Septembre www.lebonbon.fr Septembre 2019 - nĂ° 97 - www.lebonbon.fr
DĂCIBELS PRODUCTIONS_491 422 978 RCS PARIS_L2-1072531 - L3-1072532 / ARTWORK BY SPH OZR
21 & 22 SEPTEMBRE JOCKEY DISQUE (HIPPODROME DâAUTEUIL)
JAKE SHEARS FROM SCISSOR SISTERS HYPHEN HYPHEN âą KIDDY SMILE DJ SET ARNAUD REBOTINI DJ SET âą CHLOĂ LIVE THE PIROUETTES âą SCRATCH MASSIVE DJ SET âą CORINE MALIK DJOUDI âą VOYOU âą ALICE ET MOI RAG âą BARBARA BUTCH âą CRAME HAPPY & FRIENDLY GARDEN PARTY ! PARISESTTETU.COM
SEPTEMBRE 2019
Je me sens comme un hĂ©tĂ©ro dans un club gay. Je vois dĂ©jĂ Ă ta gueule dĂ©confite que tu te demandes ce que je vais encore te raconter comme conneries, mais si tu ne comprends pas cette expression, pose-toi quelques secondes, je vais tâexpliquer. Lâautre fois, il devait ĂȘtre 4 heures du matâ, je me suis retrouvĂ© je ne sais plus comment dans un club situĂ© rue du Faubourg-du-Temple, le Gibus, tu connaisâ? Jâai Ă©tĂ© bien reçu, il nây avait que des mecs mais je mâen foutais, jâavais besoin dâĂ©couter de la musique et de brĂ»ler les calories qui me restaient dans le cornet, si tu vois ce que je veux dire. Je danse, le son est bon. Je vois que tout le monde est torse-poil, je fais de mĂȘme, il fait putain de chaud. Je me sens Ă lâaise, lĂ , entourĂ© dâours Ă casquettes, je me fonds dans le dĂ©cor, ambiance vestiaire de sport, la Molly en plus. Et puis dans mon marathon, je contemple un mec Ă cĂŽtĂ© de moi sacrĂ©ment bien gaulĂ©. Le salaud, je me dis que câest quand mĂȘme beau un corps dâhomme. Limite troublĂ©, jâarrĂȘte pas de le mater. Et puis une voix nasillarde me titille la tĂȘte et me ditâ: «âAttends mon petit, tu serais pas en train de virer gros pĂ©dĂ© lĂ â?â». Ferme-la toi, je suis un hĂ©tĂ©ro moi, un vrai de vrai. Pour preuve connard, je rĂ©tro-pĂ©dale, je change de stratĂ©gie, je ne vais plus bloquer mon regard quâau niveau des visages. VoilĂ , je suis au top lĂ , je reprends le contrĂŽle de la situation. Et puis merde, la voix nasillarde rĂ©-apparaĂźtâ: «âMais si tu fais ça, câest que tu dois refouler un truc, nonâ?â». Tâas pas tort. Ouais, je vais me re-forcer Ă mater les corps pour me prouver que je suis pas gay. Non mais câest complĂštement con ce que je fais, je suis en pleine contradiction. Seul un bon shot de poppers me montrera la voie. La suite nâappartient quâĂ moi, mais il me semble bien que jâai testĂ© lâhĂ©tĂ©ro-curiositĂ©. Je ne sais plus qui mâavait dit que les hĂ©tĂ©ros se bĂątissent souvent en rĂ©action Ă lâhomosexualitĂ©. Possiblement vĂ©ridique. Ămancipe-toi de ça, et il se peut que tu deviennes un esprit libre.
N°97
MPK
CERRONE, LâHOMME QUI SE JOUE DU TEMPS 15. VISITE NOCTURNE HOUSE OF MODA 21. PORTRAIT THOMAS SMITH, LUMIĂRES DANS LâOMBRE 23. CINĂMA GASPARD ULLIEL, LâAMOUR AU CARRĂ 29. CINĂMA CLAIR OBSCUR, LâĂDIT O CINĂMA 31. THĂĂTRE GHOST, RET OUR VIVANT 33. STYLE VOYAGE Ă VILNIUS 39. MUSIQUE FĂTE DE LâHUMA 41. INTERVIEW FRĂDĂRIC HOCQUARD CONFISEUR JACQUES DE LA CHAISE RĂDACTEUR EN CHEF LUCAS JAVELLE DESIGN RĂPUBLIQUE STUDIO GRAPHISTES CLĂMENT TREMBLOT, MAR GOT ROBERT COUVERTURE CERRONE PAR THIERRY LE GOUES RĂDACTION INĂS AGBLO, MANON MERRIEN-JOLY, PIERIG LERAY, SARAH SIREL, JACQUES SIMONIAN, MPK SR LOUIS HAEFFNER RĂGIE CULTURE FANNY LEBIZAY, ANT OINE KODIO RĂGIE PUB LIONEL PONSIN LE BONBON 15, RUE DU DELTA, 75009 PARIS SIRET 510 580 301 00040
SOMMAIRE
7. MUSIQUE
IMPRIMĂ EN FRANCE
DI R E CT I ON
SĂ©bastien
Maud
PAS CA L
Guillaume
L E GRO S
Anne-Sophie
Astrid
Alexandre
CASTRO LE GUĂNĂDAL CLĂRICE GERMANAZ ROOS JĂRĂME
Une comédie de
DESIGN GRAPHIQUE EFIL WWW.EFIL.FR / PHOTO © BERNARD RICHEBĂ // THĂĂTRE FONTAINE. LICENCES N° 1-1056789 âą 2-1056790 âą 3-1056772
SĂBASTIEN CASTRO
LOCATION 01 48 74 74 40
theatrefontaine.com
Mise en scĂšne
JOSĂ PAUL
Assistant mise en scĂšne GUILLAUME RUBEAUD DĂ©cors JEAN-MICHEL ADAM Costumes JULIETTE CHANAUD LumiĂšres LAURENT BĂAL Son VIRGILE HILAIRE
SOIRĂE LĂGENDAIRE
Un lieu de lĂ©gende, un DJ et producteur de lĂ©gende⊠Ăa fait une soirĂ©e digne de ce nom. Directement venu de DĂ©troit, DJ Stingray, lâhomme cagoulĂ©, continue de partager son expĂ©rience des annĂ©es fondatrices de la techno, une pĂ©riode pendant laquelle il faisait partie de Drexciya. Avec la Danoise Solid Blake et la rĂ©sidente de Rinse France Elise, le Rex Club va vibrer aux rythmes effrĂ©nĂ©s dâĂ©lectro et dâacid. De lâexcellence digne dâune Club Trax qui sort de son petit confort habituel pour conquĂ©rir lâun des plus grands clubs de France et de Navarre. Club Traxâ: DJ Stingray, Solid Blake, Elise @ Rex Club 13 septembre
UN FESTIVAL DE VALEURS
Petit nouveau du coin, Paris Est TĂȘtu nâa pas de pertinent que le nom. EngagĂ© pour la tolĂ©rance, la diversitĂ© et le combat des cultures alternatives, sa premiĂšre annĂ©e nây va pas avec le dos de la cuillĂšre : ChloĂ©, Scratch Massive, Crame, Kiddy Smile, Arnaud Rebotini, Rag⊠La scĂšne locale est bien prĂ©sente et suffisante pour bien nous Ă©clater le temps dâun week-end Ă deux pas du centre de la ville (pour les gros flemmards de la rentrĂ©e). Avec un beau soleil en prime (si possible). Paris Est TĂȘtu Festival @ Hippodrome dâAuteuil 21-22 septembre
BON TIMING
AU CĆUR DE LA TECHNOLOGIE
Si aujourdâhui on se dĂ©glingue sur de la techno dans des clubs et entrepĂŽts qui sentent la sueur et le bonheur, câest grĂące aux machines. Parce que câest quand mĂȘme une histoire de bip-bip sur des synthĂ©s et autres modulaires. Du coup, quand la Ferme du Buisson fait une soirĂ©e spĂ©ciale et invite des pionniers et gĂ©nies de la machine comme Juan Atkins, Onur Ăzer, Vril ou Antigone (rien que çaâŠ), on est prĂȘts Ă aller prendre un coup dâhistoire de la musique dans la gueule. Et des grosses basses. Le Champ des Machines @ La Ferme du Buisson 19 octobre
MUSIQUE
CERRONE, LĂą€™HOMME QUI SE JOUE DU TEMPS T P
JACQUES SIMONIAN ANNA SHUMANSKAIA
8/9 MUSIQUE
CERRONE
Sâentretenir avec un artiste qui a traversĂ© les Ăąges nâest jamais une mince affaire. Si certains vont jusquâĂ enterrer ces idoles avant lâheure en dĂ©gainant leur plus bel hommage, prĂ©cipitĂ©, en oubliant souvent que leur actualitĂ© ne sâĂ©crit pas quâau passĂ©, de notre cĂŽtĂ©, nous avons choisi la carte de lâhistoire en sĂ©lectionnant des moments forts de la vie de Marc Cerrone.
Entre des folies dâantan au goĂ»t prononcĂ© dâĂtats-Unis, un prĂ©sent passionnĂ© rythmĂ© par des platines longtemps boudĂ©es, et un futur aussi prometteur que novateur, voici ce que nous nous sommes dit.
LE BONBONâ: Commençons par votre
L.B. Cette aventure nâa pas durĂ© longtemps.
CERRONEâ: Ah nonâ! Câest moi qui me suis
C.
passion : la batterie. Câest cet instrument qui vous a choisi dans ce magasin du boulevard Beaumarchaisâ?
jetĂ© dessus. Je me souviens trĂšs bien, elle Ă©tait vert pailletĂ© comme on faisait Ă lâĂ©poque. Jâen suis immĂ©diatement tombĂ© amoureux. Quand je me suis assis et que jâai commencĂ© Ă la taper, le vendeur est venu voir ma mĂšreâ: «âvotre fils, il sait dĂ©jĂ jouerâ!â». Depuis quâelle mâavait dit quâelle me ferait ce cadeau, je nâavais cessĂ© dâĂ©couter, sans mâen rendre compte, tous les batteurs. DĂšs quâil y avait de la musique, je nâentendais mĂȘme plus le chanteur. AprĂšs, jâai commencĂ© Ă motiver des copains pour que chacun chope un instrument, et jâai montĂ© mon premier groupe Ă 13 ans. Comme je nâĂ©tais pas trop mauvais, jâai eu un peu la cote en banlieue parisienne et jâai commencĂ© Ă frĂ©quenter des artistes de Paris. Vers lâĂąge de 15 ans, jâai fait quelques sĂ©ances avec des gens qui avaient entendu parler de moi, jusquâĂ travailler avec Michel Colombier pour une pub DIM.
