HYPE webzine #4

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HYPE #3

le webzine amateur des artistes amateurs

Johanna Rolle, Paul Villard, EVA PENNER, VICTOR HABCHY, NANS Benoit Courti, etc... RIVOIRE, JOYFUL KNOCKOUTS, ETC ...


COUVERTURE Johanna Rolle, www.johannarolle.com


le fabuleux sommaire de

Hype

P12

PHOTO Rencontre : Johanna Rolle,

Benoit Courti, Paul Villard Galerie : Joël Sossa, Daniel Reichow, I’m not Ana, Nicola Odemann

MUSIQUE

P38

L’actu musique : Dr. John, Jack White, Django Django, Amadou et Mariam, Alabama Shakes, De La Soul, Gossip, Norah Jones, Santigold, Quakers, Tindersticks

P45

CINE Prochainement : Holy Motors Critiques: Bellflower, Twixt

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MODE L’actu mode : Tendances été hommes/femmes 2012, Lookbook d’Alice

P47

ART Découvertes : Les carnets de Joseph, Magdalena Lamri

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P51


P63

LITTE Les livres à découvrir : D’acier, Histoires en creux, Pourquoi pas, Les murs Blog littéraire : Amanalat

CONFIDENCES

P70

A découvrir : Laforgue, Sur la route

BLOG Les trésors du net : Print and Pattern, Kuler

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P74


Agnès KR Patience Retrouvez-la sur son tumblr.








Johanna Rolle Autoportrait


PHOTO / rencontre

Johanna rolle

Interview : Michel Cariou

Nous vous avions déjà parlé de Johanna Rolle dans notre numéro de décembre : cette jeune mancelle (vivant actuellement à Rennes) nous avait étonnés par son travail remarquable sur le thème de l’homme et de la nature. Assise à la terrasse d’un café (« l’atelier de l’artiste » pour les plus curieux), non loin de la petite place Sainte-Anne située à Rennes, c’est une jeune femme très sympathique et bien élégante qui se présente à nous. Salut Johanna ! Peux-tu te présenter en quelques mots ?

J’avais déjà exposé au service jeunesse du Mans pour la première fois, mais c’est cette nouvelle envie de faire découvrir mon travail à de plus en plus de monde, et de recevoir plus de ressentis et de critiques, qui m’a poussé à faire des demandes d’expositions. J’ai donc pu exposer 15 jours au service jeunesse de Rennes, et à « l’Exposito », un salon de coiffure très original. Ensuite, durant plusieurs mois au « Sablier », à « L’Enchanté » et pour finir au « Bateau Ivre ».

Bonjour ! J’ai 20 ans et suis étudiante en Arts du spectacle. J’ai commencé la photo il y a 5 - 6 ans. C’est devenu une vraie passion, petit à petit, et je suis parvenue à décrire mes aspirations dans ce domaine ; je souhaite toucher, faire rêver, voyager. Une photographie, selon moi - comme un film, une peinture, ou une chanson - est réussie si elle raconte une histoire. Tes photos sont en ce moment-même exposées au « Bateau Ivre », un bar plutôt sympathique situé dans le centre de Rennes. Peux-tu me résumer, en bref, ton parcours professionnel jusqu’ici ? Exposer son travail de cette façon n’est en effet pas donné à tout le monde. J’ai d’abord commencé à faire de la photo uniquement pour moi et mes amis. Et puis grâce à Internet de plus en plus de gens ont commencé à me suivre. Sur Facebook les demandes en ami devenaient beaucoup trop nombreuses et j’étais plutôt contre l’idée que des inconnus aient accès à toute ma vie privée au passage. Ainsi est née ma page Facebook. À partir de là, tout s’est accéléré.

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Comment t’es venue cette idée de pratiquer la photographie, quel fut ton déclic ? Je touchais déjà un peu à la photographie, je connaissais la sensation de l’appareil photo dans les mains, mais pas encore la véritable création, la mise en scène. Mon déclic fut indéniablement le travail d’autrui, et ce grâce à la visibilité et les découvertes que permettent Internet, je crois. Je ne me suis pas réveillée un beau matin en me disant « Tiens, j’ai envie de faire de la photo ! », c’est en voyant le travail des autres que j’ai eu envie moi aussi de faire quelque chose, de créer. J’ai été très émerveillée par ce que j’ai pu voir, tellement étonnée que telle ou telle image arrive à transmettre autant d’émotion que j’ai voulu m’y mettre à mon tour afin peut-être d’éveiller en moi – et chez les autres - de nouvelles sensations, sinon les mêmes.

Retouches-tu beaucoup tes clichés ? De quelle manière ? Très peu. J’ai l’avantage de ne pas avoir Photoshop. En réalité j’ai essayé de l’installer mais je n’ai pas réussi du premier coup, et n’étant pas très patiente, j’ai laissé tomber ! Au fond ça m’arrange un peu, je n’ai pas envie de prendre goût aux retouches poussées. Les logiciels bas de gamme comme PhotoFiltre me conviennent parfaitement pour l’instant. Lorsque je retouche une photo, j’ai seulement tendance à accentuer le contraste et pousser un peu les couleurs. Il m’est arrivé une fois d’enlever un fil électrique qui faisait tâche sur un beau ciel bleu, mais ça ne va pas plus loin.

Aujourd’hui, quel matériel utilises-tu ? Canon 600D, 18-55 mm, 10-22 mm et 50 mm 1.8. Le plus gros de mon travail consiste en des mises en scènes, c’est pourquoi le 10-22 mm (grand-angle) m’accompagne où que j’aille. Je veux qu’il y ait des paysages, le visage du modèle n’est pas toujours très présent, parfois ils ne sont simplement que des corps dans un environnement. Et, plus récemment, j’ai vraiment pris goût aux portraits, et pour cela mon 50 mm m’est indispensable ! J’apprécie ces deux objectifs, pourtant très différents, autant l’un que l’autre !

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Tu as actuellement 4000 « fans » sur ta page Facebook, ce n’est pas rien ! Est-ce qu’il t’arrive d’être influencé par ce qu’attendent de toi les personnes qui suivent ton travail ?

Comptes-tu, à l’avenir, t’orienter vers quelque chose de différent ? Je ne sais pas, je n’y ai jamais réfléchi. L’homme et la nature sont mes thèmes de prédilection, ils me tiennent absolument à cœur. Chaque photo est pour moi synonyme de message. Je ne vois pas quel autre thème pourrait illustrer aussi bien ce que je ressens, ce qui compte pour moi.

Forcément. C’est difficile d’y échapper. Avec la création de ma page Facebook j’ai eu beaucoup d’encouragements, de remarques et de critiques. D’une certaine façon c’est grâce à ces personnes-là que j’ai réussi à progresser. Plus on regardait mes photos, plus j’avais envie d’en faire. Mais c’est important de garder à l’esprit ce qu’on veut vraiment montrer, ce qu’on aime faire, et ne pas être influencé. C’est une force, et j’essaie de faire au mieux ! Certains de tes modèles, comme Alice Kong ou Auriane Allaire, posent ces derniers temps pour pas mal de photographes qui ont la côte sur la toile. N’es-tu pas dérangée à l’idée de photographier des modèles « réputés » à ce point ? Auriane est une connaissance à moi, on habite dans le même coin ! J’aime bien ce qu’elle fait et c’est aussi un bon modèle. C’est vrai qu’on la voit souvent et je comprends qu’au bout d’un moment ça peut devenir lassant. Personnellement, cela ne me pose pas de souci. Quant à Alice, je l’ai rencontrée juste une fois à Paris à une rencontre entre plusieurs photographes. Le plus difficile, étant donné que nous étions tous au même endroit, avec les mêmes modèles, a été de réussir à conserver son univers. C’est ça qui compte, pas vraiment le nombre de fois où tel ou tel modèle a été photographié, ni par qui.

En parlant d’à venir (d’avenir ?) ta carrière est encore toute jeune, quels sont tes futurs projets ? Souhaites-tu vivre de ton art ? Évidemment, c’est l’idéal de pouvoir vivre de ce que tu aimes. Pourtant ce n’est pas encore un projet concret. Si j’ai de la chance, si je rencontre les bonnes personnes, si je me rends un jour compte que ça marche vraiment, pourquoi pas. Jusqu’ici la photo était pour moi un passe-temps, mais plus ça va plus je me dis que je pourrais peut être vivre de ce que je fais et j’en serais d’autant plus contente. Après ma licence je pense prendre une année pour me consacrer à différentes projets, proposer mes photos à des magazines, faire le maximum d’expositions et puis voir si ça peut décoller ! Avec Internet et les réseaux sociaux naissent un nombre incroyable de jeunes photographes amateurs. Quel est ton regard vis-à-vis de ce nouveau phénomène de « pseudo-artiste » ? Je n’ai pas vraiment d’avis à ce sujet. Si chacun y trouve son compte, tant mieux ! Il en faut pour tous les goûts. Cela n’influence pas mon travail, je pense.

