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2.2 Adapter les modèles opérationnels pour relever les défis de la coordination et de l’inclusion

Techniquement, le cadre doit respecter les normes d’architecture informatique orientée services. De plus, l’interopérabilité requiert l’utilisation d’identifiants uniques dans les systèmes d’information, de façon à permettre le cas échéant de recouper les différentes données des personnes et dans la mesure où l’établissement de cette correspondance est autorisé.

Étant donnée la complexité des programmes de protection sociale impliquant de grands débits de données et de transactions, la confidentialité et la protection des données sont primordiales. Les organismes de mise en œuvre accordent beaucoup d’attention et consacrent des ressources significatives à leurs systèmes informatiques et à leurs référentiels de données, afin de s’assurer qu’ils sont bien gérés et sécurisés, et qu’ils leur permettent de soutenir les programmes de protection sociale en remplissant leurs missions. Les systèmes de mise en œuvre de protection sociale peuvent recueillir et utiliser des données très sensibles, notamment (1) des informations sur l’identité personnelle, (2) des données à caractère personnel sensibles, (3) des informations socio-économiques (4) des informations sur l’emploi et le chômage, (5) des informations sur le niveau de handicap et (6) des informations hautement confidentielles sur les divers risques sociaux auxquels sont exposées les personnes et les familles. Comme les systèmes intégrés d’information sociale nécessitent que certaines informations soient partagées entre les différents acteurs, la protection de ces informations doit être assurée pour garantir que les données personnelles restent précises et sécurisées, et qu’aucune personne non autorisée n’y accède. Voir la section Protection des données, confidentialité et sécurité dans le chapitre 4.

Enfin, certains gouvernements s’orientent vers l’adoption de centres de données partagés pour gérer les coûts des passations des marchés, des investissements et des opérations, ainsi que le temps qui y est consacré, et pour réaliser des économies d’échelle sur l’ensemble du gouvernement12. La fragmentation des programmes a entraîné la duplication des investissements en matière d’applications logicielles, de bases de données et d’infrastructures dédiées aux technologies de l’information et de la communication (TIC), aussi bien entre les organes gouvernementaux qu’au sein de chacun d’eux. Les gouvernements se tournent de plus en plus vers des approches basées sur le cloud («infrastructure en tant que service»)13 pour minimiser les coûts liés aux passations des marchés, aux investissements et aux opérations, et pour tirer profit de la puissance de calcul potentiellement illimitée du cloud, tout en tenant compte de la perte de contrôle occasionnée et des risques de sécurité supplémentaires que cette approche implique.

La coordination et l’inclusion sont deux défis communs aux systèmes de protection sociale du monde entier. Le défi de la coordination se pose pour de nombreuses raisons, dont notamment la diversité des acteurs impliqués dans les programmes et les systèmes de protection sociale ainsi que la multiplicité des programmes. Le défi de l’inclusion possède plusieurs facettes. La première concerne la couverture globale : de nombreux pays visent à étendre leurs programmes et même à atteindre une couverture nationale. La seconde est la couverture de groupes vulnérables spécifiques, y compris les personnes dont l’accès est potentiellement difficile. La troisième est le principe d’inclusion dynamique, selon lequel toute personne ayant besoin d’une protection sociale doit pouvoir y accéder à tout moment. Ce principe est également étroitement lié à la protection sociale adaptative, dans laquelle la couverture peut s’étendre ou être réorientée de manière flexible pour répondre aux chocs. Enfin, les capacités administratives et les financements disponibles exercent de fortes contraintes sur ce défi de l’inclusion.

