VOYAGER ICI ET AILLEURS 41

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L’ÉVASION DES SENS — WEEK-END / CITY BREAK / SÉJOUR — ÉTÉ 2023 — N°41

CORSE

Bonifacio, Alta Rocca, Plaine orientale, Bastia, Castagniccia, cap Corse, Balagne...

La plage secrète de la Cala di u Lioni Îles Lavezzi

TRIMESTRIEL — JUIN-JUILLET-AOÛT 2023

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éDITO

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Édito 10 ans ! Voilà dix ans que nous sommes là. Dix années à voyager, et raconter. Vous raconter nos histoires, nos rencontres aux quatre coins de la France, de l’Europe et du monde entier. Dix ans que vous nous suivez, nous lisez et revenez chaque trimestre. En quarante-et-un numéros, nous avons tenté de varier, de vous montrer de nombreuses destinations, souvent très différentes les unes des autres. Des plaines de l’Afrique du Sud aux sommets des Alpes, en passant par les fjords de Patagonie et les marchés de Hong Kong, nous avons toujours essayé de mêler les couleurs et les senteurs, de vous donner envie de visiter encore le monde. Et on continue ! Ce numéro des dix ans s’annonce abondamment français. Il vous amène en Écosse, c’est vrai, mais surtout dans les collines de la Creuse et sur les rivières qui émaillent la Sarthe, l’Anjou et la Mayenne. Et puis la pépite de ce numéro anniversaire est surtout ce long reportage sur la Corse. Pas moins de cinquante pages pour découvrir ou redécouvrir l’île de Beauté à travers ses spots les plus connus et nos trouvailles bien plus secrètes. Un reportage ensoleillé et plein d’optimisme pour clore les dix premières années de VIEA et lancer les dix prochaines! Merci de nous être fidèles. Bel été à tous! La rédaction

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VOYAGER ICI & AILLEURS CAPITALE TRAVEL 55, boulevard Pereire, 75017 Paris Standard : 01 58 88 37 00 Directeurs de la rédaction : Pauline et Yann Crabé (redaction@viea.fr) Direction artistique : Grand National Studio (hello@grandnationalstudio.com) Journalistes & photographes : Clotilde Boudet, Nicolas Anetson, Lucas Lahargoue, Christian Jelenia et Philippe Guillaume Photos de couverture : Nicolas Anetson Secrétaire de rédaction : Isabelle Calmets Publicité et partenariats : Pauline Crabé (pauline.c@viea.fr)

­­ ABONNEMENTS :

Abonnez-vous directement sur www.viea.fr CAPITALE TRAVEL / VOYAGER ICI & AILLEURS Marjorie Batikian (marjorie@viea.fr) Distribution France : MLP – Distribution Export : Export Presse Voyager Ici & Ailleurs est édité par CAPITALE TRAVEL SARL au capital de 1 000 euros RCS 793 525 007 BORDEAUX Gérant / Directeur de la publication : Yann Crabé Numéro commission paritaire: 0918 K 91970 N° ISSN 2268-0799 Imprimerie : ROTIMPRES – Girona – Espagne © Capitale Travel. Tous droits de reproduction réservés pour tous pays. Aucun élément de ce magazine ne peut être reproduit ni transmis d’aucune manière que ce soit, ni par quelque moyen que ce soit, y compris mécanique et électronique, on-line ou off-line, sans l’autorisation écrite de Capitale Travel.


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SOMMAIRE

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Sommaire 014 NEWS

Nouveautés dans le monde de l’hôtellerie, à Paris, en France et dans le monde

026 CROISIÈRE EN GRÈCE

Sur la mer Égée avec Celestyal Cruises

032 RIVIÈRES DE L’OUEST

Slow tourisme en Pays de la Loire

050 ÉCOSSE

La van life à l’épreuve des Highlands

060 CREUSE

Balade estivale sur les routes du Limousin

076 CORSE

L’île de Beauté de ses plages jusqu’aux cimes

127 TENDANCES Automobile

© Nicolas Anetson

SOMMAIRE


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NEWS

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Hôtels PaRis Quoi de neuf dans le monde de l’hôtellerie francilienne? De nouvelles adresses en plein Paris, ou aux portes de la capitale !

É Le Parchamp

La Belle Juliette 6E ARRONDISSEMENT

L’été est bien là ! Les hôtels ont rouvert leurs terrasses. C’est le cas de l’hôtel La Belle Juliette, un quatre-étoiles au cœur de Saint-Germain-des-Prés. Au programme sur sa superbe terrasse : des cocktails signatures et une carte de snacking chic. Les chambres revisitent le style XIXe siècle dans un univers poétique. Elles ont des vues jardin ou sur la ville. Les suites quant à elles mesurent entre 27 m² et 46 m². On y trouve un salon cosy et certaines sont même pourvues d’une cheminée, pour un séjour entre romantisme et design. Le spa de l’hôtel enfin, peut être privatisé ! Son petit bassin piscine surnommé « bassin de rêve » a des hydrojets massants et un mode de nage à contre-courant. L’espace bien-être possède également un hammam et deux cabines privées de soin.

C’est dans un ancien bâtiment de la Banque de France que le Parchamp a ouvert ses portes au printemps. Cet hôtel est fait pour séduire à la fois les locaux, les visiteurs, les travailleurs nomades… mais aussi les amateurs de sports ou de musique. Membre de la collection Tribute Portfolio, il est situé près du stade de Roland-Garros, de la Seine musicale et du Parc des Princes. Sa clientèle diversifiée se retrouvera autant sur le rooftop un cocktail à la main, qu’au restaurant en dégustant une cuisine d’inspiration levantine ou le brunch du dimanche. Des tons terracotta ou vert sauge, et un mobilier inspiré du style moderniste caractérisent les 123 chambres de l’hôtel, qui promet de doux séjours aux portes de Paris. LEPARCHAMP.COM

Hôtel Baume 6E ARRONDISSEMENT

À deux pas de l’Odéon, l’hôtel Baume vous invite à un voyage dans le temps. Rétrogradez vers les années 30 dans ce nouvel hôtel parisien de style Art déco. La décoration de chacune des 35 chambres et suites suit l’un de ces cinq thèmes : la mode, le cinéma, la joaillerie, l’architecture-design et les clubs des années 30. Toutes présentent ce parfait mélange d’allures masculines et de courbes féminines, de textures douces et de couleurs profondes, d’une pointe d’Asie et d’une touche « d’élégance à la française ». L’hôtel a aussi un salon intime et feutré, et l’été, les petits déjeuners sont servis dans le patio fleuri. Quant aux dîners, ils peuvent se prendre en chambre et sont préparés par Maison Babine qui livre des plats bistronomiques directement devant votre porte. Original ! BAUME-HOTEL-PARIS.COM

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BOULOGNE-BILLANCOURT



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© Adel Fecih

© Gaelle Le Boulicaut

© Adel Fecih

© Gaelle Le Boulicaut

NEWS

Maison Delano Paris 8E ARRONDISMENT

Après Miami et Las Vegas, un hôtel Maison Delano a ouvert ses portes à Paris il y a quelques semaines. Situé à deux pas de la rue du Faubourg Saint-Honoré, c’est un cocon 100 % parisien : un hôtel particulier du XVIIIe construit autour d’une belle cour centrale. La marque Maison Delano est née à Miami en 1995 et appartient aujourd’hui au groupe Accor. Son mantra ? Redéfinir les codes de l’hôtellerie de luxe. À l’époque, la marque se lançait dans l’hospitalité lifestyle, en créant des hôtels comme des oasis où l’on ne se contente pas simplement d’y poser ses valises pour une nuit. On y vit des expériences ! Avec ses 56 chambres dont 19 suites, cet hôtel est donc un oasis, sophistiqué certes, mais qui invite à la détente. L’une des expériences signatures de Maison Delano Paris se vit à La Chambre bleue. Le restaurant de l’hôtel porte le nom d’une toile de Picasso. L’ancien chef trois étoiles Dani García est aux manettes, né à Malaga, en Andalousie, comme le peintre. Au-delà des traditionnelles paellas, le chef travaille une incroyable longe de thon en carpaccio, du chevreau de lait cuit à basse température, ou du turbot rôti entier avec des pommes de terre à la roteña. Un vrai petit bout d’Espagne s’invite dans l’un des quartiers les plus chics de Paris. MAISONDELANOPARIS.COM/FR


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NEWS

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Hôtels FRaNCE Côte d’Azur, Bordeaux, Normandie, Bourgogne… beaucoup d’ouvertures ces dernières semaines, aux quatre coins de l’Hexagone !

É Cap d’Antibes Beach Hotel

© Nicolas Anetson

La collection Adresses Hotels s’agrandit ! Le Cap d’Antibes Beach Hôtel vient d’être intégralement repensé par l’architecte Bernard Dubois et de rouvrir au public. Ses 35 chambres et suites donnent toutes sur la mer. Avant d’être un boutique-hôtel cinq étoiles, cette adresse était un restaurant, déjà tourné vers la Méditerranée : La Maison des pêcheurs. Une institution depuis les années 1940 ! Aujourd’hui, au restaurant étoilé Les Pêcheurs, le chef Nicolas Rondelli sublime les délices qu’offrent le soleil et la mer, évidemment. Et l’offre culinaire ne s’arrête pas là puisque l’hôtel vous accueille aussi au BABA, un second restaurant avec un bar circulaire à colonnes où l’on déguste une cuisine plutôt levantine. À vous de choisir !

Marty Hôtel BORDEAUX

Une nouvelle adresse de la Tapestry Collection by Hilton a ouvert ses portes à Bordeaux. Installé au cœur du quartier de Mériadeck, le Marty se trouve à quelques minutes du Grand Théâtre et de la gare Saint-Jean. Lieu de vie inspirant et créatif, ce nouveau quatreétoiles a été pensé par et pour les jeunes. Il compte 61 chambres à l’ambiance feutrée, mais son cœur bat sans aucun doute dans son bar. Un grand bar plutôt branché, surmonté d’une avalanche de lustres, est installé dans le hall. En partenariat avec L’Artillerie, Le Marty est aussi un incubateur. Au cours d’expériences immersives, les voyageurs tout comme les Bordelais peuvent assister à des workshops engagés ou culturels, et à de nombreuses expositions. Un hôtel donc, mais surtout un nouveau refuge pour les esprits créatifs !

CAPDANTIBES-BEACHHOTEL.COM

MARTY-HOTEL.COM

© DR

CÔTE D’AZUR

Les Maisons de Léa NORMANDIE

Le premier établissement Radisson Individuals vient d’ouvrir en Normandie. Ce boutique-hôtel 4 étoiles vous accueille à seulement 150 mètres du vieux port d’Honfleur, face à l’église historique Sainte-Catherine. À la fois luxueux et authentique, il se compose d’un bâtiment principal du XVIe siècle, ancien grenier à sel, et de 5 maisons adjacentes, plus récentes. L’établissement compte 43 chambres et suites. Toutes sont spacieuses, décorées pour être des cocons cosy et sereins aux allures rustique-chic. Un Univers Spa by Thalgo permet des moments de détente, et Tourbillon est le restaurant des Maisons de Léa, servant surtout des délices de la région, sur la magnifique terrasse de l’hôtel ou au coin du feu. Une vraie cuisine de terroir !

© DR

LESMAISONSDELEA.COM


NEWS

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Como Le Montrachet BOURGOGNE

La première adresse française de la marque COMO Hotels & Resorts vient d’ouvrir ses portes. Le COMO Le Montrachet vous attend en Bourgogne, au cœur de la Côte-d’Or, dans le village de Puligny-Montrachet qui ne compte que 385 habitants. Trente chambres et suites sont réparties dans une ancienne auberge du XVIIIe siècle, un parfait mélange de contemporain et de pittoresque, toujours entremêlés d’élégance. Le restaurant est tenu par le chef Romain Versino. Le Montrachet est une table parfaite pour les amateurs de cuisine française de saison et de bons vins. Pour un séjour en Bourgogne plus intimiste encore, COMO Le Montrachet propose aussi la Villa Christine. Cette maison privée de cinq chambres et suites, séparée du reste de l’hôtel, est située de l’autre côté de la place du village.

© Jérôme Galland

COMOHOTELS.COM


testé & APPROUVé

The Alpina — GSTAAD

C’est une pépite de verdure posée au creux des Alpes. Le village de Gstaad est tout ce que l’on peut faire de plus pittoresque en Suisse, le luxe en plus. Ses chalets de bois aux balcons bordés de géraniums et ses pâturages à perte de vue en font un havre de paix où l’on vient respirer de l’air entièrement pur. Sur les hauteurs du village, nous arrivons à l’Alpina. L’entrée de l’hôtel ne paye pas de mine, bien cachée en sous-sol pour ne pas dénaturer le paysage. L’essentiel est plus haut, à l’intérieur. Une fois le pied dans le hall d’accueil, notre œil est happé par le bel escalier central surmonté d’une flamboyante fresque de bois multicolore au plafond. Certainement originaire d’Italie, elle est approximativement datée des années 1780. Mais à l’Alpina, il y a aussi du bois ailleurs. Beaucoup de bois même, dans les décors de ce magnifique cinq-étoiles dont l’aura dépasse les frontières de la Suisse. Notre suite est la 505. Les murs sont habillés d’un bois épais mais clair qui donne de la chaleur à la pièce. Le reste n’est que tonalités douces qui tournent autour du crème, de l’ivoire ou du blanc. Nous aimons surtout notre large terrasse ouverte sur les toits du village en contrebas et les montagnes rondelettes au loin. Notre premier dîner a lieu au Swiss Stübli. Ce restaurant traditionnel aligne sur son menu la traditionnelle fondue qui peut être ici à la truffe et au champagne, mais aussi une raclette du Valais ou des rösti. Bref, des plats réconfortants, vitrines de la gastronomie suisse que l’on peut consommer toute l’année. Le lendemain, après un vol matinal en montgolfière au-dessus de paysages de carte postale, nous profitons de l’hôtel et notamment de son spa Six Senses. Des salles de soin sont disséminées autour d’un long couloir aux murs arrondis qui donnent la sensation que l’on traverse une caverne lumineuse. Un long massage Deep Tissues nous fait évacuer la pointe de stress qu’il nous restait, et permet de booster notre circulation sanguine. Après cette expérience holistique revigorante, direction le nouveau Japanese Whisky Bar. Un doigt de Shinobu pure malt nous est servi avant de passer à la table du Megu, le restaurant japonais voisin du bar. Le chef Tsutomu Kugota nous concocte un menu Omakase de sept plats comprenant du tataki de wagyu, des crevettes kanzuri croustillantes ou encore une sélection de sushis et sashimis parfaitement exécutés. Un beau moment d’évasion en Asie sans bouger de ce magnifique vaisseau de luxe et de raffinement, au beau milieu des Alpes suisses. CJ thealpinagstaad.ch/fr

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Photos © The Alpina Gstaad

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© Nardo / Michel Figuet

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Palazzi Maritati e Muci — ITALIE

Été 2017. Guy Martin, sorti des cuisines de son Grand Véfour parisien, débarque à Nardò. Il est alors invité par des amis lui enjoignant de visiter ce gros bourg affalé au sud des Pouilles, écrasé par un soleil de plomb. Le choc est réel. Nardò n’est finalement pas une petite ville poussiéreuse, mais une pépite encore secrète. Le chef français se prend même à visiter deux palais des XVe et XVIIe siècles avant de finir par les faire siens. En compagnie de Guy Martin, nous voilà débarquant au cœur du Salento, cette région plate et maraîchère qui occupe tout le talon de la botte italienne. Avec lui nous traînons nos valises sur les pavés des ruelles tortueuses. Soudain, entre deux façades aux murs lépreux, une porte cochère restaurée apparaît. Nous pénétrons dans le Palazzo Muci, première demeure de notre chef, entièrement retapée selon ses goûts, mais dans le respect total du style et de l’architecture locale. À l’intérieur, un jardin verdoyant s’articule autour d’un long bassin et d’une épaisse sculpture en bronze de Michèle Chast, le tout bordé d’anciennes colonnes doriques. Six chambres d’hôte ont été créées dans cette maison aux murs droits mais au plan biscornu fait d’escaliers et de toits-terrasses successifs. La nôtre est la Egidia, ressemblant à une chapelle d’une pureté divine. Les autres sont toutes lumineuses, habillées de tonalités très douces, relevées par des pièces d’art multicolores. À quelques rues de là, nous découvrons ensuite le Palazzo Maritati. Lui aussi est bien camouflé derrière un haut mur innocent et une magnifique porte cochère massive. Il n’a que trois chambres, dont une suite royale, la Gabriella, qui a un accès vers un rooftop merveilleux dominant tous les toits de la ville. Guy y a aussi disséminé des œuvres de sa collection personnelle d’art et de design. Ici une table Rennie Mackintosh, là des lampes Tobia Scarpa, ailleurs un vase Ettore Sottsass, et dans l’escalier principal, une sculpture baptisée Ange noir est signée Laurence Bonnel. Le temps d’une paire de jours, nous suivons Guy Martin dans ses tribulations à Nardò et sur les côtes du Salento. De restaurants en tavernes, il nous montre ce qui fait l’âme de cette terre encore préservée du tourisme de masse. Et ses deux flamboyants palazzi sont de beaux refuges pour partir à l’assaut de cette Italie encore un peu reculée. LL maritatiemuci.com


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Hôtels MONDE É Muse Villas

© Alessio Mei

La Fiermontina MAROC

Il faut descendre 45 minutes au sud de Tanger, sur la côte sauvage de Larache, pour découvrir ce nouveau lieu féerique… Un endroit où le concept du voyage prend tout son sens. Voilà un projet très spécial mené par la fondation Orient-Occident. Cet écoresort d’un nouveau genre comprend 11 suites, 2 villas (d’une à trois pièces) et 4 maisons traditionnelles en pierre. À La Fiermontina, vous vivez une expérience authentique, entre les promenades au coucher du soleil et la découverte des villages alentour. En plus de vous accueillir dans un lieu sublime et de créer un pont entre les locaux et les voyageurs, cet hôtel unique en son genre dispose d’un hammam traditionnel, d’un café maure, de deux restaurants et d’un beach club. Un lieu parfait pour les baroudeurs chics, les avides d’aventures, les écotouristes, les voyageurs en quête d’authenticité et de partage.

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LAFIERMONTINAOCEAN.COM

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ÎLE MAURICE

Muse Villas, c’est une vingtaine de prestigieuses villas à louer sur l’île Maurice. Il y a la collection « Signatures » et la collection « Indépendantes ». Des logements exceptionnels où faire l’expérience de l’hospitalité mauricienne, en famille ou entre amis, de façon intime. La plupart de ces demeures privées n’ont jamais été louées et le sont pour la première fois grâce à Muse Villas. La société forme en parallèle des « villas hosts » qui vous accueillent. Leur rôle ? Faire de vos désirs des réalités : Bonnes adresses, accès exclusifs sur les hot spots de l’île, organisation d’activités pour adultes et enfants, création d’un programme bien-être dans les meilleurs spas de l’île… Cerise sur le gâteau : la location de ces villas s’accompagne des services d’un chef attitré. Décidément, Muse Villas ne laisse rien au hasard pour vous permettre de vivre les plus belles vacances de votre vie.