L.B. JusquâĂ arriver au Club Med. C.
Un jour mon pĂšre mâa ditâ: «âtu ne peux pas faire ce mĂ©tier, tu dois en apprendre unâ». Ăa ne mâa pas plu, alors jâai fuguĂ©. Quand on se tire, on essaye de trouver des copines pour dormirâ! Au bout dâun moment passĂ© chez une, elle est partie au Club Med et je lâai accompagnĂ©e. LĂ -bas, je me suis retrouvĂ© dans une soirĂ©e organisĂ©e par Albert Trigano. Je faisais la gueule, alors il est venu me voir. Je me suis prĂ©sentĂ© et lui ai demandĂ© pourquoi aucun groupe ne jouait dans ses villages. Ăa lui a plu. Il mâa engagĂ© comme DA.
Vous avez vite eu lâenvie de monter votre groupe, Kongas. Surtout, vous avez rapidement fait une rencontre dĂ©cisive.
Pour Kongas, jâai choisi les meilleurs musiciens que jâavais fait venir dans les villages. Avant de les rejoindre en septembre, je suis parti faire un tour du cĂŽtĂ© de Saint-Tropez, avec un plateau de 4 roulettes sur lequel je foutais ma batterie. Fallait oserâ! En dĂ©but de soirĂ©e je faisais des solos sur le port, et elle, passait avec un chapeau rĂ©cupĂ©rer les sous. On gagnait trĂšs bien notre vie. Eddie Barclay en entend parler et lui glisse un petit papier. Vous connaissez la suiteâ: dĂ©but novembre, on sortait notre premier single. Cela a durĂ© un temps et malgrĂ© quelques succĂšs commerciaux â beaucoup trop pop Ă mon goĂ»t â, je me suis lassĂ© puis le groupe sâest arrĂȘtĂ©.
L.B. Vous nâavez pas lĂąchĂ© la musique. Nous
sommes en 1976 et vous ouvrez votre magasin de disques. Câest Ă ce moment-lĂ que vous avez compris lâimpact du discoâ?
C.
Ma copine de lâĂ©poque Ă©tait enceinte, jâavais 20 ans et plus de temps Ă perdre, un mĂŽme arrivait. Je devais faire quelque chose alors jâai ouvert Import Music, ça a Ă©tĂ© un carton. Mais plus que le disco, jâai plutĂŽt senti quâil y avait un mouvement des discothĂšques. On ne pouvait plus Ă©couter âChampsĂlysĂ©esâ de Joe Dassin dans les clubs quand il y avait des mastodontes de musique internationaux comme Barry White. Ă cette Ă©poque, dans les night-clubs, on dansait du rythmĂ© puis du slow. Les DJâs nâarrĂȘtaient pas de jacter. CâĂ©tait une Ă©mission de radioâ! Jâavais tellement roulĂ© ma bosse avec Kongas dans les clubs du monde entier que jâĂ©tais au courant
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â
On commençait Ă me dire que ça marchait pour moi de lâautre cĂŽtĂ© de lâAtlantique. Je pensais quâon se foutait de ma gueule, mais pas du tout. Jâai foncĂ© dans le premier avion et jâai signĂ© un contrat chez Atlantic Recordsâ
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de ce qui se faisait. Alors jâai voulu faire mon album pour en vendre quelques-uns dans mon magasin. Je nâai fait aucune concession.
L.B. Vous parlez de Love in C Minor, que
L.B. LâannĂ©e suivante, 1977, vous sortez
CERRONE
C.
MUSIQUE
tout. Alors jâai foncĂ© dans le premier avion et jâai signĂ© un contrat chez Atlantic Records (Jackson Five, Quincy Jones, Ray CharlesâŠ).
vous avez enregistrĂ© Ă Londres. CâĂ©tait un disque trĂšs spĂ©cial pour lâĂ©poque. Avec sa longueur, sa pochette, et cette batterie omniprĂ©sente.
Oui, au studio Trident (Franck Zappa, Rolling Stones, Lou Reed⊠ndlr), comme Elton John me lâavait conseillĂ©. Je pensais que tout le monde savait que jâĂ©tais batteur, Kongas nâĂ©tait pas anonyme. Cette composition me paraissait logique, mais on mâa ditâ: «âce pied en avant, ce nâest pas possibleâ! Comment fait-on pour passer çaâ?â». Eddie Barclay, lui, Ă©tait fou furieux. Je repars Ă Londres et fais fabriquer 5â000 albums. Je file 300 copies Ă un collĂšgue. Il me rappelle 3 jours aprĂšs en me disant quâun de ses magasiniers, un peu imbĂ©cile, sâest plantĂ© de carton, et au lieu de renvoyer les disques de Barry White au gars de New York, a envoyĂ© les miensâ! Quand lâAmĂ©ricain est tombĂ© dessus, avec cette fille nue, il lâa Ă©coutĂ©. Coup de pot, le mec Ă©tait en fait un DJ. Il a commencĂ© Ă le jouer dans des clubs. De lĂ , Frankie Crocker entend mon album et cherche absolument Ă me joindre. En plus des annonces radio, il rĂ©ussit Ă convaincre Neil Bogart (producteur et fondateur de Casablanca Records, ndlr) de faire faire une cover de mon morceau par Donna Summer. Il sort cette reprise sur son label et le titre entre dans le top 10 amĂ©ricain. En France, on commençait Ă me dire que ça marchait pour moi de lâautre cĂŽtĂ© de lâAtlantique. Je pensais quâon se foutait de ma gueule, mais pas du
C.
votre 2e album, Cerroneâs paradise, mais surtout âSupernatureâ, morceau inspirĂ© par LâĂle du Docteur Moreau de H.G. Wells.
Le premier album a tellement marchĂ©, quâon se dit que câest normal que le deuxiĂšme aussi. Jâai toujours pensĂ© que ça allait durer 6 mois, 1 an, et que jâallais passer Ă autre chose. Jâavais envie de faire un truc vraiment diffĂ©rent, alors jâai fait âSupernatureâ. Il y avait des voix androgynes, un texte Ă©colo, des sonoritĂ©s inconnues pour lâĂ©poque. RĂ©sultatâ: jâai reçu 5 Grammy Awards.
L.B. Quâest-ce que ces disques ont changĂ© Ă votre vieâ?
C.
Ils ont fait que jâai pu vivre ma vie entiĂšre de ma passion. Et je suis certain que si ce nâĂ©tait pas parti des USA, ça nâaurait pas Ă©tĂ© aussi important. Les AmĂ©ricains mâont amenĂ© mon identitĂ©â: disco, pas disco, Cerrone câest Cerrone, jâai mon son, ma couleur, je suis un artiste Ă part entiĂšre. Alors que le disco battait son plein et que tout le monde sây mettait, les labels ont voulu croquer. Ils ont pris leurs idoles locales, en France câĂ©taient Dalida ou autres, et ils leur ont fait faire des titres arrangĂ©s Ă la sauce disco. Pour eux cette mouvance câĂ©tait un pied devant et des violonsâ! Sauf que pour les AmĂ©ricains, ça ne suffit pas. Câest un Ă©tat dâesprit. La preuve, câest que les DJâs, de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration, ne se sont pas trompĂ©s.
L.B. Est-ce quâaprĂšs Cerrone by Bob Sinclar et Cerrone by Jamie Lewis vous Ă©tiez rassurĂ© par les DJâsâ?
C.
Ăvidemment que ce sont des gens influents qui mâont portĂ©, sinon je ne serais pas en train de vous parler. Quand Emmanuel de Buretel essayait de me convaincre de mixer, jâai appelĂ© 3 personnesâ: mon vieil ami David Guetta, Calvin Harris et Bob Sinclar. Je leur ai demandĂ© comment ils rĂ©agiraient si on leur disait que jâallais passer derriĂšre des platines pour jouer mon rĂ©pertoire. Tous mâont rĂ©ponduâ: «âMarc, si toi, tu ne le fais pas⊠Tâes un maladeâ!â».
L.B. MĂȘme si vous avez publiĂ© Red Lips
en 2016, câest en 2018 que tout a recommencĂ© trĂšs fort. Dâabord avec le film Climax de Gaspard NoĂ©, oĂč lâon entend pour la premiĂšre fois âSupernatureâ en version instrumentale.
C.
Quand jâai Ă©coutĂ© cette version, je me suis dit que ce nâĂ©tait pas chiant du toutâ! Ăa mâa intĂ©ressĂ© et jâai commencĂ© Ă faire des inters dans mes sets de plus en plus longs. Tout ça dans un esprit trĂšs Ă©lectronique, câestĂ -dire ma pĂ©riode Brigade mondaine (1978). Ma maison de disques mâa poussĂ© Ă dĂ©veloppĂ© ça et un premier titre est apparu, âThe Impactâ, puis un album. Je ne cherchais vraiment pas Ă en faire un. Jâai commencĂ© Ă jouer les morceaux dans mes sets et jâai vu la mĂȘme rĂ©action que quand je faisais mon truc avec le pied, Ă lâĂ©poque de Kongas. Ăa mâa motivĂ© et pendant 6 mois jâai pondu des titres. Le rĂ©sultat, câest mon premier album instrumental.
L.B. Le premier single, âThe Impactâ, sortira
Ă la rentrĂ©e. Ă la diffĂ©rence de ce que vous avez pu faire avant, je trouve quâil y a moins ce cĂŽtĂ© joyeux et chaud.
C.
Je nâai fait que dĂ©marrer ce que jâappelle des âentreâ, des titres de mon catalogue que je joue sans arrĂȘt. Jâai juste fait des choses pour les terminer, les emmener lĂ oĂč je le souhaitais. Jâinsisteâ: je nâavais pas prĂ©vu de faire un disque. Il sâest fait comme on fait des albums quand on est jeunotâ! Simplement en voulant crĂ©er de la musique. DĂ©jĂ dâavoir le cadeau Ă mon Ăąge de mâĂ©clater comme je mâĂ©clateâ! Jâai Ă©tĂ© voir Moroder quand il est venu Ă Paris rĂ©cemmentâ: 79 ansâ! Ăa mâa donnĂ© un espoirâ! Câest fou, on vit dans une pĂ©riode⊠Profitons-en⊠Alors jâen profiteâ!
