BIKINI JUIN-JUILLET-AOÛT 2014

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JUIN-JUILLET-AOÛT 2014 #17



TEASING

À découvrir dans ce numéro... « EN ÉRECTION DANS UNE ÉGLISE »

ROBOTS C H A M PA G N E

RUREX

BRITPOP

GIRAFE

S U R L A P I S T E D E X A PATA N

OLIVE ET TOM

G E O RG E S B E L L E R

DRAGUE GÉOLOCALISÉE

ALBUM PANINI FISH AND CHIPS

«  L E P I R E R E S T O D E B R E T A G N E  »


ÉDITO HYMNES

Les chansons officielles des équipes de foot, c’est un peu comme l’Eurovision. Tu sais que c’est un peu cheap, tu sais que tout le monde s’en fout mais t’as quand même envie de voir à quoi ça ressemble. Si la Fédération française de football s’est fendue d’un communiqué pour préciser qu’elle n’accordera à aucune chanson le titre d’hymne officiel des Bleus, Mickey 3D et Sébastien Patoche se sont malgré tout déjà lancés. Carton jaune pour l’un, carton rouge pour l’autre. Cette cuvée 2014 ne restera pas dans les annales. Vingt-huit ans après, on lui préfère toujours le Viva les Bleus écrit pour le Mondial au Mexique. Un titre au casting high-level : Enrico Macias, Herbert Léonard, Carlos, Didier Barbelivien… Une chanson qui porta chance aux Tricolores puisque les coéquipiers d’Alain Giresse (vous savez, le père de Thibault) terminèrent à la 3e place. Et du côté des clubs bretons ? Le FC Lorient a confié son hymne à Soldat Louis en 2011, les supporters de l’EAG se sont appropriés cette année le morceau Animals des Craftmen Club (groupe guingampais, plutôt logique), le seul véritable hymne de Brest reste La Marée Rouge des Canadiens dans les années 80. Quid du Stade Rennais ? Malheureux sur le terrain, le club s’avère en revanche prolifique en musique : Galette saucisse je t’aime en 2012, Vague Rouge en 2013, Vêtu de rouge, vêtu de noir en 2014. Vivement 2015. La rédaction

SOMMAIRE 6 à 13 WTF : festivals gratuits, provenance du public, girafes, drague géolocalisée, DJ interplateaux, chouchous des festoches, s’amuser au cinéma, champagne en festival, corbeille... 14 à 23 « P’tit foot les gars ? » 24 à 29 Les festivals : ça sera comment dans 10 ans ? 30 à 41 L’anti-guide des vacances 40 à 47 RDV : Mac DeMarco, les robots, Sapin, Angel Olsen, Falabella, Clarens, Midweek 50 BIKINI recommande 4

juin-juillet-août 2014 #17

Directeur de la publication : Julien Marchand / Rédacteurs : Régis Delanoë, Isabelle Jaffré, Brice Miclet / Directeurs artistiques : Julien Zwahlen, Jean-Marie Le Gallou / Photographe : Justin Bihan / Consultant : Amar Nafa / Relecture : Anaïg Delanoë / Publicité et partenariats : Julien Marchand, contact@bikinimag.fr / Impression par Cloître Imprimeurs (St-Thonan, Finistère) sur du papier PEFC. Remerciements : nos annonceurs, nos lieux de diffusion, la CCI de Rennes, Michel Haloux, Mickaël Le Cadre, Matthieu Noël, Étienne Cormier, Émilie Le Gall. Contact : BIKINI / Bretagne Presse Médias - Espace Performance Bât C1-C2, 35769 Saint-Grégoire / Téléphone : 02 99 23 74 46 / Email : contact@bikinimag.fr Dépôt légal : à parution. BIKINI “société et pop culture” est édité par Bretagne Presse Médias (BPM), SARL au capital social de 5 500 €. Les articles publiés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Le magazine décline toute responsabilité quant aux photographies et articles qui lui sont envoyés. Toute reproduction, intégrale ou partielle, est strictement interdite sans autorisation. Magazine édité à 20 000 exemplaires. Ne pas jeter sur la voie publique. © Bretagne Presse Médias 2014.



WTF

LES FESTIVALS QUI COÛTENT KEUDAL

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THE BIACTOLS

TU N’AS PAS UN ROND MAIS TU VEUX QUAND MÊME ÉCOUTER DE LA MUSIQUE ? DON’T WORRY, LES RENDEZ-VOUS GRATUITS SQUATTENT AUSSI LE CALENDRIER ESTIVAL. ET GRATUIT NE VEUT PAS DIRE CHEAP, BIEN AU CONTRAIRE. LA PREUVE PAR TROIS.

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Le groupe irlandais The Strypes a 17 ans de moyenne d’âge mais connaît déjà un succès international avec un rock garage d’inspiration sixties. Après un passage à Bourges, les minots reviennent en France pour deux dates en BZH : le 9 août à l’Interceltique et le 10 à Fête du Bruit à Landerneau.

BINIC FOLKS BLUES GRAND(S) AIR(S)

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LE MONDE EST STONER

Triggerfinger est un groupe flamand bien bien coté, pratiquant le rock stoner façon Queens of the Stone Age. Tête d’affiche du festival Au Pont du Rock le 25 juillet à Malestroit, il revient dans la région le 16 octobre pour une date à La Carène à Brest.

KUNDELICH & WHITEMAN

art

Fans d’art contemporain, sortez vos agendas. À partir du 7 juin, Le Festin de l’art, au palais des arts de Dinard, explore les thèmes de la nature morte et du repas. À Quimper, c’est Marc Bauer et Dierk Schmidt qui investiront Le Quartier. Enfin, la biennale de Rennes prépare son retour pour la rentrée. Rdv le 27 septembre. 6

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Une fois par an, le paisible et joli port de Binic se transforme en un joli bordel. La faute à qui ? Aux loustics de l’association La NefD-Fous qui invitent la crème de la scène indépendante (garage, punk, blues…) aussi bien locale qu’internationale (grosse colonie de Ricains et d’Australiens cette année). Après les jolis coups Ty Segall et Thee Oh Sees les éditions passées, Cheveu, Go!Zilla (photo) ou encore Left Lane Cruiser devraient réveiller la cité balnéaire cet été. Quand et où ? Du 1er au 3 août à Binic

LES OFF

Gros potentiel de déprime la dernière semaine d’août à Rennes. Entre les changements d’appart, la rentrée imminente et la fin des vacances, oui on peut le dire : c’est la merde. Pour se détendre un peu et se ressourcer avant le rush de septembre, l’Orchestre Symphonique de Bretagne a la bonne idée d’organiser des concerts gratuits. Au programme : classique, jazz, symphonique, musique de chambre et de film… On respire un grand coup et tout va bien se passer. Quand et où ? Du 28 au 31 août à Rennes

La plupart des festivals de la région proposent des rendez-vous ouverts à tous. Soit dans le cadre de la programmation officielle, à l’image d’Astropolis (Astrococktail, Beau Rivage…) ou de La Route du Rock (les concerts de La Plage dans l’après-midi). Soit dans le cadre du traditionnel off. Dans ce domaine, les bars de Saint-Brieuc seront de la partie durant Art Rock (avec Thomas Howard Memorial et Kids Of Maths notamment). Idem lors du Festival Interceltique où les rues de Lorient s’enjaillent plutôt bien. Quand et où ? Tout l’été à Brest, Saint-Brieuc, Lorient, Saint-Malo…


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LES GIRAFES EN VOIE DE DISPARITION ?

CE SYSTÈME QUI PERMET DE SERVIR PLUSIEURS LITRES DE BIÈRE SEMBLE DÉSERTER LES TABLES. VRAIMENT ? « On les a abandonnées à la fin des années 90 », commence Yann, du bar Les Fauvettes à Brest. L’établissement était alors équipé de girafes allemandes. « Tubes en verre, capsules de gaz pour regazéifier la bière. C’était de la qualité. Quand les tubes ont cassé, on n’a pas renouvelé », explique-t-il. Dans d’autres pubs brestois, on n’en trouve carrément pas. « On nous en demande très peu », indiquent les barmaids du Tara Inn, Lansdowne Road et Tir na nÓg. Et même dans les bars équipés, elles ne sont pas forcément demandées. « Les gens préfèrent les pichets. » Au Gentil’ho, on propose aussi des pichets en plus des girafes. Mais cela n’empêche pas ces dernières de bien marcher. « Surtout les week-ends. Le rapport qualité-prix est meilleur. » Bref, la girafe semble toujours garder ses lieux de prédilection. Ce que confirme Antoine de l’entreprise i-Bière qui commercialise des girafes. « On en vend entre 400 et 500 par an dans toute la France. Dans les bars oui, mais principalement dans les boîtes de nuit. » Isabelle Jaffré 7


WTF

FESTIVALIER, DIS MOI D’OÙ TU VIENS... S’ILS SONT FORTEMENT ANCRÉS AU NIVEAU LOCAL, LES FESTIVALS RÉUSSISSENT MALGRÉ TOUT À CAPTER DU PUBLIC EN DEHORS DE LEURS FRONTIÈRES NATURELLES. BRETAGNE, FRANCE, ÉTRANGER : MAIS D’OÙ VIENNENT LES FESTIVALIERS ? D’ABORD BRETON

anglais expliquent ce succès british. Un rayonnement national et international que tentent de développer les autres acteurs qui communiquent hors-Bretagne, surtout à Paris. Bikini

Pour la quasi totalité des festivals d’été, pas de surprise : la grande majorité du public est originaire de la région : 70 % de Bretons aux Charrues, 80 % au Bout du Monde, près de 70 % à Astropolis, 75 % à Art Rock… « C’est d’ailleurs la même tendance chez tous les autres gros festivals français, comme Les Eurocks, Arras ou Rock en Seine : ils attirent principalement un public régional dû, je pense, au nombre très important de festivals sur le territoire national », explique Claire Malard des Charrues.

LE RAYONNEMENT Une exception apparaît. La Route du Rock n’attire que 35 % de Bretons : 55 % du public vient des autres régions et 10 % de l’étranger (Angleterre principalement). La liaison St-Malo/Portsmouth et les billets d’entrée au prix plutôt bas par rapport à ceux des festivals

L’IMPORTANCE DU LOCAL À l’image des 60 % de Finistériens présents au Bout du Monde et des 50 % de Costarmoricains à Art Rock, le public local apparaît néanmoins comme le vivier de festivaliers le plus naturel car le plus proche. Une tendance appuyée par le maillage serré qu’offrent les festivals sur le territoire breton.

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THÉÂTRE DE POCHE : 40 ANS TOUJOURS DINGO

Cette année, le Théâtre de Poche à Hédé célèbre ses 40 ans. Un anniversaire qui sera, nul doute, fêté lors de la 4e édition de son festival de théâtre contemporain, Bonus. Avec, comme toujours, un programme farfelu : un combat de bière et de mousse à raser avec les Belges de la compagnie Het KIP (photo), des vraies-fausses conférences scientifiques, un Homer Simpson s’interrogeant sur la crise des subprimes... Du 22 au 24 août.