Palazzo Tirso SARDAIGNE

C’était un palais des années 1920 situé dans la ville de Cagliari. C’est aujourd’hui un boutiquehôtel qui vient d’ouvrir ses portes dans la capitale sarde. Le Palazzo Tirso arbore cinq étoiles et porte la marque Mgallery du groupe Accor. 85 chambres et suites sont réparties dans ce petit bijou architectural dressé face au port de la ville, donc en bord de mer. Le studio d’architecture Marco Piva a œuvré à sa transformation, pour en faire une adresse moderne, mais qui respecte le patrimoine historique du bâtiment. On trouve deux restaurants à l’intérieur, l’un gastronomique, et l’autre sous forme de rooftop panoramique avec des vues spectaculaires sur toute la ville. Derrière sa façade néo-renaissance, on compte aussi deux bars, une salle de sport et un spa by l’Occitane. Une belle adresse idéale où se baser pour découvrir le sud de la deuxième plus grande île de Méditerranée.

© DR

PALAZZOTIRSOCAGLIARI.COM


NEWS

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Kagi Maldives Spa Island OCÉAN INDIEN

Le concept est courant aux Maldives : une île pour un hôtel. Mais celui-ci a quelque chose de plus. Une élégance, un finesse dans l’architecture que n’ont pas les autres. Le Kagi Maldives occupe une île de 4 hectares, bordée par 700 mètres de plage. Ses 10 villas de plage et 40 villas sur pilotis sont toutes grandes de 105 mètres carrés et ont toutes leur piscine privée. À l’intérieur, déco opalescente et pureté assumée dans le choix des teintes ou des matériaux. Mais le plus impressionnant dans cet hôtel de grand luxe est certainement ses parties communes. La pièce maîtresse est ce grand édifice rond, en bois clair, d’où la mer apparaît peu importe où l’on se situe. On y trouve une magnifique terrasse avec piscine commune, mais aussi le restaurant baptisé Noo Faru et une seconde table d’inspiration italienne appelée Nonna. Le spa lui aussi est situé dans un autre bâtiment posé sur les flots, à la forme ronde qui n’inspire que pureté et relaxation. Cet hôtel ouvert en 2020 mais qui ne prend vraiment son envol que maintenant est l’une des ouvertures les plus remarquables de ces dernières années aux Maldives.

Photos © DR

KAGIMALDIVES.COM


CROISIÈRE EN MER ÉGÉE

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Voir la Grèce depuis les flots

CROISIÈRE EN MER ÉGÉE Parcourir la Grèce, c’est bien. La voir depuis la mer, c’est encore mieux. Nous avons embarqué sur le Celestyal Olympia pour une croisière de quelques jours entre les îles de la mer Égée, avec même une escale sur les côtes turques. Une errance maritime sur un bateau à taille humaine pour revoir quelques incontournables de la région, et découvrir d’autres sites moins connus.

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Texte \ Christian Jelenia — Photos \ Celestyal Cruises (sauf mention)


CROISIÈRE EN MER ÉGÉE

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TEMPLE DE POSÉIDON

JOUR 1 : D’ATHÈNES À MYKONOS Nous voilà près de la capitale grecque. Le Celestyal Olympia embarque ses passagers toute la matinée au port de Lavrio. Le site est éloigné du centre-ville mais idéal pour partir vers les îles orientales. Une fois à bord nous arrivons dans notre cabine. La 7011 est une cabine dite « extérieure », avec de larges fenêtres orientées sur le pont n°6 du bateau. Elle n’est pas si étroite. On prend nos aises dans cet espace de 15 m2 qui dispose même d’un petit coin salon. Soudain le signal du départ retentit. Une fois les consignes de sécurité intégrées par tous les passagers, l’Olympia largue les amarres en direction du sud. Sur le pont supérieur, certains profitent déjà du beau temps et entament une sieste au soleil. Nous en profitons pour admirer les côtes continentales grecques qui s’éloignent peu à peu. Au loin on aperçoit le cap Sounion qui est la pointe la plus au sud de l’Attique. Au sommet, les beaux vestiges du temple de Poséidon se dressent face à la mer. De magnifiques colonnes de six mètres de haut restent

impassibles et traversent les âges depuis le Ve siècle av. J.-C. Après plusieurs heures de navigation au large de Kéa, Giaros ou Siros, nous débarquons vers 16 h à Mykonos. Le port d’amarrage est tout proche de la principale ville de l’île. Cinq minutes de bus nous suffisent pour nous retrouver à l’entrée de ce labyrinthe enchanté de ruelles toutes blanches. En cette semaine de printemps, toutes les boutiques ne sont pas encore ouvertes et les locaux se préparent à la haute saison. Dans tous les coins on nettoie, on repeint, pour que tout paraisse beau et neuf à l’orée de l’été. En attendant, les chats font la sieste au pied des portes, et au large, le soleil commence à se coucher lentement. Nous admirons les lumières du crépuscule depuis la colline des moulins avant de redescendre palper l’animation de la ville une fois le soir tombé. Les restaurant sont pleins, l’atmosphère est déjà un peu à la fête. Il nous reste le temps de dîner au calme, en terrasse, avant de rentrer au bateau qui largue les amarres à 23 h, direction la Turquie.

© Gabriela Insuratelu

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JOUR 2 : KUŞADASI ET LA CITÉ ANTIQUE D’ÉPHÈSE Nous naviguons toute la nuit vers l’est. La mer est calme, et nous arrivons aux aurores dans le port de Kuşadası. La ville turque dont le nom signifie « l’île aux oiseaux » se réveille à peine quand nous montons dans un bus qui file dans les terres. De nombreux bateaux de croisière font escale ici, surtout pour la cité antique d’Éphèse située à une vingtaine de minutes de route. À 8 h du matin, nous sommes les premiers à entrer, à l’ouverture du site. Au cours d’une intéressante visite guidée, défilent sous nos yeux l’Odéon, les thermes, l’agora politique… puis nous descendons lentement à travers ces vieilles pierres vers la fontaine de Trajan et le temple d’Hadrien. Éphèse a été une cité prospère dès le VIIIe siècle avant notre ère, mais son apogée se situe à l’époque romaine quand 250 000 personnes vivaient dans ce qui était alors la capitale de l’Asie mineure romaine. Au fil du temps et de travaux peu ingénieux, le port

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LA CITÉ ANTIQUE D’ÉPHÈSE EST UNE MERVEILLE QUI FAIT L’OBJET DE LA SEULE ESCALE TURQUE DE NOTRE CROISIÈRE SUR LA MER ÉGÉE recula, et Éphèse qui était alors au bord de la mer se trouva finalement à sept kilomètres du littoral, perdant alors tout son commerce. Il ne reste aujourd’hui que les ruines d’Éphèse, mais des ruines flamboyantes, comme la fameuse façade de l’ancienne Bibliothèque ou le Grand Théâtre qui pouvait accueillir 25 000 spectateurs. Après cette visite palpitante, nous rentrons à Kuşadası. Boutiques d’artisanat, caravansérail, mosquées chantant à l’heure de la prière… Tout y est pour nous sentir ailleurs le temps d’une escale avant de rembarquer sur l’Olympia qui quitte le port à 13 h.

© Multipedia / Shutterstock.com

ÉPHÈSE


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© Lorenzo Spoleti

© CDL Creative Studio

© Christian Jelenia

CROISIÈRE EN MER ÉGÉE

PATMOS

JOUR 2 : PATMOS 1 RENCONTRE YANNIS FOUNTOUKAS Comme tout bateau, l’Olympia a son capitaine. Yannis Fountoukas est gradé à ce poste depuis 2001, et commande ce paquebot précisément depuis trois ans. Il est responsable des 1 664 passagers (maximum) et des 540 membres d’équipage. Dans le poste de commandement, son équipe et lui sont très concentrés, surtout à l’entrée et à la sortie des ports. Sept officiers travaillent en sa compagnie au pilotage du paquebot, et une relève est assurée toutes

© Christian Jelenia

Quelques heures de navigation seulement nous séparent de Patmos. Sur le trajet, nous nous faufilons dans le détroit de Mycale, passage le plus étroit entre la Turquie et la Grèce. D’un côté nous laissons les côtes de l’île de Samos, et de l’autre on admire le parc national turc de la péninsule de Dilek. Vers 16h30, nous sommes proches de Patmos. Ici pas d’accostage direct. De petites chaloupes nous mènent du bateau vers le village principal de Skala qui n’a pas de jetée suffisamment grande pour un paquebot. Nous sommes au printemps, l’île est très verte. Nous nous promenons dans les ruelles du village et montons chercher quelques points de vue sur les hauteurs. Mais il nous faut monter encore plus haut pour atteindre le monastère de St-Jean. Fondé en 1808, il a des allures de forteresse. À l’intérieur, l’église de la Vierge exhibe ses magnifiques fresques du XVIIe siècle, et la salle des trésors. Au pied de la colline du monastère, dans le creux d’un virage, nous visitons ensuite la grotte de l’Apocalypse. C’est ici, dans ce renfoncement de pierre que l’apôtre St-Jean aurait écrit, sous la dictée de Dieu, l’Apocalypse, en 95 après la mort du Christ. Le site est gardé par un moine et visité par des pèlerins du monde entier. La nuit est tombée, nous rentrons sur l’Olympia pour une soirée tranquille à bord. Dans le salon Muses, un spectacle de cirque contemporain se déroule sous les yeux ébahis des passagers. La nuit s’annonce courte. Demain matin, nous arrivons en Crète.

les quatre heures pour des questions de sécurité. « Il y a peu de difficultés sur ce parcours » explique-t-il à propos de notre croisière, avant d’ajouter que « les seuls inconvénients sont le trafic qui est

intense sur la mer Égée, et la météo qui est parfois capricieuse ». Mais Yannis a la maitrise parfaite de ce petit monstre de 215 m de long qui a besoin de trois miles marins pour s’arrêter, soit 5,5 km.


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© Georgios Tsichlis

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HÉRAKLION

© Alexandros Michailidis / Shutterstock.com

KNOSSOS

JOUR 3 : CRÈTE Un nouveau jour se lève sur la mer Égée. Une nouvelle île apparaît sous nos yeux. Au réveil, nous accostons dans le port d’Héraklion. Le Celestyal Olympia largue ses passagers qui se répartissent dans des autobus. Nous partons vers l’intérieur des terres, vers le palais de Knossos. Redécouvert en 1878, c’est le plus important palais de la civilisation minoenne aujourd’hui disparue. Il n’en reste que des ruines, mais une visite guidée nous permet de mieux comprendre son architecture et les codes de cette civilisation de l’âge du Bronze (autour de 2000 av. J.-C.). Heureusement il reste quelques fresques et décorations nous permettant d’imaginer le style des lieux à l’époque, comme dans la salle du trône, ou dans les magasins où se trouvent encore de grandes jarres décorées. Knossos est peu « palpable » pour les néophytes mais reste incontournable lors

AVANT DE REMONTER VERS SANTORIN, LE CELESTYAL OLYMPIA FAIT ESCALE DANS LE PORT CRÉTOIS D’HÉRAKLION, SUR LA PLUS GRANDE DES ÎLES GRECQUES d’une visite de la Crète. Nous retournons à Héraklion pour le reste de l’escale. Le matin, les rues du centre ancien sont plutôt calmes. Les échoppes ouvrent petit à petit et les terrasses de cafés se remplissent peu à peu. Nous nous arrêtons au café Phyllosophies, sur la place Morosini, pour goûter les meilleurs bougatsa de l’île. Ces pâtisseries de pâte filo sont fourrées de crème pâtissière ou de fromage frais, et saupoudrées de sucre glace et de cannelle. Une petit encas bienvenu avant de rembarquer en fin de matinée sur notre paquebot.


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JOUR 3 : SANTORIN

© Fokke Baarssen

Alors que notre bateau navigue plein nord vers Athènes, nous marquons une dernière escale. Santorin nous accueille, en chaloupes de nouveau. La visite de l’île commence par un domaine viticole. La maison Venetsanos produit du vin depuis 1947 sur les hauteurs de la caldeira. Nous goûtons du blanc de cépage assyrtiko, du rouge 100 % mandilaria, et même un rouge doux issu d’un assemblage de trois cépages dont des raisins blancs que l’on laisse mûrir et sécher entièrement une fois coupés avant de les presser. Drôle de mixture mais le résultat est intéressant. Après ces quelques gorgées originales, direction Oia. Le village le plus connu de l’île se remplit de visiteurs chaque soir quand vient l’heure du coucher de soleil. Chaque centimètre carré d’escalier, de muret ou de terrasse est investi pour ce rituel quotidien immuable. L’été, les flux sont invivables, mais au printemps on respire un peu mieux. Quoi qu’il en soit, le spectacle reste extraordinaire. Le soleil passe derrière l’horizon et irradie de sa lumière rasante toute cette île unique au monde, née de l’effondrement d’un volcan gigantesque toujours en activité. Une fois la nuit tombée, nous rentrons une dernière fois sur l’Olympia qui nous ramène en une nuit à Athènes. L’escapade fut courte mais riche et intense, d’un bout à l’autre de la mer Égée. —

OIA

AVEC QUI Y ALLER

CELESTYAL CRUISES Cette compagnie grecque est spécialiste des croisières en mer Égée. Ses rotations partent du port de Lavrio, situé à l’est d’Athènes, près de l’aéroport, juste derrière les montagnes du parc national de Sounion. L’itinéraire « Emblématique mer Égée » que nous avons réalisé dure trois nuits/quatre jours et comprend une escale à Mykonos, Kuşadası, Patmos, en Crète et à Santorin. À partir de 760 € par personne. Le prix comprend toutes les taxes portuaires, les pourboires, la restauration, les divertissements à bord, les activités quotidiennes, et une réduction de 75 € sur toute excursion à terre. D’autres parcours incluent une escale de plus à Rhodes (5 jours) ou Thessalonique (7 jours). La compagnie réalise aussi des croisières plus exceptionnelles au-delà de la mer Égée, avec des escales à Chypre, en Israël ou en Égypte. celestyal.com/fr/


© Emilie Deletang / Mayennne Tourisme

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Au fil de l’eau

LES RIVIÈRES DE L’OUEST Et si on prenait du temps ? Et si l’on suivait le cours de l’eau ? Dans les Pays de la Loire, quatre rivières reliées entre elles sont navigables sur presque 300 kilomètres. Nous en avons écumé les berges, découvert les attraits, et sommes revenus avec quelques suggestions pour un séjour au rythme lent de l’eau qui coule.

É

Texte & photos \ Lucas Lahargoue (sauf mention)


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© Pascal Beltrami

Les Rivières de l’Ouest

C’

est l’histoire d’une bonne entente. Il y a quelques mois, les responsables touristiques de la Sarthe, du Maine-et-Loire et de la Mayenne se mettaient autour d’une table devant un constat : ces trois départements partagent un trésor. Le trésor, c’est 283 kilomètres de cours d’eau reliés, soit le plus grand bassin de rivières navigables en France. Ce réseau fluvial exceptionnel et canalisé depuis belle lurette est désormais baptisé « Rivières de l’Ouest ». Il mérite largement qu’on s’y attarde tant il cache des pépites méconnues et des paysages qui font du bien. Entre les trois villes que sont le Mans, Angers et Laval, il y a de quoi passer des vacances à un rythme tranquille, dans des recoins de campagne profonde où l’on est jamais embêté par le trop-plein de visiteurs ; un slow tourisme d’une pureté sans égale. Au fil de la Sarthe, de la Maine, de la Mayenne et de l’Oudon, nous avons déniché de jolies adresses, et de drôles d’expériences pour vivre un séjour au vert sans s’ennuyer une seconde. Qu’on suive leur cours en bateau, par la route ou sur les chemins de halage, ces quatre rivières ont des choses à montrer. En voilà la preuve ! — rivieres-ouest.com


© Alexandre Lamoureux / Mayenne Tourisme

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© kipgodi / Shutterstock.com

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EMBARQUER AU MANS

1 VISITE DISTILLERIE DU SONNEUR Au début du XXe siècle, cette distillerie était un bal populaire. Dans ce bâtiment où d’interminables marathons de danse se déroulaient sur plusieurs jours, ont fabrique désormais de l’alcool. Trente kilomètres plus au nord, à Ségrie, un verger de cinq

hectares est cultivé en agroforesterie et agriculture bio. Pommiers, poiriers ou pruniers sont plantés alternativement avec du romarin, de la menthe suisse ou des baies de genièvre pour limiter la propagation de maladies et favoriser la biodiversité. Les fruits et fleurs récoltés sont ensuite ramenés au Mans pour être distillés, seuls

ou mélangés, et donner toute une gamme d’alcools allant de l’eau de vie de nèfle jusqu’à la liqueur de framboise. Mais cette distillerie du Sonneur, dont le nom vient d’une espèce de crapaud protégée voisine du verger, est aussi connue pour son eau de vie… de rillettes ! Le Mans oblige. distillerie-dusonneur.com

Cette ville est un voyage dans l’Histoire. Éventrée par les eaux de la Sarthe, on y trouve les traces de plusieurs époques reculées qui ont été plutôt bien conservées. Sur l’un des quais de la rivière, se dressent encore douze tours et un long mur d’une vingtaine de mètres de hauteur datant du début du IVe siècle. L’enceinte romaine du Mans est l’une des mieux sauvegardées de l’Ancien Empire, et témoigne du temps où la ville se nommait Vindinum. Juste au-dessus, en surplomb de la Sarthe, c’est un lacis de ruelles qui s’ouvre aux visiteurs qui pénètrent dans le Vieux-Mans. Ce grand quartier est aussi baptisé Cité Plantagenêt, en souvenir de l’époque où les Plantagenêt firent du Mans leur capitale, vers la fin du XIIe siècle. Ce quartier est l’un des ensembles homogènes les mieux préservés de France. Si bien que s’y promener est comme plonger un peu dans un décor qui a été utilisé dans des dizaines de films de cape et d’épée. Cyrano de Bergerac, Le Bossu, ou encore Le Masque de fer ont vu des scènes tournées ici, dans ces venelles pavées qui ont longtemps été malfamées avant de subir d’intenses rénovations. Le quartier est remarquablement propre, les façades à colombages parfaitement entretenues et l’atmosphère y est délicieuse lorsqu’on parcourt la rue des Chanoines ou la rue de la Reine Bérengère qui mènent à la cathédrale Saint-Julien. Le magnifique vaisseau de pierre est l’étendard de toute la ville. Nef romane, chœur gothique et croisée d’ogives, vitraux éclatants des XIe et XIIe siècles… l’ensemble forme un monument religieux exceptionnel, érigé sur un promontoire qui domine toute la vallée de la Sarthe.