CERRONE SERA DE RETOUR TRĂS BIENTĂTâŠ
LES ADIEUX DâUNE DIVA
T P
LUCAS JAVELLE SĂBASTIEN DOLIDON
VISITE NOCTURNE
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HOUSE OF MODA
Il y a des soirées
quâon prĂ©voit longtemps Ă lâavance. On se chauffe, on se dit que celle-lĂ , câest la bonne. On sait Ă quoi sâattendre, on imagine mal ĂȘtre déçu. Les petits dĂ©tails qui font parfois dâune sortie en club une vĂ©ritable corvĂ©e, on les oublie. Neuf balles la pinte ? Pas de problĂšme ! Bosser Ă 10h le lendemain matin ou dĂ©mĂ©nager ? On sâen fout ! On veut vivre, merde. Parce que la soirĂ©e vaut tous les efforts du monde. Parce que câest la derniĂšre. Parce que, aprĂšs huit ans Ă faire rugir la force pure de la fĂȘte libre, House of Moda a toujours eu ce truc de la soirĂ©e oĂč on se laisse guider les yeux fermĂ©s.
16 / 17 HOUSE OF MODA VISITE NOCTURNE
ForcĂ©ment, je me suis fait embarquer. Impossible de rĂ©sister Ă lâappel dâaller cĂ©lĂ©brer une derniĂšre fois ce qui symbolise les soirĂ©es queer de la ville : un esprit libre, loin des prĂ©jugĂ©s habituels du petit Parisien â mĂȘme si la direction se rĂ©serve le droit dâentrĂ©e. LĂ -bas, tout le monde sâaime, tout le monde partage et personne ne se donne de faux airs. Le plan parfait pour un vieux con comme moi qui se donne rarement lâoccasion dâaller supporter les bas-fonds parisiens, cernĂ©s par les cadavres humains et lâambiance Ă©touffante dâun trou de balle allemand. Ici, on parle de lĂ©gĂšretĂ© et de finesse, mĂȘme si la sueur, inĂ©vitable, coule sur les murs. Pas de brut et une toute autre animositĂ©. ArrivĂ©s Ă lâheure oĂč personne nâarrive â lâouverture des portes â, il y a pourtant dĂ©jĂ une belle Ă©quipe de joyeux danseurs. AdossĂ©s Ă deux pas de lâentrĂ©e comme des clochards qui nâont rien Ă faire en soirĂ©e LGBT, nos «âbellesâ» tronches dâhĂ©tĂ©ros sont fascinĂ©es par le spectacle qui dĂ©file peu Ă peu. Queer aprĂšs queer, on dĂ©couvre les dĂ©guisements de ceux et celles qui sont venu.e.s transpirer jusquâĂ la derniĂšre goutteâ; jusquâĂ la petite larme de la musique de fin, signant lâadieu dâune amie de longue date et non plus dâune soirĂ©e. Une relique de biĂšre de plus laissĂ©e sur le muret et nous voilĂ fin prĂȘts Ă pĂ©nĂ©trer lâantre de la diva Moda. Ă lâintĂ©rieur, la Java nâa pas changĂ©. FidĂšle Ă elle-mĂȘme, ce sont les gens qui font la dĂ©co. Ă peine en bas des escaliers, lâambiance sombre du club fait briller les tenues des un.e.s et des autres. Premier Ă se faire remarquer, un jeune homme masquĂ© au troisiĂšme Ćil, une boĂźte de mouchoirs en guise de parure pour souligner un peu plus la tristesse de chacun.e â il ne sera pas le seul. Dans lâobscuritĂ©, robes satinĂ©es et paillettes se distinguent de mille couleurs. Du vert, du rouge, du bleu, du rose⊠un arc-en-ciel de sensations. Mention spĂ©ciale Ă Enza
Fragola pour sa robe âmontĂ©e des marchesâ, vĂ©ritable Ă©difice vestimentaire reprĂ©sentant un tapis rouge qui a trop longtemps mis Ă lâĂ©cart ces communautĂ©s alternatives. La soirĂ©e bat son plein, la musique fait rage et la foule danse. Entre deux morceaux, on a le temps de capter Crame, Arnaud de son vĂ©ritable prĂ©nom, fondateur de la fameuse soirĂ©e tandis que son compĂšre Reno est en bas Ă sâoccuper de lâambiance. Son costume bleu marine, bien plus sobre que ce Ă quoi le personnage a pu nous habituer, reflĂšte Ă la perfection lâadieu dâune diva. Lâextravagance, Crame la laissera aux autres. La tĂȘte lourde et lâĂąme en peine, lâartiste nâa pas le temps de se prĂ©occuper de nos questions. Avec douceur et un soupçon de tristesse, il sâinquiĂšte de son deuxiĂšme passage derriĂšre les platines. «âJe verrai bien en fonction de lâambiance si je dois jouer un peu plus violent ou rester sur des classiques.â» Soucieux de satisfaire son public jusquâau bout, on le quitte plein dâĂ©motion, avec une promesse de le revoir trĂšs vite sur le paysage culturel parisien. Une heure plus tard, le systĂšme son de la Java rugira de plus belle. Peu aprĂšs notre court entretien, nos esprits sâembrument et nos corps se laissent aller dans cet environnement libre et accueillant. Venus lĂ pour tĂ©moigner dâun moment unique, notre premier instinct de dipsomanes finira par avoir raison de nous. Pourtant, ce nâest pas lâalcool qui nous rendra ivres, mais bien lâatmosphĂšre de la derniĂšre House of Moda. Au milieu des homos, des queers et des cis het blancs comme nous, tout le monde se regarde mais personne ne sâobserve. LiĂ©.e.s dans la musique et dans la danse, il nâest pas encore quatre heures du matin que tout le monde sâessouffle dâun amour communautaire si fort quâil est difficile de ne pas se laisser aller au partage. Le beat Ă©clate jusquâĂ monter dans les trĂ©fonds de la trance et du hardcore,
VISITE NOCTURNE
HOUSE OF MODA
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â Au cĆur de la foule, le plus curieux des personnages sera ce grand jeune homme Ă chemise, plus hĂ©tĂ©rocoincĂ© que la norme. GĂȘnĂ©, il sourit et danse maladroitement sur un rythme noir et gueulant.â
envoyant dâune violence sans pareille des gifles au visage des entĂȘtĂ©s du premier rang, accoudĂ©s au booth dans un effort ultime. Un moment slow sâinvite au milieu des kicks, et la grande CĂ©line rĂ©sonne pendant que tout le monde gueule Ă sâarracher les cordes vocales : «âJâIRAI CHERCHER TON CĆUR SI TU LâEMPORTES AILLEUUUUURS !â». Une pause bien mĂ©ritĂ©e avant de reprendre les tambours. Au cĆur de la foule, le plus curieux des personnages de la soirĂ©e sera ce grand jeune homme Ă chemise, plus hĂ©tĂ©rocoincĂ© que la norme. GĂȘnĂ© â par timiditĂ© apparente plus que par inconfort â, il sourit
et danse maladroitement sur un rythme noir et gueulant. SoulevĂ© par ce brouillard de love, dâalcool et de paillettes, jâentre alors en transe, portĂ© par le poids de lâĂ©motion. Rarement aussi dĂ©chaĂźnĂ© sur la piste, jâapproche peu Ă peu du bord de scĂšne pour profiter du spectacle. Ăa fait deux heures que jây suis et lâheure de fin approche. DerriĂšre les platines, Crame est entourĂ© dâune troupe de joyeux.ses luron.ne.s qui se dĂ©hanchent en montant sur les tables, jouant avec le DJ, le dĂ©cor et le reste de la salle. Le club ne dĂ©semplit pas pendant quâune version longue de âI Feel Loveâ se laisse aller. Les corps se rapprochent, on en oublie la chaleur et la transpiration. Le visage ruisselant, les cheveux trempĂ©s, câest lâoccasion dâune fois de plus se laisser emporter avec nos voix de casseroles : «âI FEEEEL LOOOOOVE ! ». Personne ne se tient la main et pourtant tout le monde se touche avec le cĆur et la musique. Crame tire alors sa rĂ©vĂ©rence avec ce qui nous restera comme le plus beau moment de la soirĂ©e : âDĂ©bordementâ de Jardin. Un morceau fraĂźchement sorti qui hurle la rancĆur de la nouvelle gĂ©nĂ©ration, fatiguĂ©e du systĂšme et des inĂ©galitĂ©s. On y voit comme une passation de pouvoir, un clin dâĆil, une confiance envers les petits nouveaux Ă qui revient le lourd fardeau de porter le bien-ĂȘtre de la communautĂ© LGBT sur leurs Ă©paules. Dans un silence serein et mĂ©lancolique, tout le monde se dirige vers la sortie. Pas la peine dâajouter quoi que ce soit. Les amis partent entre eux, certains en after, dâautres au travail. On finira sur un verre au Moka, Ă deux pas, Ă balbutier sur la belle expĂ©rience quâon vient de vivre. Pourtant, inutile dâen dire plus : la diva a fait ses adieux, la boucle est bouclĂ©e. Oui, on est tristes. Mais non, on ne pleurera pas pendant des mois Ă demander oĂč est passĂ©e notre soirĂ©e prĂ©fĂ©rĂ©e. Toutes les bonnes choses ont une fin.
