Issue #26

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Vue sur la mer 27.6 — 9.7.2011 Un projet curatorial de Romain Legros, en collaboration avec Vlado Alonso. Avec les soutiens de Laurent Schmid et Fouad Bouchoucha.

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Avec : Constance Allen et Romain Graf Dorothée Baumann et Serge Boulaz Sarah Burger et Ingrid Kaeser Jérémy Chevalier Natalia Comandari et Daniel Otero Editions hard copy 2011 Chloé Delarue et Florimond Dupont Nicolas Fremion Nelly Haliti Romain Hamard Hyun Sook Kim Aurélien Lemmonier Li Li Renaud Loda et Pricasso Aldric Mathieu Nicolas Momein et Antoine Palmier Reynaud Olivier Muller Daphné Roulin Bastien Roustan Kim Sohyun Noémie Sonck Sabrina Soyer et Sacha Béraud Robin Touchard Yooree Yang

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Yann Chateigné Emigrer On pourrait élaborer une hypothèse pédagogique à partir de Vue sur la mer, un projet initié en coopération par un étudiant en art, un jeune photographe-professeur-assistant dans la même école, un groupe d’autres étudiants-artistes et un studio de designers graphiques émergents : il y aurait deux sortes d’enseignement artistique. L’un se pense comme un monument, on y pose de larges fondations, on définit un périmètre, on circonscrit les plans d’un projet à l’image unitaire, monolithique — on fait école. L’autre opterait pour la multiplicité, la libre circulation voire une forme de nomadisme, de liberté et d’autonomie — quelque chose de plus horizontal, d’ouvert. Préférant une approche organique, une structure que l’on pourrait qualifier de végétale plus que de lithique (propre à la construction « en dur » citée plus haut), elle est difficile à fixer, identifier, communiquer ; elle n’induit pas nécessairement une tabula rasa pour se constituer en lieu et place d’un autre projet ; elle occupe des espaces vacants. Pour autant, il serait fallacieux de vouloir radicalement opposer ces deux modèles : le second, disons le modèle nomade, se fonde sur une pédagogie par emprunts, imitations, et déplacement ; l’autre, appelons-le modèle sédentaire, incorpore des formes de nomadisme à l’intérieur même de son édifice, et se les approprie : recontextualisations, retournements, interpénétrations, la complexité des questions soulevées ici trouve dans Vue sur la mer un révélateur des plus pertinents. En pliant un modèle sur l’autre, le projet de Romain Legros et Vlado Alonso montre dans le même temps les différences, les oppositions mais aussi les ressemblances, les isomorphismes. Le modèle historique, celui de la contreculture, d’un certain « esprit de Genève », celui du squat, rencontre les formes de l’industrie immobilière, universitaire et des annexes de l’académie, du logement collectif et de la gentrification d’un quartier-symbole de l’underground romand. Il est à mon sens précieux qu’une école, la HEAD – Genève, et un programme spécifique, WORK.MASTER, accompagne l’émergence d’une proposition telle que Vue sur la mer. Réalisée à l’initiative des étudiant-e-s eux-mêmes, elle substitue de manière subtile, transitoire, critique à l’exposition annuelle de fin d’année des écoles d’art qui ritualisent ainsi une forme de présentation-vitrine souvent par trop formatée. Sans pour autant tenir un discours venant surcoder son projet — tenu dans un lieu si fortement connoté à Genève — elle occupe selon moi un espace éminemment politique, tant aux plans urbanistiques, sociaux, artistiques que pédagogiques, sans pour autant mimer les discours autoritaires du politique lui-même. Vue sur la mer, c’est aussi, pour moi, et dans une ville qui a été le lieu de passage de tant de figures du déplacement, une image de la condition migrante, d’une pensée de la dislocation, de la mémoire de celles et de ceux qui ont vécu ailleurs, peut-être, justement, près de la mer et qui continuent, par-delà les distances, ouvrant des perspectives, creusant des lignes de fuite, de l’imaginer.

