Le projet du rostu

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; de

olorivier

SociĂŠtĂŠ des Filles du Coeur de Marie

OO/t-2.

Marie du Rostu. Jeanne Ancel,


II

LE

"

PROJET

"

DU

PERE

DE

CLORIVIERE.


Abréviations et sigles.

AFCM = Archives des Filles du Coeur de Marie, à Paris. D.C. = Documents constitutifs. L.C. = Lettres circulaires. Lettres = Lettres du Père de Clorivière, 1787-l8l4, 2 vol., 1948. (La pagination étant continue, la référence des vol. a été supprimée), (t.l, p.1-472. t.2, p.473-972). Notes intimes = Pierre de Clorivière... d'après ses notes: intimes, de 1763 à 1773, publiées par le P. Monier-Vinard, s.J., 2 vol., 1935. Prière et oraison = Pierre de Clorivière, Considérations sur l'exercice de la prière et de 1'oraison...Desclée De Brouwer, 196l, coll. Christus. J. Terrien, Histoire... = Jacques Terrien, Histoire du R.P.de Clorivière

1891. Ecrits de M. de C,

I,

II,

III = Ecrits de M. de Cicé, en trois parties, reproduits d'après les AFCM.

Quand cela était possible, le texte des lettres du P. de Clorivière et de M. de Cicé a été corrigé d'après les autographes des AFCM,

ce qui explique quelques légers changements.

C'est pour attirer l'attention que certaines phrases ont été soulignées par nous dans les citations. Les copies des lettres de M. de Cicé au P. de Clorivière n'étant pas datées,

on ne peut certifier l'exactitude de l'ordre

adopté lors de la reproduction.

A


- 1 -

SOMMAIRE

LE

ii

1.

PROJET

"

DU

PERE

DE

CLORIVIERE.

Conviction intime et immuable du fondateur' : - Tradition de l'Eglise et conduite habituelle du Seigneur. - Origine surnaturelle des Sociétés. - Sociétés vraiment religieuses.

2.

Ces nouvelles Sociétés ont une fin dernière générale et une fin particulière inséparables.

3.

Une dernière question.

LA SOURCE DONT TOUT DECOULE

1.

:

LE COEUR DU CHRIST ET CELUI DE SA MERE.

Valeur normative des fins essentielles de toute vie religieuse pour la conduite habituelle des membres des Sociétés.

2.

La Pédagogie de

3.

La Source des Sources

AU MILIEU DU MONDE,

"l'essentiel religieux".

: Le Coeur du Christ et le Coeur de sa Mère.

POURQUOI ?

COMMENT ?

1.

Au milieu du monde :

Pourquoi ?

2.

Au milieu du monde :

Comment ?

APPENDICE HISTORIQUE.


- 3 -

AVANT - PROPOS

A certains égards, avance sur son temps,

le "Projet" du Père de Clorivière est en

par suite,

sans doute,

exceptionnelles de la Révolution française vie religieuse "à l'insu des peuples" la personnalité même du fondateur. intimes, traits

;

:

des circonstances il fallait garder la

mais en raison,

aussi,

de

Dans l'Introduction aux Notes

le Père Monier-Vinard en résume excellemment les principaux

:

"Le P. de Clorivière est un théologien et un mystique. A la prudence du premier, il joint la hardiesse du second. Ce que la théologie lui montre..., le Saint-Esprit le lui révèle au fond du cogur d'une manière inexprimable, supérieure à toute science ; ainsi il possède, avec des intuitions dépassant singulièrement les données communes théologiques, cette connaissance savoureuse de Dieu qui est le fruit du don de sagesse ; et, comme chez lui tout se résout en pratique, cette divine théologie il ne la possède pas seulement, il la vit." (1)

Par nature et par grâce,

le Père de Clorivière est toujours

resté étranger aux dichotomies si justement dénoncées aujourd'hui chez lui,

;

"l'esprit" informe profondément et comme spontanément

les réalités terrestres,

ces dernières étant

toujours respectées

dans leur ordre propre. En se laissant guider par les textes,

on s'est efforcé dans

ce fascicule de traduire aussi fidèlement que possible la profondeur et l'ampleur du "Projet", voulu.

tel que le Père de Clorivière l'a conçu et


-

5 -

II

LE

"PROJET"

DU

PERE

DE

CLORIVIERE

La destruction des ordres religieux en France dont le Père de Clorivière mesure toutes les conséquences, lui a causé une profonde douleur. L'inspiration du 19 juillet lui a découvert "comme dans un clin d'oeil" qu'il était possible de garder "le don divin" de la vie religieuse a l'Eglise et au monde. Dès lors,

avec une foi inconfusible et un don de créativité

peu commun, le fondateur va développer toutes les possibilités de ce nouveau mode de vie religieuse,

et ceci,

au sein même des destructions

et des ruines de la Révolution française. Mais,

comment va-t-il présenter ces Sociétés, si différentes de

celles existant précédemment, décider de "leur existence" ?

aux chefs de l'Eglise qui, seuls,

peuvent

A cette époque, les évêques, eux aussi,

sont en suspicion, sous le coup de la persécution religieuse, beaucoup sont en exil. C'est dans ce contexte qu'il faut aborder l'étude des nombreux documents où le Père de Clorivière expose aux premiers associés, aux évêques, au Souverain Pontife, ce que sont ces Sociétés.

Plans

et

Mémoires sont écrits le plus souvent soit dans des cachettes, soit en prison,

et il est remarquable de constater la continuité de sa pensée

au milieu de ces vicissitudes. En comparant ces différents■textes, deux données principales, leur futur développement 1.

fondement

on peut semble-t-il dégager

d&g• Sociétés,

et qui assureront

:

une conviction intime,

immuable du Père de Clorivière : ce

nouveau mode de vie religieuse lui a été inspiré d'en haut ; 2. une précision nécessaire à la mission spéciale de ces nouvelles Sociétés

: elles ont une fin générale et une fin particulière

inséparables.

o

o

o


CONVICTION INTIME ET IMMUABLE DU FONDATEUR : TRADITION DE L'EGLISE ET CONDUITE HABITUELLE DU SEIGNEUR.

Quand le Père de Clorivière présente les nouvelles Sociétés il commence presque toujours par invoquer la tradition de l'Eglise, ou mieux, la conduite habituelle du Seigneur et de son Esprit. Dès la première rédaction du Plan de la Société des hommes écrite aussitôt après l'inspiration du 19 juillet 1790, le préambule se présente ainsi : "A chaque époque, suivant les besoins divers de son Eglise, Notre Seigneur Jésus-Christ a accordé comme un secours opportun aux fidèles, tel ou tel Ordre religieux, soit pour développer la piété, soit pour défendre la foi ; mais maintenant l'impiété est arrivée à un tel degré que la plupart rejettent comme nuisible ce secours pourtant si utile et si nécessaire", (l) En 1792,

paraît le texte imprimé du "Plan Abrégé de la Société

du Coeur de Jésus", fruit des réflexions faites en commun par les nouveaux associés, après leur consécration du 2 février 1791» Le premier paragraphe est très proche de celui du Plan de 1790 : "Le Seigneur, toujours 'attentif aux besoins de son Eglise, a fait naître en différents temps dans son sein, divers Ordres religieux, dont le but, conforme aux nécessités des fidèles, était ou de réveiller et de nourrir leur piété ou de défendre la foi". (2) Dans le mémoire "A Nos Seigneurs les Evêques de France" (1798), six ans plus tard,

après avoir insisté sur l'origine surnaturelle des

Sociétés et "la nécessité la plus grande où elle (l'Eglise) ait jamais été", le Père revient sur la même constatation : "La conduite la plus douce et la plus ordinaire de la Providence a été de susciter dans ces sortes de nécessités de nouveaux Ordres religieux adaptés aux temps où ils ont pris naissance et au génie et aux moeurs des hommes qui vivaient alors ; et il nous semble que la nature des deux Sociétés est la seule qui puisse convenir aux • circonstances où nous nous trouvons". (3)

(1) D.C., p.41. (2) D.C., p.71. (3) D.C., p.155-156.


- 7 -

La lettre du 2 septembre 1800 adressée "au Souverain Pontife... Pie VII" pour accompagner le Mémoire sollicitant son approbation, débute encore par ces lignes : "Lorsque Jésus-Christ Notre-Seigneur permet que son Eglise soit en butte à de grandes et de nouvelles secousses, il a coutume de venir à son secours d'une manière nouvelle et extraordinaire ; ce qui se fait le plus souvent par l'érection de nouveaux Ordres religieux qui paraissent plus propres pour subvenir à ses besoins".(l) Dans l'Exposé de 1808, le recours à la tradition pour légitimer l'entreprise est exprimé d'une façon suggestive : "La formation des Ordres religieux a suffi plus d'une fois pour anaiser l'indignation du Seigneur et pour détourner de dessus nos têtes, les fléaux que nous avions mérités par nos désordres. C'est ainsi qu'en différents temps, les enfants de saint Benoît', de saint Bruno, de saint Dominique, de saint François, et plus récemment encore ceux de saint Ignace, ont beaucoup contribué par leurs exemples, leurs prières et leurs travaux, à renouveler la face de l'Eglise et à attirer sur la terre l'abondance des bénédictions célestes". (2) Certes, l'humble religieux ne songe pas à se comparer à ces grands fondateurs, mais de fait, il s'insère à leur suite en fondant un ordre religieux d'une forme toute nouvelle.

L' ORIGINE SURNATURELLE DES SOCIETES.

Se situer dans la tradition de l'Eglise est déjà une sécurité, mais la conviction du Père de Clorivière se fonde aussi sur l'origine surnaturelle des Sociétés. Lui qui est un maître en discernement spirituel, son ouvrage : "Considérations sur l'exercice de la prière et de l'oraison" en fait foi, il n'hésite pas à affirmer le caractère surnaturel de l'inspiration, soit dans les différents mémoires officiels, soit dans les écrits destinés aux membres de ses deux familles religieuses. Dans le bref historique inséré dans le Commentaire de l'Apocalypse (179^) concernant l'inspiration et les débuts des deux

(1) D.C., p.243. (2) D.C., p.kk2.


-

Sociétés, on trouve déjà :

8 -

(l)

Les craintes d'une nouvelle révolution..."ne nous paraîtraient pas suffisantes pour proposer un nouveau genre de Société, religieuse, si nous n'avions pas quelque raison de croire que Dieu même en a inspiré la pensée", et le Père de Clorivière conclut le récit de l'inspiration par ces lignes : i.

"L'impression que fit sur lui cette lumière ne lui permit pas de douter dans l'instant même qu'il n'y eût en cela quelque chose de surnaturel, et que cela ne vînt de Dieu. Il s'étonna seulement de ce que Dieu semblait jeter les yeux sur un instrument si vil pour • une entreprise si grande ; mais plein de confiance en sa Puissance et en son infinie Bonté, il s'offrit à Dieu pour qu'il fît de lui et par lui tout ce qui serait conforme à son bon plaisir". Dans ce même ouvrage, il transcrit la Supplique destinée à être jointe aux deux plans des Sociétés qu'il voulait faire présenter au Saint Père.

(2)

Elle se termine ainsi :

"j'oserai vous découvrir le fond de mon âme, et vous développer des pensées qui se sont d'elles-mêmes présentées à mon esprit, lorsque j'y pensais le moins, et qu'on pourrait croire venir d'En-Haut", et commentant toujours l'inspiration : "Lorsqu'il eut dressé ces deux Plans, pour obéir à ce qu'il lui paraissait, aux mouvements de l'Esprit de Dieu, il crut devoir les soumettre au jugement de son Evêque".

CJl

Enfin, relatant la consécration des premiers associés de la Société du Coeur de Jésus,

à Montmartre, le

2 février 1791, il

rapporte le "petit dise ours... que ce jour-là même il avait écrit" et qu'il put lire à ses compagnons "un peu à l'écart",

après la

messe.

(1) D.C., p.15-18. (2) D.C., p.19-20. (3) D.C., p.22. C'est le Père de Clorivière qui souligne.


