BIKINI NOVEMBRE-DECEMBRE 2012

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NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2012 #9



TEASING

À découvrir dans ce numéro... «STÉPHANE BERN DU ROCK»

SOUS ACIDE

T O N Y VA I R E L L E S

LOU DOILLON

PASTIS MUSIQUE DE FILM PORNO FIN DU MONDE

KURT COBAIN

FA N S DESSOUS DE BOCK

MORTAL KOMBAT

JOUEURS À

MOUSTACHE

« J ’ A I M E B I E N FA I R E C H I E R L E S V E N D E U R S D E L A F N A C »


ÉDITO

SECONDE TOURNÉE Il y a un an, on vous faisait un édito sur la tournée des Trans. Dans une époque où il est important et plutôt bien vu de recycler, on a donc décidé de s’appliquer ce beau précepte et de vous reparler de cet apéritif qui ouvre le festin rennais. Pourquoi ? Parce que le cru de cette année nous fait penser qu’il sera particulièrement bon. Si des groupes de la cuvée 2011 ont su sortir du lot et profiter de cet éclairage pour bien occuper l’année (les gars de Juveniles pour ne citer qu’eux), la promo 2012 peut réserver de jolis pieds dans la porte et de futures confirmations. Des inévitables Mermonte (que tout le monde suce à raison) aux Normands de Gomina (que tout le monde sucera à raison), en passant par les buzzés O Safari, les groupes accompagnés cette année par le festival semblent bien armés pour faire partie des jeunes pousses incontournables de 2013. Le genre de résultat sur lequel on ne parierait pas sur une défaite. La rédaction

SOMMAIRE 6 à 19 WTF : groupes répétitifs, foot à papa, concerts arrêtés, beer it yourself, Lou Doillon, musique d’enterrement, chanteurs roux, picole low cost, youtubers, babyfoot, ciné et littérature, snacks, corbeille... 18 à 25 Prêt pour la fin du monde ? 26 à 31 « Remets la p’tite sœur » 32 & 33 Bande originale 34 à 39 Fan un jour, fan toujours 40 à 47 RDV : Lescop, Corbeaux, On est les champions, Julia Cima, Salut c’est cool et Pegase 48 & 49 Vide ton sac... Richard Dumas 50 BIKINI recommande 4

novembre-décembre 2012 #9

Directeur de la publication : Julien Marchand / Rédacteurs : Régis Delanoë, Isabelle Jaffré, Benoît Tréhorel, Simon Doniol / Directeurs artistiques : Julien Zwahlen, Jean-Marie Le Gallou / Photographes : Justin Bihan / Consultant : Amar Nafa / Relecture : Anaïg Delanoë / Publicité et partenariats : Julien Marchand, contact@bikinimag.fr / Impression par Cloître Imprimeurs (Saint-Thonan, Finistère) sur du papier PEFC. Remerciements : nos annonceurs, nos lieux de diffusion, la CCI de Rennes, Michel Haloux, Matthieu Noël, Émilie Le Gall. Contact : BIKINI / Bretagne Presse Médias - Espace Performance Bât C1-C2, 35769 Saint-Grégoire / Téléphone : 02 99 23 74 46 / Email : contact@bikinimag.fr Dépôt légal : à parution. BIKINI “société et pop culture” est édité par Bretagne Presse Médias (BPM), SARL au capital social de 5 500 €. Les articles publiés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Le magazine décline toute responsabilité quant aux photographies et articles qui lui sont envoyés. Toute reproduction, intégrale ou partielle, est strictement interdite sans autorisation. Magazine édité à 20 000 exemplaires. Ne pas jeter sur la voie publique. © Bretagne Presse Médias 2012.



WTF

QUEL GROUPE RÉPÉTITIF VOIR ?

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TREMPLIN

LEUR NOM BÉGAYE MAIS PAS LEUR MUSIQUE. PLUSIEURS GROUPES MISENT SUR DES PATRONYMES QUI VOIENT DOUBLE (VOIRE TRIPLE !) POUR SE FAIRE REMARQUER DANS VOTRE PLAYLIST. REVUE-REVUE D’EFFECTIF-D’EFFECTIF.

DR

Pour sa 23e édition qui se tiendra les 26 et 27 juillet prochain, le festival Au Pont du Rock à Malestroit recherche le groupe qui ouvrira ces deux jours de musique. Ceux qui souhaitent participer au tremplin du 23 février ont jusqu’au 31 décembre pour déposer leur candidature. Plus d’infos sur le site du festoche.

DJANGO DJANGO

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JEAN-LOUIS AUBAR

Traditionnel off des Trans, les Bars en Trans investissent de nouveau une quinzaine de rades du centreville rennais. Avec, entre autres, Aline (photo), Arch Woodmann, Piranha, ainsi que Theodore, Paul & Gabriel. Du 6 au 8 décembre.

WINNEUSE

couverture

Pour ce numéro, nous avions laissé carte blanche aux lecteurs pour la réalisation de la couv’. Parmi la cinquantaine de propositions reçues, l’une d’elles a fait notre bonheur. Bravo à Amélie Hamon qui remporte le concours avec cette délicieuse photo de t-shirt à petits chats. Le calendrier des postes likes this. 6

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Ces quatre Écossais ont été l’une des révélations 2012 avec leur pop électro psyché. À la base, ils n’avaient pourtant comme seule ambition que celle de jouer dans leur chambre. Avant d’être finalement repérés, de tourner avec Metronomy et de signer un premier album salué par tous. Leur nom ? Un clin d’œil au musicien jazz manouche Django Reinhardt. Qu’on se rassure, pas d’influences de cet hommage dans leurs morceaux. Thomas Dutronc reports it as a spam. Idéal si vous aimez ? Lire Tintin et les Picaros sous acides. Quand et où ? Le 1er décembre à L’Antipode à Rennes

DARK DARK DARK

HYPHEN HYPHEN

Esthétiquement, les jeunes Niçois (photo) rappellent les New-Yorkais de MGMT. Même formation en arts plastiques, mêmes délires en fluo, mêmes peintures tribales sur leur petit minois, mêmes fringues de hipster que sur eux ça va nickel alors que sur toi ça te donne un air gland. Musicalement, Foals est jamais loin, Breton non plus, avec ces multiples changements de rythme et explosions de sons. Putain d’artistes. Idéal si vous aimez ? Lire des catalogues d’expos d’art contemporain en fumant des spliffs. Quand et où ? Le 7 décembre à La Citrouille à Saint-Brieuc

Le nom de ce groupe de Minneapolis est trompeur. Si tu cherches un son black metal, gothique ou cold wave, casse-toi vite vite vite, tu vas pas aimer. Car Dark Dark Dark donne dans la pop folk chamarrée, avec cuivres, accordéon et tout le tremblement. Façon Beirut, pour situer, avec une mignonne voix de meuf. Manson, Robert Smith ou Ian Curtis sont loin loin loin. Idéal si vous aimez ? Feuilleter le Guide du Routard sur la Louisiane en buvant une bière brune. Quand et où ? Le 27 novembre à L’Antipode à Rennes


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LE FOOT, C’ÉTAIT MIEUX AVANT ?

JOURNALISTE À SO FOOT, MAXIME MARCHON REVIENT SUR L ’A  CTUEL REVIVAL AUTOUR DU FOOT À PAPA. Buzz Facebook sur le foot de district, #LeFootballVrai sur Twitter, Vairelles en couv’ de So Foot : c’est quoi ce trip “le foot c’était mieux avant” ? Je ne pense pas qu’il faille y voir un besoin de se raccrocher au passé, seulement rappeler qu’un autre foot a existé : le foot à la papa et celui des joueurs à moustache. Et tu trouves que le foot c’était mieux avant ? Pas forcément, juste différent. Quand tu vois un mec comme M’vila, t’as le droit d’être nostalgique de joueurs comme Vairelles ou Gascoigne mais ça veut pas dire que c’était mieux ou de meilleure qualité sportivement. C’est comme en politique : aujourd’hui tout le monde est nostalgique de Chirac, alors qu’au fond c’était quand même une belle ordure. Les petits jeunes, ça les intéresse le foot old school ou c’est juste un truc de vieux cons ? Les bonnes histoires n’intéressent pas que les trentenaires. Tony Vairelles, si tu t’arrêtes seulement à sa carrière, ça n’intéresse personne. Mais si tu parles avec lui de dépucelage, d’anecdotes sur la vie en prison et des videurs en boîte de nuit, tu touches tout le monde. 7


WTF

LES CONCERTS QUI DÉBUTENT... ET QUI S’ARRÊTENT C’EST LA FAUTE À PAS DE CHANCE. ALORS QUE LES CHOSES AVAIENT BIEN COMMENCÉ, VOILÀ QUE TOUT S’INTERROMPT AU BOUT DE QUELQUES MINUTES. RETOUR SUR L ’ HISTOIRE DE TROIS PRESTATIONS AYANT BUGGÉ.

Compositeur de musique contemporaine, l’Américain Moondog, programmé à l’Opéra de Rennes, devait être l’un des moments forts de l’édition 1988 des Trans Musicales. Le couac. Après une vingtaine de minutes, la trentaine de musiciens de l’Orchestre de Bretagne qui l’accompagne quitte la scène un par un. Why ? Une captation vidéo étant prévue, tous estimaient devoir recevoir une rémunération complémentaire. Signe particulier. 24 ans après, les Trans réinvestissent l’Opéra.

Le 15 mars 2002, les artistes trad’ de la région se payaient le Stade de France pour la Nuit Celtique : biniou, bombarde et cidre à volonté. Grosse chouille entre Brezhoneg quoi. Le couac. Didier Squiban débarque sur la pelouse et s’installe à son piano. Avant de rentrer aux vestiaires quelques minutes plus tard. La raison de l’exclusion ? Certaines touches restaient enfoncées, la faute à une température plus basse que prévu. Signe particulier. On vous l’a dit : le cidre était à volonté. Yepaaaa.

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INDOCHINE

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DIDIER SQUIBAN

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MOONDOG

Lancé en 2003, le X festival était un festoche itinérant sur cinq villes. Parmi celles-ci : Saint-Malo, le 26 juillet. Ce soir-là, Dolly (aïe) assure le warm-up, avant l’arrivée sur scène d’Indochine. Le couac. Dès le début de set, la pluie commence à tomber, endommageant le matos de sonorisation. Au bout de deux chansons, le groupe est contraint de stopper. Le public gueule, avant de repartir la queue entre les jambes. Signe particulier. Pas une goutte de flotte trois semaines plus tard à la Route du Rock. Merci la météo. J.M

PEUT-ON FAIRE SA BIÈRE SOI-MÊME ? APRÈS LES YAOURTS ET LE PAIN, VOILÀ QU’ON PEUT DÉSORMAIS CONFECTIONNER SA PROPRE MOUSSE À LA MAISON. POUR LES ENTREPRISES SPÉCIALISÉES DANS LE “BEER IT YOURSELF”, LE PHÉNOMÈNE PREND DE L’  AMPLEUR. Des kits sont légalement mis en vente sur Internet pour produire chez soi une quinzaine de litres de bière. Le plus connu s’appelle Brewferm et coûte moins de quinze euros. Faites le calcul, c’est rentable. « Le malt est déjà concassé et présenté sous forme de sirop », détaille Thierry du site Le Bon Plan. Nul besoin de matos sophistiqué, il faut juste être rigoureux. Pour quel résultat ? « C’est bien mieux que la Kro en tout cas », assure Susanna du site Bière Boutique. Près de quarante sortes de bières sont faisables chez soi : blonde, blanche, brune, pils… Les ventes sont en hausse constante, assure-t-on. « C’est comme les machines à pain et yaourtières, y’a de la fierté à fabriquer ce qu’on consomme. » 8

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Faire ses quinze litres pour impressionner les potes, « c’est amusant mais ça n’a rien à voir avec de la vraie bière », précisent les puristes du forum BrassageAmateur.com. C’est comme quand tu fais un gâteau avec de la pâte Alsa en te croyant chef… Pour brasser dans les règles de l’art, il faut acheter les céréales et s’équiper, un peu. « Pas grand-chose : des gamelles, un filtre, un tamis… », rassure Mickaël, de la brasserie Tri Martolod, organisatrice le 10 novembre à Concarneau du salon Bierzhistans. « Une quinzaine de micro-brasseries sera présente, dont certaines sont justement parties de zéro. » Avis aux brasseurs amateurs à l’esprit MacGyver, c’est l’occasion de les rencontrer. R.D


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FAUT-IL ZAPPER LOU DOILLON ?