Un petit mot pour la fin ? Un grand merci à tout ceux m’ayant soutenu, poussé, et à ceux qui suivent mon travail, qui me font part de leur ressentis, merci à HYPE webzine et merci à toi ! Retrouvez-la sur son website officiel et également sur sa page Facebook.

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PHOTO / galerie

Joël sossa

Texte : Michel Cariou

Originaire du Mexique, Joel Sossa est un de ces jeunes photographes amateur talentueux dont le travail ne reste pas longtemps inaperçu. Son univers, et, plus en particulier les thèmes qu’il illustre, attirent facilement l’œil ces derniers temps : ils s’inscrivent dans la tendance « Youth » du moment, comme on pourrait la nommer, ou l’art de savoir mettre en scène – lorsqu’il ne s’agit pas d’instantanéité - une jeunesse désinvolte, pleine de rêves, en quête d’aventure et de liberté. Ce jeune homme nous livre à travers ses photographies son propre monde et ce qu’il semble bien vivre au quotidien : après-midi entre amis, escapades sur les terres désertiques du Mexique, tantôt sur une montagne, tantôt près d’un lac. Outre cette intimité partagée sans pudeur, il nous étonne davantage par une fascinante maîtrise de la lumière. Où qu’il aille, Joel Sossa emmène avec lui les ingrédients magiques du rêve. Retrouvez le travail de Joel sur son Flickr.

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PHOTO / galerie

Nicola odemann

Texte : Michel Cariou

Il suffit d’aller faire un petit tour sur le Flickr de Nicola Odemann, jeune photographe originaire d’Allemagne, pour se rendre compte à quel point la nature peut parfois être belle. D’une montagne où règnent les neiges éternelles jusqu’aux grand espaces sauvages oubliés d’Allemagne où s’écoulent fleuves et lacs, en passant par des routes bordées d’immenses sapins, traversant des forêts menaçantes, Nicola Odemann arrive à capturer – à l’argentique, uniquement - des instants magnifiques d’une simplicité et d’une authenticité déconcertante. Un univers rappelant avec émerveillement certains récits du grand Jack London : rien que du beau, du sauvage, du lointain. Les choses simples sont les plus belles, dit-on. Retrouvez le travail de Nicola sur son Flickr.

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PHOTO / galerie

Daniel Reichow

Texte : Michel Cariou

De retour en Allemagne près d’Emmerich am Rhein, Daniel Reichow, la trentaine, mise sur l’utilisation d’un appareil photo argentique dont il fait lui-même les tirages : poussières, rayures, grain, brûlures, couleurs inversées ou mélangées, c’est un véritable amalgame de détails qui rendent à la photographie cette authenticité aujourd’hui trop souvent oubliée. Outre ce côté vintage, ce jeune photographe allemand possède avant tout un univers profondément mystérieux et intriguant, alliant parfois poésie et honnêteté, où les visages ne sont que très rarement mis à découvert. Il semble aussi s’amuser à superposer des pellicules qui n’ont parfois rien en commun : un résultat étonnant et difficilement explicable, magique. Retrouvez le travail de Daniel sur son Flickr.

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PHOTO / galerie

Ana santl I’m not ana Délicat et poétique, parfois sombre, parfois enfantin, souvent décalé, l'univers d'Ana Santl s'installe au fil de ses photos, assemblant ses multiples facettes. Un univers qu'elle estime personnel, mais pas forcément original : « Je pense que j'ai mon propre univers en général, mais tout le reste du monde en a un aussi. Je me sens comme une totale étrangère dans mon propre univers la plupart du temps, et la photographie est plutôt un moyen d'y échapper. » Mais plus qu'à une fonction d'échappatoire, Ana ramène également son art à son rôle premier, celui du souvenir : « J'ai besoin de prendre des photographies pour me rappeler des choses, des endroits, des gens, des sentiments. De tout. » Quant à l'énigme de ce nom, « I am not Ana », il est bien « vaguement inspiré de la « Trahison des images » de René Magritte. C'est également une combinaison de mes anciens pseudos, parodie de la prononciation de mon nom. » Un nom empreint de paradoxe et qui pousse à la réflexion, à l'image de son travail. Retrouvez-la sur sa page Facebook.

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Texte : Julie Robin






PHOTO / rencontre

benoit courti

J'ai ensuite posté quelques photos sur internet et j'ai eu un retour incroyablement positif, ce qui m'a encouragé à continuer, à creuser, à explorer et à prendre un peu confiance en moi.

Comment ta passion pour la photographie est-elle née ? C’est la découverte qui vous fait aimer les choses. Les premières images marquantes que vous admirez, celles qui restent gravées dans votre mémoire. La curiosité vous donne ensuite envie d’en voir davantage, d’être touché à nouveau, d’être dérangé, de ressentir encore. Je me revois à dix huit ans réunir soigneusement toutes les photos que j’aimais dans des classeurs, rêveur devant Avedon, Ritts, Lindbergh, Demarchelier. Ce sont eux qui m'ont donnés le goût.

Avec quel matériel travailles-tu ? J'utilise aujourd’hui avec un Canon 5D mark II et différentes focales fixes, un peu de lumière… Je n’accorde pas d’importance particulière au matériel, je lui demande simplement de répondre à mes attentes, je ne suis pas un technicien. Concernant les portraits j'aimerai pouvoir passer au moyen format.

Quel est ton parcours jusqu'à aujourd'hui ? J’ai commencé à prendre mes premières photos lorsque j’avais une vingtaine d’année avec un petit argentique. J'ai ensuite embrassé une carrière de compositeur-réalisateur mettant de coté la photo faute de temps, mais continuant de dévorer un maximum de livres photos et d'expositions. Il y a quelques années, je suis parti habiter en Allemagne, j'ai recommencé à faire un peu plus de photos là bas mais c'est lorsque je suis revenu habiter en France en 2010 que j'ai eu un vrai déclic. En revoyant mes proches j’ai eu envie de faire des portraits, quelque chose de simple, de direct. J’ai alors acheté un peu de lumière puis un fond noir et j’ai fait mes premiers essais.

Texte : Manon Mella

Quels sont tes sujets de prédilection ? Les sentiments quel-qu’ils soient, la symbolique. Y a t-il quelque chose en particulier que tu cherches à transmettre dans tes photographies ? (la sensation du temps, simplement l'esthétique...)

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Je suis à la recherche de l’émotion simple, pure. Prise sur le vif ou mise en scène, peu m’importe tant que je me sens ému en regardant l’image. J’aime la combinaison du symbole et du moment, cet instant clef. J'essaye le plus possible de donner du sens, que les photos veuillent dire quelque chose, là où le "c'est beau" ne suffit pas.


Quels sont tes projets à court terme ? Dans quel milieu de la photographie te vois-tu ?

Y a t-il des contraintes à la pratique de la photographie ? Il faut bien penser à recharger les batteries et ne pas égarer les cartes mémoire. Mis à part ça, je ne vois pas... Après si vous décidez d'en vivre, c'est une autre paire de manche.

En parallèle de mes projets personnels, on me commande de plus en plus de photos de presse pour des artistes, j'aime beaucoup ces rencontres, c'est très enrichissant.

Quelle est ton actualité, tes projets ?

Comment organises-tu tes shooting ?

J'aimerais commencer à exposer, chose que je n'ai encore jamais fait pensant que je n'avais pas encore assez d'image pertinentes à proposer. Mon activité de photographe est assez récente, je découvre doucement.

A vrai dire je n'organise pas grand chose, il y a toujours une grande place à l'improvisation même s' il y a toujours l'idée d'un thème avant tout. Je note les idées au fur et à mesure, certaines images sont nées d’envies très précises, d’autres sont le fruit de l’instant. En général, je consacre davantage de temps à la réflexion qu’à la prise de vue elle même.

Trois adjectifs pour définir ton travail ? Intime, intense et profond, autant que faire se peut.

Quelles sont tes sources d'inspiration ? et quels artistes t'inspirent par la même occasion ?

Un petit mot pour les lecteurs ? Rêvez !

Tout est inspiration, cinéma, expositions, musique, la vie, les autres... J'aime regarder des images, fouiller, découvrir encore. Les photographes dont j’apprécie le travail sont nombreux, ils m’ébahissent. Il y a tant de choses que je ne saurai faire, j'adore me prendre des « claques », c'est stimulant. Que penses-tu de la photographie d'aujourd'hui ? La même chose que celle d'hier. J'aime les images fortes, censées, les belles lumières, le soin apporté au cadrage, la pertinence d'un angle, le choix d'un sujet... Tous ces éléments peuvent se retrouver aussi bien dans une image prise en 1975 qu'en 2012. Une belle image reste une belle image, elle traverse le temps, c'est à ça qu'on la reconnait.

Découvrez son travail sur son website officiel.

