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diagrammes à couloirs). Conceptualiser l’organisation comme un système

Encadré 2.2 Diagramme de la chaîne de mise en œuvre des services de protection sociale (diagrammes à couloirs). Conceptualiser l’organisation comme un système

Les diagrammes de la chaîne de mise en œuvre sont des outils de gestion utiles pour représenter le séquençage des processus entre les acteurs. Ces diagrammes utilisent les principes des diagrammes à «couloirs fonctionnels» qui sont des outils de gestion courants permettant de distinguer visuellement les rôles et les responsabilités des processus opérationnels. Chaque acteur se voit attribuer un «couloirfonctionnel», puis les principaux processus de mise en œuvre sont représentés dans l’ordre dans ces couloirs. Le terme «couloirfonctionnel» symbolise le concept selon lequel «chaque acteur reste dans son propre couloir» sans le traverser pour éviter les «collisions» ou la confusion sur les rôles.

Cette représentation permet d’évaluer la robustesse de la chaîne de mise en œuvre en identifiant «qui fait quoi» et «quand» pour les processus de base accompagnant les fonctions des principales phases de mise en œuvre. Il est essentiel d’attribuer des rôles uniques selon des principes de clarté et de redevabilité. Les diagrammes de la chaîne de mise en œuvre peuvent être tracés de bout en bout pour l’ensemble de la chaîne, ou pour les processus de phases spécifiques de mise en œuvre au sein de la chaîne (par exemple, tracer un diagramme de processus pour la phase de paiement sans les autres phases). Ces outils peuvent contribuer à promouvoir l’efficience, la transparence et l’efficacité des programmes sociaux et des systèmes de prestation.

Idéalement, l’élaboration d’un diagramme des processus devrait être réalisée de manière participative avec l’implication des principaux acteurs. De cette manière, chaque acteur comprend son propre rôle et comment il s’inscrit dans le système global. De plus, il peut contribuer à l’identification des améliorations et réformes potentielles. L’approche participative permet également de renforcer la confiance, le consensus, l’appropriation et la compréhension des processus clés de la chaîne de mise en œuvre. Des progiciels de bureautique courants peuvent être utilisés pour tracer et visualiser ces diagrammes de la chaîne de mise en œuvre — et elles peuvent également être dessinées de manière participative sur des tableaux de conférence. Les principales étapes de la cartographie de la chaîne de mise en œuvre sont les suivantes :

n Identifier les acteurs : organismes centraux, autres organismes ou prestataires, acteurs locaux et clients; n Discuter des rôles et des responsabilités de chaque acteur le long de la chaîne de mise en œuvre;

Attribuer un «couloir fonctionnel» à chaque acteur (nous utilisons généralement des couloirs horizontaux avec les acteurs centraux en haut, puis les autres agences ou prestataires, puis les acteurs infranationaux et locaux, puis les personnes); n Identifier les étapes de réalisation des phases d’exécution le long de la chaîne de mise en œuvre; n Créer un diagramme à couloirs des étapes dans l’ordre dans l’ensemble des «couloirsfonctionnels» pour chaque acteur; n Examiner l’efficience et l’efficacité des processus.

Toutes les étapes sont-elles nécessaires? Quelles sont les étapes à «valeur ajoutée»? Certaines étapes sans valeur ajoutée peuvent-elles être éliminées pour réduire les formalités administratives superflues? Certaines étapes peuvent-elles être automatisées à l’aide de systèmes informatiques?

Le diagramme à couloirs de la chaîne de mise en œuvre fait partie intégrante de l’élaboration ou de l’évaluation de la mise en œuvre des programmes de protection sociale. Ces outils de représentation remplacent les habituels «diagrammes spaghetti» que l’on voit couramment dans les manuels opérationnels des programmes — ceux qui comportent de nombreux acteurs, de nombreuses lignes entortillées sans que le début, l’enchaînement des séquences et la fin apparaissent clairement. Les diagrammes de la chaîne de mise en œuvre permettent également de stabiliser et d’identifier les processus et les fonctions qui pourraient être automatisés grâce à des systèmes informatiques et d’exploitation.

Ce chapitre présente des exemples de diagrammes de la chaîne de mise en œuvre pour deux scénarios fictifs. De nombreux exemples réels sont présentés ailleurs dans ce Manuel de référence.

