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7.4 Questions clés à considérer en cas de sous-traitance des services d’emploi et de formation

Encadré 7.4 Questions clés à considérer en cas de sous-traitance des services d’emploi et de formation

Au moment de sous-traiter des services d’emploi ou de formation aux compétences, il convient de garder à l’esprit certains éléments importants :

n Comment un marché peut-il être concurrentiel lorsqu’il n’y a pas suffisamment de fournisseurs de services de qualité? n Comment amener un prestataire privé à desservir des zones « à coût élevé »? n Quelles incitations peuvent amener les fournisseurs privés à desservir les populations difficiles à atteindre? n Comment sélectionner les fournisseurs de services potentiels lorsqu’il n’y a pas suffisamment d’informations sur la « qualité » ex ante? n Comment inciter les prestataires de services à fournir des services de qualité, et comment appliquer un contrôle et des normes de qualité?

Il est facile de considérer les contrats fondés sur la performance comme une règle d’or pour la passation de contrats de fourniture de services, étant donné qu’ils transfèrent le risque de non-performance sur le prestataire. Ce type de contrat peut sans nul doute améliorer l’efficacité (Vinson, 1999), mais lorsqu’il est « non contrôlé », il peut pervertir la fourniture des services en incitant à promouvoir l’efficacité au détriment de la qualité. Une partie du problème réside dans la difficulté de déterminer et mesurer les résultats de qualité examinés dans ce chapitre. Par exemple, si le contrat/les résultats ne sont pas correctement définis, les fournisseurs peuvent privilégier les objectifs faciles à atteindre au détriment de ceux plus difficiles à réaliser, comme dans l’« écrémage » des clients des services d’aide à l’emploi, lorsque le fournisseur préfère les placements immédiats aux emplois durables à long terme ou oriente la prestation des services vers les personnes les plus « employables » au détriment de celles qui ont besoin de plus d’aide pour trouver un emploi.

Lorsque la structure de rétribution est bien conçue, le financement fondé sur les résultats peut contribuer à accroître significativement la performance tout en permettant un transfert efficace des risques liés à la fourniture des services de l’acheteur public au prestataire externalisé. Il peut toutefois être difficile de trouver le bon équilibre entre la performance/ les résultats et le risque pour les prestataires. Plus l’accent est mis sur la performance, plus le risque de non-paiement ou de paiement réduit est élevé pour le prestataire. Dans certains cas, il peut être plus efficace d’offrir des primes aux prestataires pour qu’ils maintiennent un certain taux d’achèvement plutôt que de les pénaliser pour les abandons.

Un nombre croissant d’expériences montre que l’accent doit être mis sur les résultats lors de la passation et de la gestion des contrats (GPL, 2016, 2017; Mansour et Johnson, 2006). Ce sont la capacité de gestion et les pratiques de passation des marchés qui détermineront l’efficacité de la prestation externalisée. Dans l’ensemble, il est conseillé d’établir des plans de manière stratégique, en formulant clairement les objectifs et les problèmes à résoudre par le service (social, d’emploi); d’intégrer des résultats qualitatifs dans le cadre des performances; d’utiliser des données (qualitatives et quantitatives) pour comprendre les besoins de la population; et de fixer des objectifs appropriés et réalistes pour les programmes. Laisser aux prestataires la possibilité de proposer de nouvelles interventions et de s’intéresser aux domaines sur lesquels il existe peu de données, et réserver des fonds pour l’évaluation. Enfin, même si la conformité est importante, il faut également que les pouvoirs publics et les contractants puissent aborder ensemble les questions de performance.

La passation des marchés de services dans des environnements où la capacité est faible présente des difficultés supplémentaires. Par exemple, à ses débuts, pour qu’un marché de prestataires se développe, il peut être nécessaire de réduire le risque pour le prestataire et donc de mettre moins l’accent sur la performance, puis d’accroître progressivement cette composante. Le suivi des activités étant plus aisé que celui des produits ou des résultats, il peut également être préférable, lorsque le contexte est difficile, de passer progressivement au suivi des produits et résultats.

Sources : élaboré sur la base de Vinson (1999); GPL (2016, 2017); et Mansour et Johnson (2006).

