DAVID MESGUICH CONDITIONS SUSPENSIVES
DAVID MESGUICH CONDITIONS SUSPENSIVES
David Mesguich en atelier Jardin Rouge, Marrakech - Maroc Janv 2018
Dans les grottes de Lascaux, il y a quelques milliers d’années, le premier artiste reconnu de l’Art contemporain traçait au silex des formes rehaussées d’ocre et de charbon de bois. Elles étonnent encore aujourd’hui par leur réalisme, leurs mouvements qui nous éclairent sur cette période de l’humanité. Elles sont, avec les outils, l’un des seuls témoignages. De nos jours, ces fresques ont inspiré de nombreux artistes modernes. Picasso, avec sa série des scènes de Corrida, pourrait faire référence à ces tracés préhistoriques. Personne n’a copié personne. L’homme a dompté la science, les techniques. Il a aussi fabriqué des instruments utilisés par différentes écoles artistiques. Les outils ont changé, évolué. Les matières, les pinceaux, les huiles, les acryliques en aérosols sont venus se mettre au service des artistes. Peux-t-on alors leur reprocher leur utilisation? Peux-t-on dire que ces nouveaux instruments, ces nouvelles techniques appartiennent en exclusivité à l’un d’eux? David MESGUICH vit avec son temps. Il est né dans l’ère du numérique avec ce qu’il nous apporte au quotidien, au quotidien de l’artiste aussi… Ses formes à facettes sont l’œuvre d’une maîtrise parfaite de l’outil informatique utilisé au point de les sublimer. David ne copie personne, il se sert des outils de son temps comme nos ancêtres de Lascaux, nombreux, ont utilisé le silex, les ocres et le charbon de bois. Je rends hommage aux deux.
Et puis il y a l’histoire, l’histoire de l’artiste. David ne dévoile jamais son vécu unique. Il nous le livre dans la sensibilité douce des expressions des personnages qu’il met en scène. Je n’ose pas dire des visages, car lorsque je regarde l’une ou l’autre de ses créations, j’oublie le féminin ou le masculin. Pour moi, toutes ces expressions sont des autoportraits, des morceaux de vie de l’artiste. Elles sont le reflet de son parcours et du respect de l’autre. Rien n’est agressif, rien n’est jamais résigné, les barres qui souvent traversent ses personnages sont aussi le témoignage d’une envie non assumée de se mettre à nu. Les clins d’œil sont multiples, les messages révèlent une invitation à se livrer, à partager. La poésie de David MESGUICH est unique, contemporaine et urbaine. Il a souvent placé ses œuvres dans l’espace public, assistant attentif à leur destruction. L’éphémère fait partie de sa vie, rien n’est jamais vraiment acquis, tout est remis en question à chaque instant. C’est également le constat du monde moderne dans lequel nous vivons. David va murir, maitriser le grand potentiel qui l’anime. Ses créations nous étonnent déjà, elles ne sont plus le reflet de sa vie, mais le miroir de la nôtre.
JLH
David Mesguich en atelier Jardin Rouge, Marrakech - Maroc Fèv 2017
David Mesguich in the workshop Jardin Rouge, Marrakech - Morocco Dec 2018
In the caves of Lascaux, a few thousand years ago, the first recognized artist of Contemporary Art traced forms with flint, enhanced by ochre and charcoal. They still amaze today with their realism, their movement that enlighten us on this period of humanity. They are, with the tools, one of the few testimonials. Nowadays, these frescoes have inspired many modern artists. Picasso, with his series of scenes of Corrida, could refer to these prehistoric drawings. Nobody copied anyone. Man has tamed science and techniques. He also made instruments used by different art movement. Tools have changed, evolved. The materials, the brushes, the oils, the spray are at the service of the artists. Can we blame them for their use? Can we say that these new instruments, these new techniques belong exclusively to one of them? David MESGUICH lives with his time. He was born in the digital age with what it brings to us on a daily basis, in the artist’s everyday life as well ... His faceted forms are the result of a perfect mastery of the computer tool used in order to sublimate. David does not copy anyone, he uses the tools of his time as our ancestors of Lascaux, who used flint, ochre and charcoal. I pay tribute to both.