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Dorothée Baumann Après le vernissage En regard de son travail présenté à Vue sur la mer, Dorothée Baumann a invité le médium Charles-Philippe Lannes pour une intervention le jour du vernissage. Pendant deux heures, les visiteurs ont pu faire la queue devant une des chambres du bâtiment où M. Lannes les accueillait, une dizaine de minutes, utilisant son talent pour se projeter dans leur futur. DB Comment s’est déroulée, pour vous, cette expérience ? A un moment, vous étiez très fatigué. CPL Oui, après un moment, je ne pouvais même plus continuer, mais c’était très intéressant. Sur le plan humain, c’est vraiment passionnant. Les gens se livrent, pendant cinq à dix minutes, il y a eu une ouverture très forte. Par contre, c’était tout à fait différent de voir les gens seuls et de voir l’ambiance du groupe. En tête-à-tête, les participants étaient beaucoup plus vulnérables, comme s’ils lâchaient quelque chose en entrant dans ma pièce. Quand vous êtes en groupe, il existe une sorte de jeu de rôle, autant je les ai perçus très vrais en individuel, autant dès qu’ils sortaient, prenaient un verre, on sentait ce masque de groupe revenir. J’ai senti cette différence à chacune de mes pauses. DB Comment pouvez-vous sentir tout cela ? Comment en êtes-vous aussi sûr ? CPL Parce qu’il y a un inconscient collectif. Pendant ces deux heures, j’ai senti que les gens faisaient partie d’une même communauté. Un groupe dégage les mêmes sentiments qu’une personne, c’est pour cela que j’avais besoin de m’isoler avec chacun. Ce qui était très beau, ce qui m’a touché, c’était la venue des gens, l’entrée dans ma pièce. Et il y avait du monde, beaucoup voulaient me voir. Mais l’entrée dans la pièce, c’était très touchant, il y avait comme une ouverture, ils n’avaient pas beaucoup de temps, ils balançaient leurs frusques, ils étaient vrais. J’ai vu qu’ils avaient confiance, ça m’a fait chaud au cœur. DB Alors, ce genre d’expérience est très différent de celle que vous rencontrez dans votre cabinet ? CPL Ah oui, c’est différent, c’est tout à fait à part. Ça avait cette tournure de ce que vous appelez, je crois, une performance. Je ne pourrais pas faire cela tous les jours, c’est très fatigant. C’est comme si vous ouvriez un bouquin, vous en lisez une page, vous en ouvrez un autre, vous en lisez une page. Chaque personne est unique, et de rentrer comme ça, cinq minutes dans l’une, cinq minutes dans l’autre, à la fin j’étais un peu étêté, ça vous saoule. On saisit la tonalité de quelqu’un, comme on peut saisir l’essence d’un livre en en lisant deux pages au hasard, on ne commence pas forcément par l’introduction. En cabinet, ce n’est pas la même chose, ce ne sont pas les mêmes demandes. En cabinet, la demande c’est d’aller mieux. Et là, la grande demande c’était : Où vais-je ? Où cours-je ? Ils étaient tous étudiants, en fin d’année, et se posaient intérieurement toujours la même question, au moins au début de l’entretien : Est-ce que ça va tenir la route ? Est-ce que je vais réussir ? La question de l’inconscient collectif, ici, c’était ça : la réussite. Ce qui m’étonne c’est que, souvent, plus les gens sont talentueux, plus il y a de l’autosabotage. Leur pire ennemi, c’est eux-mêmes. Ils font un château de sable et au moment où il ne reste plus que le petit drapeau à mettre, ils sautent dessus. Il y a une peur de la réussite, beaucoup plus qu’une peur de l’échec. On sort 12

de l’anonymat, la réussite dans l’art, c’est vraiment un cataclysme, c’est une révolution. En fait, tout le monde veut cela, mais l’inconscient, le moi profond, est peut-être plus intelligent que le désir brut, il se méfie plus. Plus j’explorais les gens, plus je voyais qu’ils n’étaient pas si bêtes quand même. La réussite était donc la question générale. Mais, ce n’était pas une réussite comme on peut en rencontrer dans une école de commerce. C’est vraiment une réussite artistique qui est attendue, aucun ne m’a demandé quoi que ce soit sur une réussite matérielle.

DB Mais sur la vocation ? CPL Voilà oui, la vocation. Est-ce que je suis là où je devrais être ? Et, pour être honnête, j’ai vu des gens qui ne continueront pas dans cette voie. Mais heureusement qu’ils ont fait cela, c’est une teinte qu’ils garderont tout le temps, je n’ai pas vu d’inutilité. Ce qui était difficile aussi dans cette expérience, c’est ce côté élitiste de l’art. De tous les gens que j’ai vus, il y a en un ou deux qui vont percer, ou plutôt qui ont toutes les chances pour eux. Alors que du talent, il y a en a beaucoup, mais le talent ne suffit plus, tout rentre en jeu maintenant, le facteur chance, les connaissances… DB Mais vous avez senti que pour deux d’entre eux, c’était évident, c’est fou ? CPL Oui, évident. Un peu comme ma mère qui, aux Beaux-Arts, était avec ce français qui fait du noir tout le temps, il est hyper connu maintenant… Savage… Sauvage, je ne sais plus comment il s’appelle. Lui, ça a été la célébrité de son année. Et parallèlement, il y a des désillusions artistiques, ceux qui ne vivront pas de leur art. Mais pour tous, ce n’est pas inutile, car tous ces gens ont le cœur transformé. Il y a là quelque chose de très beau. Enfin, une petite précision quand même, car il y a un gros travail à faire sur l’égo. Ah ça, qu’est-ce qu’on pète plus haut que son cul ! Et en fait c’est un ennemi. Je ne le dis pas méchamment mais souvent, les gens comme ça, et bien ça ne marche pas. On entend moins, on écoute moins. Quand on se croit ceci ou cela, on a beaucoup moins d’ouverture. DB Il s’agirait pour vous d’une forme de déséquilibre ? CPL Oui, en lien direct avec une forme d’insécurité. J’ai senti beaucoup de vulnérabilité, l’art ne va pas sans une certaine fêlure. Il y avait beaucoup d’enfants gâtés matériellement, mais pas d’enfants gâtés émotionnellement, pas du tout. Ce n’est pas un hasard si c’est un peu blindé après, c’est une protection. Des études comme ça, ça devrait être le bonheur. Dans ce type de formation, il faudrait aussi travailler l’inconscient collectif, l’ambiance et l’entraide. Même dans l’art, même si c’est très individualiste, l’entraide c’est obligatoire. C’est ce qui manque, car il y a des tas de qualités partout, mais je n’ai pas senti de solidarité. Et c’est dommage, car tous l’attendent, tout le monde en souffre, c’est évident. Et comme tout le monde est mal, on finit par ressentir ce malaise. C’est le même sentiment qu’on ressent quand on entre dans une maison où il y a eu quelqu’un d’assassiné, on n’est pas bien, c’est omniprésent. Mais comme le monde de l’art est très dur, hélas, c’est aussi une formation quelque part. DB Alors que pourrait-on faire ? Que pourrait-on leur proposer ? CPL Moi, je parlerais à la tête pensante, et je demanderais de songer à relancer certaines activités basées sur l’entraide, où l’autre est indispensable mais aussi sur le retour de la joie. C’est ça, insuffler quelque chose de joyeux, de léger et de festif. 13


