Vivre Bordeaux 32

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LE MAGAZINE DES BORDELAIS —

ÉTÉ 2022 / NUMÉRO 32 —

Nouvelle formule

Coulisses Lillet, l’apéritif girondin fête ses 150 ans

Les abeilles de Joanna et Romain Un nouveau centre culturel à Mériadeck

Gueuleton Le phénomène du Sud-Ouest

Interview exclusive Morgane Sézalory,

alias Sézane

10 séjours

INSOLITES à 1 h de Bordeaux

L 15367 - 32 - F: 5,50 € - RD

RIVE DROITE



ÉDI TO

Un été solidaire I

l y a des éditos qui sont moins faciles à écrire que d’autres. À l’heure où nous bouclons notre magazine, à quelques milliers de kilomètres de Bordeaux, un pays européen subit une guerre épouvantable et injuste. Préparer un nouvel été qui promet ici d’être ensoleillé ne doit pas nous empêcher d’y penser. Et si un modeste remède à cette sombre actualité était de venir en aide à ceux qui en ont besoin ? D’autant qu’il y a mille et une façons de manifester notre solidarité : accueillir des réfugiés, faire un don, trier dans nos placards pour donner à ceux qui ont tout perdu, via des associations comme weukraine.fr, jeveuxaider.gouv.fr ou tousbenevoles.org. Ou encore modifier notre façon de consommer afin de faire face aux pénuries de produits de première nécessité, à l’augmentation des prix, tout en faisant un geste pour la planète. En résumé, réinventer le quotidien en s’appuyant plus que jamais sur de belles initiatives ou entreprises locales. D’autant qu’elles ne manquent pas dans la région, comme vous le découvrirez dans ces pages estivales. Un mouvement de fond lancé par la marque Asphalte installée aux Chartrons permet de limiter le gaspillage textile, deuxième industrie la plus polluante dans le monde après le pétrole, en s’appuyant sur la pré-commande (page 114). L’artisane Marie-Gaëlle Doutreloux préfère restaurer que jeter vos

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objets préférés (page 128). Les fondateurs de Gueuleton redonnent du sens à l’expression « bons vivants » (page 52). La nouvelle plateforme de vente en ligne La Halle des chefs (page 40) fait le plein d’ingrédients de qualité et locaux comme le miel urbain de Joanna et Romain, notre couverture. Tous entreprennent pour un monde meilleur, à l’image des six start-up hébergées par l’Arche, le nouvel écosystème de la place girondine (page 84). Des rencontres inspirantes que nous ne nous lassons pas de mettre en lumière.

Émilie Dubrul Rédactrice en chef


RÉDACTION Vivre Bordeaux 47, avenue Victor Hugo 33110 Le Bouscat

VIVRE BORDEAUX est édité par Capitale Publishing SARL de presse au capital de 5 000 €

Directeur de la publication Yann Crabé infos@vivrebordeaux.fr

Siège social 55, boulevard Pereire 75017 Paris RCS 517 815 908

Rédactrice en chef Émilie Dubrul emilie.d@vivrebordeaux.fr

Gérant : Yann Crabé Distribution France MLP

Direction artistique & Design graphique Grand National Studio hello@grandnationalstudio.com

Numéro commission paritaire 1122 K 92550 ISSN : 2416-9609

Secrétaire de rédaction Isabelle Calmets

IMPRIMERIE Rotimpress Girona, Espagne

Journalistes & photographes Aline Chambras Marie Chevreau Martine Crespin Émilie Dubrul Nicolas Duffaure Pauline Gallard Claire Lafargue Myriam La Selve

Photo de couverture © L'Essaim de la Reine

Administration et finance Marjorie Batikian marjorie@vivrebordeaux.fr

facebook.com/ vivrebordeaux

instagram.com/ vivrebordeaux

ABONNEMENTS Vivre Bordeaux marjorie@editionsvivre.fr PUBLICITÉ Catherine Haim 06 20 68 88 66 ch@vivrebordeaux.fr

Le papier de ce magazine est issu de forêts gérées durablement et de sources contrôlées. pefc-france.org

La reproduction, même partielle, des textes, photos et illustrations est interdite sans l’autorisation de CAPITALE PUBLISHING. Le contenu des textes n’engage que la responsabilité de leurs auteurs respectifs.

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SOMMA I RE

Culture —

Christine Hassid, une chorégraphe sur les routes d’Aquitaine p. 16 Rencontre avec Aurélien Dessailloud, directeur artistique de l’institut culturel Bernard Magrez p. 18 Mezzanine, la nouvelle librairie du Bouscat p. 20 Le Signal vu par Sophie Poirier & Olivier Crouzel p. 22 L’ancienne Caisse d’Épargne de Mériadeck entame sa métamorphose p. 26 Entretien avec Cédric Fauq, le nouveau commissaire d’exposition du CAPC p. 30

© Nicolas Duffaure

© Claire Lafargue

© Nicolas Duffaure

V I V RE B O RDEAUX ÉTÉ 2022

Food —

Le chef Yannick Alléno passe à table p. 35 La Halle des chefs, la nouvelle plateforme d’achat des gourmets p. 40 La baratte de Bordeaux où l’art de faire du beurre artisanal p. 42 La folie des cookies, des biscuits très feel-good p. 48 Success-story : retour sur le phénomène Gueuleton p. 52

Wine —

Art & vin, un assemblage très tendance p. 62

Coulisses —

Lillet, l’apéritif 100 % girondin qui n’a pas pris une ride p. 68

Green —

Rencontre : Virginie Lalanne, artisane du pétale p. 78 Nomad Surfing, pour surfer sans culpabiliser p. 79 L’Essaim de la Reine, focus sur des apiculteurs urbains p. 80

Clos Louie, un petit vignoble qui fait parler de lui p. 57 Aymeric Combefreyroux, le vin en héritage p. 58

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L’Arche écosystème, une pépinière d’entreprises vertes et innovantes p. 84



SOMMA I RE

Portfolio —

Les joyeux dessins de l’artiste contemporain Arnaud Faugas p. 90

Top 10 —

Des spots insolites pour des moments inoubliables autour de Bordeaux p. 98

Mode —

Mona watches, des montres made in Bordeaux & inspirées p. 109 Dans l’atelier de Petrusse, fabricants d’étoles de luxe p. 110

© Émilie Dubrul

© Émilie Dubrul

© Nicolas Duffaure

V I V RE B O RDEAUX ÉTÉ 2022

Asphalte, précurseur de la pré-commande : pour une mode consciente et écoresponsable p. 114 Sézane à Bordeaux : Interview exclusive de sa fondatrice Morgane Sézalory p. 120

Déco —

Escapade — L’hôtel La Réserve de Saint-Jean-de-Luz vous invite à des retraites de yoga p. 141 Un week-end iodé sur l’île de Ré p. 142

+

Ekru, une nouvelle marque de bougies décoratives artisanales et poétiques p. 125 Rencontre avec Sarah Tissandié, fondatrice de Tilt, des conseils déco très écolos p. 126 Dans l’atelier de la restauratrice MarieGaëlle Doutreloux p. 128 Visite : Coraline, Nina et Juliette de Touton Studio nous ont ouvert les portes de la maison d’Agnès p. 132

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Carnet d’adresses p. 145 LE BORDEAUX DE Héla Mansour, guide-conférencière et cofondatrice de Bordeaux Walking Tours p. 146






Culture ×

“L’homme sans culture est un arbre sans fruit.” Antoine de Rivarol Écrivain, journaliste et polémiste français (1836)

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Repéré

© David Viarouge

© Christophe Doucet

MUSIQUE. Il n’a pas 20 ans et a déjà joué devant 12 000 personnes sur la scène du Zénith de Strasbourg. Lauréat du tremplin RIFFX Top Music Live 2021, le jeune Alexis Joubert, alias Søren, est le nouvel artiste à suivre. Auteur, compositeur, interprète, on retrouve dans ses mélopées des influences comme Muse, Yungblud, ShakaPonk ou encore Bring Me The Horizon. Les morceaux de son premier EP, Beside me, sorti en 2021, ont été produits depuis son home studio de Saint-Aubin-du-Médoc. Ça rock ! ED

Artiste forestier EXPO. Jusqu’au 17 septembre, la faune landaise investit Bordeaux. Le Frac a invité l’artiste landais Christophe Doucet à s’emparer de différents espaces de la Méca pour exposer ses œuvres monumentales : lapin, souris, renard en chêne, en tilleul, en acacia et autre aulne glutineux, c’est une véritable forêt de sculptures géantes et étranges qui s’offre au visiteur. C’est aussi la première exposition d’envergure de l’artiste dans une institution publique en France. ED 014


Exposition immersive

© Aldo Ballo courtesy Archivio Nanda Vigo

HOMMAGE. Du 7 juillet au 7 janvier prochain, le musée des Arts décoratifs et du Design dédie une exposition à la célèbre architecte et designer Nanda Vigo. Nanda Vigo, l’espace intérieur retracera la carrière de l’artiste et permettra de plonger dans son œuvre grâce à une expérience immersive. Pour l’occasion, plusieurs installations aujourd’hui disparues seront reconstituées. L’objectif est de rendre hommage à la démarche expérimentale de Nanda Vigo, cette artiste avant-gardiste qui voyait l’art comme une projection de la société à venir. L’accent sera également mis sur le caractère novateur et original de ses créations ! MCH

Nanda Vigo, Trigger of the space, 1974, Galleria Vinciana


SUR LES ROUTES D’AQUITAINE

© Anne-Sophie Annese

— 26 juin à l’abbaye de la Sauve-Majeure (Scènes d’été en Gironde) — 28 juin à Villenave d’Ornon — 22 juillet à Ambès — en septembre dans le cadre des Journées du patrimoine à la halle des Chartrons — 10 septembre au Porge