MOTOCULTOR : INOXYDABLE Les affreux jojos du Motocultor, le festival métal du Morbihan, remettent le couvert cet été pour leur édition 2014 qui accueille, entre autres, Testament, Behemoth, Epica et Six Feet Under. Du 15 au 17 août à Saint-Nolff. 8

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Bikini

... JE TE DIRAI AVEC QUI TU REPARTIRAS

LA DRAGUE PAR GÉOLOCALISATION VA-T-ELLE ARRIVER EN FESTIVAL ? SES UTILISATEURS RÉPONDENT. À l’occasion du festival de Coachella en avril dernier, Tinder, la plus populaire des applications de rencontres géolocalisées, a multiplié les messages sur les réseaux sociaux pour inciter ses utilisateurs à se connecter. But du jeu : rentrer en contact avec les autres festivaliers autour de soi. « Un festival est un lieu idéal pour faire de nouvelles rencontres, explique Rosette Pambakian, chargée de com’ à Tinder. On enregistre d’ailleurs un pic d’utilisation dans ce type d’événement. » Mais qu’en pensent les festivaliers inscrits ? Les avis sont partagés. « Je vais tester à Art Rock, annonce Adeline, 23 ans, avec qui on a causé via l’appli. Ce sera un moyen de boire une bière avec des gens que je ne connais pas. Et si l’apéro se passe bien, il y aura sûrement flirt. » Marie, 18 ans, est plus sceptique : « Ça peut avoir une utilité avec autant de gens rassemblés au même endroit, mais je ne sais pas si j’aurais le temps de l’utiliser. » Céline, 21 ans, poursuit : « C’est quand même simple de rencontrer du monde en festival... Et puis, je préfère économiser la batterie pour retrouver des potes qu’on a perdus. » 9


WTF

DJ INTERPLATEAUX : LES TROIS RÈGLES LE MEC QUI MIXE ENTRE DEUX CONCERTS EN FESTIVAL PENDANT QUE TU FAIS LA QUEUE AU BAR, C’EST LUI. LE DJ INTERPLATEAUX A LA RESPONSABILITÉ DE MEUBLER AVEC BRIO LES TEMPS MORTS. OK, MAIS COMMENT ? LE BON TIMING, TU AURAS

LE TEMPO, TU SUIVRAS En avril dernier, le Bordelais Dombrance a mixé devant 7 000 festi-

me saute aux yeux quand ça n’est pas au point, pas en adéquation avec l’ambiance. Faire appel aux mêmes, ça permet de les laisser préparer des sets construits. »

CONCENTRÉ, TU RESTERAS

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Le DJ interplateaux, c’est l’artiste pour lequel on a toujours un peu peur (et un peu de peine) en festival. Personne ne vient pour lui, mais il a la lourde tâche de faire en sorte que l’ambiance ne retombe pas entre deux têtes d’affiche. Et pour faire danser un public parfois impatient, quelques règles s’imposent. Pour le Rennais Douchka (photo), qui assure cet été les interplateaux du festival Transrythm en août à Ploufragan, le timing est primordial : « Il faut prendre en compte l’heure à laquelle tu passes. Si ton set est adapté à l’horaire, tu peux avoir de belles surprises et te retrouver par exemple devant deux ou trois mille personnes. »

valiers à Panoramas : « Quand tu joues entre des DJ, il faut rester cohérent au niveau de leur tempo et de leur énergie. J’ai mixé avant Fakear, j’ai pas balancé de la grosse trap par exemple. » Le but n’est pas de casser l’ambiance, c’est sûr. Tous les ans, le festival des Indisciplinées à Lorient fait appel au duo Le Secret du Son d’Abba pour les interplateaux. Son programmateur Thierry Houal parle « d’habillage sonore ». Il développe : « Perso, ça

CORBEILLE Shaka Ponk Tweet d’Aurélie Filippetti, la ministre de la culture et de la communication, le 14 mars dernier : « Shaka Ponk chevaliers Arts et Lettres : une énergie rock/numérique inédite, une popularité gagnée sur scène, un lien fort avec le public. » C’est chiiiiié, non ? Si. À Carhaix 10

Les comédies musicales Le 14 juin à Rennes devait avoir lieu le Robin des Bois de M. Pokora en après-midi, enchaîné avec Mozart l’opéra rock le soir. Un programme aussi digeste qu’un repas flageolets/cocos de Paimpol, qui a finalement été annulé. Ouf, vous pouvez ranger la boîte de Smecta dans le placard à pharmacie.

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Avec des soirées qui se terminent à 3 h du mat’, mieux vaut rester concentré. Dombrance explique : « On reste sous tension. Les têtes d’affiche quand elles sortent de scène, elles décompressent. Pas nous. » Douchka : « Parfois, quand tu mixes, t’entends les balances du live d’après. Et t’as pas de retours son pour ne pas gêner les techniciens qui bossent sur scène... » Pas trop ingrat comme taf quand même ? « Le côté frustrant, répond Douchka, c’est que t’as toujours envie de pousser le son. Mais quand tu débutes, c’est déjà une chance énorme. » Brice Miclet

NOTRE ANTI-SÉLECTION DES SPECTACLES QUAND FRANCHISE ET MAUVAISE FOI NE FONT QU’UN Kev Adams Comment juger que notre monde part vraiment en couille ? En regardant la liste sans fin des spectacles de Kev Adams qui affichent tous complet. Et les dates programmées à la rentrée 2014 sont bien parties pour subir le même sort. Pas de doute : on n’en a pas fini avec la crise. À Plœmeur, Plougastel...

La rentrée 2014 Obispo, Grégoire, Florent Pagny, Franck Dubosc, Tal, Calogero, Yannick Noah… Ceci n’est pas le casting de la prochaine tournée des Enfoirés mais les premiers noms confirmés dans les salles bretonnes à partir de septembre. Un conseil donc : profitez bien des vacances. À Rennes, Brest…


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LES CHOUCHOUS DES FESTOCHES

QUELS ARTISTES ONT LEUR ROND DE SERVIETTE EN FESTIVAL ? PETIT TOUR D’HORIZON. ASTROPOLIS : MANU LE MALIN, 16 FOIS « Depuis 98, Manu vient chaque année, explique Matthieu GuerreBerthelot de l’orga. Là où il n’a pas encore joué, c’est sur l’Astroboum, la scène conçue pour les bambins. »

ROUTE DU ROCK : DOMINIQUE A, 4 FOIS La première fois que le divin chauve (photo) est venu, c’était en 1993. Pas très rock’n’roll mais hyper classe.

VIEILLES CHARRUES : -M-, 6 FOIS « C’est un artiste spécial pour nous, explique l’équipe. Il était présent à l’enterrement de Jean-Philippe Quignon, président du festival, et a joué lors de la cérémonie. »

PONT DU ROCK : TAGADA JONES, 4 FOIS Fidèle à Malestroit, le groupe fêtera cet été ses 20 années sur scène à l’occasion des 25 ans du festival.

INTERCELTIQUE : ALAN STIVELL, 15 FOIS Sa première venue date de 1971. « C’est vieux, mais le festival a 44 ans aussi », rappelle le directeur.

BOUT DU MONDE : LAVILLIERS, 4 FOIS « Avant le festival, il était déjà venu à Crozon, précise le programmateur Jacques Guérin. À cette époque, il était en solex et avait joué en discothèque » 11


WTF

S’AMUSE-T-ON TOUJOURS AU CINÉ ?

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SQUATTEURS

SI LES SALLES SONT DE PLUS EN PLUS CONFORTABLES, ELLES APPARAISSENT PAR CONTRE DE PLUS EN PLUS CHIANTES. LES SOIRÉES ET NUITS SPÉCIALES OÙ ON VIENT POUR LA FÊTE SONT MOINS NOMBREUSES. MAIS LA RÉSISTANCE S’ORGANISE.

Comme chaque année, Sourdoreille a épluché les programmations des festivals 2014 à la recherche des squatteurs de l’été. Sur le podium, on retrouve HollySiz (programmée 21 fois), Cats on Trees (22) et, grand gagnant, le groupe Fauve à l’affiche de 26 festivals. Nique sa mère le blizzard.

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BANG BANG !

Un groupe qui s’appelle The Decline!, du nom de l’album des mythiques Californiens NOFX, part déjà avec notre sympathie. La bonne impression est confirmée avec le deuxième opus des Rennais, 12A Calvary Road, qui vient de paraître et qui butte bien dans son genre punk teinté de blues. Plusieurs concerts sont prévus cet été pour le défendre, dont le 30 août au WestFest à Guipavas.

QUI VEUT DES PLACES ?

à gagner On vous offre des places pour les festivals cet été : Bout du Monde, Vieilles Charrues, Au Pont du Rock, Roi Arthur… Pour tenter votre chance, rendez-vous sur la page Facebook de Bikini ! 12

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Pour les patrons de salles, cela fait peu de doutes, les soirées spéciales et autres « doubles doses » fonctionnent bien. « Mais les distributeurs ne sont pas toujours d’accord que l’ancien film soit vu juste avant le nouveau, explique Alain Poujol, ex-patron de la salle Gaumont de Rennes. Rupture de ton, de réalisateur, changement d’ambiance, d’acteurs ou même différence de qualité, certains studios préfèrent éviter un comparatif. « Et puis, ils veulent focaliser l’attention sur la dernière sortie, c’est normal. » Dommage car les nuits Star Wars ou Harry Potter, avec chips et bières dans le sac à dos, étaient quand même bien cool. « On essaie de faire un maximum d’animations dans nos salles car c’est ce que les gens attendent, rétorque malgré tout Yves Sutter, le boss des salles Cinéville dans l’Ouest. Mais ce n’est pas toujours facile d’obtenir les droits. Il faut aussi que ça fasse sens avec l’actu ciné du moment. » Les soirées spéciales les plus courantes restent les avant-premières avec l’équipe des films. Mais là, le succès n’est pas forcément au rendezvous. « C’est selon la popularité des acteurs qui viennent... »

(mais pas que) en proposant des animations : jeu, déguisement, musique… Exemple : Cry-Baby de John Waters en novembre dernier. « Pour une fois, on avait abandonné les salles de ciné pour le bar Le Mondo Bizarro, raconte Gwenn Benech, l’un des fondateurs. Il y avait un concert après la séance et un concours de pin-up. Ça correspondait à l’ambiance du film. » Objectif : réinventer la séance de ciné et lui apporter une valeur ajoutée face à des salons équipés de grand écran et de films à volonté sur Internet. « Ce qu’on recherche au FIST, c’est cette ambiance de foire des débuts du cinéma. Il y a un autre rapport au film. Les gens ne sont pas dans OUI, ÇA BOUGE ENCORE leur bulle mais réagissent à ce qui Pour l’asso rennaise Le FIST(Films se passe autour. » L’asso prépare Insolites et Séances Trash), le ciné d’ailleurs une nouvelle soirée dans est avant tout une bonne occas’ de cet esprit : « On va projeter Speed... faire la teuf. Le groupe se démène dans un bus qui roule », confie pour diffuser des films de genre Gwenn. Vroum ! Isabelle Jaffré

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MOUAIS, ÇA DÉPEND


ATM

LES FESTIVALS BULLENT

ALTERNATIVE CHIC À LA BIÈRE, LE CHAMPAGNE GAGNE DU TERRAIN EN FESTIVAL CES DERNIÈRES ANNÉES. En festoche, il y avait les roteuses et les sodas, il y a désormais le champagne. La boisson la plus classe du monde – coucou George Abitbol – s’est notamment faite une place aux Charrues depuis 2010. « L’an dernier, nous avons vendu 3 864 bouteilles, soit près de 3 000 litres de champagne », indique l’orga. Un marché pas si mineur qu’il en a l’air, puisque cela représente tout de même « l’équivalent d’un tiers de la consommation de cola ». Aux Trans aussi, les bulles ont la cote. « L’opportunité s’est présentée en 2009 de collaborer avec un caviste pour proposer une cuvée spéciale, avec le visuel de l’édition sur l’étiquette. À 6 euros la coupe, l’opération a rencontré un franc succès », se souvient Émilie Lacroix, du festival rennais. Mais lorsqu’il a fallu augmenter le tarif d’un euro pour rentabiliser la chose l’année suivante, « il y a eu une baisse des ventes ». Du coup, il a été décidé de conserver la vente de champ’ uniquement au bar VIP et de le remplacer sur le site par « un bar à bulles proposant un vin rosé pétillant ». Moins prestigieux mais surtout moins cher : 3,50 euros la coupe. « Un succès », assure-t-on, à tel point que pareil dispositif sera mis en place en décembre prochain. 13


DOSSIER

« P’TIT FOOT LES GARS ? »

BUSINESS, STARIFICATION, RÉCUPÉRATION POLITIQUE... LE BALLON ROND EST-IL BON À JETER À LA POUBELLE ? NON, ET ON VOUS DIT POURQUOI.



