L'Univers. Histoire et description de tous les peuples

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COLOMBIE. Il t r o u v e , sur sa r o u t e , des croix élevées à la mémoire des voyageurs morts dans ces mêmes lieux, e t , à côté, quelques frailecon , dont les fleurs jaunâtres ressemblent à de pâ­ les lumières s u r des tiges d'ébène. Ces sinistres présages redoublent son épouvante; les vapeurs placées qui s'exhalent de t o u t e s parts engourdis­ sent ses membres , sa poitrine est haletante , sa v u e se trouble , e t , a u ­ tour de l u i , les ténèbres épaississent incessamment. S'il continue à f u i r , il a peu d'espoir d'échapper à la m o r t ; s'il s ' a r r ê t e , il est perdu. La C o l o m b i e , ainsi q u e nous l'a­ vons dit plus h a u t , renfermant s u r son t e r r i t o i r e le noyau du système des Andes , doit offrir plus que toute a u ­ tre contrée l'apparence d ' u n sol volcanisé. Dans t o u t e s les parties m o n ­ tagneuses de cet é t a t , on rencontre , en effet, de larges cicatrices qu'y ont im­ primées les anciens volcans. Les treinments de t e r r e y sont encore des phé­ nomènes fort c o m m u n s , s u r t o u t dans les départements de l'équateur , de la Cauca et de Cundinamarca. C'est là que se trouvent les montagnes ignivomes les plus élevées et les plus formi­ dables de tout le globe. Tels sont les volcans d ' A n t i s a n a , de Cotopaxi, de Sanguay, de P i c h i n c h a , de P a s t o , d e Sotara, de P u r a c é , du grand pic de Tolima et du paramo de Ruiz. L a plupart de ces volcans offrent une sé­ rie de pics qui s'élèvent jusqu'à la hauteur des neiges é t e r n e l l e s , tandis Que leur base se perd dans des vallées brûlées par les feux de la zone t o r r i d e . Ainsi, les montagnes neigeuses ser­ vent à tempérer lès ardeurs qui s'ex­ halent d'un sol e m b r a s é , et c'est à l'aide de ce contraste q u e la n a t u r e permet aux habitants des parties in­ termédiaires , dans les régions équatoriales, de jouir de la t e m p é r a t u r e et des productions de l'Europe. L ' A m é r i q u e , on le s a i t , est arrosée par les plus grands fleuves du monde. Nous ne rattacherons pas l ' a m a z o n e a la Colombie, et cependant, ce fleuve, formé p a r la réunion du vieux et du nouveau M a r a n n o n , passe s u r la partie

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la plus méridionale de son t e r r i t o i r e , dans la province de J a é n , et y reçoit de nombreux affluents. Cette contrée, à peu près inconnue aux E u r o p é e n s , est celle où se t r o u v e n t , en plus grande q u a n t i t é , des hordes d'Indiens indé­ pendants. L ' O r ê n o q u e , l'un des fleuves les plus considérables de l'Amérique m é r i ­ d i o n a l , appartient en entier à la Colombie. Il prend sa source dans les montagnes de la P a r i m a , au c œ u r de l'ancienne Guyane espagnole, décrit un demi-cercle dans la partie du s u d , r e m o n t e vers le n o r d , et va se j e t e r dans l'Océan a t l a n t i q u e , servant ainsi de ligne de démarcation entre la Guyane et l'ancienne capitainerie de Caracas. Les branches de son embou­ chure sont n o m b r e u s e s , et plusieurs navigables pour des navires de plus de 200 tonneaux. Quelques-uns des af­ fluents de l'Orénoque ne le cèdent en g r a n d e u r , ni au R h i n , ni au R h ô n e , ni à la L o i r e , ni au Tage ; ce s o n t : le V e n t u a r i , le Caura, le C a r o n i , le G u a v i a r e , le Meta et l'Apure. On a , depuis p e u , vérifié l'existence de la fameuse bifurcation de l'Orénoque. Ce grand fleuve étend u n de ses bras vers le Rio-Negro et c o m m u n i q u e a i n s i , au moyen de cet affluent, avec l'Amazone. I n d é p e n d a m m e n t de la célébrité que l'Orénoque s'est acquise par son i m ­ portance , par le prestige qui s'attache aux régions peu connues qu'il t r a v e r s e , par les m œ u r s des hordes sauvages qui errent s u r ses rives , e t , enfin, par les richesses qu'il fournit à l'histoire n a t u r e l l e , il a reçu encore une r e ­ n o m m é e historique de la fable du fa­ meux pays d ' E l - d o r a d o , qui a fait si long-temps le désespoir des voya­ geurs et des géographes. Il paraît que c'est dans la Parima, aux sources de l ' O r é n o q u e , qu'il faut chercher l'ori­ gine de cette prétendue m e r blanche, dont les flots roulaient un sable d ' o r et des cailloux de diamants, ainsi q u e de la ville de M a n o a , d o n t les palais étaient couverts de lames d'or massif, et de brillantes pierreries. Sans d o u t e , les matériaux précieux abondent dans cette partie du nouveau monde ; il 1.


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