Laurent Schmid

forclos. Il faut l’entendre comme une transcendance de toute réalité d’expérience et donc comme l’Un universel et général de la connaissance.

La montagne du nord Si l’on suit la présentation de Cosmas Indicopleustès, ancien voyageur de commerce et plus tard moine de la Basse-Antiquité, ce ne devait pas être une sinécure, à l’époque. Dans son œuvre principale, Topographie chrétienne, il décrit comment les anges font glisser le soleil le soir derrière une montagne, afin de faire l’obscurité et présenter les étoiles. Cosmas, dont l’idée de la montagne du nord a été reprise par Arno Schmidt 1 et plus tard par Umberto Eco 2, connaissait très bien la Terre pour son époque, notamment au travers de ses nombreux voyages : Inde, Ceylan, Éthiopie, jusqu’à l’est du continent africain. Vers 550 apr. J.-C., et à un âge déjà avancé, il écrivit la Topographie chrétienne dont le but était la réfutation de la thèse ptolémaïque d’une Terre de forme sphérique. Motivé par sa foi, il avait pour objectif de développer un système compatible avec l’Ancien Testament. Dans cette vision du monde, défendue contre plusieurs scientifiques aristotéliciens de renom, la Terre est vue comme une surface quadrangulaire posée dans une sorte de caisse. Il place au centre une haute montagne lointaine et inaccessible, la montagne du nord, dont l’ombre fait le jour et la nuit. Sa cosmologie abstruse, construite avec une grande acuité à partir d’une astronomie mal comprise, de légendes de marins et de superstitions déguisées en science, semble à première vue défendable. Quelques contradictions inhérentes à la platitude de la Terre sont résolues par l’artifice de la montagne, du moins tant que cette dernière, maintenue à distance, reste inaccessible. Les nuits sont longues en hiver car le soleil tourne plus bas autour du mont, les phénomènes tels que le décalage horaire ou les ombres plus courtes dans les pays du sud trouvent une explication. Au fond, c’est un modèle théorique très élégant. Un canular sensationnel, une montagne de prestidigitateur. Mais une telle explication ne peut se permettre aucune contradiction intrinsèque. Pour pouvoir s’établir contre les autres cosmologies, elle ne donne pas de réponse aux questions critiques ni ne résout les problèmes soulevés, les preuves reculent dans le lointain, là où elles ne sont plus vérifiables. Il me plaît de temps en temps de construire en imagination un WORK.MASTER suivant de tels principes. J’y éprouve une même fascination que celle générée par les représentations captivantes de dystopies, de scénarios de fin du monde ou d’évocations de l’enfer. A quoi ressemblerait un WORK.MASTER dans un tel film d’horreur mental, où l’ombre d’une haute et lointaine montagne crée la nuit, où aucune contradiction au sein de la ligne n’est tolérée ? Des hypothèses naïves sont reprises sans vérification, pourvu qu’elles servent une grande cause. Les critères de qualité ne doivent pas être décrits, on suppose qu’ils sont suffisamment connus de tous. Ils ne doivent donc pas être discutés ni élaborés, c’est directement sur cette supposition que l’on travaille. Comme l’art répond à des aspirations et à des besoins humains originels, ces critères sont immanents et n’ont pas besoin d’être redéfinis à chaque fois. La marche à suivre est clairement définie dès le début, souvent en étapes communes. Ainsi peut-on planifier le déroulement de la formation à l’avance et tout le monde tire sur une même corde dans la même direction. Chacun pour soi, toutefois, et celui qui n’a plus assez de force est perdant. Mais tous connaissent le but et chacun travaille assidûment à l’atteindre. Il s’agit de la tradition d’un principe ordonnateur situé dans un absolu pur et 14