There is also the story, the story of the artist. David never reveals his unique experience. He delivers it to us in the gentle sensibility of the expressions of the characters he stages. I do not dare to say faces, because when I look at one or the other of his creations, I forget the feminine or the masculine. For me, all these expressions are self-portraits, pieces of life of the artist. They are a reflection of his career and respect for others. Nothing is aggressive, nothing is ever resigned, the bars that often cross his characters are also the testimony of an unfulfilled desire to lay himself bare. The nods are multiple, the messages reveal an invitation to surrender, to share. The poetry of David MESGUICH is unique, contemporary and urban. He has often placed his works in the public space, being attentive to their destruction. The ephemeral is part of his life, nothing is ever really acquired, everything is questioned at every moment. It is also the observation of the modern world in which we live. David will mature, master the great potential that drives him. His creations already amaze us, they are no longer the reflection of his life, but the mirror of ours.
JLH
Mohamed Tajine, Khalid Mohati and Stéphane Aubert in the workshop Jardin Rouge, Marrakech - Morocco Dec 2018
Short cut Acrylique sur résine polyurethane 25,5 x 35 x 17 cm 8 exemplaires - 2017
Dead end Acrylique sur résine polyurethane 25,5 x 30 x 7 cm 8 exemplaires - 2017
Simple things Acrylique sur résine polyurethane 72 x 26 x 16 cm 8 exemplaires - 2017
Electric vapors Acrylique sur résine polyurethane 46 x 52 x 11 cm 8 exemplaires - 2017
Anti gravity Acrylique sur résine polyurethane 51 x 25 x 13 cm 8 exemplaires - 2017
Anne-Laure Acrylique sur résine polyurethane 48 x 57 x 21 cm 8 exemplaires - 2018
Mehdi Acrylique sur résine polyurethane et acier 65 x 45 x 20 cm 8 exemplaires - 2018
Happy ending Techniques mixtes sur toile 90 x 139 cm 2018
Happy ending 2 Techniques mixtes sur toile 90 x 139 cm 2018
Sorry not sorry Orebro, Suède 2017
LA TROISIÈME DIMENSION Guillaume Rivera Auteur, critique et cinéaste
Comme tout artiste flirtant avec la quarantaine, Mesguich s’est mis à douter de l’absolu. Alors, quand il vous parle de sa prochaine exposition, il fuit soigneusement les discours et les affirmations pour s’engager plutôt du côté de la technique et de l’esthétique. En prenant le temps d’y réfléchir: quelque part, cette tendance a toujours habité son travail. Car plus que la restriction, plus que la frontière, ce que David peint, dessine, modélise ou sculpte, depuis le début, relève du cri. Une urgence au mouvement, une exhortation au dépassement, un refus de l’entrave et la péremption par la sacralisation de la dynamique. Ainsi, tour à tour, le plasticien français s’est emparé d’espaces matériels ou symboliques dont les limites défient l’instinct de survie. Se confronter à l’univers Mesguich, c’est donc accepter de traiter avec des notions telles que morale, société, destinée, corps ou simplement mort. Mais la valeur sémantique de ces sujets importe aujourd’hui finalement peu.
Même si tous nos réflexes nous conduisent à encore y chercher un signifié, un sens profond, ceux-ci oeuvrent avant tout comme prétexte ou comme leitmotiv à un travail. Mesguich s’active en effet pour ne pas étouffer. Il en a toujours été ainsi. Certes, l’homme s’empare de réalités environnantes, mais l’artiste, lui, renonce progressivement à l’acte de représentation ou de formulation d’une idée centrale pour glisser vers un mode d’existence cathartique ou toutes les enveloppes, tous les contenants structurés, sont progressivement déconstruits jusqu’à libérer des potentialités, des lieux d’interprétations diverses et d’évolution constante. Bref, David veut vivre et pour cela il sculpte.
La forme, comme objet géométrique défini, où l’addition de côtés cloisonne un espace, constitue la matière première de son procédé. Mais sans sombrer dans la pédanterie des technicismes. L’influx premier est, et restera, existentiel. En attestent ses flamings. La lettre stricte y est démontée au profit d’une enveloppe vivante, le blaze abandonné pour laisser place à l’organicité contradictoire du feu. Tout un symbole! De même, ses sculptures entrechoquent rigidité et mouvement. Par la position, par la relation au contexte ou même par l’intégration d’un décorum qui suppose une action préalable, Mesguich figure la dynamique.
