Le Bonbon Nuit - 81

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Avril 2018 - n° 81 - www.lebonbon.fr

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FESTIVAL DU CINEMA BRESILIEN

FESTIVAL ONLINE DU CINEMA BRESILIEN FESTIVAL SCOPE L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération

03 AVRIL AU 02 MAI FESTIVALSCOPE.COM/BRESIL


EDITO

Le Bonbon Nuit → 04/2018

Paris, Ville Lumière… Et puis quoi encore ? La seule lueur que je perçois dans cette ville, c’est celle du lampadaire qui se reflète dans une petite flaque d’eau depuis mes 6  ans devant chez mes grands-parents, rue Quincampoix. Et croyez-moi, elle ne me donne pas envie d’enfiler mon nouveau maillot de bain, même si les beaux jours reviennent et que je peux enfin exhiber mon nouveau tatouage sur le mollet droit – une reproduction grandeur nature de la main de Mohammed Ali. La nuit parisienne intra-muros me fait de la peine. C’est un astre mort, un Sputnik à la larme amère, un Youri Gagarine en culottes courtes, un Neil Armstrong qui n’en finit plus de crever. Avant, la nuit parisienne brillait de toutes les couleurs et les jeunes excités du soir pouvaient crier à pleins poumons leur bonheur d’exister pour ne plus jamais se coucher. On pouvait foutre le bordel jusqu’au petit matin sans personne pour venir nous déranger, jouer à saute-mouton au-dessus des poubelles de nos ruelles, imaginer des sculptures folles avec les panneaux de signalisation et brouiller les pistes de la nuit en semant nos rêves le long des boulevards. Désormais, la nuit intra-muros semble gêner. Ceux qui partent à la recherche de libertés nouvelles s’exportent ailleurs, dans les lieux souterrains jouxtant nos grises banlieues, dans des entrepôts foutraques ou des hangars gigantesques, à l’intérieur de parkings aux portes dérobées ou dans des squats aux énergies puissantes car éphémères. Ce sera toujours mieux que d’avoir la tête trempée parce qu’un voisin vous a jeté un seau d’eau à la tronche, simplement parce que vous fumiez votre clope avec un peu trop d’entrain… Allez, bonne nuit Paris ! Victor Taranne

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OURS

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Jacques de la Chaise Victor Taranne République Studio Coralie Bariot Cécile Jaillard Lara Silber L’Impératrice par Prioreau Naïs Bessaih Alexandra Dumont Raoul & Georges Ivan Vronsky Pierig Leray Eva Bleibtreu Anna Shumanskaia Flavien Prioreau Antoine Viger William Baudouin Dulien Serriere Florian Yebga Fanny Lebizay Lionel Ponsin Benjamin Alazard 15, rue du Delta 75009 Paris 01 48 78 15 64 510 580 301 00040 2


Le Bonbon Nuit → 04/2018

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À la une

15 Musique

L’Impératrice, joyeusement libre Barbara Carlotti rêve éveillée

21 Littérature

Animal Boy, bienvenu le Paris des paumés

27 Festival

Le Festival du cinéma brésilien de Paris

29 Cinéma

Un mois, quatre films

31 Photo

Rencontre nocturne

33 Œuvre

The Absolut Company Creation

35 Fiction

Voyage au bout de la teuf

39 Gonzo

Buffet froid et resto de nuit

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HOTSPOTS

Avril 2018

L’ANGLETERRE SUR UN PLATEAU D’ARGENT Distrikt Paris nous fait traverser la Manche avec trois Anglais conviés dans un spot secret jusqu’au petit matin – et même plus loin. Préparez les pansements parce qu’on risque de se prendre deuxtrois manchettes très bien senties ! Distrikt Paris @ Secret Warehouse Vendredi 6 avril

CINQUIÈME BOUGIE INCANDESCENTE Une grosse rave avec des légendes du circuit techno et house, ça vous tente ? C’est en tout cas le plan suprême proposé par Electric Feels et Newtrack, qui souffle d’ailleurs sa cinquième bougie pour l’occasion ! Electric Feels x Newtrack 5th Anniversary @ Paris Event Center Samedi 14 avril

GIEGLING, MISSION DÉGLINGUE Mythe allemand, le label Giegling est l’exemple de la rareté et de la classe. Que le Rex Club l’accueille à nouveau dans le cadre de ses 30 ans relève donc du mariage des légendes. On ne raterait ça pour rien au monde. Giegling x Headon x Rex Club 30 Years @ Rex Club Samedi 21 avril

UNE NUIT DANS UN CLUB LIBERTIN On les avait lâchés avec un format minuitmidi des plus techniques, ils reviennent pour un format minuit-16h des plus épiques dans un ancien club libertin du 19e arrondissement. La Friend/Zone risque d’être définitivement rompue. Friend/Zone 003 @ Ouh Lala nuit Vendredi 27 avril

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Flavien Prioreau

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À LA UNE

Interview

L’Impératrice, joyeusement libre Texte

VICTOR TARANNE FLAVIEN PRIOREAU

Parker Day

Photos

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L’Impératrice

Martin Ellis

À LA UNE

Charles de Boisseguin mange une gracieuse salade Caesar lorsqu’il me parle de l’histoire de son groupe, créé il y a cinq ans et qui vient à peine de sortir son premier album, Matahari, une œuvre pop-jazz-funk-et-tout-le-reste qui a le goût et l’odeur des 70’s, de l’innocence retrouvée, des rayons de soleil et des croûtons à l’ail. Car entre L’Impératrice et Caesar, il n’y a qu’un pas. Rencontre. 8


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Mata Hari est une espionne et une courtisane du XXe siècle à la vie tout à fait romanesque. Pourquoi avoir donné à votre premier album le nom de cette femme hors du commun ? L’idée c’était de créer une analogie entre un personnage qu’on n’aime pas définir, L’Impératrice, et cette espionnecourtisane qui a marqué l’Histoire d’une manière assez peu concrète finalement, Mata Hari. En fait, il n’y a pas de fait historique tangible derrière ce personnage. C’est ça qui est drôle avec elle, car personne ne connaît la vérité sur cette femme. C’est toute l’audace de Mata Hari. Je me suis pris de fascination pour cette femme qui a tout construit sur un mythe d’ellemême. Ce n’était d’ailleurs même pas son vrai nom ! Elle s’est appelée comme ça parce qu’elle parlait malais et que Mata Hari, ça veut dire soleil dans cette langue. Elle a appris la javanaise, la danse de Gainsbourg, et s’est retrouvée à l’Olympia, elle a construit cette réputation de femme polyglotte, instruite et danseuse alors qu’en fait elle n’était rien du tout ! C’était juste une grosse mytho… Je trouve ça génial ! J’aime le côté romancé de Mata Hari et je me suis dit que l’analogie avec L’Impératrice était fantastique, car pour moi L’Impératrice a autant de visages que le groupe a de musiciens en son sein. Et même si, au début, c’est moi qui faisait tout, pour cet album on a vraiment bossé à six.