On demandait déjà une vue sur la mer à Zurich dans les années 80, la revendication était alors de raser les montagnes. « Rasez les Alpes, qu’on voie la mer. » La formulation d’un désir du mouvement des années 80, Opernhauskrawalle, désir qui se réfère à l’idée que dans une société fragmentée, les revendications d’un groupe social paraissent souvent absurdes aux yeux d’un autre. Ces revendications dépassaient la simple matérialité, exigeant des rêves même s’ils semblent irréalistes. La déception qui a suivi, du fait de l’absorption de cette culture par le marché et de l’évolution socio-politique générale vers un durcissement accru dans toute l’Europe, se fait sentir encore profondément et les effets paralysants s’étendent encore aujourd’hui dans la diffusion culturelle.

Illustration d’après Cosmas Indicopleustes, Christian Topography, éd. J. W. McCrindle, Calcutta 1897

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Et voilà que pour cette exposition, simplement, le mot est lancé, non plus comme revendication, mais dans une forme ouverte, qui oscille entre affirmation, souhait et imagination : Vue sur la mer. Point. Un premier jet hypothétique. Donc pas de montagne du nord dans un système qui fonctionne sans contradiction, au moins en surface, et qui n’admet aucune variante. Cette fois, directement, chambre avec vue sur le lac, situation idéale, mais formulée comme la supposition d’une possibilité. La différence par rapport à la supposition de Cosmas est lourde de conséquences : aucun rapprochement de l’objectivité ni du consensus n’est recherché, la vérité n’est pas posée comme un faux problème. Alors que le modèle de la montagne du nord sert à discréditer une autre théorie, à la neutraliser, et n’y réussit que par une revendication de la vérité, ceci est une variante parmi d’autres, mais ce qui est décisif est l’attitude qui la sous-tend, et elle ne saurait être plus claire. Le but est l’ouverture à ce qui est multiple, spécial, potentiellement surprenant et d’un nouveau genre. La déclaration comprend donc aussi ce concept qui vaut depuis la modernité, fondé par John Keats, de la Negative Capability 3, c’est-à-dire l’aptitude à se trouver au milieu d’incertitudes, de secrets et de doutes sans chercher avec irritation à se tourner vers les faits et la raison. Il s’agit de la capacité de tolérer la confusion ou le doute et même d’y trouver du plaisir. C’est aussi un plaidoyer pour un rapport ludique avec la variété et la complexité, qui représente aussi en dernière conséquence un appel à l’anticonformisme. Si nous acceptons dès lors cette audacieuse métaphore pour le WORK.MASTER, s’ouvre alors à nous un champ qui promet densité et profondeur. Elle correspond exactement à ce que le WORK.MASTER est censé représenter, à ce que nous voulons vivre et expérimenter dans ce projet. Toutefois, cela ne va pas sans exiger beaucoup des participants dès le début, parce qu’il est déjà difficile de simplement avancer sur un terrain glissant. La liberté des enseignants et des apprenants doit être aussi grande que possible : non seulement les contenus, mais aussi le rythme, la forme et la structure de cet échange doivent pouvoir être déterminés librement, pour que ces expériences puissent avoir lieu. Aucune de ces entités ne peut exister et fonctionner isolément, il est indispensable d’interréagir en permanence. Les points communs ont la même valeur que les différences, c’est le rapport avec eux, leur ancrage communicationnel qui est décisif. Comme John Dewey — qui considérait la théorie de la communication comme une théorie pédagogique de l’apprentissage par la recherche et qui citait Keats comme source d’inspiration importante — l’a plus tard souligné : même les découvertes en sciences naturelles ont un caractère hypothétique. 1 Arno Schmidt, Kosmas oder Vom Berge des Nordens Baden-Baden, 1955 / Cosmas ou la montagne du Nord, Tristram, 2006. 2 Umberto Eco, Baudolino, Milano, 2000. 3 Le célèbre extrait de sa lettre de 1817 à son frère : “I had not a dispute but a disquisition with Dilke, on various subjects; several things dovetailed in my mind, & at once it struck me, what quality went to form a Man of Achievement especially in literature & which Shakespeare possessed so enormously — I mean Negative Capability, that is when man is capable of being in uncertainties, Mysteries, doubts without any irritable reaching after fact & reason.” « Je n’ai pas eu de dispute avec Dilke, mais une enquête sur diverses questions; plusieurs idées ont convergé dans mes pensées, et j’ai tout à coup pris conscience de la qualité qui fait un grand homme, notamment en littérature, et que Shakespeare possédait à un degré aussi extraordinaire — je veux parler de la Negative Capability, c’est-à-dire l’aptitude à se trouver au milieu d’incertitudes, de secrets et de doutes sans chercher avec irritation à se tourner vers les faits et la raison. »