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2 BOUTIQUE FROMAGE ET SES AMIS

© Kiev.Victor / Shutterstock.com

© Christian Musat

Fabien Degoulet est fils et petit-fils de crémiers-fromagers. Quand il est adolescent, son seul souhait est alors de ne pas faire le même métier. Il se met à étudier les langues orientales, part au Japon, et devient… crémier-fromager à Tokyo ! Après dix ans au pays du Soleil levant et un titre de meilleur fromager du monde obtenu en 2015, il rentre en France en 2018. Sa boutique est située en bord de Sarthe, face à la Cité Plantagenêt. On y trouve une ribambelle de fromages pas communs et de grande qualité, sourcés aux quatre coins de l’Europe et parfois affinés dans sa cave. Brebis de la Sarthe, tomme du Pays basque ou Präst suédois occupent sa vitrine bien fournie et qui se renouvelle régulièrement. Une vraie Mecque du fromage, pour connaisseurs ou novices qui cherchent des conseils avisés. 107 Quai Ledru-Rollin, 72 100 Le Mans. Tel : 02 43 52 37 45


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DESCENDRE LA VALLÉE DE LA SARTHE Du Mans, la Sarthe coule lentement vers l’ouest à travers des paysages de campagne profonde. Près de la sortie de la ville, elle contourne l’île MoulinSart. Rien à voir ici avec le château imaginé par Hergé. L’une des pointes de cette grande île abrite un moulin du XVe siècle qui a été rénové et fonctionne de nouveau pour moudre du blé et du sarrasin bio. Juste à côté, un four à bois permet de prolonger la visite en assistant à la cuisson de pains et de fouées. Quant à l’ancienne grange à grains, elle a été transformée en centre d’art contemporain. Cette petite île tranquille fait office de halte culturelle idyllique avant de continuer de descendre la rivière. Au fil de l’eau, on passe ensuite des premières écluses comme à Suze-sur-Sarthe, puis on longe Noyen-sur-Sarthe et son église Saint-Germain avant de croiser le château de Rivesaltes posé à l’entrée de Malicorne-sur-Sarthe. Une halte est nécessaire dans ce gros bourg qui vit encore de la faïence. Le joli musée qui occupe une ancienne faïencerie raconte l’histoire de cet artisanat local. On y découvre des pièces historiques remarquables, mises en regard avec des objets de céramique contemporaine montrant que les techniques et les styles ont évolué. C’est tout un univers qui se dévoile, dans un édifice

LE MUSÉE DE LA FAÏENCE ET DE LA CÉRAMIQUE DE MALICORNE-SURSARTHE EST LABELLISÉ « MUSÉE DE FRANCE » DEPUIS 2009. IL PRÉSENTE UNE EXPOSITION SUR LES ARTS DE LA TABLE JUSQU’EN SEPTEMBRE PROCHAIN.

SABLÉ-SUR-SARTHE

ENTRE LE MANS ET PINCÉ, LA SARTHE EST NAVIGABLE SUR 90 KILOMÈTRES ET JALONNÉE DE 16 ÉCLUSES moderne dont il reste les fours et la cheminée ancienne. Pendant ce temps, la Sarthe poursuit son cours, impassible, jusqu’à Sablé qui vit littéralement les pieds dans la rivière. Le château du XVIIIe siècle trône au-dessus de toute la ville et accueille une annexe de la bibliothèque nationale de France qui y conserve et restaure de vieux livres et documents imprimés. Il se dresse fièrement au-dessus du petit port de plaisance d’où l’on part pour des balades fluviales. On peut être autonome sur un bateau de location, ou partir sur le Sablésien qui propose des balades commentées avec même un déjeuner à bord. L’excursion immanquable mène jusqu’à l’abbaye de Solesmes. Quelques kilomètres en amont de la ville, ce chef-d’œuvre architectural bénédictin est solidement posé au bord de l’eau. Il ne se visite pas vraiment. Seule l’église est accessible lors des prières des moines de l’abbaye qui se déroulent en grégorien six fois par jour.


© Gregory Valle

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LE SABLÉSIEN DEVANT L’ABBAYE DE SOLESMES

3 ARTISANAT ATELIER VÉZANNE Clélia Chotard vit à Malicorne. En avril 2020, un jour de confinement, sa fille Garance trouve des morceaux de faïence cassée dans le jardin de la maison familiale. Avec son petit frère, elle passe des heures à fouiller le sol telle une archéologue en herbe. Clélia se prend alors d’une idée : créer des bijoux avec ces tessons de faïence. Un an plus tard, l’atelier Vézanne prend son envol, du nom du ruisseau qui borde la maison. Avec des tessons d’objets oubliés, la créatrice qu’elle est devenue travaille à les polir, les limer, les sertir dans du métal pour en faire des bijoux originaux et raffinés. Des assiettes, des soupières ou des carafes donnent alors plusieurs boucles d’oreilles ou morceaux de colliers. Une idée lumineuse et un savoir-faire créé de toutes pièces, à découvrir sur place dans l’atelier de Clélia, ou en ligne. vezanne.fr

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© Sebastien Gaudard / Anjou Tourisme

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LE CHÂTEAU DES DUCS D’ANJOU A LES PIEDS AU BORD DE LA MAINE DEPUIS SA CONSTRUCTION AU XIIIE SIÈCLE

La capitale de l’Anjou n’est pas sur la Loire. Le fleuve royal n’est pourtant pas loin, mais le cours d’eau qui traverse Angers est la Maine. Elle naît de la confluence de la Sarthe et de la Mayenne juste à l’entrée de la ville, et ne s’étire que sur 11,5 petits kilomètres. Mais elle est tout à fait navigable. Il est donc possible de débarquer à Angers par voie fluviale. On a alors l’impression de fendre la ville qui est littéralement coupée en deux par la rivière. D’un côté, l’ancien quartier de la Doutre s’est développé il y a dix siècles autour de l’abbaye du Ronceray devenue le siège de l’école des arts et métiers. Cette rive ouest de la Maine compte aussi la belle église de la Trinité, mais aussi le musée Jean-Lurçat et de la tapisserie contemporaine. Les rues les plus proches du bord de l’eau vivent une vraie renaissance depuis l’installation de restaurants en vogue ou encore de l’impressionnant Centre national de danse contemporaine. Et l’inauguration d’une ligne de tramway qui traverse le secteur depuis cet été 2023 devrait encore donner un nouveau battement d’ailes à la Doutre.

© LUG Creation / Anjou Tourisme

AUTOUR DE LA MAINE À ANGERS


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© Thierry Pineau

© Sebastien Gaudard / Anjou Tourisme

© Le blog Cash Pistache / Anjou Tourisme

De l’autre côté de la Maine, c’est le cœur d’Angers qui bat la chamade. Il y a le château bien sûr, unique en son genre avec sa longue enceinte bicolore flanquée de dix-sept tours massives. Mais pour mieux palper la mythique douceur angevine, il faut errer dans la vieille ville émaillée par endroits de belles demeures à pans de bois comme dans la rue de l’Oisellerie. De nombreux jeunes se baladent dans les rues commerçantes autour de la place du Ralliement. Angers est une ville étudiante, qui baigne dans une atmosphère aussi dynamique qu’insouciante, surtout dans les parcs et jardins comme sur les berges ombragées de la Maine qui n’invitent qu’à la détente.

© LUG Creation / Anjou Tourisme

4 HÉBERGEMENT L’OISELLERIE

LE JARDIN DU MAIL

Marlène et Joanna sont amies. À elles deux, elles ont repris les clés d’une maison du XVIe siècle classée Monument historique en plein centre-ville. Elles en ont fait une maison d’hôte de grand charme où l’on trouve six chambres reliées par un impressionnant escalier intérieur en bois massif. Le Refuge, le Perchoir, la Volière, le Nid… chacune est différente des autres. Dans la décoration, quelques

touches contemporaines dans le mobilier ou dans la literie en font une maison d’aujourd’hui, mais les parquets qui crissent, les tomettes abîmées ou les poutres apparentes nous rappellent sans cesse que nous sommes dans une demeure à fort caractère, et qui a une longue histoire. Les petits déjeuners sont servis au rez-de-chaussée, derrière la boutique de produits locaux qui achève de faire de l’Oisellerie une maison vraiment pas comme les autres. loisellerie.com


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5 PARC À THÈME TERRA BOTANICA

hectares, douze sont consacrés à la visite. Il faut bien passer une journée sur place si l’on veut prendre le temps d’écumer la place du marché, la serre au papillons, l’île aux sons, le bain de couleurs ou encore les cabanes à quizz, parmi les dizaines

d’espaces et de jardins qui mettent tous en valeur le monde du végétal. Parterres de fleurs, bambouseraies, bayou de Louisiane et potagers forment un parc géant qui fait prendre un grand bol d’air à n’importe qui y met le pied. Des

attractions comme le petit train qui contourne le parc ou l’Odyssée botanique qui se parcourt en bateau ajoutent des sensations à la visite. Sans parler des spectacles vivants qui se déroulent toute la journée et du nouveau parcours des géants où

© Coralie Pilard

© Coralie Pilard

© Thierry Huguenin

© Terre Botanica

Plus qu’un parc, c’est tout un monde. Depuis son ouverture au public en 2010, Terra Botanica est l’une des locomotives touristiques de l’Anjou.

Situé à l’emplacement d’un ancien aérodrome, tout près des rives de la Mayenne, ce grand terrain de découvertes pour petits et grands évoque le monde de l’horticulture qui fait vivre la région depuis plusieurs siècles. Sur quarante

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l’on se promène sur des filets suspendus entre les arbres. Terra Botanica est une expérience complète qui ouvre l’esprit et met des paillettes dans les yeux. Une bulle de nature éclatante à quelques lieues du centre d’Angers. terrabotanica.fr


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© Sebastien Gaudard / Anjou Tourisme

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Quittons Angers pour remonter le cours de la Mayenne. La rivière qui court sur près de 200 kilomètres traverse une partie du Maine-et-Loire. Son lit contourne l’agglomération angevine. On rencontre rapidement une série de jolies écluses dont celle de la Roussière où une vieille maison massive paraît flotter sur les eaux impassibles. Plus haut vient ensuite Grez-Neuville, petit village charmant où l’on trouve une importante base fluviale. C’est un bon point de départ pour embarquer sur un bateau sans permis et voguer dans ces paysages verdoyants. Au niveau de la commune du Lion d’Angers, on croise le haras national de l’Isle-Briand, beau château planté au cœur d’un domaine de 160 hectares. C’est à peu près à son niveau que l’on peut aussi bifurquer pour remonter l’Oudon. Ce cours d’eau est navigable jusqu’à Segré, et ponctué de trois écluses. Plus étroit et sauvage que la Sarthe ou la Mayenne, il détonne par ses berges touffues et ses paysages rustiques, caractéristiques de cette région baptisée Anjou Bleu. Hervé Bazin, originaire d’un village des environs, décrit parfaitement le coin: « Des prés bas, rongés de carex, des chemins creux, d’innombrables haies vives qui font de la campagne un épineux damier, des pommiers à cidre encombrés de gui, et quelques landes à genêts… » écrit-il dans Vipère au poing en 1948. Voguer sur l’Oudon donne à voir des paysages inapprivoisés, et replonge les plaisanciers dans un décor de bocage profond qui fait se sentir loin de tout, mais près de la terre.

© Sebastien Gaudard / Anjou Tourisme

DE LA MAYENNE À L’OUDON

LA CANALISATION DE LA MAYENNE A COMMENCÉ DÈS LE XVIE SIÈCLE ET A PERMIS QU’ELLE SOIT FACILEMENT NAVIGABLE. LA SARTHE ET L’OUDON ONT AUSSI ÉTÉ CANALISÉES, AU XIXE.


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© Lezbroz / Teddy Verneuil / Mayenne Tourisme

© Lezbroz / Teddy Verneuil / Mayenne Tourisme

ESCALE À CHÂTEAU-GONTIER

LE COUVENT DES URSULINES

Sur le fil de la Mayenne, en remontant toujours vers le nord, une petit ville pleine de charme invite à l’escale. Château-Gontier est connue pour son couvent des Ursulines. Fondé au début du XVIIe siècle par les sœurs d’une congrégation de Laval, l’édifice rayonne par son cloître à trois ailes. Il abrite aujourd’hui l’office de tourisme, un conservatoire de musique et une magnifique salle de spectacle. Depuis le départ des religieuses en 1965, tout l’édifice résonne au son de la musique et des textes qui sont déclamés sur les planches de cette scène nationale. Sur l’autre rive de la Mayenne, la vieille ville est construite sur la pente d’un à-pic rocheux. En grimpant la


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© Mathieu Lassalle / French Wanderers / Mayenne Tourisme

Grande Rue, on s’élève vers l’hôtel Fouquet où loge le musée d’Art et d’Archéologie. Au-dessus encore se dresse l’église romane Saint-Jean-Baptiste dont la nef et la crypte sont d’une beauté très épurée. Et puis le jardin du bout du monde offre de beaux espaces d’ombre pour se reposer après la montée. La Mayenne coule en contrebas, sur laquelle on voit parfois de drôles de bateaux miniatures faire des ronds dans l’eau. Le centre Canotika voisin de la capitainerie loue des Dandy, sortes de « toy boats » monoplaces, très maniables et propulsés électriquement. Voilà un moyen amusant et écologique de voguer en toute sécurité, dans une sorte de mini-riva capable de se faufiler partout, au plus près des berges de la rivière.

LE DANDY EST UN BON MOYEN DE DÉCOUVRIR CHÂTEAU-GONTIER DEPUIS LES EAUX DE LA MAYENNE

Lancé dans des études d’infirmier, Antoine Faucheux décide un jour d’opérer un virage à 180 degrés. Sa passion, c’est la coutellerie. Il se rend donc à Thiers pour entamer une formation au métier. En 2012, il installe sa propre coutellerie dans la maison éclusière de Neuville, au bord de l’eau, en plein cœur de la Mayenne. Avec sa petite équipe, entre deux tournages de manivelle pour ouvrir ou fermer l’écluse au passage des bateaux, il travaille ses couteaux

© May’photos

6 ARTISANAT COUTELLERIE

pliants, couteaux de table ou couteaux de cuisine dans l’atelier situé à l’étage. Chaque lame finement travaillée est en acier inoxydable et les manches sont en bois qui provient à 98 % de la région. La Coutellerie du Maine-Anjou peut

aussi personnaliser les lames avec du guillochage. Il est aussi possible de suivre des ateliers pour fabriquer soi-même son couteau, ici ou dans l’atelier-boutique jumeau situé à Angers. coutellerie-dumaine-anjou.com


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© Mathieu Lassalle / French Wanderers / Mayenne Tourisme

© Hellolaroux / Mayenne Tourisme

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AU NORD DE MAYENNE, LA RIVIÈRE N’EST PLUS VRAIMENT NAVIGABLE ET A GARDÉ UN ASPECT ENCORE PLUS SAUVAGE LAVAL

DE LAVAL À MAYENNE

7 ARTISANAT LES SAVONS DE RAPHAËL Il y a quelques années, Florence Ankri s’installe dans la maison de ses rêves, à la campagne, au fin fond de la Mayenne. Lassée de son travail, elle se met à créer ses propres cosmétiques, en distribue à ses amis, et finit par ouvrir une première boutique en 2010. À force de formations, de recherche et de passion, elle développe peu à peu sa gamme et se met à créer des savons, puis des shampoings, puis des baumes et fait grossir sa petite entreprise. La voilà désormais installée dans une grande

boutique en centreville de Mayenne. Toutes ses créations sont 100 % bio, issues de produits naturels et principalement locaux, faites à la main et vendues sans emballage. Ses crèmes, ses dentifrices ou ses déodorants sont créés en fonction

des différents types de peaux ou de cheveux et peuvent même résoudre certains problèmes dermatologiques. Des cosmétiques éthiques et efficaces pour plaire aux femmes, aux hommes et aux enfants ! lessavonsderaphael.fr

Les virages s’enchaînent, les écluses aussi. La Mayenne fait défiler ses interminables décors de campagne bucolique jusqu’à Laval. La préfecture du département est elle aussi en équilibre de part et d’autre de la rivière. On s’y arrête pour ses jolies ruelles raides ou escarpées comme la rue de la Chapelle, ou la Grand-Rue qui exhibe fièrement l’une des plus vieilles maisons… de France (début XVe) ! Dans le jardin de la Perrine, les amateurs d’art viennent se recueillir sur la tombe d’Henri Rousseau. « Le Douanier » est l’une des figures de Laval, connu pour ses toiles si exotiques alors qu’il a si peu voyagé et s’est rarement éloigné de sa région natale. Une toile et une esquisse signées de son nom sont visibles au musée d’Art naïf, le plus important de ce style en Europe. Le musée occupe une partie du vieux château qui reste la plus ancienne construction de Laval. Ses racines remontent au XIe siècle. Il a gardé plusieurs éléments de son architecture d’origine, dont son enceinte fortifiée et son donjon circulaire que l’on peut grimper. Au sommet, une magnifique charpente défensive offre quelques fenêtres d’ouverture sur les toits de la ville et sur la rivière qui passe en contrebas. Au nord du département, Mayenne a aussi son château dressé au bord de l’eau. À l’intérieur, un petit musée récemment rénové retrace l’histoire de la ville depuis l’époque carolingienne. Le joli parc du château permet d’obtenir une dernière belle vue sur la Mayenne dont on atteint ici la dernière limite navigable. Les maisons éclusières rénovées, les chemins de halage élagués et ces paysages bocagers laissés intacts achèvent de convaincre quiconque suit le cours de cette rivière qu’elle est bien l’une des plus belles de France. —


© Hellolaroux / Mayenne Tourisme

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CARNET D’ADRESSES É

Toue la Laita Port de Cheffes, 49125 Cheffes-sur-Sarthe 06 89 40 52 06 bateau-laita.fr Cette très jolie toue cabanée est amarrée au petit port de Cheffessur-Sarthe. Nuit calme garantie sur ce bateau très stable et confortable, où l’on est accueilli avec le sourire par Isabelle et son mari, le couple propriétaire. Compter 120 € la nuit en été.

SE RESTAURER

Le Petit Perier 4 place du Gast, 53000 Laval 02 43 49 22 00 hotel.lepetitperier.fr Un joli trois-étoiles près du centre de Laval. Déco agréable, très dans l’air du temps. À partir de 95 € la nuit en chambre simple, 100 € en chambre double.

La Petite Auberge 5 place Du Guesclin, 72270 Malicornesur-Sarthe 02 43 94 80 52 petite-aubergemalicorne.com Une bonne vieille table bien française comme on les aime. Atmosphère purement familiale, avec accueil chaleureux et cuisine de qualité dans un décor légèrement suranné. L’âme de la France. Fermé dimanche soir, lundi et mardi. Menu à 20,50 € le midi.

La Maison d’Hercule 93 rue Charles de Gaulle, 53100 Mayenne 07 86 99 26 44 Splendide demeure construite en 1878 et tenue aujourd’hui par un Américain aimable. Robert Trickey propose cinq chambres d’hôte de grand style bourgeois, avec quelques touches de modernité disséminées. À partir de 65 € la nuit.

La Ciboulette 14 rue de la Vieille Porte, 72000 Le Mans 02 43 24 65 67 laciboulettelemans.com Une bonne table familiale au bas du Vieux-Mans. Ouvert tous les jours midi et soir (sauf le mardi). Plats à partir de 14,90 €. Cuisine française classique mais bien exécutée et servie avec le sourire.

Les Copains d’abord Le Moulin de Neuville, 53360 La Roche-Neuville 02 43 07 77 20 Une adresse sympa avec une belle terrasse au bord de l’eau. Produits frais et locaux, viandes de qualité et escargots très goûteux. Ouvert du mercredi au dimanche de midi à 14 h puis de 19 h à 21 h 30.

© DR / La Réserve

Hôtel le Prince Allée Leprince d’Ardenay, 72100 Le Mans 02 72 16 81 77 leprince-hotel-spa.com Un joli quatre-étoiles récent, situé dans l’enceinte du couvent de la Visitation, en plein centre-ville. 38 chambres et suites à la déco contemporaine, un spa et salon de coiffure, et de nombreuses boutiques et restaurants juste à côté. À partir de 110 € la nuit.