Est-ce que votre album est une fin en soi ou bien est-ce, comme toute la vie de Mata Hari, le moyen d’arriver à quelque chose d’autre ? Quelque part, l’album est une étape obligatoire. C’est suivre une logique et, à un moment, si tu veux bouffer en tant que musicien, tu es obligé de répondre à cette logique. S’il n’y a pas d’album, on ne parle pas de toi. Et même vis-à-vis du public en fait, puisque les gens attendent un format long. Je ne sais pas si sortir un album veut dire quelque chose aujourd’hui, mais je sais que les gens en ont besoin. Nous, ça nous permet de nous exprimer sur un format plus long et de faire le taf à six. Le premier qui a des idées est le bienvenu. Mais l’album n’est pas une fin en soi. Ça marque juste un tournant dans l’histoire d’un groupe. Depuis les cinq ans d’existence du groupe, L’Impératrice est passé d’un membre unique, toi, à six musiciens et a connu deux labels différents (Cracki Records puis microqlima, ndlr). Quel regard portes-tu sur tout ça ? J’ai un regard un peu paternel sur le groupe, je pense. Au-delà du fait d’avoir créé ce projet, j’ai essayé de fédérer du mieux possible des musiciens autour. Je ne parlais pas le langage musical et il y a une espèce d’évolution qui est très amusante. En fait, les excitations du début deviennent des normes à transgresser après. Plus ça va, plus

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À LA UNE

Et en tant que bon père de famille, tu donnes des fessées à ton groupe ? Non, pas du tout. (Rires) Je suis quelqu’un d’assez calme et j’évolue dans la gratitude de les avoir, car ils m’apprennent énormément. Est-ce que L’Impératrice est 100% française ? J’imagine qu’on lui a affilié un fantasme de voyage aussi. Le dernier EP qu’on a sorti, Odyssey, racontait l’histoire de Théodora, l’emblème féminin de l’Empire byzantin qui était une danseuse et courtisane complètement débauchée et libre. En fait, j’aime bien le concept de la femme libre. Mais pour revenir à ta question, il n’y a pas un truc francofrançais. Dans le style, évidemment, on s’inscrit dans la musique française avec Serge Gainsbourg, Véronique Sanson, Françoise Hardy ou encore Gérard Mancet, Nino Ferrer ou Cortex, qui moi m’ont énormément inspiré. Mais je pense que lorsqu’on fait un morceau de disco arrangé par Deodato, par exemple, ça va complètement transgresser ce truc franco-français. Et puis on s’est permis de mettre des morceaux en anglais dans

l’album. Peux-tu revenir sur cette idée de femme libre ? J’imagine que c’est quelque chose d’assez intime chez moi. Dans ma vie, je suis vraiment beaucoup tombé amoureux. J’ai l’impression de vivre les émotions de manière super intense et ça a toujours été un handicap chez moi, parce que j’ai toujours grandi et évolué en ressentant les choses à 100%. Les filles m’ont toujours inspiré, j’ai toujours voulu faire des trucs pour elles. Du coup, j’ai vraiment cultivé ce truc de l’émotion féminine. Quand je me suis mis à faire de la musique, c’est la première chose que j’ai ressenti. C’est pour ça que j’ai appelé ce groupe L’Impératrice. Alors je ne dis pas que j’ai une double sexualité, mais j’ai une espèce de fascination pour la femme, oui. En ce qui concerne la liberté, j’ai l’impression qu’il y a une espèce de cloître féminin, surtout en France, hyper présent dans le milieu hyper bourgeois et aristocratique dans lequel j’ai évolué, les Yvelines, SaintGermain-en-Laye, la vie de jardin, de la famille à Versailles et un nom à particule… Pour moi, le féminin est sacré, que ce soit chez un homme ou chez une femme. Est-ce qu’il n’y pas un risque, justement, à faire du féminin une chose sacrée ? Cela revient peutêtre à faire de la femme un objet de désir et de conquête… Je ne suis pas d’accord avec cette idée. Pour moi, ce qu’il y a de beau c’est la liberté qu’une femme peut avoir et sa faculté à pouvoir transgresser tous les

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Flavien Prioreau

la musique crée des besoin, d’où la nécessité de changer de label. Mais surtout la nécessité de rester en indé pour connaître le milieu musical. En grandissant, on a appris à se connaître et à adopter le même langage. Quant au groupe, il s’est complètement greffé sur ma direction artistique pour se l’approprier complètement. Ce groupe est à mi-chemin entre une cour d’école et une famille.

L’Impératrice


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codes moraux et toutes les règles pour essayer de s’échapper. « Paris, c'est comme une fille qu'on embrasse mais dont les souvenirs s'effacent. » En fait, vous étiez tout le temps bourrés en écrivant cet album ?

“Ce groupe est à mi-chemin entre une cour d’école et une famille”

(Rires) Non, c’est plutôt la métaphore de la ville où tout va à cent à l’heure. Une ville comme Paris te pousse à faire des choses que tu n’as pas envie de faire mais que tu fais par besoin d’appréciation, d’adaptation et d’intégration. C’est une ville très méchante qu’on a tendance à sublimer, mais qui reste très dure pour les provinciaux. Par exemple, Flore est arrivée du Sud de la France mais garde pour les Parisiens pure souche cette étiquette de provinciale. On ne va pas se mentir, le Parisien pur et dur, c’est une espèce de mec snobe qui se gargarise d’être né à Paris et de venir de tel arrondissement. À Paris, il y a un entre-soi qu’il n’y a pas ailleurs. C’est ce qu’on a essayé de dire avec ce morceau. Paris est une ville aussi crade que les autres, où il y a autant de pauvreté, c’est une ville bâtarde… Nous on répète au Point Éphémère, et à côté, il y a tous les migrants qui se sont tapé la grosse vague de froid… Il y a quelque chose d’affligeant dans la manière dont les gens interagissent entre eux. Il n’y a pas d’harmonie dans cette ville, même si c’est ma ville de cœur. Paris est une ville qui meurt ? Regarde le décret qui vient d’être pris et qui baisse le niveau sonore de la musique amplifiée… T’imagines la régression ? C’est fou quand même ! Paris

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À LA UNE

Hellena Burchard

L’Impératrice

L’Impératrice - Matahari Les 3 et 4 avril au Casino de Paris

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est une ville de vieux et de crevards, tout le monde ne pense qu’à sa gueule, qu’à son sommeil, qu’à son réveil, qu’à passer sa petite journée pour gagner son petit salaire tranquillement… Il n’y a aucune entraide. Alors que culturellement il se passe plein de trucs ! Paris est une ville fermée. Et même le Grand Paris, ça fait trente ans qu’on en parle ! On n’en verra jamais la couleur ! Votre pochette est obscure, mystérieuse et un peu angoissante… Comment l’avezvous choisie ? Tu vas être déçu… Au début, on était parti sur tout un concept de filles masquées car on voulait appeler l’album “Masques”. On a fait tout un shooting où il y avait une ambiance un peu intemporelle où on était autour d’un banquet où il y avait une fille avec un masque blanc assez étrange, quasimortuaire, un peu japonisant… Et en fait on est tombé sur ce que fait l’artiste Mat Maitland et on a vu l’un de ses artworks, qui n’était pas exactement pareil. On s’est dit que ça devait être la pochette parce que l’artwork, comme l’album, est nocturne, qu’il y a ce côté espion, on ne voit pas le visage de la femme… Il y a aussi ce côté Grace Jones dans l’album, donc on a demandé à ce gars si on pouvait se servir de son artwork pour faire la pochette. Parfois ça marche au coup de cœur, tout simplement. On a juste déplacé l’histoire de l’album pour qu’elle colle à cette pochette.