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Paul villard Photo : ThĂŠo Gosselin


PHOTO / rencontre Texte : Michel Cariou

Comme tant d’autres, Paul Villard, jeune photographe français habitant Paris, photographie ses amis, la vie, sa vie. Cependant, rares sont ceux qui savent aussi bien le faire. D’un soleil couchant, illuminant une bande de potes aux allures d’adolescents immortels, jusqu’au tumulte des corps, de la beauté et parfois même de la nature, Paul arrive à nous transporter dans un univers admirable dont il est difficile de décrocher.

Salut Paul ! Peux-tu te présenter rapidement ? Je m’appelle Paul Villard et j’ai 23 ans, tout simplement. Qui es-tu, que fais-tu dans la vie, et surtout comment ça va ? Qui je suis ? Difficile à dire. Un mec de 23 ans qui sort d’une école d’art. Du coup, un type un peu branleur qui n’a pas trop de sous mais qui fait avec. En fait, le plus gros de mon taf consiste à chercher du taf, que ce soit comme graphiste ou photographe. Voilà pour ce que je fais dans la vie. Mais je fais aussi plein d’autres trucs parce que bon, il faut bien s’occuper. Du coup je bois pas mal de bières avec les copains, je me promène, en ce moment je matte même Roland Garros à la télé, enfin tout un tas de trucs quoi. J’essaie aussi de rencontrer des gens intéressants et je prends un maximum de photos. Sinon, ça ne va pas trop mal mis à part quelques problèmes de dos qui m’ont handicapé ces derniers temps. Le prix à payer quand on a un passé de skateur et un dos de merde à la base.

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Comment t’es venue cette passion – s’il s’en agit bien d’une - pour la photographie ? Et depuis quand ?

La plupart de tes clichés sont marqués par cette même empreinte qu’on retrouve beaucoup dans le travail de ton entourage et de tes amis proches si je ne dis pas de bêtise : Théo Gosselin, Yougo Jeberg pour ne citer qu’eux. Des soleils rasants l’horizon, des photos prises sur le vif, elles transpirent la vie autant que la jeunesse et elles font surtout éternellement rêver. Toutefois tu photographies aussi des modèles, que ce soit en extérieur ou en studio. Comment définirais-tu vraiment ton style ?

Bien-sûr que c’est une passion, et ça ne peut pas en être autrement. Elle vient d’un goût prononcé pour l’image et aussi forcément pas mal de mon entourage. C’était aussi une manière de remédier au dur labeur du graphisme. La photo pour moi à la base c’était du repos, une manière de créer beaucoup plus simple et efficace que le graphisme. Mais très rapidement on arrive à la limite de ce processus et c’est à partir de là que les choses commencent à se compliquer. Depuis quand ? Je n’en sais trop rien.

Je ne crois pas être en mesure de définir mon style, il est sûrement trop tôt. On est tout le temps à la recherche de nouvelles choses. J’aime essayer des trucs, découvrir des endroits, des techniques que je ne connais pas. C’est évident qu’une partie de mon travail se rapproche de celui de Yougo et de Théo parce qu’on a beaucoup évolué ensemble et qu’on est aussi très proches (on vient de la même école, on est potes…) mais je ne veux pas m’arrêter à ça, j’aime dix milliards de choses que ce soit en photo ou dans la création en général et c’est pourquoi je ne peux pas vraiment répondre à cette question : je suis sans cesse à la recherche de nouvelles expériences. C’est aussi pour ça qu’en ce moment je prends un peu de recul, j’ai de nouvelles envies et j’aimerais laisser cela mûrir tranquillement…

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Photo : Jalis Vienne



Quels sont tes principaux sujets d’inspiration ?

Le problème c’est que j’ai vite tendance à être en manque lorsque je ne fais pas de photo pendant un certain temps, et puis il faut faire attention : on en arrive parfois même à apprécier ce qui nous entoure qu’à travers l’objectif.

Ah, l’inspiration ! Elle peut venir de partout et des fois elle peut ne pas venir du tout. C’est bien là le souci d’ailleurs, mais bon je crois qu’elle vient le plus souvent des gens, que ce soit des personnes que j’admire, de mes proches, de mes potes ou des rencontres. J’aime aussi parfois être seul pour réfléchir à certaines choses, mettre en place des idées, comme en ce moment. Pourtant je ne suis pas du tout un solitaire, j’aime beaucoup trop le chaos qu’engendre la foule, le monde qui m’entoure. Malheureusement c’est quelque chose qui possède un double tranchant parce que c’est ce monde qui m’inspire et qui me donne envie de faire tout un tas de trucs, mais c’est ce même monde qui me fatigue, qui pompe toute l’énergie dont j’ai besoin pour agir. L’idéal c’est de trouver un juste milieu et de savoir s’en servir sans se laisser happer par celui-ci. As-tu été influencé par un artiste en particulier ? Beaucoup même ! J’aime énormément le travail de Ryan McGinley ou d’Ellen von Unwerth pour ne citer qu’eux. Cependant j’évite de trop regarder le travail des autres pour justement ne pas me laisser influencer. Mon entourage et la musique m’influencent beaucoup également.

S’agirait-il, pour toi, d’un éventuel gagne-pain pour les années à venir ? Si oui, es-tu confiant ?

Qu’est-ce qui te pousses à photographier ? Que préfères-tu dans ce travail ?

Beaucoup d’artistes préfèrent ne pas passer à l’étape supérieure : lorsque tu commences à gagner ta vie grâce à ton art et/ ou à ta passion, tu te retrouves parfois dans l’obligation de le faire davantage par nécessité que par plaisir. Évidemment, j’aimerais gagner ma vie en faisant ce que j’aime. Par contre, non, je ne suis pas du tout confiant mais je crois que c’est une bonne chose : c’est le propre d’un créatif de ne pas avoir confiance en lui, sinon à quoi bon. J’aime travailler sur commande car ça représente pour moi un défi et c’est toujours bon à prendre.

La photo devient très vite une addiction, justement pour les raisons que j’évoquais plus haut. On parle beaucoup d’instantané dans la photo mais c’est aussi très instinctif. Lorsque tu publies une photo, elle ne t’appartient presque plus, tu l’oublies, il faut passer à la suivante. C’est comme ça que je le conçois et c’est ce que j’aime dans ce travail, il te pousse à continuer, à aller de l’avant.

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Quel matériel utilises-tu ? Argentique ou numérique ? Pourquoi ? Les deux. Les gens qui disent que l’argentique se meurt à cause du numérique sont à côté de la plaque. Ce sont deux approches complètement différentes, les deux techniques n’ont rien à voir. Il faudrait se poser deux questions : « Qu’est-ce que tu aimerais montrer aux gens ? » et « Comment faire pour le leur montrer, pour qu’ils s’y intéressent ? » C’est là que la technique entre en jeu. Des projets futurs dans ce domaine ? Beaucoup, mais je ne préfère pas en parler. Peut-être par superstition… Un petit conseil à donner aux débutants ? Commencez par faire les choses uniquement pour vous, tout en vous posant les deux questions situées plus haut. On sera toujours des débutants. Un dernier mot ?

Un grand merci à Paul. Retrouvez-le sur son website et sur sa page Facebook.

Je ne vais pas me relire au risque de trouver tout ce que je viens de dire ridicule !

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MUSIQUE / actus

SORTIES ALBUMS

Texte : Paul-Julien Roux

urd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on ree beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se

Alabama Shakes - Boys And Girls

Blues Revival Le revival est à la mode. Il suffit d’apprécier les cartons plus ou moins récents d’Amy Whinehouse et d’Adele (entre autres) pour le constater sans équivoque. Comment y échapper ? Le cas d’Alabama Shakes est caractéristique de cet état de fait. Malgré un album plutôt bon, sonnant exactement, au grain près, comme il y a une quarantaine d’années, je profite de cette sortie pour pousser mon coup de gueule : sans vouloir faire fi des riches racines du XXème siècle, cet esprit revival ne pointet-il pas clairement un criant (criard) manque d'inspiration, de création, à l'image de notre époque, en dedans, nonchalante, terne ?

N'est-il pas représentatif, caractéristique de notre génération blasée, des affres de notre société de consommation à outrance ? Où sont passés le goût de la création, le talent, l'inventivité ? Que reste-t-il des explorateurs, des défricheurs des décennies précédentes, des conquistadors du rock, du blues, du jazz, de la soul, ceux qui allaient créer de toutes pièces (ou presque) le funk, le reggae, le punk, le disco, le rock progressif puis le hardrock, le hip-hop, l'électro, la new-wave et j'en passe et des meilleurs ? Le débat est lancé…

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Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de

Django Django

Improbables et illégitimes mariages La première livraison de Django Django, jeune groupe originaire une fois n’est pas coutume d’Ecosse, et plus précisément d’Edimbourg est LA bonne surprise de cette première partie de l’année 2012. Leur musique métissée vient apporter une pierre de plus à l’édifice en restauration de la musique pop. Tout au long de cet effort éponyme, d’habiles nappes électroniques habillent intelligemment les vagues successives nées d’influences riches et diverses qui transpirent et déferlent telles des tsunamis. Dans ce disque invitant aux voyages (dans l’espace et dans le temps), on a comme l’impression tenace de croiser les Beatles, Les Beach Boys, Vampire Weekend, Metronomy, de traverser le désert d’Egypte, le Sahel, la Californie, les îles britanniques bien sûr, de multiplier les expériences psychédéliques et hallucinatoires, les hauts et les bas, le tout pour un résultat vraiment rafraîchissant et assez unique. A découvrir…

rd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nomes pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et techniques.