© DR / La Petite Auberge

SE LOGER

Aux 3 Moulins 10 quai de Verdun, 53200 Château-Gontiersur-Mayenne 06 82 40 84 25 Cette vieille maison médiévale a été entièrement restaurée par Christophe, son propriétaire littéralement passionné. Les deux chambres sont vastes et pleines de charme, dont une a vue sur la rivière. Située sur la Vélo Francette, elle est parfaite pour les cyclistes. À partir de 65 € la nuit.

La Réserve Boulevard Henri Arnauld, 49100 Angers 02 41 87 85 80 lareserveangers.fr Une adresse sympa, un peu isolée au sommet du théâtre Le Quai, mais qui profite d’une vue grandiose sur toute la ville. En été la terrasse est pleine. Bonne ambiance garantie. Plats entre 17 et 25 €. Menu à 42 €. Mamie Fada 18 quai des Carmes, 49100 Angers 02 41 54 49 59 mamiefada.com Un restaurant un peu


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LES RIVIÈRES DE L’OUEST

L’Écluse 2 quai de l’Hirondelle, 49220 Grez-Neuville 02 41 27 13 08 restaurant-lecluse.com Bonne adresse située dans une maison éclusière au-dessus du port de Grez-Neuville. Cuisine réconfortante et de très bonne qualité. Ouvert le midi du mardi au dimanche, et les vendredis et samedis soir. Entrée-plat-dessert à partir de 19,50 €.

branché, situé dans le quartier de la Doutre, au bord de la Maine. Belle terrasse extérieure et cuisine bien ancrée dans son temps. Ouvert tous les jours, midi et soir. Plats à partir de 18,90 €. Mardi, jeudi et dimanche soir c’est brasero uniquement.

Le Grand Hôtel 2 rue Ambroise de Loré, 53100 Mayenne 02 43 00 96 00 grandhotelmayenne.com Hôtel-restaurant de charme classé trois étoiles et labellisé Logis de France. La table est raffinée et authentique, avec service traditionnel à la française. Menu Grand Hôtel à 19,90 €, et Menu terroir à 37 €. Fermé les samedis midi et dimanches de mai à octobre.

À FAIRE — À VOIR

© Pascal Beltrami

L’Effet papilles 16 rue des Déportés, 53000 Laval 02 43 65 68 03 effetpapilles.fr Une adresse bistronomique dans le centre de Laval. Menu du marché le midi, menu dégustation ou formule à la carte le soir. Plats à partir de 29 €. Formule à partir de 38 €. Ouvert du mardi au samedi de 12 h à 14 h et de 19 h à 22 h.

Île MoulinSart, Rue du Canal, 72210 Fillé 02 43 57 05 10 ile-moulinsart.fr Les installations sur l’île sont ouvertes du mercredi au dimanche de 14 h à 18 h et les dimanches matin de 10 h à 13 h. Le Sablésien sablesien.fr Les croisières vont de la simple promenade d’une heure et demie (13 €), jusqu’à la grande

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navigation jusqu’à Parcésur-Sarthe avec déjeuner à bord (81 €). Musée de la Faïence et de la Céramique Rue Victor Hugo, 72270 Malicornesur-Sarthe 02 43 48 07 17 musee-faience.fr Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 18 h. Entrée adulte 5 €, enfant 3 €. Balade en Dandy canotika-tourisme.fr La base Canotika est située juste à côté de la capitainerie du port de Château-Gontier. Compter 8 € pour un essai de 15 minutes, et 14 € pour naviguer en duo sur la Mayenne. Musée des Arts naïfs de Laval Du mardi au samedi de 9 h à 12 h et de 13 h 30 à 18 h. Les dimanches de 14 h à 18 h. Entrée gratuite. Visite commentée à 3 € mais gratuite chaque premier dimanche du mois. Anjou Navigation anjounavigation.fr Compter à partir de 445 € de location pour un week-end sur un bateau avec une seule cabine, à partir de 590 €

pour un bateau familial plus grand. Tous les modèles et tarifs sont en ligne. La base principale est à Sablé-sur-Sarthe et une base secondaire est à Grez-Neuville.

INFOS PRATIQUES

Y ALLER Le Mans, Angers et Laval sont toutes trois accessibles en TGV depuis ParisMontparnasse, Nantes ou Rennes. Une fois sur place, mieux vaut disposer d’une voiture pour se balader dans la région. Sinon, de nombreux itinéraires 100 % cyclables existent comme la Vélo Francette qui longe la Mayenne sur des dizaines de kilomètres. Enfin, la compagnie Anjou Navigation loue des bateaux pour parcourir les Rivières de l’Ouest.

RENSEIGNEMENTS Rivières de l’Ouest rivieres-ouest.com

À LIRE La France au fil de l’eau (Guide du tourisme fluvial), Petit Futé 2019


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On the road again

ÉCOSSE La « van life » c’est quoi ? Tout le monde en parle, mais qui la vit ? Le temps d’une semaine de road trip en Écosse, nous avons voulu tester. Et le constat est clair : vivre sur la route n’est plus comme avant. Le confort est de mise, et la liberté totale.

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Texte & photos \ Lucas Lahargoue (sauf mention)

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© Daniel Kay

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Édimbourg ANGLETERRE

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e pays est comme un rêve. Ce n’est pas vraiment un pays, certes, mais on aime l’appeler ainsi tant son identité et son caractère son forts et affirmés. L’Écosse est l’une des nations constitutives du RoyaumeUni. La plus septentrionale, la plus chaleureuse peut-être, surtout très haute en couleur. Voyager en Écosse, c’est parcourir l’un des bouts du monde. C’est pourquoi nous l’avons choisie pour notre premier road trip en van ; pour être libres et proches de la nature qui s’exprime avec grandeur, qu’on soit dans les Highlands ou sur les îles Hébrides. Partis d’Édimbourg, nous avons mis cap au nord vers le mythique château de Balmoral. Après une longue traversée des Highlands, nous avons atteint les côtes atlantiques. L’île de Mull a ensuite été une belle découverte, avant de redescendre tranquillement en faisant une escale sur les bords du Loch Lomond. En cinq jours à travers le cœur de l’Écosse, nous avons écumé de jolis villages, traversé des rivières, longé des falaises et pas vraiment eu le temps de compter les moutons. Dans notre van Roadsurfer, la vie s’est organisée facilement, en exploitant toutes les astuces et les espaces de cette petite maison roulante qui n’a jamais manqué de confort. Au hasard des routes et des montagnes, nous avons voyagé au plus près de l’Écosse véritable, celle des pubs et des petits ports de pêche, des bergers et des lacs, mais aussi des châteaux et des cornemuses. Récit d’une aventure enchantée, où nous avons eu la chance… de passer entre les gouttes ! — visitbritain.com/fr


© kasakphoto

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© Luis Mayoral

© Cameron Gibson

© Athip_Taechapongsathon

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JOUR 1 : ÉDIMBOURG Nous voilà arrivés dans la capitale écossaise. Première surprise, le ciel est d’un bleu éclatant, pourvu que ça dure. Nous avons la journée pour nous balader, d’abord dans la vieille ville. Elle est construite sur les contreforts d’un ancien volcan qui crée une fortification naturelle. Le château se repère de loin. Dressé sur son piton rocheux, il émerge au-dessus des toits et surplombe le beau jardin de Princes Street. On y grimpe en traversant le cœur historique d’Édimbourg classé au Patrimoine mondial de l’Unesco. Il y a Victoria Street bien sûr, cette artère arrondie connue pour ses façades colorées, mais aussi le quartier de Grassmarket centré sur une agréable place piétonne où se déploie un marché tous les samedis. En empruntant The Mound, on redescend en pente douce vers la ville nouvelle. Ici, les rues

sont bien moins biscornues. « New Town » est le symbole de l’architecture géorgienne du XVIIIe siècle, caractérisée par un plan beaucoup plus ordonné, mais parfois ponctué de drôles de rues en demi-lune, et de places particulièrement arborées. Ces jardins sont d’ailleurs privés, et seuls les riverains peuvent en disposer, en échange d’un droit annuel. Sans aller beaucoup plus loin, notre coup de cœur est pour le Dean Village. À quelques rues du centre, ce petit quartier est un ancien village de meuniers immergé en pleine agglomération. Il est traversé par une rivière presque sauvage qui creuse un petit vallon. Cette coulée verte luxuriante a quelque chose de profondément romantique et donne l’image d’une capitale investie par la nature.


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JOUR 2 : CHÂTEAU DE BALMORAL 9 h du matin. Nous sommes à l’ouverture de l’agence Roadsurfer, située à l’extérieur d’Édimbourg. C’est un avantage pour quitter la ville plus facilement. Une fois la location signée et « l’état des lieux » effectué, nous prenons la route. Rien à signaler. Notre van est un Volkswagen T6.1 California, baptisé « Surfer suite ». Il est tout neuf, habillé d’une éclatante robe blanc et rouge. Une fois le volant à droite apprivoisé, nous filons vers le nord. En traversant le fleuve Forth, nous apercevons le célèbre Forth Bridge, deuxième plus long pont ferroviaire au monde et classé à l’Unesco depuis 2015. Plus la ville s’éloigne, plus la campagne s’installe. Une fois sortis de l’autoroute, les chaussées rétrécissent. La prudence est nécessaire pour apprivoiser les routes écossaises ! Après deux heures de balade dans les bocages, nous arrivons à Balmoral. Ce petit hameau perdu au cœur de l’Aberdeenshire abrite l’une des résidences de la famille royale britannique depuis 1852. Mieux encore, c’est le château préféré de la famille. Un château existait déjà sur ce terrain acheté par le mari de la reine Victoria, mais il fut détruit. La demeure d’aujourd’hui a été achevée en 1856. L’intérieur ne se visite pas mais le roi Charles III a déjà exprimé son souhait de l’ouvrir davantage au public à l’avenir. Pour le moment, on ne découvre que la salle de bal où sont exposés quelques costumes et une myriade de photos des Windsor. On peut aussi profiter du magnifique parc qui entoure le château et fait partie du domaine qui couvre au total 20000 hectares. Le site est un havre de paix absolu, bordé par la rivière Dee. Élisabeth II aimait ce château. C’est même ici qu’elle a rendu l’âme le 8 septembre 2022, dans cette forteresse aux allures de manoir fantasmagorique sorti tout droit d’un conte de fées.

© Gimas / Shutterstock.com

balmoralcastle.com

LE CHÂTEAU DE BALMORAL EST AU CŒUR D’UN DOMAINE DE 20 000 HECTARES CONSTITUÉ DE LANDES, DE FORÊTS ET DE TERRES AGRICOLES.


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JOUR 3 : TRAVERSÉE DES HIGHLANDS

LES HIGHLANDS SONT LE CŒUR ET L’ÂME DE L’ÉCOSSE. UNE TERRE AUSSI BELLE QU’AUSTÈRE. Plus loin, une fois passée la ville de Fort Williams se trouve le viaduc de Glennfinnan. Achevé en 1901, c’était à l’époque l’un des plus grands ouvrages d’art utilisant du béton armé dans ses 21 arches. Le monument surfe sur un incroyable retour de notoriété depuis qu’il a été utilisé comme décor dans la saga Harry Potter. Plusieurs points de vue autour du viaduc permettent d’observer le vieux train à vapeur de la West Highland Line qui passe sur les rails plusieurs fois par jour. Dans l’esprit des plus grands fans de l’enfant sorcier, c’est le Poudlard Express qui siffle, qui ronronne et qui fume au milieu de ce paysage typiquement écossais.

UN VIEUX TRAIN À VAPEUR PARCOURT LES 380 MÈTRES DU VIADUC PLUSIEURS FOIS PAR JOUR

© travellight

© Matthew Feeney

Sortis de Balmoral, nous continuons notre route à travers ce qu’on peut déjà appeler les Highlands. Une longue route contourne le parc national de Cairngorms où l’on croise les seuls rennes écossais, ré-introduits en 1952 par un lapon suédois. Parfois, l’itinéraire plonge dans de larges vallées, puis remonte vers des cols peu élevés mais souvent enneigés l’hiver. On croise même une station de ski ! Le Lecht Ski Centre est la plus petite station écossaise, perchée à seulement 778 mètres. Mais cette altitude est suffisante pour qu’il y ait 23 pistes couvrant 26 kilomètres de glissade ! Après une nuit passée dans un camping forestier, au bord d’une rivière paisible, nous repartons vers l’ouest en marquant une halte à la chapelle de Cille Choirill, perdue en pleine montagne et entourée d’un petit cimetière. L’endroit correspond parfaitement à l’image que l’on se fait des Highlands.

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UNE LÉGENDE RACONTE QU’UN GALION ESPAGNOL PLEIN D’OR AURAIT COULÉ PRÈS DE TOBERMORY EN 1588. POUR LE MOMENT, PERSONNE N’EN A RETROUVÉ LA TRACE.

JOUR 4 & 5 : L’ÎLE DE MULL Dans le port d’Oban, notre petit van rouge et blanc monte sur un ferry. Direction l’île de Mull. Une heure de navigation suffit à rallier la deuxième plus grande île écossaise après l’île de Skye. Dans le port de Craignure où l’on débarque, pas grandchose : une église, deux auberges, un camping et deux restaurants. Nous filons prendre notre petit déjeuner avec vue sur la mer au pied du magnifique château de Duart. L’île est grande. Nous entamons ensuite un grand tour, en tentant d’esquiver les averses qui laissent parfois deviner leur arrivée quelques kilomètres en avance. Plus on s’enfonce dans l’île, plus les routes sont escarpées, mais partout, sur les bas-côtés, des espaces permettent de se ranger pour croiser des véhicules

arrivant en sens inverse. C’est le génie des routes écossaises. Sur Mull, nous avançons lentement, observant chaque détail du paysage parfois très doux, parfois plus rude. À certains endroits, la route longe des falaises abruptes où viennent se casser des vagues intenses. Les décors ressemblent parfois à des scènes de Game of Thrones, et parfois à des coins de Bretagne plus hospitaliers comme la magnifique plage de Calgary et son sable blanc. Au nord de l’île, le petit port de Tobermory est une respiration après des kilomètres écumés sur des routes presque vierges. Le village est un peu touristique et notre dîner chez Mishnish, un pub dans le plus pur style écossais, nous réconforte avant de déplier le toit de notre van pour une nuit face à la mer.


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* À PROPOS ROADSURFER Cette compagnie de location de vans aménagés est originaire d’Allemagne, mais présente dans toute l’Europe. 52 agences sont disséminées en France, Autriche, Belgique, Espagne, Italie, Portugal, Suède, et même aux USA. De nombreux modèles sont disponibles. Le Surfer Suite que nous avons pu tester est le plus petit modèle mais déjà très confortable. On peut y voyager à quatre personnes. Il comprend une petite cuisine, une douche extérieure d’eau froide, un GPS, une aide au stationnement et un toit relevable automatique. Roadsurfer met aussi à disposition du linge de lit et une box cuisine avec tous les ustensiles nécessaires, moyennant supplément. D’autres fourgons plus grands et plus élaborés offrent encore plus de confort comme le Travel Home, ou le Road House. Il faut compter à partir de 65 € la nuit pour le plus petit modèle, avec kilométrage illimité et deuxième conducteur gratuit. roadsurfer.com

JOUR 6 : LOCH LOMOND Au petit matin, un ferry nous ramène de Mull sur le continent. Ou plutôt sur la grande île. Retour dans les Highlands pour prendre la route du sud qui nous ramène lentement vers Édimbourg. Nous optons pour un détour par les massifs de Glencoe. La route A82 traverse un impressionnant goulet bordé de hauts et spectaculaires sommets. La région est un haut lieu de l’alpinisme et de la randonnée en Écosse. Nous en profitons pour nous enfoncer à pied dans ce paysage extraordinaire qui revêt différentes tonalités brunes et vertes. Et puis le paysage s’aplanit et fait penser à d’immenses champs de lave figée comme on pourrait en voir en Islande. Le décor change tous les dix kilomètres et le spectacle est incessant jusqu’aux rives du Loch Lomond. Le plus grand lac de GrandeBretagne impressionne avec ses 71 kilomètres carrés. Il fait


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© Jaroslav Moravcik

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LE LOCH LOMOND S’ÉTEND SUR 71 KILOMÈTRES CARRÉS. C’EST L’UN DES PLUS GRANDS LACS DU ROYAUME-UNI. partie intégrante d’un parc national depuis 2002. La route qui court tout au long de sa côte ouest est étroite et assez fréquentée. Nous préférons nous installer sur la rive orientale pour la nuit, sur un site au bord de l’eau. Pour la dernière fois du séjour, nous déployons le toit ouvrant de notre Surfer Suite. Un rayon de soleil de fin de journée nous permet même de dîner dehors, sur les chaises et la table astucieusement dissimulées dans l’habitacle. Au petit matin, en ouvrant la fenêtre du toit, c’est une merveilleuse vue sur le lac qui se présente à nos yeux dès le réveil. Une possibilité qui ne peut exister que lorsqu’on voyage en van, par la route, en s’arrêtant où bon nous semble, sans embêter personne. La liberté ! —

À PROPOS DE L’ÉCOSSE Comme tout le Royaume-Uni, l’Écosse est adepte de la conduite… à gauche ! Dans l’ensemble, les routes écossaises sont assez étroites, surtout dans les campagnes. Les croisements sont parfois… inquiétants, mais avec un peu de concentration, tout se passe bien. Une place de nuit pour un van dans les campings écossais coûte généralement entre 20 et 40 livres. Cela dit, il faut savoir que le camping sauvage est légal dans tout le « pays ». C’est un argument de choix pour profiter pleinement d’un road trip en toute liberté. visitscotland.com


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Balade en Limousin

LA CREUSE Envie de verdure ? Besoin de recharger les batteries ? Aller simple vers la Creuse ! Loin d’être perdue et ennuyeuse, cette terre située en plein cœur de la France attire de plus en plus les amateurs de campagne et les chercheurs d’authentique. Nous sommes allés voir.

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Texte & photos \ Christian Jelenia (sauf mention)

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ortons des clichés ! Ce département n’est pas celui que l’on croit. Son nom voudrait le faire passer pour vide, mais la Creuse est bien pleine. Pleine de jolis reliefs, pleine d’idées et pleine de chaleur humaine surtout, pour qui vient s’aventurer dans ces contrées du fin fond du Limousin. En Creuse, il y a quelque chose à venir chercher : du vert, de la nature, du calme… bref, tout ce qui fait la vraie valeur de la vie d’aujourd’hui dans nos sociétés un peu trop pressées. Loin des métropoles, et loin des clichés, nous avons donc pris la tangente, direction ce coin de France qui ne mérite pas qu’on l’oublie. De la vallée des peintres au plateau de Millevaches en passant par la station thermale d’Évaux-lesBains ou la tranquille Bourganeuf, nous avons écumé la Creuse par ses routes et ses chemins de traverse. Et au milieu de tout ça, il était impossible de manquer Aubusson qui n’en finit pas de rayonner sur le monde grâce à sa merveilleuse Cité internationale de la tapisserie. Comme quoi, à son niveau, la Creuse peut aussi être un étendard de la France qui réussit. Une France profonde comme on l’aime, avec ses campagnes, son histoire et son patrimoine infiniment riche et puissant. —

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© FOEHN Photographie / Creuse Tourisme

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UNE VALLÉE, DES PEINTRES Entrer en Creuse par le nord vous mène forcément à Crozant. Au pied de ce petit village, la rivière qui a donné son nom au département dessine des boucles arrondies à travers la végétation et marque la frontière avec l’Indre. Elle contourne une presqu’île sur laquelle résistent au temps les ruines d’un château du Moyen Âge. Ces paysages bucoliques ont été immortalisés à partir des années 1850 par une armée de peintres impressionnistes venus chercher ici des décors sauvages éventrés par le passage de l’eau. Comme Barbizon ou Pont-Aven, l’école de Crozant a marqué les esprits grâce aux toiles d’Armand Guillaumin, Léon Detroy ou Paul Sérusier. Claude Monet a aussi passé du temps avec ses pinceaux et son chevalet dans cette vallée de la Creuse. En 1889, son ami, le poète Maurice Rollinat, l’invite alors qu’il est installé dans le village voisin de Fresselines. Monet y débarque, tombe amoureux du coin, remonte chercher son matériel à Giverny et revient dans la vallée pour y rester plusieurs semaines. « C’est superbe ici, d’une sauvagerie terrible qui me rappelle Belle-Île. J’y suis venu en excursion avec des amis et j’ai été si émerveillé que m’y voici depuis un bon mois », écrit-il à Berthe Morisot en avril 1889. Dans le village, l’espace Monet-Rollinat retrace le séjour du peintre à Fresselines, à travers des citations et des reproductions. Le petit musée qui occupe un ancien bâtiment agricole réhabilité fait aussi la part belle à la création contemporaine avec des expositions et des rencontres autour des arts graphiques, sonores, plastiques ou encore photographiques. Une visite intéressante dans ce village situé à la confluence de la petite et de la grande Creuse.