DOSSIER

« IL FAUT ÊTRE UN PEU SCHIZOPHRÈNE POUR n a causé avec Jérôme Latta, le rédacteur en chef des Cahiers du football, le média intello-satirique du ballon rond. Il nous explique pourquoi il faut (encore) aimer ce sport. Argent, starification… On fait une multitude de procès au foot depuis quelques années. À raison ? Ce qui est sûr c’est que continuer à aimer le foot tout en étant conscient de ses dérives récentes relève du défi. L’attitude la plus simple consiste à évacuer toute la dimension idéologique pour s’adonner à la passion. Car malgré toutes les dérives, quelque chose subsiste : le jeu luimême, quelque chose de la magie de l’enfance. C’est une notion certes très largement dévoyée mais qui opère quand même lorsqu’on reste attaché à l’équipe qu’on supporte. Un geste exceptionnel de footballeur, c’est beau. Un retournement de situation dans un match, la dramaturgie, des épopées que continue de raconter le football, c’est beau aussi. Tout ça permet au football de conserver son pouvoir de fascination.

se demander quelle place… Depuis une vingtaine d’années, se développe une logique économique qui s’oppose directement à l’aléa sportif. Il y a une répartition inégalitaire des revenus qui tend à enrichir les clubs les plus riches. La dérive la plus spectaculaire concerne la Ligue des champions, de plus en plus organisée comme une oligarchie de clubs ayant promu un système leur permettant de réinstaurer en continu leur domination sportive et économique.

Une autre dérive actuelle à combattre n’est-elle pas l’importance aujourd’hui prise par le Ballon d’or ? Parce qu’à la base, le football est un sport collectif… L’histoire du Ballon d’or est symptoEt puis il reste la fameuse « glorieuse matique : avec l’explosion du marincertitude du sport », non ? keting et du sponsoring, glorifier Il y a encore de la place pour des petits un joueur est plus efficace que de clubs comme Guingamp mais il faut glorifier une équipe. Ce phénomène

« Malgré les dérives actuelles, quelque chose subsiste : le jeu » 16

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de starification éloigne les meilleurs footballeurs de la réalité. L’écart se creuse avec le public, d’où ce sentiment de malaise… Mais quand l’opinion publique et les médias tapent sur les joueurs, ne se trompent-ils pas de cible ? Oui car les footballeurs actuels sont le produit de leur milieu. Depuis 2010, ils sont un exutoire pratique permettant de faire des amalgames douteux, avec la question de l’identité nationale en toile de fond. N’est-ce pas plus dur pour un jeune d’être pro aujourd’hui qu’il y a trente ans ? Avec leur hygiène de vie, les Best, Gascoigne ou Maradona auraient-ils pu avoir la même carrière aujourd’hui ? La comparaison d’une époque à l’autre est toujours un exercice délicat… Mais c’est sûr qu’il y a aujourd’hui plus d’aspirants pro et que l’exigence pour réussir n’est pas la même. L’hygiène et la diététique sont devenues incontournables. Il y a également plus de pression autour


AIMER LE FOOT »

des joueurs pro, une forte contrainte sociale et médiatique pèse sur eux. Et il est donc clair qu’en comparaison avec les excès d’un George Best, la manière dont a été traité un Yann M’Vila qui a eu le malheur de sortir en boîte quatre jours avant un match prête à sourire. Cet été, la Coupe du monde a lieu au Brésil, où un mouvement social légitime cherche à se faire entendre. Le plaisir du foot a-t-il encore sa place ? Oui mais il faut être un peu schizophrène (rires) ! En plus, on va être servi avec les trois prochaines Coupes du monde à venir, au Brésil, puis en Russie et au Qatar ! Mais ce n’est pas nouveau, il y avait notamment eu un fort appel au boycott de la Coupe du monde en Argentine en 1978, à l’époque où le pays était en proie à une dictature. Ce qui me gène le plus, c’est le vieux réflexe des instances du foot qui voudraient sanctuariser leurs compétitions. À l’image de Michel Platini, le président de l’UEFA, qui demande aux Brésiliens de laisser leurs problèmes du quotidien aux portes du stade… C’est édifiant. 17


DOSSIER

Quel regard portes-tu sur la couverture médiatique du football ? Il y a eu ces dernières années une explosion du nombre de canaux couvrant ce sport mais ça n’a pas tellement permis de développer la culture foot de notre pays. Dans l’ensemble, les talk-shows sont d’un niveau médiocre avec une ambiance très “café du commerce”. Les médias sont plus dans une position de vendeur de spectacle que de journaliste. Il y a une dépendance économique qui compromet toute distance critique vis-à-vis du “produit” football. Heureusement, la dernière décennie a vu se développer une sorte de sphère “alter-footballistique”, en grande partie sur le Net. Il y a une vraie créativité, de l’expertise…

conserver leur influence. On trouve très peu de voix dissonantes. Il y avait possibilité après 1998 d’enraciner le football dans le patrimoine culturel national, mais l’occasion a été manquée.

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Ce serait donc, comme souvent, une question d’éducation des foules… Oui. Il y a une forme d’hystérisation autour du résultat sportif. Que ce soit dans la victoire ou dans la défaite, tout est exagéré. Or, les journalistes sportifs ont plus tendance à alimenter cette dérive qu’à la raisonner. Il n’y a pas assez d’effort de pédagogie. À l’arrivée, on se retrouve avec un public très versatile, au discours assez pauvre sur l’histoire de ce sport, la culture tactique, etc. Je n’en suis pas à prôner une vision savante et Quand même, des médias comme encyclopédique du football, juste Les Cahiers du foot ou So Foot une vision plus exigeante. Plus n’ont-ils pas permis d’enrichir le amoureuse aussi. Pourquoi ne pas contenu journalistique, par rapport chercher à plus entretenir la passion à l’époque Téléfoot/Onze Mondial ? du jeu plutôt que la haine de l’arbitre, L’offre est plus diversifiée, c’est vrai. de l’adversaire ou des supporters ? Mais le problème, c’est que les médias mainstream ont une forte capacité à Recueilli par Régis Delanoë

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Mais qui sont vraiment ces créatures qui, entre un dribble de Rémy Cabella et un tacle glissé de Florent Balmont, viennent perturber l’analyse footballistique des téléspectateurs ? « Nous avons des consignes de la part de la production qui ne souhaite pas communiquer... Mais oui, il arrive que les hôtesses qui accueillent le public assistent à l’émission. » Ce qu’avait confirmé Hervé Mathoux au sujet de la célèbre « blonde du CFC » qui, il y a quelques mois, avait fait couler beaucoup de tweets. J.M

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L’ÉPAULE GAUCHE D’HERVÉ MATHOUX Si le programme foot de la 4 suscite commentaires et débats sur les réseaux sociaux, ce n’est pas que pour le résumé d’Évian-Bastia. Chaque dimanche, la jeune femme assise derrière l’animateur alimente aussi les discussions. « L’assistance du CFC est essentiellement masculine. C’est 80 % de garçons, explique David Rousseau, de l’agence Casting Events chargée du public de l’émission. Alors forcément, les filles ne sont pas installées n’importe où. » Et encore moins les plus jolies. « On les place sur les axes caméras… »


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PANINI OH OUI !

Mon album Panini de la Coupe du monde 1990, je l’ai chéri. Les pochettes de vignettes offertes par mon daron, les échanges avec les copains, les images collées avec application… Ce plaisir d’enfance, je pensais l’avoir perdu. Jusqu’à ce que je découvre le site Old School Panini (OSP). Le principe ? Mettre en ligne des vignettes scannées et raconter l’histoire du foot à travers ces images du passé. Des plus grandes anecdotes aux choses les plus futiles et amusantes : les sosies de joueurs, le concours de la plus belle moustache… « Tout a commencé en 2010 quand j’ai trouvé un album de la saison 1975-76, raconte l’administrateur Alex Bourouf. J’ai d’abord envoyé la vignette scannée de Jacques Santini en sosie de Charles Bronson à mes amis avec un commentaire décalé. Ça les a fait rire. C’est là que m’est venue l’idée de créer OSP, un blog qui a débuté avec seulement 25 visites par jour. » Aujourd’hui, il en revendique 10 000 et a plus de 70 000 followers sur Twitter. L’empire Panini, né en Italie en 1961, continue de prospérer. Avec toujours ce fameux rituel de l’album à compléter. « Celui de la Coupe du monde au Brésil est vendu dans 110 pays », annonce Isabelle Fillon, responsable marketing France. Chaque année, entre 5 et 6 milliards de vignettes sont éditées. Un jour c’est sûr, le concours des plus belles crêtes remplacera celui des moustaches. 19


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ON A VU L’ÉQUIPE LA PLUS NULLE (ET LA PLUS « Oh nous le football, c’est du plaisir. Retrouver les copains et taper dans le ballon. Après le résultat… Pff, à la limite c’est anecdotique si on a donné ce qu’on a pu sur le terrain. Et puis pourquoi serait-on démotivé ? Faut pas croire, on fait une bonne saison par rapport à la dernière, où c’était la cata. » Ainsi parle Carlos, membre des Paotred du Tarun, le club de foot de La Chapelle-Neuve dans le Morbihan, commune de 750 âmes entre Baud et Locminé. Un bourg qu’on traverse en deux minutes en voiture, avec juste avant le panneau de sortie une déviation amenant au terrain des sports. Le domicile d’une des plus petites formations de la région : une seule équipe, quinze licenciés.