LA MANNEQUIN-ACTRICE-FILLE DE A SORTI SON PREMIER ALBUM EN CETTE RENTRÉE. OUAIS OU MOUAIS ? Courant septembre, Libération a publié un portrait bien véner en dernière page. La victime ? Lou Doillon qui venait de sortir Places. Si cet album a été bien reçu par la critique, le journal de Nico Demorand prenait lui le sens inverse. « Le jour de ses 30 ans, Lou Doillon a reçu un cadeau du tonnerre : son propre album dans les bacs. Unanimement, les Stéphane Bern du rock ont trompeté la naissance d’un talent. En quoi cet album louangé est-il personnel ? Surprenant, inspiré ? », écrivait ainsi Marie-Dominique Lelièvre. Parmi les “Stéphane Bern du rock”, Christophe Conte des Inrocks qui affiche un avis tout autre. « Le papier de Libé est injuste car il prend comme angle de tir le fait qu’elle soit une fille de, faisant passer son envie de faire de la chanson pour un caprice. À l’écoute de ses premières démos, on sentait déjà quelque chose de profond. » OK, mais son disque ? « Elle chante bien, elle écrit bien. Le choix de Daho comme producteur est bon. Les accords ne sont pas délirants mais ça tient très bien la route. Et puis, sa programmation aux Trans est une validation. Je pense qu’ils s’en cognent qu’elle soit une fille de. » Le 7 décembre aux Trans à Rennes 9


WTF

QUELLE MUSIQUE CHOISIR POUR SON ENTERREMENT ?

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KEEP ROCKIN’

Arthur, chanteur du défunt groupe vannetais The Furs, n’a pas mis longtemps à se refaire la cerise. Son nouveau projet : Modern Death. Style : rock péchu à tendance indus. Pour l’instant, trois morceaux ont été mis en ligne. Premier concert le 23 novembre à domicile, au Bruit Qui Court.

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CENTENAIRE

À l’occasion des cent ans du stade de la Route de Lorient, un bouquin hommage vient de paraître : Supporters du Stade Rennais. Un ouvrage bien bâti de 192 pages, richement illustrées, signé du journaliste Benjamin Keltz. Le cadeau de Noël idéal pour faire plaisir au daron fan des Rouge & Noir.

MACDORÉMI

’dwich La Passerelle renouvelle son opération “Concert sandwich” : un mardi par mois, les Briochins sont invités à faire leur pausedéjeuner au théâtre et à assister à une prestation du Conservatoire de Musique de la ville. Prochaine date : le 13 novembre. Gratuit. 10

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Quand on meurt, on meurt en musique. Qu’il s’agisse d’une cérémonie religieuse ou d’obsèques civiles, la famille s’arrange toujours pour passer un brin de chansonnette qui plaisait au défunt. Au crématorium de Monfort-surMeu, « on ne refuse jamais rien. Chacun voit la mort comme il veut ». Même remarque au funérarium de Saint-Brieuc, à une exception près : « Une fois, j’ai dû refuser une marche nazie », renseigne le chargé de qualité des cérémonies. Pour le reste, l’éventail est aussi large que l’océan de la variet’. Goldman, Sardou et Céline Dion figurant dans le top five. son préférée”, les prêtres répondent par « le dialogue pastoral, précise-t-on « PAS TROP ROCK’N’ROLL » au presbytère de Douarnenez. On Aux jeunes défunts, Someone like fait comprendre aux gens qu’il y a you d’Adele rencontre un vif succès des morceaux incompatibles avec ces derniers mois. Le plus étrange l’espérance chrétienne. » Des prédéjà entendu ? « Du James Brown cautions qui ne sont pas sans faille. et du musette dans la même cérémo- « Une fois près de Pontivy, on s’est nie », détaille Louis Bail, au créma- aperçu après coup que la chanson en torium de Carhaix. Et le pire – ou breton d’Alan Stivell parlait de sexe », le meilleur – ? « Allumer le feu de raconte le père Jean-Paul Cado. Johnny. Juste avant que le cercueil Du reste, au moment de la bénédics’en aille », assure-t-on à Montfort. tion du corps, « quand la célébration Pour des funérailles religieuses, la liturgique est terminée », le prêtre liberté est toute autre. Certes, l’Église se montre davantage tolérant pour ne délivre pas de blacklist, mais les le choix de la playlist. Le must pour chansons diffusées doivent « respec- un homme d’Église ? Les morceaux ter le lieu, le défunt et les personnes qui évoquent « l’au-delà, la séparaprésentes », résume le père Sachet, tion comme la chanson Le Paradis de Vitré. Sans heurter les familles Blanc de Michel Berger », dit le père dans le deuil, il demande alors que ce Gaël Sachet. Surtout si le défunt ne soit « pas trop rock’n’roll ». À la pratiquait le tennis. remarque imparable “C’était sa chanBenoît Tréhorel

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POUR RENDRE HOMMAGE À UN DÉFUNT, LES PROCHES ONT L’HABITUDE DE PASSER QUELQUES-UNS DE SES ARTISTES PRÉFÉRÉS. UN CHOIX DE PLAYLIST LIBRE A PRIORI. DANS LES FAITS, QUELQUES INDICATIONS SONT DONNÉES.


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CHANTEUR ROUX : LEQUEL VOIR ?

TROIS GROUPES DONT LE LEADER ARBORE DES CHEVEUX CUIVRÉS S’ARRÊTENT DANS LA RÉGION. DIONYSOS Selon Infoconcert, le groupe consiste en « une sorte de bric-à-brac sonore rafraîchissant ». En gros, du pop-rock un peu énervé et un rien énervant. Rouquinitude ? Le cheveu rêche, de belles rouflaquettes rousses, un front vertigineux, des vestes en velour : Mathias Malzieu nous donne furieusement envie de manger du Rouy. Où ? À Rennes le 28 novembre

MORIARTY Prenez un Français, un Américain et un Suisse. Ajoutez Rosemary Standley une Parisienne trentenaire. Agitez. Vous obtenez un groupe de country folk qui se prend plutôt au sérieux. Rouquinitude ? Petite, Rosemary passait ses vacances à Bénodet. L’iode, les algues, le sel : mieux que le henné. Où ? À Saint-Brieuc le 14 décembre

TWO DOOR CINEMA CLUB Alex Trimble et ses deux complices (photo) se sont rencontrés dans un camp scout. Avant de faire le buzz sur Myspace et de signer chez Kitsuné. Rouquinitude ? Un teint de jambonneau, des tâches plein les joues, Alex incarne à merveille l’Irlandais. Et décomplexe avec fierté l’ensemble de la communauté blond vénitien. Où ? À Lorient le 10 novembre 11


WTF

QUI SONT LES YOUTUBERS BRETONS ? DANS LA FAMILLE DES PODCASTEURS, ON CONNAÎT DÉJÀ NORMAN, HUGO TOUT SEUL, CYPRIEN... PLUSIEURS GARS DE LA RÉGION SE SONT EUX AUSSI LANCÉS DANS LE LOL EN LIGNE. CRASH-TEST POUR TROIS D’ENTRE EUX.

C’est qui ? À la fin 2011, le batteur des Wankin’ Noodles a lancé son site, Aujourd’hui Romain Baousson, où il expliquait comment reconnaître les différents types de musiciens : les guitaristes qui font des riffs connus en magasin, les DJ casse-burnes (« J’mixe exclusivement sur vinyles, y’a quelque chose qui se dégage »), les batteurs qui font chier tout le monde pour monter la mayo à la main... Depuis février, zéro update par contre. Pour qui ? Les zikos, les groupies. Audimat ? 250  000 vues Dailymotion Puissance lol ?

C’est qui ? Mère camerounaise et père breton, Mister V (Yvick Letexier in real life) est celui qui se rapproche le plus des têtes de gondole du genre. Un mec dans sa chambre qui raconte ce qui se passe dans la life d’un gars de 18 ans : le bac, les meufs, les potes, les boulots d’été, le permis, les boîtes de nuit… Seul hic : c’est pas des masses drôle en fait. Denis Maréchal, toi-même tu sais. Pour qui ? Les kids et kikoolol. Audimat ? 62 millions de vues YouTube (ouais quand même) Puissance lol ?

CORBEILLE Saez Le double-passage en Bretagne du « chanteur engagé et rebelle » – lol, hein – a un intérêt : se rappeler de la meilleure blague de l’été. C’est Christophe Lemaître qui se pointe au bar et qui dit « Bonjour, j’voudrais une 16. » Le patron : « Une 1664 ? » Lemaître : « Bah nan, une 16, pour m’asseoir ! » À Queven et Brest 12

The Cranberries Au top 50 des nineties, le tube Zombie des Cranberries se classe 38e, coincé entre Ocarina et I Like to Move It de Reel 2 Real. Oui c’est un fait, la décennie 90 vieillit crade. À Brest

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LINKS THE SUN

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MISTER V

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ROMAIN BAOUSSON

C’est qui ? Depuis 2009, ce Rennais assure sur sa chaîne YouTube le Point Culture, un programme d’une dizaine de minutes où il dissèque, façon exposé de 4e, un sujet de pop culture : les jeux vidéos, les films d’horreur, les super-héros, les mangas... Des vidéos à la prod’ cheap-cool (on dirait du Paint) et une voix-off aussi rapide qu’une descente d’étudiant un jeudi soir. Le tout, emballé d’humour 9gag. Pour qui ? Les geeks. Vues ? 23 millions de vues YouTube Puissance lol ?

NOTRE ANTI-SÉLECTION DES SPECTACLES QUAND FRANCHISE ET MAUVAISE FOI NE FONT QU’UN huître, intelligence d’un bulot et parfum d’algues vertes : contrat rempli. Sortie le 26 novembre

Gossip Le Gossip millésime 2006, époque Standing in the way of control, on n’a absolument rien contre. Nolwenn Leroy Par contre, le virage total Avec Ô filles de l’eau, la mainstream FM entrepris chanteuse voulait que son cette année avec A Joyful nouvel album soit inspiré noise, c’est non. Les par la mer. Élégance d’une bourrelets de madame

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ne doivent pas être un bouclier à la critique. À Rennes Thomas Dutronc Constat intéressant : il n’y a pas une année sans que Thomas Dutronc s’invite en Bretagne. Même phénomène avec la gastro. Coïncidence ? Je ne pense pas. À Brest et Rennes La rédaction


FINI LES JEUX DE BAR ?

BABYFOOT, FLIPPER ET BILLARD : SYMBOLES DES TROQUETS D’ANTAN, CES JEUX VONT-ILS DISPARAÎTRE ? « Je le dis tout net : c’est la fin. » Gilles Capitaine, patron de l’entreprise de location New Matic dans le 29, en a gros. « Les gens ne jouent même plus ! Ils préfèrent s’occuper avec leur téléphone… » Le jeu qui morfle le plus ? Le flipper. Le journal Sept Jours à Brest, qui a mené l’enquête en ville, n’y a recensé que quatre troquets où on peut encore y jouer. À Guipavas, le Guip’ Café fait de la résistance. « Mais ça ne marche pas fort, en plus les gens se lassent, il faut en changer plusieurs fois par an. » Ce qui revient cher : chaque appareil coûte près de 6 000 euros. Il y aura toujours des motivés pour un petit 2 contre 2 au babyfoot, affirme Bernard Creismeas, le gérant du Guip’ Café. « Chez moi c’est ce qui marche le mieux, surtout auprès des trentenaires. » Christophe Marec, de l’entreprise Jeux G.A dans le Morbihan, observe que des jeux placés dans des endroits stratégiques continuent d’être rentables. « Près des écoles, c’est le must. » Le billard aussi a ses adeptes. Au Tiffany’s à Rennes, il y en a une dizaine « et ça fonctionne toujours très bien », constate le tenancier Victor Juillard. 13


WTF

QUI CHOISIT LES SNACKS DANS LES DISTRIBUTEURS ?

2

NOUVELLE VAGUE

À LA FAC, À LA GARE OU À LA PISCINE, CES MACHINES AUTOMATIQUES SONT PARTOUT. MARS OU KINDER BUENO, TWIX OU MIKADO, MENTOS OU HARIBO… ON VOUS DIT QUI SÉLECTIONNE CE QUI SE TROUVE DEDANS.

Seconde vie pour la salle de musiques actuelles de Saint-Malo. L’association Rock Tympans, désormais aux manettes du lieu, a décidé de le renommer. Tchao L’Omnibus, bienvenue La Nouvelle Vague de Saint-Malo. En stand-by depuis la rentrée, le lieu s’apprête à remettre le couvert ce mois-ci.

Bikini

Bikini

JULIA REDEVIENT REBEKA

La tournée de Mansfield.TYA terminée, Julia Lanoë reprend son costume de Rebeka Warrior. Elle sera le 10 novembre au club Coatélan à Morlaix. Signe d’un retour du duo Sexy Sushi ? En attendant le nouvel album, les deux zigotos ont sorti un clip inédit y’a pas longtemps Le Mystère des pommes volantes.

CONFÉRENCE

électro

Pour tout connaître des musiques électroniques des années 80 aux années 2000, L’Échonova accueille Guillaume Kosmicki, enseignant en musicologie et spécialiste du genre, pour une conférence. De son émergence à son importance actuelle, ce sont 30 ans de sons électro qui seront analysés. Gratuit. 14

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Derrière ces machines à la carapace vitrée et au cœur en chocolat se trouvent des sociétés de distribution automatique. Parmi les plus connues, Selecta (900 machines dans les gares et plus de 10 000 réparties dans les entreprises) et Autobar (très présente dans les boîtes, 35 000 distributeurs sur toute la France).

où le déjeuner vous paraît trop loin. Elle met alors en place différentes gammes de snacks qu’elle propose aux lieux d’accueil selon le type de public. Les étudiants n’ont pas les même encas que des salariés d’un cabinet d’expert-comptable.