-•9 -

En cette circonstance solennelle, puisque c'est le premier acte officiel d'association de la Société du Coeur de Jésus, le Père de Clorivière n'hésite pas à affirmer le caractère surnaturel de 1'inspiration : "N'en doutons point, c'est le Seigneur qui a fait ces choses, c'est le Père des lumières, de qui vient d'en haut tout bien excellent, et tout don parfait ; ce conseil ne pouvant être inspiré que par ce divin Esprit qui souffle où il veut et dont on entend la voix, mais sans qu'on sache d'où il vient ni où il va", (l) Dans le "Plan Abrégé de la Société du Coeur de Jésus" (1792), on trouve aussi ces lignes : "la pensée de l'établir (cette Société) n'a point d'autre source que le sein même du Père des lumières", (2) et un peu plus loin : "De là, je crois pouvoir dire, avec quelque assurance, que c'est Dieu qui nous a inspiré la première idée de cette oeuvre, lorsque nous étions bien éloignés de penser à rien de semblable".(3) En 1798, dans le Mémoire aux Evêques de France, le Père indique encore à plusieurs reprises l'origine surnaturelle de ces Sociétés. Dès les premiers paragraphes il écrit : "D'un côté, une pareille entreprise m'a toujours paru trop au-dessus des forces humaines., aidées même d'une grâce ordinaire ; de l'autre, je connaissais trop mon peu de capacité pour en concevoir la première idée, et moins encore pour tenter de la mettre en exécution, si je n'avais eu comme'une douce conviction que cette pensée venait de Dieu et que je ne pouvais négliger de la suivre sans aller contre la volonté de Dieu", (k) Après avoir précisé en détail dans le même document le caractère religieux des sociétés et la pratique des voeux, le Père pose cette question quelques pages plus loin : deux sociétés est-elle possible ?

L'existence des

Avant d'entreprendre la réfutation

(1) D.C., p.30-31. (2) D.C., p.100. C'est le Père de Clorivière qui souligne. (3) D.C., p.103. C'est le Père de Clorivière qui souligne. (4) D.C., p.125-126. C'est le Père de Clorivière qui souligne,


-10-

des objections qui pourraient s'élever contre elle, il commence par exposer les données surnaturelles, pour lui, les plus sûres : "On ne doute point qu'elle ne soit absolument possible. Cette existence ne renferme aucune contradiction et tout est possible à Dieu. On convient!, qu'elle ne l'est pas naturellement, ni même dans le cours ordinaire des choses de la grâce. Pour leur donner l'existence, il ne suffit pas d'une grâce commune, il faut une intervention, une assistance particulière du Seigneur. C'est une chose commune à tous les Ordres religieux qui ont jamais existé dans l'Eglise, et en cela ils ont quelque ressemblance avec l'Eglise elle-même. Ce qu'on demande donc ici c'est qu'il est croyable que Dieu veuille intervenir par une assistance spéciale de sa grâce pour donner l'existence à ces Sociétés. Il faudrait être entré dans les conseils du Très Haut et qu'il eût daigné nous révéler ses secrets, pour oser l'affirmer avec quelque sorte d'assurance. Dieu ne nous a pas fait une pareille faveur, mais nous avons là-dessus la plus douce confiance, et cette confiance est fondée sur la Bonté de Dieu, sur les besoins de l'Eglise, sur la nature même de ces Sociétés", (l) Dans cette longue citation le Père de Clorivière exprime avec assurance et humilité sa conviction immuable.. Enfin, dans l'Exposé de l808, il écrit encore : "Plus cette fin est'sublime, plus il s'y rencontre de difficultés, plus nous pouvons nous rendre témoignage que nous n'avons pas entrepris de nous-mêmes une chose si fort au-dessus de nos forces". (2) Cette conviction de l'origine surnaturelle des sociétés a été pour le fondateur source de paix, d'audace même, dans des conditions humainement déconcertantes. Il suffit d'évoquer dans quelles circonstances il écrit plans et mémoires : suspect de 1790 à 1792, réfugié dans la cachette de la rue Cassette de 1792 à 1798, prisonnier au Temple de 1804- à 1808 avant d'être interné à la maison de santé près de la Barrière du Trône, d'où il ne sortira libéré*qu'en avril 1809. (3)

(1) D.C., p.155. (2) D.C., p.kk8. (3) Voir l'appendice historique.


- 11 -

L'épreuve du temps et la succession des événements qui, si souvent, estompent, sinon effacent les impressions même les plus vives, ne font,

au contraire,que fortifier le Père de Clorivière dans

la conviction qu'il réalise l'oeuvre voulue par le Seigneur. Lui-même précise dans le Spécimen de la Société du Coeur de Jésus (1799)

:

"Comme elle (cette Société) est donc l'oeuvre de Dieu, auquel tout est possible, il n'est rien dans les difficultés qu'elle présente qui doive nous effrayer. ...C'est Dieu...qui m'a donné la force de l'entreprendre, et qui m'a dirigé depuis les commencements jusqu'à ce moment, par la main de sa Providence. D'où l'on peut espérer que lui-même, par sa bonté infinie, perfectionnera cette bonne oeuvre qu'il a lui-même commencée".(1) Evoquant dans le Mémoire au Souverain Pontife Pie VII (l800), les objections qu'on peut faire à l'établissement des deux Sociétés, il répond ainsi : "S'il était question d'une affaire dont le succès dépendît des conseils et des efforts de la prudence humaine, -on pourrait regarder la chose, non seulement comme difficile, mais comme tout à fait impossible, tant il s'y rencontre de toutes parts d'obstacles et de difficultés ; mais il n'en est pas ainsi". Et un peu plus bas il conclut

:

"Si donc c'est l'ouvrage de Celui à qui tout est possible, nulle difficulté ne doit plus nous effrayer ; et si nous mettons en Dieu notre confiance, celles qu'on nous objecte ne nous paraîtront pas si grandes que nous ne puissions les surmonter avec le secours de la grâce. Or, c'est ce que nous pouvons raisonnablement espérer par rapport à l'oeuvre dont il s'agit". (2) Dans l'Exposé de 1808, le Père étant encore interné dans la maison de santé, écrit : "Nous n'avons donc à craindre ni la difficulté de l'entreprise, ni la force, ni le nombre de nos ennemis, ni notre propre faiblesse. Le défaut de confiance est l'unique chose qui puisse nous nuire. Pierre marche avec fermeté sur les eaux, tandis qu'il se fie à la parole du Seignéur, il ne commence à enfoncer que lorsque sa confiance est ébranlée". (3)

(1) D.C., p.234. (2) D.C., p.280-281. (3) D.C., p.448.

VQ


- 12 -

Ces extraits montrent où, au milieu des pires difficultés, le Père de Clorivière puisait sa paix, sa force et son assurance. Cette même conviction sera aussi source de paix, de force et d'assurance pour la Société. En poursuivant envers et contre tout la mission confiée, elle saura que, en étant fidèle au fondateur, elle l'est plus encore à "l'oeuvre de Dieu", (l)

SOCIETE "VRAIMENT RELIGIEUSE". Située dans la tradition de l'Eglise et inspirée d'en haut, ces nouvelles Sociétés ont aussi tout "ce qu'il faut pour devenir des Sociétés religieuses". (2) Cette dernière assurance, objet même de l'inspiration, achève de fonder la conviction du fondateur. Les précisions données dans les différents Plans, celles qu'il multiplie dans les Mémoires officiels ne laissent aucun doute à ce sujjet. Dans le Plan Abrégé de la Société du Coeur de Jésus (1792), la partie traitant de l'observance des voeux débute ainsi :

(3)

"Des raisons très graves et en grand nombre nous persuadent qu'il est beaucoup plus convenable que ceux qui se consacrent à Dieu dans cette Société se lient par les trois Voeux substantiels de Religion". Huit raisons sont énumérées. Citons seulement les deux premières : "1. Il n'y a point de liens plus sacrés qui puissent resserrer davantage entre eux les membres■de cette Société, et les unir tous ensemble plus•étroitement avec Jésus-Christ. 2. C'est l'unique moyen de faire de cette Société un Corps religieux - ce qui paraît important - afin de réparer, en quelque manière, les pertes que l'Eglise catholique a faites presque en même temps, par la suppression de tant d'Ordres religieux".

(1) D.C., p.234. (2) D.C., p.133. (3) D.C., p.79.


- 13 -

Dans le Mémoire aux Evêques de- France Clorivière précise

(1798)

le Père de

:

"Nous désirons... cet établissement en Ordres religieux, parce qu'il nous semble que cela contribuera beaucoup à la gloire de Dieu et au bien de l'Eglise", (l) et après avoir longuement

explicité la manière dont

les Sociétés les voeux d'obéissance et avec

force

de pauvreté

on gardera dans

(2), il conclut

:

"Nous croyons avoir prouvé que ces voeux ont tout ce qui est essentiel aux voeux de Religion ; que, quant à 1'esprit qui doit en animer la pratique, ils n'ont rien.de moins sublime que dans ces Ordres qui ont édifié le plus l'Eglise par leur obéissance et leur pauvreté ; que quant à la pratique extérieure, elle peut être portée à ce que ces voeux ont de plus héroïque ; qu'ainsi ces Sociétés telles qu'elles ont été représentées, ont tout ce qu'il faut pour devenir des Sociétés vraiment religieuses si l'Eglise daigne imprimer sur elles le sceau de son approbation". (3)

On ne peut perdre de vue,

à travers ces différents

que l'objet même de l'inspiration du possible la fondation d'un nouvel

textes,

19 juillet était de rendre

ordre religieux,

pour réparer les

pertes faites par l'Eglise à la suite de la suppression des ordres existant,

et pour défendre la

foi des fidèles.

que consistera la mission reçue d'en-haut Il insistera

toujours sur ce point

Après un court préambule, Pie VII

C'est

en cela même

par le Père de Clorivière.

essentiel.

le Mémoire au Souverain Pontife

(1800) (4), débute ainsi :

"Ce que ces deux Sociétés souhaitent avant toutes choses, c'est qu'il soit permis d'y émettre les trois Voeux substantiels de religion.

Dans la lettre à Mgr Cortois de Pressigny

(l8Cl) (5), écrite

après la première approbation verbale donnée par Sa Sainteté Pie VII

(1) D.C., p.134. (2) D.C., p.136-154. (3) D.C., p.154. (4) D.C., p.255. (5) D.C., p.327.


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Mémoire aux Evêques de France, 1798.

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14

6e Lettre Circulaire, 11 mai 1803.


- 1k -

aux deux envoyés du Père de Clorivière à Rome, le fondateur donne les précisions suivantes

:

"La forme de vie tracée dans le Mémoire (1) est toute religieuse, et tout le Mémoire tend à.montrer qu'elle est religieuse; c'est donc comme telle qu'elle est approuvée. Ce en quoi elle diffère de celle des autres Ordres religieux, quant à la pratique des Voeux, la manière de vivre, et le régime, est donc en général approuvé". En conclusion de ce Mémoire au Souverain Pontife Pie VII, le Père de Clorivière avait ainsi formulé le voeu qui résumait sa conviction profonde : "Que' Notre Saint-Père le Pape... daigne déclarer qu'il les admet (ces Sociétés) dans l'Eglise comme des Sociétés religieuses suscitées, à ce qu'on espère, par l'Esprit-Saint, pour subvenir aux nécessités présentes de l'Eglise et aux maux dont elle est prochainement menacée''. (2 )

o o

o

CES NOUVELLES SOCIETES ONT UNE FIN DERNIERE GENERALE ET UNE FIN PARTICULIERE INSEPARABLES.

Cette précision qui se dégage de l'ensemble des écrits du fondateur est nécessaire pour comprendre la mission spéciale de la Société, son unité organique, Dès

et l'équilibre de son développement.

1792, le Père de Clorivière précise dans le Plan Abrégé

de la Société du Coeur de Jésus : "La fin dernière et générale de cette Société est de procurer de tout notre pouvoir, avec le secours de la grâce divine, la gloire de Dieu, notre salut et celui du Prochain ; mais sa fin particulière, celle qui la distingue de toutes les autres Sociétés religieuses, est de faire tellement refleurir le désir de la Perfection, même hors du Cloître, parmi ceux qui vivent dans le monde, et'surtout parmi les Ecclésiastiques, qu'on puisse apercevoir en eux quelque Image de l'Eglise naissante". (3)

(1) D.C., p.255(2) D.C., p.28?. (3) D.C., p.72.


- 15 -

Dans la quatrième partie de ce Plan, la liaison entre les deux fins est clairement marquée : "La fin générale qu'elle se propose (cette Société) est de procurer la gloire de Dieu, le salut de ses membres et de tous les Fidèles, par les moyens les meilleurs et les plus convenables. Sa fin particulière est de porter des hommes de tous les états, et surtout ceux de l'état ecclésiastique qui vivent au milieu du monde, à mener une vie si parfaite et à suivre de si près notre divin Maître, par la voie des Conseils évangéliques, qu'on puisse retrouver en eux quelque Image de l'Eglise naissante", (l) En 1798, dans le Mémoire aux Evêques de France, exposé important s'il en fût puisqu'il a pour objet de solliciter leur approbation et leur appui, le Père de Clorivière précise : "La première de ces Sociétés serait composée d'hommes de toutes sortes d'états compatibles avec la perfection religieuse... qui feraient profession de tendre à la perfection par l'observation des trois Voeux de Pauvreté, de Chasteté et d'Obéissance... Chacun d'eux pourra rester dans sa profession, si cette profession n'a rien d'incompatible avec la perfection évangélique... Tous, en cela, se proposeront de faire refleurir en eux-mêmes, et autant qu'ils le pourront, dans les autres, au milieu de la corruption des derniers âges, quelque Image de l'Eglise naissante". (2) C'est le rayonnement de la perfection évangélique qui doit refléter "quelque image de l'Eglise naissante". Le paragraphe suivant concerne "la seconde Société...coraposée de filles et de veuves de , toutes sortes d'états compatibles avec la perfection religieuse". Elle est "essentiellement distincte de la première Société" (celle des hommes) mais elle est "liée par les mêmes voeux substantiels de religion et vivrait à peu près de la même manière, hors du cloître..." Le Spe'cimen de la Société du Coeur de Jésus (1799) reprend, en termes analogues la définition des deux fins, soit au début de l'exposé (voir D.C. p.204), soit vers la fin (D.C., p.228). Le Mémoire au Souverain Pontife Pie VII (l800), évoque le vaste champ offert à cette nouvelle forme de vie religieuse :

(1) D.C, p.97. (2) D.C, p.128.