Quakers

Hip-Hop cinq étoiles Lassé de la médiocrité générale des productions récentes d’un style en net déclin, Le génial producteur et accessoirement cerveau de Portishead, j’ai nommé Geoff Barrow, entreprend une vaste rénovation du Hip-Hop, le vrai, celui des caves moites et sombres, pas celui des strass, des projecteurs et du potage prédigéré pour teenagers. Le résultat de cet ouvrage titanesque est tout simplement impressionnant, net et sans bavure.

En quarante-et-un morceaux qui ne dépassent jamais les trois minutes, une production monstrueuse et pas moins de trente-cinq MC’s, la messe est dite, merci, le spectacle est terminé, circulez, il n’y a plus rien à voir. Sur place, tout est dévasté, et l’herbe n’est pas prête de repousser après le passage de Quakers.

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Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et techniques.

Santigold Master Of My Make Believe Ladies Power !

Quatre ans après l’excellent Santogold, cette native de Philadelphie exilée à New-York revient en forme avec un (presque) nouveau nom et son deuxième album en poche. Digne représentante de cette génération furieusement contemporaine d’amazones ethno-punk apparues avec M.I.A. au milieu des années 2000, Santigold a toujours tenue à faire valoir sa différence malgré les étonnantes ressemblances : plus rock, moins digitale, plus occidentale, sa musique explore de nouvelles voies et évite de justesse l’accroc du deuxième album, qui en a vu plus d’un s’y casser les dents.

Après un début tonitruant (L’enchaînement de Go !, Disparate Youth et God From The Machine est assez impressionnant), l’inspiration de cette boulimique de featurings se tarit un peu avant de redécoller sur la fin avec le très pop The Keeper. Même si l’album semble se bonifier avec le temps, le résultat reste quand même assez inférieur à sa première fournée qui avait placé il est vrai la barre très (trop) haut.

Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nom-

De La Soul : First Serve Retour vers le futur

Les vétérans de De La Soul ont de beaux restes. Ils le prouvent avec classe sur leur dernière production en date remplie à en craquer de pépites travaillées avec soin et rafraîchies par la production de deux français inconnus et énigmatiques (Chokolate et Khalid). Le résultat s’apparente à un véritable travail d’orfèvre, est très old-school, bourré d’un humour désopilant et avec un sérieux accent frenchie. C’est très groovy, funky, un hip-hop de fête donc, qui n’a pas la prétention de se prendre trop au sérieux, renouant avec un passé que l’on croyait révolu, à des centaines de lieues du rap-business. Eux au moins savent d’où ils viennent, qui ils sont et où ils vont. Tout cela à la fois, et franchement, ce n’est pas rien. - 41 -


Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et

Norah Jones -Little Broken Heart

Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et tech-

Tindersticks - The Something Rain

Au chat et à la souris

Envoûtant jour de pluie

Dix ans après l’immense succès de Come Away With Me, La fille du légendaire Ravi Shankar s’associe avec Brian Burton, alias Danger Mouse, compositeur et producteur de génie (Gorillaz, Gnarls Barkley, Black Keys…) pour un album pop tout en douceur et en finesse. Après le tube Black, présent sur l’album Rome du deuxième nommé et sorti l’an dernier, la rencontre des deux talents promettait. Elle ne déçoit pas. Burton, qui se pose dorénavant comme le sparring partner idéal est fidèle à ses principes et habille la magnifique voix de Norah d’arrangements cliniques, nous offrant au final une œuvre à la grande puissance harmonique et mélodique, fortement émotionnelle en somme, d’autant que les textes, conceptuels, tournent essentiellement autour de la rupture et de la déception amoureuse. Le résultat est beau, à la fois léger et dense, et il se savoure d’une traite, comme en apesanteur.

Les Tindersticks, avec cette dernière fournée, apparaissent clairement comme au sommet de leur art. Méfiance toutefois au devant de la mélancolie pernicieuse qui s’échappe insidieusement de cet album aux accents parfois morbides mais mis en œuvre avec une telle beauté qu’il est bien difficile de ne pas tomber (après un certain nombre d’écoutes il est vrai) sous le charme. On oscille perpétuellement entre une soul viscéralement moderne à la Massive Attack époque Blue lines et des références plus classiques façon Isaac Hayes ou Marvin Gaye sous antidépresseurs. Arrivé au bout, on est comme lessivé, repu suite à ce déchaînement de sentiments diffus, cette cascade d'émotions diverses, parfois contradictoires mais satisfait de ce voyage dans des contrées à la fois hostiles et hospitalières, accidentés et poétiques, propices à la méditation et à la paresse contemplative. Malheureusement, toutes les bonnes choses ont une fin... Une fois revenu à bon port, une seule idée nous obsède : retourner encore et encore dans ce pays vierge et enchanteur, malgré le danger et le risque de contagion.

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Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les

Gossip - A Joyful Noise

Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunité

Dr. John - Locked Down

En mode Gossip

Tempête sur le Bayou

Figure fantasmagorique, icone trash, mais aussi porte drapeau haut en couleur de l'homosexualité taille XXL, les adjectifs épicés et les superlatifs ne manquent pas pour caractériser le personnage emblématique de Beth Ditto. Elle et son groupe, Gossip reprennent du service pour un virage pop vertigineux (voire disco), à des années-lumière de l’esprit punk qui les avait habités jusque-là… Faut-il y voir une prise de risque artistique ou une simple réflexion avec une arrière-pensée purement commerciale ? Difficile à dire.

Le monstre sacré Dr. John, accompagné pour l’occasion de Dan Auerbach, l’excellent guitariste des Black Keys, et de tout un tas d’autres musiciens talentueux, prend les commandes pour un voyage inoubliable sur les rives du Mississipi. Attachez vos ceintures, les turbulences s’annoncent nombreuses mais jouissives. L’atmosphère poisseuse de la NouvelleOrléans et par extension de la Louisiane suinte de toutes parts de ces dix hymnes épiques au groove ravageur, entre incantations vaudous et fièvre du Bayou.

Deux choses sont sûres, les fans de la première heure et les puristes passeront leur chemin tandis que personne ne pourra échapper cet été à Move In The Right Direction, qui s’annonce comme LE tube que l’on va se manger à toutes les sauces, à la radio, à la télé, dans les campings, sur les plages, et ce certainement jusqu’à l’indigestion. Pour le reste, malgré un potentiel intéressant, le tout manque quand même un peu de substance et s’avère tiède, voir fade par moments. Par contre, il y a fort à parier que le succès commercial sera au rendez-vous. Tant mieux pour Gossip. Tant pis pour les puristes.

Difficile de sortir indemne de cette jungle impénétrable mais toutefois habitée, de se remettre des bijoux atemporels et anachroniques qui ornent ce moment de magie pure. Le tout orchestré par un vieux, grand et charismatique gourou à plumes qui n’a qu’un seul objectif : vous envoûter. Et croyez-moi, une fois que vous aurez goûté à sa religion de blues et de jazz, que vous l’aurez appréciée à sa juste valeur, vous ne pourrez plus vous en passer.

Gossip - A Joyful Noise

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Amadou et Mariam - Folila

C’est le parcours habituel, on forme un groupe, on commence à

A la folila

Amadou et Mariam reviennent en forme, quatre ans après l’excellent et plébiscité Welcome To Mali , accompagnés de toute une troupe de guests plus prestigieux les uns que les autres. A l’écoute, le résultat est à nouveau très probant et lorgne de plus en plus vers l’occident tout en renforçant ses fières racines africaines. La plus-value apportée par les nombreux invités (Bertrand Cantat en tête, de retour de l’enfer) est indéniable et donne une couleur originale au disque, malgré le risque initial pour le duo, finalement évité, de perdre son essence et d’offrir un patchwork de pistes désincarnées.

Aucun doute, et une fois les dernières réticences balayées, ce cohérent Folila conforte les deux maliens dans leur statut d’ambassadeurs mondiaux et universels de la musique africaine. Il réchauffe également l’âme et le cœur à travers un tourbillon tribal d’influences multiples et évidemment métissées, celles d’un monde idéal et espéré, réconcilié, où le continent originel aurait enfin toute la place et le rang qu’il mérite.

Jack White - Blunderbuss

’est le parcours habituel, on forme un groupe, on commence

Edward aux doigts d’or

Jack White, pour ceux qui ne le connaissent pas, est la moitié pensante des White Stripes, le groupe à l’origine du désormais mégatube des stades, Seven Nation Army. Mais pas que. En plus de sembler sortir tout doit d’un film de Tim Burton, il est aussi un artiste reconnu pour son talent de musicien et de compositeur. Ces dernières années, suite au split du groupe nommé plus haut qu’il formait avec Meg White, il a multiplié les collaborations plus ou moins prolifiques. Arrive cette année son premier album solo, Blunderbuss.