PARFOIS LES COMITÉS D’ENTREPRISE

Et si le client veut quelque chose de spécifique ? « On essaie de relayer, La plupart du temps, ce sont les mais c’est compliqué parce que nous commerciaux de ces entreprises avons nos fournisseurs. Et puis, nos qui choisissent quels snacks auront gammes ne sont pas figées : on inl’honneur d’être positionnés en 38 tègre des nouveautés, des produits ou en 15. « Neuf fois sur dix, nous régionaux, type galettes Saint-Michel pratiquons la gestion totale des distri- ou gâteaux Ker Cadelac», poursuit buteurs. On s’occupe de tout. Nous François Hirrien. les installons, les approvisionnons, 10 % des ventes ne se font cependant faisons la maintenance... », explique pas en gestion totale. Dans ce cas, François Hirrien, directeur commer- c’est le client qui fait son marché. « Il cial chez Avenir Distribution, une arrive que des comités d’entreprise, société basée à Quimper, qui fait par exemple, gèrent eux-mêmes leurs partie du groupe Autobar. Le boulot produits, Mais c’est assez marginal. d’une telle boîte, c’est d’anticiper En général, les entreprises ne veulent votre envie de 10 h 38, ce fameux pas s’encombrer avec ça. » moment où vous crevez la dalle et Isabelle Jaffré

SOUVENT LES COMMERCIAUX


Hélène Bamberger

UN FILM FAIT-IL UN BON LIVRE ?

DEUX SPÉCIALISTES DE LA QUESTION NOUS EN DISENT PLUS SUR LES LIENS ENTRE CINÉMA ET LITTÉRATURE. Les romans ont toujours influencé le cinéma, mais l’inverse est-il aussi le cas ? Pour Jean-Louis Jeannelle, de la revue spécialisée LHT, « l’influence des films sur la littérature a toujours existé. Malraux et Duras en étaient fascinés et cela se ressentait. » Parmi les formes de prolongement littéraire les plus connus : la novélisation, à savoir l’adaptation en roman d’une histoire née au ciné. « Un genre qui s’est développé au moment de la Nouvelle Vague », explique Jan Baetens, auteur de l’ouvrage La Novélisation. Un phénomène qui a ensuite explosé à partir des années 1980. « Aujourd’hui, chaque grosse production est quasi-systématiquement novélisée. Des succès commerciaux mais pas toujours critiques. Ces livres sont souvent bâclés. » Au-delà de la simple retranscription de l’écran à l’écrit, nos spécialistes préfèrent citer des romans comme Cinéma du Breton Tanguy Viel (photo) ou La Tentation des armes à feu de Patrick Deville qui apportent leur propre regard sur un longmétrage plutôt que de le paraphraser. « Marqué par un film, l’auteur, après l’avoir étudié, souhaite aller plus loin. Parfois 20, 30 ou 40 ans après. » Soirée littérature et cinéma, le 13 décembre au Triangle à Rennes 15


WTF

LA CUITE À PETIT PRIX EST-ELLE UN BON MARCHÉ ?

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PINK FLOYD

Soirée un peu particulière le 4 décembre au Quartz de Brest : dix musiciens seront sur scène pour interpréter en intégralité les 43 minutes de The Dark Side of the Moon, des Pink Floyd. Soit l’album le plus célèbre du groupe, celui qui a longtemps été considéré comme l’outil parfait pour tester la qualité sonore de sa chaîne hi-fi.

Franck Vogel

PHOTO-REPORTAGE

Jusqu’au 11 novembre se déroule dans la baie de Saint-Brieuc le festival Photoreporter, un rendezvous mettant à l’honneur le travail d’une quinzaine de photographes revenus de leurs voyages à travers le monde. Les expos ont lieu à Saint-Brieuc et dans plusieurs communes de l’agglomération.

À GAGNER

compils

À l’approche de l’édition 2012 des Trans Musicales, Bikini vous fait gagner des compils du festival. Pour tenter d’en remporter, rendez-vous sur notre page Facebook où le jeu-concours sera lancé ! 16

novembre-décembre 2012 #9

Le truc est connu : si tu veux ta cuite sans trop te ruiner, la bière forte est ton amie. On parle de ces canettes 50 cl, vendues à l’unité pour à peine un euro, voire moins. Vous en voyez plus qu’avant en magasin ? Normal, les ventes sont en hausse : +14 % en 2011, selon le site professionnel Rayon Boissons, ce qui représente en tout 325 000 hectolitres écoulés. « Mais ça reste toujours un petit secteur de niche », assure Clémentine Alary, du service com’ de Kronenbourg, distributeur de la 7,2 ° qui, comme son nom l’indique, tape bien la gueule. La marque alsacienne ne vient-elle pas pourtant d’étendre récemment sa gamme, avec une ambrée forte à petit prix et un pack de 7,2° vendu par six ? « C’est vrai, mais ce n’est pas mis en avant, on ne fait pas de pub. La raison est simple : ce n’est pas attractif. »

« BIÈRES INTENSES » Il faut reconnaître qu’en termes d’image, la bière des punks à chien n’a pas la cote. Gilles Badin, le directeur marketing du groupe SABMiller, responsable de la gamme Amsterdam, préfère d’ailleurs qualifier ses produits de « bières intenses » : l’Explorator, la Navigator et la Maximator, qui culmine à 11,6°. « Moins de 0,5 % de nos clients vivent dans la rue, affirmet-il. C’est plus la boisson de potes des 18-25 ans. Nous la considérons comme la bière intense des moments

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BREUVAGE PRÉFÉRÉ DES KEUPONS ET DES CLODOS, LA BIÈRE FORTE LOW COST EST EN PLEIN DÉVELOPPEMENT. VENTES QUI GRIMPENT ET GAMMES QUI S’ÉTENDENT, LA PICOLE À UN EURO S’INSTALLE.

intenses. » Mais aussi la roteuse de « ceux qui aiment les bonnes bières d’abbaye et pour qui les fins de mois sont difficiles ». Conscient néanmoins de leur réputation plutôt sale, le dircom’ insiste sur le soin apporté récemment au nouveau packaging des canettes, « plus moderne, plus ciblé premium et moins masculin ». C’est que la concurrence fait rage dans le secteur des bières fortes à bas coût. Les marques de distributeurs ont en effet envahi le marché ces dernières années, au point de représenter aujourd’hui un tiers des ventes. Ce qui n’empêche pas d’autres arrivées possibles dans le futur. Interrogée sur la question, Meteor, l’une des rares grandes brasseries de l’hexagone à ne pas y avoir encore investi, ne s’interdit d’ailleurs pas de « réfléchir à des propositions plus alcoolisées pour l’avenir ». R.D


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À RETOURNER AVEC VOTRE RÈGLEMENT PAR CHÈQUE À L’ORDRE DE : BIKINI MAGAZINE - ESPACE PERFORMANCE - BÂT C1-C2, 35769 SAINT-GREGOIRE


DOSSIER

PRÊT POUR LA FIN DU MONDE ? L’APOCALYPSE EST PROGRAMMÉE LE 21 DÉCEMBRE 2012. LA BRETAGNE NE SERA PAS ÉPARGNÉE. EN EXCLUSIVITÉ, ON VOUS RACONTE COMMENT ÇA VA SE PASSER. 18

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12 h 10. À la demande expresse des gouvernements, les premières conclusions et projections sont livrées dans l’urgence. « L’augmentation accrue de la chaleur à la surface de la planète engendrera en premier lieu la fonte des banquises arctique et antarctique. » Initialement calculée pour 2016 par Peter Wadhams, directeur du département de physique de l’océan polaire à l’université de Cambridge, la disparition totale de la banquise arctique sera finalement

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10 h 23. Alors que des infos commençaient à fuiter de la communauté scientifique depuis quelques semaines, une dépêche AFP confirme la nouvelle : « Le GIEC, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, annonce une hausse de la température moyenne de la Terre d’ici la fin de l’année, dépassant très largement les prévisions. L’ensemble de ses membres font part de leur plus grande inquiétude quant aux conséquences de ce réchauffement exceptionnel. » En l’espace de six semaines, la température à la surface du globe augmentera en effet de 6,4°C. Ce que le GIEC avait certes prévu dans son rapport de 2007… mais pas avant l’an 2100.

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MARDI 20 NOVEMBRE 2012 : J-31

effective avant 2013. Le début de bouleversements en série. Le premier au programme : l’élévation du niveau des océans.

sitif ORSEC départemental se met en place. Les préfectures du Finistère, des Côtes d’Armor, du Morbihan et d’Ille-et-Vilaine activent leur centre opérationnel départemental (COD), 12 h 11. Reprise immédiatement par organisation permettant de coordontous les médias, l’info monopolise ner les actions en situation de crise. les titres. Et réalimente les rumeurs Dans chaque département, le préfet de fin du monde annoncée pour le prend la direction des opérations 21 décembre 2012. Sur Twitter, les de secours (DOS) et s’appuie sur hashtags #Apocalypse, #LesMayas un officier sapeur-pompier désigné AvaientRaison, #JugementDernier Commandant des opérations de et #OnVaTousCrever sont en TT. secours (COS). Tous sont en lien À cette heure-ci, il est malheureu- permanent avec Paris. sement encore trop tôt pour savoir s’il est déjà trop tard. 9 h 00. Les COD ordonnent l’évacuation immédiate des zones littorales MERCREDI 21 NOVEMBRE 2012 : J-30 présentant un risque de submersion. 7 h 30. Face à ces annonces, le dispo- Dans la région, 52 communes sont concernées. Toutes avaient été identifiées en 2011 par le Plan national des préventions des submersions, suite au passage de la tempête Xynthia en février 2010. « J’porte la poisse ou

« Une hausse exceptionnelle de la température de la Terre » 20

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Comme en 2002, le Morbihan frappé par un séisme majeur

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8 h 01. Depuis une dizaine de jours, le niveau de la mer a augmenté continuellement. Les communes du littoral boivent la tasse. À Brest, des bateaux à l’abandon dérivent jusqu’à la place de la Liberté. À Vannes, on peut désormais se baigner depuis l’Hôtel de Ville. Si certaines localités pataugent, d’autres sont déjà noyées. En cette première matinée de décembre, les îles de Molène et de Bréhat se réveillent en partie coulées ; Penmarc’h, Loctudy, Séné, Damgan, Paimpol et SaintMalo sont totalement rayées de la quoi ? », s’interroge Jean-Jacques carte. Conséquence d’une hausse Brot, actuel préfet du Finistère, en de neuf mètres du niveau de la mer. poste en Vendée à l’époque de la catastrophe. JEUDI 6 DÉCEMBRE : J-15 14 h 10. Dans le Morbihan, le milieu 10 h 05 : L’évacuation est étendue à de l’après-midi est marqué par un l’ensemble des communes du littoral, tremblement de terre d’une violence ainsi qu’aux 190 communes actuel- extrême. D’une magnitude de 9,0 lement recensées par le Plan de pré- (similaire à celui survenu au Japon vention du risque inondation. « C’est en 2011), le séisme a pour épicentre la merde », lâche Michel Cadot, Plouay, sur la faille de décrochement préfet de région, à son directeur de sud-armoricaine. Cette même faille cabinet avant de lui annoncer qu’un avait déjà causé, en septembre 2002, dispositif ORSEC de zone Ouest sera ce qui était alors le dernier tremmis en œuvre dans la journée. blement important ressenti dans la région : le séisme d’Hennebont avait SAMEDI 1er DÉCEMBRE : J-20 atteint une magnitude de 5,4. Si ce 6 h 00. La hausse du niveau de la dernier n’avait pas fait de victime, mer s’est faite beaucoup plus vite les premières estimations concernant que prévu. C’est désormais officiel : Plouay sont dramatiques : plus de les pôles Nord et Sud ne sont plus 3 000 personnes auraient perdu entourés de glace, balayant ainsi la vie. « Les besoins dépassent les toutes les prévisions des scientifiques. moyens, s’inquiète le chef de corps Take that Claude Allègre. départemental des sapeurs-pompiers.