- 16 -

"Une de ces Sociétés serait pour les hommes, l'autre pour les Filles et pour les Veuves. Par là, il serait en quelque sorte frayé un chemin à toutes sortes de personnes pour marcher dans la voie des Conseils du Saint Evangile", (l) Un peu plus tard,

en janvier 1802, dans la lettre au Cardinal

Caprara, le Père de Clorivière donne cette esquisse globale des deux Sociétés

:

"Il faut...que leur forme de vie (de ces Sociétés) soit telle qu'elle puisse faciliter à toutes sortes de personnes, la pratique des Conseils évangéliques, qu'elle réveille dans tous les fidèles, et dans toutes les classes de la société civile, l'esprit véritable du Christianisme, que, comme une digue puissante, elle s'oppose plus directement aux progrès de l'impiété... qu'elle puisse préserver du naufrage un plus grand nombre d'âmes et sauver plusieurs de celles que la séduction aurait entraînées qu'elle soit propre à sanctifier toutes les conditions ; à propager, à perpétuer le règne de la perfection évangélique, à servir au peuple fidèle comme de bouclier contre les traits de la Justice divine ; en un mot, à faire refleurir, pour tous les chrétiens, même dans le siècle, les beaux jours de l'Eglise naissante". (2) D'après cet exposé dont toutes les phrases seraient à peser, ces Sociétés doivent faciliter à toutes sortes de personnes la pratique des conseils évangéliques. pour pouvoir réaliser sa fin générale (largement indiquée ici) pour "perpétuer le règne de la perfection évangélique",

et sanctifier toutes les conditions.

Dé fait, le Projet du fondateur dans toute son ampleur ne peut se réaliser sans la nécessaire relation entre fin générale et fin particulière. Ce seront bien "toutes sortes de personnes", hommes ou femmes, clercs ou laïcs,

engagés ou non dans une profession,

leur âge, leur condition, qui,

quel que soit

au sein de la vie religieuse devront

s'employer par tous les moyens en leur pouvoir, au service de Dieu, de l'Eglise, de leurs frères.

(1) D.C, p.256. (2) D.C, p.364.


- 17 -

Les clercs embrasseront tous les ministères possibles dans leur état : "Il doit y en avoir (des clercs associés) pour élever la jeunesse dès son enfance ; pour expliquer l'Ecriture Sainte ; pour enseigner les hautes sciences ; pour prêcher la parole de Dieu, entendre les Confessions, donner les exercices spirituels, évangéliser dans les campagnes, apprendre les éléments de la Foi aux ignorants, servir les malades dans les hôpitaux, visiter les prisonniers et remplir les autres emplois de ce genre, s'il en est encore d'autres que le besoin des peuples semble demander", (l) donc, rien de limitatif, au contraire, ouverture à de larges perspectives. Même ouverture dans le Spécimen de la Société du Coeur de Jésus (1799) : Ils..."exerceront les autres ministères s'il en est d'autres que paraisse demander Inutilité publique". (2) Quant aux Filles du Coeur de Marie, leur disponibilité devra être totale : "Il faut que cette Société, partout où elle sera établie, supplée, autant qu'il sera possible, à tous les autres Ordres religieux institués pour les Personnes du Sexe, que l'esprit irréligieux de notre siècle se propose de supprimer. Il faut qu'elle en retrace les vertus différentes ; et qu'elle embrasse elle seule toute les diverses sortes d'oeuvres de miséricorde et de piété, qu'ils embrassaient tous ensemble. C'est ce que rappelle la première devise. (Faites tout ce que mon Fils vous dira). Il faut aussi qu'elle dédommage, en quelque sorte, la Reine des Vierges des hommages qui lui sont ravis par la suppression de tant d'Ordres, qui se faisaient gloire de l'avoir pour Patronne et pour Mère. C'est ce qu'exprime la seconde devise. (Voilà votre Mère). L'union de ces deux choses offre la fin de la Société de Marie, et l'esprit qui doit en animer tous les membres". (5) Pour ceux (ou celles) engagés dans une profession et pouvant la conserver, c'est par leur sanctification au sein de cette profession et le rayonnement apostolique qui en résultera qu'ils contribueront à l'oeuvre commune.

(1) D.C, p.77. (2) D.C, p.209. (3) D.C, p.55.


- .18 -

Dans le Plan abrégé de la Société du Coeur de Jésus (1792), puis dans le Mémoire au Souverain Pontife Pie VII (l800), le Père de Clorivière écrit déjà : "Si par un effet de la Bonté divine, des Citoyens de tous les Ordres sont admis dans cette Société ; il en résultera pour la chose publique cet avantage précieux, qu'elle pourra se glorifier d'avoir partout d'excellents Citoyens, des Hommes vraiment attachés à la Patrie, des Magistrats intègres, des Médecins habiles, des Marchands pleins de probité, des Artisans sobres, des gens enfin de toute condition qui, se conduisant en tout suivant les lois de la plus exacte équité, pourront peut-être, par leur exemple, porter un grand nombre d'autres à faire la même chose", (l) De fait,

du vivant même du Père de Clorivière peu de laïcs

hommes entrèrent dans la Société du Coeur de Jésus. Ce qui doit être souligné ici,

c'est que cette grande diversi-

té d'apostolats, d'activités, de moyens d'évangélisation, Sociétés,

propre aux

est confiée à des religieux ou à des religieuses relevant

d'un même esprit et d'une même formation reçue dans leur Société respective. Là se manifeste le génie créateur du fondateur. Saisissant avec une étonnante profondeur et lucidité ce qui constitue l'essence même de la vie religieuse,

il est à l'aise pour en dicter les exigences

au sein des situations les plus diverses. Nous le savons par expérience quelles que soient leurs conditions de vie, leurs activités,

il n'y a

qu'un type de Filles du Coeur de Marie. Les huit lettres circulaires développent cette unité de vues, de spiritualité,

de moyens de sanctification.

Il est demandé à tous

les membres des Sociétés la même haute idée de la vocation religieuse, la même fidélité à l'esprit et à la pratique des voeux, la même recherche de la perfection de la charité, la même profondeur de vie intérieure en union avec le Coeur du Christ et de sa Mère, la même édification à donner au prochain. A partir de ce fond commun, le Père de Clorivière toujours réaliste,indique les secours ou les obstacles que les différents états de vie peuvent apporter à la sanctification des membres. C'est là un point important sur lequel nous aurons l'occasion de revenir.

(1) D.C, p.98 et D.C, p. 2?4.


- 19 -

Mais signalons déjà pour garder son aspect concret au "Projet" du fondateur,

cette règle donnée aux Filles du Coeur de Marie dès la

"première idée d'une Société religieuse de Filles et de Veuves" (1790)

:

N° 17. "Chacune s'efforcera d'acquérir la perfection des vertus propres de sa profession, et les plus opposées aux vices qui y sont les plus ordinaires", (l) Ce même libellé relatif aux soeurs se retrouve dans la Constitution de l8l8, aussi l'état profession

(ou condition)

engagés dans une profession, mais la Règle envisage

des autres Filles du Coeur de Marie sans

:

"Celles qui seront dans un état qui les mettrait dans l'opulence et l'élévation éviteront avec grand soin l'orgueil et l'oisiveté, elles s'appliqueront spécialement à l'humilité et à la charité, dans les rapports que leur état nécessite avec le prochain ; celles qui sont dans la dépendance auront soin de se défendre de l'impatience et de l'humeur". Suit cette conclusion qui englobe professionnelles dans

une même exigence

ou non

:

"Toutes s'affectionneront à l'obéissance et à l'amour de l'abjection". (2)

o

(1)

D.C.,

p.60.

(2)

D.C,

p.510.

o

o


- 20 -

UNE

DERNIERE

QUESTION.

Ces Sociétés, conçues l'une et l'autre, et avec quelle hardiesse, pour des temps troublés, sont-elles encore utiles en des temps plus calmes où les différents ordres religieux détruits peuvent se reconstituer ? Le Père de Clorivière donne lui-même la réponse : Dans le Plan abrégé de la Société du Coeur de Jésus (1792), après avoir exposé les raisons qui montrent "les avantages" de cette Société, se remémorant sans doute l'incrédulité montante du l8e siècle malgré toute la liberté laissée alors à la religion, il écrit peutêtre non sans mélancolie : "On pourrait... dire, sans trop s'avancer, que cette Société, même dans des temps plus paisibles, et lorsque la Religion était la plus florissante, eût pu rendre quelque service à l'Eglise, d'autant qu'elle ne blesse en rien les autres Ordres religieux". Après ce regard sur le passé, envisageant l'avenir, il écrit dans le Spécimen de la Société du Coeur de Jésus (1799), après avoir longuement exposé les avantages que l'Eglise peut retirer de cette Société : "Lorsque tous ces avantages coulent comme d'une source de la fin excellente de cette Société, nous ne paraîtrons à personne trop affirmer, si nous disons aussi que même dans les temps très paisibles, et quand fleurirait la religion chrétienne, elle pourrait rendre dfutiles services à l'Eglise". (2) Depuis bientôt deux cents ans d'une existence affrontée aux multiples péripéties de l'histoire, en France, en Europe, puis dans les divers continents, la Société des Filles du Coeur de Marie s'efforce de répondre au voeu du fondateur écrivant aux premiers associés :

(3)

(1) D.C, p.99. C'est le Père de Clorivière qui souligne. (2) D.C, p.230-231. C'est le Père de Clorivière qui souligne. (3) L.C , p.179.


- 21 -

"Demandez souvent au Seigneur, avec toute la ferveur dont vous êtes capables...qu1 il répande abondamment ses bénédictions sur les deux Sociétés naissantes...qu1 elles deviennent véritablement utiles à l'Eglise; qu'elles méritent de recevoir du Père commun des fidèles une approbation pleine et entière qui les érige en Sociétés religieuses ; qu'à la faveur de cette approbation, elles s'étendent au loin parmi tous les peuples de l'univers ; qu'elles y po:rtent partout des fruits de salut pour la gloire de Dieu, l'exaltation du Coeur adorable de Jésus, et le bien universel de l'Eglise enfin, qu'à mesure qu'elles croîtront en nombre, elles croissent également en ferveur et en perfection".


- 2* "

LA

SOURCE

DONT

TOUT

DECOULE LE

Après cette

: COEUR DU CHRIST

ET DE SA MERE.

apide esquisse sur le "PROJET" du Père de

r

Clorivière il reste à chercher quel était pour lui le "modèle" de Société religieuse pouvant le réaliser. Trois orientations majeures se dégagent d'une étude àttentive de ses différents écrits, 'lignes maîtresses qui convergent autour d'un foyer central, d'une Source unique dont tout découle

:

le

Coeur du Christ et de sa Mère, 1. La première est la valeur normative pour la conduite habituelle des membres des Sociétés des fins essentielles de toute vie religieuse gloire de Dieu, sanctification personnelle, salut du monde. Ce sont là les intérêts mêmes du Coeur du Verbe Incarné.

2. La seconde est la pédagogie propre du Père de Clorivière. Nous l'appelons celle de "l'essentiel religieux". Elle consiste à référer avec aisance,

toute situation humaine au primat de la vie religieuse,

notamment aux exigences des trois conseils évangéliques dont le modèle suprême est le Coeur même du Sauveur.

3. La troisième est la profondeur d'intériorité nécessaire à la vie religieuse dans le monde. Elle puise son modèle à la Source des sources les Coeurs de Jésus et de Marie.

Ces trois orientations fortement marquées par le fondateur, unifiées par ce qu'on peut appeler au sens fort, la "mystique de la Société", spécifient sa vie religieuse, garantissent son authenticité, lui assurent vigueur, liberté et dynamisme. Dans le cadre de cet essai,

on peut seulement les évoquer à

partir de textes de différentes époques.•Elles mériteraient de plus amples développements.