L’étrange projet de monsieur Jack est un disque protéiforme, à la croisée de nombreux chemins où le sosie officiel de Johnny Depp s’amuse à détourner les standards hyper-codés de la musique américaine, soufflant souvent le chaud et parfois le froid. On alterne donc, au fil de l’œuvre, entre divers sentiments : on a envie par moments de crier au génie, à d’autres de soupirer en se disant que tout cela est bien lisse et très banal, déjà entendu mille fois. A la fin toutefois, le positif l’emporte : Blunderbuss est un très bon album de rock contemporain. C’est bien là l’essentiel.

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CINE / actus

prochainement en salle

Texte : Emilien Barthoulot

Holy Motors Pourquoi on l'attend ? Tout d'abord parce que cela faisait 13 ans que Leos Carax n'avait pas sorti de long-métrage. Ensuite, parce que le casting est plus qu'intriguant : Denis Lavant, Eva Mendes ou encore Kylie Minogue ! Enfin, parce que le synopsis qui nous parle d'un récit de 24 heures dans la vie de M. Oscar, étrange acteur voyageant de vie en vie (tour à tour meurtrier, mendiant, veillard ou encore père de famille se) révèle assez déconcertant. Un film mystérieux que la bande annonce ne permet pas vraiment d'éclaircir, comme pour nous laisser tout le plaisir d'en découvrir les secrets dans les salles obscures.

Sortie : 4 juillet 2012

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critiques Twixt Dans son dernier film, Francis Ford Coppola prend un malin plaisir à stimuler nos sens en passant du registre tragico-fantastique à celui de parodie de film d'horreur de série B, tout en gardant une cohérence et une authenticité remarquable à son récit, racontant l'enquête d'un écrivain raté, Hall Baltimore, sur un massacre ayant eu lieu dans une petit ville des Etats-Unis afin d'en faire un roman. Val Kilmer est plus que crédible dans ce rôle et l'esthétique du film, notamment lorsque le spectateur est plongé dans les rêves de Hall, est d'une beauté saisissante. Malgré son côté un peu kitch et certaines scènes ou apparitions déconcertantes, Twixt est une œuvre complètement envoutante d'un bout à l'autre. Coppola réussit ici un tour de maître, sans utiliser tout un panel d’artifices ou d’effets spéciaux en tout genre, mais réalisé avec une sincérité remarquable.

Bellflower

Deux jeunes amis un peu paumés qui ne croient plus en grand-chose et qui occupent le clair de leur temps à se préparer à l’arrivée d’une éventuelle apocalypse, voilà le thème du tout premier film du jeune réalisateur américain Evan Glodell. Mais les projets fous de Aiden et de Woodrow vont être perturbés par l'arrivée d'une jolie jeune femme dans la vie ce dernier. L’esthétique originale, la violence à fleur de peau de certaines scènes couplées au juste portrait d’une jeunesse en déroute et à une bande son de grande qualité (mention spéciale au talentueux Jonathan Keevil), font de ce film déglingué une œuvre touchante et profondément marquante. Malgré le fait que le réalisateur ait parfois voulu en faire un peu trop pour son premier coup d’essai, le résultat en reste très convainquant et on ne sort pas indemne de ce film au charme vénéneux. Chapeau !

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ART / découvertes

Les carnets de Joseph Joseph est un dessinateur en noir et blanc. Ses dessins de visages ou de crânes aux yeux vides et blancs sont noirs de mélancolie. Jeune artiste, Joseph commence à se faire une réputation sur la toile. Au premier abord, ses dessins peuvent effrayer mais il faut tout regarder, longtemps, fixer ces personnages et lire leur histoire pour plonger dans cet univers. Certes Joseph dessine bien, mais ce n'est pas seulement un bon dessinateur. Reprenant le thème de la vanité sur un ton plus moderne, Joseph travaille autour d'un univers fantasmagorique, peuplé des chimères de la dame blanche, ce fantôme errant entre deux mondes à cause d'une histoire d'amour malheureuse. Il traite de sujets graves et profonds avec la légèreté d'un coup de crayon. Sa touche ressemble à celle de Klimt ou de Schiele, à qui il fait lui-même référence, y apportant en plus une mythologie d'éternel. Il aime aussi beaucoup les mots et a réalisé une suite de dessins où il associe un dessin abstrait, constitué d'un trait discontinu, à un poème. Ses dessins servent à illustrer ses textes. Finalement, noir et blanc ne signifie pas toujours manichéen. Ici, ce serait une attente dans le Styx. Son histoire des allumettes qui se consument, allégorie de l'amour non réciproque, est un exemple de cette vie d'entre deux. Retrouvez ses carnets sur son website.

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Magdalena Lamri

Les tableaux de Magdalena Lamri rappellent les corps de Lucian Freud à la recherche d'expressivité. A ces corps, elle ajoute l'univers du bestiaire. Et tout cela s'efface parfois sur la toile. Après des études artistiques, elle prend rapidement le pinceau et ne peut plus s'en passer, commençant à peindre. Aujourd'hui, elle expose dans plusieurs galeries. Son univers pourrait presque être enfantin par les couleurs et l'innocence qui s'en dégage. Mais les personnages nous fixent, se décomposent, et même la peinture semble se déformer. S'opposant aux installations platoniciennes qui font loi par exemple, Magdalena revient à une exploration de la peinture pour en dépasser les possibilités et à un univers du rêve que l'on essaierait de décoder.

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ART / découvertes

J'ai lu Le portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde J'ai commandé une petite frite au fast-food J'ai lu Théorie et design à l'ére industrielle de Rayner Banham J'ai visité les Invalides J'ai regardé Le Mépris de Jean-Luc Godard Juste après j'ai regardé Secret Story Je suis allée à un colloque de sémiologie J'ai étudié les temples grecs du Sud de l'Italie J'ai écouté une conférence sur la stéréotomie au XVIIème siècle J'ai écouté Barbara J'ai longtemps observé au Louvre les autoportraits de peintres En revenant dans le bus j'ai écouté Vampire Weekend En même temps, je lisais Oscar Wilde J'ai regardé les œuvres de Fabian Ciraolo Je suis allée voir Cosmopolis avec Robert Pattinson La philosophie de l'éclectisme au XIXème siècle n'avait plus aucun secret pour moi J'ai regardé le festival de Cannes J'ai écouté Paganini J'ai regardé la bande-annonce de Laurence Anyways de Xavier Dolan J'ai lu Bachelard J'ai lu Elle J'ai lu l'article sur les stock-options en Europe dans Libération J'ai mangé un kebab J'ai actualisé mon tumblr Je me suis posée des questions sur Blaise de Parme Éloigner le futur et rapprocher le passé pour créer le présent. Voilà.

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http://maupassantisswag.tumblr.com/

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Texte : Florence Bousquet


MODE / actus

tendances femme Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et techniques.

Montrez la couleur

Bon, les exams sont finis, le soleil brille c’est chouette non ? Donc qui dit soleil, dit playa et qui dit playa, dit MAILLOTS DE BAIN TROP SEXY DE LA MORT QUI TUE. Alors cette année, bikini ? Trikini ? Bandeau ? A poil ? Haha. Concernant les couleurs, ce sera soit du flashy, soit du pastel. Pour celles qui ont les moyens, Princesse Tam Tam a sorti une jolie collection pour cet été.

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Personnellement, je n’aime pas des masses. Je trouve les couleurs assez fadasses mais bon les coupes sont bien faites. Sinon H&M a cartonné ! Des modèles originaux, coupes parfaites, assez sexy, nickel pour se pavaner sur la plage telle une déesse.

Pour les femmes fortes, sachez que la blogueuse BIG BEAUTY a également sorti sa collection de maillots de bain en collaboration avec La Redoute ! Une jolie collection nommée « Cupcake » toute pimpante, toute sucrée, toute smooth ! Bah oui je pense aux femmes fortes parce qu’elles aussi méritent toute notre attention.

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Pour sublimer vos petits petons, rien de tel que les vernis !!! Et la marque Essie est faite pour vous ! Des couleurs sublimes, une tenue parfaite, Essie a fait une remarquable entrée dans le monde du cosmétique et elle le vaut bien ! Et pour finir, pas de vacances sans les lunettes de soleil qui vont avec, alors voilà une sélection de modèles assez cool dont je veux vous faire part.

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Je vous présente une collection que j’affectionne tout particulièrement, la collection Minelli x Punky B ! Je trouve que la collaboration est parfaitement réussie ! Des modèles assez ethniques et les pochettes sont à croquer ! Les chaussures aussi bien entendu. Au niveau du prix, cela va de 119 à 129 euros pour les chaussures et au niveau de la petite maroquinerie je n’en sais rien du tout !

Sur ce, bonnes vacances à vous tous ! Pour ma part ça s’annonce BUENO.