Nous ne sommes pas en mesure de secourir toutes les personnes qui seraient encore vivantes. » Comme cela s’opère en cas de situations d’exception, des conventions d’assistance mutuelle permettent aux Sdis (service départemental d’incendie et de secours) voisins de venir en renfort. 17 h 55. Moins de quatre heures après cette catastrophe, le sol a déjà tremblé plusieurs fois dans les trois autres départements, laissant présager le pire quant à d’éventuelles répliques. Depuis 1960, moins d’une vingtaine de séismes de magnitude supérieure à 4,0 avaient été enregistrés en Bretagne. Un chiffre battu en l’espace d’une journée... « À l’heure actuelle, il est encore impossible de connaître le nombre de personnes touchées », communiquent les autorités. Selon les services de secours dépêchés sur place, cela se chiffrerait « à minima » à plusieurs dizaines de milliers de victimes. 18 h 20. Dans toutes les villes, les mêmes scènes. Des attroupements, des personnes allongées au sol, des gens qui courent, des cris, des larmes et le bruit continuel des sirènes. À la télé, des images similaires proviennent d’autres régions, d’autres pays, d’autres continents. Sur i>Télé, le directeur du CNRS avoue son impuissance. « Aucun des scientifiques n’a vu venir ces séismes. Du fait de cette activité soudaine 21


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D’après les premiers calculs, des collisions devraient avoir lieu d’ici 72 à 96 heures. Pour le moment, nous ne connaissons ni les points d’impact ni l’importance des dégâts qu’elles devraient causer. » 17 h 35 : L’onde de choc de cette annonce est phénoménale. La panique envahit chaque foyer. Où se réfugier ? Où se protéger ? Dans la rue, les mouvements de foule, les scènes de violence, les pillages se multiplient. Pour contenir ces débordements, des unités militaires quadrillent chaque ville, un couvre-feu est instauré. 19 h 56. Au Sdis d’Ille-et-Vilaine, le standard explose. « Quand il y a une grosse averse orageuse, c’est 150 appels à la minute, explique le commandant Durocher. Alors, quand on nous annonce ce qui ressemble à la fin du monde, vous imaginez… »

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et imprévisible, il nous est difficile LUNDI 17 DÉCEMBRE : J-4 d’anticiper les prochaines répliques. 11 h 06. Cela fait onze jours que Il faut se préparer au pire. » la terre n’a pas tremblé. Mieux, la situation sur la côte s’améliore : à 19 h 00. Les plans communaux de Brest, Lorient et Roscoff, le niveau sauvegarde (PCS) se mettent en place de la mer a même légèrement baissé. dans les communes touchées. Non Le spectacle est pourtant loin d’être sans quelques difficultés, notamment réjouissant : débris, gravats, voidans les grandes villes où le chaos tures et bateaux cassés recouvrent règne. « En sécurité, l’habitude est les rues. Des corps sont également de prévoir tous les types de scénarios découverts. Des chapelles ardentes pour ne jamais être dépassé. Cela doivent être montées, les hôpitaux permet de répondre à la situation en et centres funéraires étant saturés. un minimum de temps. Nous avons des plans d’actions pour les risques 17 h 30. L’accalmie était de courte qui, potentiellement, sont considé- durée. L’union astronomique interrés comme possibles et importants, nationale annonce le pire scénario explique Alain Derrot, en charge de qu’il était possible d’imaginer. « Des la sécurité civile à la Ville de Rennes. astéroïdes croiseront l’orbite de la Or, la probabilité d’un séisme majeur Terre. Pour des raisons inconnues, dans la capitale bretonne était très ces géocroiseurs ont quitté soudaifaible, voire nulle. La ville n’avait nement la ceinture située entre Mars pas de plan d’actions préétabli pour et Jupiter et se dirigent vers nous à un cas comme celui-ci. » une vitesse encore jamais atteinte.

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21 DÉCEMBRE : JOUR J 4 h 12. La nuit est agitée, les éléments semblant se réveiller tous en même temps. Alors que sur la côte, des vagues d’une vingtaine de mètres frappent falaises, ports et rivages, le vent se lève. Des rafales à 180 km/h sont enregistrées dans les Côtes d’Armor, balayant toitures, structures agricoles et hangars. On se croirait 25 ans en arrière, quand la tempête de 1987 touchait durement l’Ouest, faisant quinze morts à l’époque.

« Des astéroïdes croiseront l’orbite de la Terre d’ici 96 h » abris de la Seconde Guerre mondiale sont rouverts. Parmi ceux-ci, l’abri Sadi Carnot qui avait déjà servi de refuge pendant les bombardements lors du siège de Brest en 1944. En ce début de matinée, le monde se presse devant les deux portes blindées de l’abri antiatomique qu’abrite aujourd’hui le lieu. « Tout le monde ne pourra pas rentrer », alerte un militaire à l’entrée.

les bâtiments et creusant des cratères au sol. Les impacts sont incessants. Des abris souterrains cèdent face à la force des chocs.

12 h 21. Large de 300 mètres, un astéroïde fonce à 93 000 km/h en direction de la Terre. Une collision avec un objet de cette dimension équivaudrait à 600 000 fois la puis7 h 00. La pluie de météorites est sance de la bombe d’Hiroshima. annoncée pour aujourd’hui. La Cela raserait entièrement un pays priorité des autorités est de s’assu- 9 h 42. Les premiers astéroïdes de la taille de la Belgique. Ou un rer que le maximum de personnes commencent à traverser le ciel territoire de la superficie de la Brepuisse s’abriter. Les plus profonds resté sombre depuis l’aube. Seules tagne. Le point d’impact est connu : des garages souterrains sont réqui- ces boules de feu l’éclaircissent. Loudéac, en plein cœur de la région. sitionnés, idem pour les parkings Des détonations résonnent. Les À quelques minutes du bombardeprivés. À Rennes, le réseau du métro dernières observations astrono- ment ultime, on peut le dire : la fin est ouvert à la population. Située à miques laissent peu d’espoir : c’est a bel et bien commencé. 24 mètres de profondeur, la station une pluie de roches interstellaires Julien Marchand Anatole France est la première à qui va frapper la terre. Les premières Illustrations : Julien Zwahlen être remplie. À Brest, les anciens météorites sont petites, bombardant et Jean-Marie Le Gallou 23


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«  LA 183e FIN DU MONDE DE L’HISTOIRE  »

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Luc Mary, historien et auteur de l’ouvrage Le Mythe de la fin du monde.

C’est un phénomène que l’on retrouve dans toutes les civilisations ? C’est inhérent aux trois religions monothéistes. Par contre, du temps des Grecs, on n’y croyait pas. Dans la cosmologie grecque, l’univers avait créé les dieux et non l’inverse. On n’envisageait alors pas la fin du monde mais plutôt la fin d’un cycle. Un peu comme les Mayas : ces derniers n’ont pas prédit la fin du monde dans sa totalité le 21 décembre 2012 mais seulement la fin du 5e soleil. On remet simplement les compteurs à zéro.

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Pourquoi la fin du monde nous fascine-t-elle autant ? La fin du monde, c’est la peur de l’avenir. Toutes les générations ont cru qu’elles étaient les dernières. C’est un phénomène permanent : la fin du monde annoncée pour 2012 est la 183e de notre Histoire. Cela fait partie du patrimoine culturel de l’humanité.

Quels sont leurs fondements ? Jusqu’à l’orée du 20e siècle, elles étaient surtout liées à la peur des dieux. Depuis, c’est devenu essentiellement la peur de l’autodestruction de l’Homme par l’Homme. L’épouvantail de la 3e Guerre mondiale a marqué le siècle jusqu’à la fin de l’Union Soviétique. La peur de la nature a aujourd’hui pris le dessus. Tout le monde a l’impression que la nature s’emballe... La fin du monde est également rationalisée par les scientifiques : on sait que l’espace est dangereux et qu’un cataclysme cosmique peut se produire. Rien n’est immortel dans l’univers.

jours été prophétisée pour punir l’Homme. On dit d’ailleurs que seuls les justes seront ressuscités.

L’apocalypse de 2012 est-elle particulière ? Elle restera comme la plus médiatisée. Cela fait quatre/cinq ans qu’on en parle, notamment grâce à Internet. Les différentes crises – économique, sociétale, environnementale… – se conjuguent et accentuent le phénomène. Cette fin du monde est à mi-chemin Y’a-t-il eu des époques où la crainte entre les vieilles croyances et les de fin du monde était plus forte ? théories scientifiques. Les actuels Le temps des croisades a été très bouleversements, catastrophes et propice à la prolifération des protensions seraient des prémices du phéties apocalyptiques. Les guerres Le mythe de la fin du monde a-t-il futur cataclysme… Cette annonce de religion au 16e siècle également : été instrumentalisé ? est également la première univeril y avait des annonces de fin du L’Église l’a toujours agité. C’était sellement connue. Peut-être aussi la monde pratiquement tous les deux pour elle une explication du monde : dernière : on en a tellement entendu ans. Le 20e siècle n’a pas non plus été cela avait commencé avec la Genèse parler que les prochaines seront ceravare : de 1900 à 2000, on a quand et devait se finir par le Jugement tainement déconsidérées. même enregistré 18 prophéties. dernier. La fin du monde a touRecueilli par J.M 24

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ARMAGEDDON A DÉJÀ FRAPPÉ DINAN

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On savait les Ricains pas forcément super à cheval sur la géographie à la télé – les cartes CNN… –, sachez qu’ils le sont aussi au ciné. En 1998, le blockbuster – et joli nanar – de l’été Armageddon posait ses caméras à Dinan, dans les Côtes d’Armor, pour illustrer la destruction de… Paris. Ben ouais, pourquoi se faire chier. À l’écran, les plans de la cité médiévale ne font que quelques secondes, mais durent suffisamment longtemps pour reconnaître la place des Cordeliers, où une scène de panique générale est tournée, et la Tour de l’Horloge qui se voit frôlée par une météorite (photo). Cette même météorite qui rasera le pays cinq secondes plus tard. OK, mais pourquoi choisir Dinan pour illustrer Paris alors que près de 400 bornes les séparent tout de même ? « Michael Bay (le réalisateur

du film, ndlr) a vraiment flashé, il a trouvé à Dinan un super cachet, confiait à Ouest-France le régisseur général à l’époque du tournage au printemps 2008. L’authenticité de la ville colle parfaitement à l’image qu’il veut transporter de la France et de l’Europe. » Murs en pierres taillées, deudeuche qui se dodeline, terrasses extérieures et vieilles chaises en bois : là-dessus pas de souci, l’image carte postale de la France transparait bien à l’image. Bon les Dinannais, ça vous a plu d’apparaître à côté de Bruce Willis ? À l’office de tourisme de la ville, le film n’a visiblement pas laissé d’énormes souvenirs (« Oula, ça ne dure que quelques secondes… »), chacun préférant retenir d’autres téléfilms ou longs métrages tournés à Dinan. Parmi ceux-ci, L’Inspecteur Lavardin de Chabrol, L’Heure Zéro, Un Jour ou L’Épervier.

QUELLE MUSIQUE ÉCOUTER PENDANT L’APOCALYPSE ? Six musiciens vous disent quelle playlist mettre quand tout va péter pour de bon.

BUMPKIN ISLAND

Mogwai : Stereodee « Une belle musique pour un tsunami, un tremblement de terre géant, ou encore un joli champignon atomique. » Arcade Fire : Neighborhood 3 Jonsi et Alex : Boy 1904 Ben Frost : Theory of machines

MERMONTE

Phillip Glass : Part 1 « L’impression que la maison tourne en même temps que la musique. » Beatles : Strawberry fields Dillinger Escape Plan : 82588 Beach boys : God only knows

LA FEMME

Beethoven : Symphony No.7 in A major op.92 - II, Allegretto « À écouter quand l’apocalypse se termine, que le chaos règne. Il reste tout à reconstruire. Y’a de l’espoir dans ce morceau et beaucoup de beauté. » Les Landles : Le monde est mort Serge Gainsbourg : Initials BB La Femme : Paris 2012

CHRISTINE

Justice : Genesis « Une sorte de péplum apocalyptique et fantastique. » Badbadnotgood x Tyler The Creator : Seven Noisia : Machine Gun Rone : Parade

LADYLIKE LILY

Boney M : Rasputin « S’il fallait une ultime danse, ce serait sur ce morceau. Mais avec quelques verres d’alcool... » Midlake : Roscoe Montgomery : Champagne Éric Satie : Gnossienne No. 1

GRANDMARNIER

The Doors : The end « Tous allongés sur un tapis, on regarde les formes créées par une lampe à huile, en attendant de ne plus rien voir du tout » Fontaine & Areski : C’est normal Yelle : S’éteint le soleil Soundforce : The fin du monde Housse de Racket : Apocalypso 25


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« REMETS LA P’TITE SŒUR »

ALORS QUE LES BARS RURAUX DISPARAISSENT PETIT À PETIT, QUELQUES JEUNES REPRENEURS TENTENT LE PARI DE TENIR UN RADE À LA CAMPAGNE. UN REPORTAGE ANISÉ. 27


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la campagne, difficile de distinguer le bon du mauvais chasseur. L’un voit un animal, il tire ; l’autre voit un animal, il tire. Sauf que c’est pas pareil. Les bons et les mauvais bistrots, c’est la même chose. Il y en a chez qui on se sent bien, d’autres non, alors que globalement, c’est toujours un peu la même chose. Un patron (ou une patronne), une tireuse à bière, un zinc, des verres et des potes.