VALEUR NORMATIVE DES FINS ESSENTIELLES DE TOUTE VIE RELIGIEUSE POUR LA CONDUITE HABITUELLE DES MEMBRES DES DEUX SOCIETES,

(l)

Sous cette optique, une étude systématique des textes du Père de Clorivière est révélatrice. On a pu relever dans les seuls Documents Constitutifs et Lettres circulaires, 159' citations évoquant ces finalités : gloire de Dieu, service de l'Eglise, sanctification personnelle, salut du monde. Dans la foi et l'amour, ces relations entre Dieu et l'homme sont primordiales pour le fondateur. Dès lors elles apparaissent comme des normes de vie habituant l'esprit et le coeur à se mouvoir,

aisément en toute

occasion, dans les grandes perspectives du mystère divin. Tout d'abord une notion très chère au Père de Clorivière, qui précise notre vocation ecclésiale. "Le plus grand bien de l'Eglise est inséparable de la plus grande gloire de Dieu".(2l Ces deux fins, gloire de Dieu, bien de son Eglise, seront le plus souvent réunies dans les buts assignés aux deux Sociétés ouvrent de larges perspectives et déterminent un esprit

;

elles

:

"Ces Sociétés n'existeront pas pour elles-mêmes ; elles n'ont reçu l'existence, elles ne veulent la conserver que pour le bien de l'Eglise, en vue de Dieu et de Jésus-Christ son Fils", (3)

(l) Remarque importante. Dans sa pensée, le Père de Clorivière ne dissociant pas les deux Sociétés, leur esprit et leur mission, on a donc dû se référer le plus souvent à des textes traitant conjointement de la Société des Filles du Coeur de Marie et de la Société du-Coeur de Jésus. C'est évidemment à la seule Société des Filles du Coeur de Marie que ces textes sont appliqués dans ce travail.même quand le pluriel est employé. D.C, p.171 î D.C.,.p.22 ; D.C, p.365 à 372 ; D.C,p.26?

(2) D.C, p.l45. (3) D.C, p.39C


- 25 -

"Elles (ces Sociétés) serviront l'Eglise, parce que leur existence a pour but le service de l'Eglise", (l) Plus loin, le Père de Clorivière parle de ces deux Sociétés comme "ne subsistant et ne voulant subsister que pour procurer par toute la terre les intérêts de Dieu, de Jésus-Christ et de son Eglise". (2) Puis ces lignes où le pluralisme de moyens est mis en relation directe avec la fin : "La fin dernière et générale de l'une et l'autre Société est de procurer, par toutes sortes de moyens, la gloire de Dieu, notre salut et celui du prochain". (3) La Constitution de l8l8 situe l'esprit propre de la Société par rapport à ses fins générales ; elle est normative quant aux préférences concrètes que ces fins peuvent exiger : "Que chacune comprenne (qu'elle doit) ne regarder en toutes choses que la gloire de Dieu, mais de plus, qu'elle considère avec attention que cette Société n'a point d.'esprit particulier et qu'elle n'ambitionne rien comme propre ; mais qu'elle veut se gouverner en tout par l'Esprit de Jésus-Christ et se propose uniquement pour but le bien général de l'Eglise; c'est pourquoi toutes les fois que le plus grand service de Dieu pourrait le demander, qu'elle n'hésite point à préférer l'intérêt des autres qui ne seraient pas de la même Société, à ce qu'elle croirait être plus avantageux, soit à elle-même, soit à la Société en général". (4) Ce texte a été conservé presque mot pour mot dans les différentes éditions de nos constitutions,

(voir chapitre I, n°6, édition de

I969). Ces fins générales qui requièrent l'entière disponibilité des membres et du corps pour être prêts à tout service de Dieu et du prochain, seront clairement proposées à ceux qui désirent s'engager dans ces Sociétés.

(1) D.C, p.391. (2) D.C, p.396. (3) D.C, p.258. (4) Voir Plan abrégé 1792, D.C, p.83 et Constitution de l8l8, D.C, p.520-521.


-. 26 -

"Seuls pourront être admis dans la Société ceux qui, appelés à elle par le Christ... seront fermement décidés à se consacrer tout entiers, chacun suivant son état...non seulement à leur propre salut, mais encore à procurer celui du prochain ainsi que la Gloire de Dieu", (l) Les quatre fins générales si souvent indiquées, se retrouvent groupées en une seule phrase dans le texte suivant

:

"Nous devons toujours tendre au bien général et à la fin de notre Société qui n'est autre que la gloire de Dieu, le bien de l'Eglise, la perfection des membres de la Société et le salut de tous les hommes".' (2) Ces fins seront normatives en toute occasion,

par rapport à

l'état de vie, la profession, les oeuvres à réaliser ;

ce sont elles

qui assureront leur efficacité apostolique. On pourrait multiplier les citations

:

"Dans le choix qu'elles feront d'un état, de concert avec leur Supérieure, elles ne doivent point considérer l'intérêt propre et l'inclination particulière, mais la gloire de Dieu, leur propre salut et le besoin du prochain". (3) Ceux qui sont déjà engagés dans une profession doivent se référer en toutes circonstances à ces fins essentielles en raison même de leur vocation : "Chacun, dans sa profession, doit se regarder comme l'homme de Dieu, chargé d'agir en son nom, pour l'intérêt de sa gloire, le bien de l'Eglise et celui de toutes les classes de la société civile". (4) et dans la même ligne

:

" Combien on se rend agréable au Seigneur quand on s'adonne à l'éducation de la jeunesse, quand on en fait sa principale occupation, et que... on ne se propose en cela que la gloire de Dieu et le salut de ces enfants". (5)

(1)

D.C, p.41.

(2) D.C, p.546.

(3)

Règle de conduite,

(4) (5)

L.C ,

p.322.

L.C,

p.348".

chap.II,

3°.


Enfin,

pour le fondateur,

dès deux Sociétés, membres,

- 27 -

ces

fins générales,

raison d'être

sont aussi un centre d'unité pour tous leurs

comme elles l'étaient pour les premiers chrétiens

:

"Il peut y avoir...une grande variété de professions dans nos Sociétés ; mais quelle que soit la profession de ceux qui s'y sont consacrés au service de Dieu, leur principale attention doit être d'en concilier les devoirs avec leurs saints engagements, et de la faire servir en tout temps à la gloire de Dieu, a leur propre salut, au bien de l'Eglise, à l'utilité générale", (l) "Ils (les premiers chrétiens) tendaient tellement à la même fin, au même but surnaturel : la gloire de Dieu, le bien de l'Eglise, leur salut et celui du prochain, que, quoiqu'ils prissent pour y parvenir des. chemins différents, et qu'il y eût entre eux une grande diversité de dons et d'attraits, il paraissait néanmoins que le même esprit les faisait agir et qu'il réglait seul tous leurs mouvements".(2)

Ces grandes finalités salut du monde,

:

gloire de Dieu,

sanctification du prochain,

l'esprit et au coeur,

C'est ce constant

grand service de l'Eglise" et

ce raopel des mystères divins actualise la vie de foi

des membres de la Société,

vivifiant cette foi que saint Thomas

appeler "participation à la science de Dieu". Cela est d'autant plus

leur vie,

ou leurs

(3)

soumis avec

et partagent à travers

oeuvres,

aspirations de leurs frères les hommes, idéologies,

les souffrances et les

et sont comme eux affrontés

eux à toutes les pressions.

(1) L.C., p.320. (2) L.C.,

ose

important que les membres des Sociétés

ou envoyés au milieu du monde,

leurs professions

à toutes les

peuples".

De plus,

sont laissés

rapport entre les

et le plan rédempteur qui indique finalement

se trouve et en quoi consiste "le plus "le besoin des

sans cesse présentes à

dicteront à la Société la diversité et l'ampleur

de ses entreprises apostoliques. situations de la terre

service de l'Eglise,

p.51.

(3) Saint Shomas, Somme Théologique,

la

Ilae,

tri

q.110,

conclusion.


-28

-'29 -

o

o

o

LA PEDAGOGIE DE "L'ESSENTIEL RELIGIEUX".

Nous sommes si habitués à cette pédagogie, maintenir et développer notre vie de consacrées,

nécessaire pour en toutes situa-

tions et milieux, qu'il est utile de prendre un peu de recul pour en saisir la valeur. Cette pédagogie de l'essentiel est caractéristique des enseignements du Père de Clorivière. L'essentiel dont il est ici question'n* est pas pris dans le sens restrictif,

minimiste,

c'est-à-dire ce dont on ne peut se passer sans dommage, sorte de minimum vital, au-dessous duquel on dépérit. re, dans son sens fondamental, générique,

Il est pris,

au contrai-

capable de vivifier un

ensemble, sans être entravé ni limité par ce qui est contingent ou secondaire. Le fondateur a situé maintes fois cet essentiel de la vie religieuse : un passage du Mémoire aux Evêques de France en cerne bien le problème

sic)

1798

:

"C'est un sentiment, je crois, universellement reçu parmi les théologiens, que l'essence de l'état, religieux consiste dans les trois voeux de pauvreté,'de chasteté et d'obéissance, ce qui fait au'on le définit communément l'état de ceux qui tendent à la perfection par l'observation des voeux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance ; on pourrait ajouter : et qui vivent sous une règle commune qui les constitue en Corps religieux, et sert à distinguer entre elles les différentes Sociétés religieuses. Ce n'est donc point le défaut d'uniformité dans le vêtement, ni une habitation séparée, ni d'autres choses semblables, qui pourraient empêcher qu'on ne fût religieux, puisque avec toutes ces choses on pourrait remplir tout ce qui est essentiel à l'état religieux", (l) Mais si,

objectivement, voeux et règles définissent "l'essence

de l'état religieux", il reste à les vivre de telle manière,

au

milieu du monde, qu'ils assurent l'authenticité de cet état. Et c'est là où la pédagogie de l'essentiel est continuellement affirmée, employée par le fondateur dans un sens bien déterminé : référence de la périphérie au centre, de l'extérieur à la source qui vivifie tout.

(1) D.C., p.135.


- 30 -

Une étude d'ensemble de nos règles et des écrits du Père de Clorivière,

sous cette optique, serait très éclairante, particuliè-

rement quant à l'esprit et la pratique des voeux d'obéissance et de pauvreté. On rapportera seulement ici quelques exemples typiques, il en est bien d'autres. La pratique du voeu d'obéissance,

particulièrement nécessaire

à la Fille du Coeur de Marie (nous aurons l'occasion de l'envisager dans un prochain chapitre),

offre un exemple de cette pédagogie

vis-à-vis de toutes les situations de dépendance que peut présenter une vie au milieu du monde. Elle s'y manifeste avec un sûr équilibre entre les différentes valeurs en présence,

(l)

Les Filles du Coeur de Marie peuvent avoir dans le siècle d'autres supérieurs dont elles dépendent.

C'est une conséquence de

la nature même de la Société-. "Toutes obéiront avec la dernière exactitude à ceux qui seront au-dessus d'elles, à quelque titre que ce soit, soit naturel, soit civil, soit ecclésiastique, dans les choses dans lesquelles elles en dépendent". L'indication très claire s'accompagne de discernement. "Les Supérieurs de la Société ne commanderont rien de contraire aux ordres de ces Supérieurs (externes)...à moins que dans ces ordres ou dans ces emplois, il ne se trouvât quelque chose de peu conforme à la loi divine". Ceci posé,

toutes ces situations de dépendance recevront

"une nouvelle vigueur de nos saints engagements".

(2)

En effet, le voeu d'obéissance devra porter les Filles du Coeur de Marie "à obéir avec plus de promptitude et de perfection aux supérieurs externes". Mais toute confusion devant être évitée dans une matière aussi grave que celle d'un voeu, une mise au-point précise : "il est nécessaire cependant qu'elles sachent qu'en vertu de ce voeu la dépendance où elles sont à l'égard de ces supérieurs (externes) n'est point augmentée, et que les fautes qu'elles pourraient commettre contre l'obéissance qu'elles leur doivent, ne changent point de nature".

(1) D.C., p.519. (2) L.C., p.303.


- 31 -

En ce qui concerne les autres domaines, laissé sur l'étendue de l'obéissance religieuse

aucun doute n'est :

"Pour toutes les autres choses dans lesquelles elles ne seraient point dans la dépendance d'autrui, elles seront tenues d'obéir aux Supérieures de la Société". et "Quant aux fautes contraires à l'obéissance dont on se rendrait coupable envers les Supérieures de la Société, il faut en porter le même jugement que dans les autres Ordres religieux".

La pratique du voeu de pauvreté présente un autre

exemple de

ce recours à l'essentiel dans la détermination de "l'honnête nécessaire" c'est-à-dire, il doit

ce que chacun peut appliquer à son usage,

et comment

employer ce qui lui reste sous la direction de l'obéissance.

On relève

toujours le même mouvement de référence aux conseils

évangéliques

à partir de situations qui peuvent

être très diverses.