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Lili Reynaud-Dewar Nous sommes à l’avant-garde de la gentrification. Mais d’un autre côté, nous sommes des ramasseurs d’ordures J’aime déménager, faire des cartons, jeter ou donner des objets, des livres, des disques, de la vaisselle, abandonner des meubles. J’aime visiter des appartements et des ateliers. J’aime y emménager pour des durées que j’envisage toujours confusément comme limitées. Je déménage tous les deux trois ans environ. Ces dix dernières années, j’ai vécu dans quatre villes différentes, et je m’apprête à vivre dans une cinquième. Je ne serai pas propriétaire. Ou peut-être d’une caravane. Je ne conduis pas.

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« Etre locataire c’est penser la délocalisation et la relocalisation de soi, des choses que l’on possède, de connaissances et de matériaux, c’est se détacher de l’idée de propriété et de durabilité. […] Penser comme un locataire amène à questionner le lieu, son espace-temps, son découpage et les déplacements qu’il entraine. C’est une façon de penser la dislocation. […] Mais le fait d’être locataire amène à questionner de manière spécifique l’œuvre in situ. Comment organiser un lieu intérieur sans cloison à partir de multiples activités puisque ce lieu devra être rendu en l’état ? Comment penser une partition du lieu dans un temps limité ? Quels seront les modes de déplacement dans ce lieu réorganisé ? Comment penser à la fois une œuvre in situ et son déplacement ? Qu’est-ce qui sera déplacé, préservé, modifié ? » 1 Ces questions sont celles que se posait une de mes étudiantes à l’école des BeauxArts de Bordeaux, Caroline Bagot, dans son mémoire intitulé Les Disloquantes. Elle y envisageait l’artiste in situ comme un locataire. Au moment où s’ouvrait Vue sur la Mer, reprenant et élargissant sa définition, j’ai écrit un texte (publié dans Petunia, la revue que j’ai fondée avec Valérie Chartrain et Dorothée Dupuis) dans lequel j’énonce l’impossibilité pour une artiste femme de concilier son engagement artistique avec un titre de propriété immobilière. J’ai délibérément fait dévier les problématiques du mémoire de Caroline, centrées sur la question de l’œuvre, vers des questions liées à la vie privée de ses producteurs-trices, et j’ai encore plus délibérément pris le parti d’une prescription provocante. Décrivant comment l’artiste qui investit un lieu d’exposition est soumis(e) à un cahier des charges impliquant une restitution du lieu en « l’état », comment la durée de l’occupation est, un peu à la manière d’un bail locatif, paramétrée par des durées types (celle d’une exposition — s’inscrivant dans un programme — et de son montage), comment les directeurs-trices d’institutions, curateurs-trices, et galeristes semblent toujours, à la manière d’agents immobiliers, vanter les mérites des espaces qu’ils nous confient, comment à cela s’ajoutent des impératifs de maintenance liés aux œuvres que nous produisons — et parfois stockons — et comment ces impératifs ne sont pas sans rappeler ceux de la maintenance domestique, j’affirme : — d’une part, que les pratiques de l’exposition et de l’art produisent des conséquences tangibles et durables sur notre rapport aux espaces domestiques et aux titres juridiques qui nous en garantissent l’occupation, — d’autre part, que la propriété immobilière est une entrave au développement de la pratique d’une artiste femme.

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Ce faisant, est-ce que je glorifie la précarité et l’instabilité engendrées par les mutations économiques et technologiques foutraques de notre présent globalisé ? Est-ce que je mythifie, est-ce que j’idéalise la figure type de l’artiste du troisième millénaire ? Est-ce que j’adhère au consensus récemment décrit par le critique d’art allemand Diedrich Diederichsen ? « A travers ce consensus, la post-bourgeoisie va créer un mythe de l’artiste différent de celui qu’avait créé l’ancienne bourgeoisie, et en lequel elle croyait. Ce nouveau mythe, comme l’ancien, partage son enthousiasme pour des actes de libération et se base sur une image de soi idéale : un monstre excessif, hédoniste et puissant […] [mais, à l’inverse de l’ancien mythe, celui-ci se tient à distance de] tout engagement critique ou politique. Comme les nouveaux prolétaires de la performance, cet artiste embrassera le mouvement constant et l’instabilité en tant que valeurs culturelles, et il idéalisera la précarité. » 2 Ces mêmes questions et quasi-oracles pourraient être adressés aux commissaires et aux artistes de l’exposition Vue sur la Mer. En inscrivant leur projet d’exposition dans le nouveau bâtiment de la Ciguë, une coopérative d’habitation qui remédie, de manière temporaire, c’est-à-dire pendant la durée de leurs études, aux problèmes de logement rencontrés par les étudiants dans la ville de Genève, font-ils l’apologie d’un système qui résout des problèmes de façon provisoire et opportuniste, s’infiltrant dans les brèches et les interstices d’une réalité foncièrement inéquitable, mais qui ne cherche pas (aussi idéaliste que cela puisse sembler) à résoudre ces questions de manière pérenne et profonde ? En d’autres termes, ce projet est-il de nature pragmatique ou utopique ? Témoigne-t-il d’une capacité d’adaptation et d’absorption ou d’une volonté de changement et de critique radicale ? Et est-il aujourd’hui valide d’opposer ces termes ?