JUSQU’À LA FIN DU MOIS DE JUILLET, L’ESPACE MONET-ROLLINAT PRÉSENTE UNE EXPOSITION BAPTISÉE PEINDRE DANS LA VALLÉE DE LA CREUSE (1950-2023)


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1 HÉBERGEMENT CHÂTEAU DE LA CREUZETTE

Photos © Château de la Creuzette

Aux confins du Berry et de la Combraille, Boussac est connue pour son château érigé sur un promontoire majestueux. Mais à l’entrée de la ville, dans un parc flamboyant, un autre château n’est pas à bouder. La Creuzette est cette magnifique demeure, style Napoléon III, où l’on vient passer une nuit dans un magnifique décor à la française. Cinq chambres d’hôte sont réservables, dont la Arthur Rimbaud et son beau carton de tapisserie exposé en guise de tête de lit. Il y a aussi la Marie-Antoinette avec sa baignoire à l’ancienne qui loge dans une jolie alcôve intérieure. Au rez-de-chaussée, la salle à manger a conservé son papier peint d’origine sur lequel sont exposés d’autres beaux cartons de tapisserie. C’est ici que l’on profite de la cuisine de DeVerra Auret, jeune Sud-Africaine et maîtresse de cette maison historique. Elle met tous ses talents pour préparer des dîners agréables dans ce cadre enchanteur. Le reste du temps, il n’y a qu’à profiter des salons du rez-de-chaussée ou se reposer dans le parc qui n’invite qu’à une chose : se détendre au son du chant des oiseaux. lacreuzette.fr


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CHAMBON-SUR-VOUEIZE EST UN DRÔLE DE VILLAGE, TAPI DANS UN VALLON ET CENTRÉ AUTOUR D’UNE ÉGLISE IMMENSE

LA COMBRAILLE EST UNE RÉGION NATURELLE ET HISTORIQUE, PARTAGÉE ENTRE LE PUY-DE-DÔME, L’ALLIER ET LA CREUSE

Entre les collines de cette région que l’on appelle Combraille, des clochers émergent. Celui de Chambon-sur-Voueize est impressionnant. L’abbatiale Sainte-Valérie est la plus grande église de Creuse et impressionne par ses dimensions. Longue de 87 mètres, elle est plantée au cœur du village depuis le XIIe siècle. Tout près de là, Évaux-les-Bains a aussi une belle église. Baptisée SaintPierre-et-Saint-Paul, elle possède une longue et haute nef plutôt sobre et un clocher-porche unique dans la région. Mais on vient à Évaux-les-Bains pour ses sources bienfaitrices qui jaillissent à 60 °C. La seule et unique station thermale du Limousin est située en contrebas de la ville, dans le creux d’un vallon ravissant où l’on accourait déjà à l’époque gallo-romaine. Il règne un petit charme désuet dans ce centre thermal qui vit pourtant une nouvelle jeunesse. D’importants travaux de rénovation viennent d’être réalisés dans le Grand Hôtel et son restaurant qui rouvrent leurs portes le

© Nathalie Dubost - QPE

À TRAVERS LA COMBRAILLE

THERMES & SPA ÉVAUX-LES-BAINS

15 juillet. En attendant, les thermes continuent d’accueillir les curistes qui viennent se faire soigner des problèmes de rhumatologie, de phlébologie ou de gynécologie. Mais pas besoin d’être curiste pour profiter de l’endroit. Un spa permet de s’octroyer des soins de bien-être qui sont prodigués avec des cosmétiques de la marque Sothys. Mieux encore, de nouveaux produits élaborés avec plus de 50 % d’eau thermale viennent d’être mis sur le marché. Une gamme baptisée L’eau d’Évaux, certifiée bio et fabriquée à 100 % en France.


© FOEHN Photographie / Creuse Tourisme

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AUBUSSON

VOIR AUBUSSON ET SES CARTONS

LE MUSÉE DU CARTON EST L’UNE DES CURIOSITÉS D’AUBUSSON

Cap au sud du département. Aubusson est tapie dans le creux d’une vallée assez profonde, éventrée par le cours de la Creuse. C’est donc une ville de toits penchés, de rues raides et de jolis ponts. Une vieille maison paraît littéralement accrochée au pont de la Terrade. Il s’agit du royaume de Chantal Chirac. Voilà bientôt quarante ans que Chantal récolte, restaure, expose et vend des cartons de tapisserie. Ces modèles glissés sous un métier à tisser sont peints à la main sur… du carton. Ils ont progressivement été érigés au rang d’œuvres d’art à part entière, et Chantal en a des centaines. Beaucoup sont enroulés et stockés en attente d’être vendus ou nettoyés. Mais son antre est surtout un musée unique en France, où les salles un peu biscornues sont remplies de cartons déroulés souvent magnifiques. Le visiter est comme pénétrer dans une tanière lumineuse où l’on a envie de fouiller tous les recoins tellement les cartons sont partout. C’est en tout cas une bonne introduction au monde de la tapisserie qui fait la renommée de la ville depuis au moins six siècles. Ce savoir-faire continue d’être exercé aujourd’hui. Il est même labellisé Patrimoine immatériel par l’Unesco et la Cité internationale de la tapisserie d’Aubusson en est l’étendard dans le monde entier.


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2 RENCONTRE NADIA PETKOVIC Ça fume, ça bout, ça siffle… l’atelier de Nadia Petkovic est une sorte de petite usine à gaz multicolore. Mais la comparaison ne va pas plus loin. Nadia est teinturière et travaille artisanalement dans un local en plein centre-ville. Ce travail d’alchimiste, elle ne l’a appris que par l’expérience. « C’est un savoir empirique qui m’a seulement été transmis par mon prédécesseur. Tout se fait à l’œil. Ce n’est qu’à moi d’être attentive et de savoir quels ajustements exécuter pour obtenir les couleurs voulues » expliquet-elle en remuant des bonnets plongés dans une eau chaude où il manque visiblement quelques grammes de pigment jaune. Aux quatre coins de son atelier, des écheveaux de laine pendent, sèchent et attendent que les lissiers qui œuvrent sur les tapisseries viennent les chercher. Nadia fournit notamment les lissiers de la Cité internationale. Une belle reconnaissance pour la qualité de ses teintures, elle qui a longtemps travaillé sur des tapisseries avant de changer d’orientation pour créer elle-même la couleur.


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© Jérôme Trindade / Creuse Tourisme

LA CREUSE

UNE CITÉ QUI RAYONNE Les mines sont concentrées. Le silence règne et chacun est dans sa bulle. Dans une petite pièce au sommet de la Cité internationale de la tapisserie, des petites mains s’affairent à terminer La Peur de Hauru. Cette pièce de 3 x 5,60 m est une image extraite du film d’animation Le Château ambulant. Elle rentre dans la collection de cinq tapisseries que tisse la Cité, en partenariat avec le Studio Ghibli qui met en images les films de Hayao Miyazaki. Après avoir réalisé quatorze tapisseries et deux tapis inspirés de l’univers Tolkien, voilà qu’Aubusson tisse Miyazaki. L’idée lumineuse émane de l’esprit d’Emmanuel Gérard, brillant directeur de la Cité, qui met son énergie et sa créativité au service de la tapisserie d’Aubusson. Depuis plus de dix ans, lui et son équipe mènent à bout de bras des projets qui redonnent vie à cet art qui paraissait un peu poussiéreux jusqu’au milieu des années 2000. Parmi ces projets, il y eut l’idée de créer un grand édifice, d’architecture contemporaine, uniquement consacré à l’histoire de la tapisserie. En 2016, la Cité internationale était inaugurée, et avec elle Aubusson se refaisait une place de choix sur la carte culturelle de la France profonde. Sept ans plus tard, la Cité continue d’être la locomotive de toute une ville, si ce n’est de toute la région. Emmanuel a monté un fonds contemporain pour créer

LA PRINCIPALE MISSION DE LA CITÉ INTERNATIONALE EST DE FAIRE BRILLER L’ART DE LA TAPISSERIE EN FRANCE ET DANS LE MONDE ENTIER une quarantaine de pièces en dix ans. Certaines sont exposées, comme La Corde de Mathieu Mercier. Le reste des œuvres présentées au public évolue au fil du temps, mais on croise toujours des pièces du XVIIIe siècle qui jouxtent des tapisseries modernes de Picasso ou Vasarely. La Cité est surtout un musée vivant dans lequel des ateliers et des cours sont dispensés. On tisse sans cesse derrière les murs de ce bâtiment et, certains jours, c’est l’événement. Une fois achevée, une tapisserie (toujours réalisée à l’envers) est enfin révélée à l’endroit lors d’une cérémonie émouvante que l’on appelle « une tombée de métier ». Un instant magique pour les lissiers qui ont œuvré, et pour le public ébahi par ce travail d’une immense finesse. cite-tapisserie.fr


© Cité internationale de la tapisserie

© 2022 Princesse Mononoké © 1997 Studio Ghibli - ND

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LE LAC DE VASSIVIÈRE

SOUS LE CIEL ÉTOILÉ DES MILLEVACHES Il y en a vingt dans le monde. Vingt sites naturels seulement, labellisés Réserve internationale de ciel étoilé. Le plateau de Millevaches en fait partie. Avec 14 habitants seulement au kilomètre carré, pas étonnant que ce vaste plateau granitique à cheval entre la Creuse, la Corrèze et la Haute-Vienne soit vierge de pollution lumineuse. Les locaux l’appellent « la montagne limousine ». Il faut le dire vite. Le point culminant n’est qu’à 976 mètres de haut. Mais l’endroit a de vrais airs de montagne. Il est un peu rude et austère, mais aussi beau et très attirant. Il occupe un bon quart sud de la Creuse. On y arrive par Felletin, petite bourgade charmante qui serait le véritable berceau originel de la tapisserie. Ensuite, il n’y a qu’à s’enfoncer sur les petites routes du plateau pour comprendre ce qui fait l’âme de cette région reculée. Des villages de poche sont disséminés çà et là comme Crocq, agrippé sur les pentes de son ancienne ville fortifiée dont il ne reste que deux tours médiévales. Au fil des collines et des virages, on croise parfois des maisons de granit ou des fermes isolées dont on a bien du mal à comprendre le mode de survivance si loin de toute civilisation. Pourtant, l’homme est présent sur le plateau de Millevaches depuis plusieurs millénaires. Dans une forêt près de Crocq, le magnifique dolmen d’Urbe témoigne d’une présence il y a 4000 ans !

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© Daboost

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À l’autre bout du plateau, le pont de Senoueix paraît lui aussi avoir traversé les âges. Il est pourtant bien moins vieux mais paraît abîmé par les assauts du temps et de la rivière tourbée qui lui coule entre les jambes. En parlant de rivières, elles sont nombreuses à couler sur le plateau. Certaines alimentent le lac de Vassivière. À la jointure entre la Creuse et la Haute-Vienne, ce plan d’eau artificiel de 9,5 kilomètres carrés offre des paysages dignes du fin fond du Canada. Forêts de sapins, petits ports de plaisance et quelques îles touffues font partie de cet écosystème créé par la construction d’un barrage en 1950. En été, les berges du lac se transforment en petite riviera creusoise, avec leurs plages, leurs bases nautiques et leurs touristes qui profitent du décor en canoë, en paddle ou même en voilier. Les plus courageux peuvent même parcourir les 28 kilomètres de sentiers qui en font le tour… à pied !

© Gozzoli

« J’AI VITE COMPRIS POURQUOI ON APPELLE CE PLATEAU “DES MILLEVACHES”. PARCE QUE, MIEUX QUE NULLE PART AILLEURS, ON Y VOIT LA VOIE LACTÉE. » ERIK ORSENNA


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BOURGANEUF

BOURGANEUF EST MARQUÉE PAR LE PASSAGE DU PRINCE ZIZIM, TANTÔT DÉCRIT COMME « TRÈS SAVANT DANS LES LETTRES ANCIENNES », ET TANTÔT VU COMME « UN BARBARE FÉROCE ET CRUEL »

3 CENTRE D’ART LA BERGERIE Depuis 1975, « la Société des amis du Moutier d’Ahun » fait vivre une ancienne ferme située au centre du village, à deux pas de l’abbaye. En près de cinquante ans, la Bergerie est devenue un centre d’art réputé dans tout le Limousin. Elle enchaîne les expositions d’art plastique contemporain ou de tapisseries d’Aubusson mais propose aussi régulièrement

DERNIÈRES DÉCOUVERTES CREUSOISES

des concerts et même parfois du théâtre. Cet été, des tapisseries seront mises en regard avec des peintures de

Richard Marcziniak du 7 juillet au 3 septembre, et six concerts auront lieu entre juillet et août. labergerie-expo.fr

En ressortant des Millevaches par l’ouest, on atteint Bourganeuf. Il fut un temps où cette ville tranquille prospérait, quand l’ordre des Templiers, puis celui des Hospitaliers en firent leur commanderie à la fin du Moyen Âge. Au XVe siècle, un prince turc emprisonné ici dans une tour construite pour lui a laissé sa marque pour l’éternité. Ce fils de l’empereur ottoman Mehmet II était surnommé Zizim. La tour Zizim est désormais une attraction patrimoniale incontournable et entretient le récit d’une drôle d’épopée qui mena ce personnage haut en couleur de Rhodes jusqu’en Creuse. Mais Bourganeuf est aussi connue pour avoir été l’une des premières villes électrifiées de France. Le Pôle des énergies est un petit musée qui


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© ADRT23 Services / Creuse Tourisme

Dans un coin perdu de la Creuse profonde, une famille britannique est installée depuis plusieurs années. Au-dessus de la ferme-château où ils vivent, Nathalie et Andy ont construit une magnifique cabane en bois. Elle se dresse en lisière de forêt et s’intègre parfaitement dans le décor. On y grimpe grâce à un grand escalier. Une fois au sommet, il n’y a qu’à

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profiter du paysage et de l’atmosphère 100 % nature qui vous envahit. La cabane dispose de tout le confort nécessaire pour ne pas trop se sentir isolé. Cuisine complète, sanitaires, chauffage ou climatisation, et même un bain à remous qui permet de se relaxer sur la terrasse extérieure tout en admirant les alentours. Une robinsonnade de luxe, au fin fond de la campagne. chateaude memanat.com

MOUTIER D’AHUN

vient d’être entièrement refait. On y découvre comment l’électricité est arrivée jusqu’ici dès 1886. Mais ce nouveau lieu culturel est aussi un espace de démonstration et de réflexion pour le développement des énergies renouvelables, montrant que la Creuse est bien ancrée, elle aussi, dans les problématiques de notre temps. Mais pour terminer sur une note plus bucolique, direction Moutier d’Ahun. Ce village qui ne fait pas de bruit abrite un trésor qu’il serait dommage de ne pas admirer. Le chœur de son abbaye est habillé de boiseries baroques absolument

© Chris Brookes Photographie

4 INSOLITE CABANE DE MÉMANAT

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LES BOISERIES DE L’ABBAYE ONT ÉTÉ RECOUVERTES D’ENDUIT PENDANT 150 ANS AVANT QU’UN ABBÉ DE LA PAROISSE NE CONSACRE SA VIE À LEUR RENDRE LEUR SPLENDEUR AU COURS DU XXE SIÈCLE.

splendides. Elles sont l’œuvre d’un sculpteur auvergnat, Simon Bauer, qui a agit sur commande des moines entre 1673 et 1681. Retable à colonnes torses, jubé, lutrin et 26 stalles sont richement décorés d’animaux fantastiques, de motifs floraux et de visages rieurs ou grimaciers. Un œuvre unique en son genre dans cette belle abbaye que l’on repère de loin en arrivant au village. Depuis l’une des rives de la Creuse, la vue sur le pont qui mène au village et le clocher en arrière-plan est l’une des plus belles cartes postale de la région. Une image d’Épinal de la France des campagnes et des villages. —


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CARNET D’ADRESSES É adresse très conviviale en plein cœur de la campagne creusoise. À partir de 70 € la nuit.

SE LOGER

Château de la Creuzette 17 avenue d’Auvergne, 23600 Boussac 05 55 65 78 27 lacreuzette.fr Chambres à partir de 170 € la nuit. Dîner sur réservation : 40 €.

© DR / Maison Ourdeaux

Cabane de Mémanat 23250 Chavanat 07 86 66 18 20 chateaudememanat.com Séjour de minimum 7 nuits en juillet-août, à partir de 2 075 € la semaine. De septembre à juin, à partir de 275 € la nuit.

Maison Ourdeaux 23200 Alleyrat 06 87 32 61 14 maisondhotes ourdeaux.com Cette jolie maison de campagne du XVIIIe siècle a complètement été retapée par Cécile et Christophe Rouchon. Le couple vous accueille comme des amis. Des cinq chambres, quatre sont au rez-de-chaussée et une plus grande est à l’étage. Elles donnent toutes sur un jardin magnifique où l’on trouve une piscine. Les dîners (28 €) et petits déjeuners se prennent en communauté, dans la salle à manger de la maison principale. Une

Hôtel Colbert 57 Grande Rue, 23200 Aubusson 05 55 83 19 92 Malgré son nom d’hôtel, il s’agit plutôt d’une maison d’hôte. Elle est le fruit d’un Creusois qui a longtemps été paysagiste sur la Côte d’Azur avant de rentrer en Creuse. Chacune des quatre chambres a sa déco propre, de pur style français. On se croirait dans un château, mais il s’agit d’une grande demeure en plein centre d’Aubusson. Mention spéciale pour le restaurant assez

gourmand, et la jolie terrasse ombragée idéale les jours d’été. Du mardi au dimanche de 12 h à 14 h et de 19 h à 21 h. Menu unique à 19 €. Nuit à partir de 90 €.

qu’y déjeuner. Le midi, un seul plat à la carte (16 €), qui change tous les jours. Le chef Benoît Corjon est un ancien de la brasserie du Crillon à Paris. Le service est sympathique et l’ambiance chaleureuse.