La danse appassionata SPECTACLE. Après quelques années d’errance artistique, une solide formation de danseuse auprès des plus grands noms de la scène internationale, Christine Hassid a retrouvé sa ville natale, Bordeaux. Et a eu l’envie de passer de l’autre côté du miroir, à savoir entamer une carrière de chorégraphe. Création de sa compagnie, nominations au Golden Mask en Russie (meilleure chorégraphe et meilleur spectacle contemporain) avec une « Carte blanche à Chopin ». Un programme totalement blacklisté actuellement pour des raisons géopolitiques évidentes… mais bien éloignées de l’art ! Guettez son passage dans les programmations estivales, avec sa création Souffles#1, création où l’art visuel et la danse contemporaine traduisent sa rencontre avec l’artiste plasticien Laurent Valera. Une proposition accompagnée d’une partition originale créée par le compositeur bordelais Damien Delpech. Mais comme nul n’est prophète en son pays, on peut simplement regretter que la scène bordelaise ne lui ait pas encore passé commande. MC 016



L’homme de l’ombre

Comment êtes-vous arrivé dans le milieu de l’art contemporain ? J’ai baigné dans la culture classique avec des parents ex-soixante-huitards mélomanes, très ouverts, qui m’ont donné le goût pour les expos, la création. Mon premier souvenir artistique fut à la fondation Maegh, à Saint-Paul-de-Vence, où j’ai découvert Miró et Giacometti. Ça m’a donné envie de retourner voir d’autres expos. En parallèle, comme beaucoup de gens de ma génération [il est né dans les années 80], j’ai grandi avec I Am et NTM, la culture hip-hop, et j’ai vécu les balbutiements du street art. Après vos études, on vous retrouve à Paris, à la tête de l’exposition éphémère Mix’Art au Grand Palais. Pouvez-vous nous en dire plus ? Après Sciences-Po à Lille, j’ai intégré l’association Ariana qui donne accès à la culture à des élèves issus de quartiers prioritaires, au travers de programmes artistiques notamment. J’ai accepté de monter ce projet qui avait pour thématique la diversité culturelle sous réserve qu’on y intègre le street art. J’ai réussi à faire venir les plus grands street artistes internationaux du moment comme Speedy Graphito, Jeff Aérosol, Jérôme Mesnager, Brusk et plein d’autres.

© Émilie Dubrul

Après 544 jours de « débrayage total » pour cause de Covid, Aurélien Dessailloud fait désormais feu de tout bois. À la direction artistique de l’institut culturel Bernard Magrez depuis cinq ans, il est le responsable de l’organisation des expositions.

Aurélien Dessailloud devant la toile Never Give Up de l’artiste Blade

Et puis il y a eu Bordeaux ? Après trois ans avec Ariana, j’avais créé ma société de diffusion d’artistes. C’est en travaillant sur des levées de fonds pour des établissements culturels que j’ai rencontré M. Magrez. Quand le poste de directeur s’est libéré, j’ai évidemment postulé. Comment travaillez-vous ensemble ? Bernard Magrez, du fait de ses goûts personnels et de mon expertise, a la volonté de faire de l’institut culturel LA référence du street art en France. Nous nous sommes fixé une ligne éditoriale. Chaque salle a ses propres temporalités. Je lui fais des propositions d’expositions ou d’orientations au moins un an avant le début de la saison puis nous avançons ensemble. 018

Vous avez jusqu’au 22 octobre 2022 pour découvrir l’exposition La collection. Imaginée il y a 2 ans, elle réunit près de 80 œuvres parmi les plus belles pièces de la collection personnelle de Bernard Magrez. À travers les 10 salles du château, Aurélien Dessailloud vous convie à un voyage cinématique plein de surprises.

Quelle est cette ligne éditoriale ? La nouveauté, l’inédit. Ce qui n’a jamais été vu dans la région, voire en France. À l’image de la carte blanche donné à l’artiste parisien Seth en 2019. C’était sa première exposition muséale en solo en France. Ou encore l’exposition d’avril 2023 qui sera consacrée aux muralistes impressionnistes espagnols.


© DR © DR

Comment vous viennent vos idées, vos envies ? Je fais énormément de veilles via les RS. Pour nous, Instagram est un média génial. Et lorsque je suis en vacances ou que je vais à Paris (une fois par mois), je vais voir des expositions, des galeries. J’ai été bluffé par l’exposition Natures mortes d’Anne Imhof actuellement au palais de Tokyo. On nous démarche aussi beaucoup, mais pour qu’il en résulte une expo, il faut que toutes les étoiles soient hyper bien alignées. Et puis il y a les rencontres. C’est ce qui s’est passé avec l’artiste espagnol Manolo Mesa, actuellement exposé, que j’ai découvert lors de l’exposition de Rouge, et qui m’a donné envie de proposer les muralistes espagnols. Un avant-goût de l’expo de rentrée ? Elle sera consacrée aux pionniers du graffiti français autour des 10-12 meilleurs peintres. ED


Photos © Nicolas Duffaures

Une librairie au Bouscat

Librairie la Petite Mezzanine 8, esplanade Jean Valleix 33110 Le Bouscat 05 56 96 31 52

L’ADRESSE. Depuis février, Le Bouscat a sa librairie, la Petite Mezzanine. À l’origine de ce projet, on trouve Quitterie Tanguy, ex-professeure des écoles. « Cela faisait bien une dizaine d’années que j’avais ce rêve de monter ma librairie, explique la quarantenaire, et puis, il y a trois ans, j’ai décidé que le rêve pouvait devenir réalité. » Elle suit alors des cours à l’INFL (maintenant École de la librairie) à Paris en 2019 ; travaille tous les samedis de l’année scolaire 2020 à la librairie le Partage des mots de Villenave-d’Ornon, dresse un business plan, et finalement choisit Le Bouscat pour s’installer. « Il n’y avait pas de librairie dans cette commune », précise-t-elle. Dans un local cosy de 57 m2, situé dans le nouveau quartier Libération-Centre-Ville du Bouscat, sa librairie généraliste se distingue par un rayon jeunesse très important (près de 30 % de son magasin), et une grande variété de livres (romans, polars, mangas, livres pratiques, etc.). Quitterie Tanguy a également déjà mis sur pied un programme d’animations variées : lectures méditatives avec Magali Berteau, ateliers de comptines signées pour les enfants avec Julie Roudier, ou encore ateliers d’écriture. AC 020



Le Signal de Sophie Poirier En 2014, l’auteure bordelaise Sophie Poirier tombe amoureuse du Signal, cet immeuble de Soulac-sur-Mer menacé d’érosion et vidé de ses occupants. C’est cet « amour » qu’elle raconte dans son dernier livre, Le Signal. Propos recueillis par Aline Chambras Photos Voir mentions

Comment est né ce livre, ce roman, sur le Signal ? Le Signal a été évacué en janvier 2014. En novembre 2014, je décide de m’y rendre pour un reportage. Quand j’arrive, il est marqué Interdit d’entrer. Mais les portes sont ouvertes, les vitres cassées. Je rentre.

d’être dans un bateau. Avec Olivier Crouzel qui m’accompagne pour des photos et des vidéos (lire encadré), on trouve dans un appartement deux chaises disposées devant la fenêtre. On s’y assoit et on est comme envoûtés. À ce choc esthétique s’est mélangé un choc émotionnel.

Que découvrez-vous ? Je pénètre un immeuble vide, c’està-dire sans habitants, mais où il reste plein d’affaires. Dans chaque appartement, il reste des objets, des livres, du mobilier parfois. Ça fait comme un décor, des sortes de mises en scène. Et au fond de chaque appartement, systématiquement, il y a l’océan derrière les fenêtres.

C’est-à-dire ? Ce lieu a ravivé en moi les sentiments que l’on ressent quand on doit quitter des lieux que l’on aime, quand on laisse des lieux derrière soi, quand on voit une maison que l’on a aimée se fermer, se vendre. J’ai vraiment ressenti ça très fort. J’habite à Bordeaux depuis très longtemps et dans cette ville, il y a plein d’endroits, d’appartements, de maison, devant lesquels je passe et où je n’habite plus.

Est-ce à ce moment-là qu’a lieu ce que vous avez appelé un « coup de foudre » ? Oui, parce que je vis d’abord un choc esthétique : il y a quelque chose de très beau. J’ai l’impression

Comment se traduit ensuite cet amour, cet attachement au Signal ? 022

J’y retourne très régulièrement. Je lui rends visite. Je m’inquiète pour lui. Quand il y a une tempête, j’ai peur qu’il s’abîme. C’est un peu comme si j’assistais à une sorte de mort lente. Ça me touche. Êtes-vous retournée le voir depuis la parution de votre livre ? Oui, bien sûr. Mais je crois qu’il a fait son temps comme on dit. Il est temps qu’il disparaisse je pense. Pourquoi ? Quand il a été désamianté et dépollué, ça a été un moment où il était redevenu très beau. Il avait une élégance. Ce n’était plus une simple ruine. Tout de gris, de béton nu, il avait une beauté, un rapport puissant avec le paysage océanique. Mais aujourd’hui, il recommence à dépérir. Néanmoins, il tient toujours debout, malgré tout ce que les humains et les éléments naturels lui ont fait subir.


© Claire Lafargue


IMAGES D’ART

Photos © Olivier Crouzel

C’est avec l’artiste plasticien, photographe et vidéaste, Olivier Crouzel, connu pour composer des dispositifs vidéo associés à des bâtiments, des objets, des matériaux et des paysages, que Sophie Poirier a mené ce projet littéraire autour du Signal. Les deux artistes travaillent régulièrement ensemble. Dernières créations en date : Vers le fleuve, des histoires à entendre et projections vidéo de plein air, à découvrir les 18 août (Port de Bègles) et 26 août (Refuge la Nuit américaine, Bassens). On attend les voyages, une installation, vidéos/ textes, Fabrique Pola, du 9 juillet au 24 juillet 2022. histoires maritimes.art

Sophie Poirier, Le Signal, éditions Inculte, 2022, 140 p., 13,90 €

Ce Signal, pour vous, estce une parabole du monde contemporain ? Oui, il a beaucoup de choses à nous dire. Déjà son nom, ce n’est pas pour rien, je pense qu’il s’appelle le Signal. Et puis, j’ai le même âge que cet immeuble, je suis née en 1970. Et ce bâtiment dit beaucoup de ces 50 dernières années. Il dit une époque où on croyait en la croissance infinie, où on construisait des immeubles amiantés à 200 m de l’océan.