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THOMAS SMITH,
LUMIĂRE DANS PORTRAIT
T
SARAH SIREL
LâOMBRE
Tu as forcĂ©ment dĂ©jĂ croisĂ© sa tignasse rousse au dĂ©tour dâune teuf, lâappareil autour du cou. Voici Thomas Smith, le plus Ă©clectique des photographes de nos nuits parisiennes, qui prĂ©sente sa premiĂšre exposition le 19 septembre Ă lâAntiGalerie. Il est un dinosaure dans le monde des photographes de nuit. BientĂŽt 10 ans que Thomas Ă©cume les soirĂ©es aux quatre coins de la capitale, quand ses collĂšgues ne tiennent le coup que quelques annĂ©es a maxima. Ses photos au flash font partie de celles quâon admire et quâon garde prĂ©cieusement dans un coin de son ordi (et de son cĆur). Des squats en bordure de Paris aux soirĂ©es LGBT en passant par les aftershows les plus prisĂ©s de la Fashion Week, Thomas Smith est un vrai camĂ©lĂ©on, et pas un visage nâĂ©chappe Ă son objectif. Il a commencĂ© par photographier les inconnus quâil croisait pour ne pas les oublier aprĂšs quelques coups dans le nez. Il compilait ses souvenirs dans un blog, The Party Diary, vitrine grĂące Ă laquelle il a pu travailler en direct avec des organisateurs. Aujourdâhui, on le croise encore Ă la BLT au Maximâs ou Ă La Toilette, quand il ne shoote pas pour Say Who ou Ten Days In Paris. Si ce mĂ©tier lui plaĂźt autant, câest pour la libertĂ© et le contact avec les fĂȘtards quâil procure. «âCâest une façon trĂšs frontale de rencontrer les gens, dâailleurs jâai une photo de la premiĂšre fois que jâai rencontrĂ© la plupart de mes bons amis.â» La photo de soirĂ©e, un moyen transversal pour cet oiseau de nuit de naviguer entre tous les diffĂ©rents milieux sociaux. «âTout le
monde se retrouve dans la fĂȘte, et tu portes un regard diffĂ©rent sur des gens dans un contexte festif nocturne. Les Ă©motions sont amplifiĂ©es par lâalcool et lâexubĂ©rance, câest un truc dont je ne me lasse pas depuis 2010.â» Pour Thomas, la meilleure fĂȘte est celle qui est responsable. «âĂ nos Ăąges, il y a de plus en plus de gens qui se dĂ©montent la tĂȘte avec toutes sortes de drogues, qui sortent et tapent tous les soirs, moi ça me saoule. Les soirĂ©es que je prĂ©fĂšre, câest avec mes potes en appartâ, ou en festival comme Pete The Monkey.â» Des milliers de teufs, dâafters, de concerts, des milliers de gens croisĂ©s au fil des ans et autant de portraits quâil compile dans sa premiĂšre expo Ă©phĂ©mĂšre. Câest lĂ , dans lâancienne imprimerie abandonnĂ©e quâest lâAntiGalerie, lovĂ©e dans un coin du boulevard RichardLenoir, que nous dĂ©couvrirons dĂšs le 19 septembre une grande partie des photos de Thomas. Ce soir-lĂ , nos coudes se lĂšveront au rythme de lâopen bar et des DJ sets de guests surprise fort lĂ©chĂ©s. Vous savez oĂč nous trouver. THOMAS SMITH THEPARTYDIARY.FR VERNISSAGE LE 19/09 Ă LâANTIGALERIE 44 BIS, BD RICHARD-LENOIR â 11e
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GASPARD ULLIEL,
CINĂMA
LâAMOUR AU CARRĂ T P
INĂS AGBLO NAĂS BESSAIH
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GASPARD ULLIEL
Impossible de ne pas ĂȘtre familier avec la formule on ne peut plus clichĂ©e qui tend Ă demander ce que vous seriez prĂȘt Ă faire par amour. Seulement, la rĂ©ponse se rĂ©vĂšle rarement ĂȘtreâ: voyager dans le temps Ă travers un cube.
Câest pourtant le dĂ©fi que relĂšve la minisĂ©rie Il Ă©tait une seconde fois, diffusĂ©e sur Arte Ă partir du 29 aoĂ»t. Puisque rien ne nous arrĂȘte, nous avons bravĂ© la canicule il y a quelques semaines pour parler dâamour, de happy ending et de rĂ©alitĂ© avec Gaspard Ulliel.
LE BONBONâ: AprĂšs Les confins du
monde, câest la seconde fois que tu collabores avec Guillaume Nicloux. Quâest-ce qui, dans son travail, tâa donnĂ© envie de rejouer face Ă son objectifâ?
GASPARD ULLIELâ: Ăa a Ă©tĂ©, pour moi,
assez Ă©vident trĂšs rapidement quâon allait potentiellement retravailler ensemble aprĂšs Les confins du monde. Parce que je pense que câest une rencontre qui a Ă©tĂ© vraiment significative autant pour lui que pour moi. Je ne saurais expliquer pourquoi, mais voilà ⊠Il y a des rencontres oĂč dâun coup on se stimule lâun lâautre. Ăa nous permet dâexplorer des choses nouvelles. Câest une impulsion nouvelle en fait. Je parle pour moi, mais jâai lâimpression que lui aussi, je lui apporte peut-ĂȘtre. Jâaime sa maniĂšre de penser le cinĂ©ma, sa maniĂšre de travailler. Ăa correspond exactement Ă ce que je recherchais Ă ce moment-lĂ dans mon parcours dâacteur. Ăa mâa permis de rĂ©inventer mon rapport Ă cet exercice, celui du tournage. Et je pense que câest ce que lâon cherche en permanenceâ: se rĂ©inventer Ă chaque fois, donc câest assez prĂ©cieux oui.
L.B. Dans la série, les sentiments de Vincent
pour Louise le poussent Ă tout tenter pour sauver leur histoire, quitte Ă relayer au second plan sa vie et son fils y compris. Tu penses que les sentiments amoureux peuvent ĂȘtre apprĂ©hendĂ©s comme nĂ©fastesâ?
G.U. Bien sĂ»r. Mais câest sans doute ce qui
rend la passion aussi puissanteâ: câest quâil y a Ă un moment donnĂ© une certaine forme de souffrance. Dâailleurs, câest assez juste de le soulever parce que, pour moi, un des thĂšmes rĂ©currents chez Nicloux â et qui est au centre de cette sĂ©rie â,
câest lâenfermement. Ce personnage est enfermĂ© dans lâamour en fait. Donc lâamour peut aussi monopoliser une Ă©nergie, prendre une place dans la vie, dans le rapport au monde des ĂȘtres et peut-ĂȘtre parfois les Ă©loigner dâune forme de rĂ©alitĂ©. Mais câest ça qui est intĂ©ressant aussi, câest de ça que parle la sĂ©rie. Cette temporalitĂ© vraiment propre Ă lâamour, propre aux amants, puisquâil sâagit quand mĂȘme dâun voyage dans le temps. Jâai lâimpression que ce que Guillaume dĂ©ploie dans la sĂ©rie, le temps du cube, câest presque un non-temps. Un temps qui nâexiste pas et qui nâappartient quâaux seuls amantsâ: le temps de lâamour comme une sorte de rĂ©alitĂ© parallĂšle. Donc oui, ça peut potentiellement ĂȘtre dangereux. AprĂšs, est-ce que câest pas ça aussi quâon rechercheâ? Je pense quâil faut, dans une relation, sâaffranchir de la prudence et essayer de sâĂ©loigner de ce besoin de toujours avoir des garanties.
L.B. Le voyage dans le temps est effectuĂ© sous le prisme dâun cube en bois, un concept intelligemment absurde et inĂ©dit dans la fiction. Toi, quelles sont tes rĂ©fĂ©rences cinĂ© ou sĂ©ries phares en termes de voyage dans le tempsâ?
G.U. Il y a une sĂ©rie que jâaime bienâ: The OA. Je nâai pas encore regardĂ© la seconde saison. Câest sur des personnages qui voyagent un peu dans une autre rĂ©alitĂ©, une autre temporalitĂ©, dans des sortes de NDE (Near Death Experience). Et pour le coup, jâai vraiment lâimpression de voyager avec cette sĂ©rie, oui.
L.B. Le gĂ©nĂ©rique de la sĂ©rie, Ă la fois esthĂ©tique et intriguant, annonce dâemblĂ©e les Ă©vĂ©nements Ă venir. Câest un dĂ©tail sur lequel tu tâarrĂȘtes dâhabitudeâ?
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G.U. Oui, il révÚle tout un panel de
personnages quâon nâa pas encore vus. On les dĂ©couvre de dos, donc câest quand mĂȘme assez opaque. Mais en mĂȘme temps câest intĂ©ressant, parce que ça, pour le coup, câest un des Ă©lĂ©ments qui appartiennent vraiment aux codes de la sĂ©rie. AprĂšs câest aussi une forme de teasingâ: câest vraiment propre Ă la sĂ©rie dans la construction dramaturgique. Un long-mĂ©trage, on le consomme originellement dans une salle de cinĂ©maâ: Ă priori on va rester jusquâau bout, mĂȘme si on peut sortir si ça ne nous plaĂźt rĂ©ellement pas. Alors quâune sĂ©rie, il y a toujours le danger que la personne zappe, dĂ©croche, arrĂȘte pour autre chose. Alors il y a besoin dâavoir ces Ă©lĂ©ments de teasing quâon injecte Ă diffĂ©rents moments dans le rĂ©cit pour crĂ©er des micro-suspenses. Breaking Bad, en terme de storytelling et dâĂ©criture, câest exemplaire. Et justement, ils introduisent cet Ă©lĂ©ment de teasing oĂč ils nous montrent des plans qui sortent un peu de nulle part et quâon retrouve plusieurs Ă©pisodes aprĂšs. Câest assez intĂ©ressant.
L.B. Le titre âIl Ă©tait une seconde foisâ fait
appel Ă lâutopie des contes de fĂ©es et la sĂ©rie se rattache au genre de la romance. Pourtant, dâentrĂ©e, on a le sentiment quâil ne sera pas question dâun happy ending. Câest un sentiment que tu partageais lors de la lecture du scĂ©narioâ?
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G.U. Ouais, mais parce que je connais
Nicloux (rires). En mĂȘme temps, est-ce que câest pas un happy endingâ? Bon aprĂšs je ne vais pas spoiler la fin⊠Mais⊠Au final, câest peut-ĂȘtre le plus beau geste dâamour, ce qui se passe Ă la fin. Mais oui, il y a clairement
un climat dĂšs le dĂ©part, un ton qui est donnĂ©, avec une forme de menace un peu sourde, une forme de tensionâ: quelque chose dâassez noir quand mĂȘme, de trĂšs dramatique. Donc oui, dĂšs le dĂ©part jâavais conscience de ça, mĂȘme la premiĂšre fois que jâai ouvert le scĂ©nario.
L.B. Tout au long de la série, la musique
permet dâentretenir cette tension sousjacente que tu Ă©voques. Est-ce quâil y a des bandes originales qui tâont marquĂ© sur le petit ou grand Ă©cranâ?