Du coup, dans quelle histoire s’inscrit-il musicalement, cet album ? Déjà, on n’a jamais voulu faire quelque chose de révolutionnaire. C’est une musique d’influence, c’est en quelque sorte une musique de musiciens qui ont une certaine éducation et qui ont juste besoin de rendre hommage à leur patrimoine et d’en faire la plus belle et sincère des choses possibles. Si on était dans une logique d’innovation ou de révolution, on n’irait pas puiser nos influences dans toute la musique des années 70, dans la scène disco de New York ou de Philadelphie, ni dans toute cette scène French Touch représentée notamment par Air… C’est important pour nous de montrer que tout ça n’a pas été fait par hasard. C’est une musique référencée et nourrie par tout un tas de groupes. L’Impératrice a l’air d’être vachement humble, en fait… Le groupe l’est ! Je pense qu’il y a beaucoup d’humilité dans ce qu’elle représente, et je sens qu’elle l’incarne avec élégance et noblesse. En tout cas, c’est ce qu’on essaie de faire. C’est vrai que c’est très pop et qu’il y a beaucoup de sucre, mais dans cet album il y a quelque chose d’un peu plus sérieux. On s’est foutu à poil. Je ne pense pas que L’Impératrice soit présomptueuse. Si je devais l’imaginer, je dirais qu’elle est très libre mais qu’elle s’en fiche un peu de ce qu’on pense d’elle. Comme Mata Hari, cet album est une créature de nuit un peu insaisissable.

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Interview

RÊVE ÉVEILLÉE 14

PHOTOS

ALEXANDRA DUMONT ÉLODIE DAGUIN

BARBARA CARLOTTI

TEXTE

MUSIQUE


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Un disque racé, intime, sur son rapport au rêve. Un terrain inconnu, source de nombreux questionnements. Que se passe-t-il la nuit quand le corps est abandonné à lui-même ? « J’ai trop de feu, trop de violence, trop d’énergie, trop de peur, trop de mouvements contraires, trop d’agitation et si je n’arrive pas à canaliser tout ça, je vais me consumer d’un coup, mon cœur va lâcher », chante-t-elle sur le morceau d’ouverture. Un aveu de faiblesse, de vulnérabilité, touchant. Elle tient le point de départ de ses nouvelles chansons qui capturent à merveille l’aspect mystérieux de ces scénarios que la nuit nous offre. 15


MUSIQUE

Des vagues ondulatoires, vibrantes, une sensation de vertige, une avalanche de couleurs. D’où viennent ces étranges visions psychédéliques ? D’une machine apparemment anodine ! Un tourne-disque de 78 tours minute surmonté d’un cylindre perforé qui renferme une ampoule. Quand la lumière tournoie sous nos paupières closes, elle nous donne à voir des images inédites. Barbara Carlotti s’approprie une création de la beat generation, la dream machine, conceptualisée en 61 par Brion Gysin et William S. Burroughs. L’artiste propose aux curieux de venir tester l’appareil lors de quelques séances collectives. L’expérience a des allures de rituel dont elle est le témoin lucide. Bols tibétains, encens, infusions de plantes… tout est savamment pensé pour nous offrir une séance de méditation au climax de nos émotions, un rêve commun à plusieurs. On se laisse guider au son de sa voix, chamanique et charnelle, à la merci de n’importe quel débordement sensitif, dans un état comparable à l’hypnose. « Ça guérit même la gueule de bois », fait-elle remarquer. Barbara Carlotti fait sienne l’ambition de Gysin et Burroughs : se reconnecter à son moi intérieur, et faire écran aux écrans. « Ils voulaient évacuer une forme de carcan idéologique de la société de masse qui était en train de naître à leur époque avec la télévision et la publicité », raconte-t-elle. À l’époque, c’est une double révolution. D’abord, parce qu’il s’agit de la première œuvre d’art que l’on regarde les yeux fermés. Ensuite, parce qu’elle se donne à voir de l’intérieur par le biais des visions. Carlotti propose une parenthèse enchantée à l’agitation quotidienne de nos sociétés, cette frénésie qui souvent nous

Barbara Carlotti

consume, qui nous impose d’avoir un avis sur tout. « Pour une fois, vous faites une expérience et on ne vous demande rien », dit-elle pour résumer sa démarche. On ne compte plus les adeptes du yoga ou du hygge, c’est symptomatique. « C’est en vogue aujourd’hui d’apprendre à être en phase avec soi-même. La dream machine permet ça mais suppose un état de lenteur, une disponibilité intérieure, une réceptivité particulière. » Il faut aimer s’abandonner, dériver, perdre pied, atteindre une forme de transe. Un moteur de création pour beaucoup. « La première fois, j’étais comme folle, nous dit-elle. Ça a généré une énergie très forte en moi, comme si ça réactivait une activité psychique, mentale et intellectuelle. » Sous ses paupières se dessinent des couleurs, du bleu et du rouge, qui se muent en jaune et violet, puis des faisceaux verts dans un défilement cosmique comparable à la scène de fin de 2001, L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick (1968). Elle reproduit régulièrement l’expérience chez elle, pour méditer ou contrer la fatigue, et déroule le fil conducteur de son nouvel album. Elle replonge dans ses souvenirs de rêves, des centaines, qu’elle compile depuis l’enfance dans des carnets intimes. Une matière qu’elle décide d’exploiter après un cauchemar récurrent qui se matérialise dans Vampyr. Elle raconte : « C’était un cauchemar extrêmement pesant qui m’a beaucoup tourmentée, jusqu’à ce que j’écrive cette chanson. Après ça, il a disparu ! C’était merveilleux de saisir le côté transcendantal, thérapeutique de la création. Je voulais appréhender au plus près ce continent inconnu qu’est la nuit, le rêve, l’inconscient, et qui nous traverse involontairement. »

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“Le rêve m’a offert une fantaisie supplémentaire avec ces scénarios inédits et farfelus” 17


MUSIQUE

TRIPS SANS DROGUE Elle multiplie les expériences du même ordre, se dévouant corps et âme à l’exploration de son activité onirique, avec une méthode éprouvée par l’auteur de sci-fi A. E. van Vogt. Enfermée pendant un mois dans une maison, elle s’extirpe

Barbara Carlotti

du sommeil paradoxal toutes les heures et demie, pour capturer sa part d’ombre. Le résultat est déroutant. Radio Mentale Sentimentale conte par ailleurs son expérience de l’Ayahuasca, cérémonie rituelle des Indiens d’Amazonie exportée en Suisse. Un breuvage de lianes, qu’on ingère collectivement aux carillons des instruments traditionnels, provoque un état de conscience modifié aux vertus curatives, utilisé pour traiter les addictions à la cocaïne. « J’ai vu des grandes bulles de cristal se former dans l’espace, décrit-elle.