Sophie Poirier sera présente au salon du Livre de l’Estuaire, le dimanche 7 août 2022 sur le port de la Rive de Mortagne (33).

C’est une critique en quelque sorte ? Non, je ne veux pas être dans la morale. Dans les prospectus de vente du Signal, on vantait sa 024

bonne isolation grâce à la présence d’amiante ! J’ai grandi dans ce mouvement-là, dans ce langage-là. C’est ça que je veux raconter, c’est cette histoire qui m’importe. Je trouve que c’est trop facile de juger et de dire que c’est n’importe quoi d’avoir construit cet immeuble ici. Aujourd’hui, on continue bien à faire plein de choses tout en sachant que ça ne fait pas de bien à notre avenir, non ? Votre plus beau retour de lecteur/ trice ? J’aime beaucoup quand des gens me disent qu’avant de lire mon livre, ils appelaient le Signal la verrue et que maintenant, ils le trouvent beau.




Texte Aline Chambras Photos Claire Lagargue

La Caisse version Fradin Dans le quartier Mériadeck, l’ancien siège de la Caisse d’Épargne, racheté par le promoteur Norbert Fradin en 2015, a entamé sa métamorphose intérieure : le rez-de-chaussée du bâtiment doit accueillir en 2023 un vaste espace culturel.

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n pourrait presque ne pas la remarquer. Posée en plein cœur du quartier Mériadeck, entre les voies du tram, Auchan et La Poste, dans ce dédale d’architecture de béton, la « Caisse », comme on la surnomme, se glisse plutôt bien dans le décor. Pourtant, avec sa silhouette imposante aux formes arrondies et sa façade grumeleuse, elle se démarque, tel un vaisseau d’une autre époque ou un

ovni architectural, dont toute la beauté tient dans son étrangeté. Érigée en 1977 pour abriter le siège social de la Caisse d’Épargne, ce bâtiment a d’ailleurs valu à son concepteur, l’architecte pyrénéen Edmond Lay, le Grand Prix national de l’architecture en 1984. Preuve qu’elle illustre de manière emblématique le style architectural, de type brutaliste, de la deuxième moitié du XXe siècle, la Caisse est même 027

classée Monument historique depuis cette année. Et c’est cette esthétique, cette patte si particulière, qui a séduit le promoteur Norbert Fradin, déjà propriétaire de nombreux sites remarquables et chargés d’histoire, à l’instar du château du Prince noir à Lormont, du moulin de Porchères ou du château de Villandraut. D’autant que l’intérieur de la Caisse est aussi « typé » et « dans son jus » que son extérieur.


Norbert Fradin

“Un lieu pareil, on ne le laisse pas vide, on l’occupe”

Un décor de cinéma En 2015, Norbert Fradin décide donc de racheter cet édifice de plus de 3 200 m2 après que la Caisse d’Épargne a déménagé dans des locaux flambants neufs situés dans le secteur d ­ ’Euratlantique. Il installe d’emblée sa propre société, Fradin Promotion, au deuxième étage de cet édifice atypique. « Un lieu pareil, on ne le laisse pas vide, on l’occupe », insiste son nouveau propriétaire. On peut le croire quand on découvre une fois sorti de l’ascenseur qui mène à « son étage » un décor quasi cinématographique : une longue coursive, des bureaux vitrés, des jardinières de béton, des faux-plafonds, le tout en dominante marron. C’est là, dans ces vestiges d’un univers bureaucratique d’avant l’an 2000 que Norbert Fradin a pris les commandes de la Caisse. L’homme d’affaires expérimenté, passionné d’art et de culture, y a posé ses dossiers, empilés les uns sur les autres, sur un immense bureau, des œuvressouvenirs comme cette immense 028

photo de Mick Jagger qui lui vient de Jean-Marie Périer, cet étrange fauteuil aux pieds en forme de pattes d’animal ou sa collection de voitures de course miniatures. Entre deux coups de fil et quelques anecdotes, il explique à demi-mot son projet : donner une deuxième vie à ce « chef-d’œuvre », comme il aime à qualifier ce bâtiment, en y créant au rez-de-chaussée un lieu dédié à la culture et en louant le reste des étages à des entreprises privées, afin d’équilibrer les budgets. Dès 2018, il a ainsi hébergé l’école de danse bordelaise de Patrick Dupont. Mais le brutal décès de ce dernier en 2021 a sonné de manière précoce la fin de cette aventure. Ensuite, alors qu’il se met à chercher activement « des gens sympathiques susceptibles d’habiter avec (lui) dans ce navire », Norbert Fradin doit composer avec la pandémie de Covid-19. Bref, la renaissance de la Caisse a pris du retard. Néanmoins, depuis septembre 2021, les 1 000 m2 du 4e étage et sa terrasse de 600 m2 avec vue sur la cathédrale Saint-André ont été investis par le coworking W’IN, la société de l’homme d’affaires Clarence Grosdidier. Ici près de 40 % des 140 postes de travail (une cinquantaine de postes en bureaux privatisables, une quarantaine de postes dédiés en open space, huit postes « libres », ainsi que des salles de réunion), ont déjà trouvé preneur. Lumineux grâce aux immenses baies vitrées qui donnent sur la terrasse, cet espace a été revisité version XXIe siècle : coussins et luminaires en jute et coton, matériau bois et couleur blanc-beige dominant, plantes vertes et tapis, etc., les années 80 sont de lointains souvenirs, que seules les dalles de béton et la rambarde de pierres scellées de la terrasse rappellent.

Culture et salle des coffres Quant aux autres étages de la Caisse, ils sont pour l’instant inoccupés. Des discussions seraient en cours avec d’autres sociétés. Sur ce point, Norbert Fradin préfère rester discret. « Ça dépendra des propositions, il faut une cohérence », élude l’homme d’affaires. Seule certitude, le projet de lieu cultu-


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“Je veux en faire un lieu intermédiaire où se produiront des musiciens, des danseurs, des plasticiens” rel prévu au rez-de-chaussée est lancé et devrait voir le jour en 2023. Les travaux d’aménagements ont d’ailleurs déjà commencé. Pour l’entrepreneur, l’objectif est de remettre à cet étage le site dans son jus d’origine, celui de 1977. « Nous avons déjà abattu de nombreuses cloisons mobiles afin de retrouver l’amplitude des espaces, explique-til. Les faux-plafonds ont été arrachés, des câbles électriques pendent et la poussière est au rendez-vous. L’espace plongé dans une semi-pénombre est immense. « Pour l’instant, je n’ai pas encore trouvé de nom pour ce lieu, mais je sais qu’il servira à accueillir des expositions, des performances d’artistes. Je veux en faire un lieu intermédiaire où se produiront des musiciens, des danseurs, des plasticiens », indique Norbert Fradin, sans en dire davantage. Il préfère parler du lieu, évoquer l’amplitude de la structure première, celle qui existait avant la mise en place des petits bureaux dans les années 90. Il montre la moquette murale verdâtre, qu’il devra certainement faire arracher pour être en conformité avec les nouvelles normes d’accueil du public et de risques incendie, les luminaires 030

d’origine aux formes arrondies et très seventies qu’il conservera, et bien sûr, la salle des coffres qu’il gardera en l’état et ouvrira aux visiteurs. « Là, 5 000 coffres ont gardé précieusement pendant quarante ans les biens de familles bordelaises. C’est la deuxième plus grande salle des coffres de France », précise-t-il, enjoué. Avant de terminer la visite de ce labyrinthe « où l’on ne se perd jamais », assure Norbert Fradin, un passage au 3e étage s’impose : ici, un auditorium et ses 220 fauteuils aux accoudoirs en bois et sièges rembourrés servait aux réunions ou séminaires de la Caisse d’Épargne. L’homme d’affaires souhaite le transformer en espace de manifestations qui pourra accueillir du public, lors de conférences, concerts ou autres réunions organisés par Fradin Culture et Patrimoine, sa société dédiée à la culture. Là encore, Norbert Fradin espère pouvoir préserver le plus possible le style initial de la salle même s’il sait bien qu’il devra faire certaines concessions afin d’être en conformité avec les normes actuelles d’accueil du public. Mais les fauteuils, c’est certain, il fera tout pour les garder.



La nouvelle voix de l’art contemporain à Bordeaux Cédric Fauq vient de rejoindre le CAPC en tant que commissaire en chef. Une belle consécration pour ce jeune prodige de l’art contemporain, auteur de plusieurs expositions remarquées en France et à l’étranger. Texte & photos Émilie Dubrul (sauf mentions)

I

l y a des rencontres qui commencent par un rendez-vous manqué. C’est finalement dans le lobby du CAPC, sous les imposantes poutres en bois qui peuplent les hauteurs de l’entrepôt Lainé que se tient l’entretien. « Je m’apprêtais à partir chez le médecin. La grippe saisonnière je pense », lance-t-il en riant comme pour mieux exorciser le mal. « On n’est pas passé loin du deuxième lapin ! » La trentaine approchante, la tignasse indomptable et le rire facile, Cédric Fauq est de ces personnalités stimulantes qui donnent envie de débattre, de discuter, de comprendre. « J’avais 16 ans quand j’ai découvert l’art contemporain. J’ai eu une sorte de déclic. C’était lors du festival le Printemps de septembre à Toulouse, la ville où j’ai grandi. Ce n’est pas avec une œuvre en particulier mais plutôt à travers un parcours d’œuvres dans l’espace public et le récit qui était proposé. J’ai su à ce moment-là que j’en ferai mon métier, que je deviendrai commissaire d’exposition. » Il se souvient d’« émotions assez

puissantes » et « d’avoir été secoué, sans trop comprendre pourquoi ». Ne pas tout comprendre, c’est un peu propre à l’art contemporain, non ? La remarque le fait de nouveau beaucoup rire. « Il y a “ne pas tout comprendre, être surpris et avoir le désir d’en savoir plus”. Et il y a “ne pas tout comprendre en ayant l’impression d’être exclu”. Deux réactions très différentes que l’art contemporain peut provoquer malheureusement. Ce que j’essaie de faire évidemment c’est de susciter la curiosité et l’envie. »