Laurent, Serge et Jacky Prenez le Carolys par exemple. Un troquet basé dans les Côtes d’Armor à La Bouillie – oui, c’est un vrai nom de commune – et tenu par Matthieu, 28 ans. Il suffit d’une poignée de minutes pour savoir qu’on va s’y

plaire ou pas. L’ambiance y est chaleureuse mais disons… rustique. Déco plutôt spartiate, deux choix de pression, des habitués débarquent avec fraise sur la figure et bottes aux pieds, s’interpellent à coups de « Ça va ? Ouais mieux que le temps » et n’ont pour la plupart même pas besoin de commander qu’ils ont déjà leur alcool favori posé sur le comptoir. Des kirs remplis ras la gueule qui se vident comme des shooters pour les plus pressés, des pastis généreusement servis qui en appellent d’autres – ce qui est fait d’un « remets la p’tite sœur » ou d’un rapide geste circulaire de l’index au-dessus du verre pour signifier qu’il est vide – et bien sûr la bière. En demi toujours, pas en pinte, on n’est pas

Des kirs remplis ras la gueule et vidés comme des shooters 28

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chez les rosbifs. Les piliers du soir s’appellent Laurent, Serge, Jacky et ils se mettent bien à l’heure de l’apéro, causant chantier en cours et poisson du matin vendu à la criée d’Erquy, non loin.

« Le parlement du peuple » Si vous kiffez le concept du bar lounge et les cocktails à base de jus de goyave, cette ambiance fait tout drôle… « Moi j’ai toujours connu ça donc je m’y suis habitué, j’ai même appris à apprécier, la preuve ! », rigole Matthieu. Et pour cause, l’établissement est un héritage de sa grand-mère. Enfant du village, il baigne depuis tout gamin dans cet univers intemporel fait de formica, de dessous de bock Amstel et d’assiettes de cahouètes. À La Bouillie, c’est ainsi que la clientèle aime son bar et c’est ainsi qu’il est donc resté. Car le bistrot de campagne, plus qu’un simple lieu où l’on picole, est


« le parlement du peuple », comme le nomme Laurent Lutse, président de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie). « C’est souvent le dernier lieu de socialisation du quotidien qui reste dans un bourg. » Leur nombre a considérablement diminué ces dernières décennies : de 200 000 en France en 1960, il est passé à 35 000 aujourd’hui, d’après les estimations de l’Umih. Pourtant, leur importance reste vitale. « C’est lors de la fermeture d’un établissement que les habitants d’un village prennent conscience de son rôle essentiel, note Nicolas Cahagne, sociologue spécialisé sur la question. C’est mal vécu car considéré comme un déclassement, la vie économique perd sa devanture. Il ne manque plus que la fermeture de l’école primaire pour que la commune soit définitivement morte. » Alors, pour que subsiste cette agora locale, les initiatives se multiplient.

Un univers fait de formica et de dessous de bock Amstel De la part des collectivités locales tout d’abord, qui n’hésitent pas à mettre les moyens financiers pour trouver des repreneurs, par le biais de locations en gérance ou de loyers aidés. De la part des institutions touristiques aussi, qui ont bien compris qu’un territoire sans vie n’attire pas. La fédération régionale des pays touristiques de Bretagne a ainsi créé en 2006 le label “Café de Pays”.

valorisation des produits du terroir » – bières de microbrasseries locales, vente de produits des paysans du coin… – et « favoriser les échanges entre la population locale et les touristes », en mettant en place des manifestations culturelles, concerts, conférences and co. Parmi les 28 cafés de pays recensés en Bretagne, il y a Le Contretemps, à Moncontour. Fabrice, le gérant, a débuté dans le métier à 25 ans, dans un rade de la commune qui « Rôle d’ambassadeur » n’existe plus aujourd’hui. « L’idée est de mettre en avant les « Puis l’an dernier, l’opportunité s’est cafetiers jouant le rôle d’ambas- présentée de récupérer ce lieu », présadeur de leur secteur », explique sente ce discret patron aujourd’hui Marie Languille, la chargée de mis- âgé de 32 ans. Dans cette ancienne sion. Pour bénéficier de l’attractive boulangerie renovée, Fabrice proétiquette “Café de Pays”, les gérants pose en pression la bière issue de la doivent « avoir une démarche de brasserie de Launay, toute proche. 29


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Très lié aux assos locales, il n’a pas eu de difficultés ni à être labellisé “Café de Pays” – « un plus, surtout pour les gens de passage » – ni à implanter durablement son commerce dans une localité qui ne chiffre que 900 habitants à l’année. Signe de la bonne santé de sa petite entreprise, il a même embauché un saisonnier cet été.

longs/grosse beubar, il y avait pas mal de turn-over, il fallait redynamiser la chose. » Au même moment, l’asso culturelle du coin cherche un lieu de concert. Le nordiste rénove alors le troquet, fait de l’événementiel chaque week-end et réussit en quelques mois à se constituer une solide clientèle. « Les gens se rencontrent avec l’envie de partager un bon moment. J’offre le cadre, après Cheveux longs et grosse beubar les clients y font ce qu’ils veulent. » Autre illustration à Lanloup, tou- La recette cartonne. « Avant on était jours dans les Côtes d’Armor. Là obligé de se déplacer à Saint-Brieuc c’est Laurent, 34 ans, le maître des (à quarante minutes en voiture, lieux. Débarqué de Valenciennes il ndlr) pour assister à un concert. y a douze ans, il a d’abord connu cet Aujourd’hui ce sont les Briochins établissement comme client, avant qui viennent. » de le reprendre en 2009. Nicolas Cahagne observe ce « Quand je suis arrivé, explique bouillonnement autour de ces l’homme au joyeux combo cheveux bars en sillonnant régulièrement la

« Le débit de boisson a toujours été un lieu d’innovations... » 30

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région pour les besoins de sa thèse sur le sujet (lire par ailleurs). Selon lui, ce phénomène est salvateur mais n’est en rien révolutionnaire.

« Un produit d’appel » « Le débit de boisson a toujours été un lieu d’innovations, explique-til. Par exemple, le téléphone et la télévision ont pénétré beaucoup de zones rurales par les cafés, car c’était un moyen d’attirer du monde. En des termes actuels, on pourrait considérer ça comme un produit d’appel. » Malgré le difficile contexte économique, les contraintes législatives et l’urbanisation rampante, des motivés continuent donc de reprendre le flambeau. Laurent Luste de l’Umih comptabilise « 22 000 licences III et IV accordées en France depuis un an et demi, dont beaucoup de jeunes pleins de bonnes idées : café-lecture, brocante, tricot… » Attention néanmoins à ne pas


« LE DERNIER ENDROIT OÙ ON CAUSE »

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verser dans l’angélisme béat. Les cas de Matthieu d’une part, qui a réussi à fédérer une clientèle autour de son bar à La Bouillie ; de Fabrice et de Laurent d’autre part, qui ont su développer leur bar grâce au concept “Café de Pays”, ne doivent pas masquer les difficultés de certains autres jeunes repreneurs. À La Trinité-Langonnet par exemple, minuscule bourgade située non loin de Gourin dans le Morbihan, Magali dresse un tableau nettement moins positif de la situation. Tombée amoureuse d’un Anglais vivant au village, cette Clermontoise diplômée Bac +5 a plaqué sa vie d’avant pour venir s’y installer.

du bourg. Avec de belles idées en tête : développer des activités pour les clients, les faire se rencontrer, attirer une clientèle féminine via des soirées tricot… Mais 18 mois plus tard, c’est la désillusion. « Bien que je reste motivée à l’idée de faire vivre ce lieu, c’est difficile », reconnaît-elle. Ce n’est pas le petit smic qu’elle parvient à se dégager qui la déçoit, mais plutôt le manque d’enthousiasme de la population. « J’y mets de la bonne volonté pourtant, indique la jeune femme de 28 ans, en montrant le coin lecture qu’elle a aménagé, mais les gens ici ne sont visiblement plus habitués à échanger autour d’un verre. » Dans de tels lieux où cohabite une Alimentation et dépôt de pain population très diversifiée – ruraux, Rapidement confrontée à l’absence néo-ruraux, retraités… – le bar ne d’emploi dans son secteur d’activité peut pas miraculeusement créer du – le management des entreprises –, lien social du jour au lendemain. elle s’est décidée à reprendre début 2011 le bar/alimentation/dépôt de Régis Delanoë pain/relais Poste et seul commerce avec Benoît Tréhorel

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Nicolas Cahagne, doctorant à Rennes 2, réalise une thèse sur les bars ruraux. La Bretagne a-t-elle un rapport particulier aux bistrots ? D’après l’Insee, elle concentre environ un dixième des débits de boisson français. Aujourd’hui encore, rares sont les communes bretonnes à ne pas avoir de bistrot, alors que dans d’autres régions, ils ont plus vite disparu. Ce particularisme date du 19e siècle et s’est poursuivi depuis. En 1914, il y avait en Bretagne un débit pour 26 adultes masculins ! Le bistrot de campagne a-t-il une fonction sociale en zone rurale ? Il se situe aux toutes premières places dans la hiérarchie des services. Du fait de la dispersion de la population en campagne, le café devient souvent plus qu’un débit de boisson : c’est le commerce-qui-fait-tout ou presque ! C’est aussi un espace accessible à tous. Il est considéré comme le dernier endroit où on cause, où les discussions et les débats sont autorisés. Quel avenir pour les jeunes repreneurs ? Le secteur des débits de boisson connaît une érosion importane. Mais j’observe de nombreuses reprises par de jeunes cafetiers. Certains s’inscrivent dans la continuité de leurs prédécesseurs, d’autres arrivent avec leurs propres idées et tentent d’impulser une dynamique locale. Malheureusement il y a beaucoup de désillusions. Certains jeunes ne se rendent pas compte du travail demandé et de la rigueur à tenir face à une population qui attend beaucoup d’eux.

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PAPIER

BANDE ORIGINALE LE CINÉMA PORNO EST UN GENRE OÙ IL EST COUTUME DE PRIVILÉGIER L’IMAGE. ENTRE DEUX SCÈNES DE CULBUTES, DE LA MUSIQUE SE FAIT POURTANT ENTENDRE. MAIS QUI SE CACHE DERRIÈRE CES COMPOSITIONS PARFOIS BIEN FOUTUES ? l y a des films dont on reconnaît immédiatement la bande originale. Certaines d’entre elles sont aussi connues que le longmétrage lui-même. Seulement voilà, tout le monde ne s’appelle pas Drive, Kill Bill ou Dirty Dancing. Dans le cinéma porno, le constat est encore plus cruel : le public n’en a généralement rien à foutre de la musique qui passe avant, pendant ou après les scènes. Parmi vous, chers lecteurs, qui 32

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serait capable de siffloter le thème de Secrétaires prêtes à tout, Infirmières à domicile ou Étudiante le jour, escort girl la nuit ? Avouez que c’est plus facile avec Amélie Poulain. Méconnue ou ignorée, la musique dans le X n’est cependant pas inexistante. Clip de cinq minutes ou long métrage, soft ou hard, pro ou amateur : quel que soit le type de production, il suffit de tendre l’oreille pour découvrir des touches

de synthé, des lignes de basse, des nappes de violons ou des grattements de guitare. D’où notre interrogation : existe-t-il des musiciens estampillés films de boules ? Patron d’Iris Casting Production, une boîte spécialisée dans le X amateur, le Rennais Pascal Galbrun utilise de la zik dans chacune de ses vidéos. Sous contrat avec la société Dorcel, à qui il vend les droits de ses films afin qu’elle les commercialise, il traite directement


avec le pape du porno chic. C’est le cas d’Éric Chedeville, alias Rico the Wizard, proche des Daft Punk et de Sébastien Tellier avec qui il a taffé sur l’album Sexuality. Organiste attitré de Peter Von Poehl, Charlie O, également musicien pour Philippe Katerine et Étienne de Crécy, a lui aussi quelques bandes son de films porno à son actif. Parmi ses collaborations phare, celle avec le réalisateur John B. Root. « J’ai commencé à travailler avec lui sur le film Exhibition 99. Je trouvais ça cool de bosser sur un projet comme ça. J’aimais bien l’idée et le côté baba cool du cul libéré. J’avais l’impression d’être dans les années 70, se souvient-il, amusé. Et puis John B.Root est quelqu’un de cultivé. Dans ses films, il veut des compositions et pas uniquement qu’on fasse tourner la boîte à rythmes. » avec le leader du X français pour le choix des pistes audio. « Toutes les musiques qu’on retrouve dans mes prod’ lui appartiennent. J’envoie à Dorcel mes images montées et donne juste quelques indications sur le style de bande son qui collerait le mieux à l’histoire, explique l’auteur de La France Profonde, une série porno au cœur de nos régions. Souvent, ce sont des morceaux qu’on retrouve sur plusieurs films. Si l’ambiance correspond, ils sont réutilisés. » Contactée, la société Dorcel n’a pas souhaité nous en dire plus (« La musique peut être signée par des artistes, des studios ou directement par Marc. Mais nous ne souhaitons pas communiquer davantage pour ne pas dévoiler nos secrets de fabrication. »). Malgré tout, quelques compositeurs ont déjà rendu publique leur collaboration