SantaEuropa 4 Mètres Toulouse, France - 2015
Cependant, celle-ci n’a d’intérêt que s’il lui oppose la staticité. Une rigueur qu’il obtient essentiellement par le triangle. Comme s’il ne pouvait peindre la vie sans le miroir de la mort, il célèbre le potentiel moteur de l’homme tout en enfermant celui-ci dans un corps anguleux où chaque ligne, tôt ou tard, est interrompue par une autre. Rodin cherchait grâce et vie dans l’infinité des courbes, Mesguich cultive lespolygones et ne cesse ainsi d’alourdir l’existence d’une chair qui inéluctablement croulera. Il y a donc chez lui une conscience radicale, presque pessimiste, de l’échéance. Toute sa pratique se fonde sur cette guerre. Quelles perspectives pour un organe caduque? Comment se mouvoir si tout entrave? Où trouver le courage dans un monde de peurs? Des oppositions binaires difficilement surmontables par des actes de langage verbal. D’où l’intérêt de les traiter par des logiques moins rhétoriques. D’où l’intérêt aussi de les mettre en mouvement plutôt que les théoriser.
Et c’est sans doute sous cet angle qu’il faudra dorénavant considérer l’oeuvre Mesguich. A 20 ans, comme la majorité d’entre nous, il s’efforçait de représenter, de déclarer, d’affirmer. A 40 ans, il préfère s’essayer, chercher, expérimenter… “Conditions Suspensives” et le recours au stop-motion en sont sans doute la meilleure preuve. La technique d’animation lui permet en effet depuis deux ans de jouer avec une notion aussi essentielle que le hasard. Car quoi de plus vivant et de moins prédestiné que l’imprévu? Ainsi, plutôt que de travailler à partir d’une position finale, David se concentre à présent sur la décomposition du mouvement. Il renonce ainsi à une forme de totalitarisme sur l’oeuvre - où ses propres a priori pouvaient soumettre le corps à un traitement stéréotypé - et favorise la puissance intrinsèque de la motricité enfilmant les déambulations libres de ses amis.
La technique autorise de la sorte un espace de surprise indispensable lorsque l’on tente de répondre à l’immuabilité de concepts binaires. Il est important de comprendre à quel point quelqu’un, dont l’angoisse première est l’annihilation du devenir, ne peut respirer si tout autour de lui repose sur l’opposition castratrice de forces contradictoires. Le bien, le mal. Le cadre, la marge. L’espace, la limite. La vie, la mort. Autant de concepts rigides et anxiogènes que Mesguich contourne par la praxis. Puisque les mots, toujours, le conduisent à la collision entre thèse et antithèse, David cherche la synthèse à un autre niveau. Celui du procédé créatif et artistique, celui du dessin, celui de la sculpture, celui de la troisième dimension.
Pressure 1.2 - 4 Mètres Nantes, France 2014
Pressure 2,5 Mètres Marseille, France - 2013
Lucie - 10 Metres Poznan, Poland 2016
THE THIRD DIMENSION Guillaume Rivera Author, critic and filmmaker
Like many artists in their midlife, Mesguich began to doubt the absolute. So when discussing his next exhibition, he carefully avoids speeches and assertions to engage more with technique and aesthetics. When you take the time to think about it: somehow, this tendency has always inhabited his work. Beyond restriction, past the boundary, what David has been painting, drawing, modeling or sculpting, since the beginning, is a cry. A call to action, an exhortation to exceed limits, a refusal of the obstacles and expiration by sacralizing the dynamics. Thus, in turn, the French visual artist has seized material or symbolic spaces whose limits defy the instinct of survival. To confront the Mesguich universe is therefore to accept dealing with notions such as morality, society, destiny, body or simply death. But the semantic value of these topics is ultimately of little importance today.
Even if all our reflexes lead us to still seek a signified, a deep meaning, these work above all as a pretext or leitmotiv to an achievement. Mesguich is indeed active so as not to suffocate. It has always been so. Admittedly, the man takes hold of surrounding realities, but the artist progressively renounces the act of representation or formulation of a central idea to slide towards a cathartic mode of existence where all the envelopes, all the structured containers are progressively deconstructed to the point of liberating potentialities, places of diverse interpretations and constant evolution. In short, David wants to live and for that he sculpts.
Form, as a definite geometrical object where the addition of sides partitions a space, constitutes the raw material of his process. But without sinking into the pedantry of the technique, the first impulse is, and will remain, existential. As evidenced by his flamings. The strict letter is disassembled in favor of a living envelope, the name is abandoned to leave room for the contradictory organic aspect of fire. All a symbol! In the same way, his sculptures knock together rigidity and movement. By the position, the contextual relation or even by the integration of a decorum which supposes a preliminary action, Mesguich depicts the dynamics.