Première exposition Après une classe préparatoire, une licence en métier des Arts et de la Culture à Paris I, puis des études à l’EHESS (École de hautes études en sciences sociales) et au prestigieux Royal College of Art de Londres, Cédric Fauq intègre le centre d’art Nottingham Contemporary où il occupe les postes d’assistant curateur puis de curateur. Il fait une entrée remarquée dans le monde de l’art contemporain 032

en cosignant l’exposition Still I Rise: Feminisms, Gender, Resistance, Act 1. Il y invite une quarantaine de praticiens dont Linder Sterling, Grace Jones ou Sung Tieu à explorer le rôle joué par les femmes dans l’histoire des mouvements de résistance. « Et puis en 2020, au beau milieu de la pandémie, j’ai eu l’opportunité de rejoindre l’équipe curatoriale du palais de Tokyo, une très belle maison. Le contexte était compliqué, c’était très court pour mettre en place des choses mais j’ai tout de même créé deux beaux projets et un dernier qui ouvre bientôt. D’où mon voyage à Paris la semaine dernière », précise-t-il amusé, en référence au premier lapin. « Et puis ce poste s’est ouvert ici. » S’il y a beaucoup de jeunes commissaires d’exposition sur le marché, rares sont ceux qui accèdent à un tel niveau de responsabilité aussi rapidement. « C’est vrai que j’ai un parcours fulgurant. Mais j’ai cravaché (Rires) ! Il y a beaucoup de travail derrière et de belles opportunités qui se sont présentées à moi. J’étais au bon endroit


Portait devant une œuvre de Olu Ogunnaike, artiste britannique.


© Armin Morbach

© Iryna Drahun

© Franck Alix

À venir

“J’aimerais que les gens viennent ici puis aillent à la fête foraine. Qu’une expérience esthétique se passe, qu’ils soient surpris.” ➀ Lukas Hofmann, Into the

Unknown, 2021. Performance au Moderna Museet Malmö ➁ Sgàire Wood. Photographiée par Armin Morbach pour TUSH Magazine, 2019 ➂ Éloïse Lem. DNSEP, option art, Institut supérieur des arts, Toulouse, 2018

au bon moment. » Choisi par Sandra Patron et la ville de Bordeaux parmi une dizaine de prétendants au poste de commissaire en chef, Cédric Fauq n’est pas arrivé les mains vides. Depuis septembre, il est à l’origine du collectif le Club du Poisson Lune et de la venue de l’artiste Olu Ogunnaiké qu’il a connu à Londres. « Il y a un petit côté stratégie lorsque vous souhaitez un poste, dans le sens où il faut comprendre quel est le projet de la directrice, quel est le projet de la ville, quelle est l’histoire du lieu. Il ne faut pas être en terrain inconnu. Connaître permet de proposer d’autres choses. De donner envie tout en s’inscrivant dans une forme de continuité et en même temps montrer que votre présence peut offrir quelque chose qui n’a pas encore été fait. » 034

Avec ce tempérament aussi rassurant qu’audacieux, Cédric Fauq s’est peut-être aussi distingué parce qu’il connaît bien la maison. « Le CAPC, j’y viens souvent, depuis une dizaine d’années, lorsque je descends en famille à Toulouse. C’est un passage obligé. J’ai toujours été fasciné par le lieu, son histoire. Sa collection qui dit quelque chose de l’histoire de l’art contemporain. Je n’inviterais jamais un artiste juste parce que j’aime sa pratique. Il faut que son travail puisse entrer en résonance avec le lieu, le bâtiment et avec Bordeaux. Que ça ait du sens de faire cette expo ici et maintenant. C’est assez crucial pour moi. » À l’image de sa future exposition Barbe à papa qui sera le coup d’envoi des festivités liées à l’anniversaire des 50 ans du CAPC. Avec son environnement féerique de fête foraine, elle investira la nef au mois d’octobre 2022, au moment où la Foire aux plaisirs occupera la place des Quinconces. « J’aimerais que les gens viennent ici puis aillent à la fête foraine. Ou l’inverse. Qu’une expérience esthétique se passe, qu’ils soient surpris. J’aimerais pouvoir créer la parole autour de l’art contemporain trop souvent décrit comme hermétique. Que cette parole puisse exister au-delà des murs du CAPC. C’est par la rumeur, le boucheà-oreille qu’on va faire venir des publics qui ne sont jamais venus ici », conclut-il, confiant.


Food ×

Quête de singularité et démarche vertueuse : tels sont les nouveaux crédos de nos jeunes chefs. Après la dictature des plats signatures qui les prennent en otage et enferment les convives dans un parcours fléché, place à l’imagination. Et pour se démarquer, les artisans de bouche comme les restaurateurs font assaut de bons plans que nous avons pistés pour vous. L’été sera résolument gourmand ! Texte Martine Crespin

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Photos © Risy

Ayawaska nous met la tête à l’envers ! MIXOLOGIE. Ce drôle de nom, qui semble sorti d’un album de Tintin, signifie tout simplement « la liane de l’âme ». Car, pour Gabriel Rovira, tout a commencé dans un village perdu d’Équateur où, au cours d’une mission humanitaire, une séance chamanique lui a mis la tête à l’envers, après qu’il a bu un étrange breuvage. D’où la déco très fun de ce nouveau haut lieu de la mixologie bordelaise en association avec Grégory Bruneau, où la végétation est au plafond ! Gabriel a toujours été passionné par le monde du cocktail et des alcools méconnus. Après avoir liquidé son passé parisien, il s’installe à Bordeaux et décide de « faire voyager les gens ». Treize refus de banques et trois mois de travaux plus tard, il ouvre ce lieu, pour lequel sa compagne Béryl l’aide copieusement. Une carte de dix cocktails originaux (dont deux sans alcool) concoctés par Mario, bartender brésilien, qui changent selon la saison car ils contiennent des produits frais, et des assiettes à partager. Explosion sur les réseaux sociaux et, très vite, la terrasse et la salle sont pris d’assaut de 18 h à minuit. Tout comme la cave, qui peut être privatisée pour un anniversaire ou une fête de copains. Comme quoi, certaines expériences perturbantes peuvent avoir des conséquences pour le moins heureuses ! MC accbordeaux.com 036


Yannick Alléno, le pari de SaintÉmilion

Le mouvement culinaire Cuisine moderne que vous avez lancé en 2013 est-il toujours d’actualité ? Plus que jamais ! La notion de terroir y demeure fondamentale et ma carte fait appel à la fine fleur des artisans et de leurs meilleurs produits. La vigne est le fil rouge de la carte, des feuilles au moût de raisin, et pour les aficionados de ma cuisine, les sauces sont toujours à l’honneur. Mais il convient de les

les producteurs de la région, ce qui correspond actuellement à une nécessaire éthique. Ma carte est volontairement limitée à 5 entrées, 5 plats, 5 desserts au fil desquels je revisite le foie gras au verjus, la garbure, la volaille soufflée et rôtie avec son foie blond, associés à des créations personnelles qui font de ma cuisine un moment de partage intense.

© Richard Haughton

Comment votre chemin a-t-il croisé celui d’Angélique Da Costa, fille de Chantal et Gérard Perse, propriétaires de Château Pavie et de cet établissement ? J’étais déjà admiratif du travail effectué dans leurs vignobles, je les avais croisés régulièrement dans différents établissements et, lorsqu’il s’est agi de prendre les commandes de cette table, j’ai saisi l’opportunité de poser un pied dans le Sud-Ouest. Et c’est dans la période compliquée du confinement, en 2020, que nous avons pu mettre en place à la fois un nouveau décor et une carte où je me suis efforcé de comprendre le terroir pour en livrer mon interprétation.

© Jean-Bernard Nadeau

La gastronomie, c’est l’harmonie entre ce que le chef raconte et ce que le client ressent, entend-on souvent. Pari réussi pour la Table de Pavie, où le chef star Yannick Alléno a décidé d’accrocher quelques étoiles supplémentaires dans le ciel de Saint-Émilion. Rencontre au sommet… de la terrasse.

réinventer pour ancrer la cuisine dans le présent et le futur. Mon travail sur l’extraction me permet d’enrichir mon répertoire. Quelle est votre approche de notre patrimoine gastronomique du Sud-Ouest ? J’ai tissé des liens très forts avec 0 37

Et les plats d’anthologie goûtés lors d’un sublime dîner orchestré par ce chef d’orchestre hors pair n’ont pas raté leur cible. L’émotion était au rendez-vous ! Vu par le grand bout de la fourchette, qui sait si une troisième étoile n’apportera pas une aura de perfection au-dessus de l’église monolithe ? MC hoteldepavie.com


L’adresse tout choco ! GOURMANDISE. Un jeune couple en reconversion vient d’investir une petite rue du Vieux Bordeaux pour y ouvrir une chocolaterie qui a tout juste ! Arnaud s’est formé auprès des meilleurs et Nathalie l’épaule à la boutique avec un grand sourire. Plus d’une vingtaine de bonbons au chocolat fabriqués dans le labo, juste derrière le comptoir, des tablettes de chocolat grand cru, à l’heure du goûter des cookies à tomber et un chocolat chaud à emporter à se damner. Trop de superlatifs ? Allez tester, vous nous en direz des nouvelles ! MC © DR

chocolaterie-nathalieetarnaud.com

La dolce vita selon Bartolo

© DR

ADDICTIF. Dépaysement garanti à deux pas de Gambetta, où Bartolo vient d’ouvrir son nouveau spot gourmand : Delizia da Bartolo. On se croirait à Positano, avec ce décor coloré, fleuri, ces tables de lave décorée, ces assiettes que l’on a envie d’emporter. Et une cuisine qui fait de ce refuge méditerranéen une ambassade parfaite de la gastronomie amalfitaine ! Des antipasti au tiramisu, sans oublier toutes les spécialités – dont une fameuse pizza Margherita de compétition –, on se régale. Formule le midi et carte le soir, des pizzas cuites dans le four XXL du rez-dechaussée et une bonne humeur en guise de signature. On est bien chez Bartolo ! MC dabartolo-bordeaux.com 038



