Mimi : moeurs guadeloupéennes

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MIMI

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d'un vol lourd et n o n c h a l a n t , s ' a b a t t a n t t o u t à coup dans la mer qui rejaillissait en gerbes irisées p a r le soleil; à droite, la Soufrière, en partie cachée p a r les nuages, les grands mornes du P e t i t Bourg, projections secondaires des Deux-Mamelles, les forêts, les c h a m p s de cannes, les sucreries révélées de çi de là par la fumée qui se déroulait de leurs hautes cheminées et, plus loin, perdues à l'horizon, à demi-enfouies sous un a m a s de v e r d u r e , le toit de c h a u m e des cases des petits propriétaires planteurs. Chaque m a t i n , Julien, a p p u y é sur le bras de Mme Minglèche, faisait dans les environs de délicieuses promenades. Les promeneurs surprenaient les c a m p a g n a r d s à leur lever, occupés d ' a b o r d à traire les vaches, parfois, ils s'arrêtaient pour prendre un verre de « lait chaud »; disaient bonjour a u x paysannes en train d'allumer ou de p r é p a r e r le café du m a t i n , pour le premier repas de la journée créole, ce bon café bouillant et parfumé q u ' o n prend sans pain, comme didies, accompagné d ' u n morceau de cassave, d'igname ou de fruit à pain; ils souriaient amicalement a u x gamins qui, les y e u x encore pleins de sommeil, v ê t u s d'une longue chemise de toile bleue, a p p r ê t a i e n t la pâtée, le manger a u x cochons; puis ils allaient droit d e v a n t eux, au hasard, sans savoir où, par les immenses c h a m p s de cannes qui « o n d o y a i e n t au soleil », é t a l a n t aux regards leur l u x u r i a n t e robe v e r t e , ou bien cueillaient les fruits jaunes ou v e r t s qui s'offraient à eux, suspendus a u x branches des goyaviers, les icaques rouges, blanches ou noires; prê-


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