SE RESTAURER

Hôtel du Lac Pont de Crozant, Le Goutatin, 23160 Crozant 05 55 89 81 96 hoteldulac-crozant.com Cet hôtel a une adresse en Creuse mais il est concrètement de l’autre côté de la rivière, en Indre. Peu importe. Son restaurant fait office d’escale agréable, au bord de l’eau, lorsqu’on parcourt la vallée des peintres. Plats à partir de 14 €. Possibilité de balades en bateau, ou de louer des canoës, kayaks ou paddles pour découvrir les environs. Hôtel de France 6 rue des Déportés, 23200 Aubusson 05 55 66 00 06 aubussonlefrance.com Cet élégant hôtel particulier du XVIIe siècle vient d’être rénové et relancé. Il est situé en plein centre d’Aubusson. On y trouve 21 chambres, un patio intérieur et un agréable bar d’hôtel. Nous n’avons fait

Le Bois tordu Les Brutisses, 23400 Montboucher 06 47 13 36 67 Cette ancienne ferme a récemment été réhabilitée par la mairie de Montboucher et transformée en restaurant. En cuisine, Jean-Michel Devaux est lui aussi issu d’une reconversion. Il travaillait dans le tourisme avant de se former à l’école Ducasse de Paris pour devenir chef cuisinier. Il concocte tout maison, avec des produits frais. Nous avons aimé sa salade Félicia au pamplemousse, champignons, sirop d’érables et herbes fraîches, mais aussi son saumon confit avec condiment citron et doigts de polenta. Menus autour de 30 €.


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Restaurant Le Viaduc 9 Busseau Gare, 23150 Ahun 05 55 62 57 20 restaurant-leviaduc.com Un restaurant agréable, dont le principal atout est sa vue panoramique sur le viaduc de Busseausur-Creuse et toute la vallée en contrebas. Dans l’assiette, une cuisine généreuse bourrée de terroir. Menus à partir de 25 €.

À FAIRE — À VOIR

Étang des Landes etang-des-landes. creuse.fr Cette réserve naturelle nationale offre une belle balade autour d’un beau plan d’eau très sauvage. La maison de la réserve est ouverte tous les jours sauf le vendredi, de 14 h à 18 h. On y trouve des agents d’accueil à qui on peut poser des questions, mais aussi beaucoup d’explications bien faites sur l’histoire des lieux et la biodiversité du site.

Espace Monet-Rollinat 2 allée Fernand Maillaud, 23450 Fresselines 05 55 89 24 61 sites-valleedespeintres.com Du 1er juillet au 31 août, le musée est ouvert tous les jours de 10 h 30 à 12 h 30 et de 13 h 30 à 18 h 30. Entrée 6,30 € par adulte, 3,50 € par enfant (à partir de 8 ans). Thermes & Spa Évaux-les-Bains 05 55 65 89 48 evauxthermes.com La carte des soins et ateliers est vaste. Compter par exemple 299 € pour une semaine « liberté » de 24 soins thermaux. Au spa, les soins démarrent à 35 € (modelage jambes ou visage). Compter 105 € pour un soin secret de Sothys pour tout le corps (60 min). La totalité des prestations possibles est consultable en ligne. Cité internationale de la tapisserie cite-tapisserie.fr La cité est ouverte tous les jours en juillet et août de 10 h à 18 h, mais seulement à partir de 14 h le mardi. Des visites guidées gratuites ont aussi lieu chaque jour à 10 h 30 et 15 h. Compter 8,50 € l’entrée pour un adulte. Entrée gratuite pour les mineurs.

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Musée du Carton 1 rue de l’Abreuvoir, 23200 Aubusson 06 88 25 35 07 Ouvert tous les jours sauf dimanche et lundi, de 10 h 30 à 12 h 30 et de 14 h à 19 h. Entrée adulte 7,50 €, enfant 3 €.

ouvert tous les jours de 8 h à 22 h 30. L’entrée coûte 4 € pour un adulte et 3 € pour un enfant. La visite est libre mais des visites guidées sont possibles sur rendez-vous.

INFOS PRATIQUES

Y ALLER

Pôle des énergies 19 route de la Cascade, 23400 Bourganeuf 05 55 64 39 29 poledesenergies.fr Ouvert les lundi, mardi et mercredi de 10 h à 14 h 30. Du jeudi au dimanche seulement l’après-midi. Entrée adulte 6 €, enfant 4 €. La Bergerie 18 rue de la Bergerie, 23150 Moutier d’Ahun labergerie-expo.fr Cet été, concerts les 21 et 28 juillet, puis les 4, 11, 18 et 25 août. L’expo estivale est présentée du 7 juillet au 3 septembre. Ruines de la forteresse de Crozant Une balade dans les ruines du château est très agréable. Le site est

La Creuse est effleurée par l’autoroute A20 (Vierzon - Montauban) et traversée d’est en ouest par les Nationale 145 et Nationale 141. Par le train, la gare de La Souterraine est reliée à ParisAusterlitz, à raison de sept trains par jour (dont six directs).

RENSEIGNEMENTS Tourisme Creuse tourisme-creuse.com

À LIRE Impressionnisme et postimpressionnisme dans la vallée de la Creuse, par Christophe Rameix, éd. La Simarre (2012) Les sites remarquables du Limousin, Tome 2, Creuse, éd. Les Ardentes (2015)


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De villages en paysages

LA CORSE Faisons simple. Pas besoin d’aller au bout du monde. La quatrième plus grande île de Méditerranée est un monde à elle seule tant les décors et les expériences qu’elle offre sont riches et variés. Pour en avoir le cœur net, nous y sommes allés, et elle nous a tapé dans l’œil, la Corse ; encore une fois. Voyez vous-mêmes !

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Texte \ Lucas Lahargoue — Photos \ Nicolas Anetson

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n croit tout savoir de la Corse. À force d’être abreuvés d’images et de cartes postales, des paysages s’installent dans nos têtes. Mais au final, nous savons juste qu’elle est belle. Pour mieux la découvrir et mieux la comprendre, il faut y aller, y retourner, l’explorer de fond en comble et déceler pourquoi elle est aussi belle. Est-ce simplement une affaire de paysages ? Le terroir joue-t-il sa part ? Et les Corses dans tout ça ? C’est pourquoi nous avons mis cap sur l’île de Beauté, avec un objectif : prendre le temps. Il nous a fallu plusieurs longs jours d’été pour parcourir les deux départements sans hâte, pour dénicher des adresses, voir quelques sites iconiques et découvrir des coins beaucoup moins fréquentés. Dans nos tribulations, nous avons rencontré un oléiculteur rétro, un céramiste concentré, une vigneronne motivée ou encore un apiculteur passionné. Des Corses bien plus ouverts qu’on le dit, qui nous ont raconté leurs métiers sur cette île bourrée de caractère et pleine d’une identité très forte. Évidemment nous n’avons pas tout vu. Ce n’était d’ailleurs pas le but. Notre voyage nous a menés de Bonifacio à l’Alta Rocca, avant de remonter la Plaine orientale et de pénétrer dans la mystérieuse Castagniccia. Enfin, après une halte à Bastia, nous avons fait un crochet par le cap Corse avant de terminer par le Nebbio et la Balagne. Un grand tour quand même, mais sans Ajaccio ou les calanques de Piana, pour tenter de voir autre chose, et montrer un autre visage de cette île qui l’on croît si bien connaître. Voilà dans ces pages tout ce que nous avons trouvé sur notre route : des rencontres et de la beauté, évidemment ! —

Bastia

L’Île-Rousse

Saint-Florent

Calvi Corte Cargèse Aléria

Ajaccio

Propriano Porto-Vecchio Sartène Bonifacio


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BONIFACIO, CITÉ ÉQUILIBRISTE Drôle d’endroit pour y construire une ville ! Pourtant, le site de Bonifacio paraît occupé depuis la préhistoire. À quelques kilomètres de la pointe sud de la Corse, une fine langue de terre se détache et forme un long goulet de mer devenu l’un des ports les plus sécurisés de Méditerranée. L’été, une armée de yachts et de grands voiliers mouille ici, au pied de la Haute Ville de Bonifacio bâtie en équilibre entre le ciel et la mer, sur cette petite péninsule panoramique. Après une montée courte mais rude, on traverse les remparts qui ceinturent la cité sur 2,5 kilomètres. Derrière l’imposant bastion de l’Étendard qui protège la porte de Gênes se dessinent déjà les ruelles étroites, caractéristiques de cette cité millénaire. La rue Doria, la rue du Saint-Sacrement ou la rue du Palais filent tout droit à travers les façades ocres si

L’ÉCONOMIE DE BONIFACIO EST TRÈS LIÉE À L’ACTIVITÉ DE SON PORT DE PLAISANCE QUI COMPTE 350 PLACES DONT 150 POUR LES VISITEURS

rapprochées qu’elles gardent l’ombre en ville une bonne partie de la journée. Il y a la rue des Deux Empereurs aussi, où Charles Quint et Napoléon séjournèrent, à 250 ans d’écart. Il faut venir tôt dans ces venelles étroites pour ressentir un peu de l’âme du Bonifacio d’autrefois. Aux premières heures du matin, le calme règne encore avant que les badauds ne débarquent et défilent en rangs d’oignons. Heureusement quelques terrasses panoramiques donnent une bouffée d’air pur. La rue du Clocher ou la place du Marché s’ouvrent sur des belvédères en surplomb de la mer. On mesure alors la prouesse d’équilibriste de cette ville perchée sur le haut de falaises qui plongent à pic dans les flots bleus. Au loin, ce sont les reliefs de la Sardaigne qui apparaissent. L’île italienne n’est qu’à 16 kilomètres au large.


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1 RESTAURANT CICCIO En plein cœur de la Haute-Ville, Gérald Larrieu est à la fois traiteur et restaurateur. Il rend hommage à son grand-père surnommé Ciccio, dans ce comptoir à dégustation qui s’articule en trois lieux, voisins mais très différents les uns des autres. On peut s’attabler sur place, ou emporter les plats et viandes de cet ancien membre de la brigade de Pierre Gagnaire au Sketch de Londres. Les aubergines à la bonifacienne sont bien faites, le porcelet Nustrale confit et laqué au miel est très fondant, et le mixed grill de la ferme de Casella est très copieux. Une bonne table 100 % terroir et pleine de charme, dans un coin relativement tranquille de Bonifacio. Depuis le mois de juin, une pâtisserie Ciccio est ouverte quelques mètres plus loin. Gérald Larrieu continue de s’étendre dans le bas de la HauteVille ! cicciobonifacio.com © Martin Kloster

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“U TEMPU PIO PASSÀ, BUNIFAZZIU È ETERNU” “LE TEMPS PEUT PASSER, BONIFACIO EST ÉTERNELLE” PROVERBE CORSE

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2 HÉBERGEMENT DOMAINE DE PERRETTI DELLA ROCCA Ce n’est pas vraiment un hôtel, ni tout à fait une maison d’hôte. Le domaine s’étend sur le haut d’une colline, à Figari, en surplomb de belles parcelles de vigne. Il consiste en une maison principale de style clairement contemporain, où se trouvent quatre chambres, un vaste salon d’accueil, et une magnifique terrasse avec piscine et restaurant ombragé. Les lignes sont claires, droites et fines. À côté de ce vaisseau amiral, on découvre ensuite quatre bergeries immergées dans la végétation. La nôtre fut l'Alba, avec ses 65 m2, ses deux chambres doubles, et sa belle piscine privative de 12 m de long. Il est facile de se sentir seul au monde dans ces bicoques authentiques en pierre, qui s’ouvrent sur de jolies terrasses orientées sur la nature verdoyante. En plus de tenir ces hébergements de charme avec service hôtelier, Jean-Baptiste de Peretti della Rocca produit aussi du vin. Ses 15 hectares de vigne ont été vendangés la première fois en 2017 et sont en pleine conversion vers le bio. Les pieds de sciaccarellu, de nielluccio ou de vermentinu prennent le soleil du sud de la Corse et donnent des vins rouges ou blancs caractérisés par de belles robes et des arômes fruités ou floraux. Ils sont vinifiés dans le chai du domaine, en cuve, en fût ou dans un beau foudre en bois que Jean-Baptiste est toujours fier de montrer à ses hôtes. Ainsi, le domaine de Peretti della Rocca est davantage une exploitation viticole où l’on trouve des hébergements que l’inverse. deperettidellarocca.com


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CABOTER AUTOUR DES LAVEZZI SANS Y ACCOSTER EST UNE DÉMARCHE ÉCOLOGIQUEMENT VERTUEUSE À PRIVILÉGIER

EN MER VERS LES LAVEZZI En Corse, il faut prendre la mer pour mieux la sentir, l’admirer, et voir les côtes depuis le large. Du port de Bonifacio, on sort assez vite de ce goulet long de 1,5 kilomètre qui mène vers le large. Une fois croisé le phare de la Madonetta qui abrite une toute petite vierge, il y a deux choix. Soit on remonte vers l’ouest pour découvrir la belle plage secrète du Fazzio puis celle du Paraguan, soit on navigue vers l’est. On longe alors les falaises calcaires érodées par le vent et les flots, d’où émergent au sommet les habitations de la ville, suspendues au-dessus du vide. Viennent après le cap Pertusatu et le cap Testagro qui marquent la pointe sud de l’île de Beauté. Mais le territoire français ne s’achève pas là. Il y a encore la petite île de Piana et son lagon translucide, l’île Cavallo investie par un hôtel et une résidence pour visiteurs fortunés, mais il y a surtout le reste des îles Lavezzi. Cet amas d’énormes rocailles enchevêtrées a longtemps été un

merveilleux sanctuaire de nature sauvage. C’est toujours une réserve naturelle, qui fait partie du parc marin international des Bouches de Bonifacio avec l’archipel de la Maddalena tout proche, situé côté sarde. Pourtant, certains jours d’affluence, les Lavezzi n’ont pas grand-chose d’un sanctuaire de vie sauvage. L’affluence de visiteurs a conduit la mairie de Bonifacio à instaurer des quotas en juin 2023. Durant les mois d’été, pas plus de 2 000 visiteurs par jour sont autorisés à accoster sur ce bout de terre où l’on trouve de belles plages qui trempent dans des eaux translucides. Marcher sur les Lavezzi deviendra bientôt un luxe. S’en approcher par la mer, les contourner, les admirer peut déjà bien suffire tant la beauté de ce paradis de poche éclate aux yeux de n’importe qui s’en approche juste. L’option la plus durable pour sauvegarder cet archipel enchanté est de le toucher… avec les yeux, et de s’en aller.

LES BOUCHES DE BONIFACIO SONT CLASSÉES “RÉSERVE NATURELLE” DEPUIS 1999. AVEC PLUS DE 79 000 HECTARES, C’EST LA PLUS GRANDE DE CE TYPE EN FRANCE


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LES ÎLES LAVEZZI NE SONT QUE CET AMAS DE ROCAILLES ARRONDIES ÉMERGEANT AU-DESSUS DE FLOTS TURQUOISE


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3 DESTINATION DOMAINE DE MURTOLI Comment comprendre Murtoli ? Que dire du concept ? Par où commencer ? Ce domaine est un projet complet, qui mêle hôtellerie haut de gamme, gastronomie, agriculture, golf, services exclusifs, et même une longue plage, le tout sur 2 500 hectares de nature dans une vallée nichée entre les montagnes et la mer. Nous sommes quelque part au sud-ouest de la Corse. De la route principale qui remonte l’île, un grand mais simple portail en fer forgé marque l’entrée du domaine. Il faut s’enfoncer dans le maquis sur une piste terreuse pour atteindre l’hôtel de la ferme. Le vaisseau amiral du domaine abrite neuf toutes nouvelles

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chambres et suites cinq étoiles, dans un édifice d’architecture traditionnelle corse qui s’articule autour d’une place centrale. On y trouve aussi l’accueil du golf 12 trous, et une piscine. Mais le cœur du concept Murtoli réside dans ces vingt demeures éparpillées sur le domaine. Certaines sont complètement isolées dans le paysage et peuvent recevoir jusqu’à 16 personnes ! D’autres comme la Caseduu a Muredda, ou la Caseduu a Biada sont plus intimistes, idéales pour des couples aux envies de calme et de repos intégral. Que l’on souhaite séjourner côté mer, côté campagne ou côté vallée, il y a forcément une maison de maître ou une bergerie qui correspond aux attentes de chacun.

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Au-delà de l’hébergement, le domaine de Murtoli aligne un choix de quatre restaurants. Les menus font la part belle aux produits du grand potager dont la physionomie évolue au fil des saisons. La Table de la plage a des accents méditerranéens, dans sa carte et dans sa déco faite de bois flotté et de petits salons privés ayant parfois vue sur la mer. La Table de la grotte occupe une impressionnante cavité naturelle où l’on vient dîner aux chandelles dans un décor spectaculaire. La Table de la ferme quant à elle a une grande salle intérieure ou une belle terrasse ombragée et orientée sur le golf. On y déguste la cuisine de Mathieu Pacaud qui est en résidence au domaine tout l’été, avec son étoile Michelin. Le reste

du temps, comme à l’heure du déjeuner par exemple, on profite des talents de Laurent Renard, chef exécutif du domaine. Pour sa nouvelle carte, Florence Weis s’est jointe à lui. Cette chasseuse de plantes sauvages l’aide à créer des plats hauts en goût et en couleur, sans perdre de vue l’inspiration purement végétale. La carte propose un oignon farci aux légumes et herbes locales puis saupoudré de pollen de fleurs, des rigatoni à la courgette avec ail confit, vuletta et basilic, ou encore un fenouil rôti accompagné de purée anisée aux fanes sauvages. Un voyage initiatique du maquis à l’assiette, dans un cadre enchanteur qui respire les plus pures effluves de la campagne corse. murtoli.com

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LES PLAGES DU SUD DE LA CORSE SONT TOUTES AUSSI BELLES LES UNES QUE LES AUTRES. IL N’Y A QU’À CHERCHER LES PLUS RECULÉES POUR TROUVER UN PEU DE TRANQUILITÉ

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EAU TURQUOISE ET SABLE CHAUD Le littoral de l’île de Beauté est torturé. Rarement rectiligne, souvent accidenté, il est criblé de criques cachées entre des rochers, des falaises ou carrément des montagnes plongeant dans les flots. En Corse, les bords de mer ont du relief, jusqu’à ce qu’ils s’adoucissent pour laisser place à de belles plages. Dans le sud, il n’y a que l’embarras du choix. Palombaggia est célèbre pour ses dunes étalées sous de hauts pins maritimes. Rondinara est cette plage arrondie, ayant presque une forme de coquillage pour peu qu’on l’admire du ciel. Mais pour trouver des coins plus tranquilles, mieux vaut poser sa serviette sur la plage de Canetto, sur celle des Arbousiers ou de Cala Longa, petits bancs de sable plus isolés sur la côte orientale. Côté ouest, la plus belle est sans doute la plage de Roccapina. Elle est surmontée d’un magnifique cap rocheux dont les blocs de granit évoquent un fauve couché. Avec un peu d’imagination, on devine sans mal le fameux « lion de Roccapina », affalé face à la mer, entre deux plages au charme irrésistible, surtout quand vient l’heure du coucher de soleil et que les couleurs virent à l’orange incandescent.