Moniker artfair UNCENSORED London, England - 2018
However, this one has interest only if he opposes to it the stability. A rigor that he gets essentially through the triangle. As if he could not paint life without the mirror of death, he celebrates the motor potential of man while enclosing it in a angular body where each line, sooner or later, is interrupted by another. Rodin sought grace and life in the infinity of curves, Mesguich cultivates polygons to weigh down continually the existence of a flesh that will inevitably crumble. There is therefore in him a radical, almost pessimistic consciousness of timescale. All his practice is based on this war. What prospects for an obsolete organ? How to move if everything hinders? Where to find courage in a world of fears? These are binary oppositions difficult to overcome by acts of verbal language. Hence, the interest of treating them with less rhetorical logic. Hence, the interest of putting them in motion rather than theorizing them.
And it is undoubtedly from this angle that it will from now on be necessary to consider the work of Mesguich. At 20, like most of us, he strove to represent, to declare, to affirm. At 40, he prefers to try, search, experiment ... “Conditions Suspensives” and the use of stop-motion are probably the best proof. The animation technique allows him for the past two years to play with a concept as essential as chance. For what is more alive and less predestined than the unexpected? Thus, rather than working from a final position, David is now focusing on the decomposition of movement. He thus renounces a form of totalitarianism on the work — where he a priori could subject the body to a stereotypical treatment — and promotes the intrinsic power of motor skills by filming the free wanderings of his friends.
The technique thus allows a space of surprise indispensable when one tries to answer the immutability of binary concepts. It is important to understand how much someone, whose first anxiety is the annihilation of future, can not breathe if all around him lies on the castrating opposition of contradictory forces. The good, the evil. The frame, the margin. The space, the limit. The life, the death. So many rigid and anxiety-provoking concepts that Mesguich circumvents through praxis. Since words always lead him to the collision between thesis and antithesis, David seeks synthesis at another level. That of the creative and artistic process, that of the drawing, that of the sculpture, that of the third dimension.
Collectcall - 2,7 Metres Orebro, Sueden 2017
Short cut 2,7 Mètres Musée des beaux arts d’A rras, France - 2016
Anti gravity Résine polyester, fibres de verre, acier 213 x 120 x 62 cm 3 exemplaires - 2018
Falling selfie Sculpture acier sablé 440 x 400 x 269 cm exemplaire unique - 2018
Short cut Sculpture acier 213 x 120 x 62 cm 3 exemplaires - 2018
Conditions Suspensives Résidence Jardin Rouge Marrakech, Maroc Déc.2018
Né à Lyon en 1979, David Mesguich est diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts d’Aixen-Provence. Ayant fait du dessin son premier lieu de création, c’est par une pratique parallèle assidue du graffiti vandale que l’artiste va nourrir son travail. Fasciné par l’univers des jeux vidéos, David Mesguich utilise également le numérique afin de concevoir les prémices de ses sujets. Marqué par ses années de déambulations illégales, ses sculptures prendront ainsi vie dans l’espace public par la rencontre entre la technique d’imagerie en trois dimensions et le modelage traditionnel. Born in Lyon in 1979, David Mesguich graduated from the School of Fine Arts of Aix-en-Provence. Drawing has been his first place of creation and it is through an assiduous parallel practice of the illegal graffiti that the artist would feed his work. Fascinated by the world of video games, David Mesguich also uses digital to conceive the first lines of his subjects. Marked by his years of street painting, his sculptures will thus take life in the public space by the encounter between the three-dimensional imaging technique and traditional modeling.
2018 XXL#2, Espace d’art Montresso Marrakech, Maroc 2017 Le Mur, Nancy “Open Art biennale”, Orebro, Pologne 2016 « Festival Appel d’Air », Arras « Ghostland », Twentytwo Gallery, Lyon 2015 Pop-up Gallery, Amiens 2013 « Pressure » Backside Gallery, La friche Belle de Mai, Marseille 2012 « Closed Circuit », Datta Gallery, Carhartt, Lyon 2010 « Human merchandise », Galerie Raymond Banas / MCL, Metz « Border line » RX Gallery, Paris 2009 « Mesguich », Maison des Arts de Malakoff, Paris « Absences », RX Gallery, Paris
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