N°00 D(É)SCOR(P)S - Mai 2015 - Gratuit
DÉ(S)COR(P)S Bill Durgin / Lucy McRae / Matthew Stones / Berlinde De Bruyckere
CHAPTER 0
DÉ(S)CO
MAGAZINE À VALEUR CULTURELLE AJOUTÉE
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00
OR(P)S
Sommaire | 2
"NOUS
HABITONS NÔTRE CORPS BIEN AVANT DE LE PENSER"
ALBERT CAMUS
Matthew Stone photographie / volume
Le Britannique Matthew Stone, véritable éponge de culture artistique, s’inspire de tout, emprunte aux classiques, aux modernes et aux contemporains en passant par la culture de masse pour composer ses images. Son œuvre travaille les notions d’ordre et de chaos, son travail est tantôt disposé de manière classique, la « forme-
tableau ». Notion cher à l’historien de l’art Jean-François Chevrier pour définir une photographie qui tient le mur et l’espace. L’expression
a
été
mille
fois
reprise, souvent mal interprétée. On l’a liée au grand format, voir à des images qui singeraient la peinture. L’art de Matthew Stone
est
indéniablement
celui de la mise en scène. Ses photographies, assemblées sur bois
des
structures
parfois
deviennent
en
complexes des
objets,
acquérant une certaine tridimensionnalité.
Matthew Stone | 4
Mais plus encore, Matthew Stone excelle dans la démesure, lorsqu’il voit grand, trop grand pour nous. Ses “photos-sculptures”, posées dans un équilibre instable, traversant les murs, échappant au regard, écrasant le spectateur, nous dépassent. Ce n’est pas la taille qui compte mais la puissance qui se dégage dès lors de cette mise en espace. Son travail est très référencé, en effet il emprunte le nu et le drapé à l’antiquité, la composition pyramidale à la renaissance (Léonard De Vinci), les zones de réserve aux impressionnistes, emprunte
aux
contemporains
les
notions
de
cadrage et de hors champs au cinéma, le châssis apparent à Daniel Dezeuze (Stones quand à lui montre des charnières en tout cas un dispositif d’assemblage), les entrelacement de corps à la danse contemporaine ou encore la notion de pli à l’origami. Stone aime découper l’image, la recomposer. Comme à pu le faire Hans Bellmer au sujet du corps de ces poupées. Ses œuvres semblent émerger du sol ou encore sortir du mur comme des parasites, des objets fantomatiques qui viennent troubler l’ordre et la sérénité du lieux. Ses agrégats de cubes, proches du totem sont eux aussi parasités et deviennent étranges,
instables,
mouvants et me font
penser à une multitude de cellules agencées les unes contres les autres dans un apparent chaos, dans une volonté de reconstruction de l’œuvre par unité fragmentée.
5 | Matthew Stone
Matthew Stone | 6
Lucy McRae Ballerine / Architecte / Designer
cR ae
a pour double
formation, la danse
classique et l’architecture.
Elle se présente comme « Body
cy
M
Architect ». Comprenez, architecte du
corps. Son travail mélange ses deux univers pour créer un résultat
parfois provocant,
parfois grotesque, parfois décalé et étrange. Véritable Prométhée contemporaine, les déformations
Lu
qu’elle attribut au corps font la part belle à la notion de
silhouette et d’espace. La recherche esthétique de Lucy
suggère un nouveau « type » d’humain, les déformations faites de rafistolages low-tech qu’elle y ajoute participe a créer un être nouveau. Lucy est, entre autre, responsable de la ligne de concepts « emotion-sensitive » de Philips, il s’agit de bijoux qui, stimulés par le toucher, sont censés augmenter le potentiel d’excitation de l’individu qui les porte.
Lucy McRae & Bart Hess | 8
Lucy a également réalisé les pochettes d’albums de Body talk 1, 2 et 3 de Robyn et a également conçu la tenu que porte Robyn pour son clip
« indestructible ». Lucy Mc Rae collabore souvent avec un dénommé Bart Hess. Celui-ci conçoit l’évolution comme un bac à sable fétichiste et n’hésite pas à garnir ou à épurer les traits humains de masses de fourrures grotesques et de reluisantes écailles, prônant la communion des attributs de l’animal à ceux de l’homme tout en leur conférant parfois une troublante aura futuriste. Son concept de chaussures vivantes est particulièrement éloquent. Les deux designers construisent leurs démarches de manière décompléxée Parcourant la
mode,
et la
intuitive. génétique,
l’architecture,
la
performance (rapport à la danse et aux Arts Plastiques).
Bart Hess Designer 9 | Lucy McRae & Bart Hess
Tout en s’intérrogeant sur des considérations le
deux
esthétiques
compères
se
devaient d’engendrer les plus improbables des bâtards et en effet, c’est une nouvelle fois chez Philips qu’ils ont épanché leurs esprits et pensées Bubelle, une robe dynamique que l’on imaginerait
aisément
vêtue
par Björk et qui varierait de forme et de couleur au contact de a
la
peau.
également
Leur mis
fécondité
au
monde
différents projets, dont Grow On
You (ci-contre), Germination, une étrange combinaison exagérant la silhouette d’une personne obèse composées de « sacs » de graines de pelouse vouées à pousser liant humain et végétal le temps d’une «mue» et le projet Exploded.