Une valse en pleine partouze Dans un style cinématographique où l’image prime, deux écoles apparaissent quant à la fonction de la musique : ceux qui l’utilisent dans les scènes de sexe et ceux qui la réservent uniquement pour les moments de comédie. « Dans le genre amateur, on a l’habitude de laisser les sons réels pour les plans hard sans ajouter d’effets sonores, éclaire Pascal Galbrun. Par contre, si on a une scène de balade sur la plage ou une course poursuite en voiture, la musique se justifie. » Position différente pour John B. Root qui, pour chaque long métrage, essaie d’associer culbutes et instruments. « La musique n’est pas qu’un accompagnement. Ce qui m’intéresse, c’est de lui donner un rôle de contrepoids. Dans une de mes scènes de partouze

par exemple, j’avais un héros en plein désarroi. On a alors utilisé une valse et ça marchait : on voyait la scène comme si on était dans sa tête ! » Même son de cloche du côté du réalisateur Jack Tyler. Pour ses films Propriété privée et Journal de la chair, il a ainsi utilisé des musiques originales, faisant spécialement appel à des formations. Parmi celles-ci, les Morlaisiens d’Abstrackt Keal Agram, ancien groupe de Tepr (Yelle) et de Lionel Pierres (Fortune). « On a bossé sur six de ses films. Ça reste une expérience plutôt cool car amusante, se rappelle Lionel. On lui a composé des morceaux électro – parfois des fonds de tiroir j’avoue – mais on a aussi fait des trucs en impro, accompagné d’un batteur, avec le film qui défilait sous nos yeux. Après, artistiquement, c’était surtout la rencontre qui était intéressante. » Malgré leurs bonnes volontés, les plus artistes des réal’ reconnaissent que la musique reste « le parent pauvre » dans le métier. Depuis les années 70 et 80 (âge d’or des B.O dans le X avec des films comme Gorge Profonde, Emmanuelle ou Bilitis), tous observent un désintérêt croissant pour les bandes son. La baisse des budgets dans l’industrie pornographique est citée comme principale explication. « À part des sociétés comme Dorcel, plus personne ne gagne d’argent dans le porno, affirme John B. Root. La plupart des réalisateurs ne peuvent plus s’offrir des musiciens. Pour mes films, je fais appel à eux uniquement si une diffusion Canal est prévue. Ce qui permet aux artistes d’être payés par la Sacem en droits d’auteur. Ça se chiffre alors en quelques milliers d’euros. » Julien Marchand 33


DOSSIER

FAN UN JOUR FAN TOUJOURS PASSIONNÉS, ACCROS, COLLECTIONNEURS... ILS SONT LA FRANGE LA PLUS HARDCORE DU PUBLIC CULTUREL. RENCONTRE AVEC QUELQUES-UNS DE SES REPRÉSENTANTS. 34

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’est quelque chose qui démarre le plus souvent à l’adolescence. Musique, cinéma, sport, art… on se met à bloquer sur un truc, avant de tomber dedans et d’en faire sa passion. Avec le temps, deux possibilités apparaissent : soit on perd l’intérêt et on en trouve de nouveaux ; soit on reste invariablement enthousiaste jusqu’à en faire l’un de ses principaux loisirs. Si la majorité d’entre nous se retrouvent dans la première catégorie, certains se reconnaissent dans la deuxième. Si nous sommes des amateurs, eux sont des fans. Nous en avons interrogés. Ils assument ce statut et reconnaissent les excès qui vont avec. Adoration sans faille, collection interminable, documentation permanente, recherche quotidienne… tous ont en commun des mêmes traits et comportements, qu’ils soient dingos de Johnny ou de Nirvana, des Spice Girls ou de Manu Chao. À l’heure de la culture jetable, du buzz et du zapping, les fans inconditionnels interpellent toujours. On leur a donc demandé de nous expliquer ce que c’était de l’être. 35


DOSSIER

« PERSONNE N’ARRIVE À LA CHEVILLE DE JOHNNY » « Je suis fan de Johnny depuis que je suis ado. J’avais une dizaine d’années quand je l’ai entendu chanter Mal et j’ai tout de suite accroché. J’ai alors commencé à acheter des disques… le début d’une grosse collection. Vinyles, CD, livres, briquets, tasses, stylos, t-shirts… C’est un petit musée que j’ai dans mon garage. Quand on me cherche, je suis ici… J’y passe minimum deux heures par jour. L’objet le plus rare ? Un peigne lui appartenant. Il l’avait jeté dans la foule lors d’un concert à Nîmes, mon frère avait réussi à l’attraper ! Je découpe aussi tous les articles de presse. Au final, je remplis un classeur chaque année. Mon marchand de journaux me connaît et me met de côté tous les magazines où on le voit. Je l’ai vu une quinzaine de fois en concert. Personne n’arrive à sa cheville. À ses débuts, il faisait même des

matchs de boxe sur scène : truc de louf ! Si je me souviens de mon premier concert ? Oui, c’était à Pantin, le pote avec qui j’étais avait oublié les clés à l’intérieur de la voiture, obligé de casser la vitre… mais c’était bien. Sa voix, on la reconnaît tout de suite. Ça, c’est grâce à la Gitane… (il augmente le volume de la chaîne hi-fi) tiens écoute… niveau vocal, c’est le n°1… Quand tu as le blues, tu as toujours une chanson de Johnny qui colle à ta vie. Et puis il y a quatre ans, après avoir participé à un rassemblement de fans à Châteauroux, on s’est décidé avec trois copains à monter un club dans le Morbihan. Malheureusement, je n’ai pas encore rencontré mon idole. Par contre, j’ai un pote qui a réussi un jour à lui serrer la main. Et ben, il a tatoué la date sur son poignet ! Moi, j’ai simplement le même tatouage d’aigle que lui sur le bras. Tiens, regarde.» J.M

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YVES, 57 ANS :

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« SUR YOUTUBE EN COSTUME STAR TREK » à la rencontre de nouveaux peuples, d’expliquer l’inexpliqué, d’explorer de nouveaux mondes… On se situe entre le 23e et le 24e siècle, les personnages sont à la fois des humains et des extraterrestres : tout cela m’a plu. Forcément, j’ai beaucoup de DVD, GABRIEL, 23 ANS : une vingtaine de coffrets. Je me suis « Je suis devenu trekkie (fan de Star abonné exprès à Canal Sat pour receTrek, ndlr) d’une façon toute bête : voir Syfy, seule chaîne qui passe les il y avait un temps de merde, j’ai séries Star Trek. En France, ça reste allumé la télé et suis tombé dessus. malheureusement beaucoup moins J’aimais déjà les histoires de science- populaire que Star Wars, alors qu’aux fiction mais là il était question d’aller États-Unis, c’est une institution. 36

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Je passe beaucoup de temps sur Internet. J’ai participé pendant de nombreuses années à un jeu de rôle en ligne. Avec des potes, on faisait aussi sur YouTube “Les Chroniques du docteur Laundal”, une émission où on expliquait la série en portant les costumes. On se marrait bien. Mais j’ai moins le temps aujourd’hui à cause du boulot. Par contre, j’écris en ce moment une pièce de théâtre qui s’inspire de Star Trek et de Futurama. Je suis dessus depuis 2009. Où j’en suis ? À la moitié en gros. »


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« À LA MORT DE KURT COBAIN, J’AI CHIALÉ »

ANTHONY, 34 ANS : « Début 1994, on peut dire que j’étais un grand fan de Nirvana, ouais. Beaucoup de monde l’était à l’époque, en tout cas dans mon lycée à Rennes. J’avais 15 ans et demi quand j’ai appris que Nirvana était programmé au Liberté le 16 février. L’événement ! Pourtant dans mon souvenir, la salle n’était pas totalement pleine. Il y avait pas mal de vieux punks venus voir les Buzzcocks en première partie et toute une faune grunge. Comme beaucoup, j’avais une de ces fameuses chemises de trappeur d’époque, putain ce qu’elle grattait ! J’en avais profité aussi pour acheter un t-shirt, le célèbre avec le smiley, que je garde encore aujourd’hui précieusement. C’était un vrai bon concert, avec un Kurt Cobain en forme et pas mal de gros pogos,

du fait de la présence de nombreux punks. Sa mort quelques mois plus tard a été un choc. On était à jouer à la console avec des potes et on a entendu la nouvelle à la radio sur Skyrock. Bon, j’ai chialé comme un vieux fan, normal…

Je me souviens aussi avoir monté un groupe de lycée avec des potes peu après la mort de Kurt Cobain. Entre la vente d’une vieille mob repeinte, un peu de taf rémunéré et la thune d’un ou deux anniversaires, j’avais réussi à m’acheter la basse la moins chère du magasin. « Putain de belle époque » Bon, comme un con je la tenais voEnsuite j’ai continué à suivre les paru- lontairement très basse, à la Krist tions, dont le fameux Unplugged. Novoselic, donc c’était injouable ! J’ai lu ses carnets personnels aussi On s’appelait Projectile et on a tenu quand ils sont sortis – c’est mécham- quatre années, même si c’était plutôt ment triste à lire d’ailleurs au pas- mauvais en fait. On faisait essensage –, vu des documentaires, le film tiellement des reprises… Putain de Last Days de Gus Van Sant... belle époque ! Mais forcément avec l’âge, la passion Un peu par nostalgie, j’ai créé un n’est plus aussi forte. Je reste quand groupe Facebook pour réunir un même marqué par cette époque musi- maximum de témoignages sur ce cale. J’ai d’ailleurs été voir Pearl Jam fameux concert au Liberté en 94. cet été au Main Square Festival et Avec, pourquoi pas, l’idée d’en faire c’était génial. J’en ai profité pour quelque chose pour marquer son acheter un t-shirt, à l’ancienne ! 20e anniversaire en 2014. » R.D 37


DOSSIER

« PORTE-PAROLE DE LA MANO » MORGANE, 27 ANS :

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« En 1999, j’avais quatorze ans quand j’ai reçu le best-of de la Mano Negra. J’ai tout de suite adoré. Mais j’ai vite déchanté en apprenant que le groupe n’existait déjà plus à l’époque… Bon au moins la collec’ était facile à constituer. J’ai commencé par acheter tous les CD du groupe, puis les vinyles, puis les albums que les membres de la Mano avaient faits avant sous d’autres formations, les reprises… Et bien sûr, je continue à suivre attentivement la carrière de Manu Chao. En 2004, j’ai créé un site Internet de fans, que j’alimente encore aujourd’hui régulièrement. On y trouve de tout : discographie, l’historique, ce qu’ils sont devenus… Un jour, j’ai reçu sur mon livre d’or un message d’encouragement signé “Tom, Phil

« PAS TRÈS SAIN DE VOIR 50 FOIS UN CHANTEUR » Olivier Donnat, sociologue et co-auteur de l’ouvrage Le(s) public(s) de la culture. Il y a une définition précise du mot « fan » ? Sociologiquement pas vraiment. Disons que le terme « fan » est lié au développement de l’industrie de la culture, avec la production et la diffusion en masse de films, de séries TV et bien sûr de musique. C’est dans ces domaines populaires de la culture – par opposition à la culture « savante » - qu’on trouve ce qu’on appelle des fans. Y a-t-il des points communs entre un fan de Britney Spears 38

et un de Marylin Manson ? Oui, le fan quel qu’il soit va consacrer beaucoup de temps et d’argent à sa passion, forcément. Deuxièmement, il va presque toujours développer un intérêt poussé pour la personne, parfois plus que pour son œuvre. C’est ce qui distingue l’amateur du fan. L’amateur de cinéma va s’intéresser à la carrière d’un acteur et à ses films, alors que le fan va s’intéresser à l’acteur en tant que personnage public : consulter les revues people, découper articles et photos le concernant…

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et Joseph”, anciens membres du groupe ! Le batteur Philippe Teboul m’a contactée, puis Joseph Dahan et Daniel Jamet. J’ai eu l’occasion de les rencontrer… Grâce à eux, j’ai pu assister au concert de Manu Chao en 2008 à Nantes et le rencontrer backstage. On s’est salué mais ça s’est arrêté là, j’étais trop intimidée et lui trop sollicité. Mais je garde contact avec les autres membres, ils me tiennent au courant de leur actu, je l’indique sur mon site, je suis devenue en quelque sorte leur porte-parole. Pour mes potes, je suis “la fille qui aime un groupe mort” mais ça me va très bien. Ma chanson préférée ? Out of time man. Je sais un peu la jouer à la guitare, c’est facile, si t’écoutes bien c’est le même air que The Passenger d’Iggy Pop. » R.D

C’est un comportement assez immature. La plupart des fans commencent d’ailleurs à l’être à l’adolescence. Qu’en est-il des fans adultes ? Quand certains revendiquent d’avoir vu leur chanteur préféré plus de 50 fois, il y a quelque chose de pas très sain… Un adulte doit logiquement avoir un comportement adéquat, responsable. Or, un fan va vivre dans l’excès vis-à-vis de l’argent dépensé et du temps passé. Car il faut posséder… Oui voilà. Les fans sont très matérialistes, leur passion doit s’incarner dans des objets, il faut du concret. C’est important non seulement

pour eux mais vis-à-vis de leur entourage : une collection, des photos, des tickets de concert, ça permet de rendre la chose réelle. À l’ère du numérique et de l’Internet, le fan collectionneur est donc amené à disparaître ? Au contraire, Internet alimente la passion des fans, avec ces forums communautaires où chacun peut discuter, échanger, troquer… Les industries de la culture ont très bien compris le business que ça peut représenter. Par exemple, si les CD normaux disparaissent petit à petit, il n’y a jamais eu autant de sorties d’albums collector, de rééditions prestige et de coffrets limités. Recueilli par R.D