Sources : Rummler et Brache, 1990 ; Hammer et Champy, 2003 ; Karippacheril et Lindert, 2016, 2017, 2018 ; Karippacheril, Nishikawa Chavez, et Rodriguez Caillava, 2019.

mieux placés que les acteurs centraux pour mettre en œuvre les fonctions de contact avec les clients, car ils peuvent avoir une meilleure connaissance de la clientèle des programmes ou avoir des contacts avec elle. Les acteurs infranationaux peuvent englober les branches administratives des pays, des régions ou des provinces. Les acteurs locaux peuvent inclure les bureaux administratifs municipaux, les bureaux locaux de l’organisme central, des bureaux locaux spécialisés et des équipes mobiles. Dans certains cas, les fonctions de contact avec les clients sont confiées à des prestataires spécialisés, tels que des fondations ou des organisations non gouvernementales, des acteurs privés, des agents de paiement, des prestataires de services spécifiques (tels que des instituts de formation, des prestataires de services de garde d’enfants, des centres d’accueil d’urgence ou d’autres services de protection) et d’autres acteurs.

Le réseau de l’interface client peut prendre diverses formes. Cette interface est examinée plus en détail ci-dessous. l Fonctions de prise de décision. Quels sont les acteurs qui prennent les décisions opérationnelles tout au long de la chaîne de mise en œuvre (par exemple, concernant l’éligibilité, l’inscription, le paquet de prestations/services, les sanctions et les sorties) ? Dans de nombreux programmes, la responsabilité de ces décisions reste centralisée. Les avantages de la prise de décision centralisée sont les suivants : les personnes se trouvant dans des circonstances similaires reçoivent un traitement standard dans tout le pays; les pressions politiques et les pressions exercées par les clients sur les acteurs locaux sont réduites et le pouvoir discrétionnaire dans la prise de décision au niveau local est limité. Dans d’autres programmes, ces décisions sont décentralisées et confiées aux acteurs locaux (aux municipalités, aux conseils locaux, aux communautés, voire aux travailleurs sociaux ou aux facilitateurs). Cette décentralisation permet de tenir compte des réalités locales dans les décisions. Son désavantage est que l’introduction d’un pouvoir local discrétionnaire peut avoir des biais pour résultat. l Gestion des systèmes d’exploitation. Qui gère les plateformes de mise en œuvre, comme par exemple les systèmes d’information ? Dans de nombreux cas, ces systèmes sont gérés de manière centralisée (même en cas de stockage virtuel des données). Parmi ces systèmes, on peut citer le Système intégré d’assistance sociale de la Turquie, le Registre social des ménages et le système d’information intégré du Chili, ainsi que les registres sociaux des Philippines et du Pakistan. Dans d’autres cas, il n’existe pas de systèmes nationaux. Par exemple, il n’existe pas de système national de gestion de l’assistance sociale aux États-Unis ; chaque État est responsable de la conception et de la création (ou de l’acquisition) et de la maintenance de son propre système. Dans certains cas, ces systèmes sont confiés à des agents d’exécution, comme le Cadastro Unico (registre social) du Brésil, qui est géré par le ministère des Affaires sociales, mais exploité par une banque fédérale nationale (qui gère également le système de paiement du programme). Un autre exemple est donné par Centrelink en Australie, qui est à la fois l’agent de gestion et le système d’exploitation de toutes les prestations de protection sociale.

Interface client : interaction entre les institutions et les personnes

Les institutions et les personnes interagissent à travers les processus et mécanismes de mise en œuvre. Du côté des institutions, des acteurs locaux ou des fournisseurs externes sont généralement chargés de la mise en œuvre des phases clés d’interaction avec les clients : information et sensibilisation, accueil et enregistrement, notification et intégration, paiement, fourniture de services, et certains aspects de la gestion des opérations des bénéficiaires. Du côté des clients, toute personne doit pouvoir (1) en savoir plus sur un programme et sur les processus associés, et identifier les personnes à contacter, (2) comprendre comment et où s’enregistrer, et accéder aux différents processus nécessaires à cet effet, (3) être informée des décisions concernant son éligibilité, son inscription et les prestations et les services dont elle bénéficie (si elle est inscrite), et les comprendre, (4) participer aux activités d’intégration (si elle est inscrite), (5) interagir avec les prestataires de services ou de paiement et bénéficier de services de qualité et de prestations en temps opportuns et (6) mettre à jour ses informations, être informée de toute modification de son propre statut (notamment en cas de non-respect des conditionnalités) et présenter des réclamations.