Photos © DR

Au bonheur des gourmets

« Florence, Richard et Cyril, unis par leur passion pour la gastronomie »

LOCAVORISME. Envie de bons produits, sourcés avec rigueur auprès de producteurs vertueux… mais pas forcément le temps de les dénicher ? La place de marché en ligne la Halle des chefs s’en est chargée et vous facilite la tâche. Pros ou amateurs, tous les cuisiniers le savent : une recette réussie commence par de bons ingrédients. Les trois mousquetaires fondateurs de cette belle idée, Florence, Richard et Cyril, unis par leur passion pour la gastronomie, les terroirs du Sud-Ouest et les produits fermiers, ont sélectionné près de 500 références, la plupart estampillés de labels et inscrits dans une charte de qualité. Par ailleurs, ils s’engagent dans des partenariats à long terme avec des produits payés au juste prix. En s’appuyant sur des chefs en phase avec leurs valeurs de promotion du bien-manger, des pointures telles Fabien Beaufour (le Cent33) ou Mathieu Martin (Saint-James), ils espèrent former une communauté du goût que l’on retrouve en première ligne du « Mag des Fines Bouches », leur webzine gastronomique et curieux dans lequel ils vous font même partager leurs recettes ! Avec des circuits de distribution raccourcis, grâce à une centralisation des expéditions sur la plateforme, ce marché garantit… le meilleur. Et coche toutes les cases de nos envies du moment. MC Plus d’informations sur lahalledeschefs.fr 040



Texte & Photos Émilie Dubrul

Du beurre, oui, mais de baratte et bordelais ! Du côté du Bouscat, François, Sébastien et leurs quatre salariés fabriquent du beurre de baratte artisanalement. Avec ou sans sel, nature ou aromatisé, c’est tout un pan de notre patrimoine gastronomique qu’ils font revivre avec leurs superbes produits.

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“Nous savions que nous voulions faire du beurre de qualité, et nous nous sommes orientés vers la méthode traditionnelle, le beurre de baratte.”

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on, la production de beurre de baratte n’est pas qu’un truc de Normands ou de Bretons qui restent les principaux producteurs hexagonaux. En Gironde, il fut un temps pas si lointain où chaque ferme qui possédait une vache laitière produisait son propre beurre, à la main. Certes, la tradition s’est peu à peu perdue durant l’entre-deux-guerres. Mais deux entrepreneurs épicuriens la remettent au goût du jour.

Double barattage Dans leur petit laboratoire bouscatais dont la température ne doit pas dépasser les 10 degrés, Nayem, Marina, Arthur et Lucas, manches retroussées, s’activent autour d’un cylindre en acier inoxydable qui ressemble à un énorme tambour de lave-linge. 250 litres de crème épaisse pasteurisée y tournent à très grande vitesse. D’abord dans un sens, « c’est ce qu’on appelle le barattage », puis dans l’autre, la phase de malaxage, et ce pendant près de trois heures. « Il n’y a pas 36 façons de faire du beurre, explique Sébastien, pragmatique. Les gros industriels utilisent un butyrateur, qui, en un rien de temps, transforme 044

la crème en beurre. Nous savions que nous voulions faire du beurre de qualité, et nous nous sommes orientés vers la méthode traditionnelle, le beurre de baratte. » Après avoir laissé la crème maturer quelques heures, le barattage consiste à évacuer le babeurre (ou petit lait) afin que les molécules de matière grasse s’agglomèrent et constituent cette motte solide d’un jaune doré qu’est le beurre. « Pour nous différencier d’autres acteurs, nous avons une spécificité ! précise fièrement l’entrepreneur. Après un premier barattage, nous laissons le beurre reposer à cœur quelques jours puis nous le repassons en cuve. Ça permet de lui donner plus de matières grasses. Les chefs étoilés adorent car ça tient mieux en cuisson. Et nous aussi ! Le beurre sera d’autant plus onctueux et facilement tartinable. » Une fois que le beurre s’est de nouveau reposé en chambre froide, il peut être moulé puis conditionné. Lors de ces étapes 100 % manuelles, il n’est pas rare que les deux associés passent derrière les paillasses. « Nous sommes une toute petite entreprise et tout le monde est polyvalent. » La structure artisanale produit 500 kilos de beurre par semaine et tend vers un objectif d’une tonne. « Nous proposons trois gammes de beurre : doux, demi-sel et fleur de sel (de l’île de Ré ou d’Oléron) ainsi que des beurres assemblés. » Piments, algues, zestes de citron, cèpes, poivre noir de Madagascar, mais aussi des saveurs insolites comme fève de Tonka ou ciboulette, développées par ou pour les chefs étoilés, viennent étoffer la gamme.

L’art d’entreprendre À l’origine de ce projet ambitieux, il y a François Demarque, ancien consultant auprès d’exploitants agricoles, spécialisé dans la mise en place des bonnes pratiques environnementales. Sébastien Fouché, lui, était contrôleur qualité pour de grandes marques agroalimentaires. Deux copains qui partagent l’amour des bons produits.


La structure artisanale produit 500 kilos de beurre par semaine.

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© Rebecka Oftedal

“Ils nourrissent le projet, à terme, de s’approvisionner en lait en direct auprès d’éleveurs girondins, et pourquoi pas de relancer la filière laitière” « Il y a quelques années, François, qui avait envie d’entreprendre sur notre territoire, contacte un de ses amis qui venait de reprendre une beurrerie en Bretagne, raconte Sébastien. Son histoire était vraiment belle et François a réalisé qu’à Bordeaux, terre de gastronomie, il n’y avait plus de beurrerie artisanale. Il m’en a parlé et l’aventure a commencé. » À la Baratte Bordelaise, si les deux fondateurs ne sont pas accrochés au bio, l’aspect environnemental et local était dans la balance. Ils se fournissent pour l’heure auprès d’un regroupement d’éleveurs en Charente, mais nourrissent le projet, à terme, de s’approvisionner en direct, auprès d’éleveurs girondins « et pourquoi pas de relancer la filière laitière ». Après une étude de marché et six mois de R&D chez Coloc 2 Chefs (des cuisines professionnelles partagées à Lormont), le binôme fait le choix de se déployer dans les 046

commerces de proximité du département (fromagerie, charcutier-traiteur, épicerie fine, poissonnerie, etc.), dans les hôtels et restaurants mais aussi via la GMS (grande et moyenne surface). « La majorité des ventes de beurre en France se fait en grande surface » explique François qui rentre justement de livraison d’une grande surface en camion électrique. « Bien nous en a pris car, ayant démarré la commercialisation fin 2019, avec le Covid et la fermeture des restaurants, nous n’aurions pas survécu. » Pour revaloriser leurs chutes de beurre, nos deux gourmands imaginent alors les petits Besquis®, des recettes de biscuits salés et sucrés, à servir aussi bien à l’apéritif que pour accompagner le café. « Parce qu’un bon biscuit sablé, c’est d’abord un bon beurre » souligne Sébastien. Mais pourquoi « Besquis » ? « Le terme “besquis” d’origine médiévale vient du latin panis biscotus signifiant “pain cuit deux fois”, détaille François. Mais c’est aussi l’ancien nom donné aux “petits pains de mer” réclamés par la marine bordelaise au XIXe siècle pour égayer le quotidien de ses équipages. » En référence à cet univers marin, leurs exquis petits Besquis s’appellent donc Petits moussaillons, Petit chaloupés, Petits voyageurs, Petits corsés, etc. Voilà qui devrait faire ancrer le beurre de baratte en Gironde !



La folie des cookies

Vous n’avez sûrement pas échappé aux effluves délicieuses qui embaument les rues de Bordeaux ces derniers mois. De la rue des Ayres à la porte Dijeaux, en passant par la rue des Remparts, rencontres avec les leaders du cookie gourmand bordelais. Texte Pauline Gallard Photos Nicolas Duffaure (sauf mentions)

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ur le pouce, pour bien démarrer la journée, à l’heure du goûter, ou juste pour le plaisir, il y a toujours une bonne raison de manger un cookie. Cette pâtisserie aux notes d’enfance fait désormais les beaux jours de Bordeaux. Et ce n’est pas Hugo Bassani, 29 ans et le charme de la jeunesse, fondateur de Pépite, qui nous dira le contraire : « J’ai une histoire particulière avec eux depuis que je suis tout petit. » Ce globe-trotter aux mille vies a quitté Aix-en-Provence pour le Vénézuela, avant de revenir à Bordeaux dont une partie de sa famille était originaire. « Manger, c’est familial !, confie Hugo. En famille, nous faisions des cookies, des tartes au citron meringuées, des crumbles. » Une enfance aux fourneaux, à

élaborer avec sa sœur les recettes qu’il partage aujourd’hui. Derrière sa douceur, Hugo évoque à demimot la disparition de Léa, sa sœur chérie, dans un accident, alors âgée de 20 ans. Un drame duquel il puise sa force : «Nous avions prévu de nous lancer dans la mode avec ma sœur. » Le déclic se fait pendant le confinement en mars 2020, dans sa maison familiale du Ferret : « Nous imaginions nos cookies là-bas et les testions sur nos amis. J’ai ressorti nos vieilles recettes, je m’entraînais à en faire énormément. L’idée était de les vendre l’été sur le marché du Ferret, dans le but de créer ma première collection. » Hugo déroule le fil de son histoire, qui l’encourage à se lancer dans la création de sa marque de cookies. « Cela n’existait pas au Ferret. Mais ça ne pouvait 048

que marcher. » Il trouve le lieu de ses rêves : une boutique au Canon. « Tout s’est fait de manière organique, rien n’a été trop réfléchi. » En avril 2021, Pépite réjouit les papilles des Ferretcapiens. Un succès immédiat qui l’encourage à s’établir à Bordeaux, rue de la Porte Dijeaux. « Pépite est une marque qui s’est créée avec des souvenirs d’enfance. Nous les aimions à peine croustillants à l’extérieur et presque crus à cœur. C’est le cookie régressif. On vient de sortir une version avec un cœur pâte à tartiner. »

“Nous les aimions à peine croustillants à l’extérieur et presque crus à cœur”


La joyeuse équipe de Pépite

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“Le cookie est une pâtisserie très familiale. Tout le monde en a déjà fait, contrairement aux cannelés.” Une pâtisserie familiale

Seize parfums composent la gamme Be my cookie.