"Nous sommes par état et par la profession'que nous faisons de suivre les Conseils évangéliques, obligés d'apprécier ce nécessaire par les maximes du saint Evangile, et non par celles du monde et par les désirs aveugles de la nature, nous y sommes obligés parce que nous ne regardons pas comme à nous ce que nous gardons, mais comme appartenant à Jésus-Christ et que, par conséquent, ce sont ses intentions que nous devons consulter avant toutes choses dans l'emploi que nous en faisons. Cela suppose que ce nécessaire est restreint dans des bornes bien plus étroites que ne seraient celles que le monde a coutume d'y mettre, qu'on n'accorde rien aux penchants vicieux et désordonnés de la nature, au goût, à la fantaisie, aux usages du siècle,

etc ...'*. (l ) Suit un lumineux développement sur la manière de comprendre

le conseil évangélique de pauvreté. La Jème Lettre circulaire,

consacrée à la "communauté de biens"

qui doit régner entre les membres de chacune des deux Sociétés de la pauvreté surtout sous l'angle communautaire,

traite

mais certains

passages contiennent des avis précieux sur la manière d'apprécier l'honnête nécessaire et le superflu, de la vie religieuse

(1)

D.C.,

toujours en fonction du primat

:

p.387.

n


- 32 -

"La prudence peut seule nous apprendre à garder en cela ce juste milieu qui concilie tout...Il faut savoir faire un juste discernement de ses vrais besoins et de ces besoins factices qu'on s© fait à soi-même ou qu'on s'imagine avoir ; qu'on travaille constamment à diminuer le nombre de ceux-ci, sans toutefois se laisser aller à une ferveur indiscrète. Les conseils d'un homme prudent, et surtout ceux de l'obéissance, sont ici bien nécessaires", (l) La 6ème Lettre circulaire indique quelques critères de jugement, notamment en matière de permissions

:

"Les permissions sont exprimées, ou par la Règle, ou par la voix des Supérieurs. Les premières sont très étendues parmi nous, ainsi que l'exige la nature même de nos Sociétés. Elles embrassent tout ce qui convient à l'état d'un chacun et ce que demande le commerce de la vie civile. Les secondes regardent ce qui serait douteux, ou de plus grande importance". (2) L'Exposé de

1808 rappelle brièvement que l'honnête nécessaire

doit être "considéré et pesé au poids de l'Evangile...

tout ce qui

est au-delà" devant être consacré "à des oeuvres de miséricorde et de piété", selon les conseils des Supérieurs qu'il .faut "consulter autant qu'on le peut", puis le Père de Clorivière ajoute :

"On peut trouver

ailleurs des Instructions plus détaillées sur la pratique de la pauvreté". (3) En effet, le voeu et la pratique de la pauvreté sont longuement expliqués dans le triduum aux Premières Filles du Coeur de Marie et dans les Conférences sur les voeux de religion. Ces deux opuscules sont d'excellents témoignages de la pensée et de l'enseignement direct du Père de Clorivière aux Filles du Coeur de Marie.

Ses directives quant au choix et à l'exercice d'une profession mettent en lumière sa manière d'apprécier en fonction de "l'essentiel religieux" une situation en soi profane. Tout d'abord une règle générale

(1) L.C., p.8^-85. (2) L.C., p.170. (3) D.C., p.M+7.

:


- 33 -

"Il peut y avoir...une grande variété de professions dans nos Sociétés; mais quelle que soit la profession de ceux qui s'y sont-consacrés au service de Dieu, leur principale attention doit être d'en concilier les devoirs avec leurs saints engagements, et de la faire servir en tout temps à la gloire de Dieu, à leur propre salut, au bien de l'Eglise, à l'utilité générale", (l) Quand le choix d'une profession est libre, les fins essentielles de la Société et l'esprit d'obéissance sont normatifs

:

"Dans le choix qu'elles feront d'un état, de concert avec leur Supérieure, elles ne doivent point considérer l'intérêt propre et l'inclination particulière, mais la gloire de Dieu, leur propre salut et le besoin du prochain". (2) "Il faut faire la plus grande attention à ce qui est marqué dans les Constitutions... de ne point rechercher avec empressement les états les plus lucratifs et les plus honorables, mais de choisir plutôt et par préférence ceux dans lesquels on peut espérer de rendre plus de services à Dieu et au prochain". (3) Enfin, certaines professions sont incompatibles avec la vie religieuse, soit par elles-mêmes, soit en raison du sujet qui les exercerait

:

"Que si quelque profession, soit à raison des personnes, soit à raison des circonstances, avait trop de dangers, ou apportât trop d'obstacles à la pratique de la perfection évangélique, ce serait un motif d'exclusion qui empêcherait qu'on fût admis dans l'une ou l'autre Société, et jamais, après avoir été admis, il ne serait permis de s'y engager", (k) Les mêmes exigences religieuses peuvent demander le détachement religieux de la famille : "Il faut être prêtes à nous en éloigner...dès que le service de Dieu et notre propre perfection sembleront le demander, et que le Seigneur nous fera connaître sa volonté par le-moyen de nos Supérieures, quand même elles ne nous donneraient pas là-dessus des ordres positifs. Souvenons-nous pour cela que, en qualité de religieuses, "nous sommes mortes au monde et à nous-mêmes, pour ne plus vivre que pour Jésus-Christ, qui seul doit nous tenir lieu de toutes choses" (5)

(1) L.C., p.320. (2) Règle de conduite, chap.II, 3°. (3) Conférences sur les Voeux, 5e Conf.Pratique de la pauvreté religieuse, (k)

(vers la fin).

D.C., p.135-136.

(5) Sommaire, R.VIII, Réflexions p.29-30.

30


-•34 -

Nous savons avec quelle largeur d'esprit et. quelle prudence la Société a toujours envisagé les devoirs des Filles du Coeur de Marie vis-à-vis de leur famille, au centre de toute élection,

mais l'essentiel religieux demeure

dans ce domaine comme dans les autres.

En cet essentiel réside la joie, notre vie religieuse, la Société.

la

force et la sécurité de

et la réalisation du don total assurée par


- 35 -

LA SOURCE DES SOURCES : LE COEUR DU CHRIST ET LE COEUR DE SA MERE.

La troisième orientation maîtresse donnée par Le fondateur à la Société peut se définir : une exigence d'intériorité puisant sa profondeur et sa force au Coeur du Christ et de sa Mère. Il est frappant de voir que la première Lettre circulaire adressée par le Père de Clorivière à tous les membres des deux Sociétés, en 1799, soit neuf années après les débuts, traite de la conformité que nous devons nous efforcer d'avoir avec le divin Coeur de Jésus. Pendant ce laps de temps, au milieu des tribulations de la Révolution, il a eu maintes occasions de confronter son Projet aux événements et aux dures réalités de la vie, de réfléchir et de méditer sur l'inspiration initiale devant "le Père des lumières, de qui vient d'en haut tout bien excellent, et tout don parfait?1, (l) Il livre donc aux premiers associés ce qui, à ses yeux est le plus essentiel et le plus nécessaire pour les deux Sociétés, et ceci, au moment même où il va solliciter leur approbation auprès des "Chefs de l'Eglise". (2)

Si l'on veut situer les Sociétés à leur

vraie place au sein du monde et assurer leur efficacité apostolique, il faut d'abord les situer dans le Coeur du Christ et celui de sa Mère. Et là, point de différence entre les deux Sociétés : "Je ne distingue point ici, entre la Société du Coeur de Jésus et celle du Coeur de Marie, parce que ces deux Coeurs sont essentiellement l'un dans l'autre ; le Coeur de Jésus se trouve tout entier dans celui de Marie, le Coeur de Marie est plus dans le Coeur de Jésus qu'il n'est en lui-même". (3) Dans cette lettre, le mouvement initial de l'Incarnation rédemptrice, par amour du Père et par amour des hommes, est développé par le Père de Clorivière en vue d'y associer le plus intimement possible les deux Sociétés et leurs membres. Cela se réalisera par la conformité avec les sentiments du Coeur de Jésus et du Coeur de Marie.

(1) D.C., p.31.

cf. Jac.,1,17.

(2) L.C., p.l^-. (3) L.C., p.l8.

31


- .36 -

Il convient de souligner ici que si "le coeur est, de sa nature, le symbole de l'amour"

(l),

c'est au sens biblique le plus

profond et le plus riche que s'attache le Père de Clorivière. Théologien et mystique,

il contemple et ramène en quelque sorte

toute la vie d'amour de la Trinité sainte et son amour gratuit pour les hommes, au Coeur du Verbe incarné : "Le Coeur de Jésus est le symbole vivant et vivifiant de la Charité divine ; il est tout amour et pour Dieu et pour les hommes. Il est lui-même par excellence l'ouvrage de'ce Divin Esprit ; il le possède dans toute sa plénitude, et il le communique à tous les êtres capables d'un si grand bien, à mesure qu'ils l'approchent davantage, et qu'ils lui sont plus étroitement unis. L'amour du Coeur de Jésus pour Dieu est l'amour que le Fils de Dieu a pour son Père ; l'amour du Coeur de Jésus pour.les hommes est formé sur le modèle de l'amour que son Père a pour lui, "Sicut dilexit me Pater, et ego dilexi vos" (2) il n'a point eu d'autres bornes que l'immense capacité du Coeur de l'Homme-Dieu". (3) C'est à partir de ce Centre divin et des relations éternelles du Père,

du Fils et de l'Esprit que le Père de Clorivière va contem-

pler les attitudes profondes du Christ Sauveur, vis-à-vis de son Père et vis-à-vis des hommes

:

charité inépuisable,

des humiliations et des souffrances,

amour

obéissance en toutes choses,

"jusqu'à la mort et la mort de la croix". Ces mêmes attitudes,

anéantissement,

(Ph.,2,8).'

ces mêmes sentiments doivent,

toute

proportion gardée, devenir avec le secours de la grâce ceux des membres des deux Sociétés.

Cette conformité avec le Coeur du Christ

est longuement développée avec une foi et un amour dont on perçoit la densité et la force à travers un langage qui est celui du temps. Il faut parfois le dépasser pour en pénétrer la riche substance. Une expression employée par le Père de Clorivière doit retenir particulièrement l'attention, car elle sera reprise et amplifiée dans les deux lettres circulaires suivantes. Elle situe,

pour ainsi dire,

l'ensemble de la Société à sa Source.

(1) L.C.,

p.19-

(2) "Comme mon Père m'a aimé, moi aussi je vous aime". (3) L.C.,

p.19. -

(Jn.15,9).


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1ère Lettre Circulaire, l*f février 1799 "Conformez en tout vos sentiments à ceux de Jésus-Christ" Philip.2.5.

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- Tl Au sujet de l'obéissance du Coeur de Jésus, vertu qui doit être"le mobile de toutes nos actions" (l), après un développement d'une grande beauté sur l'exemple donné par le Christ, le Père de Clorivière conclut : "Ces Sociétés sont comme une production de ce Coeur adorable, dans laquelle il veut revivre et montrer encore à la terre ses principales vertus, et particulièrement son obéissance". (2) Trois ans plus tard, le 23 février 1802, le fondateur adresse sa 5ème Lettre circulaire aux membres des deux Sociétés, sur le soin qu'il faut avoir de persévérer dans sa vocation. L'excellence de cette vocation est longuement développée, toujours en fonction de l'appartenance et de la conformité des deux Sociétés au Coeur de Jésus et au Coeur de Marie, c'est-à-dire en les situant à la Source des sources, au foyer central du divin amour. Et comme si l'assurance du fondateur s'était encore fortifiée quant à l'origine surnaturelle des deux Sociétés et à la mission propre de leurs membres, faisant allusion à la récompense qui leur sera réservée dans le ciel, s'ils sont fidèles, il écrit ces lignes étonnantes à première vue, mais parfaitement cohérentes avec la profondeur de son regard contemplatif : "Jésus... présentera à son Père vos oeuvres... comme les siennes.. Comme telles, l'Homme-Dieu les offrira à son Père..."Voilà, dira-t-il à son Père, voilà ceux que vous m'avez donnés 5 ils appartiennent à mon Coeur. Dans un siècle pervers, au milieu du monde le plus corrompu, le plus impie, ils ont été les organes de ce Coeur, les interprètes de mon amour1 (3) Ayant ainsi épuisé en quelque sorte toutes les expressions humaines pour traduire la raison d'être la plus profonde des deux Sociétés et les exigences de conformité aux Sacrés Coeurs de Jésus et de Marie qui en découlent, le Père de Clorivière n'hésite pas dans la

(1) L.C., p.27. (2) L.C, p.28. A rapprocher de l'Acte de Consécration au Sacré-Coeur, ■ propre aux religieux, rédigé par le Père de la Colombière : "...faites que...je devienne... une nouvelle production de votre amour". Parlant du Bx. de la Colombière, le P. Monier-Vinard remarque que "le Père de Clorivière l'aimait de tout son coeur ; il lisait assidûment ses oeuvres". (Notes intimes, t.l, p.19). (3) L.C, p.123.