Il existe plusieurs modalités ou «points de contact» pour l’interface client. De nombreuses interactions se produisent en personne avec les travailleurs de première ligne, comme les travailleurs sociaux, les conseillers à l’emploi, les assistants sociaux, les relais communautaires ou médiateurs, les agents de vulgarisation ou encore les agents de santé communautaires. Les interactions peuvent avoir lieu au domicile de la personne (lors des visites à domicile des équipes mobiles), sur des sites communautaires ou dans des bureaux locaux, des centres de services, des lieux de services publics de l’emploi ou des points de service spécifiques (prestataires de services de paiement, par exemple). Les interactions peuvent également se produire sous forme numérique, par le biais d’appareils mobiles, de tablettes, d’ordinateurs, d’ordinateurs portables, d’agents conversationnels (chatbots), de GAB, de bornes automatiques dans des espaces publics, etc.

Le réseau de l’interface client peut être un maillon faible des systèmes de mise en œuvre et constituer un obstacle à l’inclusion. Pour l’interface client avec les personnes, il est important que le réseau sur lequel repose le système de mise en œuvre soit efficace, ou en tout cas adéquat. Toutefois, de nombreux pays et programmes négligent ce qu’on appelle parfois le «dernier kilomètre» des systèmes de mise en œuvre. Étant donné le rôle primordial des personnes dans l’efficacité et l’efficience des programmes de protection sociale, dans ce Manuel, ils sont considérés comme étant le « premier kilomètre » du système. Une vision inadaptée du « premier kilomètre» empêche les programmes de protection sociale d’évoluer, de s’étendre à l’échelle nationale, de répondre aux chocs et de progresser vers l’inclusion dynamique, dans le but de permettre à toute personne de solliciter des prestations et des services à tout moment.

Dans de nombreux pays, le réseau d’interface client est incomplet : la présence de bureaux se limite à certaines circonscriptions, la sensibilisation est faible ou inexistante dans les zones reculées, le nombre, la formation ou les compétences des agents de première ligne ne sont pas à la hauteur des tâches qui leur incombent ou les visites des équipes mobiles aux communautés locales sont espacées de plusieurs années. Parfois, lorsque les programmes s’appuient sur des équipes mobiles, aucune présence locale permanente n’est assurée. Les équipes peuvent également hésiter à collaborer avec les administrations locales autonomes en raison des contraintes institutionnelles ou du manque de capacité, ou par manque de confiance. Pour certains processus, il est possible de résorber ces lacunes grâce à la technologie, par l’utilisation des fonctionnalités en ligne ou mobile ; mais souvent, les contraintes restent problématiques.

Même lorsque l’interface client repose sur un vaste réseau, les interactions du premier kilomètre peuvent s’avérer lourdement bureaucratiques. En général, peu d’attention est accordée à l’expérience utilisateur des personnes qui naviguent dans le réseau. Malgré leurs bonnes intentions, la plupart des organismes sociaux adoptent et visualisent les processus et les systèmes du point de vue de l’administrateur. Ils se concentrent sur les processus organisationnels et les exigences institutionnelles, en faisant des hypothèses générales sur leurs clients. Pour les personnes, il peut donc s’avérer frustrant d’interagir avec les administrations publiques. L’interface client leur apparaît bureaucratique, difficile à consulter, distante, inexistante ou si fragmentée qu’ils doivent solliciter plusieurs prestations et services sur divers sites et faire maintes fois la queue, sans compter les coûts des multiples visites nécessaires pour obtenir de l’aide. Cette situation entraîne des pertes de temps, des coûts élevés et des déplacements excessifs, en raison du temps que les personnes consacrent au processus, des sommes qu’ils dépensent à cet effet (coûts de transport, coûts de garde d’enfants, absence au travail et frais de notaire) et du nombre de fois où ils doivent se rendre dans les bureaux locaux ou dans toute autre agence. Dans ce cas, le cheminement du client au travers du processus va comprendre un certain nombre de «passages pénibles» (comme expliqué dans la section 2.3 ci-dessous).

Que les interactions entre les personnes s’effectuent en personne ou sous forme numérique, il est possible de les améliorer grâce aux techniques de conception centrée sur l’humain (CCH). Ces techniques sont des processus qui consistent à comprendre les besoins des utilisateurs et à y répondre. De nombreux outils CCH facilitent l’évaluation de la qualité des interactions (ou de « l’expérience utilisateur ») dans les systèmes de protection sociale. C’est le cas notamment d’un diagramme de parcours» qui suit l’expérience client tout au long de la chaîne de mise en œuvre (voir encadré 2.3 et section 2.3 ci-dessous).

La CCH est essentielle pour l’inclusion des groupes vulnérables. Souvent, les organismes sociaux conçoivent