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« PAS UN JOUR SANS SPICE GIRLS »

CLÉMENT, 27 ANS : « J’avais onze ans quand j’ai vu le clip de Wannabe, le premier single, j’ai adoré. Je me souviens, quand les Spice Girls sont arrivées, c’était la folie. Seize ans après, je suis toujours aussi fan. Ma préférée ? Victoria, pour le côté mode. Après, j’aime bien Mel B, c’était elle la meneuse. J’ai tous les albums, tous les singles, tous les DVD… Et puis, plein de merchandising : parfum, chaussures, vêtements, poupées, magazines… En moyenne, j’ai un budget d’une cen-

taine d’euros par mois. Et à chaque anniversaire ou Noël, je sais que j’ai un cadeau en lien avec ça. Quand j’ai loué mon nouvel appart, j’ai dû prévoir une pièce spéciale pour exposer tout ça. Depuis qu’elles ne chantent plus ensemble, c’est moins facile d’avoir des trucs sur elles. Je passe pas mal de temps sur les forums, les sites, Ebay... Il n’y a pas un jour où je ne les écoute pas, pas une journée où je n’ai pas été chercher des infos sur le Net... J’étais bien sûr devant la télé

lors de leur reformation pendant la cérémonie de clôture des J.O. Ce n’était pas long mais c’était bien. Si les gens se foutent de ma gueule ? Non, ça les fait plutôt marrer : ils me prennent pour un taré quand ils voient ma collection ! Chacun a ses petits secrets et puis il y a pire comme passion... Même des amis qui ne sont pas fans sont surpris par le côté show des concerts. Il y a de la mise en scène, des costumes, ça bouge… C’est ça qui me plaît. Un jour, on m’a invité à aller voir un concert d’Ayo à Rennes. Tout le monde dit que c’est une super artiste... Peut-être, mais on se fait chier quand elle chante. Sur scène, je n’ai pu les voir qu’une seule fois, c’était en 2008 à Londres. J’aimerais bien qu’elles fassent de nouvelles tournées, mais il y a peu de chances. Par contre, Britney, dont je suis aussi fan, je l’ai vue beaucoup plus. Douze concerts en tout. » J.M

« J’ai une trentaine d’appareils photo Polaroid exposés dans le salon, plus quelques cartons dans le grenier. En tout, ça fait une centaine. Le plus ancien date de 1955, c’est le Model 95, qui faisait déjà de la photo instantanée. Pour en avoir un comme ça aujourd’hui, faut courir… Par contre, je n’arrive plus à trouver des pellicules pour celui-ci. J’ai suivi un temps une enchère sur Ebay mais c’était monté vraiment trop haut. Du coup, quand je vais à la Fnac, j’aime bien faire chier

les vendeurs en leur disant que j’avais acheté un appareil chez eux et qu’ils ne font plus de pellicules maintenant. Ce qui me plaît, c’est d’avoir la photo tout de suite. C’est un des seuls avantages car la qualité… disons qu’elle est aléatoire. J’ai commencé cette collection quand j’avais vingt ans. C’était révolutionnaire à l’époque. Depuis, je suis resté un mordu. Un jour, j’ai écrit au directeur de Polaroid France où je lui expliquais que j’étais un accro de la marque et que j’avais repéré un modèle à la télé que

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« UNE CENTAINE D’APPAREILS POLAROID » ALBERT, 78 ANS :

je n’avais pas. Un Polaroid 600 tout rouge qu’on voyait dans une émission de Canal Plus. Quelques jours plus tard, il m’en a fait parvenir un. Très content de l’avoir car il a été édité à très peu d’exemplaires. » 39


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DUR DE PASSER À CÔTÉ DE LESCOP EN CETTE RENTRÉE. L’ANCIEN LEADER D’ASYL SORT SON PREMIER ALBUM SOLO. UN DISQUE DE POP FROIDE, « UNE VARIÉTÉ BIPOLAIRE », QUI RENOUE AVEC LA COLD WAVE DES ANNÉES 80. eut-on ressusciter la new wave sans copier les aînés ? À voir Lescop, la réponse pourrait être négative. Sonorités froides à la Joy Division, voix à la Daho, gestuelle à la Ian Curtis… Les filiations sautent aux yeux et les influences aux oreilles. Les haters hate et les likers like. Copie pour les uns, héritage pour les autres. Buzz de rentrée d’un côté, future valeur sûre de l’autre. À 33 ans, l’ancien chanteur du groupe de rock Asyl se défend pourtant de tout mimétisme. Et préfère évoquer la simple digestion des références qu’il ingurgite depuis qu’il est ado. Factory Records, Daniel Darc, les Doors, Roxy Music, la Nouvelle Vague… Un background classieux pour ce grand brin filiforme qui se dit obsédé par l’ambiguïté, les mélanges inappropriés et les sentiments partagés. Pas surprenant alors qu’il définisse sa musique comme « de la variété 40

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bipolaire », sombre et facile d’accès. « J’aime travailler cette ambivalence. Je pense que ça permet d’apporter de la subtilité dans la musique. » À l’image du tube La Forêt, morceau racontant l’histoire d’un meurtre sous la lune, qu’il a réussi à rendre à la fois dansant et cinglant. Ce regard sombre dans une pop française d’ordinaire plutôt chaude, Lescop a décidé de le chanter en français. « Les paroles sont la chose la plus importante dans un morceau. Écrire en français permet d’en être sûr. La forme découle toujours du fond. Une bonne chanson, même si elle est jouée bancale, te prendra toujours aux tripes. » De quoi le mettre aux côtés des Mustang, La Femme, Aline et Granville ? « La nouvelle scène pop française, ce n’est pas mon rôle de l’analyser. Ce n’est pas parce qu’on est plusieurs à chanter en français qu’on défend les mêmes choses, bien que je trouve leur démarche intéressante. On ne

s’est pas dit “on va faire quelque chose tous ensemble”. La musique, ce n’est pas une manif. » La sortie de son premier album éponyme le mois dernier l’a présenté comme l’incontournable de la rentrée. Critiques quasi-unanimes, couvertures de nombreux magazines spécialisés et une tournée actuellement en cours. « J’ai également quelques dates aux États-Unis. Preuve que le français plaît. En musique, notre langue peut être une plus-value. La renier, c’est avouer qu’elle n’est pas assez bien pour faire des chansons. Il ne faut pas baisser son froc, on doit revendiquer ce qu’on est. Prends l’exemple de Johnny Cash, il assumait ce qu’il était : un cul terreux. C’est pour ça que c’était bien. » Julien Marchand Le 10 novembre aux Indisciplinées à Lorient


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DE BON AUGURE

BONNE SURPRISE DES CHARRUES CET ÉTÉ, LES QUIMPÉROIS DE CORBEAUX ONT LE BEC QUI RAYE LE PARQUET À L’IDÉE D’ABORDER LES MOIS À VENIR. ALBUM, TOURNÉE… C’EST LE MOMENT DE CONFIRMER.

orbeaux prend son envol. Corbeaux fait son nid. Corbeaux sur son arbre perché… C’est affolant le nombre d’allusions à la con qu’on peut faire avec ce groupe quimpérois. Un bonheur pour journaliste. Mais c’est justement parce que c’est trop facile qu’on va se retenir de le faire. Promis. Il n’est donc pas question de dire que Corbeaux a déployé ses ailes à Quimper. Juste préciser que c’est là que le groupe est né en 2010, « à l’initiative de Mick, qui bidouillait déjà un peu de rock indé avec Johanne, situe Joris, le batteur, ils m’ont sollicité et on a commencé en trio. » Avant que Maël, le quatrième de la bande, déboule quelques temps après. « J’ai fait le forcing, se souvient-il. J’aimais leur son, ça collait avec ce que je cherchais. » Les premiers concerts s’enchaînent alors. La Carène, le Run Ar Puñs, une foule de bars… 2011 est l’année du premier album, Terrain Blanc. Le groupe s’y affirme dans un registre post-rock. Mais là où ce style laisse d’ordinaire peu de place à l’originalité, Corbeaux ne se prive pas de tracer sa voie – on allait dire voler de ses propres ailes. Première surprise, tout est à l’instrumental, sans chanteur. « C’est pour donner plus de relief à la musique, précise 42

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Maël. La voix a parfois ce défaut de cacher le reste. » Autre surprise, ça sonne plus péchu que prévu. En gros, Corbeaux joue un Mogwai de rue, bagarreur et canaille. « Notre set peut effectivement pas mal s’étirer, même si on fait en sorte de privilégier l’efficacité. » Deuxième du tremplin Jeunes Charrues cet été derrière les intouchables Mermonte, les Quimpérois, qui ont tous la vingtaine, abordent les mois à venir avec un

putain d’appétit. Au menu, pas de fromage non, mais « un nouvel album et une tournée avec les potes rennais de Volte Face, ainsi que pas mal de projets, dont celui de travailler davantage sur le visuel des concerts ». On y crôa. Régis Delanoë Le 9 novembre au Mondo Bizarro à Rennes, le 30 novembre au Pixie à Lannion


« CON MAIS BON »

UNE FOIS N’EST PAS COUTUME, LE FOOT S’INVITE AU THÉÂTRE AVEC « ON EST LES CHAMPIONS », UNE PIÈCE MISE EN SCÈNE PAR LE LYONNAIS SIMON DELÉTANG. ENTRETIEN EN CRAMPONS ET CHASUBLE.

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aire une pièce de théâtre sur le foot, c’est plutôt original. Comment tu es arrivé à bosser sur ce projet ? La pièce est née en Allemagne en 2006, dans le contexte de la Coupe du monde. Comme elle a cartonné là-bas, le Centre dramatique national (institution qui coordonne des troupes partout en France, ndlr) a souhaité l’importer et j’en ai hérité.

tiaire ? Voilà une question intéressante ! Ce brouillage sémantique entre la sphère sportive et politique interpelle. On demande aux footeux leur avis sur l’actu, Douillet déboule au gouvernement…

Faut-il aimer le foot pour aimer ta pièce ? Non, il y a de tout dans le public, même si ça me fait justement plaisir de voir que le sujet fait venir des Qu’est-ce qui t’a motivé ? gens qui ne sont pas forcément haC’est un texte très malléable. J’en bitués à aller au théâtre. Et puis je ai fait un spectacle à quatre comé- ne prends pas partie pour ou contre diens où on casse les codes du le foot, la pièce n’est pas là pour ça. théâtre en appliquant un rythme de match : deux périodes de 45 mi- Mais tu as bien un avis quand nutes avec une mi-temps au milieu, même, non ? où on reste sur scène. Perso j’aime le foot. Étant de Lyon, je me suis mis à suivre l’OL au moIl y a matière à faire une bonne ment où ça cartonnait. C’était une pièce sur le football ? période où j’étais un peu déprimé : Oui car cela touche tout le monde, je peux te dire qu’il n’y a pas meilqu’on aime ou pas ce sport d’ail- leur antidépresseur que de suivre un leurs. Et puis ça permet de causer match au bar ! Cette communion politique et évolution du monde. populaire absurde autour de gens Au moment où j’ai repris la pièce, qui tapent dans un ballon, c’est con on était en plein dans l’affaire de la mais bon. lettre de Guy Môquet avec Sarko. Recueilli par R.D C’est un cas typique de confusion des genres. Qu’est-ce que venait Le 21 décembre foutre Guy Môquet dans un vesau Théâtre de Poche à Hédé (35) 43


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DISSIDANSE JULIA CIMA DÉTESTE AUTANT LA DANSE CLASSIQUE QU’ELLE AIME LA MODERNE. EN RÉSIDENCE POUR UNE ANNÉE AU TRIANGLE, CETTE INTERPRÈTE DEVENUE CHORÉGRAPHE PRÉSENTE AUJOURD’HUI « RINGS », SA NOUVELLE CRÉATION. es parents ont parfois des lubies totalement puériles. La maman de Julia Cima rêvait d’avoir une fille danseuse de renom. Alors, elle l’a flanquée à l’école de danse classique. Au programme : sourire forcé, postures douloureuses, pieds qui saignent. « Ça me faisait suer. Au propre comme au figuré. » Elle tient finalement jusqu’à ses quinze ans, âge où elle découvre la danse moderne. Et là, c’est la claque. Exit la formation « très cadrée » et le langage corporel « très codifié ». Place à la liberté, au tout permissif, au délire. Julia accroche. S’accroche. Et décroche un diplôme au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris. Très vite, elle se fait repérer par des 44

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pointures du milieu. Notamment les chorégraphes Odile Duboc et Alain Michard. Puis, vient la rencontre avec Boris Charmatz, actuel directeur du Musée de la danse, à Rennes. Leur collaboration dure onze ans. « Boris est un visionnaire, il fabrique tout. Il va chercher dans les expressions extrêmes du corps. » En 2009, Julia choisit de s’installer en Bretagne, elle, la fille « du sud ». Loin de l’agitation parisienne, mais pas trop quand même. Après Visitations en 2005, elle crée un nouveau projet solo baptisé Danse hors cadre, qu’elle joue sur tous les continents. Avec pour simple décor un jardin, un hall, une rue. Depuis début septembre, Julia est artiste en résidence au Triangle à Rennes. Et ce, pour une saison. Son

job : « Faire vivre les murs, résume la femme de 37 ans. J’organise des rencontres, des ateliers, des spectacles. » Une expérience inédite pour elle, plutôt habituée au rôle d’interprète que de chorégraphe. Ce mois-ci, accompagnée de trois autres artistes, elle mettra en scène la pièce Rings, qu’elle a elle-même écrite. On y retrouvera bien sûr ce qui l’anime : le grotesque – « Je trouve ça génial de faire des grimaces » – et « le travail précis ». Et après ? « Dans un an, je serai peut-être à l’autre bout du monde. » Ah oui parce que Julia adore danser. Avec sa vie. Benoît Tréhorel Rings, au festival Mettre en scène, du 8 au 10 novembre au TNB, à Rennes


« COMMENT FAIRE UNE BONNE PURÉE » ON A CAUSÉ AVEC JAMES DARLE, MEMBRE DU GROUPE SALUT C’EST COOL ET NOUVEAU VISAGE DU GRAND JOURNAL AVEC LA QUESTION DE LA FIN. LA PLUS BELLE MOUSTACHE DE CANAL PLUS APRÈS ARIANE MASSENET.