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4 ARTISANAT HUILE D’OLIVE Jean-Christophe Arrii est un résistant. Depuis plusieurs années, il résiste à l’avancée de la technologie. Au sous-sol de sa maison bâtie dans le village de Sainte-­Lucie-

de-Tallano, il fabrique de l’huile d’olive… à l’ancienne. Il est même le dernier oléiculteur de Corse à utiliser la méthode ancestrale ! Tout commence par la récolte sur ses treize hectares d’oliveraies. Avec sa meule et son âne, il presse ensuite ses olives au moulin du sous-sol de la maison familiale. Dans cet antre un peu sombre, le plus jeune ustensile est la presse en métal datant de 1860. Pour passer de l’olive à son huile, les étapes sont nombreuses. Jean-Christophe tourne, presse, et retourne la pâte pour en extraire le jus, puis le faire décanter avant que l’eau et l’huile ne se séparent. Suivent l’extraction, la mise en bouteille, et l’étiquetage. Tout est fait à la main dans cette petite exploitation hors du temps d’où sort une huile AOP remarquable. On l’achète sur place ou on la retrouve sur les grandes tables de la région. La dernière huile à l’ancienne de l’île.

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SUR LES ROUTES DE L’ALTA ROCCA Trop chaud sur les côtes ? Il n’y a qu’à prendre un peu de hauteur. Le cœur de la Corse du sud est hérissé de montagnes grandioses où l’air est moins étouffant. D’un côté ou de l’autre du littoral, des petites routes grimpent tranquillement à mesure que le relief s’accentue. On pénètre alors dans l’Alta Rocca. Ces « hautes roches » sont parsemées de villages au charme ravageur et qui sont l’une des images d’Épinal de l’île. Au fil des virages on est happé par ces pentes tapissées de forêts. En montant depuis Sartène, on croise d’abord Sainte-­ Lucie-de-Tallano. Ce petit bourg endormi à 450 mètres d’altitude est connu pour la qualité de son huile d’olive. En 2021, Amelia Tavella a redonné vie au couvent Saint-François qui surplombe le village et qui était à l’abandon. La célèbre

a­ rchitecte corse a bâti une extension en cuivre pour remplacer la partie détruite de cet édifice de la fin du XVe siècle. Une médiathèque et un tiers-lieu occupent désormais ce site historique mêlé à une nouvelle carcasse contemporaine. En s’enfonçant encore plus dans l’Alta Rocca, on croise ensuite le hameau de Mela, petite grappe de maisons de pierres regroupées autour d’un clocher. Il y a ensuite Levie tout proche du site préhistorique de Cucuruzzu. Un peu plus loin encore apparaît Zonza, où l’on croise dans les rues des randonneurs en partance, ou descendant des sommets alentour. Ces montagnes sont un paradis pour marcheurs, un terrain d’aventures infini pour qui veut découvrir les moindres recoins de l’île de Beauté.

L’ALTA ROCCA EST PARCOURU DE ROUTES SINUEUSES QUI IMPOSENT UNE CONDUITE LENTE POUR AVOIR LE LUXE D’ÉCARQUILLER LES YEUX À CHAQUE VIRAGE


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PARTOUT DANS LES MONTAGNES, DES VILLAGES ISOLÉS PONCTUENT LE PAYSAGE DE COULEURS CHAUDES AU MILIEU DE TANT DE VERDURE


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BAVELLA ET SES AIGUILLES Du village de Zonza, on les aperçoit déjà. Loin au nord, elles paraissent immenses. Les aiguilles de Bavella sont sept, nommées et numérotées, formant cette impressionnante barrière rocheuse qui culmine à 1 857 mètres d’altitude. Pour un peu elles ressembleraient presque aux plus beaux des massifs dolomitains en Italie. Plus que de véritables aiguilles, elle ressemblent plutôt à de gros doigts de pierre, levés vers le ciel. Le célèbre GR20 qui traverse toutes les montagnes corses du nord au sud passe à leur pied. Pas étonnant qu’une fois au col de Bavella, on croise des trekkeurs et traileurs, équipés jusqu’aux dents, qui font escale devant la petite statue de Notre-Dame-des-Neiges dressée sur un monticule d’ex-voto. Qui ne veut pas traverser toute l’île à pied peut seulement faire le tour des aiguilles. La balade est ardue mais ne dure que cinq ou six heures aller-retour. On évolue autour de ces grandioses tours de porphyre mauve qui changent lentement de couleur à mesure que le crépuscule s’installe. Heureusement, la route du col de Bavella permet de s’en approcher sans avoir à fournir d’effort. Elle relie l’Alta

­ occa à la côte est de la Corse par une interminable sucR cession de virages qui traversent des sous-bois et suivent le cours d’une rivière sauvage. En été, les amateurs de canyoning s’en donnent à cœur joie dans ces eaux tumultueuses émaillées de piscines naturelles. Un moyen de profiter de la montagne, au frais, avant de dégringoler vers Solenzara et la plaine orientale.


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NOTRE-DAME-DESNEIGES EST LA SAINTE PATRONNE DE BAVELLA, VÉNÉRÉE CHAQUE ÉTÉ DEPUIS LES ANNÉES 50


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5 VISITE DISTILLERIE LN MATTEI Entre les vignes et les forêts de la plaine orientale, une nouvelle distillerie est apparue en 2016, suite à la fusion des maisons Mavela et Mattei. Ces deux marques historiques réunies ont relancé, augmenté et amélioré la production de leurs alcools phares dont la liqueur de myrte, le whisky P&M ou encore le célèbre Mattei Cap Corse. La recette du fameux apéritif créé en 1872 a été légèrement revue et modernisée pour mieux correspondre aux standards et aux goûts d’aujourd’hui. Mais la mistelle de cépages muscat et vermentinu fait toujours partie de la mixture, avec des macérations d’écorces de quinquina, de cédrat et d’une flopée de plantes, fruits et épices locales ou exotiques. Les ventes redécollent, le mythique Cap Corse a retrouvé sa place sur les tables apéritives de Corse et la distillerie accueille les visiteurs qui défilent pour comprendre les méthodes de fabrication. Dans un bâtiment très moderne, de beaux alambics de fabrication allemande sont visibles de près, avant de passer par le chai de vieillissement en fûts et par un bel espace de dégustation sis dans d’anciennes grandes cuves en béton. Une visite intéressante qui mérite une escale lors d’une traversée du littoral oriental de la Corse. distilleriemattei.com

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UNE CORSE TOUTE PLATE Qui croit que la Corse n’est que montagnes se trompe. L’essentiel de la côte orientale de l’île est une vaste et longue plaine fertile qui s’achève en de belles plages rectilignes. Certes, les reliefs ne sont jamais loin, toujours en toile de fond. Mais cette étendue bien moins touristique a tout de même un intérêt économique. Vignobles, potagers et vergers s’y déploient et produisent la plus grande partie des richesses locales. Près de Cateragio, les vignes de Terravecchia occupent 200 hectares. Au cœur de ces parcelles que les Romains cultivaient déjà il y a plus de 2 000 ans , le restaurant Veni e Posa est l’une des meilleures adresses du coin. Perché sur une colline entre les vignes, il est tenu par Philippe Vincensini, grand gaillard purement du cru. Sa table offre une vue panoramique sur la mer au loin, et l’étang de Diane tout proche. Les Romains, encore et toujours, élevaient déjà des huîtres à leur époque sur ce plan d’eau peu profond de 570 hectares. L’ostréiculture continue de fonctionner et on peut déguster les huîtres de l’étang à la ferme aquatique ou à la table de Philippe, en admirant le paysage. Le restaurant est accueillant, comme « veni e posa », son nom, qui n’invite qu’à la détente : « Viens et assieds-toi. »

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PHILIPPE VINCENSINI SE TAPIT DANS SON PETIT COIN DE PARADIS


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6 HÉBERGEMENT U CASTELLU DI A SULANA Direction la Castagniccia. Dans cette région reculée, les vallées abruptes sont touffues et cachent quelques villages qui émergent d’entre les arbres. Cette maison aussi apparaît comme un mirage à travers la végétation. Il faut monter ardemment jusqu’au col de Sant’Antone, à 680 mètres d’altitude, pour atteindre ce Castellu édifié en 1921 et entièrement rénové cent ans plus tard. La demeure est immergée dans un parc privé de dix hectares. Elle surplombe la

vallée et le village de Casabianca. Les cinq chambres et suites sont décorées avec goût et couleurs, mais sans trop de lourdeurs. La suite familiale fut la nôtre, divisée en deux chambres vastes et lumineuses, reliées par un sas d’entrée et une salle de bain commune. Au même étage, une belle salle de lecture invite à la détente, sans parler de la jolie piscine conçue en contrebas de la maison, comme un balcon sur les montagnes. La table du Castellu est ouverte aux résidents comme aux visiteurs extérieurs. On y déguste une cuisine simple et goûteuse, dans l’une des

deux salles de restaurant ou sur la magnifique terrasse, à l’ombre des tilleuls. Mais cette adresse retirée loin du monde et près des cimes comporte aussi quatre cabanes éparpillées sur le domaine. Elles se sont fait une place entre les troncs et les branches de solides châtaigniers. Avec leurs salons, leurs salles de bain modernes et même leurs climatisation, elle promettent une robinsonnade confortable à qui voudrait tenter la vie dans les arbres le temps d’un séjour dans cette Castagniccia sauvage et flamboyante. ucastelludiasulana.com/fr

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7 APICULTURE LES RUCHERS D’OREZZA Dans le creux d’une vallée de la Castagniccia profonde, Nicolas Fontana détonne. Avec sa combinaison intégrale blanche, il erre entre les fougères pour prendre soin de ses ruches. Nicolas est apiculteur. Après une jeunesse passée sur le continent, en Eure-et-Loire, il décide de rentrer sur son île pour reprendre les ruches familiales. « Mon grand-père faisait du miel ici, depuis 1947, autour de notre maison. Je revenais souvent pendant les vacances scolaires et je l’observais travailler » explique-t-il derrière le voile fin qui protège son visage pendant la récolte. Il se forme à l’apiculture en 2005, pour enfin reprendre et augmenter le rucher de son grand-père. Armé de son enfumoir qui prévient et étourdit les abeilles, il suit le travail de ses insectes, étudie l’avancée de la production de miel et le relève quand il faut. Débarrassé de son scaphandre blanc, il extrait ensuite le nectar avant de le mettre en pots. « En 1998, le miel de Corse est devenu une AOP. Depuis cette année-là, tous les producteurs sont tenus à des normes de fabrication strictes » ajoute-t-il dans son laboratoire d’une propreté exemplaire, au sous-sol de sa maison. Son miel baptisé « Maquis de printemps » est riche en arômes de bruyère blanche, mais aussi de merisier, de pommier, d’aubépine ou d’asphodèle. Mais Nicolas produit aussi du miellat riche en sels minéraux, et un miel de châtaignier évidemment, digne de la Castagniccia, cette région dont le nom traduit en français signifie « châtaigneraie ».

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ESCALE À BASTIA Peu de monde s’y arrête. Pourtant, Bastia mérite amplement une halte tant sa situation et son patrimoine sont étonnants. Entre la Plaine orientale et le cap Corse, la voilà bâtie depuis au moins six siècles au pied du massif du Pigno. Il n’y a d’abord eu qu’un petit port de pêcheurs avant que les Génois ne s’y installent au XIVe siècle, et y créent une bastide (d’où son nom) alors baptisée Terra Nova. La ville se développe jusqu’à ce que Napoléon préfère Ajaccio comme capitale. La vieille ville surnommée Terra Vecchia s’articule autour du port en forme de fer à cheval, dont les quais deviennent piétons le soir. Difficile de manquer les deux tours de l’église baroque Saint-JeanBaptiste, la plus grande de Corse, qui est dressée à un angle du port. D’ici la citadelle génoise paraît impressionnante. Derrière ses murs, c’est une véritable petite ville fortifiée qui est élaborée selon un plan à damier. Les façades ont quelque chose d’austère mais revêtent des couleurs resplendissantes allant de l’ocre au jaune éclatant. Du linge sèche sous certaines fenêtres et il règne une véritable sérénité dans ces ruelles qui s’articulent autour de l’agréable place Guasco. La rue St-Michel quant à elle longe les remparts nord et offre de larges vues sur le reste de cette ville où l’on passe trop vite, mais qui ne demande qu’à ce qu’on s’y attarde.

BASTIA LA MAL-AIMÉE N’EST PLUS CE QU’ELLE ÉTAIT. ELLE RAYONNE DÉSORMAIS

BALADE DANS LES RUELLES COLORÉES DE LA CITADELLE


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PAUSE À L’OMBRE SOUS LES PLATANES D’UNE PLACETTE DE NONZA

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CAP NORD ! C’est le doigt de la Corse. Tout au nord, l’île de Beauté s’achève en une péninsule, une longue bande de terre qui semble s’étirer pour mieux se rapprocher du continent. Le cap Corse est un monde à part, une destination à lui seul, tant son caractère est encore différent et plus affirmé que le reste de l’île. Les locaux l’appellent même « l’île de l’île ». On y entre par Bastia ou par St-Florent. Il faut du temps pour le parcourir. Beaucoup de temps. Cette chaîne montagneuse couverte de maquis est longue de 40 kilomètres et large de 12 à 15 kilomètres seulement. D’un côté, les montagnes atteignent la mer en douceur. De l’autre, elles plongent plus violemment dans la grande bleue. Une seule route, ouverte sous Napoléon III, permet d’en faire le tour. Elle contourne les rocailles qui forment des à-pics vertigineux et serpente comme elle peut de village en village. Lavasina, Erbalunga, Marine de Sisco, Barcaggio, Minerbio… tous ces hameaux émaillent la route panoramique qui se parcourt en une journée au moins, sans être pressé. Parfois, des pauses s’imposent, comme au joli village de Nonza d’où l’on admire la grande plage de galets gris métallique en contrebas de la chaussée. Le paysage a des airs de Big Sur ou de côte amalfitaine, avec ces maisons vaillamment soudées à la montagne que l’on dit être des « maisons d’Américains ». Les Cap-Corsins ont longtemps eu l’appel du large, s’en sont allés faire fortune aux Amériques, avant de revenir construire des demeures somptueuses que l’on repère facilement au fil de la route. Il y en aurait 173 dans le cap. De vrais petits palais inspirés de l’architecture toscane ou espagnole, postés comme des belvédères de charme en surplomb de la Méditerranée.

PARCOURIR LE CAP CORSE, C’EST COMME FAIRE UN VOYAGE DANS LE VOYAGE. UNE DÉCOUVERTE À PART ENTIÈRE

8 PATRIMONIO DOMAINE ARENA Sur le domaine de la famille Arena, la vigne existe depuis le XVIIIe siècle. En 1977, Antoine Arena élimine le blé et les arbres fruitiers pour ne plus faire que du vin sur ses trois hectares. Depuis cette époque, le domaine est passé à 14 hectares. Jean-Baptiste et son frère Antoine-Marie ont repris le flambeau familial, dans les pas de leur père qui continue quand même de se donner corps et âme pour ses vignes. Quand ils ne sont pas dans leurs parcelles de vermentinu, de niellucciu ou de muscat, ils peuvent recevoir dans la cave de la maison à condition de frapper fort à la porte ou de réserver un créneau de dégustation. Les vins du domaine Arena portent l’appellation Patrimonio et sont élevés avec très peu d’intervention humaine. De vrais vins de terroir qui représentent ce que la Corse fait de mieux en matière de vins nature. domainearena.com


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LES FALAISES DU CAP TOMBENT PARFOIS À PIC SUR DE BELLES PLAGES COMME CELLE DE NONZA, ET SON SABLE NOIR PRESQUE UNIQUE DANS L’ÎLE

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9 ARTISANAT CÉRAMIQUE Depuis qu’il est enfant, Julien Truchon traîne dans l’atelier de son père, céramiste à Patrimonio. À force de voir faire, de poser des questions, de reproduire les gestes, il apprend progressivement le métier. Puis son parcours le mène ailleurs, vers des études d’économie, avant qu’une prise de conscience s’éveille en lui : il sera céramiste lui aussi. Le voilà parti pour deux années d’étude en Bourgogne, d’où il revient avec un CAP de tourneur. En 2007, Julien reprend finalement les rennes de l’atelier situé dans une partie de la maison de famille. « Tout commence par le travail de la terre, qui est préparée et malaxée » détaille-t-il à propos du grès ou de la porcelaine qu’il utilise. Cette terre est ensuite tournée ou travaillée pour ses créations qui ont souvent un lien avec les arts de la table ; mais Julien avoue vouloir désormais se tourner davantage vers la sculpture et la déco. Dans sa boutique, des œuvres d’art apparaissent peu à peu, comme cette suspension de feuilles d’arbres en céramique semblant tomber du ciel, ou comme cette installation murale ressemblant au sol craquelé d’un désert en période de sécheresse. « Toutes ces idées me viennent spontanément. Je dessine parfois en amont, mais la plupart du temps je crée intuitivement, sans croquis ou image préconçue » ajoute cet artisan calme – on peut jeter un œil à son atelier en visitant sa boutique. Ses poteries sèchent sur de longues planches de bois et attendent leur passage au four, dans une ambiance apaisante et ripolinée. Un lieu de travail et de création assez inspirant. atelierjtruchon.com

LA PRÉCISION DES GESTES DE JULIEN TRUCHON, POUR UN RÉSULTAT D’UNE PURETÉ SANS ÉGALE


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EN PASSANT PAR SAINT-FLORENT

LES JEUNES DE SAINT-FLORENT SE LANCENT DANS DES SÉANCES DE SAUTS PÉRILLEUX DANS LA MÉDITERRANÉE

Au pied du cap Corse, la petite bourgade de Saint-Florent se love dans le golfe qui porte son nom. Il fait bon se promener sur les quais de son port où les voiliers se bousculent au mouillage. Sur la place des Portes, des boulistes se lancent dans des tournois enflammés de pétanque pendant que des anciens les observent à l’ombre des platanes. En s’enfonçant un peu dans le village, on découvre de jolies rues légèrement tortueuses, surtout autour de l’église Sainte-Anne. On comprend qu’ici tout s’articule autour de la citadelle construite par les Génois en 1439. Il en reste une tour ronde et le vague tracé des murs d’enceinte. Depuis celui qui surplombe la mer, le regard embrasse à la fois les montagnes du cap Corse d’un côté et les reliefs du désert des Agriate de l’autre. Ce désert qui n’en est pas un commence dès la sortie de Saint-Florent. Point de dunes, de graviers ou de poussière dans cette région seulement touffue d’un maquis épais et entièrement inhabitée. Un paradis de nature intacte où la chaleur règne et que les incendies ont souvent abîmé. Le désert ne se parcourt qu’à pied où en longeant par la mer les 40 kilomètres de côtes intactes, aujourd’hui propriété du Conservatoire du littoral. Avec ses 57,9 kilomètres carrés, c’est le plus vaste site naturel côtier protégé de Corse.