par des problèmes spécifiques. En occupant le bâtiment de la Ciguë pendant une courte durée avant que celui-ci ne soit investi par ses locataires effectifs, sans thématiser leur projet, mais au contraire en envisageant librement les paramètres de création de leurs travaux, les artistes de Vue sur la Mer s’infiltrent dans un interstice spatial et temporel, et y produisent des formes artistiques. La tension critique des œuvres de Vue sur la Mer réside justement dans leur capacité à investir librement et formellement des espaces vacants : de discussion, de spéculation (intellectuelle), d’échange. L’exposition permet de révéler les mécanismes oppressants de la précarité et de l’instabilité, sans s’y assujettir, et en affirmant le potentiel émancipateur de l’œuvre d’art et son autonomie de nature par rapport au champ politique. C’est-àdire non pas son indifférence et sa perméabilité au politique, mais bien sa capacité à contaminer physiquement et visuellement les lieux du politique, en poursuivant des buts qui lui sont propres. Cette contamination fonctionne à la manière de ce que l’écrivaine lesbienne radicale Monique Wittig appelle des chevaux de Troie. « Le cheval construit par les Grecs est sans doute aussi un cheval de Troie pour les Troyens, même s’ils le considèrent encore avec inquiétude. Il est barbare par sa dimension mais aussi par sa forme, trop brute pour eux, les efféminés comme Virgile les appelle. Mais plus tard ils s’attachent à l’apparente simplicité, dans laquelle ils voient de la recherche. Ils voient maintenant, toute l’élaboration que sa façon brute et rudimentaire a d’abord cachée. Ils en arrivent à voir comme étant forte, puissante, l’œuvre qu’ils avaient considérée sans forme. Ils veulent se l’approprier, l’adopter comme un monument à protéger à l’intérieur de leurs murs. Mais si c’était une machine de guerre ? » 4

En 1989, le vaste projet de Martha Rosler, If You Lived Here… réunissait à New York des artistes (apparentés au système de l’art ou ignorés par celui-ci), critiques et activistes autour des questions de la précarité du logement de la gentrification. Je ne vais pas revenir ici sur les diverses opérations menées sur la question du logement, qu’il s’agisse de réfléchir à des modalités différentes de planification urbaine, de développer des formes d’habitation provisoires « acceptables », ou d’accueillir les multiples questions engendrées par la transformation des grands centres urbains contemporains ainsi que les personnes précisément exclues par cette transformation. Lors de Artists’ Life / Work : Housing and Community for Artists, un colloque organisé pendant If You Lived Here…, qui se penchait sur l’instrumentalisation des artistes dans les processus de gentrification, l’artiste et chorégraphe Yvonne Rainer déclarait « Nous sommes à l’avant-garde de la gentrification. Mais d’un autre côté, nous sommes des ramasseurs d’ordures » 3. Ce faisant elle énonçait, de façon provocante et imagée, une ambiguïté, ou plutôt une duplicité, propres à la position de l’artiste. Cette duplicité me parait symptomatique de la façon dont les artistes de Vue sur la Mer ont investi un espace d’habitation hautement symbolique, le traitant en apparence exactement comme s’il s’agissait d’une institution artistique quasi muséale, du moins pérenne, et naviguant ainsi entre fantasmes de visibilité de leur travail et réalisme pragmatique quant à leurs conditions de vie. Je ne cherche pas à comparer ou opposer l’exemplaire If You Lived Here… et Vue sur la Mer, même s’il me semble intéressant de voir comment l’exposition de Genève, à l’inverse du projet new-yorkais initié par Rosler plus de vingt ans plus tôt, regroupait des œuvres ne s’attaquant pas directement à la question politique du logement. Ces œuvres étaient produites par des artistes représentatif(ve)s d’une communauté relativement circonscrite et épargnée, celle des étudiant(e)s, néanmoins touchée 34

1 Caroline Cagot, Les disloquantes, ou l’habitation sous tension, Mémoire DNSEP 2010, sous la direction de Jean-Phillipe Halgand. 2 Diedrich Diederichsen, On (Surplus) Value in Art, collection Reflections, Witte de With Publishers / Strenberg Press, 2008, Berlin. 3 Yvonne Rainer citée par Nina Montmann in (Under) Priviledged Spaces: On Martha Rosler’s “If You Lived Here...”, e-flux journal 9, octobre 2009, New York. 4 Monique Wittig, Le Cheval de Troie (1984) in La Pensée Straight, éditions Amsterdam, 2007, Paris.