Des cookies ultra gourmands, qui répondent en écho aux autres boutiques bordelaises. À commencer par Be My Cookie, installée depuis 2019. Aux commandes, trois amies, Alexandra, Laure et Zoé. Elles lancent ensemble un salon de thé écoresponsable, où le cookie imaginé par leur cheffe pâtissière remporte un succès immédiat. « Certaines personnes venaient spécialement pour lui. Je me suis dit qu’on pourrait faire une enseigne dédiée », confie Alexandra. Depuis, leur bar à cookies de la rue des Remparts ne désemplit pas, et 050

oblige les fondatrices à délocaliser leur atelier de production vers Nansouty, où les chanceux peuvent aussi se faire plaisir avec leurs seize parfums différents grâce à un petit point de vente. « Le cookie est une pâtisserie très familiale. Tout le monde en a déjà fait, contrairement aux macarons ou aux cannelés », précise Alexandra. Moins technique, plus accessible, le petit gâteau charnu made in USA est une éternelle source d’inspiration. Car s’il séduit de plus en plus, sa diversité est fascinante. Bérangère Train, fondatrice de Batch, nous en livre une version particulièrement originale, directement inspirée de ceux de la Grosse Pomme. « J’ai vécu aux États-Unis, à New York. J’y ai découvert les gros cookies fondants de Levain Bakery. À mon retour en France, j’ai été un peu


© DR

déçue par ceux que je trouvais. Suite à une reconversion dans la pâtisserie, j’ai naturellement eu envie de lancer ma marque. » Cette diplômée en sciences politiques se lance en 2021 dans l’aventure bordelaise rue des Ayres. « J’aimais bien l’idée de reproduire l’esprit de cette pâtisserie de quartier, un endroit où se retrouver après l’école. Le cookie est universel. » Sa particularité : les cookies sont toujours frais (d’où le nom Batch, qui signifie fournées). « On les cuit tout au long de la journée. Ce qui leur donne cette texture très croustillante à l’extérieur, et fondante à l’intérieur. » Impossible de passer à côté de son odeur envoûtante qui s’engouffre dans cette rue très vivante du centre…

Bérangère Train, fondatrice de Batch Cookies

Des recettes gourmandes

Pépite Cookie, 86 rue de la Porte Dijeaux Be My Cookie, 55 rue des Remparts Batch, 61 rue des Ayres

© DR

Chacun à leur manière, les créateurs se différencient, dans une joyeuse émulation : Pépite met en avant des recettes familiales, avec différents formats aux noms évocateurs (les Pitchounes ou les Darons), Be My Cookie allie le savoir-faire américain à la finesse de la pâtisserie française avec ses surprenants assortiments, quand Batch Cookies mise tout sur la fraîcheur de gâteaux généreux et indémodables. « Je suis très content qu’elles soient là », s’enthousiasme Hugo Bassani. Même son de cloche chez Be My Cookie, qui y voit une occasion de sortir de sa zone de confort. « C’est positif. Ce phénomène cookie apporte un coup de projecteur sur chacun. » Du côté des cookies, il y a de la place pour tous les gourmands.

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L’univers Gueuleton

16 restaurants, 14 traiteurs, un magazine éponyme, une web-série, une distillerie, 1 million de followers sur les réseaux sociaux et des projets en pagaille… Retour sur le phénomène Gueuleton.

Texte Aline Chambras Photos Gueuleton (sauf mention)


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Buzz en ligne Galvanisé par cette belle première réussite, le duo met les bouchées doubles sur la com : Instagram, Facebook, Tik Tok, sur tous les réseaux sociaux, il publie des images léchées et alléchantes, et fédère dans son sillage une communauté de plus en plus nombreuse. Sur Youtube, sa web-série intitulée « Terroirs de gueuletons », dans laquelle il revendique et assume de bonne grâce son côté franchouillard, réunit très vite plus de 140 000 abonnés. « C’est à cette époque, vers 2015, que

© Émilie Dubrul

’est une histoire un peu folle qui commence presque par hasard. En coloc à Bordeaux depuis sept ans, le Lot-et-Garonnais Vincent Bernard-Comparat et le Gersois Arthur Edange ont en commun d’aimer les bonnes bouffes inspirées de leur enfance campagnarde. Une fois par semaine, les deux étudiants, l’un en restauration, l’autre en expertise-comptable, organisent dans leur appart de sacrés gueuletons. Ils déposent même le nom, Gueuleton (au singulier), en 2011 et se mettent au défi de monter des soirées privées dans des restaurants via des billetteries sur Facebook. Avec au menu : pâtés en croûte, cochonnailles en tous genre et plats mijotés, le tout en mode décomplexé et rajeuni ! « Ça avait pas mal intrigué », se rappelle Arthur Edange. Et surtout, c’est un succès : les amateurs de bonne chère sont au rendez-vous et les deux compères connaissent même un début de buzz sur les réseaux sociaux. Pour le tandem, c’est le début de l’aventure Gueuleton. Car très vite, tout s’enchaîne : à l’été 2012, ils tiennent un bar éphémère à Sarlat et en 2013, un crédit en poche, ils accouchent de leur premier établissement Gueuleton à Agen ! Avec toujours comme ligne directrice : ripailles et bonne humeur. tout s’est accéléré : des amis de Pau (64), de Royan (17), de Nérac (47) nous ont contactés pour nous dire qu’ils trouvaient le concept extra et voulaient faire comme nous », raconte Arthur Edange. Les deux fondateurs de Gueuleton décident alors de signer des systèmes d’affiliations (une sorte de franchise) et des restaurants estampillés Gueuleton voient le jour un peu partout en Nouvelle-Aquitaine. En février 2020, le premier Gueuleton bordelais s’installe place du Palais. Le dernierné a ouvert en janvier 2022 à Segonzac, en Charente. Aujourd’hui, 053

“Des amis de Pau, de Royan, de Nérac nous ont contactés pour nous dire qu’ils trouvaient le concept extra et voulaient faire comme nous”


“En décembre 2020, ils montent une distillerie près de Condom et commercialisent un gin artisanal fermier sous la marque Sybaritas” 16 restaurants Gueuleton existent en France, la plupart dans le Sud-Ouest, mais aussi à Reims, Lyon, Aix-enProvence et Angers. « Nous avons environ 1 000 demandes d’affiliation, dont certaines proviennent de Belgique, de Suisse, de Singapour ou du Canada », détaille Arthur Edange. Si le succès est au rendez-vous, le tandem ne semble jamais à court de nouvelles idées ni d’initiatives. « On construit pierre après pierre », indique Arthur Edange. En 2017, les deux compères inventent ainsi le tournebroche mobile au feu de bois et lancent le début de leur activité

traiteur. Destinée aux événements privés (mariages, baptêmes, etc.), elle trouve d’emblée sa clientèle. Aujourd’hui, 14 équipes assurent ce service traiteur Gueuleton ! En novembre 2020, ils lancent le premier numéro de Gueuleton, le magazine des bons vivants : dans ce trimestriel de 120 pages édité par Reworld Media, la ligne éditoriale c’est l’esprit Gueuleton, avec de longs papiers sur la gastronomie, la côte de bœuf, les fromages, des rencontres et des recettes, une iconographie ultra soignée et, à ce jour, 6 500 abonnés. Et en décembre 2020, ils montent 054

une distillerie près de Condom (32) et commercialisent un gin artisanal fermier sous la marque Sybaritas. Jamais rassasiés, les deux ex-colocs aujourd’hui âgés de 35 et 36 ans, ont encore mille projets en tête : un livre sur leurs pérégrinations à paraître d’ici la fin 2022 aux éditions Hachette, une émission de télé dont ils ne peuvent pour l’instant rien dire et la création d’un centre de formation spécialement destiné aux équipes des restaurants Gueuleton (240 personnes) à Pau. gueuleton.fr


Wine ×

“Vigneron, c’est un peu un métier aux mille métiers.” Pascal Lucin p. 55

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L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération

Des fleurs, un vase et du rosé

© DR

APÉRO TIME. Pour célébrer l’été, la marque de verrerie Plates&Culotées et Tamara Jacques, fondatrice de la boutique en ligne Les filles les fleurs, se sont associées avec Premius Bordeaux pour une collab exclusive autour de sa nouvelle cuvée rosée. Un combo élégant et stylé qui sera du plus bel effet sur les tables estivales. ED Disponible sur le site mondovino.com

© DR

Un (très) grand vin blanc DÉGUSTATION. Décidément, au pays du Sauternais, Château Guiraud ne fait rien comme tout le monde ! Premier grand cru classé en 1855, la propriété, pionnière en viticulture biologique, vient parfaire sa gamme de vins exceptionnels avec un vin blanc sec d’excellence. Élaboré à partir des lots de sauvignon blanc (70 %) et sémillon sélectionnés sur des parcelles de graves fines sableuses et argileuses, puis vendangé à la main à parfaite maturité, son fruit est généreusement parfumé. Après trois semaines de fermentation en barriques de sauternes, il est élevé durant douze mois en barriques neuves. À la dégustation, la bouche est éclatante et offre une belle persistance aromatique, tandis que ses amertumes fines se dévoilent avec délicatesse. Voilà un vin blanc qui saura se placer au même niveau que le premier grand cru classé et signe le caractère identitaire du terroir mystérieux de Château Guiraud. ED 056


Clos Louie, une pépite en biodynamie

« À nos débuts, à la fin des années 90, le bio et la biodynamie étaient à la marge, surtout dans le Bordelais. Nos voisins nous montraient du doigt et disaient “vous entretenez mal vos vignes” », raconte Sophie. Lorsqu’il était enfant, Pascal se souvient bien des vignes de son grand-père « remplies de tulipes rouges sauvages » et se réjouit aujourd’hui d’en voir réapparaître sur ces parcelles préphylloxériques. C’est d’ailleurs ce legs familial précieux qui leur a mis le pied à l’étrier de la culture en biodynamie. « Ça donne du sens à notre travail » précise l’artisan.