G.U. Oui, par exemple The Leftovers avec
la musique de Max Richter qui est assez entĂȘtanteâ: elle mâa beaucoup marquĂ©. AprĂšs oui, je pense que câest un Ă©lĂ©ment trĂšs important au cinĂ©maâ: la musique, le sound design⊠Surtout quand on lâutilise comme Guillaume, câest-Ă -dire avec des sortes de nappes sonores qui crĂ©ent vraiment un climat, quelque chose dâun peu trouble, nĂ©buleux. Et lĂ , il a fait appel Ă Julia Kent. Câest vrai que câest profondĂ©ment cinĂ©matographique ce quâelle fait. Donc ça colle parfaitement oui. Il y a un film aussi oĂč je trouve quâil y a un travail incroyable de musique, câest Under the Skin de Jonathan Glazer. Câest Mica Levi â une jeune femme qui fait de lâĂ©lectro â qui fait la musique.
L.B. à ton avis, une morale se dégage au
terme de la sĂ©rieâ? Et si oui, laquelleâ?
G.U. Je ne sais pas si câest vraiment la
volontĂ© de Guillaume dâassĂ©ner une morale, ou de dire quelque chose de façon affirmĂ©e sur lâamour ou sur la façon dâĂȘtre Ă lâautre, au monde, ou sur lâexistence. Je pense que ce sont des choses beaucoup plus nĂ©buleuses, beaucoup plus abstraites en fait. Je pense que lui-mĂȘme nâa
Claire Sermonne qui a notamment jouĂ© dans la sĂ©rie amĂ©ricaine Outlander. Toi, tu aimerais travailler davantage pour le petit Ă©cranâ?
G.U. Hum⊠Oui. En tout cas, je ne suis pas
pas les rĂ©ponses. Et trĂšs souvent, les films racontent quelque chose que les cinĂ©astes nâavaient pas forcĂ©ment anticipĂ©. Mais comme un poĂšme, une peinture impressionniste, le fait de coller un plan Ă un autre, de laisser durer une image plus longtemps quâune autre, comme choisir de mettre tel mot aprĂšs celui-ci dans un poĂšme ou de mettre une touche de bleu. Et ça crĂ©e quelque chose qui est de lâordre de lâabstraction la plus totale, mais câest ça qui va peut-ĂȘtre crĂ©er les sensations ou avoir le sens le plus puissant, le plus profond pour la personne qui le dĂ©couvre. Câest plus dans ce sens-lĂ que Guillaume essaye dâavancer, de continuer Ă chercher, dâexplorer de film en film.
L.B. Au sein du casting, on retrouve en tĂȘtes
dâaffiche, Ă tes cĂŽtĂ©s, Freya Mavor qui a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e par la sĂ©rie anglaise Skins, ou
du tout fermĂ© Ă lâidĂ©e. Je suis mĂȘme assez tentĂ© par lâexpĂ©rience. Je dirais que lĂ jâai eu un avant-goĂ»t. AprĂšs, câest une mini-sĂ©rie. Mais câest vrai que lâidĂ©e de travailler, explorer un personnage sur une durĂ©e un peu plus longue, dâĂ©pisode en Ă©pisode, câest ce qui depuis longtemps mâattirait. Ăa dĂ©pendra des projets, mais⊠Yâa pas trĂšs longtemps, on mâa proposĂ© une sĂ©rie oĂč il fallait sâengager sur six ans. Et je ne me sens pas prĂȘt Ă un tel engagement pour lâinstant. Je sais que je passerais Ă cĂŽtĂ© dâautres projets potentiellement trĂšs intĂ©ressants. Et câest pareil dans mon expĂ©rience de spectateur. Ăa me dĂ©courage un peu de me dire, voilĂ , il y a quatre saisons qui ont Ă©tĂ© faites. Mais en mĂȘme temps, je dois dire quâaujourdâhui, il se passe tellement de choses grĂące aux sĂ©ries. Il y a une sorte dâĂ©mulation crĂ©ative avec lâĂ©mergence de plein de nouveaux talents, que ce soit des auteurs, des cinĂ©astes, mĂȘme des acteurs qui sont rĂ©vĂ©lĂ©s. Le public est plus exigeant de par la sĂ©rie. Parce quâils ont Ă©tĂ© habituĂ©s Ă des histoires beaucoup plus denses, plus larges, plus fouillĂ©es, avec plein de rebondissements, avec des processus dramaturgiques plus Ă©laborĂ©s, du suspense⊠Du coup, jâai lâimpression que ça dĂ©teint aussi forcĂ©ment sur les longs-mĂ©trages de fiction oĂč, dâun coup, il y a cette exigence renouvelĂ©e chez les spectateurs. Ce qui est plutĂŽt bien, ça pousse Ă faire mieux.
IL ĂTAIT UNE SECONDE FOIS SUR ARTE.TV JUSQUâAU 28 SEPTEMBRE
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T
PIERIG LERAY
CLAIR OBSCUR, LâĂDITO CINĂMA
La rentrĂ©e de septembre offre toujours cette Ă©trange sensation dâun Ă©tĂ© toujours trop court et jamais assez chaud⊠Cette angoissante impression de nâavoir pu dĂ©connecter dâun monde qui nâarrĂȘte jamais de se dĂ©traquerâ: son Ă©lite qui continue de partouzer notre planĂšte comme un vulgaire vagin epsteinien, en toute impunitĂ© et dans une inexorable descente aux fourneaux, les degrĂ©s qui sâemballent et la banquise qui se noie. La salle de cinĂ©ma semble donc lâisoloir parfait Ă la connerie humaine, quoi que souvent bien prĂ©sente dans la salle (le bruxisme Ă pop-corn) ou Ă lâĂ©cran (le forcĂ©ment ratĂ© Ăa et son come-back le 11 septembre ou le pas moins lourdingue retour de Rambo le 25 septembre). Mais si se couper du monde le temps dâun film semble ĂȘtre le programme idĂ©al dâune rentrĂ©e toujours difficile, il nâen reste pas moins obligatoire de se taper les concours dâUV Ă la machine Ă cafĂ©, les histoires de cul type Cap dâAgde du collĂšgue sans pudeur et le saroual de lâamie partie en Inde («âNon, mais ça a changĂ© ma vision du monde, voire cette pauvretĂ© en bas de mon palace colonial, ça mâa bouleversĂ©eâ»)â: le rĂ©veil sonne bien la rentrĂ©e des castes. Mais pas que. La rentrĂ©e, câest aussi lâĂ©moustillement dâun nouveau dĂ©part, de nouvelles rencontres. Et peut-ĂȘtre celle dâun amour Ă©ternel ou Ă©phĂ©mĂšre. Le cinĂ©ma sâest attaquĂ© Ă bien de ses versants. Ce mois-ci, Klapisch nous le raconte via le prisme malaisant des rĂ©seaux sociaux, hĂ©tĂ©ronormĂ© dans une relation de couple de Parigots tinderisĂ©s Ă la con. Ăa ne devrait pas voler trĂšs haut (Deux Moi, sortie le 11 septembre). Câest alors que je me rappelle avec bien plus de douceur dâun film Ă transgenre branchĂ© dans le milieu du voguing new-yorkais dĂ©couvert Ă Cannes (ça claque des dents chez le bobo, lĂ )â: Port Authority de Danielle Lessovitz (sortie le 25 septembre). Un jeune blanc-bec sâamourache dâune re-noi, tout les
oppose, bla-bla. Puis il tombe raide dingue de cette meuf, reine du voguing underground et entourĂ©e de son crew gay. Le mec commence Ă flipper car il traĂźnasse avec une enflure de nĂ©o-nazi qui veut taper du PD. Puis il dĂ©couvre que la meuf est un trans. Chamboulementâ? Pas vraiment. Câest beau, câest simple, ce nâest pas un grand film, mais il nâen reste pas moins nĂ©cessaire dans le contexte social de mĂ©fiance qui nous dĂ©becte. LibertĂ© dâailleurs, titre du dernier film dâAlbert Serra, partouze de pĂ©rruquĂ©s XVIIIe siĂšcle dans les bois de la forĂȘt noire germanique (pas de jeux de mots, promis)â: festival de cul dans une libertĂ© perverse de scato, sado et tout ce qui finit par O. Dâune prĂ©tention dĂ©mesurĂ©e, interminable malaise dâun huis clos quasi-risible (sortie le 4 septembre). Si câest ça le prix de la libertĂ©, permettez-moi de rester enfermĂ© dans ma levrette hebdomadaire. Allez, courage, le mois de septembre câest aussi le fabuleux Jeanne de Bruno Dumont (sortie le 11 septembre) et sa musique originale bouleversante de Christophe, les photos de vacances de maman toujours mal cadrĂ©es, les babouches en plastique ramenĂ©es par mamie de son voyage Ă Marrakech, la carte postale des plus belles bites des sculptures italiennes de ton pire ami, qui sera suivie probablement du tablier de cuisine de la mĂȘme veine, mais surtout la conviction que lâannĂ©e prochaine, ça ne pourra pas ĂȘtre pire que ton Airbnb chiottes sur le palier de cette annĂ©e. Mais attention, lâĂȘtre humain est plein de ressources inespĂ©rĂ©es et ne recule devant rien : il est mĂȘme capable de rire ouvertement dâune jeune adolescente porte-parole dâun monde qui se meurt, avec les yeux fermĂ©s et le cigare au bec ; caricatural, bien pire quâun mĂ©chant de mauvais film dâespion, car celui-ci est bien rĂ©el.
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Nous sommes en lâan de grĂące 1990 et le cinĂ©ma hollywoodien nâa jamais aussi bien fonctionnĂ©. En moins de dix ans, le nombre de comĂ©dies musico-romantiques â dont on taira les noms pour Ă©viter de chanter Ă tue-tĂȘte â nâa fait quâaugmenter, nous perdant peu Ă peu dans les mĂ©andres de ce monde Ă lâeau de rose visitĂ© et revisitĂ©. Fort heureusement, Ghost ne fera pas partie de ces films.
GHOST, RETOUR VIVANT Ghost, câest lâhistoire de Sam Wheat (Patrick Swayze) qui file le parfait amour avec Molly Jensen (Demi Moore) jusquâau jour oĂč il se fait exĂ©cuter tragiquement dans les rues et meurt dans les bras de sa dulcinĂ©e. Revenu dâentre les morts sous forme de fantĂŽme, il va errer Ă la recherche de quelquâun qui pourra le voir ou lâentendre. Il trouvera sa rĂ©demption auprĂšs dâOda Mae Brown (Whoopi Goldberg), fausse voyante qui a vraisemblablement de vrais pouvoirs psychiques et communique avec le dĂ©funt. Il essaye alors dâĂ©lucider le mystĂšre de son meurtre en compagnie de sa veuve.
comĂ©die musicale, oĂč elle sera jouĂ©e du 17 septembre 2019 au 21 juin 2020.