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Guillaume Kaser Président de la Ciguë Un espace-temps ouvert entre deux privatisations En décembre 2010, le comité de la Ciguë 1 a réfléchi à la façon d’inaugurer son bâtiment en construction au 26 rue de la Coulouvrenière. Une série de questions a alors émergé : comment valoriser la démarche architecturale mise en oeuvre ? Comment partager ce travail avec la population, le public ? Comment marquer l’inauguration de ce bâtiment au centre de Genève ? Comment montrer un immeuble dans cette très courte phase de sa vie qui le fait passer de chantier, d’objet en construction à immeuble de logement exploité par son propriétaire ? Enfin comment donner à vivre à ressentir un travail architectural, une création collective de spécialistes ? Pendant la construction, l’immeuble en devenir, est le domaine exclusif des ouvriers, des apprentis, contremaîtres, des ingénieurs, des machines, du bruit, de la poussière : univers technique, dangereux, spécialisé, confiné par une enceinte de chantier, il est interdit au public, défense d’entrer ! Les intrus qui s’y aventurent sont toisés de haut et suspects : vous ne travaillez pas sur le chantier : qu’avez-vous à faire là ? Puis, dès que l’immeuble est achevé et dès que le dernier nettoyeur eut essuyé la dernière des vitres, le propriétaire s’empresse de louer son bien, au meilleur prix et dans les meilleurs délais. Alors, la création des professionnels change de maître ; l’appartement devient la chose des locataires, le « chez-soi » ; n’entrent que les membres de la famille, les animaux domestiques, les amis, les intimes. Pour accéder, les autres types d’humains doivent alors « connaître le code », négocier, prendre date et montrer patte blanche. Vue sur la Mer a cassé ce schéma récurrent de la production des logements et ces deux types de privatisations : celle des professionnels et celle des habitants. Presque finis, les travaux ont été suspendus trois semaines. Les ouvriers ont vu arriver les artistes étudiants et tout le matériel nécessaire au montage de l’exposition. Il a fallu se parler et travailler ensemble. Partager l’espace, construit par les uns et utilisé par les autres, le temps du montage et du démontage de l’exposition. Vue sur mer a généré l’interaction du monde ouvrier et du monde de l’art grâce aux étudiants de la HEAD : rares sont les occasions de se croiser, de travailler ensemble et de se voir de près, de s’intéresser aux affaires de l’autre. Volontairement ou non, le dispositif de Vue sur la Mer a forcé ces interactions. Il a fallu coordonner les travaux des entreprises, comprendre leurs contraintes et leurs logiques et accueillir les œuvres des étudiants : embouteillage assuré dans l’ascenseur ! Vue sur la mer a marqué un temps d’arrêt au processus hyper-rapide, mercantile et justement sans-transition que représente l’impératif de rendement du fameux respect du planning, de la fin des travaux et du début de la location. Vue sur la mer a ouvert un immeuble au public deux semaines durant : les espaces de vie ont été investis par les œuvres des étudiants et de leurs invités, mais aussi par les visiteurs : entrepreneurs, architectes, familles, futurs habitants, étudiants, ouvriers, voisins, fonctionnaires, artistes, professeurs, assistants, politiciens, banquiers… Le public a arpenté l’immeuble, visité, flâné, apprécié les œuvres et les appartements, l’espace bâti. Pistes brouillées, à coup sûr espace en transition, espace en question : immeuble locatif HLM ? Galerie ? Musée ? Chantier ? La Ciguë est très heureuse et honorée d’avoir pu contribuer à la réussite de cette exposition en mettant généreusement à disposition son bâtiment. Nous avons pu concrétiser le slogan des coopératives d’habitation : plus qu’habiter ! Merci ! ¹ Ciguë : coopérative de logement pour personne en formation, Genève