Lucy McRae & Bart Hess | 10
Photographie
Bill Durgin
Bill Durgin utilise le corps comme médium et lui fait prendre la forme désirée. Ses photographies
sont
cliniques,
que
irréprochables,
ce soit pour leur composition ou le choix du point de vue adopté. Ses modèles sont des performeurs, des
danseurs
capables
de
se
contorsionner au point d’annihiler, grâce à la prise de vue, des parties de leur anatomie. La face, l’identité du modèle est comme supprimée, inexistante, son genre est parfois visible il s’agit très souvent de modèles féminins. Volontairement statique, le corps est nu, isolé dans un espace neutre et blanc. Dans sa série Figure Studies le corps est monolithique, ses courbes et ses contrecourbes
sont
exacerbées
ou
tendent
à disparaître. C’est seulement dans les séries Nudes & Still Lifes que le corps est habillé de perruques dans le but de créer une analogie plastique entre les deux éléments mis côte à côte.
Une sorte de
conversation lie le corps et les objets,
à
travers l’acquiescement, le mimétisme et la réponse en empruntant certains éléments de la question. Les vêtements, apparaissent avec la série Figures & Wares, accentuant la verticalité du corps ou au contraire emprisonnant le corps dans le vêtement pour n’en montrer seulement que des parties et n’y voir qu’un jeu de matières.
11 | Bill Durgin
D E BERLINDE B R U Y C K E R E
L’artiste belge Berlinde De Bruyckere.
De Bruyckere aime produire des séries
est une figure importante de la scène
d’oeuvres dans lesquelles elle traite
artistique flamande depuis la fin des
d’un thème aussi bien par la sculpture
années 80 et reçoit en 1990 le prix
que par le dessin.
de la Jeune Peinture belge. Elle est
travaux en cire de préférence dans
invitée à participer à de nombreuses
des vitrines anciennes et elle dessine
expositions individuelles et collectives
au verso des plans de villes historiques.
en Belgique et à l’étranger, parmi
Ainsi, les éléments anciens confèrent
lesquelles une exposition individuelle
l’aura du passé aux oeuvres créées
dans le pavillon italien de la Biennale
dans
de Venise en 2003 et une invitation à
contexte historique du thème traité.
la 4ème Biennale de Berlin. Berlinde De
Les oeuvres de Berlinde De Bruyckere
Bruyckere crée d’abord des sculptures
se caractérisent par leur puissance
en acier et en béton inspirées de
d’évocation. Que ce soit le corps
l’Arte Povera, avant de commencer
humain ou le cheval, animal de
au début des années 1990 à travailler
prédilection de l’artiste, une grande
avec des empilements de couvertures
expressivité émane toujours de son
en laine. Influencée par les images
travail. Silhouettes féminines debout
médiatiques du génocide au Rwanda
ensevelies sous des couvertures ou
(1994), les archives d’innombrables
sous une longue chevelure de crin,
photographies
morts
chevaux pendus dans des arbres,
vues au Musée des Flandres d’Ypres,
végétation emballée de rubans de
un musée dédié à la vie des simples
laine, les sculptures de Berlinde de
soldats pendant la Première Guerre
Bruyckere développent une réflexion
mondiale. C’est cette découverte qui la
sur le corps, considéré comme le
conduira à concevoir les sculptures en
point où convergent souffrance et
peau de cheval qui lui apporteront une
désir. Ces formes hybrides, humaines
notoriété internationale. A la même
ou animales naissent de la fusion et
époque, ses premières sculptures de
de la contorsion des corps. Berlinde
moulages en cire de fragments de
De Bruyckere utilise la cire mêlée des
corps humains ou de corps humains
pigments pour retrouver le grain de
entiers voient le jour.
la peau, reprend la robe des chevaux
de
chevaux
le
présent
Elle présente ses
et
renvoient
au
Berlinde De Bruyckere | 12
pour modeler de nouveaux corps, assemble de vieilles peluches à des couvertures élimées. Elle fait usage de tables, de tréteaux , de mobiliers d’occasions comme socles pour ses sculptures ; la présence de ces éléments domestiques associés à ces corps accroît le trouble du spectateur. Ces sculptures de Berlinde De Bruyckere fascinent par leur dualité ; la mort, la souffrance sont présentes dans chacune de ses oeuvres mais toujours associées à la douceur des matériaux, à une renaissance possible, à la fusion entre les êtres.
13 | Berlinde De Bruyckere
Berlinde De Bruyckère
Sculptueur
Berlinde De Bruyckere | 14
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CONTRIBUTEURS CONCEPTEUR, RÉDACTEUR EN CHEF ET DIRECTEUR ARTISTIQUE
DESIGNER GRAPHIQUE ET CHARGÉ DE PROGRAMMATION
boudin.jessy @outlook.com
CORRECTRICE sixtine.kilian@live.fr Retrouvez votre magazine en ligne www.collapsemag.blogspot.com Vous désirez faire partie de notre équipe, écrivez à redaction.collapsemag@gmail.com
BERLINDE DE BRUYCKÈRE / pas de site personnel BILL DURGIN / www.billdurgin.com BART HESS / www.barthess.nl LUCY MC RAE / www.lucymcrae.net MATTHEW STONE / www.matthewstone.com
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