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Je pouvais voir le son se dessiner devant moi. » Tout autour d’elle se matérialisent des “architectures célestes”, comme des petits bouts d’âmes invisibles qu’on trimballe : les champs magnétiques de Breton et Soupault. « L’idée de toucher l’impalpable traverse tout l’album », résume-t-elle. Elle retrouve en rêve sa grand-mère disparue et imagine une vie après la mort. Elle exorcise aussi ses questionnements sur la représentation des femmes dans Phénomène composite où elle compare le clitoris à un petit pénis. N’est-ce pas cette curiosité infinie qui la guide depuis ses débuts ? Tous ses projets, radiophoniques ou scéniques, rivalisent d’inventivité. Elle apparaît même sous les traits d’une héroïne de BD érotique, La Fille de Christophe Blain (2013), dont elle compose la bande-son. Il s’agit moins d’une mise en danger que d’une volonté de ne pas reproduire ce qu’elle a déjà fait. « Pour échapper au système qu’on met en œuvre quand on est auteur-compositeur, j’ai besoin de nourrir mon propos mais aussi la matière de mes compositions. » En 2015, elle anime les Laboratoires oniriques sur France Culture et sur les planches du 104, avec ses plus proches amis, Juliette Armanet, Christophe ou Katerine. Elle tient ses premières ébauches sur la question du rêve, terrain de jeu idéal qui laisse libre court à sa folie créative. « Le rêve m’a offert une fantaisie supplémentaire avec ces scénarios inédits et farfelus, explique-t-elle. C’est une manière de voir la réalité de façon augmentée. » Voir les étoiles tomber, son premier single, lui est apparu un matin en se réveillant, comme le fruit d’une “injonction inconsciente”, décrit par Paul Eluard

dans La Révolution surréaliste : nous sommes tous à la merci du rêve et nous nous devons de subir son pouvoir à l’état de veille. C’est un tyran terrible habillé de miroirs et d’éclairs. Elle ajoute : « À l’université, le mouvement surréaliste m’a marquée dans sa façon de considérer l’œuvre d’art comme quelque chose qui nous traverse, dont on n’est pas totalement maître. » C’est une pensée particulière, pas seulement un courant littéraire, qu’elle embrasse sans concession pour trouver une forme de liberté absolue dans le geste artistique. « J’ai crevé l’oreiller, j’ai dû rêver trop fort » chantait Bashung en 81. Elle n’est pas la première à réconcilier ses part diurne et nocturne, cartésienne et fantaisiste. Sa playlist de chansons de rêve en témoigne : « La chanson Où je vais la nuit de Katerine m’obsède, mais celle qui m’a mis la puce à l’oreille pour Magnétique, c’est un morceau de 19 minutes, extrait de l’album The Confessions Of Dr. Dream de Kevin Ayers, proche de Soft Machine. On entend la voix de Nico en reverse et des guitares enchevêtrées dans un mécanisme infini. Ce morceau est fou ! » Quand elle ne rêve pas, Barbara Carlotti trouve du réconfort dans la contemplation de la nature, en Corse, à Poggio-di-Venaco, où son père a grandi, dans le Tavignano ou la Restonica. « Mon corps réagit aux éléments, aux sons, aux odeurs. Il y a plein de moyens d’entrer en transe, mais dans nos sociétés occidentales très normées, on a coupé ces rapports très intuitifs à la Nature, à la Terre, aux vibrations du son. » C’est un langage qu’elle partage avec le public !

Magnétique, disponible depuis mars 2018. En concert à Paris aux Étoiles le 5 avril.

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LITTÉRATURE

Animal Boy

Animal Boy, bienvenu dans le Paris des paumés 20


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Texte

VICTOR TARANNE THOMAS GUICHARD

Photos

Avec Animal Boy, son tout nouveau bouquin, l’écrivain Karim Madani dresse le portrait d’un Paris sous grosse gueule de bois. La cause ? Les attentats du 11 novembre et la combine du héros, Alex, pour se faire passer pour un survivant. Avec ses personnages paumés mais attachants, sa critique acerbe de la gentrification rampante et les délires psycho-sociaux qui traversent tout son bouquin coup de poing, Karim Madani fout une longue claque au visage de la bien-pensance à grands renforts de punk cradingue, de drogues plutôt dures et de conscience claire des problèmes qui touchent la capitale. Rencontre. 21


LITTÉRATURE

Le personnage principal de ton livre, Alex, est un punk junky complètement paumé qui se fait passer pour un survivant des attentats du 11 novembre. Comment t’es venue l’idée de ce personnage ? Après les attentats, je lisais les récits des survivants dans la presse et un soir je me suis posé la question de savoir si ça pouvait être du pipeau. Un mois plus tard, ma sœur m’envoie le lien d’un article narrant l’histoire des premières personnes qui ont essayé d’escroquer le Fonds d’Indemnisation des Victimes d’Attentat et qui ont été mises en examen par la suite. De là, je commence à penser à une story : le personnage d’Alex était né. En fait, les faits divers sont une matière que je voulais aborder parce que je veux vraiment partir du réel. Un peu comme ce que fait William Burroughs avec sa technique littéraire du cut-up… D’ailleurs ton personnage a un lien avec Burroughs : la came. Ouais, c’est un putain de camé ! (Rires) Alors ce qui était aussi intéressant, c’est que je voulais faire ce livre dans Paname. C’est une ville qui m’a vu naître et grandir et que je n’ai quasiment jamais quittée. Et ce personnage est un mix de tout un tas de gens que j’ai croisés à Paname : beaucoup de losers, beaucoup de gens dans la musique ou le sport et qui, au final, se sont retrouvés en HP, notamment à

Animal Boy

Sainte-Anne. Va savoir pourquoi, il y avait pas mal de musicos. La plupart des mecs que j’ai croisés étaient accros au mauvais shit parisien puis aux cachetons. Et Alex, j’ai voulu en faire un toxico pur et dur, un héroïnomane. Dans ton bouquin, c’est d’ailleurs plus un Paris des Portes de Paris que tu dépeins… Complètement. Ce qui m’intéressait aussi, c’était de faire le récit d’un Parisien qui est né à Paris mais qui trouve de moins en moins sa place dans la ville. J’ai vu la gentrification à l’œuvre, j’ai connu le Paris populaire et j’ai vu comment ça a changé au début des années 2000. J’ai vu aussi comment cette ville implique d’être un winner pour survivre. Si tu n’en es pas un, cette ville a tendance à t’expulser et à te dégager. En même temps c’est paradoxal parce que c’est aussi une ville où dans les soirées, tu as plein de D.A. qui t’expliquent que c’est génial de gagner 2000 balles par mois et de vivre dans un placard qui t’en coûte 700, que Paris n’est plus une ville pour les losers et qu’elle est une manifestation physique du darwinisme. Les locaux comme Alex, le personnage principal, se sont fait baiser par la ville. Il y a un contraste remarquable entre l’idéologie DIY anti-étatique revendiquée par Alex et qui lui vient du punk et son souhait de vouloir tout de même profiter du système en se faisant indemniser. Pourquoi ?

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Je pense que seul, il ne peut pas se battre. Il est trop fainéant pour cela. C’est son dealer qui le traîne dans cette combine mais, contrairement à ce dernier, qui est vraiment un requin, Alex est un personnage vraiment attachant. Il y a une espèce de romantisme chez lui. Je crois que c’est un bon gars. Comme le dit Kendrick Lamar : « Good kid, mad city ». En revanche, le personnage du dealer est l’archétype du jeune voyou juif d’une cité du 15e arrondissement collée à Beaugrenelle… C’est une petite teigne. Ce personnage, c’est le dernier des Mohicans d’une époque où noirs, juifs et arabes cohabitaient dans la délinquance sans aucun problème. Aujourd’hui, il y a trop de questions identitaires qui parasitent tout.