Afin de relever ces deux défis, des pays ont adapté de manières différentes les modèles opérationnels de leurs systèmes de mise en œuvre de protection sociale. Bien qu’il ne soit pas prévu dans le cadre de cet ouvrage d’identifier et de décrire toutes les variations possibles des systèmes de mise en œuvre dans le monde, il est

possible d’identifier les quatre variations les plus souvent observées auxquelles correspondent deux types de modèles opérationnels qui reposent chacun sur des choix opposables afin de répondre à ces deux défis.

l Systèmes de mise en œuvre distincts ou intégrés. Le premier type de modèle renvoie soit à l’exploitation de systèmes de mise en œuvre spécifiques à chaque programme, soit à celle de systèmes de mise en œuvre partagés (ou possédant des éléments communs) par plusieurs programmes. Cette distinction est liée au défi de la coordination. Les systèmes de mise en œuvre sont parfois conçus pour soutenir un seul programme (ou chaque programme séparément). Pourtant, lorsque de nombreux programmes fonctionnent en parallèle, cela peut entraîner une fragmentation. C’est pourquoi de nombreux pays s’orientent vers l’intégration de divers aspects de leurs systèmes de mise en œuvre afin de servir plusieurs programmes. l Approches à la demande contre approches impulsées par des gestionnaires de programme pour l’accueil et l’enregistrement. Le deuxième type de modèle opérationnel fait la distinction entre les systèmes auxquels les clients accèdent à la demande et les approches impulsées par des gestionnaires de programmes qui effectuent des vagues peu fréquentes d’enregistrement en masse, généralement tous les trois à cinq ans seulement. Ces modèles opérationnels distincts sont apparus dans divers contextes pour relever le défi de l’inclusion, compte tenu des différences de capacité administrative et des contraintes de financement.

Le défi de la coordination : Systèmes de mise en œuvre distincts ou intégrés

Le manque de coordination, ou la fragmentation des programmes de protection sociale est un défi auquel sont confrontés tous les programmes et les systèmes dans le monde. Compte tenu du nombre d’acteurs impliqués dans la protection sociale, de gros efforts sont nécessaires pour coordonner efficacement les prestations et les services entre les acteurs opérant à différents niveaux administratifs (coordination verticale) ou au même niveau administratif (coordination horizontale).

Une coordination efficace des programmes est importante pour de nombreuses raisons. Premièrement, la coordination au niveau de l’élaboration des politiques permet de hiérarchiser les objectifs, les programmes et les différents groupes de populations. Deuxièmement, de nombreux programmes individuels sont multidimensionnels ou multisectoriels par nature. Par exemple, les transferts monétaires conditionnels fournissent une aide en espèces aux familles pauvres, avec des incitations pour que leurs enfants aillent à l’école et reçoivent des soins de santé, et des incitations pour s’assurer qu’ils le font. Troisièmement, la coordination permet de regrouper les prestations et les services. Un exemple d’approche groupée est un programme offrant un paquet complet dans lequel une personne sans emploi bénéficie non seulement d’une aide au revenu, mais également de divers services pour l’aider à trouver un emploi, à accéder à des programmes actifs du marché du travail (PAMT) tels que la formation, la préparation à l’emploi ou d’autres services, ou à améliorer autrement son employabilité. De nombreux pays offrent de multiples prestations et des services, et le risque de fragmentation est plus grand lorsque ces programmes sont mis en œuvre par des systèmes de mise en œuvre distincts. Cette section se concentre sur les défis de ce dernier type de coordination.

Les pays offrent une multitude de prestations et de services. Si certains pays proposent moins d’une douzaine de programmes, d’autres en proposent beaucoup plus. Dans de nombreux cas, des systèmes de mise en œuvre distincts sont développés pour chacun de ces programmes (figure 2.6). Chaque système exécute les mêmes processus ou des processus similaires tout au long de la chaîne de mise en œuvre, mais pour un seul et même programme. Ces processus comprennent la sensibilisation, l’accueil, l’enregistrement et l’évaluation des besoins et des conditions de vie, ainsi que l’inscription, la fourniture de prestations ou de services et enfin la gestion des opérations des bénéficiaires. Chaque système de mise en œuvre a ses propres dispositions institutionnelles (centrales, locales et prestataires de services), réalise ses propres communications et exploite ses propres systèmes d’information et plateformes technologiques.

Bien que les différents programmes contribuent à répondre aux divers besoins des populations, leur