133 buts encaissés Pour un peu, le club aurait pu disparaître il y a un an, à l’issue de la saison cataclysmique évoquée par Carlos : en D4 (plus petit échelon du foot français), une seule victoire de tout l’exercice 2012-2013 pour 18 défaites et 3 forfaits, 12 buts marqués, 133 encaissés ! En comparaison, l’actuelle saison est effectivement une réussite. Nous sommes fin avril et les Paotred du Tarun figurent certes à la dernière place du groupe K de D4, mais avec un bilan moins honteux : 1 victoire, 3 nuls, 12 défaites, 22 buts pour, 58 contre. José, latéral gauche, a des étoiles dans les yeux : « La victoire je m’en souviens, c’était en décembre,

arrachée 3-2 contre Malguénac. Enfin, la réserve de Malguénac. » Car à ce niveau de compétition, la formation de La Chapelle-Neuve doit affronter des équipes B, C voire D. Autrement dit devoir se battre contre les fonds de tiroir des clubs voisins, lesquels doivent bien se marrer d’affronter les nains de Paotred. « Franchement non, il y a du respect, dément Didier l’entraîneur-joueur. Les adversaires viennent pas nous jouer en pensant que c’est facile. On perd souvent c’est vrai mais de pas beaucoup… Et il y a une vraie satisfaction cette année, c’est de n’avoir aucun forfait. » Le match du jour ne dérogera pas à la règle : la joyeuse troupe au complet débarque malgré l’heure précoce du coup d’envoi, 13 h 30, et malgré la soirée paëlla organisée la veille. Les joueurs arrivent les uns après les autres, plus ou moins

« On perd souvent c’est vrai mais de pas beaucoup... » 20

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frais : Carlos et José les premiers, puis Didier, Mick, Seb, Max, Micka, Goulven, Steph, etc. Flo, le gardien capitaine, se pointe le sac de sport en bandoulière, portant un sachet de frites surgelées dans une main, la valise de Kro dans l’autre. La bouffe est déchargée à la buvette, le pack est planqué dans le vestiaire. « C’est pour l’après-match hein, attention ! »

Voltarène et Ricqlès Vrai qu’il y a de l’enthousiasme dans ce petit réduit qui sent le mâle, le déo Axe, le Voltarène et la menthe Ricqlès, alcool concentré à 80° qu’utilisent quelques gaziers pour se réveiller avant de partir à l’échauffement sous la pluie. Peu de consignes seront données, si ce n’est la position des onze joueurs titulaires sur un terrain au marquage aléatoire (« le traceur devait avoir un coup dans le nez certainement ») et la volonté de « se faire plaisir », toujours. Avec une poignée de personnes devant sa buvette – des femmes et copines de joueurs essentiellement –, la présidente Josiane Guillemette


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COOL) DE BRETAGNE

n’est pas débordée de travail. Elle pose un regard affectueux sur ses hommes. Le bonheur est sur le pré. « C’est un petit club mais on va essayer de le faire grandir, promet-elle. Des jeunes devraient venir renforcer l’équipe. » La Ligue du Morbihan ayant décidé la suppression de la D4 la saison prochaine, les Paotred devraient automatiquement monter en D3. « Voire en D2, car on a dans l’idée d’essayer d’avoir deux équipes. » Au coup d’envoi, la pluie s’arrête enfin. Un miracle n’arrivant jamais seul, les locaux ouvrent le score dès le premier quart d’heure, puis doublent la mise dans la foulée. À la mi-temps, le score est déjà de 3-0. Il faut dire qu’en face, l’équipe B de l’ES Remungol n’est venue qu’à 10… Les visiteurs s’inclinent finalement sur le score de 5-1. Grâce à cette deuxième victoire de la saison, les Paotred quittent la dernière place du classement. Une performance qui mérite bien un cri de guerre dans le vestiaire (« Ah tchik ? Aïe ! ») et le décapsulage des mousses. « Faut croire que tu portes bonheur le journaliste, reviens quand tu veux. » R.D 21


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OLIVE ET TOM DANS LA VRAIE VIE Que celui qui n’a jamais tenté le tir de l’aigle d’Olivier Atton lève la main. Le plus célèbre des dessins animés de foot a donné envie de réaliser les gestes les plus dingos. Seulement voilà, entre la télé et le terrain, il y a un gap. On vérifie ça. Les frappes dans Olive et Tom avaient une capacité assez folle, celle de déformer les ballons qui poursuivaient leur trajectoire tout aplatis. « Impossible », affirme Caroline Cohen, auteure d’une thèse sur la vitesse d’un ballon après l’impact. Si la déformation est un phénomène normal au moment de la frappe, celle-ci ne peut perdurer. « Un objet sphérique et bien gonflé a tendance à vouloir rester tendu. Le frottement de l’air peut jouer, mais il faudrait une frappe à très grande vitesse et une balle dégonflée. » Et à la différence des ballons d’Olive et Tom écrasés de bas en haut, le frottement de l’air déformerait la balle de tous les côtés.

FOOT AUTEUR DE L’OUVRAGE « SOCRATE EN CRAMPONS » ET PROF DE PHILO, MATHIAS ROUX S’EST INTERROGÉ SUR LES LIENS ENTRE SA MATIÈRE ET LE BALLON ROND. AVANT LE DÉBUT DU BAC, ON RÉVISE TROIS NOTIONS. 22

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LES BALLONS QUI SE DÉFORMENT

LA TAILLE DU TERRAIN

LES FILETS DE BUT QUI SE PERCENT

Lorsque les équipes avançaient vers le but adverse, cela durait très, très longtemps. Mais bordel, combien pouvait bien mesurer le terrain ? On a donc sorti notre calculette. En moyenne, Olivier Atton et ses coéquipiers mettent 2 minutes à remonter le terrain à fond la caisse. En courant à 30 km/h (la vitesse de pointe de Ribéry), ils auraient ainsi parcouru 1 km. Soit presque dix fois plus qu’un vrai terrain dont la longueur est fixée à 105 mètres.

Sous la puissance des tirs de Mark Landers, les filets ont bien morflé, jusqu’à se trouer pour certains. Possible ? « Non si le filet est neuf et s’il n’a pas de défaut de fabrication », affirme Michel David, gérant de la société bretonne Sport Nature. Les filets sont réalisés en polypropylène ou polyéthylène. Les mêmes matières utilisées pour les bardages de sécurité sur les chantiers. Ces filets peuvent supporter le poids d’un homme après une chute, alors un ballon...» J.M

LA LIBERTÉ

LE TEMPS

LE DÉSIR

« Prenons le pénalty de Zidane en Coupe du Monde en 2006. Sa panenka (geste consistant à frapper le ballon d’une pichenette, ndlr) est le geste d’un homme libre. Il s’affranchit de la peur de l’échec et de l’enjeu. La liberté c’est faire preuve d’une résolution et de s’y tenir. Zidane est un homme libre car il se fixe sa propre règle, celle de réaliser une panenka, et ne change pas d’avis lors de sa course d’élan. La liberté, c’est s’obliger soi-même. »

« Le temps a une réalité double. Il y a le temps de l’horloge (le temps objectif) et la durée (le temps vécu). Notre perception du temps change en fonction des événements et de notre attente. Dans le foot, lorsque notre équipe est menée et tente de revenir à la marque, il nous semble que le chronomètre va à toute allure. Et, au contraire, quand on mène, le temps paraît figé. Un match est idéal pour expliquer la relativité du temps. »

« Nous avons des désirs, mais nous ne savons pas ce que nous désirons réellement. Nous sommes vite insatisfaits. Dans le foot, derrière tout objet du désir, il y en a un autre : gagner le match, gagner le championnat, etc. La victoire qui compte, c’est celle à venir. L’objet du désir serait donc le désir lui-même, cette énergie mobilisatrice. Dans le football, il y a des joies mais jamais de bonheur, car l’Homme ne peut pas ne plus désirer. Sinon, cela s’apparente à la mort. »

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L’oreille collée au poste de radio, à espérer le but de Nonda, Carnot, Ginola ou Darcheville, ça vous rappelle votre enfance ? C’est bien normal. Car pour tout fan de foot, aimer ce sport, c’était aussi ne pas voir le match en direct mais l’imaginer par l’entremise des journalistes présents au stade. À l’ère d’Internet et de beIN Sport, que devient le commentaire radio ? Il va bien, et perdure grâce à son charme suranné et son pouvoir narratif incomparable. Historique de la maison Radio France en BZH, Georges Cadiou (photo) parle d’un « véritable spectacle radiophonique d’une heure trente. Les aspects techniques et tactiques, c’est pas le plus important. Ce qu’il faut, c’est raconter une histoire. » Quitte parfois à survendre un poil… « Oui c’est vrai que ça peut arriver de parler d’un centre pourri comme d’une action extraordinaire mais il faut bien savoir garder son public ! » Pierre Henry-Dufeil fait partie de la jeune garde. Depuis quelques saisons, il commente les matchs de l’En Avant de Guingamp pour Radio Bonheur. Il a beau avoir la vingtaine, il kiffe l’exercice et ce n’est rien de le dire. « Je commente aussi des matchs TV pour Canal mais c’est la radio le plus excitant. Déjà gamin, j’avais tendance à commenter les parties de jeux vidéo alors je crois que j’étais fait pour ça ! » 23


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ÉCONOMIE, TECHNOLOGIE, ACCUEIL DU PUBLIC, SERVICES, OFFRES VIP... À QUOI POURRONT BIEN RESSEMBLER LES FESTIVALS DANS UN FUTUR PROCHE ? LES PROFESSIONNELS DU SECTEUR RÉPONDENT ET IMAGINENT DÉJÀ LEUR AVENIR. vacuons d’emblée l’épineuse question du financement des festivals. Le nerf de la guerre et un sujet qui revient régulièrement dans l’actualité en fonction des évolutions politiques et de la conjoncture économique. « L’inquiétude prédomine, pose François Floret, directeur de La Route du Rock. Dans le contexte de crise actuel, le volet culturel n’est pas prioritaire, il faut se creuser la tête pour boucler un budget avec une programmation satisfaisante sans faire augmenter le prix du billet d’entrée et des consos. » S’il se confirme à l’avenir que les subventions nationales diminuent, il faudra s’orienter vers d’autres modes de financement. « Je vois deux écoles s’affirmer, présente Gaétan Naël, du festival rennais Maintenant, ex-Electroni[k]. Soit un fonctionnement en complète autonomie avec le tissu local : aides des collectivités,

mécénat des entreprises du coin, fort appel au bénévolat et crowdfunding par exemple. Soit le modèle anglosaxon, avec des producteurs à la tête des structures – Live Nation and co –, des partenaires privés et du naming (à l’image du Carling festival en Angleterre, ndlr). Les deux peuvent cohabiter. »

« Une tablette tactile au bar » Inutile de préciser qu’un festival ancré dans son territoire comme les Vieilles Charrues s’imagine plus un avenir avec un mode de financement local, façon première école. « Le naming par exemple, c’est forcément non car c’est inscrit dans la charte du festival », balaie son directeur Jérôme Tréhorel. S’agissant de l’accueil des festivaliers, vous ne vous en rendez peut-être pas compte mais les bouleversements sont déjà en cours. « Il existe par exemple la géolocalisation sur smart-

phone, permettant aux festivaliers de se situer sur le site », illustre Émilie Lacroix, des Trans Musicales, qui voit dans le système “cashless” la prochaine grande révolution à venir en France. Le principe : pouvoir tout payer sur le lieu du festival – consommation, restauration, merchandising… – grâce à une carte prépayée ou un bracelet muni d’une puce magnétique RFID. Plus besoin de se trimballer avec un portefeuille plein de liquide : un passage de la carte ou du bracelet vers une borne permet de régler l’addition. Primavera en Espagne ou Sziget en Hongrie s’y sont mis, les Vieilles Charrues y réfléchissent. « On va déjà tester sur quelques bars la mise en place d’une tablette tactile pour passer commande, annonce Jérôme Tréhorel. Tout ce qui peut permettre au festivalier de laisser ses problèmes à l’entrée et de profiter de son temps passé sur place est bon à 25