Sans que tu le dises textuellement, ce récit est aussi celui d’une société qui n’arrive plus à prendre soin des déshérités. Oui. Mais, avant tout, je raconte une histoire. Effectivement, en filigrane, il y a beaucoup de choses qui trainent et je pense qu’un bon storytelling, c’est toujours une histoire inscrite dans un contexte. Dans ce bouquin, il y a un peu l’odeur de la fin d’un monde. Quand un fond d’indemnisation te parle d’un bras qui vaut 100 000 balles, qu’une jambe en vaut 200 000, il y a un petit côté effrayant. Entre ça et le lancement du dernier iPhone, il y a peut-être un problème. Comme le disait Freud, il y a un mal-être civilisationnel

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LITTÉRATURE

Animal Boy

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dans notre société. On arrive au bout de la came, au bout de la culture porno, au bout de la consommation… Qu’est-ce qu’il nous reste ? J’ai l’impression que c’est la fin d’une époque, clairement. Après les attentats, la France s’est réveillée avec une grosse gueule de bois en fait… De dingue. Et derrière tout ça, il y a cette figure de Paris embourgeoisée et gentrifiée qui est en réalité une ville complètement déboussolée. Les attentats ont juste accentué cet état de fait. La jeunesse elle aussi est déboussolée, d’ailleurs. En fait, ce livre est en quelque sorte une radioscopie profonde de Paris. Il se passe des choses encore dans cette ville ? Peut-être dans les villes autour, oui… Mais Paris, putain… C’est mort ! Quand il m’arrive de sortir, je me rends compte que tout le monde est dans la représentation. Les gens ne s’amusent pas comme à Montréal ou à New York… Dans ce bouquin, je montre aussi le côté hyper cynique de Paname. Il y a toujours du calcul et il n’y a pas la spontanéité que j’ai pu connaître. Après je ne suis pas dans la nostalgie parce que je pense que quelque chose peut sortir de tout ce chaos. Peutêtre qu’on va réussir à se reconnecter, finalement.

La musique traverse tout ton livre. Quel sens tu lui donnes ? Elle sert la narration. Par rapport aux Ramones (chaque chapitre porte le nom d'un titre de l’album Animal Boy, ndlr), j’ai fait en sorte que ce bouquin soit plus un album qu’un livre. C’est presque un disque qu’on lit, en fait. Chez les Ramones, j’aimais bien le côté “petites frappes blanches du Queens”. Chaque morceau des Ramones ramène à une histoire qui fait partie de l’histoire du groupe, et chaque morceau peut résumer une partie du bouquin, comme la drogue par exemple. C’est vraiment un fil conducteur, la musique. Pour clore cette interview, j’aimerais revenir sur un personnage important : l’extaulard, Biggy, qui revient hanter Alex et Lou. Est-ce que ce n’est pas une allégorie de la justice qui rattrape les deux héros ? Les Américains parlent justement de poetic justice à ce sujet : c’est quand les méchants sont punis au dernier moment alors que tu pensais qu’ils allaient échapper à leur sentence. Quand tu fais une connerie, ça te rattrape forcément. Karim Madani, Animal Boy, Le serpent à plumes, 190 pages

“Le récit d’un Parisien qui est né à Paris mais qui trouve de moins en moins sa place dans la ville.” 25


CINÉMA

Festival en ligne

Le Festival du cinéma brésilien de Paris se décline en ligne

Le Festival du cinéma brésilien de Paris revient pour sa vingtième édition du 3 au 10 avril au cinéma l’Arlequin, dans le 6e arrondissement. Au programme ? De la fiction, bien entendu, mais aussi des documentaires, du cinéma jeune

public et, vingtième bougie oblige, une rétrospective des plus grands succès du cinéma brésilien de ces dernières années. Des invités prestigieux, quelques concerts, des débats et une bonne dose d’alegria brasileira ! Mais surtout, cette année, il se déclinera aussi en ligne grâce à Festival Scope : du 3 avril au 2 mai, vous pourrez ainsi profiter depuis chez vous de l’excellente programmation du festival, le tout spécialement calibré pour les spécificités du net. Un film avec une caipirinha à la main, c’est toujours mieux, non ? Du coup, onze films seront disponibles au visionnage pendant un mois entier. Sept œuvres de fiction sélectionnées parce qu’elles représentent le meilleur

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du cinéma brésilien actuel et qu’elles font de ce grand pays l’une des figures importantes du 7e art. Peut-être succomberez-vous alors à Bingo (de Daniel Rezende) qui raconte l’histoire d’un présentateur de télé déguisé en clown trempant dans le milieu de la drogue et qui s’en sortira grâce à son fils et à la religion ; ou bien préférerezvous plutôt Casa grande (de Fellipe Barbosa), un film d’apprentissage sur un adolescent de 17 ans qui découvre toutes les contradictions rongeant la ville dans laquelle il est né. Pour une note plus musicale, ne ratez pas Elis (d’Hugo Prata) qui porte son regard sur l’une des chanteuses les plus iconiques du Brésil, Elis Regina, et qui peint le portrait de cette femme magnifique au caractère bien trempé. Ou bien, pour les âmes voyageuses, jetez un oeil à Gabriel et la montagne (de Fellipe Barbosa, encore une fois), racontant le parcours initiatique d’un étudiant parti visiter le monde. Ou bien revenez du côté de São Paulo pour Hôtel Cambridge (d’Eliane Caffé), un joli film sur l’histoire de réfugiés qui partagent leur toit avec des sans-abris menacés d’expulsion. Je voyage parce qu’il le faut, je reviens parce que je t’aime (de Marcelo Gomes et Karim Aïnouz) narre la vie d’un géologue envoyé en mission pendant un mois dans le sertao brésilien et qui en tire des enseignements

importants sur le sens de la vie et des populations qui résident au Brésil. La dernière fiction présentée, Sérieux, Maman ?! (de Pedro Vasconcelos), raconte avec humour les stratégies d’une fille pour échapper aux griffes de sa mère-poule. Concernant les quatre documentaires, attendez-vous à en savoir plus sur le Cinema Novo, la nouvelle vague brésilienne, avec le docu du même nom (de Eryk Rocha) ou sur Chico Buarque avec Chico, artiste brésilien (de Miguel Faria Jr.) que le réalisateur a filmé quotidiennement pendant une certaine durée. Dzi Croquettes (de Tatiana Issa et Raphael Alvarez) retrace l’histoire d’une troupe de théâtre révolutionnaire et subversive montée pendant la dictature militaire. Pour finir, Févriers (de Marcio Debellian) rend hommage à Maria Bethânia, chanteuse la plus populaire du pays qui a inspiré l’école de samba de Mangueira pour son défilé du carnaval 2016. Bref, tout un tas de joyaux à découvrir chez soi, confortablement installé ! Filmes bons ! Festival du cinéma brésilien de Paris, du 3 au 10 avril au Cinéma l’Arlequin (6e). Et sa version online à découvrir sur Festival Scope du 3 avril au 2 mai, directement sur internet : www.festivalscope.com

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CINÉMA

Par Pierig Leray

Avril Dans la brume De D. Roby Sortie le 4 avril Quel délire a bien pu toucher Daniel Roby pour décalquer en version française le The Mist de Stephen King mis en scène par Frank Darabont en 2008 ? Pour contourner le plagiat, il nous rajoute un enfant bulle à sauver au milieu de cette purée de pois et un Romain Duris toujours aussi exaspérant qui se bat comme il peut contre la beauté fade d’Olga Kurylenko. C’est grotesque, les effets visuels renvoient à la nostalgie bien tassée du dimanche après-midi et son téléfilm catastrophe sur M6 (genre La tempête du siècle ou SOS ouragan destructeur), et c’est sans compter sur une bonne vieille démagogie à message verdoyante. Un film littéralement… catastrophique.