Composer avec le vivant « Nous sommes engagés dans une démarche où tout doit être parfait et maîtrisable. Vigneron, c’est un peu un métier aux mille métiers et nous ne sommes que tous les deux. » Ici pas de « cuve tronconique ni de sol de marbre » mais un travail d’orfèvre qui met en valeur toutes les singularités de ces pieds de vignes d’une soixante d’années. « La vigne restitue toute une panoplie aromatique sur des rendements moyens entre 30 et 40 hectolitres par hectare. C’est l’avantage de travailler

© Émilie Dubrul

À Saint-Genès-de-Castillon, non loin des grands crus classés de Saint-Émilion, voilà une vingtaine d’années que Sophie et Pascal Lucin, artisans vignerons, écrivent l’histoire de Clos Louie. Une discrète mais audacieuse propriété viticole d’une quarantaine d’ares conduite en biodynamie.

Pascal et Sophie au milieu de leurs pieds de cabernet franc

des vieilles vignes. Mais il ne faut pas faire tomber un raisin » confesse celui qui se définit comme paysan. Non loin de lui, un dynamiseur et un pulvérisateur en cuivre d’un autre siècle illustrent en partie ces préceptes. « Avec nos tisanes (préparations à base de plantes pour prévenir les maladies et renforcer les défenses de la vigne), on donne une impulsion à la vigne, par rapport à un instant T. On s’adresse à l’environnement, pas uniquement au raisin, car la biodynamie est avant tout une façon de vivre le vin. Un état d’esprit, plus qu’un label. » En résultent de fabuleuses cuvées de castillon-côtes de bordeaux tant par l’originalité que dans la rigueur à l’ouvrage. Car ce qui compte pour le couple, c’est d’abord le fruit. « Aux 0 57

arômes floraux de violette, de fruits rouges, c’est marquant chez nous » précise Sophie. Pour ne pas altérer la qualité du raisin, ici pas de cuvaison trop longue « qui durcit les vins » et des extractions tout en douceur. Si le bois est « un formidable outil pour affiner le vin », Pascal fait le choix de barriques de 300 ou 600 litres pour ne pas emprisonner ses jus violacés éclatants de fraicheur. Et seulement 20 % de barriques neuves. À raison de 8 à 10 000 bouteilles par an, Clos Louie est une cuvée rare, élégante, qui devrait inciter à détourner le regard des pomerol et autres saint-émilion voisins pour ce beau territoire de castillon. ED En vente directe ou en exclusivité à la cave des Capucins, Bordeaux


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‹ Dans le Médoc, au château Chasse-Spleen, les bottes géantes de Lilian Bourgeat sont un hommage au travail des vignerons.

Texte Émilie Dubrul Photos DR (Sauf mentions)

ART & VIN, LE BON MIX L’art contemporain s’est introduit depuis longtemps dans de nombreux châteaux viticoles, pour le plus grand bonheur de leurs propriétaires. Certains, à la tête de remarquables collections, sont allés jusqu’à transformer leur domaine en véritable centre d’art. Passage en revue.

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“À l’occasion d’une résidence au château, l’artiste chinois Ho Lui a initié une œuvre qui invite le public à participer à l’acte de création” ➀ Château Chasse-Spleen ➁ Château d’Arsac ➂ Château Smith Haut Lafitte -

Ernesto Nieto - A tree on the way

➃ Au château Cantenac Brown,

l’artiste finlandais David Popa a réalisé une fresque monumentale entre les vignes. Biodégradable, elle sera conservée en NFT

rtistes et vignerons partagent un point en commun : la production d’une œuvre, fruit d’un long processus de création qui façonne nos paysages. La vigne et l’art sont ici intimement liés. La première finance l’acquisition annuelle d’une œuvre d’art. En retour, l’art donne à la propriété sa personnalité originale, son supplément d’âme, tout en soignant son image de marque.

Lieux d’exposition atypiques Quand des faiseurs de vins se passionnent pour l’art, cela donne un étonnant assemblage. Si le phénomène n’est pas récent dans le vignoble bordelais – le lièvre en bronze Humanity de Barry Flanagan veille sur les parcelles de cabernet du château Smith Haut-Lafitte depuis une vingtaine d’années –, avec l’essor spectaculaire de l’œnotourisme, de plus en plus de châteaux emboîtent le pas. À quelques encablures de Saint-Émilion, le château de Ferrand, propriété acquise en 1978 par le visionnaire baron Marcel Bich, fondateur de l’entreprise éponyme, expose désormais en son sein une collection d’œuvres réalisées ou inspirées par les produits de la célèbre

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marque. En effet, dès le lancement du stylo à bille BIC® Cristal® en 1950, de nombreux artistes ont librement utilisé cet outil pour réaliser des dessins, des sculptures ou des installations. « Au début des années 2000, mon frère Bruno Bich, alors dirigeant de BIC, a commencé la collection. Mais c’est sous l’impulsion de ma sœur Charlotte qu’elle s’est enrichie d’œuvres d’artistes majeurs et historiques », raconte Pauline Bich Chandon-Moët, actuelle présidente du grand cru classé. Depuis quelques années, comme un écho aux 32 hectares de vignes qui l’entourent, le château de Ferrand accueille en son sein une trentaine d’œuvres issues de la collection BIC privée. Une partie est visible depuis l’entrée de la propriété, à l’instar d’une sculpture de 2,80 m de haut, Le Capuchon mordu, réalisée par Julien Gudéa, exposée sur la façade extérieure. D’autres se découvriront au détour d’un atelier dégustation ou d’une nuit passée au cœur de la propriété familiale. « En 2019, à l’occasion de la création de la salle de dégustation, nous avons demandé à l’artiste Alexandre Doucin de réaliser une fresque au stylo à bille BIC® sur les 62,20 m de murs », poursuit-elle. Une œuvre à 360 degrés, illustrant les paysages de la propriété à travers les quatre saisons. Un travail monumental qui a nécessité 6 mois et 7 stylos Bic® Cristal® pointe fine. « Cette salle est devenue l’icône du château. Cette œuvre magnifique symbolise ce qui fait partie de notre ADN : le vin et notre histoire industrielle. » « Elle marque aussi le point de départ du mouvement artistique qui s’installe aujourd’hui au château de Ferrand » poursuit sa nièce, Alix Dufour, en charge de la collection BIC Art contemporain. Au printemps dernier, à l’occasion d’une résidence au château, l’artiste chinois Ho Lui a initié une œuvre qui invite le public à participer à l’acte de création. Exposée dans l’orangerie, elle sera composée des signatures des amateurs de vins qui passeront les portes du château et prendra la forme du « sourire de Ferrand. »


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© DR


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VORTEX

© Laurent Pernot ADAGP, Paris - Courtesy galerie Marguo Paris

Dans le Libournais, Château de Laurets a fait appel aux artistes nantais Michaël et Florian Quistrebert pour illuminer son chai à barriques. Depuis le printemps, deux sculptures lumineuses reprenant la forme des amphores d’argile où vieillissent les vins diffusent au sol, au plafond, sur les murs un tourbillon de lumières colorées.

➀ Bic Art au château de Ferrand ➁ Château Larrivet Haut-Brion ➂ Pièce sculptée monumentale

en marbre de 14 tonnes, issue de carrières d’aigues blanches en Savoie : La Mémoire du temps par Raymond Jacquet, sculpteur français arrivée récemment au château Smith Haut Lafitte. ➃ Antinoüs par Laurent Pernot au château Malromé

« C’est assez extraordinaire de voir l’émerveillement que les œuvres sollicitent. Les premiers à avoir signé cette nouvelle œuvre sont les membres de l’équipe, fiers d’être invités à devenir artiste » se réjouit Pauline Bich Chandon-Moët.

Un autre regard sur les paysages viticoles De nombreux projets créatifs au service de la notoriété du vin sont portés par une nouvelle génération. Ainsi, du côté de Saint-André-desBois, Amélie et Mélanie Hyunh ont

choisi de faire du château Malromé un lieu dédié à l’art contemporain. À partir de mi-juin 2022 jusqu’au 1er janvier 2023, elles exposent les créations de Laurent Pernot, L’Instant d’une vie, qui invite à méditer sur la fugacité du temps, en proposant des œuvres qui révèlent une poétique de l’impermanence. Au cœur de l’appellation Pessac-­ Léognan, l’art trouve également sa place dans le parc du château Larrivet Haut-Brion. À la demande des filles des propriétaires, « les demoiselles de Haut-Brion », l’artiste paysagiste Soline Portmann a imaginé des installations dans un esprit « land art bucolique » avec 720 piquets d’acacia teints en rouge qui rappellent les cycles végétatifs de la vigne. Le Château a également confié aux élèves de l’ECV, école de design à Bordeaux, la mission de faire de ses cuves ovoïdes, où sont élevés les vins blancs, de véritables chef-d’œuvres. Dans le Médoc, le château d’Arsac est devenu LA terre 063

d’accueil de sculptures monumentales. Depuis 1992, le domaine, qui acquiert tous les ans une œuvre signée d’un artiste contemporain majeur, est devenu au fil du temps le « Jardin des sculptures ». Cette année, trois étonnants lorgnons de couleur ont fait leur apparition à la lisière de ce vignoble de Margaux. Avec ces drôles de loupes jaune, rouge et bleue, les visiteurs découvrent « en un clin d’œil » le vignoble paré de couleurs, tel une invitation à poser un autre regard sur le paysage viticole. Châteaux Chasse-Spleen, à Moulis-­ en-Médoc, joue aussi la carte de l’art contemporain. Devant sa façade XVIIIe trônent deux gigantesques bottes de jardin, œuvre de Lilian Bourgeat ; accessoire indispensable au quotidien des faiseurs du vin. Grands collectionneurs, Céline et Jean-Pierre Foubet, les propriétaires, ont fait du jardin une magnifique galerie à ciel ouvert. Vincent Ganivet, Pierre Labat, Morgane Tschiember… à l’ombre des arbres centenaires, une dizaine de pièces monumentales de leur collection personnelle s’offre aux regards toute l’année. Enfin, en faisant l’acquisition du château Gressier Grand Poujeaux, le couple de passionnés a même fait d’une belle chartreuse du XVIIIe siècle un véritable centre d’art de 350 m2 tourné vers les artistes émergents.