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DES PARTIES DE BOULES À L’OMBRE DES PLATANES, COMME IMAGE RÊVÉE DU SUD DE LA FRANCE


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“AU PARFUM DE SON MAQUIS, DE LOIN, LES YEUX FERMÉS JE RECONNAÎTRAI LA CORSE” NAPOLÉON BONAPARTE


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10 VITICULTURE DOMAINE MAESTRACCI Au cœur de la vallée du Regino, Camille-Anaïs Choix affirme ses talents de vigneronne grâce aux vins de son domaine. Elle représente la cinquième génération de sa famille qui récupéra en 1893 une ancienne usine oléicole de la marque Puget. Cinq hectares de vignes occupaient déjà le domaine, entre les oliviers. Il y en a trente

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aujourd’hui, tout autour de la propriété, cultivés en biodynamie depuis 2019. Les vins que façonne Camille-Anaïs portent l’AOP Corse-Calvi et méritent une dégustation, sur place lors d’une visite de la cave par exemple. Après avoir traversé le grand chai avec ses cuves en inox et ses fûts de chêne, on goûte les vins du domaine dans une jolie petite salle voûtée en pierre. Le Clos Reginu est un rosé de table gourmand. Le E

Prove est un rouge issu d’un assemblage de nielluciu, sciaccarellu, grenache et carigne élevé un an en barrique, et dont le nez évoque des fruits rouges et des épices. Côté blancs, le Villa Maestracci fermente en fût avant de vieillir huit mois en bouteille pour que les tanins se fondent. Des vins secs et fruités idéals pour des repas frugaux, sous le soleil de Corse ou d’ailleurs. domaine-maestracci.fr


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PREMIÈRES DÉCOUVERTES EN BALAGNE Petit matin sur la plage de Lozari. Le soleil commence à réchauffer les paysages de la Balagne quand trois hommes en rouge débarquent sur le sable. Ils mettent à l’eau une drôle d’embarcation bleue semblant arrivée tout droit d’Hawaï. « C’est en effet une pirogue à balancier ! Beaucoup croient que c’est un bateau uniquement originaire du Pacifique, mais nous avons beaucoup de traces d’échanges entre la Corse et la Sardaigne à l’Antiquité, qui se faisaient aussi certainement en pirogue » explique Jean-Christophe Bastiani, fondateur d’In Terra Corsa. Avec ses fils, il propose des balades en pirogue pour louvoyer au fil des côtes, de la plage de Losari jusqu’aux premiers reliefs des Agriate. Avec quelques coups de rame, la coque de noix équilibrée par un balancier file à toute allure sur les eaux turquoise et permet une sortie originale pour voir la Balagne depuis la mer. Tout près de là, le parc de Saleccia est un autre immanquable de la région. Il est l’œuvre de Bruno Demoustier, un paysagiste originaire de Saint-Étienne qui façonna, des années durant, une oliveraie remarquable. Après qu’un incendie eut ravagé

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LA BALAGNE A DU RELIEF, CERTES, MAIS ICI LES MONTAGNES RENCONTRENT LA MÉDITERRANÉE AVEC PLUS DE DOUCEUR l­ ’ensemble en 1974, il recréa sur les cendres un jardin extraordinaire, plein de variétés et d’essences méditerranéennes. Sur sept hectares on divague entre les massifs de fleurs et d’arbustes joliment agencés pour créer un parcours de visite assez romantique. Les allées sont bordées de mûriers, de lentisques, d’arbousiers ou de lauriers. Une oliveraie a été replantée sur un tapis d’immortelles. Au centre, une grande pelouse est entourée de splendides massifs de fleurs multicolores comme des agathées, des cistes ou encore des ficoïdes. La promenade est reposante, et peut même se terminer à table. Un petit restaurant permet de se sustenter en dégustant des produits frais et locaux dans ce cadre verdoyant, à quelques kilomètres seulement de l’Île-Rousse.


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11 HÔTEL CASA PARADISU C’est une adresse toute neuve ! Cet hôtel situé au bord de la route T30, à l’entrée de l’Île-Rousse, a ouvert ses portes en juin 2022. Christophe Pillet est à l’origine de ce projet voulu et financé par deux familles locales. L’architecte charentais a imaginé quatre bâtiments blancs, aux lignes très irrégulières et contemporaines, surmontés de toits de tuiles histoire de respecter le style de

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la région. Dix-sept chambres et suites sont réparties dans ces édifices, toutes blanches comme neige, avec quelques touches de couleur dans le mobilier qui rehaussent l’ensemble. Toutes ont un balcon ou une terrasse privée. La notre fut la 18, ouverte sur le jardin grâce à une belle terrasse panoramique. C’est l’ensemble de l’hôtel qui est d’ailleurs tourné vers ce beau jardin central où trônent deux piscines à débordement presque imbriquées l’une au-dessus de l’autre. Il est

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­ articulièrement agréable de p prendre un petit déjeuner à l’orée de ce jardin, en admirant la végétation, et les reflets de la mer au loin. À l’extrémité du parc, un petit portail donne accès au sentier des douaniers qui passe devant l’hôtel. Trois pas suffisent pour atterrir sur une minuscule crique sauvage où l’on peut se baigner en toute tranquillité. Sinon, il n’y a qu’à marcher sur le sentier pour écumer le bord de l’eau sans croiser grand monde. casaparadisu.fr


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12 ARTISANAT BISCUITS CORSES En Corse les biscuitiers sont nombreux. Rodolphe Perrin est de ceux-là. Il est installé dans le village de Calenzana. Depuis le départ de ses parents à la retraite en 2015, le voilà à la tête de la biscuiterie E Fritelle. Il se pose en garant de la tradition familiale et fait perdurer les recettes qui existaient déjà. Derrière ses fourneaux, avec sa petite équipe qui comprend l’un de ses fils, il concocte tous les jours les biscuits qui font le succès de sa boutique. Il y a les E Cjulelle sans œufs, sans lait, mais avec du vin blanc. Les E Fritelle sont des beignets au sucre, aromatisés au citron ou à l’orange ; quant aux Canistrelli, ce sont des biscuits typiquement corses. On peut observer tout ce petit monde au travail dans l’atelier qui jouxte le magasin. Et sans venir jusqu’à Calenzana, la petite entreprise de Rodolphe tient un autre point de vente en plein centre de Calvi. e-fritelle.com

CALVI A LONGTEMPS ÉTÉ GÉNOISE AVANT D’ÊTRE FRANÇAISE. LA CITADELLE DESCEND DE CETTE ÉPOQUE QUI S’EST ACHEVÉE À LA FIN DU XVIIIE SIÈCLE

CALVI, C’EST FINI… Voilà une étonnante découverte. À peine débarqués au pied de la citadelle de Calvi, les visiteurs en goguette tombent sur… une statue de Christophe Colomb. Pourquoi ici ? Une légende et quelques érudits corses affirment que le découvreur ne serait pas né à Gênes, mais… à Calvi, en 1436 ! Évidemment, personne n’en a la preuve, sauf le Vatican qui dit détenir son acte de naissance mais refuse de le montrer. Ce qui est plus sûr, c’est que la ville a bien été génoise, et pendant longtemps. Avec Bonifacio elle fut même la dernière a rentrer dans l’escarcelle française, en 1796. La citadelle témoigne de cette époque génoise, avec ses hauts murs ocre qui la dressent au sommet d’un rocher, comme une figure de proue qui s’avance sur la mer. D’en haut, la vue est bien entendu imprenable. À l’intérieur, les ruelles montent et descendent. Parfois, on aperçoit la tour de sel et le port en contrebas. Le reste de la ville nouvelle est fait de longue rues assez droites qui convergent toutes vers la citadelle. Mais pour obtenir une meilleure vue d’ensemble de la capitale de la Balagne, il faut prendre du recul. Une dizaine de minutes de route suffit pour grimper sur les hauteurs. Au pied de l’église de Notre-Dame-de-la-Serra, le panorama porte sur la baie de Calvi tout entière. Mais aucune côte n’apparaît à l’horizon. Gênes ou Nice sont encore à 200 kilomètres au nord. —


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CALVI EST TOUT ENROULÉE AUTOUR DE SON PORT

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CARNET D’ADRESSES É SE LOGER

Domaine de Perretti della Rocca Route de Pruno, 20114 Figari 06 49 52 68 84 deperettidellarocca.com Le domaine est parfaitement situé, à l’intérieur des terres, à vingt minutes de l’aéroport, et une vingtaine de minutes aussi des plages les plus proches. Chaque chambre de la maison principale (entre 25 et 35 m 2) a une terrasse privée avec vue sur les oliviers et les vignes. Les bergeries sont évidemment plus grandes et encore plus isolées. À partir de 206 € la nuit. Domaine de Murtoli Vallée de L’Ortolo, 20100 Sartène 04 95 71 69 24 murtoli.com Chambres à partir de 260 € la nuit hors saison, et à partir de 840 € en plein été. Demeures ou bergeries à partir de 300 € hors saison, et à partir de 1 720 € la nuit en plein été (3 nuits minimum). Au restaurant, plats à partir de 18 € sur la carte végétale, et à partir de 34 € sur la carte semi-gastronomique.

U Catelu di a Sulana 20237 Casabianca 07 61 15 80 13 ucastelludiasulana.com Compter autour de 260 € la nuit. Hôtel Casa Paradisu 15 Lotissement L’Alivu, 20220 Monticello 04 95 39 12 55 casaparadisu.com À partir de 280 € la nuit en basse saison, et à partir de 640 € en plein été. En 2024, l’hôtel aura un spa, qui est pour l’instant toujours en cours d’élaboration.

SE RESTAURER

Ciccio 6 rue St-Jean-Baptiste, 20169 Bonifacio 06 16 98 81 68 Le restaurant s’articule en 3 espaces différents, tous situés autour du croisement entre deux rues de la ville haute. Vous trouverez au choix des tables en intérieur ou en terrasse. Le service est agréable et les produits sont finement sourcés. Plats à partir de 22 €. Tous les jours de 12 h à 15 h puis de 19 h à minuit. Casa Corsa Quai Pascal Paoli, 20137 Porto-Vecchio 04 95 20 38 87 casacorsa-portovecchio.com

Une table agréable située en surplomb du port de PortoVecchio. La cuisine y est simple mais bonne. Elle met surtout en valeur des produits corses. L’intérieur peut être bruyant mais la terrasse est agréable les soirs d’été. Service énergique. Plats à partir de 19,50 €. Tous les jours de 10 h à minuit. U Palazzu 20112 SainteLucie-de-Tallano 06 13 44 09 51 Le moulin de JeanChristophe Arrii est situé dans une rue calme, perpendiculaire à la place centrale du village. L’atelier est au sous-sol de la maison. Si personne ne répond, ne pas hésiter à fouiller autour de la maison pour trouver le propriétaire, ou sinon le contacter sur son portable. Distillerie LN Mattei 04 95 56 60 30 distilleriemattei.com La distillerie est située en retrait de la grande route T10 qui traverse toute la Plaine orientale du nord au sud. Ne pas hésiter à demander des explications sur les méthodes de fabrication,

et à voir les deux beaux alambics de plus près. Du lundi au vendredi de 8 h 30 à 12 h puis de 14 h à 17 h. Veni e Posa Domaine Terra Vecchia, 20270 Tallone 06 22 56 12 10 clospoggiale.fr Le restaurant se situe au bout d’une piste. Il faut rouler une dizaine de minutes depuis la route principale pour y arriver. De nombreuses tables sont disponibles mais mieux vaut réserver pour être sûr d’avoir une place. Il s’agit d’une des meilleures adresses de la côte orientale. Ne pas manquer de goûter les huîtres qui sont élevées dans l’étang de Diane, au pied du restaurant ! Les Ruchers d’Orezza Pour goûter et acheter le miel de Nicolas Fontana, il suffit de passer chez lui. Sa maison est en fond de vallée, près de la source des eaux minérales d’Orezza, dans la Castagniccia. Le contacter au 06 78 13 63 26. Si vous lui demandez, il vous expliquera sa méthode de fabrication. Compter 6 € le pot de 250 g et 10 € le pot de 500 g.


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LA CORSE

Domaine Arena Lieu-dit Morta Majo, 20253 Patrimonio 04 95 37 08 27 domainearena.com Le domaine ne reçoit pas clairement les visiteurs mais vous pouvez toujours passer et frapper à la porte de la cave. Antoine Arena ou plus probablement son épouse vous recevra. Mieux vaut appeler avant pour être sûr d’y trouver quelqu’un et de pouvoir goûter et acheter quelques bouteilles. Domaine Maestracci Route de Santa Reparata, 20225 Feliceto 04 95 61 72 11 domainemaestracci.fr Durant les mois d’été, le domaine est ouvert tous les jours sauf le dimanche, de 9 h à 12 h 30 et de 14 h à 19 h 30. CamilleAnaïs, la propriétaire et vigneronne, est régulièrement là pour parler de ses vins. L’Escale 22 rue Notre-Dame, 20220 L’Île-Rousse 05 95 60 10 53 hotel-cotesud.com Une bonne adresse dans le centre de L’ÎleRousse, qui fait souvent le plein. Mieux vaut

réserver votre table ! Cuisine généreuse et de terroir, à base de pêche locale, de charcuterie corse. Les pâtes aux langoustes y sont réputées. Tapas à partager à partir de 12 €. Plats à partir de 16,90 €. Le restaurant jouxte un hôtel qui appartient au même propriétaire. E Fritelle Bvd François Marini, 20214 Calenzana 04 95 62 78 17 e-fritelle.com Rodolphe Perrin et son équipe reçoivent les visiteurs dans leur boutique du lundi au vendredi de 7 h à 19 h, et le samedi le matin seulement. Fermé le dimanche. Possibilité de jeter un œil à l’atelier qui est juste derrière. Une annexe est située au 6 rue Clémenceau à Calvi.

À FAIRE — À VOIR

Corse Nautic Escape corse-nautic-escape.com Voilà une compagnie qui propose des sorties en mer sur des bateaux confortables dans les Bouches de Bonifacio. Ces sorties incluent les criques alentour, un passage sous les falaises

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de la Haute-Ville et vous mènent jusqu’aux Lavezzi qui ne sont qu’à une douzaine de kilomètres de là. Croisières à la journée (115 € par adulte, 65 € par enfant) ou à la demi-journée (65 € par adulte, 45 € par enfant). In Terra Corsa interracorsa.com Depuis 25 ans maintenant, cette société est spécialisée dans les activités nature au nord de la Corse. En hiver elle se concentre sur le ski, et en été sur le canyoning, rafting, kayak, via ferrata, paintball, randonnée, paddle… et la pirogue hawaïenne sur la plage de Lozari. C’est une nouveauté 2023. Compter 45 € par adulte pour une balade d’environ deux heures, 40 € par enfant. Parc de Saleccia parc-saleccia.fr L’entrée du parc est bien visible depuis la route T30 qui longe la côte. Le parc n’est pas immédiatement sur le littoral mais tout proche. Compter deux heures environ pour une visite tranquille, à pas lent. Un petit restaurant permet aussi de déjeuner sur place. La carte propose des salades, des tartes ou quiches froides (14 €), et un plat du jour (18 €).

INFOS PRATIQUES Y ALLER Air Corsica dessert Ajaccio, Bastia, Calvi et Figari, toute l’année, depuis Paris Orly (à partir de 125 € aller-simple), depuis Marseille et Nice (à partir de 105 € aller-simple), et depuis Toulouse ou Lyon (à partir de 89 € aller-simple). Les tarifs comprennent un bagage en soute de 23 kg, un bagage en cabine de 12 kg et l’enregistrement en ligne avec choix du siège. aircorsica.com

RENSEIGNEMENTS Agence du tourisme de la Corse visit-corsica.com

À LIRE Corse, Activités mer & montagne, Le Guide Vert Expériences, éd. Michelin (2023)


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et de rectification des informations qui vous sont demandées pour le traitement de votre abonnement.)


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MOTEUR

BMW i7 xDRIVE 60

Une nouvelle limousine allemande, c’est toujours un événement ! Surtout quand, comme dans le cas de cette BMW Série 7, elle « carbure » à l’électricité et dévoile un niveau de raffinement et d’équipements inédit… Texte \ Philippe Guillaume — Photos \ DR


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es temps changent et il va falloir s’y faire ! Tenez, prenons le cas de BMW, par exemple : des trois marques premium allemande, c’est la firme munichoise qui a l’image la plus dynamique, non sans raisons d’ailleurs. Sa branche sportive, sous le blason M, vient d’ailleurs de présenter le second véhicule conçu en nom propre de son histoire : quarante-cinq ans après la M1, qui fut un coupé aux formes sculpturales dont la cote atteint aujourd’hui des sommets, le XM est un SUV… hybride rechargeable ! L’électricité gagne du terrain, y compris dans le monde feutré des limousines : c’est ainsi que notre i7 d’essai est mue entièrement par la fée électricité, avec un certain dynamisme, d’ailleurs, puisque la version xDrive60 développe 544 chevaux et 745 Nm de couple. La gamme propose également des versions xDrive50 (455 ch) ainsi que la sculpturale M70 xDrive (659 ch). Sur la version xDrive60, les 101,7 kWh de batteries offrent une autonomie (théorique) de près de 600 kilomètres. À noter que contrairement à sa rivale, la Mercedes EQS, uniquement disponible avec des motorisations électriques, la nouvelle Série 7 dispose également de motorisations Diesel et hybrides rechargeables.

HOME CINÉMA

On attend tous les raffinements possibles d’une auto statutaire, mesurant 5,39 mètres de long et c’est le cas ! Cela commence à l’extérieur, déjà, avec une calandre entourée de LED qui s’illuminent la nuit. Amateurs de discrétion

BMW i7 à partir de 128 500 €, gamme Série 7 à partir de 121 150 €

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s’abstenir ! L’ambiance lumineuse est tout aussi soignée à l’intérieur, avec une planche de bord soulignée d’un bandeau travaillé façon cristal, offrant toutes les combinaisons de couleur possibles. Est-il nécessaire de souligner que tant la qualité des sièges que l’isolation des vicissitudes de la route sont au meilleur niveau ? Le travail des suspensions est lui aussi exceptionnel, faisant de cette i7 une sorte de tapis volant qui surfe sur la route avec légèreté et une agilité étonnante au vu du gabarit, remercions pour cela la présence de roues arrière directrices. Le niveau de confort est tout simplement fabuleux, ce qui n’a rien d’étonnant lorsque l’on réalise que la base technique de cette i7 est également celle de la prochaine Rolls Royce Spectre… Une limousine se doit de choyer les passagers du second rang : la i7 le fait à la perfection et de manière innovante. Notons la présence de tablettes tactiles, façon iPhone, dans les accoudoirs des places arrière, qui permettent de commander tout un environnement de confort et de bienêtre, parmi lequel figure un écran de cinéma (mais oui !), sous la forme d’une dalle de 80 centimètres de diagonale en qualité 8K, qui se replie dans le toit quand elle n’est pas en opération. Bien logé dans un siège chauffant, ventilé, massant, on peut ainsi se ressourcer le temps que l’auto reprenne de l’énergie sur une borne de recharge rapide (l’i7 accepte des recharges jusque 195 kW). Ce serait presque la première fois que l’on trouve que le temps de recharge est trop court ! —


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1 \ L’instrumentation est entièrement numérique et le bandeau soulignant la planche de bord, orné de reliefs façon cristal, peut s’illuminer de toutes les couleurs possibles pour une ambiance intérieure à nulle autre pareille. 2 \ Gadget ou raffinement ultime ? L’écran en qualité 8K, qui descend du ciel de toit au-dessus des places arrière, permet de passer le temps confortablement pendant que l’i7 se recharge sur une borne… 3 \ Chaque endroit, chaque détail démontre un soin absolu apporté à la finition et à la qualité des matériaux. L’i7, comme les autres versions de la Série 7, justifie pleinement son statut de limousine.


TEASER

DÉTROIT, MICHIGAN, USA

© Caleb George

Numéro disponible mi-septembre 2023

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CUVÉE LOUISE 2005 L’EXCEPTION PAR POMMERY

L ’ A B U S

D ’ A L C O O L

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D A N G E R E U X

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M O D É R A T I O N .


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