L’île aux chiens De W. Anderson Sortie le 11 avril Wes Anderson a cette fâcheus e tendance à répéter sans cesse la même (exc ellente) compote qu’il cuisine depuis La Famille Tenenbaum. On osait esp érer une évolution, voire une révoluti on, mais il s’est empêtré dans sa géo métrie jaunissante pour finir dépassé et rempli de lourdeur (The Grand Budapes t Hotel). Sans renier sa popote hab ituelle, Wes Anderson joue ici un rôle moins poétique et plus politique, mat uré par les années qui passent et venant déli vrer un film d’animation authentique pour enfin sortir de son enfance nostalgique (Mr Fox). Il était temps.

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2018

Love Addict De F. Bellocq Sortie le 18 avril re la Quelle tristesse de voir se perd ce sublime Mélanie Bernier dans insultant nts, ramassis de clichés déprava ération gén e vell avec brio toute une nou le uer adiq d’ér t tentant durablemen Et . elle sexu tie ocra machisme et l’idi e vain sa s dan locq Bel l’inconscient une r isse aba t vien r, mou tentative d’hu ice ratr cast ch coa en brée céré femme es, d’un loser en costume trois pièc VRP Kev Adams et son allure de s les d’aspirateurs. L’une des comédie t dire c’es et , née plus navrantes de l’an (Les çais fran lem après le grand che e Mills). Tuches 3, La Ch’tite Famille, Mm

Nico, 1988 De S. Nicchiarelli Sortie le 18 avril Exercice casse-gueule que le biop ic, et le plus souvent lourdingue (Barbar a, Yves Saint Laurent…) ; mais avec Nic o 1988, Nicchiarelli dépeint avec intellige nce “le jour d’après”, la vie d’une femme après l’euphorie d’une jeunesse hors-ch amp. Nico est ridée, brune, éternell ement seule dans une bataille interne brillamment mise en scène. Il n’y a pas de regrets, il y a la normalité inst allée après l’anormal, le combat d’un e mère pour son fils, d’une artiste pou r sa musique, et des lendemains tris tes dans une cuisine en céramique. C’es t ainsi que se dégage à travers une per formance immense de Trine Dyrholm le sacré graal du cinéma moderne, la sinc érité d’une œuvre.

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REPORTAGE

Papillons de nuit

Rencontre nocturne NAÏS BESSAIH naisbessaih.com EVA BLEIBTREU

Photos Texte

Que font les Parisiens, une fois la nuit tombée ? La photographe Naïs Bessaih est allée s’immiscer dans le cocon de ceux qui n’éteignent pas la lumière une fois la nuit tombée. Juste pour y voir un peu plus clair.

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Le Bonbon Nuit → 03/2018

← Hélène

↑ Antoine

Se mettre au lit, ça on sait faire. Mais y rester n’est pas pour tous si mince affaire… Une fois les paupières closes, Hélène, somnambule depuis sa jeunesse, se livre à l’infinité des possibles oniriques : « Je ne garde que des bribes de souvenirs. Ces phases me sont racontées par mes proches, ce qui nous fait tous rire en général car parfois c’est vraiment burlesque. Ce sont des actions réalisées alors que je n’ai aucune conscience et aucun contrôle sur mon corps. J’agis en relation avec ce que je vis dans mes rêves/ cauchemars. Ça me fascine totalement de me dire que mes rêves dans ce cadre deviennent réalité et ont une incidence physique sur le moment. » À chaque nuit son aventure, et à chaque lendemain son enquête pour raccrocher les wagons inaiguillés du marchand de sable.

Pour les chantiers difficiles d’accès, Antoine, géomètre de 24 ans, attend que l’agitation diurne soit retombée pour réaliser ses expertises. « La nuit, c’est un travail beaucoup plus physique, le rythme est plus soutenu. Comme on dit sur place “Fini, parti !”. On met plus d’entrain dans les missions de nuit parce qu’on a juste envie de finir plus rapidement pour rentrer dormir. » Déblayées du public et de leur trafic, les routes deviennent vite un hors-temps étoilé offrant au géomètre et ses collègues une ambiance de bureau singulière : « La sensation du travail nocturne est grisante, accompagnée d’une impression d’être un peu seul au monde, c’est calme et tranquille, une tout autre perspective. »

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NIGHTLIFE

Texte

Monde de la nuit

CHRISTIAN ALVAREZ

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Scinder la nature et la technologie avec Physis, la nouvelle œuvre de The Absolut Company Creation Après avoir présenté O.X. de Romain Tardy, une installation connectant l’émotion suscitée par la musique aux sensations visuelles qui se dégagent de l’œuvre créée, The Absolut Company Creation dévoile son tout nouveau projet, Physis, conçu par le collectif Scale, qui convoque les paysages bruts et éthérés du Grand Nord, entre fjords, volcans et roches. Toujours dans sa volonté de nouer des liens indélébiles entre arts technologiques et musiques électroniques, deux mondes intimement connectés par l’univers des machines et du numérique, The Absolut Company Creation explore cette fois-ci le monde agité de la nature en lien avec les ondulations plus mécaniques des Dj’s. Qu’elles soient perçues verticalement ou horizontalement, les 26 plaques qui composent l’œuvre sont autant de manières de se saisir d’une nature organique et minérale qui, alliée aux formes gracieuses qui composent l’installation, font de Physis un témoignage d’une criante modernité.

Une réflexion sur la place de la nature dans un monde dominé par l’algorithme, la machine et le numérique, donc, mais aussi une analyse de la lumière et de ses jeux puisque les 10 000 LED qui composent l’œuvre sont complétées par un mapping enveloppant qui permet à cette œuvre moderne de livrer autant de niveaux d’interprétation qu’il y a de grains de sable répandus le long de nos côtes. Physis est une œuvre maîtresse qui se saisit d’un questionnement millénaire, la place de l’Homme dans la Nature, et qui y répond en lien avec un monde qui, a priori, en est exclu – la musique électronique. C’est là toute sa force. — Retrouvez Physis un peu partout en France : le 23 mars (Ubu, Rennes) ; le 8 avril (Chamonix Unlimited Festival) ; les 13 et 14 avril (Les Nuits de la Filature, Saint-Andrélez-Lille) ; les 20 et 21 avril (Panoramas Festival, Morlaix) ; le 9 mai (Nuits Sonores, Lyon)

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FICTION

Épisode 2

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VOYAGE AU BOUT DE LA TEUF Texte

IVAN VRONSKY

Photos

PROPAGANDA MOSCOW

Nos teufs semblent bien trop pâles dans les chroniques. Ou plutôt, elles sont plates. C’en est désespérant. Pourtant, votre humble serviteur ici présent, a ratissé le fond lubrique de cette satanée nuit parisienne. Pris de vertige face à la purulence et la satiété, la haine et la joie, voici le récit personnalisé des visages de ceux qui accueillent sans répit vos haleines chargées d’alcool et d’éther, vos mines fripées et vos airs religieux. Cessez de croire que cette nuit est ludique pour tout le monde. Il y en a, dans les bas-fonds écorchés de vos soirées, qui en bavent. Voici leurs portraits. 35