Le film a aujourdâhui presque 30 ans, et la meilleure façon de continuer Ă faire vivre ce petit bout dâhistoire du cinĂ©ma romantique, câest encore de le mettre Ă jour. Depuis 2011, la comĂ©die musicale Ghost sillonne le monde, de Manchester Ă Broadway en passant par lâAustralie ou la Russie, et redonne un boost mĂ©lodique Ă lâĆuvre. AprĂšs avoir fait du pied au public français pendant un moment, elle dĂ©barque enfin Ă Paris, du cĂŽtĂ© du thĂ©Ăątre Mogador (9e), vĂ©tĂ©ran du thĂ©Ăątre et de la
Au vu du potentiel de Moniek Boersma et GrĂ©gory Benchenafi dans les rĂŽles principaux, on ne doute pas quâelle sera reprise en beautĂ©. Ă dĂ©couvrir.
La particularitĂ© de cette reprĂ©sentation, en dehors de sa mise Ă jour, câest son casting qui change dâun pays Ă lâautre ; le nĂŽtre avait Ă©tĂ© annoncĂ© au printemps avec une certaine Claudia Tagbo, comĂ©dienne de carriĂšre et voyante dans la piĂšce. Si on ne doute pas de ses talents pour remplacer la gĂ©niale Whoopi Goldberg, on se pose surtout beaucoup de questions quant Ă la cĂ©lĂšbre scĂšne de poterie entre Sam et Molly, monument du romantisme audiovisuel.
GHOST THĂĂTRE MOGADOR â 9e DU 17 SEPTEMBRE AU 21 JUIN PLUS DâINFOS SUR THEATREMOGADOR.COM
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TRANSE
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STYLISTIQUE ET SPIRITUELLE EN TERRITOIRE LITUANIEN T&P
MANON MERRIEN-JOLY
Tous les mois, le Bonbon Nuit se mue en une Distyllerie, dĂ©composant le style et les rĂ©fĂ©rences esthĂ©tiques de ceux qui donneront le pouls du Paris de demain. Pour cette derniĂšre virĂ©e mode en Europe de lâEst, notre reporter sâest lancĂ©e dans une quĂȘte stylistique et spirituelle en territoire lituanien, de Vilnius Ă la forĂȘt de EĆŸeraitis oĂč se tient le Yaga Festival, Ă 45 kilomĂštres au sud de la capitale.
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MARDI 13 AOĂT 8h20 Cet article nâa failli jamais voir le jourâ: Ă quarante minutes du dĂ©part du zingue, je suis encore dans la navette Ă lâodeur de moquette poussiĂ©reuse qui me conduit jusquâĂ lâaĂ©roport de âParisâ Beauvais TillĂ©. Mon avion dĂ©colle Ă neuf heures pĂ©tantes.
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VOYAGE Ă VILNIUS
8h31 Jâarrive en courant, gesticulant et criant pour que les agents de sĂ©curitĂ© amorphes checkent au plus vite lâenclume que jâai sur lâĂ©paule. Je passe les portiques avec brio, pour finalement me rendre compte quâune masse de pĂ©cores attend comme moi lâouverture de lâembarquement. 10h40 ArrivĂ©e Ă Vilnius sous une mĂ©tĂ©o aussi maussade que la tronche quâaffichent les locaux. Heureusement, notre humeur est Ă lâĂ©preuve des frontiĂšres et nous partons braver le charme paisible de la ville. Notre
premier point dâancrage se situe dans un restaurant typiquement touristique oĂč lâune dâentre nous se risque Ă goĂ»ter un breuvage local, le kvas, un alcool composĂ© de pain fermentĂ© avec du blĂ©, du seigle ou de lâorge. Qui se rĂ©vĂšlera Ă©trangement savoureux. Si vous me permettez une lĂ©gĂšre digression Ă lâadresse de ceux qui, comme moi, se lanceraient dans une quĂȘte stylistique en Lituanie, la Halle Market de Vilnius nâest pas lâendroit oĂč vous trouverez rĂ©ponses Ă vos interrogations mais par contre, vous y mangerez et boirez trĂšs bien, du smoothie Ă lâamande Ă la galette frite servie avec un genre de tzatziki. Ne vous risquez pas Ă chiner du textile lĂ -bas cependant, vous risqueriez dây perdre la vue. Allez plutĂŽt chiner du cĂŽtĂ© dâUzupis, la rĂ©publique indĂ©pendante et quartier autogĂ©rĂ© nichĂ© au sein mĂȘme de la capitale. MERCREDI 14 AOĂT Sous une pluie torrentielle, on dĂ©cide dâaller Ă©cumer les friperies du coin pour sâattifer de costumes qui, je lâespĂšre, ouvriront mes chakras stylistiques. Bonne piocheâ: la fripe Humana (comme on en trouve dans
toutes les villes dâEurope) se rĂ©vĂšle ĂȘtre un vĂ©ritable coffre Ă trĂ©sors proposant une promotion ce jour-lĂ â: âVISI PO VIENA EURAâ - âTOUT Ă UN EUROâ. En rĂ©sulteâ: deux shorts de cycliste identiques en lycra estampillĂ©s Mitsubishi, un impermĂ©able blanc sur lequel figure au dos un pĂ©lican ridant une vague sur une planche de surf, pipe au bec, un voile de mariĂ©(e), une coiffe de diseuse de bonne aventure, un maillot cycliste sponsorisĂ© par Yoplait, un costume de lutteur et dâautres chiffons qui nâentreront pas dans la postĂ©ritĂ©. Quelques heures auparavant, mes acolytes mâavaient gentiment dĂ©nichĂ© un costume de cirque impermĂ©able taille enfant. Nous Ă©tions fin prĂȘts Ă partir. JEUDI 16 AOĂT 16h12 Câest pourvue dâune armĂ©e de neuf potes surexcitĂ©s que je mâenfonce dans la forĂȘt et franchis les portes du festival, Ă deux kilomĂštres de la route goudronnĂ©e la plus proche. Le soleil est au beau fixe, nous nous Ă©tions dĂ©jĂ plantĂ© de route donc Ă©tions certains dâĂȘtre au bon endroit. Les arbres, dâimmenses lances de bois, semblaient transpercer le ciel et faire un pied de nez menaçant aux inconscients qui tenteraient de les escalader. Nous arrivons au-dessus dâun cours dâeau, la source oĂč nous nous
abreuverons pour les quatre jours Ă venir. Progressivement, le sentier se fait chemin et nous apercevons les premiĂšres installations, oĂč commencent Ă grouiller des festivaliers Ă©pars qui semblent tout droit sortis de la sĂ©rie Vikings. Blonds, des dreads dominant leurs grands corps, parfois beaucoup de tatouages, des silhouettes musclĂ©es et Ă©lancĂ©es qui feraient passer Avatar pour un documentaire. En les voyant, je comprends trĂšs rapidement que lâĂ©lĂ©gance naturelle des Lituaniens ne suffira pas Ă nourrir ma soif dâinspiration en matiĂšre de mode. Non, je vais plutĂŽt devoir aller chercher du cĂŽtĂ© de lâabstrait, de lâarchitectural et de lâonirique. Ăa tombe plutĂŽt bien, lâĂ©dition 2019 du Yaga est placĂ©e sous le signe de la sorcellerie. 20h48 Le soleil se couche peu Ă peu et les premiĂšres lumiĂšres apparaissent. La scĂšne ambient, non loin de nos tentes, est parsemĂ©e de carrĂ©s de couleurs translucides Ă©clairĂ©s par des spots. Une musicienne, dans un ensemble de toile, sur la scĂšne, fait
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ses balances. Un peu plus loin, on trouve un marchĂ© parsemĂ© de tipis oĂč des artisans venus de toute lâEurope de lâEst vendent des produits artisanauxâ: miels, fringues chinĂ©es ou fabriquĂ©es, pierres et amulettes, tapis et tissus baltes ou aztĂšques. Je repense Ă Mona Chollet et ses sorciĂšres. Je me demande quels genres de pouvoirs mâauraient valu le bĂ»cher il y a quelques siĂšcles de cela. Ă ce moment-lĂ , un homme vĂȘtu dâun haut-de-forme, dâun pantalon de toile bouffant et dâun gilet de costume pourpres dĂ©ambule en parlant tout seul, sâappuyant sur un morceau de bois faisant office de bĂąton de marche. Je lâimagine en grand prophĂšte du style, dĂ©clamant Ă qui veut lâentendre ses conseils de gourou, croisement entre le chapelier fou et le pirate ayant perdu la boule. Je le quitte lorsquâil salue une connaissance Ă lui, un malabar au crĂąne rasĂ©, mono-tresse et T-shirt oĂč il est criĂ© âHARDCOREâ sur le dos.
â Des confĂ©rences et projections sur des thĂšmes aussi variĂ©s que «ââLa 5G est-elle lâĆuvre du diableâ?â»â VENDREDI 17 AOĂT
23h32
13h08
La nuit est tombĂ©e, la scĂšne psytrance vient alimenter mes pĂ©rĂ©grinations mentalesâ: et si le rĂšgne parisien du monochrome devait sâarrĂȘter lĂ oĂč se distordent ces Ă©cailles tendues au-dessus de la pisteâ? Pourquoi ne pas tout miser sur le fluo de ses lumiĂšres traversant la riviĂšre et son nuage de fumĂ©e, et devenir ainsi le guide autoproclamĂ© dâune gĂ©nĂ©ration en mal dâĂ©motions, prĂȘte Ă imploser et libĂ©rer toutes ses nuances de folie, de colĂšre et dâamour Ă travers le peu de tissu quâelle arbore pour cacher ce quâelle a de plus intimeâ?