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AMI, installation Vernissage, 30 juin 2011 Editions hard copy 2011, Romain Legros, Argelàs, journal, 38 × 28.5 cm, 64 p., design Nadja Zimmermann, 2011 Sarah Burger, jury de diplôme WORK.MASTER Die Rückseite der Materie, 2011 Fetisch; Atmen; Wolke. Kampf, 2011 I start to like maths, 2011 Bâtiment de la Ciguë, 26 rue de la Coulouvrenière, architecte Charles Pictet AMI, signalétique de l’exposition Pricasso, vidéo documentant l’exécution du portrait de Renaud Loda, 2011 Romain Hamard, A brief history about Joe, Woody and le Village Suisse, 2011 Chloé Delarue et Florimond Dupont, Concrete Island, 2011 Jérémy Chevallier, avec Paul Courlet et Guillaume Fernez, Projet disques rayés, 2011 Vlado Alonso et Romain Legros Dorothée Baumann, Vidéo Pierre, 4’30’’, vidéo Charly, 11’30’’, 2011 Nicolas Momein, Ensemble de sculpture par exemple, technique mixte, courtesy de l’artiste et Galerie White Project, 2011 Vue sur la mer, la soirée, en collaboration avec la Barje, 30 juin 2011 Romain Hamard, A brief history about Joe, Woody and le Village Suisse, 2011 Pierre Leguillon, La Promesse de l’architecture, séance de projection, 2011 Vernissage, 30 juin 2011 Lancement des Editions hard copy 2011 Vernissage, 30 juin 2011 Bâtiment de la Ciguë, 26 rue de la Coulouvrenière, architecte Charles Pictet Pierre Leguillon, La Promesse de l’architecture, séance de projection, 2011 Dorothée Baumann, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Vernissage, 30 juin 2011 Constance Allen, From Dusk to Dawn And All Over Again, 2011 Vernissage, 30 juin 2011 Dorothée Baumann, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Vernissage, 30 juin 2011 Jérémy Chevallier, avec Paul Courlet et Guillaume Fernez, Projet disques rayés, 2011 Vue sur la mer, la soirée, en collaboration avec la Barje, 30 juin 2011 Bâtiment de la Ciguë, 26 rue de la Coulouvrenière, architecte Charles Pictet Sarah Burger, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Pierre Leguillon, La Promesse de l’architecture, séance de projection, 2011 Jérémy Chevallier, avec Paul Courlet et Guillaume Fernez, Projet disques rayés, 2011 Vue sur la mer, la soirée, en collaboration avec la Barje, 30 juin 2011 Natalia Comandari, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Vue sur Genève Sarah Burger, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Natalia Comandari, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Romain Graff, ensemble de photographies, tirages pigmentaires, 80 × 63.5 et 100 × 66 cm Natalia Comandari, jury de diplôme WORK.MASTER, 2011 Pierre Leguillon, La Promesse de l’architecture, séance de projection, 2011 Nicolas Momein, Sans titre, acier, courtesy de l’artiste et Galerie White Project, 2011 Robin Touchard, Monolithe, 2010 – 2011 Sabrina Soyer et Sacha Béraud, Chaîne, 2011 Nelly Haliti, Hoarding, 2011

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Aldric Mathieu, Fenêtre, 2011 Sabrina Soyer et Sacha Béraud, Chaîne, 2011 Daniel Otero Torres, Epouvantail, 2010 Daphné Roulin, A l’heure où nous nous serrions l’un contre l’autre, 2011 Olivier Muller, Pièce montée, 2011 Dorothée Baumann, Pleasure Arousal Dominance, 2011 Daniel Otero Torres, Welcome, 2010 Nicolas Momein, Sculpture par exemple № 12, résine polyester, courtesy de l’artiste et Galerie White Project, 2010 Yooree Yang, Double paysage, 2010 Sarah Burger, I start to like maths, 2011 Sinyoung Park, Plongeoir, 2011 Antoine Palmier-Reynaud, Heavy rain, 2010 Chloé Delarue et Florimond Dupont, Concrete Island, 2011 Renaud Loda, Look at me now, 2011 Dorothée Baumann, Pleasure Arousal Dominance, 2011 Natalia Comandari, Torito Denbow, 2011 Romain Graff, Sans titre, tirage pigmentaire, 2011 Li Li, Vernissage, 2011 Natalia Comandari, Torito Denbow, 2011 Kim Sohyun, Le déversement, 2011 Romain Hamard, A brief history about Joe, Woody and le Village Suisse, 2011 Bastien Roustan, Sans titre, paysage #2, 2011 Nicolas Frémion, Saluez le Duce, 2011 Aurélien Lemmonier, Non-Lieu, 2011 Ingrid Kaeser, The love that won’t shut up, 2011 Noémie Sonck, 1. Sans-titre, 2010 Daniel Otero, Juancho, 2011

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Exposition Vue sur la mer Commissariat de l’exposition Romain Legros, en collaboration avec Vlado Alonso Avec le soutien de Laurent Schmid et Fouad Bouchoucha 27 juin — 9 juillet 2011 Bâtiment de la Ciguë Rue de la Coulouvrenière 26 CH-1204 Genève Publication Directeur de publication  Jean-Pierre Greff Auteurs des textes Dorothée Baumann, Yann Chateigné, Guillaume Kaser, Lili Reynaud Dewar, Laurent Schmid Crédits photographiques Vlado Alonso, Baptiste Coulon, Stéphane Pecorini Conception graphique AMI — Adeline Senn, Martin Maeder, Ismaël Abdallah Impression Imprimerie 3B, Genève — Nicolas Salvadori Editeur Haute école d’art et de design — Genève Boulevard James-Fazy 15 CH-1201 Genève www.hesge.ch/head © les auteurs, les ayants droit et la Haute école d’art et de design — Genève, 2013

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