FICTION

Des crevards. Tous des putains de crevards. Ils arrivent la queue entre les pattes, essayent d’apercevoir le coin de ma liste, m’assènent le nom d’un média bien à chier, du style “Rédac’-Chef du Bonbon Nuit”. Puis, quand je leur dis que j’vois pas de quoi ils peuvent bien jacter, ils me demandent, dans un murmure, si j’peux les laisser passer… Des parasites. Les types sont toujours saouls, ils puent le bon gin, le vin nature et le parfum “Pour un homme” de Caron. Des New Balance et une chemise en jean en prime. Des belles raclures. Alors que moi, j’m’en tape. J’m’en tape qu’ils soient pigistes à Konbini, photographes professionnels pour Paris La Nuit, futur patron de Minute Buzz. Moi, si t’es pas sur la liste, tu fais la queue, tu payes ta place et tu casses pas les

Épisode 2

couilles. Pour toute la coke du monde, je ferais pas cette faveur. Surtout pas pour ces merdes. Être physio, c’est censé être archi-simple. J’suis pas vendeur de velux, j’m’en contrefiche de pour qui tu votes, t’auras beau foutre toute la peinture du monde sur ta gueule, tout ce que je veux, c’est des gens qui présentent bien, qui puent pas d’la gueule et surtout qui vont salement raquer. Le patron, il veut pas lâcher le morceau. Il le dit toujours en tripotant sa moustache et en se grattant la couille. Oui, il n’a qu’une couille, rien ne vous échappe. L’autre ? Il l’a perdue. Non, pas comme ses clés. Il avait voulu ouvrir sa gueule contre le mauvais client. Les Russes, c’est pas des rigolos. Celui-là, il rigolait trop violemment pour

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trouver ça drôle. Z’avaient chopé l’patron à l’aube, quand il fermait l’club. Bim, trois coups de canne de golf dans les testicules. Une couille éventrée. Il avait couiné jusqu’à l’hosto’. Là-bas… Brrr, j’en ai un sale frisson. Bref, il tripote tout le temps “la restante” comme il l’appelle. Il la caressait donc lorsqu’il dit : « M’en fous que ça soit du negro, du bicot ou du pédé, tant qu’y’a du flouze qui ruisselle de ses poches jusque dans nos caisses et qu’il fout pas la merde ni la honte : tu fais rentrer. » Moi, l’patron, j’l’aime bien. Au taf, personne peut l’encadrer. Son odeur d’eau de cologne et sa manie d’insulter tout l’monde avec un air dédaigneux, son tempérament et ses sautes d’humeur, il est parfois difficile de s’habituer à son énergie. J’entends les autres grincer des dents lorsqu’il met une tape sur les fesses d’une serveuse d’un air satisfait ou bien qu’il arrive ivre et qu’il nous montre sa petite couille épilée et toute rose. Ils l’insultent sans cesse dès qu’il s’absente, qu’il tourne la tête ou qu’il téléphone à sa femme. Dès que son oreille traîne, là, plus personne ne moufte. C’est fort. Tous à cracher dans la soupe, à nourrir une haine glaciale, puis, le bout de ses bottines passe la porte et là, c’est la déroute totale. Les yeux se baissent, les mains suent, les slips se mouillent.

J’en rigole à chaque fois. Des soumis, des petits gosses qui ferment bien leur gueule parce que Papa a la ceinture facile. Il est pas débile ce bougre, il le sait. Du coup, il m’a à la bonne. On s’enfile des poutres pour passer le temps, il regarde brutalement ses écrans de surveillance et je vois qu’il apprécie le décolleté de Jessica au bar. Elle n’a pas l’air de s’en rendre compte. Le patron en pince pour elle. Dans ces instants-là, j’existe même plus. Y’a plus que l’image saturée des gros lolos d’Jessica, l’patron et sa couille rose dans sa main gauche. Du coup, j’prends une dernière trace et j’me tire. Je sais ce qu’il se passe dans ces bureaux d’enfer, quand l’odeur de clope devient insupportable, que les yeux sont fiévreux sur l’écran et qu’une bouteille de Scotch est sur la table. Mais le physio, il a beau te péter les burnes pour que tu rentres, il sait fermer sa gueule. C’est la règle numéro 1. Quoi qu’tu vois, quoi qu’t’entendes, tu la boucles. Peu importe ce qu’il se passe. Peu importe ce qui brille ou ce qui brûle sous mes mirettes. Quand les videurs s’amusent et démontent un hippie qui voulait fumer son pétard à l’intérieur, quand l’patron se frotte le chèque de Jessica sur “la restante”, quand la barman tire 100 balles de la caisse, que le Dj crache dans les cheveux de l’ingé-son, que l’ingé-son baise la femme du patron tous les lundi matins “pour le principe”. Tout le monde le sait : le physio, il bosse avec ses yeux. — Suite au prochain numéro.

“Tout le monde le sait : le physio, il bosse avec ses yeux.” 37


GONZO

Buffet froid et resto de nuit

Buffet froid et resto de nuit

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Les entrecôtes toutes rassies ingurgitées à 4h37 du mat’ vous font jouir de bonheur ? Les croûtons à l’ail trempés dans une soupe aux oignons frits vous font grimper au septième ciel ? Alors ne lisez pas cet article d’investigation sur la tentative ratée de deux pseudojournalistes de s’installer à la table d’un fameux resto de nuit du 11e, un mercredi soir. Ce qu’ils y ont découvert n’est qu’une pâle copie de ce qui est proposé dans le pire resto de votre quartier. Bon appétit ! Texte

RAOUL & GEORGES

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GONZO

20:03 Décidément, cette nuit parisienne semble trop souvent tout engloutir dans une obscure matière faite de jurons, de cigarettes et de cernes grêlées de petits boutons blancs peu ragoûtants. Alors que je dois rejoindre ce très cher Raoul, attablé dans un restaurant de nuit et salivant à l’idée de s’enfourner sa tendre entrecôte hebdomadaire, je fais tout mon possible pour me détourner de cette pensée infâme. Ce bon vieux Raoul est devenu un tendre parasite. Un pote qui schlingue la chienlit par ses ourlets impeccables et son discours affable de petit connard d’opérette qui n’osera plus jamais enfoncer son talon dans la gorge de cette connasse de société. Il est temps de le remuer. J’ingurgite mon pastis d’un air sérieux, nous sommes au Penty, dernier rade buvable de ce bon marché Aligre, et tandis que Murielle me fait de nouveau une avance salace du haut de ses 70 piges, je lui envoie un baiser et m’en vais. Cette nuit, j’ai un taf de pigiste mal payé à accomplir et va falloir que j’assure. Parce qu’il ne faut plus trop compter sur Raoul pour broder des papiers intéressants. Depuis qu’il a commencé son taf de rédac’-chef à la noix, plus rien d’intéressant ne sort de sa tête cabossée par les articles bidons qu’il est forcé d’écrire pour faire du clic – à défaut de faire du fric. 22:17 Raoul a l’air profondément perdu dans une œillade de torero. Il s’est endormi comme le déchet qu’il est désormais et mon réveil – une chiquette des deux doigts sur le bout de sa nuque – lui fait l’effet d’un gazage en règle, ambiance jungle de Calais. Il me tire une gueule