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prendre. » Afin d’éviter les longues files d’attente, le festival du Bout du Monde lancera par ailleurs l’an prochain un service de bar en ligne où les festivaliers pourront prépayer leurs tickets boisson (lire page 28). Gaétan Naël imagine aussi des moyens pour les organisateurs d’économiser de l’argent grâce aux avancées des nouvelles technologies. « Il y a matière à s’inspirer des pistes de danse durables qui existent déjà dans certaines discothèques : les sauts et les mouvements des gens génèrent de l’énergie, réutilisable par exemple vaut aussi avoir un site avantageux, pour alimenter l’éclairage des lieux. » qui donne envie d’y revenir d’année en année. « C’est un des avantages « L’argument touristique » de La Route du Rock, reconnaît En matière d’organisation géné- François Floret. La mer est proche, rale, que peut-on encore proposer le lieu des concerts est un ancien fort au public présent sur place ? « Il Vauban. L’argument touristique est faut surprendre, faire vivre des à prendre en considération. » expériences uniques, que le festival Rien que pour son site exceptionnel, devienne une soupape de décom- le festival du Bout du Monde peut pression », s’enthousiasme Jérôme aussi envisager un avenir durable. Tréhorel. En ce sens, les Charrues Le sociologue Nicolas Bénard va vont mettre à disposition des festiva- même plus loin : « le futur des fesliers une grande roue et proposer à tivals passe par une alliance entre ceux qui le souhaitent des baptêmes son offre culturelle et le patrimoine de montgolfière. Dans le registre touristique. » Et d’illustrer ses produ loisir et de la fête, Astropolis a pos avec l’exemple du Metaldays déjà installé des auto-tamponneuses. en Slovénie, où le public peut pro« Et au Pukkelpop en Belgique, c’est fiter en journée de visites dans les un véritable parc d’attraction qui châteaux et les vignobles du coin est installé sur le site pour s’amuser avant les concerts du soir. entre deux concerts », ajoute Gaétan « La France est le pays de la bonne Naël. Pour qu’un festivalier se sente table, alors proposons au public bien, profite et consomme, mieux toujours plus de produits du ter-

« Il faut faire vivre au public des sensations uniques » 26

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roir, propose Nicolas Bénard. Les festivals anglais ou hollandais ont peut-être plus les moyens d’attirer des grosses pointures sur scène, mais leur bouffe est dégueulasse ! Nous, on doit jouer sur notre capacité à accueillir les festivaliers et à les faire bien vivre le temps d’un week-end. »

« Des hologrammes » Toujours dans cette optique du meilleur accueil, il y a aussi matière à s’inspirer du Boom Festival au Portugal, avec ses décors époustouflants : chapiteaux multicolores, dômes géants… En faisant appel à des artistes et des décorateurs inventifs, il est possible de proposer autre chose que la traditionnelle grande scène avec sa fosse toute moche devant. Plus fort encore, le festival 70 000 Tons of Metal a lieu sur un immense bateau de croisière, où environ 2 000 festivaliers croisent les artistes en journée sur le ponton, avant les concerts du soir. Une offre VIP qui cartonne mais qui a bien sûr un coût élevé : 1 300 euros la


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semaine. « Ce n’est pas à la portée de toutes les bourses mais c’est un bon moyen pour des passionnés de passer ses vacances en côtoyant ses idoles », estime Nicolas Bénard. Sur ce point, les croisières avec Frank Michael ou Julien Lepers avaient de l’avance. Et si nos idoles sont mortes, comment fait-on ? On les fait revivre grâce aux nouvelles avancées numériques ! Gaétan Naël en est persuadé, « l’univers de la musique et celui virtuel des jeux vidéo sont faits pour s’entendre. Il y a déjà eu l’hologramme de 2Pac, le groupe Gorillaz ou la vraie fausse chanteuse japonaise Hatsune Miku, mais ce n’est qu’un début. Plein de projets en ce sens restent à imaginer ». Comme par exemple de réunir sur scène un super groupe virtuel avec les hologrammes de Cobain, Hendrix, Buckley ou Joplin ? « Oui, c’est techniquement faisable. Ça paraît fou ? Mais ce qui paraissait dingue il y a une vingtaine d’années, c’était de coloriser des films en noir et blanc, voyez comme les choses peuvent aller vite… » Régis Delanoë Illustration : Étienne Laroche 27


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Vous pouvez l’avouer sans que ça ne remette en cause votre sens de la fête : il est arrivé que parfois, le cul mal posé sur un site poussiéreux de festival, vous rêviez à votre chez vous. Tranquille, confortablement installé dans votre canapé, les bières à portée de main. Raah, qu’est-ce que ce serait bien de pouvoir assister à des concerts ainsi. Et bien c’est désormais possible, via le streaming. De plus en plus de plateformes web et TV offrent aujourd’hui la possibilité d’assister à un live en direct : Arte Live Web, SFR Live Concerts, Pression Live, Culturebox… Tous se sont mis sur un marché dont Sourdoreille est l’un des précurseurs. « La progression de cette activité est constante nous concernant depuis cinq ans », se réjouit Mario Raulin, l’un des responsables du média musical. Le dispositif varie selon les festivals, mais globalement Sourdoreille comme les autres est en mesure de proposer à la fois une retransmission live en direct, complétée par quelques “goodies” :

conf’ de presse, interviews, sessions acoustiques… « C’est un marché en pleine croissance et les possibilités de développement sont grandes, constate Mario. Par exemple aux États-Unis, la couverture médiatique du festival Coachella est un vrai business, avec de gros moyens et de bonnes audiences. » Une chaîne télé est même spécialisée dans ce secteur d’activité : AXS TV. De quoi venir à terme carrément concurrencer les entrées sur site ? François Floret de La Route du Rock n’y croit pas. « Perso je ne connais pas encore grand monde qui regarde du live depuis son domicile. C’est une offre complémentaire intéressante, que les artistes utilisent d’ailleurs comme outil de promotion, mais je ne suis pas inquiet : pour le son et le vécu, un concert se vit en public. » De la même façon qu’en sport, la retransmission TV est un service non négligeable mais qui ne remplace pas les émotions que procure un match au stade.

Ce sera une première en Bretagne. Pour son édition 2015, le festival du Bout du Monde va lancer un service de bar virtuel. Concrètement, chaque festivalier pourra, s’il le souhaite, acheter ses tickets boisson en amont sur le site Internet du festival. Alors équipé d’un codebarres imprimé sur une feuille A4, il lui suffira de se présenter à l’un des guichets spéciaux pour retirer son sésame, après un coup de scan. 28

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« Les files d’attente pour acheter les tickets boisson sont un des points noirs du festival », reconnaît Marie Clavier de l’orga pour expliquer cette nouveauté. Une dématérialisation, déjà initiée depuis quelques années avec les billets d’entrée, qui devrait offrir plus de fluidité, l’acte d’achat étant déjà effectué. Un système que l’on retrouve à l’étranger, à Dour en Belgique notamment. « En festival, entre la queue pour les toilettes, celle

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LE CODE-BAR ARRIVE EN FESTIVAL

pour la bouffe et celle du bar, on perd pas mal de temps. L’objectif c’est d’en faire gagner aux festivaliers, afin qu’ils puissent mieux profiter des concerts, ce pour quoi ils sont venus. »



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L’ANTI-GUIDE DES VACANCES TU VEUX ÉVITER LES JOURNÉES À LA PLAGE, LA GLACE SUR LE PORT ET LES SOIRÉES EN DISCOTHÈQUE ? PAS DE SOUCI. VOICI CINQ IDÉES DE SORTIE POUR ÉVITER LES TOURISTES. 30

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Si les réseaux sociaux regorgent de bonnes adresses et de bons plans restos, nous vous proposons de basculer dans le dark side des avis en ligne. Un voyage dans les limbes d’Internet où personne n’ose s’aventurer. Cette destination se trouve à la page 139 du moteur de recherche de TripAdvisor, le site de voyage de référence qui compile à ce jour près de 150 millions de commentaires de consommateurs. Face aux restaurants qui affichent un taux de recommandation de 98 %, certaines adresses font plutôt la gueule en stagnant sous la barre des 10 % d’avis positifs. Morceaux choisis : « immonde », « nourriture infâme, fuyez », « c’est infecte », « serveur gentil mais nul, patronne flippante », « on peut difficilement faire pire, l’entrée sentait très mauvais », « ma fille a demandé du ketchup, on l’attend toujours », « hygiène douteuse mais prix correct si on est à jour dans ses vaccins », « le cuisinier m’a menacé d’aller régler ça dehors », « les clients se souhaitent mutuellement bon courage »… Ça donne envie hein ? Puisque le journalisme de terrain ne me fait pas peur, j’ai donc déboulé un midi dans l’un de ces restaurants de l’horreur. Je suis à Saint-Malo, rue Jacques Cartier où s’enchaînent pizzérias, crêperies et brasseries sans discontinuité. Un dernier texto envoyé à ma meuf (on sait jamais) et je rentre dans l’établissement. Je suis installé sur une petite table

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TESTER LES PLUS MAUVAIS RESTAURANTS

et la carte m’est envoyée aussitôt. D’où cette question : comment un Ça y est Julien c’est parti, tu peux resto gère-t-il sa e-réputation ? Si la plus reculer maintenant. gérante de l’établissement malouin n’a pas donné suite à notre sollici« Ça fait pas une bonne pub... » tation, le boss d’un restaurant du À ce moment précis, je suis à la flop 3 (basé aussi dans le 35) avoue croisée des destins. Soit je vais me « être au courant des commentaires. retrouver dans la peau de Jean-Luc Ça fait pas une bonne pub mais que Petitrenaud, soit dans celle de Phi- voulez-vous… » Si TripAdvisor met lippe Etchebest. Malheureusement, à disposition un système de droit de mon repas ressemblera à celui du réponse, il ne l’a pas utilisé, affirchef de M6. Le filet de bœuf ne mant avoir « autre chose à faire ». semble pas de premier choix. J’en Et conclut : « Tout ce qu’on lit sur mange la moitié et cache le reste Internet n’est pas vrai… » sous la salade. Côté dessert, la On touche là le point sensible des crêpe sauce chocolat (disposée sites d’avis : la véracité des témoifaçon Nord-Finistère un lendemain gnages. Sur TripAdvisor, il est en d’Amoco Cadiz) est servie froide. effet possible de déposer un comPlaisir. Je sors de là plus léger de mentaire mensonger sans qu’aucun vingt euros mais pas déçu, tant les contrôle ne soit effectué. avis de TripAdvisor m’avaient clai- Lancée en grandes pompes en juilrement annoncé la couleur. let 2013, la norme NF Z74-501 de l’Afnor (Association française de normalisation) avait pourtant eu un certain écho dans les médias. Son objectif ? Lutter contre les faux messages et fiabiliser le traitement

« Les clients se souhaitent mutuellement bon courage » 32

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des avis en ligne. Si tout le monde s’était félicité de cette avancée (la France est un pays précurseur dans ce domaine), le bilan est loin d’être folichon un an après son lancement. Seulement huit entreprises sont à ce jour certifiées. « Dans le secteur du tourisme, on trouve les sites Nomade Aventure et Vinivi », indique Benoit Phuez, chef de produit Afnor. Pas vraiment les poids lourds du marché. TripAdvisor et Google sont aux abonnés absents. « Ils ont travaillé avec nous à l’élaboration de la norme, mais ne souhaitent pas s’engager pour le moment. Ils préfèrent certainement éviter les contrôles et s’abritent derrière la notoriété de leur marque. » L’Afnor reste cependant optimiste : « On a proposé à l’Iso (Organisation internationale de normalisation, ndlr) de travailler sur ce sujet. C’est long à se mettre en place mais les démarches sont lancées », se réjouit Benoit Phuez qui sait que seule une certification au plan mondial peut inciter les mastodontes à jouer le jeu. Julien Marchand 33


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APPRENDRE L’ANGLAIS SUR UN PARKING

Les vacances en Angleterre sont généralement chargées de souvenirs : l’imposant ferry accosté au port, les chips au vinaigre (chelou au début mais dont tu deviens vite accro), le volant à droite, le fish and chips emballé dans la page 3 du Sun, ce putain d’accent français que tu te trimballes quand t’essaies de discuter… Les séjours linguistiques de nos années collège et lycée étaient pour nous le meilleur moyen de pratiquer in situ notre LV1, de faire ami-ami avec nos corres’ et, quand y avait moyen, d’en emballer une ou deux. Ne me dis pas que t’as jamais essayé, j’te crois pas. Pour ceux qui n’ont malheureusement plus le temps ni l’argent pour s’offrir une virée outre-Manche, il existe un territoire merveilleux, au nord du Finistère, niché entre deux ronds-points. Nous sommes à Roscoff. Plus précisément sur le parking d’un “wine & beer”, sorte de caviste XXL ou de supérette 100 % liche. Ici, le décor ne laisse pas de place au doute. Entre les plaques d’immatriculation jaunes, 34

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le menu en english du snack collé au magasin et un ballet incessant de Britanniques venus faire le plein d’alcool : ce parking est bien un petit bout d’Angleterre.