Câest dĂ©cidĂ©, je serai une bonne Ă©lĂšve. Sont proposĂ©s tout au long du Yaga des confĂ©rences et projections cinĂ©matographiques sur des thĂšmes aussi variĂ©s que âla 5G est-elle lâĆuvre du diableâ?â, âles premiers hommes cyborgs et les dilemmes dâune sociĂ©tĂ© cyborgâ, âles tenants et aboutissants du microdosing de LSD ou de champignons hallucinogĂšnesâ ou la crĂ©ation de la communautĂ© Queercore. Des ateliers sont aussi dispensĂ©s pour concevoir ses propres amulettes et attrape-rĂȘves, apprendre le facepainting,
mode mâinsuffle une belle dose de confiance. Je me lance dans la lecture des phrases qui sont diffusĂ©es sur la scĂšne principale. AprĂšs examen, elles sâavĂšrent ĂȘtre lâhistoire des Lettres Ă©difiantes et curieuses publiĂ©es entre 1702 et 1776 en 34 volumes qui contribua Ă lâouverture de la France aux cultures non-europĂ©ennes et Ă lâĂ©mergence du siĂšcle des LumiĂšres. Elles signeront la fin (provisoire) de ma quĂȘteâ: la cĂ©ramique, lâaromathĂ©rapie ou encore la fabrication dâencens. Puissent mes sens sâimprĂ©gner de toute cette connaissance afin de mâĂ©lever au rang de prĂȘtresse du style. SAMEDI 18 AOĂT 17h16 Je sors vidĂ©e de mon cours dâacroyoga au cours duquel je me suis fait porter Ă tirelarigot en incarnant une baleine volante (sic). Quelques mĂštres plus loin, je passe rĂ©cupĂ©rer mon Ćuvre mise au point suivant la technique du âCyanotypeâ, un procĂ©dĂ© dâimpression qui rĂ©agit Ă la couleur et teint en bleu ce que lâon a prĂ©cĂ©demment collĂ© ou peint. Pour ma part, ce seront des Ă©pis de blĂ© sĂ©chĂ©s mĂȘlĂ©s Ă des enluminures grossiĂšres. Je demeure sceptique quelques secondes avant dâaccepter que le principal, câest dâexpĂ©rimenter. Jâen tire une belle leçon de vie. Mais pas le temps de mâĂ©mouvoir puisque ce soir, câest le grand soir pour nous, la tournĂ©e dâadieux, le final. 22h20 Les lignes acid transpercent lâair, ellesmĂȘmes croisĂ©es par les projections sur les arbres de formes psychĂ©dĂ©liques et de la figure de David Bowie. La vision de ce grand manitou de la musique et de la
âIn one of the volumes of the Lettres Ă©difiantes et curieuses that appeared in Paris during the first half of the eighteenth century, Father Fontecchio of the Society of Jesus planned a study of the superstitions and misinformation of the common people of Cantonâ; in the preliminary outline he noted that the Fish was a shifting and shining creature that nobody had ever caught but that many said they had glimpsed in the depths of mirrorsâŠâ
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OH D JAD JA
CâEST LA FĂTE DE LâHUMA
On parle souvent dâexpĂ©rience, dâexpertise et de savoir-faire quand on essaye de vous convaincre de vous rendre Ă un Ă©vĂšnement⊠Mais lorsquâon parle de la FĂȘte de lâHumanitĂ©, a-t-on vraiment besoin de rappeler tout cela ? Un Ă©vĂ©nement vieux de prĂšs de 100 ans dont la 84e Ă©dition est dĂ©jĂ bientĂŽt prĂȘte Ă nous accueillir, loin du clichĂ© premier de rĂ©union prolo ; âlâHumaâ, aujourdâhui, câest surtout une bien belle fĂȘte Ă passer en compagnie de ses potes autour de rĂ©jouissances musicales venues des quatre coins du globe. Trois jours au cĆur du parc Georges-Valbon, Ă La Courneuve, câest dĂ©jĂ une belle offre. Si le retour de vacances nous reste en travers de la gorge, lâHuma nous propose une rentrĂ©e idĂ©ale pour nous amuser en oubliant notre train-train quotidien, en musique, mais aussi de façon responsable Ă travers des actions engagĂ©es pour lâenvironnement et la tolĂ©rance. Un moment hors du temps, toujours en compagnie dâartistes dâexception. Si certains se souviennent peut-ĂȘtre encore du passage de Pink Floyd en 1970 ou des Who trois ans aprĂšs, dâautres peuvent mettre leur jalousie de cĂŽtĂ© : chaque Ă©dition vaut le dĂ©tour. ReprĂ©sentants de tous les genres, du funk au rap en passant par les musiques du monde et une touche Ă©lectro pour certains, il y aura suffisamment dâartistes Ă se mettre sous la dent, quels que soient les goĂ»ts et les couleurs. Câest donc normal de retrouver sur lâune des trois scĂšnes de lâHuma Ă la fois Aya Nakamura, Shaka Ponk, Youssou NâDour, Eddy de Pretto, Soprano, Les Fatals Picards, Didier Super et Paul Kalkbrenner. Auxquels
sâajoutent bien Ă©videmment une multitude de noms connus ou fraĂźchement cueillis parmi les jeunes pousses : Pouvoir Magique, LâOr Du Commun, Dope Saint Jude, SĂŽnge, Lord Esperanza, Student Kay, Alysce ou encore le Voilaaa Soundsystem⊠En plus de sa musique, lâHuma câest aussi une bonne dose dâactivitĂ©s pour passer le temps entre deux concerts ou se reposer un peu du volume sonore. On retrouvera alors cette annĂ©e un coin MMA pour sâentraĂźner et assister Ă des dĂ©monstrations de ce sport de combat, son espace de jeux accessibles aux 7-77 ans, mais aussi des confĂ©rences et dĂ©bats sur le progrĂšs social et les valeurs de chacun⊠Sans oublier de se remplir la panse ! Comme chaque annĂ©e, il y aura de quoi faire pour contenter les affamĂ©s avec prĂšs de 400 stands et des saveurs du monde entier. Et pour ceux qui avaient lâhabitude de se perdre dans ce vaste espace hĂ©doniste, plus dâinquiĂ©tude : lâHuma a mis au point une application officielle pour accĂ©der Ă toutes les infos pratiques, les horaires des dĂ©bats, spectacles et autres projections, ainsi quâun service de gĂ©olocalisation pour vous y retrouver !
FĂTE DE LâHUMANITĂ DU JEU. 12 AU SAM. 14 SEPT. AU PARC DE LâAIRE DES VENTS, DUGNY
INTERVIEW
T/ MPK P/ NAĂS BESSAIH
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FRĂDĂRIC HOCQUARD
NUITS FRANCHES
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FRĂDĂRIC HOCQUARD
FrĂ©dĂ©ric Hocquard est le genre de mec Ă avoir bien roulĂ© sa bosse (directeur de lieux culturels et alternatifs comme Confluence ; prĂ©sident de Actif, rĂ©seau de salles festives, etcâŠ) avant de devenir, en 2014, lâadjoint dâAnne Hidalgo sur la question de la vie nocturne et de la diversitĂ© de lâĂ©conomie culturelle.
Le titre fait un peu pompeux, le type ne lâest pas, et câest plus en homme de terrain quâen technocrate que celui-ci nous a parlĂ© des nuits de la capitale, ce qui est plutĂŽt une bonne chose, avouons-le. Avec lui, nous avons passĂ© en revue les enjeux, les obstacles, les dĂ©fis et le possible avenir de notre cher monde sub-lunaire.
LE BONBONâ: La nuit nâest-elle pas
fondamentalement un espace qui rend les utopies possibles ? FRĂDĂRIC HOCQUARDâ: Oui, câest vrai que les relations sociales sont diffĂ©rentes la nuit, je ne dis pas que toutes les barriĂšres se cassent, mais elles ne sont pas les mĂȘmes. Il y a plein de nuits oĂč la vie sâest rĂ©-inventĂ©e, comme la Nuit de lâabolition des privilĂšges pendant la RĂ©volution française, la Nuit des barricades en 68⊠Le philosophe Jacques RanciĂšre a Ă©crit un bouquin qui sâappelle La Nuit des ProlĂ©taires. Il y raconte comment au XIXe siĂšcle, alors quâils bossaient 10 Ă 15h par jour, les ouvriers saintsimoniens prenaient le temps, la nuit, au cafĂ©, de penser une citĂ© utopique. Il faut lire aussi Les Nuit Parisiennes de Restif de La Bretonne, oĂč il peint avec prĂ©cision les nuits du XVIIIe. Et puis Roland Barthes, quand il dĂ©crit la faune bigarrĂ©e quâil rencontre au Palace. Câest tout ça la nuit, au-delĂ du monde de la sortie, de la fĂȘteâŠ
rendre possible la variĂ©tĂ©, la diversitĂ©, en les poussant sous toutes les formes quâelles peuvent avoir. Paris, ce nâest pas Sim City, il faut que la nuit reste cet endroit interstitiel, intermĂ©diaire. MalgrĂ© tout, la ville Ă©dicte du rĂšglement, de la norme, donc on ne peut pas faire nâimporte quoi. Rendre les choses possibles, ça veut dire aussi : «âfaites gaffe au voisinageâ». Parce que toutes les villes dans lesquelles il nây a pas eu cette sorte de compromis entre le voisinage et la nuit, la nuit a perdu. Câest trĂšs flagrant Ă Londres et Ă Barcelone, la nuit a perdu parce quâil nây a pas eu de mĂ©diation. Nous, câest cette mĂ©diation que nous voulons mettre en avant.
L.B. La fermeture de Concrete â qui avait en
balader la nuit, ce qui est la dĂ©finition mĂȘme du ânoctambuleâ. Je crois savoir aussi que vous aimez bien mettre le nez de temps en temps au Petit Palace⊠câest exact ? F.H. Oui, jâaime bien. Lionel (Lionel Bensemoun, crĂ©ateur emblĂ©matique du feu Baron et Calvi on the Rocks, ndlr) et Gypsy (son bras droit, ndlr) ont fait du super boulot. Lâendroit est clairement beaucoup mieux quâavant.
quelque sorte inaugurĂ© cette dĂ©cennie dorĂ©e â a pu paraĂźtre pour certains observateurs comme un signe avantcoureur de dĂ©clin⊠F.H. Il Ă©tait hors de question quâun club emblĂ©matique disparaisse du territoire parisien. On les a dâailleurs aidĂ©s Ă trouver un nouveau lieu. Le soutien fort affirmĂ© par la Ville de Paris montre que les temps ont changĂ©. Jâai Ă©tĂ© extrĂȘmement Ă©tonnĂ© quâAnne Hidalgo fasse un courrier, et que le conseil de Paris, dans son intĂ©gralitĂ©, gauche comme droite, ait votĂ© un vĆu de soutien. Et ce, Ă lâunanimitĂ©. Il y a 10 ans, ce genre de sujet serait passĂ© Ă la trappe. Câest bien la preuve que la nuit Ă Paris a Ă©voluĂ©.