Buffet froid et resto de nuit

très pathétique, une bonne grosse caquine au bout de son pif et des yeux rouges comme le printemps qui arrive. Pour faire passer la pilule et détourner son haleine infecte, j’ordonne au serveur qui harcelait sa collègue à mon arrivée de nous amener sa meilleure bouteille de Côtes du Rhône au plus vite. J’évite son juron de l’oreille gauche et souris à ce bon vieux Raoul qui a une tronche à faire marrer un régiment sous amphétamines. Quand il aura vu le prix de la bouteille, il va vite déchanter, le con. De toute manière, il m’a dit que c’est lui qui paierait la note si je lui mâchais le travail. Moi, ça me convient. Du moment que je suis payé en temps et en heures, je peux en faire plein, des papiers froissés. Alors quand il m’a proposé de passer toute la nuit du mercredi au jeudi dans ce restaurant de nuit, j’ai signé sans hésiter. 23:59 Ça y est. Tout le monde est bourré et il est à peine minuit. Quand je dis tout le monde, je ne parle pas seulement de Raoul et moi. Non, l’ensemble de ce restaurant pourrave avec sa fausse ambiance feutrée est complètement raide d’un mélange dégueulasse de saletés et de vin rouge. D’abord, un type en complet Burn Out nous fait part de ses considérations sur « cette pute de vie » dans un rire totalement dénué d’humour. Il est pâle et rougeaud, c’est étrange, on dirait un drapeau du Japon. Raoul, quant à lui, a l’air d’avoir trouvé la vraie et pure amitié. Il se démène, heureux d’avoir rencontré un type bien plus mal en point que lui. Les serveurs, eux, ont les sourcils froncés, mais ce n’est clairement pas à cause du soleil.

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“ La situation devient ubuesque, je vois la tronche de Raoul, j’ose demander l’addition mais les couteaux tirés des serveurs, les cris des cadres en burn-out me font me dire que la douloureuse pourra être envoyée directement aux bureaux du Bonbon.” Ils font des allers-retours constants aux toilettes pour sniffer des rails, histoire peut-être de soutenir symboliquement les cheminots, en grève depuis le début de la semaine. 02:43 Raoul ayant vomi sur notre table, le videur que tout le monde appelle “Calife” nous ordonne de déguerpir.

Mon pote, qui n’est pas en reste de son vin, décide de commencer une discussion bruyante et insensée avec ce chef de califat aux sourcils fillonistes. Il engage le débat en lui rentrant un splendide coup de tête. La situation devient ubuesque, je vois la tronche de Raoul, j’ose demander l’addition mais les couteaux tirés des serveurs, les regards effrayés des étudiants venus niquer dans les chiottes, les cris des cadres en burnout me font me dire que la douloureuse pourra être envoyée directement aux bureaux du Bonbon. 4h55 L’heure du bilan, tout seul sur un banc. Désargenté, pauvre et congelé. Faut bien le dire, ce restaurant de nuit était tout pourri. Raoul m’avait vendu une expérience hors du commun et m’avait juré qu’on vivrait quelque chose d’incroyable. Au final, c’est comme partout ailleurs dans Paris, ça s’est avéré cher et bruyant. Les serveurs avaient l’amabilité d’une vive des sables piquant les pieds et la seule distraction que j’ai pu trouver, c’était de mater un mauvais match de NBA pendant que Raoul tapait la discussion avec Calife – le videur aux lunettes dorées qui lui a cassé le nez. Le pire, c’est que Raoul s’est éclipsé chez lui juste après, sans dire un mot. « Ça fera 58,50€ », m’avait asséné le serveur avant que je ne parte pour écrire ce papier qui ne me permettra même pas de rembourser la note. De Raoul, aucune nouvelle. Qu’il aille au Diable. Le journalisme, c’est de la merde. Et les restaurants de nuit, c’est pire. En plus, la bavette était toute froide !

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MUSIQUE

Acid Arab

ACID

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Acid Arab prend toujours un malin plaisir à nous balader de territoire en territoire. Prenez leur premier album Musique De France, sorti sur Crammed Discs un peu plus tôt en 2016 : là-dedans, ça voyage sec. Tout comme eux, s’échappant des frontières françaises pour faire tourner leur live aux quatre coins du monde et revenant régulièrement à Paris pour nous charmer de mélodies orientales contextualisées et de rythmiques exotiques jamais gênantes. Acid Arab n’est pas la caution “minorité” de la musique électronique française et c’est tant mieux. Pour vous le prouver comme 2 + 2 = 4, rendez-vous le 14 avril au Paris Event Center pour la soirée hors-norme préparée par Electric Feels et Newtrack.

À l’apéro, vous buvez quoi ? Du bourbon. Un lieu coupe-gorge à Paris ? Le Charbon. L’after, c’est important ? C’est furibond. Une ville plus folle que Paris ? Le Gabon. La drogue, c’est mal ? C’est bon. Un artiste sous les radars ? Simon Le Bon. Après une teuf, c’est quoi la solution ? Le rebond. Un spot vraiment underground ? Etobon. Le sexe, c’est comment ? Sans bubons. Un truc vraiment chelou ? Un gibbon vagabond qui fait des bonds.

Flavien Prioreau

— Acid Arab jouera le 14 avril au Paris Event Center pour Electric Feels x Newtrack 5th Anniversary.

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Night • Anna Shumanskaia

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AGENDA

JEUDI 5 AVRIL 00h Rex Club 8€ Lddlm: Lena Willikens, Red Axes, Ivan Smagghe VENDREDI 6 AVRIL 22h Concrete 15€ Concrete x Latency: Sendai Sound System, NSI, ENA, Izabel 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits’ sur lebonbon.fr SAMEDI 7 AVRIL 23h Garage 5€ Garage Avec Space Dimension Controller Live & Guests 00h La Rotonde 6€ 33rpm 8% Party #42: Myako & Ed Isar all Night Long JEUDI 12 AVRIL 23h La Java 5€ Immersion #6: Nage Libre VENDREDI 13 AVRIL 20h Instants Chavirés 10€ Editions Gravats : Èlg - D.K. - Carval Tarek DJs 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits’ sur lebonbon.fr SAMEDI 14 AVRIL 22h La Canopée 10€ La Prochaine : Viaduc invite La Carte Son 22h30 Paris Event Center 26,50€

Electric Feels x Newtrack 5th Anniversary 00h Rex Club 15€ Insomnia Spéciale 30 ans : Praslesh, Marwan Sabb JEUDI 19 AVRIL 23h Garage 5€ Garage Avec Point G. Live, Rohmi et Shim:on VENDREDI 20 AVRIL 23h Djoon 8€ Into The Deep invite Mike Huckaby 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits’ sur lebonbon.fr SAMEDI 21 AVRIL 20h T7 38€ Innervisions Paris 22h La Machine du Moulin Rouge 16€ Wet For Me - 10th Anniversary 00h Rex Club 15€ Rex Club 30 Présents Giegling x Headon VENDREDI 27 AVRIL 23h45 Ouh Lala nuit 10€ Friend/Zone 003 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits’ sur lebonbon.fr SAMEDI 28 AVRIL 22h Concrete 15€ Concrete presents Samedimanche 00h Rex Club 12€ Lumière Noire 1st Year Anniversary

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N VEREW SION

Toute la fĂŞte dans ta poche

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