Normes de qualité pour la fourniture de certains services sociaux et d’emploi

En plus des modalités de mise en œuvre et des dispositions institutionnelles, l’autre facteur majeur de l’efficacité des services est la qualité de leur fourniture8. La fourniture des services sociaux et d’emploi est un processus de gestion complexe, étant donné la diversité des risques et des obstacles auxquels les services entendent s’attaquer, et le haut degré de spécialisation ainsi requis. En ce sens, il est essentiel que les pays définissent et appliquent un ensemble de normes de qualité pour les services. Même si la fourniture des services varie considérablement en fonction des contextes nationaux, il n’en existe pas moins un consensus sur les normes de qualité générales applicables. Le Cadre volontaire pour la qualité des services sociaux (2009) de l’Union européenne propose sept indicateurs à utiliser pour garantir la qualité des services, non seulement sociaux, mais aussi d’emploi. Dans ce cadre, les services doivent s’efforcer de respecter les sept principes fondamentaux suivants, à savoir être :

l Disponibles, en assurant aux utilisateurs un accès à une large gamme de services sociaux afin de répondre de manière appropriée à leurs besoins, et idéalement en leur garantissant une liberté de choix et un emplacement pratique; l Accessibles, en facilitant l’accès aux services de ceux qui en ont besoin, avec des informations et des conseils impartiaux sur les services et les prestataires disponibles; les personnes en situation de handicap doivent avoir un accès garanti aux services, aux informations et à la communication; l Abordables, c’est-à-dire gratuits ou à un coût raisonnable pour ceux qui en ont besoin; l Centrés sur les personnes, en répondant en temps voulu et de manière flexible à l’évolution des besoins et de l’environnement (physique, intellectuel, culturel et social) de l’individu, afin d’améliorer sa qualité de vie; l Complets, en répondant aux multiples besoins, capacités et préférences des utilisateurs avec des services intégrés; l Continus, non seulement en assurant la continuité de la fourniture des services pendant toute la durée

d’un besoin, mais également, en répondant aux besoins de développement à long terme des utilisateurs; et l Axés vers les résultats, en se concentrant principalement sur les avantages pour les utilisateurs, tout en tenant compte des éventuels avantages pour les familles et les communautés, et en incluant des processus d’évaluation et de retour d’information continus (Comité de la protection sociale de l’UE, 2010).

Les contraintes budgétaires et autres limitations programmatiques rendent difficiles la définition et le respect de certaines normes de qualité. Celles-ci décrivent le principe général à sauvegarder, et même si la plupart des pouvoirs publics souhaiteraient idéalement établir des normes de qualité élevées pour tous les services, leur mise en application n’est pas nécessairement possible dans tous les cas, et en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. C’est pourquoi les pays fixent des normes de qualité en suivant une logique de niveaux de qualité progressifs. Les tensions entre la qualité (et la couverture) des services et les contraintes budgétaires définissent les niveaux minimaux de l’échelle de qualité, et des systèmes de certification sont souvent mis en place pour encourager des niveaux de qualité plus élevés dans la prestation des services. Dans le cas des services de développement, d’éducation et de soins de la petite enfance (ESPE), le niveau minimum des normes de qualité comporte généralement des aspects liés à la structure des bâtiments, à un personnel suffisant et à des installations adéquates, mais chaque pays définit ces normes minimales en fonction de ses préférences et de ses contraintes. En général, ces normes minimales doivent être respectées pour pouvoir ouvrir un établissement d’ESPE. Des difficultés apparaissent lorsque les services ne sont pas formellement soumis à des normes de qualité, comme dans le cas des sessions de développement familial liées aux programmes de transfert monétaires. Lorsque les pays disposent d’une assurance chômage, les pouvoirs publics sont davantage incités à améliorer les services d’emploi afin de réduire la population cible de cette assurance. En outre, plus l’économie informelle est importante dans un pays, plus la demande de services d’emploi est faible et plus les incitations à améliorer leur qualité sont maigres (Auer, Efendioglu et Leschke, 2008).