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Texte : Julie Héry


MODE / lookbook




Modèle : Alice Kong Photo : Jalis Vienne


MODE / actus

tendances homme Parfum d’été

Aujourd’hui, sur la scène des nouveaux talents qui veulent percer, on retrouve beaucoup de candidats. Les opportunités sont nombreuses pour se faire connaître. A chaque numéro, vous retrouverez des bons plans musicaux et techniques.

Fini la grisaille, fini le bitume et fini les tristes mines déconfites à l’annonce des prévisions météorologiques d’Evelyne Dhéliat, l’été pointe enfin le bout de son nez et nous offre une trêve de bien-être légère et colorée. Légère et colorée tout comme la garde robe masculine de cette saison. La Mode, devançant comme toujours nos envies, propose pour cet été l’image d’un homme émancipé qui se dévoile tout en subtilité. Shorts de ville, chemises entrouvertes, nudité suggérée, furtive, évoquée par le biais de chemises en voiles de coton, ou autres mailles courtes ou longues en résilles effet moustiquaire découvrant habilement des détails de peau. Loin de se limiter à ces effets de matière, la guerre des tendances se livrera entre les adeptes d’épures au contraste graphique de noir et de blanc, et les fervents défenseurs d’une explosion de couleurs vitaminées.

Short de ville Tendance inévitable pour les plus frivoles comme pour les plus sages, le short, vêtement masculin emblématique de l’été, s’invite (vu depuis déjà quelques saisons sur les podiums) dans nos gardes robes citadines. Fini la ségrégation vestimentaire homme/ femme, l’heure est à la parité des styles et ces messieurs ont également le droit au confort urbain, dévoilant par la même un mollet qui a tant de fois créé la polémique. Mais attention, pas question de ressortir de son placard le short camel multipoche de randonnée, la version été 2012 se fait élégante et citadine. Plus fité, plus court, il reprend les codes des pantalons de cette saison. Popelines de coton, matières techniques, jean et parfois même en soie comme au très remarqué dernier défilé D&G, le short se coordonne avec sa tenue et se porte de façon systématique avec une chemise pour le rendre plus élégant. - 59 -


Black & White Déclinée de sa version hivernale, la tendance Black and White a envahi les podiums des créateurs les plus Avant-Garde. Total look White comme chez Dior Homme ou chez Yves Saint Laurent, le White se porte en toute décomplexion. Mix de tendances à lui seul, le blanc, Off White, proche du blanc cassé, ou optique se porte autant slim qu’over size, autant épuré que superposé. Plus évident, et plus facile, le mixe noirblanc trouve sa place de façon évidente dans un vestiaire urbain aux accents d’été avec une touche edgy contrôlée. Référence à l’univers du rock’n’roll chez Lanvin Homme, le pantalon blanc se porte accompagné de boots montantes effet godillot. Plus cool, dans un esprit estival très chic, la très élégante ligne Hermès Homme propose le mix noir en blanc en jouant sur des effets de mailles. Lins tricotés ajourés à porter en contrasté avec un pantalon blanc ou un pantalon noir, la maille se fait très été et se marie de sandales graphiques soulignant une silhouette estivale et contrôlée.

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Color Block A l’opposé du minimalisme et du look summer Edgy mixant blanc et noir, la couleur fait son grand retour et créée la surprise dans une garde robe masculine souvent bien trop sage. Tendance forte des podiums, de Milan à Paris, les créateurs ont fait le pari osé du coloris unique traité en aplat sur l’ensemble de la silhouette. Turquoises, verts acides, roses fuschia ou encore rouges vibrants, les podiums ont emprunté aux arcs-en-ciel leurs palettes de couleurs vives, voir explosives et nous ont offert des cocktails détonants mais profondément grisants où le vêtement devient couleur et inversement. Ainsi les néo-yuppies osent la perfection d’un costume trois boutons Azur pour affronter le gris des marchés boursiers, ou le chic décontracté d’un trench porté en total look carmin – effet pep’s garanti.

Plus sage, plus élégante et plus facile à porter au quotidien, la tendance Color Block se décline également dans une version plus casual sur les pantalons. Mixé à un veste croisée à double boutonnage chez Disquared, le pantalon fuschia réveille une tenue un peu classique ; porté nonchalamment avec une maille loose chez Hermès, le chinos corail donne indéniablement un avantgoût de vacances en certaines périodes ou le soleil a pu nous faire cruellement défaut.

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Et pour aller avec ceci me demanderez-vous ? Spartiates, mocassins, sneakers montantes ou derby portés pieds nus, l’homme ose les souliers détournés. Chinos classique porté avec une fine sandale pour lui donner plus de légèreté, short de ville et mocassin pour plus d’urbanité, costume color-block cassé d’une paire de sneakers esprit Néo-Hip Hop ou encore veste sans manche pointue accompagnée d’un très classique mais très pointu soulier à bout fleuri et compensé, chaque style trouvera cet été chaussure à son pied ! Alors, amoureux des couleurs, hipster graphique ou preppy chic en short urbain, amusez-vous, osez et profitez de ce très bel été !

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Texte : Andy Constantin


LITTE / à découvrir

Silvia Avallone - D’acier A tout juste 25 ans, Silvia Avallone est l’auteur d’un premier roman intitulé « D’acier ». Diplômée de philosophie et résidant à Bologne en Italie, Silvia Avallone avait déjà publié plusieurs nouvelles dans des revues, ainsi qu’un recueil de poèmes « Il libro dei ventanni ». Cette jeune italienne, nous offre près de 400 pages d’un ouvrage surprenant, où elle exploite avec talent toutes les petites particularités propres à l’adolescence. Mêlant à la fois noirceur et aisance rédactionnelle, elle nous entraine dans son univers empreint de poésie et de grâce, univers doté aussi d’une terrible lucidité. « D’acier », c’est une histoire de filles. De rêves d’adolescentes. D’une banlieue grise et terne, illuminée par la présence des deux jeunes filles, pleines de vie, d’ambition et de folie. Salué par la critique, ce roman a été traduit dans une douzaine de langues et est resté longtemps en tête des ventes en Italie. « D’acier » a également été retenu comme finaliste au fameux premio Strega, qui correspond au prix Goncourt. Fort de son succès, D’acier devrait prochainement être adapté au cinéma. Un roman captivant, qui ne laisse pas le lecteur indemne, à retrouver aux éditions Liana Levi.

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Noemi Schaub - Histoires en creux Noemi Schaub. Un nom à retenir à l’avenir. Du haut de ses 22 ans, elle vient de remporter le Prix du Jeune Ecrivain de la langue française, grâce à sa nouvelle « La vie en creux. » publié dans le recueil « Histoires en creux » qui réunit les différents textes des participants au prix. La nouvelle lauréate, originaire de Suisse, toujours étudiante nous offre un récit très intimiste. « La vie en creux », c’est tout d’abord la vision d’une jeune femme sur sa propre vie, sur le monde qui l’entoure. Un personnage solitaire, assez mystérieux mais surtout en mal de sa propre vie. Le lecteur a l’impression de tomber sur un journal intime tenue par une jeune femme, un peu à part, qu’on croirait tout droit sorti de l’imaginaire d’Amélie Nothomb. L’auteur révèle un goût pour une écriture assez sombre, avec un style particulier, constitué de phrases assez courtes, laconiques, ce qui donne un rythme assez saccadé au texte, comme cadencé par les souvenirs douloureux de l’héroïne. « La vie en creux » est a retrouvée dans le recueil « Histoires en creux » publié chez Buchet-Chastel, préfacé par Sylvie Germain.

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Jessica Metsonn - Pourquoi pas Un roman qui sonne un peu comme un conte de fée ultramoderne, une fiction douce et pétillante, dont l’action se déroule au cœur de la Grosse Pomme. Agée d’à peine 16 ans, la jeune Jessica Metsonn fait preuve d’une grande maturité à travers un premier ouvrage de plus de 300 pages. Originaire du sud de la France, la jeune femme tisse avec justesse une histoire de rencontre, de voyage et d’amour, le tout avec une délicieuse fraicheur adolescente. On promet à Jessica Metsonn, une belle carrière, dans la lignée des références du genre comme Meg Cabot ou Ann Brashares. Cependant, le roman apporte aussi sa part de force et d’émotion, l’auteur crée la surprise en ne s’attachant pas uniquement aux clichés utilisés fréquemment dans ce type de romans, mais en traitant de sujets plus sérieux, comme l’alcoolisme notamment. Un roman léger et intelligent, idéal pour cet été, à déguster allongée sur une serviette de plage ou en sirotant un bon cocktail à la main. « Pourquoi pas », un roman à retrouver aux éditions Publibook.