120 bouteilles par personne On y a croisé deux de ses représentants, Darren et Eric, avec qui on a partagé un fish and chips (« plutôt bon, surtout les frites ») et causé bagnoles pendant tout le repas (Eric collectionne les 2 CV). Ces deux garçons venus du comté de Cornouailles sont là pour quelques jours, à la cool, le temps de « voir des amis français, profiter du soleil, manger des langoustines et faire quelques courses », énumère Eric en pointant le WBS. WBS ? Wine Beer Supermarket. Soit 300 m2 de bouteilles, pour un peu plus de 1 000 références. Ici, tout est écrit en anglais. Pas un hasard : 80 % des clients sont anglo-saxons (40 % d’Anglais, autant d’Irlandais). Née au milieu des années 1990, l’enseigne a, dès sa création, ciblé ces étrangers avant leur retour en bateau. Trois boutiques de ce genre ont

éclos à Roscoff et Saint-Pol-de-Léon, toutes sur le même créneau. « Par rapport aux prix outre-Manche, nous sommes très compétitifs. Sur le vin, en moyenne, nos clients anglais font 50 % d’économie », explique Fred Bossis, le gérant. On comprend tout de suite mieux les caddies remplis et les coffres archi-blindés. Surtout que les douanes autorisent jusqu’à 90 litres de vin (soit 120 bouteilles) par personne à chaque traversée. Mais bordel, pourquoi un tel écart de prix ? « Il y a plusieurs leviers. Le taux de change déjà (1 £ vaut actuellement 1,20 € environ, ndlr), la TVA et les taxes anglaises sur le vin. En fonction de l’évolution de ces facteurs, cela est plus ou moins intéressant de traverser la Manche pour acheter en France. Actuellement, ça vaut le coup. Après une dévaluation de la livre entre 2008 et 2011, c’est reparti depuis », développe le boss de WBS qui reconnaît une « bateau-dépendance. T’enlèves les Anglais, tu peux rayer les trois-quarts de Roscoff ». God save the ferry. J.M


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Aussi galère à replier qu’une notice de médicament, la carte routière reste malgré tout une madeleine de Proust de nos vacances. Étalée sur la table de la cuisine pour réfléchir à l’itinéraire, dépliée tant bien que mal en plein trajet, rangée en vrac dans la boîte à gants au moment du retour. Avec la démocratisation du GPS et le développement des applis smartphone, la carte routière a pris un sérieux coup dans le cul. Si l’apogée du marché se situe en 2006, celui-ci chute depuis. « En 2013, il a baissé de près de 8 % en France par rapport à l’année précédente », confirme Étienne Tricoire du service marketing de l’IGN, n°2 du secteur après Michelin. Pour lui, la carte reste un incontournable, surtout en période de vacances. « Le GPS propose l’itinéraire le plus rapide mais pas forcément le plus beau. Quand on planifie un trajet avec une carte, on repère beaucoup mieux les coins sympas devant lesquels passer. » Un avis partagé par Pascal Guilleux, gérant de La Librairie du Voyage à Rennes. « D’un point de vue touristique, y a pas photo. L’itinéraire est plus réfléchi, mieux pensé, plus riche. » Une plus-value que développent les éditeurs avec des cartes thématiques, à l’image de l’IGN qui a sorti cette année une version spéciale à l’occasion du centenaire de la Première Guerre mondiale. 35


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EXPLORER UNE FERME, UN HÔPITAL OU UN ZOO

Imaginez-vous débarquer sur Terre après que l’espèce humaine s’est éteinte. Imaginez-vous parcourir votre rue, votre maison, votre lieu de travail en étant la dernière personne encore vivante sur cette planète. Imaginez-vous explorer des endroits habituellement bondés mais subitement dépourvus de tout mouvement. Cette sensation de monde perdu, Clément et Fabien la connaissent. Ces deux photographes, originaires de Combourg en Ille-et-Vilaine, arpentent le département à la recherche de lieux, oubliés de leurs propriétaires, que le temps a figés : maison, ferme, hospice, marbrerie… Parmi leurs plus belles trouvailles : un zoo/parc d’attraction à l’abandon, situé entre Rennes et Saint-

Malo. « C’est fin 2013 que je l’ai découvert. Soit presque dix ans après sa fermeture. Rien ne semblait avoir bougé depuis. Les différents bâtiments, l’énorme toboggan, les grandes volières, les abris… tout était encore en bon état, se souvient Clément, toujours marqué par l’atmosphère qui s’y dégageait. Un parc d’attraction, c’est un lieu chargé. Un endroit qui a vu des milliers et des milliers de visiteurs venir s’amuser. Tu y entends presque toujours les enfants en train de jouer. »

ont monté dernièrement leur collectif “Le jeudi c’est rurex”. Le rurex ? La branche rurale de l’urbex (urban exploration), soit la visite de lieux construits par l’Homme et aujourd’hui abandonnés. Un terrain de jeu tout sauf anodin pour ces deux gars qui voient dans la campagne un endroit où tout reste à découvrir. « Là où le rurex est intéressant, c’est dans l’état de conservation. C’est comme si tu pénétrais dans un territoire encore vierge. Il y a très peu de dégradations, pas de tags, pas de pillages. « Des lettres de 1972 » Tu rentres dans des maisons où Si le parc est désormais en cours de il y a encore de la vaisselle dans démantèlement (le fameux toboggan la cuisine ou des magazines dans a été racheté par un camping du le salon. Des objets qui datent de coin), Clément et Fabien poursuivent 20, 30, 40 ans. Quand t’es là deleur chasse aux lieux fantômes. Et dans, ça fait travailler l’imagination. T’essaies de te représenter la vie des gens. » Comme avec ces quelques lettres datées de 1972 dénichées par Clément dans un ancien hospice, « des courriers envoyés par un fils

« Comme si tu pénétrais dans un territoire encore vierge » 36

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Le jeudi, c’est rurex

ABANDONNÉ

emprisonné à sa mère. De ce que j’ai lu, elle ne lui a jamais répondu… »

« L’état du jardin et des rideaux » Mais comment trouvent-ils ces lieux ? Si Fabien est ambulancier et profite de ses journées sur la route pour faire des repérages, les garçons partent le plus souvent à l’aventure, sans préparation ni recherche préalable. « À chaque balade, on trouve quelque chose. T’apprends vite à connaître les signes qui ne trompent pas : l’état du jardin, de la toiture, des fenêtres, des rideaux… Tu vois rapidement si un lieu est inhabité depuis longtemps, racontent-ils. Si on rentre par effraction ? Ça nous arrive... mais le plus souvent on profite toujours d’un carreau déjà cassé pour rentrer. D’ailleurs, les gendarmes nous emmerdent pas. Ils voient bien qu’on n’est pas là pour voler ou casser. Ils nous ont déjà surpris mais nous laissent tranquilles. Ils nous demandent juste de faire gaffe et de ne pas nous blesser. » J.M 37


DOSSIER

CHERCHER DES ZIZIS DANS LES CHAPELLES

Si vous trouvez que les nains de jardin devant la maison de votre mémé sont too much, c’est que vous ne connaissez pas Annick Bougouin. Depuis près de dix ans, cette retraitée de Trédarzec, dans les Côtes d’Armor, recouvre l’intégralité de sa pelouse de peluches et de jouets (1). On en dénombre une centaine. 38

À la fois flippant et fascinant tant l’accumulation et la mise en scène interrogent. « Pourquoi je le fais ? Je ne sais pas trop. Le jour où j’ai commencé, je ne me suis plus arrêtée. » Ce genre de jardins insolites, il en existe plusieurs en Bretagne. De l’art de bord de route porté par des artistes qui n’en sont pas, mi-freaks

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mi-authentiques : les créatures nées d’objets de récupération de Viviane Rommelaere à Quemper-Guézennec, le jardin taillé d’Eugène Bornet à Tréglamus (2), les topiaires et haies farfelues de Joseph Le Bail au Faouët (3)… Dans quelle case artistique peut-on les ranger ? Pour Laurent Danchin, spécialiste

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VISITER LES JARDINS CHELOU DE LA RÉGION

dénonciation de la luxure mais cela ne tient pas. Il faut en effet placer ces sculptures dans leur contexte historique. Jusqu’à la Révolution française, l’église bretonne était en effet assez libre. Nous ne sommes pas sur une notion de péché. » Ces scènes n’auraient donc pas vocation à choquer. Au contraire. En mariant profane et sacré, elles auraient pour fonction de célébrer « l’acte sexuel qui est un acte d’union. C’est le culte de la fertilité. S’il y a une morale, c’est celle de la vie ». Mais n’allez pas pour autant voir des scènes licencieuses là où il n’y en a pas. Car comment expliquer autrement celle du chien tenant un phallus dans sa gueule ? « On pourrait considérer que c’est une allégorie sexuelle mais ce n’est pas le cas. C’est une représentation compagnonnique. Le chien incarne l’apprenti qui durant son apprentissage doit se taire, le pénis symbolisant ici les pulsions. » Wouaf.

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Bernard Rio

Bernard Rio

Si je vous dis exhibition, masturbation, plan à trois et même zoophilie, vous me répondez quoi ? Hot vidéo, Journal du Hard et YouPorn ? Raté. Ces images pas très catholiques, Bernard Rio les a observées dans les églises et chapelles de la région. Des lieux de cul(te) dont il a décortiqué les fresques et sculptures. Il en a même fait un ouvrage : Le cul bénit. « La première fois que je suis tombé sur une scène de ce genre, c’était dans l’église Saint-Jean-Baptiste au Croisty dans le Morbihan. Sculpté sur le blochet, un homme en érection qui tenait son sexe. Ça m’a d’abord surpris mais je me suis dit que c’était certainement anecdotique. » Cela ne sera pas le cas. De Rostrenen à Malestroit, de Gourin à Rennes, de Saint-Avé à Quimper, Bernard Rio a réalisé un album photo plutôt osé : femmes qui montrent leur entrejambes, coïts (à deux, à trois, à plus), léchouilles en tous genres… « On pourrait penser qu’il s’agit d’une

de l’art brut, « on rejoint ici la notion d’art populaire. À la différence de l’art savant, les codes ne sont pas maîtrisés. Mais cela ne les empêche pas de créer, d’être inspirés, de développer un style personnel. Il y a aussi un côté très obsessionnel et entier, ce qui est le dénominateur commun de tous les créateurs ».