6ème Lettre circulaire écrite quinze mois plus tard,

(le 11 mai

l803), à préciser que cette conformité est "le devoir le plus sacré, le plus inviolable" de la Société où l'on s'enrôle,

(l)

Il le précise dans un de ces raccourcis qui lui sont coutumiers et qui méritent d'être médités ligne par ligne tant ils sont riches de perspectives. Après avoir décrit le zèle qui anime ses confrères pour le salut des hommes et le désir sincère qu'ils ont "de suivre Jésus-Christ le plus près

...possible avec le secours de

sa grâce", le Père de Clorivière poursuit

:

"Que pouviez-vous, en effet, vous proposer en vous engageant dans la Société du Coeur sacré de Jésus, dans une Société dont le devoir le plus sacré, le plus inviolable, est d'entrer, le plus qu'il est possible, dans les sentiments de ce Divin Coeur, d'avoir avec lui la plus entière conformité, de participer aux plus pures ardeurs de sa charité pour Dieu, aux effets de son généreux amour pour les hommes". (2) Si l'on rapproche les unes des autres les trois expressions-clés employées par le fondateur pour caractériser ses Sociétés, "production de ce Coeur adorable, dans revivre";

laquelle

il veut

"organes de ce Coeur...interprètes de...(son) amour", considérant comme "le devoir le plus sacré et le plus inviolable" entière conformité" avec ce divin Coeur,

"la plus

on comprend mieux la

convergence des trois orientations maîtresses qui soutiennent leur structure spirituelle,

et assurent leur unité

î

Les grandes finalités de toute vie religieuse de Dieu, salut du monde,

:

gloire

bien général de l'Eglise, sanctification

de soi-même et du prochain,

ne se confondent-elles pas avec les

intérêts mêmes du Coeur du Christ ? Etre situés en son Centre, c'est épouser ces intérêts à un tel degré d'intimité qu'ils déterminent en toutes occasions les choix, les attitudes des Sociétés et de leurs membres

: d'où leur valeur normative.

(1) Cette 6ème Lettre circulaire est adressée aux Prêtres du Coeur de Jésus, mais le Père de Clorivière nous invite lui-même à en faire l'application aux deux Sociétés, p. 1?6 et sv. (2) L.C,p.155.


La pédagogie du fondateur qui consiste à référer toute situation,

tout problème à l'essentiel religieux,

trouve son sens

le plus profond dans cette conformité au Coeur de Jésus et Coeur de Marie. pauvre,

tances en Lui,

Comment suivre le plus près possible le Christ

chaste et

voeux avec

au

obéissant sans garder jalousement les trois

toutes leurs exigences,

? Comment

penser,

quelles que soient les circons-

agir et réagir avec Lui,

comme Lui et

vis-à-vis du Père des cieux et vis-à-vis de nos frères,sans

cette conformité à ses sentiments et à ceux de sa Mère "l'image la plus accomplie du.Coeur de son divin Fils" C'est à cette profondeur,

?

(l)

celle même du Coeur du Christ,

que

l'on comprend la hardiesse surnaturelle et l'ampleur des visées du Père de Clorivière et comment la pénétration apostolique du monde, au sein des situations les plus concrètes, de la Société,

dépend de l'intériorité

de la conformité la plus intime

de chaque Fille du

Coeur de Marie avec le Coeur du Christ et celui de sa Mère.

(1) D.C., p.173 -et aussi L.C, p.l8.


- 431-

AU MILIEU

DU

MONDE,

POURQUOI ?

i

COMMENT

?

L'inspiration du 19 juillet, celle du mois d'août concernant la Société des Filles du Coeur de Marie, les Projets et Plans des deux Sociétés, les Mémoires aux Evêques, les Lettres circulaires et autres écrits du fondateur,

indiquent clairement "le monde"

(l) comme

lieu d'apostolat des associés. Nous avons vu également comment la pédagogie de "l'essentiel religieux" était celle qui convenait à des religieux et religieuses affrontés aux situations les plus diverses, propres à la vie du monde. Il convient, pour une prise de conscience aussi complète que possible de la pensée du Fondateur de dégager,

à partir de multiples

textes, les raisons majeures qu'il voit à ce nouveau genre de vie religieuse, et comment il envisage sa réalisation. On ne peut perdre de vue les circonstances qui ont suscité la naissance des Sociétés et accompagné leurs premières années d'existence

: les désordres et les destructions de la Révolution Française,

inséparables de l'incrédulité montante du XVIIIe siècle, les graves problèmes économiques et les troubles sociaux qui secouaient alors la France dans ses profondeurs. Dans ce contexte, les analyses de situations faites par le Père de Clorivière ne sont pas exagérées, il décrit ce qui est. Il nous revient de discerner avec lucidité les enseignements et avertissements du Fondateur qui conviennent pour tous les temps,

donc aussi'

pour le nôtre.. Dans le fascicule "Fidélité et Prospective", aurons l'occasion,

nous

tenant compte des mutations, du monde moderne et

des grandes orientations de Vatican II d'ouvrir quelques pistes de réflexion pouvant aider à faire le pont entre la richesse des origines, les réalisations du présent et certaines ouvertures sur l'avenir.

(1) A noter que le Père de Clorivière, suivant la Tradition néo-testamentaire, emploie le terme "monde", tantôt comme milieu où se déroule la vie, tantôt comme adversaire de l'esprit de Jésus-Christ.


-.42

Novateur et créateur,

-

dans la mesure où il conçoit l'essen-

tiel, le Père de Clorivière nous encouragerait le premier, semble-t-i}., dans cette recherche pour une Société dont il envisage le service d'Eglise et du monde pour "une durée égale à celle des siècles",

o

(1) D.C., p.397.

o

o

(l)


AU MILIEU DU MONDE

:

POURQUOI

?

Quelques citations peuvent aider à reconstituer la toile de fond, la vue d'ensemble qui se présentait aux yeux du fondateur quand il envisageait les deux Sociétés. On y retrouve l'unité de vue qui caractérise son regard réaliste et mystique : pour lui, Dieu et son Esprit sont toujours au coeur de l'événement. Voici peut-être un des textes les plus complets où il décrit le "pourquoi" de la Société au milieu du monde,

(l)

"L'Esprit régénérateur subsiste et subsistera toujours avec l'Eglise. Il a fait connaître à plusieurs de ses serviteurs qu'en recueillant avec soin les étincelles de ce feu divin qu'il avait autrefois suscité pour la réforme du peuple chrétien, -(allusion à la création de nouveaux ordres religieux)il fallait prendre une route un peu différente, que le danerer était trop pressant pour s'éloigner, qu'il fallait rester au milieu de l'orage pour donner de prompts secours à ceux qui périssaient, que pour ramener le monde à de sains principes, il fallait se montrer à ses yeux revêtus de ses livrées, être soumis à tout ce que ses lois, ses usages ont de compatible avec la loi du Saint Evangile, remplir les devoirs de citoyens en supportant toutes les charges, n'intervertir en rien.l'ordre public, ni celui des familles

;

ne point séparer du reste des hommes, ni par une habitation commune, ni par un habillement uniforme, ni par une forme de vie particulière *, et que, puisque la divine Providence nous avait fait naître dans des temps non moins orageux que les siècles où l'idolâtrie régnait encore sur tous les peuples de l'univers, il fallait que ceux de ses serviteurs,qui auraient le plus à coeur les intérêts de l'Eglise et de la Religion, comme de généreux soldats, vécussent au milieu du siècle toujours prêts à combattre les ennemis du salut et qu'ils fussent comme le sel dont on saupoudre les viandes pour les empêcher de se corrompre. Voilà l'idée qu'on doit se former de cette Oeuvre et de la fin qu'on se propose".

(l) D.C., p.hkZ-khJ). Les alinéas ont été introduits pour faire ressortir les diverses propositions.

53


- kk -

Après cette citation exhaustive semblerait-il,

on se demande

s'il reste quelque chose à ajouter ? Mais des éclairages différents sur le même sujet aident à mieux discerner les traits saillants. Dans la 9e Lettre circulaire, le Père s'adressant directement aux membres des deux Sociétés,

écrit dans la même perspective :

"Le Seigneur ne vous a pas appelés à la solitude du cloître, où vous auriez pu vaquer peut-être plus paisiblement, et sans tant de dangers, à votre propre perfection ; il vous-a appelés, comme ses apôtres et ses premiers disciples, à demeurer au milieu du siècle, dans le sein d'une nation perverse, parmi des hommes qui connaissent à peine son Nom. Pour répondre à votre vocation, vous devez, chacun de vous selon son état, sa profession, son sexe, y combattre pour sa gloire, braver sans effroi les flots d'une mer orageuse, qui vous environnent de toutes parts, sauver du naufrage le plus de malheureux que vous pourrez en retirer, et préserver, peut-être pour toujours, des familles entières qui, dans ces jours de ténèbres, sont menacées du même malheur", (l) Les formules "braver les flots d'une mer orageuse", du naufrage", sont bien d'un Breton,

"sauver

proche de l'Océan et familier

de ses tempêtes. Elles évoquent d'une façon très parlante la vaillance, le courage nécessaire aux religieux et religieuses de ces nouvelles Sociétés qui devront vivre et se dévouer en pleine tourmente révolutionnaire, avec ses risques, ses embûches,

ses dangers souvent

mortels:. Même en des temps moins orageux, courage et générosité seront toujours nécessaires aux membres des Sociétés. Avec son regard pénétrant, reprenant en quelque sorte les fortes paroles de saint Paul "tandis que les Juifs demandent des signes et que les Grecs sont en quête de sagesse,

nous prêchons,

nous, un Christ crucifié, scandale

pour les Juifs et folie pour les païens" dès sa première Lettre circulaire,

(I Corinthiens I, 22-23),

le Père de Clorivière montre

comment le monde qui s'oppose à Jésus-Christ et à son Evangile, est le monde de tous les temps

(1) L.C,

p.329.

\

:


i

9e Lettre Circulaire, 26 septembre 1808. ur l'ĂŠdification que nous devons au prochain"


- K-> -

"Et ce monde, dont les sentiments contrastent si fort avec ceux de Jésus-Christ, ce n'est pas seulement celui qui, maintenant, se montre, avec tant d'audace, l'antagoniste de Jésus-Christ, qui foule à ses pieds son. Evangile, qui préfère à sa religion le culte absurde des idoles, ou celui d'un dieu chimérique qu'il fabrique à sa fantaisie ; c'est le monde de tous les temps, c'est celui que nous voyons'encore protester (de) son attachement à notre sainte Religion, fréquenter les mêmes autels, reconnaître l'Eglise catholique, adorer Jésus-Christ ; mais en même temps, refuser de marcher sur ses traces, et proscrire par ses moeurs, une doctrine qui fait l'objet de sa foi". (1) C'est bien

à "ce monde de tous les temps" que les religieux

des deux Sociétés seront affrontés, mais : "Retenus, fixés dans le monde par la volonté de Dieu, par le s désir de sa gloire, ils peuvent compter sur une assistance spéciale du Seigneur, ils peuvent espérer d'y trouver des grâces plus abondantes qui les préserveront de la contagion du monde". (2) Le POURQUOI profond de leur présence au monde est souvent affirmé par le Père de Clorivière. "S'ils restent dans le monde, s'ils conversent avec le monde, ils se souviendront qu'ils ne sont point du monde, et qu'à l'exemple de Jésus-Christ et de ses Apôtres, ils ne sont dans le monde que pour travailler au salut du monde, et pour apprendre aux hommes à connaître et à aimer Jésus-Christ et sa Sainte Mère". (3) Dans le commentaire de la Xle règle du Sommaire il précise encore : "Nous devons être dans ce monde comme il (Notre Seigneur) y .était lui-même, et par le même motif : pour contribuer au salut du monde. Plus nous en sommes proches en y demeurant de corps, plus nous devons en être éloignées en esprit, plus nous devons en avoir horreur plus nos sentiments, plus notre conduite doivent être en opposition avec ses maximes. Toute notre crainte doit être de nous conformer au monde ; toute notre gloire, toute notre félicité, tous nos voeux de porter en nous et sur nous l'image de Jésus-Christ", (k)

(1) L.C., p.26. (2) D.C., p.160. (3) D.C., p.168. (4) Sommaire, p. ^2-^3.


- ke -

Cette vie "au milieu du monde", loin d'amoindrir la vie religieuse des Filles du Coeur de Marie doit être un appel à la sauvegarder jalousement.

