Les richesses de la Guyane Française et de l'ancien contesté franco-brésilien : 11 ans d'exploration

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LA GUYANE FRANÇAISE ET L'ANCIEN CONTESTÉ FRANCO-BRÉSILIEN

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lantes qu'une mince couche de drap marin de couleur fauve foncé. Aussi les indigénes accourent ils avec leurs pirogues légères dans les rapides. Debout, immobiles, comme la roche qui les porte, isolés dans le bruit des eaux, l'arc dans la main gauche, la flèche dans la main droite, leurs regards aigus, épient dans la profondeur de l'eau verte fleurie d'écume, les Coumarous qui passent, comme des ombres à peine distinctes entre les rochers. L'arc se tend, la flèche part en sifflant et se débat frémissante dans le courant avec le poisson percé d'outre en outre. Le pêcheur bondit sur une roche voisine en aval, se penche, saisit sa flèche, ou descend au besoin dans l'eau pour la rattraper avec sa capture. Quand son bras ne peut l'atteindre, il la saisit très habilement avec son arc, au moyen d'un tour de main spécial. Deux grands sauts du moyen Maroni, le Grand Coumarou gnagna et le Petit Coumarou-gnagna, comme leur nom l'indique, sont la grande patrie, la grande cité des Coumarous. Les journées passent vite à cette pêche pratiquée surtout par les Indiens, qui sont certainement les maîtres en ce genre. J'ai souvent

vu, en

cours

de route, en remontant l'Itani, l'In

dien de l'avant de la pirogue poser sa pagaïe sans bruit, lever sa main en l'air pour prévenir le patron et ses compagnons et prendre silencieusement son arc, et ses flèches. La pirogue ralentit sa marche. L'Indien tend son arc, fixe sa flèche entre son pouce et ses autres doigts, la pointe suivant vers le fond des eaux claires, dans la direction de son regard, quelque poisson que mes yeux

d'Européen

ne distinguent pas. Soudain, l'arc se détend, la flèche disparait en sifflant au fond des eaux. Le poisson est très gros et insuffisamment atteint, s'enfuit avec la flèche qui, de temps à autre, reparaît sur l'eau, frémissante, éperdue. La pirogue la poursuit en sa course désordonnée et l'Indien ne peut pas toujours l'atteindre. Il dépose son arc au fond de sa piroque, prend son machette et, d'un bond pique une tète

dans

le fleuve. Quelques secondes, une demi-mi-

nute s'écoulent et on le voit apparaître à quelques brasses, son machette dans les dents et sa proie sanglante dans la main gauche. J'ai vu des Indiens aller chercher ainsi au fond des eaux des Caïmans percés d'une ou deux flèches et revenir triomphants avec leur 12


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