6 minute read

aux Philippines

Encadré 4.4 Modalités de recensement collectif pour l’accueil et l’enregistrement : le Listahanan 2015 aux Philippines

Le Listahanan philippin (connu officiellement sous le nom de Système national de ciblage des ménages pour la réduction de la pauvreté [NHTS-PR]) est un registre social qui rassemble des informations sur les caractéristiques socio-économiques des ménages et des familles à l’échelle nationale. Le formulaire d’évaluation familiale (FAF) du Listahanan 2015 contient 45 champs de questions ainsi qu’un questionnaire communautaire avec 11 champs de questions. Les données du Listahanan sont utilisées par de nombreux programmes sociaux, notamment le transfert monétaire conditionnel 4Ps, la pension sociale pour les personnes âgées démunies et l’assurance maladie subventionnée PhilHealth, ainsi que par 1095 entités administratives locales et divers autres utilisateurs. Par suite de la vague d’enregistrement de 2015, le Listahanan contient les enregistrements de 15 millions de ménages sur l’ensemble du pays (environ 75 % de la population), dont 5,2 millions classés comme pauvres et prioritaires pour les programmes gouvernementaux. La vague d’enregistrement de 2015 a été réalisée en seulement six mois en utilisant les modalités, instruments et techniques suivants :

n La principale modalité d’accueil et d’enregistrement a été l’approche de recensement au porte-à-porte, in situ au domicile des personnes enregistrées. Des démarches à la demande ont également été utilisées pendant la phase de validation communautaire pour permettre aux ménages d’être enregistrés s’ils n’avaient pas été pris en compte par la vague d’enregistrement. n Les questionnaires sur papier ont été complétés par une collecte de données assistée par ordinateur. Quelque 13000 tablettes Android et 4500 ordinateurs portables ont été achetés pour faciliter la collecte de données et la supervision.

Les tablettes ont été déployées principalement dans les zones urbaines où les connexions Internet étaient plus fiables pour la communication des

données. Les ordinateurs portables disposaient d’applications spécialisées, telles que le système de gestion des données pour les superviseurs et les coordonnateurs de zone. Cette application a permis aux superviseurs de surveiller la réalisation quotidienne des évaluations des ménages par les enquêteurs et de suivre le calendrier de l’enquête. Elle a également facilité des révisions plus rapides et des vérifications ponctuelles par les superviseurs de zone, ainsi que des routines de validation automatisées pour détecter les incohérences. Les questionnaires papier ont été utilisés principalement dans les zones rurales où l’approvisionnement électrique pour la recharge des appareils et la connectivité Internet sont problématiques. En moyenne, il a fallu 30 minutes pour remplir chaque questionnaire électronique, à comparer aux 33 minutes nécessaires pour un entretien auxquelles s’ajoutent 19 minutes supplémentaires pour la saisie des données à l’aide de questionnaires papier. n Une formation approfondie, des communications et des activités de sensibilisation ont également été utilisées. L’enregistrement de 2015 a largement utilisé des vidéos pour la formation dans tout le pays (notamment pour les 39000 intervenants sur le terrain). Ces supports de formation vidéo ont beaucoup aidé à la cohérence des messages, des concepts et des protocoles, ainsi qu’aux contrôles de qualité. Le Département philippin de la protection sociale et du développement est également reconnu pour son utilisation généralisée des communications stratégiques et opérationnelles, et le Listahanan 2015 a largement utilisé ces outils. Les équipes du Listahanan ont également utilisé des techniques de sensibilisation proactives pour associer les autorités et les communautés locales et pour atteindre les populations marginalisées, telles que celles des zones géographiquement dispersées et les sans-abri.

Source : Velarde, 2018. Note : 4Ps = Programme Pantawid Pamilyang Pilipino.