En plus des normes de qualité générales présentées plus haut pour la fourniture des services, des critères de qualité spécifiques peuvent accompagner les services ciblant un groupe démographique ou vulnérable particulier. Dans les sous-sections suivantes, les ensembles de normes de qualité associés à quelques groupes de population et services sélectionnés sont identifiés afin de décrire la manière dont différents pays mettent en œuvre les normes de qualité et d’offrir quelques exemples de décisions de hiérarchisation prises par certains pays pour définir des niveaux minima et des augmentations progressives de la qualité de la fourniture des services. Le tableau 7.6 résume les principales normes de qualité des services destinés aux enfants, aux jeunes, aux personnes âgées et aux chômeurs.

Services de développement, d’éducation et d’accueil de la petite enfance

La qualité des services d’ESPE peut être améliorée par diverses actions. Le recrutement d’un personnel qualifié, une formation continue et des conditions de travail favorables sont essentiels à la fourniture de services d’ESPE de qualité. En outre, des ratios enfants par adulte et des groupes d’une taille adéquate peuvent aider le personnel à adopter des pratiques réfléchies et innovantes. Le programme éducatif est un autre élément important de la qualité des services d’ESPE ; lorsque ceux-ci sont de bonne qualité, ils combinent l’éducation et les soins pour un développement holistique des enfants. Ils répondent également aux besoins des enfants aux différents stades de leur développement et facilitent un apprentissage actif chez les enfants, en encourageant les activités initiées tant par le personnel que par les enfants. Enfin, les services d’ESPE de bonne qualité cherchent à impliquer les parents, à inclure des enfants différents et à établir des rôles et responsabilités claires pour toutes les parties prenantes.

En définissant des normes de qualité pour les services d’accueil de la petite enfance, les pays se concentrent sur la qualité structurelle et des processus. Aux États-Unis, en Europe et dans d’autres économies à revenu élevé, le principe est d’avoir des normes d’autorisation strictes pour le fonctionnement des crèches ainsi que des systèmes de certification garantissant la qualité structurelle (infrastructure, sécurité et programme). Les pays à revenu faible ou intermédiaire peuvent avoir nettement plus de difficultés à appliquer des normes de qualité structurelle strictes (Araujo, Dormal et Schady, 2017 ; Lopez Boo, Araujo et Tome, 2016). Les données montrent de plus en plus qu’une fois que la qualité structurelle a atteint une qualité minimale, il vaut mieux que les services d’ESPE concentrent leurs efforts et leurs ressources financières sur la qualité du processus plutôt que sur la qualité structurelle. En ce qui concerne la qualité du processus, l’expérience des soignants et leur capacité à entretenir des interactions de qualité avec les petits sont fortement associées à la qualité du développement des enfants fréquentant les programmes d’ESPE. Les éducateurs expérimentés sont plus à même de favoriser des interactions de haute qualité et d’accroître leur fréquence lorsque le ratio enfants/éducateur est adéquat et gérable. Notons toutefois que l’expérience d’un soignant n’est pas nécessairement déterminée par son niveau d’instruction. Par exemple, au Pérou, des programmes d’ESPE ont recruté des mères de la communauté ayant de l’expérience dans l’éducation des enfants et leur ont offert une formation (Araujo, Dormal et Schady, 2017).

Services pour les jeunes à risque

La qualité des services fournis aux jeunes dépend en très grande partie du fait qu’ils soient fondés sur les droits, participatifs et intersectoriels. La participation des jeunes aux principaux aspects des services, tels que la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des programmes, garantit que ceux-ci répondent à leurs besoins. Une telle approche tient compte des capacités cognitives et sociales émergentes des jeunes et de leur développement en tant qu’individus et citoyens. Il peut toutefois s’avérer très difficile de faire participer les jeunes à l’amélioration de la qualité des services. Les cycles d’amélioration de la qualité des services sont longs, dépassant généralement la durée de la fréquentation des programmes et services par les jeunes. En outre, le développement social et psychologique des jeunes est lié aux résultats obtenus dans des secteurs, tels que l’éducation, le travail et la santé. En outre, la formation et l’assistance technique du personnel, ainsi que des conditions d’emploi satisfaisantes, sont capitales pour garantir des interactions et des pratiques pédagogiques de meilleure qualité avec les jeunes (Smith et coll., 2012),