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Olivia Tapiero - Les murs Par ce beau temps, j’avais plutôt envie de lire des choses légères, allongée sur le sable, une capeline vissée sur la tête et un mojito à la main*. Mais j’avais déjà commandé Les murs d’Olivia Tapiero, alors… Ce qui m’a frappé dès le début, et gêné je dois dire, c’est que ce livre n’est pas rythmé par des chapitres. Il y a des paragraphes, bien sûr, mais des chapitres en bonne et due forme sur la page de droite, non. J’en attendais désespérément un (un chapitre, arrêtez le mojito, et suivez, un peu) pour respirer, souffler. Et puis j’ai compris. J’ai réalisé que s’il n’y avait pas de chapitre, c’était fait exprès, et que ce livre n’avait pas été écrit dans le but d’être agréable. Les murs, c’est l’histoire d’une jeune fille qui se laisse mourir, une « suicidaire +++ ». Enfermée dans un hôpital et dans un corps qu’elle déteste (d’où « les murs »), elle se mutile et refuse de s’alimenter, tout en essayant d’échapper « au Monstre » qu’elle sait tapi dans un coin de son âme. Le personnage, rempli d’une haine immense, est très fier de ses jambes décharnées et cadavériques : la narratrice transpire d’un mal être évident, même si elle a, paradoxalement un très fort égo. « Si on cède et qu’on mange, ils penseront qu’on est faible. » Elle lutte contre ses sentiments, s’interdit d’aimer et d’être aimée : « Je ne veux pas être humaine. ». C’est étrange comme les livres vous touchent parfois, et vous surprennent. J’ai lu des œuvres autrement plus dures, des autobiographies ou des fictions de femmes battues, violées, brûlées même, parfois des livres traitants de pédophilie, de meurtres en série. Mais il m’est arrivé, en lisant Les murs, de vouloir le fermer, de vouloir l’abandonner dans un coin et le reprendre quand ça ira mieux, de vouloir vomir, même.

« Je le hais, je veux entendre que je suis irrécupérable. » Les médecins et le personnel soignant, omniprésents, sont désignés par des surnoms ou de simples initiales. Très peu de personnages sont appelés par leur nom complet : ce détail m’a fait douter, est-ce un roman autobiographique ? Google m’a appris que non, pas le moins du monde. Découvrir que ce roman était une pure fiction a donné une toute autre dimension à ma lecture : dans un premier temps, j’avais cru être face à une de ces adolescente en mal de vivre, qui pour expliquer la maladie – et pire, pour prévenir les autres d’un potentiel danger – avait cru bon de faire un bouquin. Et j’explique ma douleur, et regardez comme j’allais mal… Sans minimiser l’importance pour les auteurs, et les vertus sans doute thérapeutiques, de ce genre d’écrits, je n’avais clairement pas envie d’écrire une critique sur l’un d’entre eux. Mais c’est une fiction, et elle est bien menée, bien développée, même si j’ai parfois trouvé l’écriture encore un peu « verte ». Olivia Tapiero obtient pour ce premier roman le prix Robert-Cliche en 2009. A lire sur la plage cet été, si vous n’avez pas peur de vous plombez les vacances, aux éditions Vlb éditeur. * Rappelez-vous que l’alcool est dangereux pour la santé (c’est pas que je m’inquiète pour vous, mais je ne voudrais pas être tenue responsable de vos soirées estivales de débauche)

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LITTE / à découvrir Amanalat, blog littéraire Philippe Delerm aurait dit "Il avait plu tout le samedi". Inlassablement, la pluie tombait, tombait : un jour à rester avec un bon livre à siroter un thé fumant, en somme. Mais j'avais rendez-vous avec Antonin alias Amanalat, dans le centre-ville de Lyon. Et quel lieu plus emblématique pour discuter de ses nouvelles qu'un café littéraire ? Alors j'abandonne mon roman, j'enfile mes bottes et je retrouve Antonin, grand blondinet, le menton enfoncé dans un large manteau bleu marine. Il met les choses au clair très rapidement : oui, il écrit parfois des choses dures et sombres, il fume et boit des cafés. Mais attention, ce n'est pas un écrivain maudit romantico-torturé pour autant. D’ailleurs, il actualise régulièrement sa page Facebook avec Les citations de l’Ecrivain Maudit Exemple : « L’Ecrivain Maudit ne passe pas ses journées à ne rien faire : il cherche l’inspiration. » De nombreuses publications à son actif (en témoigne la photographie ci-contre) et adepte des grands espaces, Amanalat voyage, a la tête pleine de projets et se débrouille finalement plutôt bien pour se faire connaître de la blogosphère. Lorsque j’ai découvert Amanalat, Entre eux deux est la première nouvelle que j’ai lue. C’est elle que j’ai envie de vous faire découvrir.

Amanalat décrit avec une vérité saisissante le quotidien des utilisateurs du métro : la bousculade, la mauvaise humeur, la précipitation Puis rapidement, on se focalise sur Thomas qui rage en silence contre le monde, l’odeur, les personnes âgées qui réclament une place assise ; et sur sa petite voisine trop maquillée. Si parfois certaines tournures me déplaisent (peut-être un peu lourdes, voire désagréables à la lecture), il faut reconnaître qu’Amanalat a un certain talent pour l’écriture. Une jolie nouvelle un brin poétique, à lire en terrasse, loin des métropoles grouillantes en attendant la rentrée. Note : Et comme j’ai eu le plaisir de débattre avec lui quant à l’objectivité d’une critique littéraire, et que je sais qu’il ne m’en voudra pas, je me permets d’ajouter un (petit) bémol : Antonin fait beaucoup d’arts martiaux, il a pratiqué « l’art secret des Ninjas ». Alors Antonin, s’il te plaît : mets tes capacités au service de l’orthographe et lutte contre ces mauvaises fautes qui se glissent dans tes textes ! Découvrez son blog et retrouvez Amanalat sur Twitter (#Amanalat1) et Facebook. Envoyez vos citations d’Ecrivain maudit, entendues ou inventées, en postant un commentaire sur son mur ou son blog !

« Amanalat, blog littéraire : Vous aimez l’écriture, j’aime écrire, nous sommes faits pour nous rencontrer ! »

Entre eux deux relate, l’espace de quelques rames de métro, la vie de deux personnes qui n’ont apparemment aucun rapport.

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Texte : Caroline Mélia / Milène Jallais




CONFIDENCES / découvertes « Laforgue et Moi » « En somme je ne suis pas remarquable ni ne fais quoi que ce soit pour être remarqué – pour qu’on me distingue il faut avoir la vue profonde, s’ennuyer des majorités, et me chercher… » Quand je lis Laforgue, j’ai l’impression de lire un livre universel, de me lire, à la fois dans les vastes ambiances poétiques que dans les ternes notules névrosées. Quand j’ose pénétrer dans sa mélancolie endimanchée, féerique, nocturne, je me rends compte que mon âme a déjà succombé à ces dérives, ces airs désabusés, tristes. J’ai dix-neuf ans. Je vis à Paris, deux siècles plus tard. Une communion s’impose. Je lis des vers, de la poésie qui rime avec les nombreuses surprises, bêtises, caprices et hybris de la vie quotidienne. Laforgue est fatalement banal, antédiluvien. Pourtant, il est là, il a vécu, il a souffert, il s’est tu. Il a laissé des maigres traces. Un jeune homme, un gandin, un voyageur, un éternel insatisfait, ayant des accès de joie et des décès de voix. Il écrit, plus encore, sans cesse. Un carnet, des dessins, des poèmes, des pensées, des rêveries. Un recueillement oecuménique égoïstement renfermé dans son unique cœur d’homme faible, partitionné. Coups de théâtre dans une seule vie. Retournements, étourdissements, perte d’équilibre. Laforgue met sa douce étoile sous la régence de l’impératrice Fatalité. Jeune homme à la beauté timide, pondérée, Laforgue est un éphèbe mûr dans la cathédrale de son âme aux mille finesses, dans la résonance de son distinguo mais une tendance instinctive, angélique le ramène, dès fois, à un stade juvénile, à la fois douillet et maussade.

La mélancolie frappe alors plus doucement, plus mélancoliquement, sur de la soie tressée par ses vers affinés et puisés d’une source vitale, dans une croyance du corps et de l’âme. Il n’a été qu’un être du doute, vivant à travers son incrédulité et son autodérision pour moins souffrir des constats alarmants qu’il avait pu dresser de la vie humaine, commune… C’est ce qui m’a poussé à écrire, tenter moi aussi une kermesse poétique, larguant mon âme comme une mer déchaînée dans le dédain collectif, dans la tempête de notre siècle démentiel, décadent et meurtrier. Car je suis certain que derrière les apparences soudaine de la poésie de Laforgue se cache un réel enthousiasme pour une vie olympienne, rajeunie, distinguée, émérite, raffinée, précieuse mais néanmoins inatteignable. Et qu’est-ce qui nous fait venir à ce délice, ce ravissement, à cette illumination possible, cette éclaircie dans un ciel ravagé, damné, inespéré : la Femme, l’Amour. Oui, messieurs. Il n’y a qu’à lire, même entre les lignes. Même si la Femme peut être haïssable et perverse, on ne peut que l’admirer, la désirer, l’appeler par des offrandes surhumaines, divines à l’image de sa grâce primitive, éternelle. Car c’est elle qui de la magie de son charme peut envisager la destruction de l’ego, l’éclatement des frontières, des barrières, des contraintes et des commandements. Elle nous arrache du dédain pour nous faire arborer la toison de la pureté.