L’approche impulsée par des gestionnaires de programme est souvent périodique et ne permet généralement pas d’enregistrer la totalité de la population, en particulier dans les contextes où les financements et les capacités sont limités. Avec l’approche impulsée par des gestionnaires, l’accessibilité aux services n’est ouverte que périodiquement (généralement tous les trois à cinq ans) au lieu de permettre une inclusion continue. La décision de procéder à des enregistrements moins fréquents est généralement motivée par des ressources limitées pour les budgets des programmes de prestations et de services basés sur les informations recueillies lors de cette forme d’enregistrement. Elle peut également traduire des contraintes de capacité dans ce domaine, notamment l’existence de structures ou de capacités institutionnelles adéquates au niveau local pour mener à bien des processus à plus haute fréquence. Mais même lorsque l’accessibilité aux services est ouverte à tous à un moment précis, il est toujours difficile d’enregistrer tout le monde : à ce jour, aucune vague d’enregistrement collectif n’a couvert 100 % des ménages. Plusieurs pays ont toutefois enregistré plus de 70 % de la population au moment où l’enregistrement a été effectué5 .

Des quotas d’enregistrement sont parfois utilisés dans les environnements où les ressources et les capacités sont limitées et où l’exclusion échappe dans une certaine mesure au contrôle des acteurs impliqués dans les efforts d’enregistrement. De nombreux pays utilisent des quotas pour limiter le nombre de ménages qui peuvent être enregistrés. Ces quotas sont généralement fixés en pourcentage des ménages d’une localité particulière (district ou municipalité) ; parfois le même pourcentage est employé pour chaque localité pour des raisons politiques. Dans certains cas, ce sont les communautés elles-mêmes qui déterminent quels ménages enregistrer en priorité, soit par l’intermédiaire des dirigeants locaux, soit lors de réunions communautaires. Ces approches peuvent tirer parti des connaissances locales pour aider à donner la priorité aux plus pauvres. Dans certains cas, les quotas sont utilisés dans le but de ne pas renforcer l’exclusion. Par exemple, dans le cadre de la généralisation du Filet de sécurité sociale productif en Tanzanie en 2014, des quotas d’enregistrement ont été fixés parce que le programme, qui se compose de multiples interventions, ne pouvait couvrir que les 15 % de la population vivant dans l’extrême pauvreté ou vulnérables à celle-ci, plutôt que la totalité des personnes vivant sous le seuil de pauvreté (Banque mondiale, 2016). Des cibles opérationnelles avec un nombre plus élevé de questionnaires d’enregistrement ont été établies pour augmenter les chances d’inclusion des personnes les plus démunies, et les communautés ont indiqué quels ménages devaient être inscrits en priorité. Les quotas peuvent également aider à gérer les attentes dans des contextes où les ressources sont limitées. Pourquoi enregistrer une grande partie (voire 100 %) des ménages et susciter des attentes si les programmes ne peuvent sélectionner qu’un petit pourcentage ou un nombre limité de ménages éligibles et inscrits à un ou plusieurs programme(s)? Cependant, des efforts sont nécessaires pour atténuer les risques associés à ces ouvertures partielles, notamment (1) une bonne communication pour gérer les perceptions en matière d’équité et de transparence sur les raisons pour lesquelles certains sont exclus, (2) un processus systématique pour valider les décisions de la communauté afin de minimiser une éventuelle reproduction des inégalités locales existantes (par exemple, certains segments défavorisés sont exclus parce qu’ils sont moins informés ou moins connectés) et (3) différents canaux (tels qu’un mécanisme de gestion des réclamations [MGR] pour traiter les questions d’exclusion ou d’inclusion incorrecte.

Quelques pays qui appliquaient une approche impulsée par les gestionnaires de programmes ont commencé à intégrer des fonctionnalités de l’approche à la demande. Des équipes mobiles peuvent par exemple mettre en place des bureaux d’enregistrement temporaires dans des régions isolées. Un bureau temporaire pourrait être associé à l’approche à la demande, car les clients ont une démarche volontaire de s’inscrire dans le processus et supportent les coûts du déplacement physique. Toutefois, il relève principalement de l’approche impulsée par les gestionnaires de programmes, car ce sont ces derniers qui provoquent l’enregistrement et en déterminent le calendrier; les bureaux sont en effet temporaires, ouverts uniquement pendant la durée de la campagne d’enregistrement collectif. Le Pakistan a expérimenté des bureaux temporaires en plus des méthodes de porte-à-porte lors de sa vague d’enregistrement collectif de 2018-2019 (encadré 4.5). De manière plus ou moins similaire, dans d’autres pays, le client prend l’initiative de se rendre à un événement d’enregistrement initial pour être présélectionné avant l’enregistrement,