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SUR LA PISTE DE XAPATAN Des candidats envoyés au fin fond du Mexique à la recherche d’une statuette. C’est le pitch de ce jeu imaginé par Antenne 2 et animé par une Sophie Davant en jeep durant l’été 1992. L’épreuve finale ? Un escalier de mille marches à gravir avant de choper un train à vapeur. Tchouuu tchouuu ! Remplacé par ? Pékin Express JEUX SANS FRONTIÈRES L’Europe ne s’est pas faite sans dommage collatéral. Diffusé de 1965 à 1999 et présenté par Georges Beller notamment, ce programme en fait partie. Le principe ? Un tournoi rassemblant des Français, Italiens et Allemands, déguisés en parts de pizza ou en bananes géantes, qui s’affrontent au cours de jeux dont personne ne comprend les règles. Jacques Delors likes this. Remplacé par ? Intervilles LES AVENTURES DE PAGO PAGO Pendant les étés 1994 et 1995, TF1 nous a conté une légende dont elle a le secret : un village de pêcheurs aux Caraïbes abriterait depuis des centaines d’années un trésor aquatique. Le butin ? Une fontaine de perles que les candidats devaient récupérer en apnée. Un jeu présenté par le regretté Olivier Chiabodo, mister three fingers. Remplacé par ? Koh Lanta 39


Être auteur de guides de voyage, c’est le job de rêve ? Même si ce n’est pas désagréable, c’est tout sauf des vacances. On est censé se mettre dans la peau d’un touriste, sauf qu’on est un supertouriste : aucun vacancier ne visite trois musées dans la même journée et aucune personne ne va au resto midi et soir pendant trois semaines. C’est un boulot qui fait rêver pourtant. On s’imagine qu’on va partir à la découverte de contrées exotiques. Dans la réalité, le quotidien ressemble plus à celui d’un VRP. On est seul, souvent sur la route. Sans oublier le temps qui fait défaut, du coup on marche sur des sentiers balisés.

Et pour un restaurant ? Quand je ne pouvais pas manger dans un resto, je faisais ma petite enquête : j’interrogeais des restaurateurs ou des hôteliers pour connaître les bonnes adresses. Et les jours où j’avais zéro info, un de mes trucs était d’aller interroger les pharmaciens de la ville : ils ont un goût plutôt Que nous cachent les guides ? sûr, assez bourgeois et se trompent Ils disent que les auteurs ont testé rarement sur les bonnes tables. tous les restaurants, tous les hôtels : c’est faux. Même chose pour la mise Peut-on faire confiance aux guides ? à jour : elle n’est pas faite tous les ans. Il faut savoir lire entre les lignes. Il Il y a des mises à jour téléphoniques y a des phrases passe-partout qui tous les deux ans et des mises à jour sont révélatrices de certaines choses. terrain seulement tous les quatre ans. Quand on dit que « c’est une ville qui se mérite », ça veut souvent dire que Comment font les auteurs pour par- c’est une ville défigurée par le béton ler de lieux qu’ils n’ont pas visités ? et dans laquelle on n’a pas envie de Moi je m’arrangeais pour tout voir, rester. Idem pour le « village hors du c’est peut-être pour ça que mes jour- temps » : il est inutile d’y chercher nées étaient speed. Mais j’avais des une activité nocturne de folie. collègues qui, eux, faisaient clairement l’impasse sur certaines zones. Un guide peut-il critiquer ? Après, pour parler d’un hôtel par Logiquement, c’est son but : être obexemple, il n’y a pas besoin d’y jectif. Après, il est évident qu’un guide passer la nuit pour savoir s’il a un ne peut être exhaustif, une sélection bon standing et s’il est confortable. s’opère donc. Les mauvaises adresses, 40

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Vincent Noyoux, ancien auteur de guides touristiques, a écrit Touriste Professionnel où il révèle les secrets de ces ouvrages.

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on ne les met pas. Par contre, quand il y a des lieux jugés incontournables et qu’ils ne sont pas à la hauteur, il faut le dire. Mais toujours en étant très feutré. Les services juridiques des éditeurs sont prudents. Quelqu’un dont on dézingue le commerce peut attaquer pour diffamation. Y a une frilosité des guides qui préfèrent s’abstenir que de dire du mal. Un guide reste un incontournable pour préparer un voyage ? Malgré tout, je pense que oui. Ça donne une bonne idée générale de ce qu’est un pays. En quelques pages, on découvre la géographie, la culture, l’histoire… Sur Internet, on peut lire ces informations mais pas rassemblées comme sait le faire un guide. Là où ils sont en revanche en train de perdre du terrain, c’est sur les adresses de restaurants et d’hôtels. Sur des sites comme TripAdvisor, les commentaires sont frais, alors que ceux des guides ont déjà une année de retard au moment de l’impression. Recueilli par J.M



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COOL AND THE GANG LE NOUVEL AIMANT À HIPSTERS S’APPELLE MAC DEMARCO. UN PETIT GÉNIE CANADIEN À LA DÉGAINE DE BRANLEUR, AUSSI TALENTUEUX QUE GROS DÉCONNEUR. UNE PERSONNALITÉ ATTACHANTE ET PLUS COMPLEXE QU’ELLE N’EN A L’AIR. e média ricain Pitchfork a récemment mis en ligne un documentaire d’une trentaine de minutes sur le cas Mac DeMarco. Intitulé Pepperoni Playboy, il montre le garnement dans son studio à Brooklyn, composant avec nonchalance les parfaites petites mélodies lo-fi qui composent son nouvel album Salad Days, déjà le troisième d’une carrière solo entamée à Montréal. C’est assez fascinant de voir qu’il lui en faut peu pour réussir des morceaux de grande classe qui peuvent faire penser à du Kinks déglingué (notamment le parfait tube Passing Out Pieces) : une guitare premier prix, quelques pédales à reverb, une 42

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touche de synthé vintage et cette voix groove et suave, travaillée à la clope, parfois à la limite de dérailler mais toujours touchante. « Je fais ma petite musique et tout ce que je sais, c’est que j’adore ça, nous a-t-il expliqué. Après, je trouve ça assez fou que ça plaise à autant de monde. » Car de fait, Mac DeMarco cartonne pas mal depuis quelques temps déjà. Après avoir fondé avec un pote d’enfance un groupe intitulé Makeout Videotape, ses premières démos sont repérées par le très coté label Captured Tracks, qui l’enrôle dans la foulée. « Bosser avec eux est une vraie chance, reconnaît-il. Les mecs sont ultra cool et me donnent

les moyens de bénéficier d’une bonne distribution à l’international et d’organiser plein de shows. Bref, c’est parfait. » Pepperoni Playboy montre d’ailleurs aussi Mac et son groupe en tournée en Asie et en Australie. L’occasion de découvrir l’autre face du gazier : son côté gros déconneur, ado éternel simulant l’amour à un flipper, décapsulant sa bière avec ses dents du bonheur et finissant régulièrement ses concerts à poil. Un trait de personnalité fou-fou que l’intéressé préfère prendre avec auto-dérision. « C’est vrai que je peux me montrer pas mal agité, notamment sur scène où je ne me fixe aucune réelle limite, avoue-t-il.


Robert Redfield

Disons que j’y suis souvent un peu plus excité que quand je suis allongé dans mon lit ! » Un euphémisme, alors que la légende raconte qu’il aurait déjà terminé un set à Montréal en essayant de s’enfoncer une baguette de batteur dans le fion… Mais s’il ne fait rien pour atténuer sa réputation d’amuseur public semblant parfois touché du syndrome Gilles de la Tourette, il serait injuste de ne retenir que cet aspect. Mac DeMarco n’est pas qu’un Peter Pan de l’indie rock. Le garçon sait se raconter dans ses chansons avec toujours le ton juste, entre humour et tendresse. « Je ne sais pas écrire autre chose que sur moi », s’excuse-t-il presque. Une qui n’a pas à s’en plaindre, c’est sa copine de toujours, Kiera, qu’il connaît depuis l’enfance et à laquelle Mac DeMarco rend hommage à chacun de ses concerts en reprenant invariablement le morceau Still Together. Pas seulement un rigolo vous voyez. Régis Delanoë Le 16 août à La Route du Rock à St-Malo 43


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EVERYDAY ROBOTS APRÈS LES ZOMBIES EN 2013, LES ROBOTS SONT LES INCONTOURNABLES DE 2014. ILS SQUATTENT LA MUSIQUE, LE CINÉMA, LES EXPOS ET MÊME LES FESTIVALS AVEC ART ROCK, NOTAMMENT, QUI EN FAIT LE THÈME DE SA PROCHAINE ÉDITION.

Yves Gellie

Louis-Philippe Demers

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a série Real Humans, le film Her, l’exposition Art Robotique à la Cité des Sciences, sans oublier le règne incontesté des Daft Punk… Dur de passer à côté des robots. Une omniprésence culturelle qui fait écho à une place de plus en plus importante de la robotique dans nos vies. Les hommes tendent à se transformer en cyborgs et les robots sont bien partis pour prendre notre place (et même la mienne, à l’image de Quakebot, le robotjournaliste du Los Angeles Times, qui en mars dernier a écrit tout seul son premier article). Une hype du robot que célèbre le festival Art Rock à Saint-Brieuc. Au programme : arts numériques (les installations interactives de LouisPhilippe Demers), photographies (celles d’Yves Gellie qui a pénétré des laboratoires développant des programmes de robotique humanoïde), musique (le concert de Compressorhead, groupe de métal dans tous les sens du terme)… « À l’origine, le robot faisait plutôt peur. Mais Star Wars a changé la donne avec ses droïdes sympathiques, éclaire Patrice Girod de Science Fiction Archives qui, 44

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toujours à Art Rock, présente l’exposition Robots : des films aux jouets. Ce qu’on nous présentait il y a des années comme de la sciencefiction, on y arrive à grands pas. Cela explique certainement l’attrait du public pour ce sujet. » Un sujet qui a toujours captivé les artistes. Cette influence, l’association “Des messieurs trop tranquilles” la décortique dans son exposition Pop culture et robots présentée à Saint-Brieuc. « On a référencé près de 250 pochettes d’album avec des robots. C’est marrant de voir comment ça touche tous les genres. Ça va de Kraftwerk à Guy Béart, détaille Julien Tiné, l’un des membres de l’asso. Pourquoi ça fascine autant ? Je pense que ça révèle notre côté Dieu ou apprenti sorcier. Comme si les humains étaient en train de créer une nouvelle espèce. Le fantasme de l’intelligence artificielle participe aussi. On est passé du robot-esclave à un robot qui nous est supérieur sur de nombreux points. On se fait peur mais on en redemande. » Julien Marchand Du 6 au 8 juin à Art Rock à St-Brieuc


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DE LA PROLIFIQUE SCÈNE GARAGE RENNAISE ÉMERGE UN NOM : SAPIN. IDÉAL POUR L’ÉTÉ. « Du rock façon San Francisco, mais en plus fun. » Voici comment Pierre, un des trois membres du groupe Sapin, présente la chose. Avec un modèle revendiqué : The Black Lips, formation ô combien culte dans le petit monde du garage qui, ces derniers temps, connaît un engouement inédit via les têtes de gondole Ty Segall et Thee Oh Sees. « En France aussi, c’est une scène hyper active, où tu peux vite te démerder à trouver des dates. Là par exemple, on revient du sud-ouest de la France. On avait même calé un concert à Barcelone, mais le camion est tombé en panne alors on a dû annuler… » Ce côté DIY, c’est ce qui fait à la fois le charme et la limite de ce style musical, où les occasions de s’exprimer hors des rades habituels sont rares. La bande a donc accueilli avec satisfaction l’invitation du festival de Binic cet été. « Pour nous c’est un peu le Graal », confie Pierre. Pour les découvrir, l’écoute de leur album Wrong Way est hautement recommandée. Le son de rock’n’roll reverb s’adapte particulièrement aux températures estivales. Mouillez, mouillez, le maillot ! Le 13 juin au Mondo Bizarro à Rennes, le 3 août au Binic Folks Blues, le 30 août au Roi Arthur à Bréal-sous-Montfort 45