L.B. Venons-en maintenant Ă notre sujet,
L.B. Quelles sont les spécificités de la
L.B. Je crois savoir que vous adorez vous
Paris et la nuit. Cette derniĂšre dĂ©cennie a Ă©tĂ© une dĂ©cennie dorĂ©e pour le clubbing parisien. Comment faire perdurer ce âgolden ageâ ? F.H. Le vrai sujet sur lequel on travaille, nous, Ă la Mairie de Paris, câest de rendre les choses possibles. On veut
nuit parisienne actuelle ? En quoi se distingue-t-elle des autres capitales ? F.H. Le principal atout de la nuit parisienne, câest sa diversitĂ©, sa variĂ©tĂ©. Il y a tout, on a le PĂ©ripate, lâĂ©quipe Concrete, les parcs et les jardins qui sont ouverts toute la
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nuit, les voies sur berge, le Petit Palace, la ClairiĂšre, des clubs plus conventionnels⊠bon, jâen oublie plein, mais voilĂ , il y en a pour tous les goĂ»ts. Pour que cette diversitĂ© continue dâexister, il faut la soutenir, Ă©viter les concentrations Ă©conomiques, ĂȘtre inventif, avoir des idĂ©es. Sinon, on peut vite retomber dans lâuniformitĂ©.
L.B. La géographie hyper dense de Paris
nâinflue-t-elle pas aussi sur ses nuits ?
INTERVIEW
FRĂDĂRIC HOCQUARD
F.H. Nous, on veut garder lâeffervescence
DANS Paris. Jâaime beaucoup ce qui se passe Ă Pantin, Montreuil, etcâŠ, mais pourquoi il nây aurait rien dans Paris ? Paris devrait ĂȘtre une ville-musĂ©e oĂč lâon va sâendormir et avoir juste des clubs institutionnels ? Non, lâADN de cette ville, câest dâavoir plein de quartiers festifs. AprĂšs oui, les warehouses en intra-muros, câest compliquĂ©, mais câest une histoire de place, ça.
L.B. Justement, en parlant de warehouse,
quelles sont les nouvelles du cĂŽtĂ© dâun autre club emblĂ©matique : le PĂ©ripate ? F.H. Le PĂ©ripate, câest un lieu qui a tournĂ© Ă lâexcĂšs, ce qui fait que la prĂ©fecture de police a signĂ© la fin de la rĂ©crĂ©, en disant quâil y avait des normes Ă respecter. Personnellement, jâen ai parlĂ© Ă Aladdin (le papa de la PĂ©ripate, ndlr), en le prĂ©venant quâil y avait des travaux Ă faire sâil veut quâon poursuive lâexpĂ©rience. Je lâavais dâailleurs rencontrĂ© Ă lâĂ©poque du Pipi Caca, câest Gaspard DelanoĂ© (fondateur du squat 59 Rivoli, ndlr) qui mâavait amenĂ© dedans, jâavais trouvĂ© ça marrant. Il a ensuite installĂ© le PĂ©ripate dans un bĂątiment municipal, jâai dit ok, il nous a prĂ©sentĂ© le projet, câĂ©tait dans les clous. AprĂšs, lâaspect restauration a un peu disparu pour cĂ©der la place au cĂŽtĂ© festif, or nous, on voulait
un Ă©quilibre. Câest pas grave, je suis sĂ»r quâil va rattraper le coup. Il a une convention avec la ville qui finit au mois de dĂ©cembre 2019, si tout roule et que les travaux sont faits, on discutera de la prolongation.
L.B. Il y aussi pas mal de bars musicaux qui
rencontrent des problĂšmes. Il me semble quâil suffise quâun voisin porte plainte pour quâun Ă©tablissement soit menacĂ©. Comment assouplir cette loi ? F.H. Câest un peu plus compliquĂ©. On a mis en place dans les arrondissements les plus festifs des commissions de rĂ©gulation de dĂ©bits de boisson, dans lesquels il y a les commissariats, la ville, et les organisations professionnelles. On fait le tri en fonction des plaintes, si elles sont nombreuses et rĂ©pĂ©titives sur un Ă©tablissement, lĂ , il y a souci. L.B. Cette loi, câest donc une lĂ©gende ? F.H. Oui, mais aprĂšs, ce qui est vrai, câest
â Les plaintes par rapport aux bruits de la place PigalleâŠ. Quâest-ce que je pouvais leur rĂ©pondre ? Depuis 100 ans il y a du bruit place Pigalleâ!â
ont commencĂ© Ă avancer. Je prends un exemple : Ă Londres, 30â% des clubs ont fermĂ© entre 2012 et 2016. Du coup, ils ont modifiĂ© la loi de telle sorte que si vous construisez un bĂątiment nouveau Ă cĂŽtĂ© dâun bar, câest Ă vous dâisoler le lieu, pas au bar. Je suis trĂšs demandeur Ă ce que lâon travaille sur des sujets comme ça. On ne peut plus rester sur cette lĂ©gislation du XIXe siĂšcle qui met tout sur le dos des dĂ©bits de boisson. AprĂšs, on a mis un fonds de soutien avec le Centre National des VariĂ©tĂ©s pour que les salles de concert puissent faire des travaux, ça va ĂȘtre le cas de la MĂ©canique Ondulatoire, par exemple.
L.B. La nuit parisienne, vous la voyez comment dans 10 ans ?
F.H. On va voir si ce que je vous raconte que cette lĂ©gislation est hĂ©ritĂ©e du XIXe siĂšcle, une Ă©poque oĂč le bar Ă©tait le seul lieu oĂč on vendait de lâalcool, ce qui le rendait trĂšs responsable de tout ce qui se passait autour de lui. On en est encore lĂ . Par exemple, si un bar tourne depuis des annĂ©es, quâil est aux normes dâun point de vue acoustique, et quâune personne achĂšte juste au-dessus et se plaint du bruit, elle a le droit dâacter en justice et de faire condamner le bar. Ă un moment donnĂ©, il va falloir quâon fasse rentrer cette loi dans des questions dâusage. Moi, quand jâai Ă©tĂ© Ă©lu en 2014, lâun des premiers courriers que je reçois de la part de riverains, câest des plaintes par rapport aux bruits de la place Pigalle. Quâest-ce que je pouvais leur rĂ©pondre ? Depuis 100 ans il y a du bruit place Pigalle ! Si je ferme les Ă©tablissements place Pigalle, je tue une Ăąme de Paris ! On est en retard sur les questions lĂ©gislatives lĂ -dessus, il y a des pays qui
sur la diversitĂ© va tenir ou pas. Ăa peut exploser, que tout se retrouve Ă la pĂ©riphĂ©rie, que Paris soit complĂštement gentrifiĂ©e, ce que je ne souhaite pas. Et puis il y a une chose importante : les prochaines annĂ©es, nous allons connaĂźtre des canicules Ă rĂ©pĂ©tition. Il va falloir que lâon organise notre vie, et donc la nuit en fonction de ça. Pourquoi ne pas passer Ă lâheure espagnole et dĂ©caler nos horaires ? Entre la climatisation Ă outrance et lâheure espagnole, je choisis la deuxiĂšme solution, elle est bien plus Ă©cologique. Ce changement de rythme impliquera le fait de vivre plus tard, ce qui aura une consĂ©quence bĂ©nĂ©fique sur lâĂ©conomie nocturne. Nous serons aussi immanquablement Ă la recherche dâespaces frais, et cette fraĂźcheur, nous pourrons la trouver dans toutes les anciennes caves parisiennes. En sâadaptant Ă ces nouvelles conditions climatiques, les sous-sols de la capitale vont devenir des nouveaux terrains de jeu !
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THOMAS SMITH
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JEUDI 5 SEPTEMBRE 20h Point ĂphĂ©mĂšre 16â⏠Voiron (live), Krampf, Paul Seul 00h Rex Club 8â⏠CrazyJack in da house VENDREDI 6 SEPTEMBRE 20h Dehors Brut 15â⏠Deena Abdelwahed, Ivan Smagghe 21h LaPlage de Glazart 14â⏠PWFM â Summerclub n°4 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits sur lebonbon.fr 00h Nouveau Casino Motion #10 â Paris Classic SAMEDI 7 SEPTEMBRE 00h La Java 10â⏠Trou aux Biches 00h Badaboum 15â⏠DJ Boring (live), Andy Garvey 00h Petit Bain 15â⏠Skylax House Explosion MERCREDI 11 SEPTEMBRE 19h Safari Boat La croisiĂšre de Bachar Mar-KhalifĂ© 00h Rex Club 8â⏠Overground VI w/ Moonwalk, Deviant Lads JEUDI 12 SEPTEMBRE 23h NF-34 15â⏠Jeudi Banco Closingâ: Blawan
AGENDA
VENDREDI 13 SEPTEMBRE 12h Parc Georges-Valbon 40â⏠FĂȘte de lâHumanitĂ© 23h Djoon 18â⏠Palms Trax all night long 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits sur lebonbon.fr 00h Rex Club 15â⏠Club Traxâ: DJ Stingray, Solid Blake
SAMEDI 14 SEPTEMBRE 23h NF-34 11â⏠Ellen Allien, Maxime Iko, A1ST 00h Rex Club 25â⏠Moodymann, Siler, Mad Rey 00h La Machine du Moulin Rouge 16â⏠La Mamieâs Trip w/ Marcellus Pittman VENDREDI 20 SEPTEMBRE 23h La Machine du Moulin Rouge 16â⏠Toronto-Paris â RBMF 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits sur lebonbon.fr 00h Badaboum 15â⏠Mor Elian + guests 00h Petit Bain 16â⏠Silent Servant x Ceremony NWPP SAMEDI 21 SEPTEMBRE 22h Docks de Paris 42â⏠Dream Nation Festival 2019 23h La Java 10â⏠Hors-Sol â Effluves dâamour ! 23h Dehors Brut 15â⏠Musique Vivante â RBMF MERCREDI 25 SEPTEMBRE 13h GaĂźtĂ© Lyrique Paris Electronic Week 2019 VENDREDI 27 SEPTEMBRE 21h LaPlage de Glazart 22â⏠Les Plages PsychĂ©dĂ©liques OrĂ©ades 00h Bus Palladium Bonbon Party, invits sur lebonbon.fr 00h Protocol Kamikaze Space Programme 00h Rex Club 15â⏠Techno Body Music #2 SAMEDI 28 SEPTEMBRE 12h Paris Techno Parade 2019 22h La ClairiĂšre Inner City (live), Kevin Saunderson