'

"Qu'auriez-vous donc à envier aux Corps les plus favorisés de l'Eglise de Dieu ? Vous êtes au milieu du monde, mais le monde est crucifié pour vous, et vous êtes crucifiées pour le monde. Vous êtes au milieu du monde, mais ce n'est pas par votre choix, mais par soumission à la volonté de Dieu qui vous y retient ; vous y êtes comme les Apôtres, pour le salut et l'édification de bien des âmes", (l) Ce dévouement à Jésus-Christ qui retient au milieu du monde, est envisagé par le fondateur jusque dans ses ultimes conséquences. Dans le Mémoire aux Evêques (1798), il écrit : "Toutes se rappelleront que comme Filles du Coeur de Marie, elles sont dans le monde sans être du monde, qu'elles n'y sont que pour y répandre la bonne odeur de Jésus-Christà l'exemple de ces illustres vierges des premiers siècles du Christianisme qui, comme elles, ont vécu dans le monde et dont un grand nombre ont scellé la foi de leur sang". (2) N'est-ce pas dans la même perspective d'un dévouement sans borne au Christ, à la Vierge et au salut du monde que dès la première "Idée d'une Société Religieuse de Filles et de Veuves" en août 1790, le Père de Clorivière trace cette règle qui envisage un sommet de fidélité et d'amour : "23. Comme le monde cherche à abolir le Christianisme et que tout nous annonce que le nombre et la malice des sectateurs de l'irréligion ne fera que croître avec le temps, ainsi que le Sauveur du monde l'a prédit dans son Evangile, la Société de Marie doit être une pépinière de Vièrges et de Martyres qui préféreront de verser leur sang et de souffrir toutes sortes d'affronts et de tourments plutôt que de rien faire contre l'honneur de Jésus et de sa très sainte Mère".(3)

Cette règle, avec quelques variantes dans les termes fait toujours partie des Constitutions de la Société. En définitive, les Filles du Coeur de Marie doivent être dans le monde comme le Christ "y était lui-même, et par le même motif : pour contribuer au salut du monde", (k)

(1) (2) (3) (4)

L.C., p.338-339. D.C., p.172. D.C., p.61-62. Sommaire, p.42.


- 47 -

AU' MILIEU DU MONDE :

COMMENT

?

Elles y seront d'abord et toujours en tant que religieuses. On peut relire à ce sujet, les enseignements d'une rare vigueur donnés au cours du Triduum aux premières Filles du Coeur de Marie. Les dispositions nécessaires pour "atteindre la perfection" dans un état qui ne "sépare pas du monde" sont

:

1° n'être point du monde.

2° ressembler à Jésus-Christ. "N'être point du monde ...c'est... être morte au monde, c'est ce qui se fait par les voeux substantiels de religion. Ils nous constituent dans l'état de mort par rapport au monde. Il ne suffit pas à une Fille du Sacré Coeur de Marie de renoncer pour un temps aux choses du monde, de n'avoir point les affections du monde... elle veut mourir à tous les biens de la terre par le voeu de pauvreté à son corps, par le voeu de chasteté; à sa propre volonté, par celui d1 obéissance... de sorte qu'on puisse lui appliquer ces paroles : Vous êtes morts et votre vie est cachée avec J.C. en Dieu", (l) Une vie religieuse, intégralement vécue,

est nécessaire à la

mission de la Fille du Coeur de Marie au milieu du monde. Nous retrouvons toujours la conviction intime, première du fondateur. Mais,

à partir de là, toutes les formes, toutes les modalités

de service de l'Eglise et de nos frères peuvent être envisagées ; seules, les vues providentielles détermineront le genre de vie de chacun des membres et les activités apostoliques à entreprendre selon les plus grands besoins du moment. Les réponses à "Comment être dans le monde ?" seront donc diverses et variées. Elles l'étaient déjà du temps du Père de Clorivière et de Mère de Cicé,

elles le sont encore

;

nos Annales,

jusqu'à aujourd'hui en témoignent. Nous trouvons dès lors,

et de nos jours :

- des Filles du Coeur de Marie retenues dans leur famille par des devoirs impérieux,

tenues "d'édifier" leur milieu de vie,

édifier

étant pris au sens fort donné à ce mot par le Père de Clorivière (2).

(1) Triduum aux premières Filles du Coeur de Marie,

p.l8 et 23.

(2) cf. la 9e Lettre circulaire tout entière, p.299-330.


- 48 -

- des Filles du Coeur de Marie professionnelles,

ayant l'occasion

d'exercer un apostolat direct ou indirect dans une profession dont elles doivent remplir les devoirs et partager les solidarités; - des Filles du Coeur de Marie engagées dans des ou non par la Société),

oeuvres

soit d'enseignement et d'éducation si parti-

culièrement recommandées par le Père de Clorivière, spirituelle plus directe nature caritative

(soutenues

:

catéchisme,

ou sociale

retraites,

soit de portée etc.,

soit de

;

- des Filles du Coeur de Marie dans des activités "en pointe", auxquelles convient leur forme spéciale de vie religieuse ments universitaires,

culturels,

mouvements internationaux,

Un relevé complet des oeuvres,

groupeetc.

activités^ et professions exercées

par les Filles du Coeur de Marie depuis leur fondation, les différents pays,

:

et

ceci,

dans

illustrerait de façon significative l'accord

entre les réalisations de la Société et le charisme du fondateur. Dans le premier Plan de la Société des Filles du Coeur de Marie

(1790),

le Père de Clorivière écrit déjà

:

"2. Il faut que cette Société... embrasse elle seule toutes les diverses sortes d'oeuvres de miséricorde et de piété, qu'ils (les ordres supprimés) embrassaient tous ensemble. 21. Leur charité doit les. porter à subvenir, avec prudence, à toutes les misères du prochain ; mais elles doivent surtout avoir pour objet de guérir celles de l'âme, et de procurer le salut de ceux dont elles prendront soin' . 17. Chacune s'efforcera d'acquérir les perfections des vertus propres de sa profession, et les plus opposées aux vices qui y sont, le plus ordinaires", (l) Dans le Mémoire aux Evêques de France té des apostolats à travers la résumée

(1798),

cette diversi-

diversité des situations

est ainsi

s

"Si les autres membres de l'une et de l'autre Société ne peuvent pas rendre à l'Eglise les mêmes services (que les clercs) ils ne seront cependant pas sans quelque utilité pour elle. Au sein des familles, répandus dans tous les états de la vie, ils pourront

(1)

D.C.,

p.55,

61

et

60.


-49 -

en être l'édification, instruire les ignorants, apprendre aux enfants les premiers éléments de la doctrine chrétienne, convertir les pécheurs, préserver bien des âmes de la contagion du mauvais exemple. Ce sera un levain jeté dans la pâte, levain qui la fera lever", (l) Dans la Lettre circulaire sur 1 ' Ediification que nous devons au prochain, après avoir parlé du zèle déployé par les prêtres du Coeur de Jésus, le Père de Clorivière poursuit : "Je dis, avec proportion, la même chose des Filles du Saint Coeur de Marie. Partout où la Divine Providence leur en a fourni l'occasion, elles rendent à Jésus-Christ, dans la personne de ses membres indigents, des services signalés, soit pour l'instruction de la jeunesse de leur sexe, soit pour le soulagement des pauvres. Il n'y en a point, à ma connaissance, quelle que soit l'obscurité de sa condition, qui ne répande autour d'elle la bonne odeur de Jésus-Christ".(2)

Quelques pages olus loin, les diverses professions sont envisagées. Si ces dernières concernent surtout les hommes, conformément aux conditions de vie de l'époque, la transposition est aisée à faire pour les femmes, les critères du choix restant les mêmes dans tous les cas : "Parmi les professions...il n'y en a point, parmi celles qui sont légitimes et compatibles avec la perfection chrétienne, que les nôtres ne puissent exercer, quoiqu'on leur conseille, lorsqu'ils sont libres dans leur choix, de préférer celles où il se rencontre plus de services à rendre au Seigneur, moins de dangers à courir pour le salut et plus de moyens pour.se sanctifier et pour sanctifier les autres". (3) Puis s'adressant cette fois aux deux Sociétés, toujours sur le même sujet ; "Il peut y avoir...une grande variété de professions dans nos Sociétés ; mais quelle que soit la profession de ceux qui s'y sont consacrés au service de Dieu, leur principale attention doit être d'en concilier les devoirs avec 3.eurs saints engagements, et de la faire servir en tout temps à la gloire de Dieu, à leur propre salut, au bien de l'Eglise, à l'utilité générale". (4)

(1) D.C., p.175. (2) L.C., p.309. (3) L.C,

P.315-

(4) L.C, p.320.

kl


- 50 -

On retrouve le primat de la vie religieuse avec ses fins générales. Au cours du Triduum donné aux premières Filles du Coeur de Marie, à travers de longs développements sur la deuxième devise de leur Société "Faites tout ce qu'il vous dira", le Père de Clorivière. montre l'importance qu'il attache aux oeuvres, notamment aux "oeuvres de miséricorde et de charité envers le prochain". Il conclut ainsi une longue énumération : "La Société, autant qu'il lui sera possible, étendra ses soins à tout ; rien de ce qui peut être vraiment utile, soit à l'âme, soit au corps, ne sera étranger pour elle", (l) Cette même ligne de conduite se retrouve dans sa correspondance. En 1801, écrivant à Mlle d'Esternoz, le Père de Clorivière lui recommande de s'appuyer "uniquement sur Dieu. Osez tout espérer de sa puissance et de sa bonté et ne reculez jamais à l'aspect d'une bonne oeuvre qu'il vous présente. Il suffit que vous ne l'ayez pas cherchée par une vaine présomption". (2) En 1806, dans une lettre à Mère de Cicé, on relève : "Dites-lui (à Mlle Oudart) que, comme Fille du Coeur de Marie, elle a vocation et mission pour faire tout le bien qui est de son ressort". (3) S'adapter pour servir, selon les besoins du moment, a été et demeure la règle d'or de la Société. Ce qui serait trahir la pensée du Fondateur, ce serait de majorer indûment un mode de vie au détriment d'un autre, plus encore, de le présenter comme exclusif. Mais, vivre au milieu du monde, le Père de Clorivière le rappelle souvent, exige une vigilance particulière de la part des Filles du Coeur de Marie

(1) Triduum aux Premières Filles du Coeur de Marie, p.l4-15. (2) lettres, p.651. (3) Lettres, p.^33.


- 51 -

Dans la 3ème Conférence sur les Voeux de religion il lés met en garde de façon concrète :

"N'étant point incorruptibles et lumineux par nous-mêmes, nous ne pouvons nous défendre des ténèbres et de la contagion du monde, qu'autant que nous sommes en garde contre tout ce qui pourrait faire entrer dans nos coeurs l'esprit et le goût du monde : les entretiens trop fréquents, les visites inutiles, les manières mondaines, les livres qui sans être tout à fait mauvais, se ressentent trop de la sagesse du siècle...un air dissipé, les repas dont on pourrait se dispenser chez les personnes du dehors ; les jeux de quelque espèce qu'ils soient", (l) Un autre danger de tous les temps est signalé au n° 22 du Premier Plan de la Société ♦

"Il faudra qu'elles s 'arment de courage pour s'élever au-dessus du respect humain ; elles en demanderont sans cesse la grâce au Seigneur. Elles en auront le besoin le plus pressant pour persévérer dans leurs saintes résolutions, et ne point se laisser aller aux pernicieux exemples qu'elles auront sous les yeux, et aux discours du monde, qui verra sa condamnation dans l'horreur qu'elles montreront pour ses vanités, ses parures et ses plaisirs". (2) Discours du monde, vanités, parures et plaisirs ont sans doute changé depuis le temps du Père de Clorivière et de Mère de Cicé ; mais sous d'autres formes, les mêmes réalités présentent -toujours les mêmes dangers. Ces mises en garde sont fréquentes et témoignent de la perspicacité et de la prudence du fondateur. Un autre point sur lequel il insiste souvent, c'est l'abondance des moyens offerts aux associés par leurs Sociétés respectives pour sauvegarder l'intégrité de leur vie religieuse en plein monde. Il précise ces moyens de façon détaillée, l808.

Ici,

notamment dans l'Exposé de

nous ne pouvons que les énumérer :

"- des Règles qui nous prescrivent ce que nous avons à faire de plus parfait dans toutes les circonstances où nous pouvons nous trouver, - des Supérieurs...dont l'autorité nous indique sûrement quelle est la volonté de Dieu, dont la charité nous soutient... - 1'union, les prières, l'exemple de nos frères... quoique nous ne vivions pas sous un même toit, nous n'en sommes pas moins étroitement unis...

(1) 3e Conférence sur les Voeux de religion, (2) D.C.,

p.6l.

p.32-33.

(texte imprimé)


-'52 -

..'.de fréquentes réunions spirituelles.. .des exhortations à la pratique des Conseils évangéliques... Je n'excepte pas même la solitude et le silence, car quoique nous ne fassions pas profession d'être extérieurement séparés du monde ... notre commerce social avec lui se borne à ce qui peut contribuer à l'avantage spirituel du prochain et à la plus grande gloire de Dieu", (l) Dans le Triduum aux premières Filles du Coeur de Marie, après leur avoir dit de compter sur des "grâces de lumière, de force, de protection, Esprit,

inspirations fréquentes,

bons mouvements, dons du Saint-

faveurs spéciales, union plus intime, etc.", il leur demande

aussi de compter sur les moyens extérieurs

:

"Vous les trouverez en grand nombre dans cette Société religieuse que vous formerez ensemble... Vous y trouverez l'édification mutuelle ; une plus grande force qui vient de la réunion des volontés qui tendent toutes au bien ; des règles communes, la vigilance des Supérieurs, leurs bons avis, plus de secours spirituels, des instructions plus fréquentes, une plus grande charité les unes envers les autres dans tous les besoins de l'âme et même du corps". (2) Cette armature spirituelle solide, sera,

avec le recours

habituel aux Coeurs de Jésus et de Marie, le soutien assuré de la vie religieuse des Filles du Coeur de Marie, le garant de l'efficacité de leur apostolat.

o

(1) D.C.,

o

o

p.448-449.