L’esprit fait penser à Sexy Sushi… Ouais, le parallèle peut se faire. Le rapprochement se fait surtout en live je pense. On est juste avec un ordi et un micro, façon karaoké, parfois au milieu de la foule.

Vous venez d’intégrer le catalogue de Wart (tourneur et organisateur de Panoramas). Vous serez à Morlaix le printemps prochain ? Ouais on sera à Panoramas normalement. Ça sera l’occasion : j’ai jamais été en festival ! Tu fais aussi partie de 10 minutes à perdre, présent sur Canal... Je suis avec eux depuis avril. Baptiste de 10MAP aimait bien nos clips. Ça fait de la pub au groupe mais j’essaie de dissocier les deux.

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Y’a aussi le look années 90… Le but, c’est de nous faire marrer et de faire kiffer les copains. Que les hipsters nous trouvent cool ? C’était pas l’objectif, mais s’ils veulent s’habiller comme nous, qu’ils le fassent.

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Comment tu la définis ? C’est de la techno-variété. Avec des paroles sympas. Des choses qu’on n’entend pas ailleurs. Comme sur notre chanson La Purée. C’est bien de savoir comment faire une bonne purée. Ou notre morceau Merci Nature. À la fois débile et poétique.

Ça ressemble à quoi vos concerts ? Ça a un côté fête à la bière. On fait des cadeaux au public. Il se passe des choses en général. Une lecture du livre Mortal Kombat ou du calcul mental par exemple. Ça rigole bien.

Recueilli par J.M Le 24 novembre au Moon Station à Rennes

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alut c’est cool a commencé par des chansons et des clips assez débiles. Une connerie de potes à la base ? C’est sûr qu’on n’a jamais fait de la musique en se prenant au sérieux. Mais quand tu as des potes artistes (trois des cinq membres sont en école d’art, ndlr), y’a jamais non plus de conneries à 100% dans les projets. Après avoir mis les premiers morceaux en ligne, on a eu la chance de faire un concert très rapidement, et ça a pris comme ça. Mais l’objectif de départ, c’était juste de faire de la musique et de se marrer avec.

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RDV

DERNIER NÉ DE LA TRÈS ACTIVE SCÈNE NANTAISE, PEGASE DÉBOULE AUX TRANS AVEC UNE RÉPUTATION HYPER FLATTEUSE. NORMAL : LE PROJET EST CELUI D’UN GARS HYPERACTIF DÉJÀ DOTÉ D’UN CV MUSICAL BIEN ÉPAIS. erci Wikipédia. Grâce au dico participatif, on apprend que le terme Pegase ne désigne pas seulement un cheval mythologique aux grandes ailes blanches et à l’air un peu con. C’est aussi une constellation de l’hémisphère nord située au sud d’Andromède, au nord-ouest des Poissons et au nord de Verseau. La référence céleste convient parfaitement pour imager le groupe Pegase. Car derrière ce projet se cache en fait un drôle de type multi-facettes. Ce Rémy Bricka à moustache s’appelle Raphaël d’Hervez et cumule les tafs : DJ, producteur, co-créateur du très coté label FVTVR et membre du groupe Minitel Rose. Aucune crainte de dispersion ? « Je donne peut-être l’impression de faire beaucoup de choses, reconnaît-il, et pourtant je limite mes envies. J’ai des amis très créatifs, avec qui on pourrait monter des nouvelles formations toutes les semaines. » 46

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Pas lassé pour un sou de tourner encore régulièrement avec la bande de Minitel Rose – « ce sont mes meilleurs amis, ils l’étaient bien avant que le groupe n’existe » – le Nantais s’est donc lancé parallèlement en 2008 dans l’aventure Pegase. « Même si j’emprunte un pseudonyme, il s’agit d’un projet très personnel. C’est juste moi et mes rêves. » On le croit facilement, puisqu’il en est le seul et unique membre. Longtemps, il n’était d’ailleurs question que de quelques démos postées sur le Net. Raphaël flairait bien que « ce projet valait quelquechose », mais étant alors en pleine tournée avec Minitel Rose, qui connaissait à l’époque un bon petit succès sur la scène électro-dance, la chose fut laissée entre parenthèses. « Dès que j’avais un moment, je revenais à Pegase. Je voulais faire mûrir le truc », concède-t-il. Puis finalement, en février 2012, le single Without Reasons déboule sur la toile, accompagné d’un clip

ultra-léché. Grâce au bouche à oreilles et quelques brèves flatteuses dans la presse spécialisée, la vidéo cartonne. Elle atteint plus de 60 000 vues à ce jour. Un succès inattendu, y compris pour son auteur. « Je fais de la musique d’abord pour moi. Étant très difficile, je sors de mon studio à peine 5 % de ce que je produis. » En attendant la sortie prochaine d’un premier EP, le second single The Bad Side Of Love a permis de mieux se faire une idée de l’univers dans lequel évolue Pegase : de l’électro-pop atmosphérique classieuse, qui a vite séduit au-delà des frontières nantaises. Aux Trans, c’est en configuration groupe et sur scène que Raphaël viendra défendre l’ambitieux projet. « C’est une musique qui dévoile vraiment sa puissance en live », promet-il. Régis Delanoë Le 7 décembre aux Trans Musicales à Rennes


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Johanna Benainous


VTS

POCHETTES D’ALBUMS, PORTRAITS POUR LIBÉRATION, LE MONDE… LE PHOTOGRAPHE, INSTALLÉ À RENNES, A FAIT DES VISAGES, DES TROMBINES ET DES GUEULES SA MATIÈRE FAVORITE. DES PHOTOS AUX CONTRASTES ET AUX NOIRS PROFONDS. IL NOUS RACONTE L’HISTOIRE DE QUATRE D’ENTRE ELLES.

Miles Davis, 1989. « On m’avait proposé d’être photographe de plateau pour le film Dingo. Une partie était tournée en France. Si j’ai accepté, c’est uniquement parce que Miles Davis faisait partie du casting. J’ai passé trois semaines avec lui à Paris. À chaque fois que j’essayais de le prendre en photo, il brandissait sa canne. Il était horrible. Et puis un jour, alors qu’on était au New Morning, je le vois seul, assis dans un coin, comme un enfant perdu. Je m’approche et lui demande si je peux le prendre en photo. Là, il me prévient que ça coute 5 000 dollars. Je lui dis alors qu’il mériterait beaucoup plus. Il sourit et me répond : “Tu as raison. Pour toi, ça sera gratuit.” En trois photos, la séance était faite. »

David Lynch, 2006. « C’est une photo que j’ai faite pour Télérama. En couleur celle-là. J’avais fait des repérages avant dans l’hôtel et j’avais remarqué ce coin rouge avec cet espace noir à côté. Ça m’avait attiré. Je lui explique alors la photo que je pense faire, en lui disant que “c’est juste une idée comme ça”. Il me répond “Idea is everything !” Toujours respecter son idée de départ. » 48

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Keith Richards, 2010. « Un jour, Libé m’appelle et me dit : “Keith Richards, ça t’intéresse ?” Mon héros de toujours. J’avais cinq minutes avec lui après l’interview. On était dans un hôtel rue de Rivoli, il avait réservé un étage pour lui tout seul… Il s’est allumé une clope, une Gitane Maïs. La fumée est très opaque. Pas besoin de voir son visage, on le reconnaît de suite. Et puis cette main...Sur le lustre, on voit une tête de bouc. Je l’avais repérée avant. Ça m’a rappelé le nom d’un de leur album : Goats Head Soup. »

Alain Bashung, 2002. « Je ne le connaissais pas du tout avant de faire des photos avec lui. C’était un grand honneur de bosser sur l’album L’Imprudence. On m’a donné deux après-midis pour faire plusieurs séries de photos. C’était à un moment où il était plutôt malade, il sortait de l’hôpital. Je me demandais ce que je pouvais bien faire… Je lui ai alors proposé d’aller manger un saucisse-frites, à la grande inquiétude de la maison de disques. Bashung a adoré, il disait que ça lui rappelait plein de choses. Je lui ai choisi ses vêtements, puis on a commencé les photos. D’abord dans une chambre d’hôtel, avant de finir du côté de Boulogne, près du bois. On était aux derniers moments de la journée, entre chien et loup. Il s’est tout de suite passé quelque chose. Au moment de choisir la pochette de l’album, c’est cette photo qui a été retenue immédiatement. » Photos : Richard Dumas / Agence VU 49


AGENDA

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RECOMMANDE

LA TOURNÉE DES TRANS

LES FILMS DE NOËL

LES INDISCIPLINÉES

LA GRANDE ET FABULEUSE...

Pour les non-Rennais, c’est le bon plan pour repérer en avant-première les possibles révélations du festival sans bouger le cul de sa ville. Au programme : Alphabet, Gomina, The 1969 Club, Mermonte, We Are van Peebles, O Safari, St.Lô, Lenny, The Octopus, Disco Anti Napoleon, Bow Low (photo) et Dead Sailor. Go !

Il fait un temps dégueulasse, t’es assis sur le canapé à décuver et la déprime s’invite entre deux gueuletons avec les cousins ? C’est alors qu’en actionnant la zapette, tu tombes sur un film old school de Noël : Les Bronzés font du ski, Maman j’ai raté l’avion, Beethoven, Sister Act ou Chéri j’ai rétréci les gosses. ’Gnifique !

Le festival lorientais devient un de ces rendez-vous dont on attend avec impatience la programmation. Une prog’ qui, à chaque édition, s’avère de mieux en mieux branlée. Alors qu’il programmait hier Tryo ou Les Fils de Teuhpu, le festoche fait aujourd’hui venir Alt-J, Woodkid (photo) et Two Door Cinema Club. Bip bip ? Ouaaaaiiis !

… histoire du commerce ! Dans cette pièce de Joël Pommerat, quatre vendeurs à domicile, prêts à tout pour faire du chiffre, se retrouvent chaque soir dans leur chambre d’hôtel. Porte-à-porte, objets inutiles, ménagères, remises… les rapports marchands sont décortiqués et les rouages de la consommation démontés.

GOJIRA Valeur sûre de la scène métal française depuis une quinzaine d’années, Gojira est en pleine bourre en 2012 avec la première partie de Metallica au Stade de France et la sortie saluée d’un nouvel album. Les gars sont aussi réputés pour être des bêtes de scène. À L’Étage à Rennes Le 19 novembre

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LES NUITS SONIQUES

L ’ HOMME À TIROIRS

Pour sa 18e édition, le festival des Nuits Soniques a programmé une soirée spéciale scène belge. On retrouvera le groupe Absynthe Minded et, surtout, les gars de BRNS (photo) actuellement en tournée française. En première partie, les locaux de Purple Mountain.

Engagé pour faire des copies, un employé refuse peu à peu d’obéir à son boss. Là où certains verraient un gros flemmard, Jean-Yves Ruf, qui dans cette pièce s’inspire de Bartleby de Melville, fait de ce salarié un résistant de la vie de bureau qui s’interroge sur notre rapport au travail.

Au Petit Théâtre d’Auray Le 17 novembre

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Au Théâtre de Cornouaille, Quimper Les 6 et 7 décembre

Au Théâtre de Lorient, 20 et 21 nov. Au Théâtre de Cornouaille, 19 et 20 dec.

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À Lorient Du 6 au 11 novembre

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À la télé Pendant les fêtes

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À La Carène, Citrouille, Échonova, Coatélan et Ubu, en novembre

FILM COURT Le festival européen du film court de Brest accueille cette année 24 nationalités, pour une cinquantaine de courts métrages en compet’. Parmi les trucs cool en aparté : le Panorama Animation, pour découvrir les nouveautés en matière de dessins animés. À Brest Du 13 au 18 novembre




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