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Le site des "fans" de Laforgue. On trouve majoritairement tout à son sujet.

Merci Jules. Tu es allé au bout du gouffre, du néant, de l’inespéré et tu as pu contempler des « morceaux de ciel », aux bonnes heures. Moi, je vais continuer à te lire, durant ma vie. Rester sur la voie, ta voie, et si jamais je dérive, me salissant des bacchanales de la majorité pestilentielle, alors, m’insuffler un « Mea Culpa ! » digne de réanimer les braises ardentes de ta poésie immédiate, insigne et magistrale dans les nuées étoilées de mon âme égarée, poussive.

L'Imitation de Notre-Dame de la Lune / Des Fleurs de bonne volonté : poésie Gallimard.

Tiraillement entre le Spleen et l'Idéal. Au milieu le Poète. Rien de nouveau sous le soleil.

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Sur la route… C’est donc ça… Cette aube qui nous est offerte, cette aubaine qui nous charme ? Il suffit de clore ses yeux pour sentir cette invite, cette tentation de partir, de deviner un autre séjour, un autre passage que celui de convention. On respire… Nos yeux sont, quant à eux, fidèles, croyants à cette magie offerte, qui erre dans les parages de nos plus chers désirs intérieurs, bien gardés en soi. Mais il suffit de juste s’en rendre compte, d’atteindre le déraisonnable, faire le pas, chausser notre liberté, épouser notre destinée qui attend, au bout du compte, notre écriture, pour conclure. On part… Ca y est… On respire… On est sur la route… Mal installé, à ma place n°97, j’observe comme tout le monde le paysage qui défile comme un film accéléré. Certains s’y perdent, d’autres s’y cherchent. Moi, je m’y crée, je fais du romanesque avec les fibres de ma vie. Le train se met en route. Où vais-je ? Nulle part. Cette fois-ci, je rejoins mon quotidien, mon logis, ma capitale… Quand viendra cet épilogue ? Plutôt cette genèse, cette odyssée ? Quand oserai-je le tempo perpétuel, l’éternelle errance, course, l’indulgence des horizons, la variété des langages ? Aujourd’hui, j’en prends conscience, seul, mais je sais que mes intimes, mes alter ego répondront à ma demande, à cette fugue improvisée, instinctive qui nous prendra quand on aura expiré la dernière lassitude routinière. On est encore jeune, plein d’entrain et d’incertitude. On le restera, dans la quête de notre présence, de notre personnalité. On attend notre jour, notre tour, notre bonne étoile, notre exil, notre aurore simple, notre vie.

Car je veux vivre, au possible. Je veux accomplir cet « impossible » aux yeux de l’universel, du commun des mortels. Cet appel endémique qui revient, constamment, comme un rêve prophétique mal digéré, se confrontant à mes petites convenances et mes routines, sans importance. J’ai tout à faire, tout à voir, tout à vivre, tout à dire. L’ardeur de cette soif m’accompagne, le temps est déjà superficiel, inoffensif voire bienveillant. En mon cœur se tortille comme un embryon naissant ma foi pour l’inconnu et l’incertain, déjà mettre de mon lendemain. Je suis prédestiné à vivre, c’est moi qui vais éroder et jouir de cette offrande que tout homme peut conquérir, d’une poignée de main évidente… Ça dépasse les âges, les usages, les lois. Rien n’est prescrit, rien n’est proscrit. On sait juste que quelque chose brûle en nous, mais on ne sait pas vraiment quoi, on ne sait pas vraiment où cette brûlure se trouve, où tout cela nous mènera. C’est là, on le sent, ancré en nous, ne lâchant rien, résistant à nos mauvaises tendances de peur ou de tristesse insensées et à nos petites satisfactions. Cet appel qui nous attend, que nous, exclusivement, au départ improvisé d’un proche lointain, encore absent de nos émerveillements. Et on regarde l’azur, puis l’horizon, le plus loin possible. On défie notre vue, on défie la réalité monotone et apprise par cœur. On regarde là-bas, au-delà de soi, vers l’insoupçonné, vers la liberté ignée qu’on capte dans notre âme à chaque brise, à chaque danse des nuages dans ce ciel muet et mondial, vers l’anonyme aire où, sans doute, d’autres âmes brûlent de nous côtoyer puis de nous rejoindre dans l’itinéraire inopiné, qu’on suit par bonheur, comme des fureurs de vie ambulantes.

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Alors il ne faut rien lâcher, surtout pas. C’est trop facile de décrocher, de quitter la course, de s’enfuir précipitamment dans le mauvais hospice. On nous accueille avec une fausse gaieté, les bras se refermant sur nous, à jamais. On va nous tuer gentiment, de seconde en seconde, puis de jour en jour jusqu’à la date fatidique, libératrice. On aura raté notre mission, on aura raté notre vie. Ne jamais rien lâcher, tenir la corde de notre destinée avec l’adage du carpe diem et la clémence de l’enfance.

Défier le temps, l’habitude, les codes, la droiture. Sans cesse aimer, vivre et produire de la lumière. Sans cesse des actes en soi, sans cesse du rire et une joie ineffable et démesurée qu’on partage dans une fièvre inédite. Je veux vivre : ce qui ne peut s’expliquer. Aucune direction, aucune décision, aucune anticipation. Faire de nos périples une grande messe, bercée de nos cantiques exceptionnels, le soir, autour d’un feu de satisfaction. Jouir de la vie, tant qu’on en a !

Partir. Partir à l’autre bout du monde. Accomplir ce que l’on souhaite, rien de plus.

« La route comme une idée fixe » (Variation sur une photographie, Jane Evelyn Atwood) - 73 -

Texte : A.D


BLOG / Les trésors du net Le monde fabuleux de Print and Pattern.... Encore un outil d’inspiration pour vos projets de création, Print and Pattern est un blog créé par une graphiste anglaise qui référence des imprimés, fonds, illustrations de tout horizons. Avec son appareil photo et son œil aiguisé elle capture tout ce qui lui semble graphiquement intéressant. Que ce soit sur des cartes, des carnets ou même des mouchoirs, d’adorables illustrations, motifs, sont donc référencés sur son blog. La suite sur le blog.

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Des couleurs, des couleurs ! Adobe est connu pour ses logiciels créatifs tel que Photoshop, aujourd’hui ils mettent en service un site qui propose des thèmes chromatiques. Si vous avez besoin d’inspiration pour une déco, ou à la recherche d’un esprit colorique, vous pouvez la trouver sur ce site. Il vous suffit de taper un mot de recherche, et Kuler vous propose une série de thèmes chromatiques qui peuvent servir pour tout projet de création. Créez, explorez, téléchargez et enregistrez des thèmes de couleurs. En complément de ce site adobe propose l’application Kuler qui vous permet de créer des thèmes chromatiques à partir d’une image. Testez les thèmes disponibles et trouvez l’inspiration auprès d’une communauté en ligne très active. La suite sur le website.

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Texte : Audrey Aznar / Aurélie Lavabre


REDACTION // PHOTO / Interviews/galerie : Manon Mella/Michel Cariou / Photos : Jalis Vienne // MUSIQUE / Interviews/critiques : Alexandre Perez/Paul-Julien Roux / Photos : Cindy Lee // CINE / Valentin Jean/Emilien Barthoulot // MODE / Féminine : Julie Héry/Virginie Daigneau / Masculine : Andy Constantin / Lookbook : Alice Kong // ART / Florence Bousquet // LITTE / Milène Jallais/Caroline Mélia // BLOG / Audrey Aznar/Aurélie Lavabre // RELECTURE / Julie Robin /// NET // GRAPHISME / Julie Osko // COMMUNICATION / Julie Robin /// PHOTOGRAPHE / Jalis Vienne IMAGES // COUVERTURE / P1 / Johanna Rolle / http://johannarolle.com // P7-11 / Agnès kr Patience / http://agneskrpatience.tumblr.com // P12-20 / Johanna Rolle / http://johannarolle. com // P21 / Joël Sossa / http://joelsossa.blogspot.be // P22 / Nicola Odemann /http://www. flickr.com/photos/carelessedition // P23 / Daniel Reichow / http://www.flickr.com/photos/ dear_caffeine // P24-28 / Ana Santl - I’m not Ana / https://www.facebook.com/pages/I-am-notAna/229831160429880 // P29-30 / Benoit Courti / http://benoitcourti.4ormat.com // P31-38 / Paul Villard / http://paulvillard.com // P48 / Les carnets de Joseph / http://lescarnetsdejoseph.com // P49 / Magdalena Lamri / http://www.magdalenalamri.com // P55-58 / Alice Kong par Jalis Vienne / http://jalissounet.blogspot.be // P68-69 / Image tirée du site d’Amanalat / http://amanalat.com



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