(2) Triduum aux premières Filles du Coeur de Marie,

p.23


-.53 -

Au terme de ce fascicule consacré au "PROJET" du Père de Clorivière,

on éprouve le besoin de prendre du recul, de réfléchir,

de se recueillir pour saisir la vie de la Société dans son ensemble. Sa structure extérieure, ses réalisations multiples sont inséparables de sa structure intérieure, spirituelle. C'est cette dernière qui inspire, soutient, toutes ses activités et,

informe toutes ses entreprises,

finalement,

nous l'avons vu,

c'est au Coeur

du Christ et à celui de sa Mère que s'enracine toute cette vie. Un point des Constitutions traduit bien cette profonde unité de la mission de la Société et en rappelle la source

:

ni

Quelle que soit la diversité des situations que de la Société, enracinée dans le Christ,

"la vie apostoli

est l'oeuvre commune à

laquelle toutes collaboreront par l'activité extérieure, le travail caché, la prière, la souffrance".


- 54 -

APPENDICE

TABLEAUX

HISTORIQUE

SITUANT DANS LEUR CONTEXTE HISTORIQUE LES PRINCIPAUX ECRITS DU PERE DE CLORIVIERE

A plusieurs reprises, dans ce fascicule,

on a fait allusion

à la continuité de la pensée du Père de Clorivière sur son "Projet" quelles que soient les conditions où il se trouvait. Pour aider à mieux saisir dans une vue d'ensemble les données historiques

(et providentielles) de la fondation de la Société,

a établi les tableaux ci-après.

Ils présentent en parallèles

- les données de l'Histoire

on

:

;

- les circonstances qui en résultent dans la vie des fondateurs ; - les principaux écrits du Père de Clorivière.

Les documents numérotés de

26b à 33 dans le recueil

"Documents Constitutifs des Sociétés" et publiés en Appendices (p.537 et suivantes) n'ont pas été cités.

Ils ne sont pas datés et

on en ignore les destinataires exacts.

En plus des écrits mentionnés,

il convient de se rappeler

la volumineuse correspondance du Père de Clorivière, source de valeur irremplaçable pour expliciter sa pensée à travers le temps.

5^0


1791

Exécution du décret ci—des-sus, point de départ de la persécution religieuse.

Mars et avril. Brefs de Pie VI condamnant la Constitution civile du clergé, mais ne se prononçant pas sur le serment.

Novembre. Décrets contre les émigrés et les prêtres "réfractaires" (ou "insermentés"). (Dès juillet, des prêtres étaient arrêtés et emprisonnés)

fondation des deux Sociétés. mars à juin, Voyages du.P. de Clorivière en Bretagne.

Réflexions sur le Sommaire. Règle de Conduite.

30 avril. Lettre du P. de Clorivière à M. de Cicé lui demandant de prendre la tête de la Société de Marie.

Triduum aux 1ères F.CM. (?)

Juin. Retour du P. de Clorivière à Paris. Il loge d'abord rue des Postes, près du collège des Irlandais.

Modification du 1er Plan de la Société du Coeur de Jésus.

Conférences sur les voeux (?)

11 novembre. Arrivée de M. de Cicé à Paris. Le P. de Clorivière lui cède son appartement rue des Postes et va loger rue de la Chaise (jusque ?) .

Les arrestations de prêtres insermentés se multiplient.

Le P. de Clorivière se cache à Paris, quartier de la Montagne Ste Geneviève (?)

10 août. Incarcération de Louis XVI à la prison du Temple.

Août. Le P. de Clorivière dénoncé doit quitter son domicile.

2 au 6 septembre. Massacres de Septembre. (1600 victimes dont environ 220 prêtres).

Septembre. Le P. de Clorivière réside à la campagne près de Paris.

21 septembre. Proclamation de la République.

Octobre. Installation des deux fondateurs à la rué Cassette.

Impression du Plan abrégé de la Société du Coeur de Jésus.

21 janvier. Exécution de Louis-XVI. A partir d'août, instauration du régime de "la Terreur".

Novembre. Le P. de Clorivière s'éloigne quelque temps de Paris.

A partir de juin, régime de "la grande Terreur".

Mai. Tout en poursuivant son ministère, le P. de Clorivière se confine dans le "réduit"de la rue Cassette.

Fin de l'année, début de réaction centre le régime terroriste.

20 .juin, exécution de Mme des Bassablons.

Composition de la 2e partie du Commentaire de l'Apocalypse, (chapitre 8).


HISTOIRE

LES FONDATEURS ET

LES

SOCIETES

ECRITS LU PERE DE CLORIVIERE

27 octobre. Le Directoire. Sous des prétextes politiques, recrudescence de la persécution religieuse.

Les fondateurs résident rue Cassette.

Envahissement des Etats italiens du Saint-Siège par les armées de la Révolution.

Les fondateurs résident rue Cassette,

Au début, adoucissement de la persécution contre les émigrés et les prêtres insermentés, puis au début de septembre "Seconde Terreur". ■

Les fondateurs résident rue Cassette,

Anarchie politique. Prise de Rome, emprisonnement de Pie VI, d'abord en Italie.

Voyages du P. de Clorivière en France.

- Mémoire aux Evêques de France (terminé en décembre).

Fin août, mort de Pie VI à Valence en France.

Août. Arrestation de M. de Cicé, relâchée une quinzaine de jours plus tard.(Motif: correspondance avec sa famille émigrée).

Présentation du "Mémoire aux Evêques' aux évê.ques français émigrés en Angleterre.

Voyages du P. de Clorivière en France.

Impression du Spécimen de la Société du Coeur de Jésus.

9 novembre. Fin du Directoire, remplacé par le Consulat.

- 14 février - 1° mai - 19 juillet

1ère Lettre circulaire. 2e Lettre circulaire. 3e Lettre circulaire.

14 mars, élection de Pie VII. 18 janvier. Lettre sur la Très Ste Vierge en réponse à quelques objections.

Novembre. Début des négociations en vue du Concordat.

24 décembre, attentat de la Machine

Lettre et Mémoire au Souverain Pontife Pie VII.

infernale, contre Bonaparte.

19 janvier. Arrestation et incarcération de M. de Cicé, impliquée indirectement dans l'attentat de la Machine infernale. Le P. de Clorivière s'éloigne de Paris pendant quelque temps. mars et mai, Brefs de Pie VII rétablissant canoniquement la Compagnie de Jésus en Russie.

19 janvier, à Rome, audience accordée par Pie VII aux deux envoyés du P. de Clorivière.


pendant quelque temps. mars et mai, Brefs de Pie VII rétablissant canoniquement la Compagnie de Jésus en Russie.

I9 janvier, à Rome, audience accordée par Pie VII aux deux envoyés du P. de Clorivière. 25 janvier. Bref de Pie VII à Mgr Cortois de Pressigny, en confirmation de l'approbation verbale donnée aux deux envoyés du - 25 mars, Lettre à'Jîgr Cortois de P. de Clorivière. Pressigny.

15 juillet. Signature du Concordat.

Début avril, procès et acquittement de M. de Cicé. M. de Cicé part à Rouen. Mme de Saisseval relève l'oeuvre des Hôpitaux.

- 1° Mai. Lettre circulaire aux membres des deux Sociétés, (cf. D.C., p.345).

En août. Retour du P. de Clorivière à Paris. 1802

8 avril. Promulgation du Concordat.' Les ordres religieux restent supprimés. Le Cardinal Caprara nommé Légat en France pour l'exécution du Concordat. Août. Bonaparte nommé Consul à vie.

- Entre juillet 1801 et avril 1802, Lettre à Mgr l'ancien évêque de St Malo.

Juin. Départ du P. de Clorivière pour les missions de Provence. Juillet. Arrivée de M. de Cicé à Aix.

Septembre. Rapport Portalis sur des Associations religieuses illégales.

- 15 janvier. Mémoire au Cardinal Caprara. - Second Mémoire aux Evêques de France. (Texte voisin du Mémoire au Cardinal Caprara). - 1ère impression des Considérations sur l'exercice de la prière et de l'oraison, composées en 1778. - 23 février, 5e Lettre-circulaire. - 20 juin, Lettre d'adieu écrite en ■partant pour les missions de Provence.

i

1803

1^

25 janvier. Circulaire Portalis aux evêques, rappelant l'interdiction portée contre toute association religieuse non autorisée.

En Provenœe, composition de la 1ère partie du Commentaire de l'Apocalypse. avril. Mme de Carcado fonde l'Oeuvre des Enfants délaissés. Mgr Jérôme de Cicé s'oppose à l'établissement des deux Sociétés dans son diocèse d'Aix.

- 11 mai, 6e Lettre circulaire.

Septembre. Le P. de Clorivière quitte Aix e1; visite les sociétés en province. Octobre, retour de M. de Cicé à Paris.

1


HISTOIRE

LES Janvier. Paris.

18 mai. Proclamation de l'Empire. 22 juin. Décret impérial sur les congrégations religieuses. La Société du Coeur de Jésus n'y est pas mentionnée.

FONDATEURS ET LES

SOCIETES

ECRITS DU PERE DE CLORIVIERE

Retour du Père de Clorivière à

5 mai; Arrestation et incarcération du P. de Clorivière à la prison de la Force. vers juin, transfert du P. de Clorivière au Temple.

Explication de la 1ère Epître de St.Pierre. 27 juin. Lettre à S.Exc. le Conseiller d'Etat, Réal.

Juillet. Décision verbale de Pie VII permettant l'agrégation des postulants de tous pays.à la Compagnie de Jésus en Russie. 2 décembre. Sacre de Napoléon à Paris par Pie VII.

Napoléon cherche à exercer une emprise croissante sur le clergé.

180J_ ;

1808

I 1

Décembre. M. de Cicé est reçue en audience par Pie VII.

4 décembre. Mémoire au Souverain Pontife Pie VII. •

Printemps. Le P. de Clorivière suivant sa demande, est agrégé à la Compagnie de Jésus en Russie.

12 février. Lettre au Souverain Pontife Pie VII. 29 mai. 7e Lettre circulaire. Explication de la 2e Epître de St Pierre.

Mort de Mlle d'Esternoz et de Mr. Engerrani'..

Réimpression du 1er Plan de la Société du Coeur de Marie et de la Règle de Conduite. 17 mai. 8e Lettre circulaire.

Début des représailles contre l'Eglise de France.

1807/1808. Envahissement des Etats Pontificaux et de Rome par les armées de Napoléon.

Mai. Annexion du Domaine pontifical à l'Empire. '

Composition de la 3e partie du Commentaire de l'Apocalypse. 17 octobre. Lettre aux F.CM. demeurant chez les Carmélites. Mai. Transfert du P. de Clorivière du Temple à la Maison de Santé près de la Barrière du Trône.

11 avril. Libération du P.de Clorivière.

12 juin.Excommunication de Napoléon. 6 juillet. Enlèvement de Pie VII emprisonne a Savone.

Voyages du P. de Clorivière en France.

29 mai. Exposé de l'Oeuvre... à Mr l'abbé Mongendre. 26 septembre. 9e Lettre circulaire. I8O8/I809. Commentaire du Discours après la Cène.

Impression de l'Explication des Epîtres de êt Pierre.


emprisonné à Savone. r

1810

Voyages du P. de Clorivière en France.

1811 1812

Juin. Transfert de Pie VII à Fontaineblea

1813

17 mars. Le P. de Clorivière est reçu en

10 mars. Lettre au Souverain Pontife Pie VII.

audience par Pie VII, à Fontainebleau. 1814

Mars. Chute de l'Empire, retour à Rome de Pie VII libéré.

Juin. Le P. Brozozovski, Général de la Compagnie de Jésus, résidant alors en Russie, charge le P. de Clorivière de la restauration de la Compagnie de Jésus en France.

7 août. Bulle "Sollicitudo" rétablissant

la Compagnie de Jésus dans le monde entier. 1815 I8lé

1817

Janvier.

1818

26 avril.

Le P. de Clorivière est déchargé . -Impression de la Constitution abrégée de la Règle de Conduite, et des Mort de M. de Cicé. Réflexions sur le Sommaire. (Manuel... en 2 volumes).

1819 i

1620

9 Janvier.

j

Mort du P. de Clorivière.


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