Zia Anger

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ANGEL ET CONTRE TOUS DANS LE PETIT MILIEU VIRIL ET MACHO DU ROCK, ANGEL OLSEN IMPOSE SON STYLE ENVOÛTANT ET SPECTRAL. GAFFE, LA RICAINE, PROGRAMMÉE À LA ROUTE DU ROCK, N’EST PAS LÀ POUR ENFILER DES PERLES. ET C’EST TANT MIEUX. e vais essayer de la joindre mais je te garantis rien, elle n’est pas très interview... » La chargée de relation presse d’Angel Olsen m’avait prévenu : sa protégée est une discrète. Finalement, les quelques questions envoyées par mail à l’artiste américaine trouvent réponses, même si celles-ci s’avèrent courtes. Oui, elle s’est bien fait connaître en collaborant avec le songwriter Bonnie “Prince” Billy, « mais (sa) carrière solo a débuté bien avant à Saint-Louis, Missouri », où elle est née et a grandi. Oui aussi, elle est contente que la sortie de son dernier album, Burn Your Fire No Witness, bénéficie d’un large écho 46

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international. « Je tourne aussi beaucoup ces temps-ci pour en faire la promotion », précise-t-elle, comme pour justifier sa popularité croissante. Et puis enfin, elle consent à se montrer un peu bavarde s’agissant d’évoquer l’évolution de style entre le premier album, Half Way Home, teinté de folk, et le nouveau, sombre et beau comme un film de Tommy Lee Jones. « Je n’ai pas délibérément fait évoluer ma musique, explique-t-elle. C’est fonction de tes expériences de vie, des personnes que tu es amené à rencontrer… Le processus est assez naturel en fait. L’important est que je sois aujourd’hui entou-

rée d’un vrai groupe qui m’offre la possibilité de mieux habiller mes chansons. » Le résultat sent bon le Midwest américain. L’Amérique trash dont on oublie l’existence à force de mater le sourire Émail Diamant de Barack Obama à la télé. « Excitée » à l’idée de partir en tournée en Europe (« j’aime observer les différences de réaction entre le public là-bas et celui d’ici en Amérique »), Angel Olsen se fera cependant rare : La Route du Rock est le seul festival d’été français à son programme. Discrète, on nous avait dit. Régis Delanoë Le 14 août à La Route du Rock à St-Malo


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IL RÉPONDAIT AU NOM DE FALABELLA

XAVIER, MEMBRE DU GROUPE BRESTOIS IM TAKT, S’OFFRE CET ÉTÉ UNE ÉCHAPPÉE SOLITAIRE. « CHEVAL MINIATURE » « Pourquoi ce nom ? Pour la sonorité, le côté chantant du truc. En vrai, le Falabella est une race de cheval miniature, mais n’y cherche aucune signification ! Membre d’Im Takt, j’expérimente depuis pas mal de temps déjà la musique et la vidéo en solo. Des DJ set d’abord, puis ce vrai projet. » « TOUT DANS LA RYTHMIQUE » « Solo à la base, Falabella se mue en duo sur scène, avec l’aide de Bertrand à la batterie (lui aussi membre d’Im Takt). Les influences vont de l’électro minimaliste à l’anglaise à l’afrobeat. C’est tout dans la rythmique, avec une voix teintée pop en complément. » « BELLES ÉCHÉANCES » « Falabella fait partie des trois projets retenus par le Label Charrues cette année. Ça assure une belle date à Carhaix cet été, mais aussi un soutien continu toute l’année, avec un temps de résidence et une tournée des Smac de la région. Ce sont de belles échéances et c’est pour moi une vraie opportunité de faire mûrir le projet plus rapidement que prévu ! » Le 19 juillet aux Vieilles Charrues 47


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IN CLARENS WE TRUST LE DERNIER ARRIVÉ DE LA BANDE DES JUVENILES VIENT DE MONTER UN PROJET SOLO BAPTISÉ CLARENS. CHAPERONNÉ PAR YUKSEK, LE RENNAIS A SORTI SON PREMIER SINGLE « TRUST ». UN MORCEAU DÉJÀ REMARQUÉ OUTRE-MANCHE.

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ressé confirme : « J’écoute beaucoup de musique de là-bas : Drake, Kindness, Blood Orange… » La voix fait aussi penser à celle de Tunde Adebimpe, chanteur de TV on the Radio. En attendant d’aller se frotter au hit-parade outre-Atlantique, ce sont les Anglais les premiers à tomber en amour de Clarens. « Les retours sont assez dingues, aussi bien en radio que sur Internet. La renommée de Yuksek y est pour

beaucoup étant donné que j’arrive un peu de nulle part. » Après s’être occupé des Juveniles, le réputé DJ rémois a en effet décidé de filer un coup de pouce au bon Ousseynou, via son label Partyfine. « Le single Trust y est sorti le 12 mai, le clip va suivre. On prévoit quelques petits trucs d’ici la fin de l’année. Quant à ma capacité à gérer mes projets de front, ça va demander de l’organisation mais c’est mon problème, comme dirait l’autre ! »

Benoît Marquette

epuis trois ans, Juveniles est la tête de gondole incontestable de l’électro-pop rennaise. Aujourd’hui signature d’AZ, le groupe a démarré à trois, puis s’est retrouvé à deux au départ du bassiste Pierre, avant de réapparaître à quatre, depuis qu’Ousseynou Cissé a rejoint le chanteur JS, le batteur Thibault et le clavier Christophe. « Je suis arrivé en mars 2013, au départ pour quelques répétitions à la basse. Puis finalement j’ai intégré le line-up pour toute la tournée qui a suivi et jusque maintenant », raconte celui qui était alors étudiant en anglais à Rennes 2. C’est pendant cette tournée qu’on imagine tout aussi bien intense, fascinante, déstabilisante et galvanisante qu’il décide de se lancer dans un projet solo, nommé Clarens. « Les premières chansons évoquent toutes ces nouvelles sensations que procure cette nouvelle vie. » Du hall B de Villejean aux clubs de Pékin où il s’est produit ce printemps avec Juveniles, il y a effectivement un monde. Un premier single, baptisé Trust, lui sert actuellement de carte de visite. Et c’est peu dire qu’elle a de la gueule, cette carte : trois minutes de pop électronique classieuse, d’inspiration américaine. L’inté-


Midweek

« FAIRE LA FÊTE EN SEMAINE »

LE JOUR PRÉFÉRÉ DE MIDWEEK, L’ASSO ÉLECTRONIQUE RENNAISE ? LE MERCREDI. HÉ OUAIS. « Quand l’asso s’est lancée, l’idée était de créer un nouveau rendez-vous électro le mercredi soir sur Rennes. Le milieu de semaine était plutôt inexploité, il y avait un créneau à développer. » C’est ainsi que Greg, Antoine, Camille et Anthony, rejoints par Tristan, ont investi la discothèque Le Pym’s pour leur première soirée en avril 2012. Avec une devise clamée haut et fort : « N’attendons pas le week-end pour faire la fête. » Aujourd’hui, Midweek s’apprête à fêter sa 10e édition, toujours au Pym’s mais au sein de sa structure live, Le 1988 Live Club. L’occasion d’un bilan ? « Déjà, la satisfaction d’avoir réussi à réunir des gens passionnés par les musiques électroniques en plein milieu de semaine. Ce qui n’était pas forcément facile au début, estime Tristan. Ensuite, la fierté d’avoir programmé des artistes qu’on adore : Upwellings, Behzad & Amarou des soirées Concrete… » Cette 10e Midweek accueillera la tournée de promo d’Astropolis (Kenny Larkin et Oniris) qui, début juillet, leur rendra la pareille. « Nous sommes invités aux 20 ans du festival. On animera le Mix’n’boules. Être accueillis par une structure aussi respectée qu’Astro, c’est pour nous une reconnaissance. » Le 14 juin au 1988 Live Club à Rennes Le 5 juillet à Astropolis à Brest 49


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AGENDA

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RECOMMANDE

BLONDIE

FESTIVAL VISIONS

THE POGUES

LA BRITPOP

C’est un mythe pop qui débarque en Bretagne. Mené par l’iconique Debbie Harry, Blondie reste l’un des groupes phare des années 80. Et peut se vanter de tubes qui vieillissent très bien : Heart of Glass, Call Me, Atomic… Et venez pas nous parler de la version remixée par Bob Sinclar pour H&M, quelle horreur ce truc.

Organisé par le label Les Disques Anonymes, le festival Visions a fait forte impression l’an dernier pour son édition inaugurale, grâce à son chouette site pas loin de Morlaix et son ambiance à la cool. Côté prog’ 2014 : Bantam Lyons, Kap Bambino, Cheveu (photo), Delacave... Cet été, l’essai sera transformé façon Jonny Wilkinson.

Ce vieux soiffard édenté de Shane MacGowan est encore en vie, ce qui ne doit cesser d’étonner le monde de la médecine. Le gazier irlandais a peutêtre la danse de Saint-Guy et la voix éraillée mais lorsqu’il est accompagné des Pogues, son groupe de toujours, l’émotion est toujours là. Keep rockin’ !

Entre la fin du grunge et cette saloperie de mode du boys band, il y a eu le sacre de la britpop dans les nineties : un revival du rock à guitares, interprété par des branleurs rosbifs aux refrains imparables. Le style revient en force dans les festoches cet été : Babyshambles, Miles Kane, Franz Ferdinand, Arctic Monkeys (photo)… À Carhaix, Landerneau… Tout l’été

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À Fête du Bruit à Landerneau Le 9 août

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À Plouézoc’h Du 8 au 10 août

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À L’Armor à Sons à Bobital Le 9 août

JAMIE XX

ÉTONNANTS VOYAGEURS

DENGUE DENGUE DENGUE LE GOÛT DES AUTRES

L’artiste anglais au nom de hardeur s’est fait connaître comme machiniste en chef du groupe The XX, avant d’entamer en parallèle une carrière de DJ bien kiffante et respectée. Son premier album solo devrait d’ailleurs débouler cet été. Yihaaaaaa !

Comme d’hab’, le festival Étonnants Voyageurs va voir débouler dans la cité corsaire une flopée d’écrivains prêts pour la session marathon de cace-dédi, dont le poto Riad Sattouf (photo). À ne pas rater aussi les expos, dont une alléchante sur le thème de la BD d’histoire.

Si la cumbia électro s’est imposée en quelques années comme l’une des spécialités de la scène sud-américaine, ce duo péruvien a réussi à devenir l’un de ses meilleurs ambassadeurs. Après un passage au Sonar festival, il est programmé à Crozon pour une date unique dans l’Ouest.

Le 4 juillet à Astropolis Le 16 août à La Route du Rock

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À Saint-Malo Du 7 au 9 juin

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Au festival du Bout du Monde Le 2 août

Pourquoi sommes-nous dégoûtés à l’idée de manger des insectes alors que nous nous délectons d’huîtres ? Pour répondre à cette question, l’abbaye de Daoulas décortique notre rapport à la nourriture à travers la planète. Un voyage culinaire mais avant tout culturel. À l’abbaye de Daoulas À partir du 5 juillet




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