L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération

Le retour du globe-trotter Comme beaucoup de jeunes de sa génération, Aymeric Combefreyroux a couru le monde. En version sac à dos, il s’est baladé sur tous les continents, dans des vignobles différents les uns des autres, où sa formation lui a servi de sésame. Mais, à l’approche de la trentaine, sans pression aucune, il est revenu sur les terres familiales. Et représente la cinquième génération sur le vignoble.

Texte Martine Crespin Photos Émilie Dubrul

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as question pour Aymeric, 27 ans, de mettre ses pieds dans les bottes de son père Thierry, encore jeune et actif sur la propriété ! De se contenter de reproduire, à l’identique, les gestes et démarches culturales ou commerciales de ceux qui l’ont précédé, dans ce terroir de l’Entredeux-Mers. Avec sa vingtaine d’hectares d’un seul tenant, autour de la demeure familiale, à Sauveterre-de-Guyenne, le château Garrineau se décline en plusieurs vins, blancs, rosés, rouges, et des crémants. À l’image de nombreux bordeaux et bordeaux supérieurs, la production a évolué du vrac à la bouteille, dans une démarche qualitative ambitieuse, impulsée par le père d’Aymeric, de retour de La Réunion où il s’était occupé d’un vignoble durant quinze ans. C’est là-bas que la fratrie de trois 064

garçons verra le jour. Aymeric est le plus jeune… et le seul intéressé par le travail de la vigne et de la vinification. D’où un parcours classique (bac techno, BTS vitivini) au lycée de Montagne à l’issue duquel il décide d’aller voir ailleurs comment on fait le vin !

Une passation en douceur Histoire de se prouver qu’il peut se débrouiller seul, le voici qui part courir les vignobles de NouvelleZélande, de Suisse, d’Australie. Entre chaque étape de ce périple, retour à la case maison, où il aide son père et se conforte dans son envie de s’investir davantage dans la propriété. Riche d’expériences aussi variées que formatrices, il mûrit sa décision : « Il m’a fallu deux ans pour me sentir prêt et aboutir à mon installation aux côtés de mon père, qui m’aide encore beaucoup. Et



À la vigne ou au cuvier, Aymeric imprime sa patte.

“Ils ont créé, début juin, un bar à vin joliment baptisé À bouchons tirés”

ne m’a jamais mis la pression pour forcer mon choix. » Mais il s’agit de trouver une nouvelle dynamique pour les vins de la gamme du château Garrineau, notamment afin de pouvoir faire vivre correctement une personne de plus sur les revenus générés. Augmenter la surface de production ? « Non, difficile, car cela nous obligerait à prendre du personnel. Pour l’instant, nous travaillons seuls, mon père et moi, tout en ayant recours à des prestataires pour certains travaux de la vigne. » Moderniser l’outil de production ? Oui, ce sera la construction d’un nouveau chai « plus simple à travailler… mais un gros investissement ! ». Si officiellement Aymeric réside encore chez ses parents, il reconnait que ce n’est pas une solution pérenne et qu’il s’échappe volontiers chez sa compagne. Ensemble, ils gambergent et imaginent un développement œnotouristique autre que celui qui se pratique dans les propriétés des alentours.

Dépoussiérer le métier Château Garrineau 1 Garrineau, 33540 Sauveterre-de-Guyenne 05 56 61 07 64

D’abord, il y a la vente directe de la douzaine de références produites sur les 20 ha. Une démarche labellisée Haute Qualité environnementale 066

pour cet ardent défenseur d’une nature au milieu de laquelle il vit et travaille. Puis la création, depuis début juin, d’un bar à vin, joliment baptisé À bouchons tirés, où les amateurs pourront déguster les vins au verre et les cocktails maison en grignotant les fromages, charcuteries ou minisandwichs également signés de la famille ! Simultanément à la création d’un circuit découverte, en autonomie, au milieu des vignes, guidé par des panneaux explicatifs concoctés par Aymeric… « Mes parents me laissent carte blanche pour développer cet aspect de notre travail et dépoussiérer le métier. En me confiant les rênes (même s’il est toujours associé), mon père m’a dit : prends la barre et bon vent ! » Et s’il s’occupe également des réseaux sociaux, des contacts avec les institutions ou les offices de tourisme, des distributions de flyers, le jeune homme n’oublie pas de se ménager un peu de temps. À son programme, du tennis à Blasimon, un poste de gardien de but dans l’équipe de foot de Podensac, de la rando dans les Pyrénées et des échappées belles sur le Bassin « quand j’ai envie de voir des vagues ». Et de préférer l’eau au vin !


Les coulisses de Lillet Texte Aline Chambras

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Photos Claire Lafargue

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L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération


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150 ans au compteur et des ventes à la croissance exponentielle : Lillet, l’apéritif 100 % girondin, n’a pas pris une ride. Vivre Bordeaux a eu le privilège de visiter sa distillerie, installée à Podensac depuis 1872 !

L L’entrée de la maison Lillet, à Podensac

ovée discrètement en plein centre de Podensac, sur la rive gauche de la Garonne, à moins de 30 minutes de Bordeaux, la maison Lillet aux couleurs rouge et bleu ne fait pas du tout son âge ! Et pourtant, c’est bien ici, il y a maintenant 150 ans que les frères Lillet, Paul et Raymond, liquoristes de métier, ont inventé le Lillet, un apéritif à base de vin blanc, parfois orthographié à l’époque avec un seul l comme on peut le

constater sur les anciennes affiches conservées sur le site. « Comme les gens prononçaient “lié”, à cause des deux l, les frères Lillet faisaient de la réclame pour le Lilet », précise Cécile Bernhard, la responsable du site de Podensac. Un détail somme toute, quand on sait aujourd’hui la postérité et la prospérité internationales de cet apéritif décliné aujourd’hui en version rouge (depuis 1692) et rosé (depuis 2011), dont tout un chacun sait désormais articuler le nom sans hésitation.

Ventes record et petite équipe Propriété du groupe Pernod-Ricard depuis 2008, la maison Lillet a connu ces dix dernières années une croissance record. Depuis 2013, la production de bouteilles a été multipliée par… dix ! Un essor fulgurant qui n’a en rien entamé l’esprit familial de la propriété de Podensac. Ici une petite équipe de douze salariés travaille dans une atmosphère sereine. « Le succès de Lillet, c’est un succès d’équipe », insiste Cécile Bernhard, la responsable du site depuis vingt ans. Une équipe répartie en trois pôles : le pôle « administratif, logistique et qualité » où officient entre autres Lisa et Marie ; le pôle « tourisme », avec Allison et Justine, les « hospitality makers » qui s’occupent du musée et de la boutique. Et bien sûr le « pôle production », avec Romain Saint068


Le nouveau chai de 800 m2 livré en 2021 héberge des foudres d’élevage

Cécile Bernhard, responsable du site de Podensac

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“Il y a le chai de vinage, le chai des infusions, le chai d’élevage et enfin l’assemblage” Martin, le chef de cave et ses trois « Lillet makers », Alex, Lucas et Boris. François Lalubie, employé polyvalent, complète le staff : « C’est notre couteau suisse, il sait tout faire. En ce moment, il est en train de construire un bar en bois pour un événement que nous organisons », indique Romain SaintMartin. Les présentations faites, il est temps de visiter les chais, en perpétuel agrandissement depuis quelques années. En effet, le tout nouveau chai de 800 m2 livré en 2021 ne permet déjà plus de répondre à la demande. Un deuxième bâtiment de stockage de 1 500 m2 est donc en cours de construction dans un immeuble mitoyen de la maison-mère. L’intérieur du bâtiment, en pin des Landes, est terminé. La dalle de béton vient tout juste d’être coulée. Il devrait être opérationnel d’ici septembre 2022. Imaginé par l’architecte de Saint-Macaire, David Blasquez, ce nouveau chai pourra accueillir à terme 50 tonneaux de 40 000 litres chacun. En attendant qu’il soit terminé, les tonneaux sont stockés dans l’entrée de l’ex-nouveau chai. Mais peu importe, le processus de fabrication de Lillet se fait toujours de la même manière : « Il y a le chai de vinage, le chai des infusions, le chai d’élevage et enfin l’assemblage », résume Romain SaintMartin.

Clause de confidentialité Dans le détail, cela donne une première étape qui consiste à réceptionner les vins (rouge, rosé et blanc) qui sont l’ingrédient de base du Lillet. « Bien sûr, on déguste toujours le vin livré pour vérifier qu’il

Romain Saint-Martin, le chef de cave

EN CHIFFRES 10 000 m2, c’est la superficie de la propriété Lillet à Podensac 12 employés 12 millions de bouteilles produites en 2021 (1 million en 2013, 5 millions en 2018, 9 millions en 2020) 34 % : taux de croissance de Lillet en 2021 La maison Lillet vend 70 % de Lillet blanc, 28 % de Lillet rosé et 2 % de Lillet rouge 95 % de la production est consommée à l’étranger

est conforme à nos attentes », précise Romain Saint-Martin. Seconde étape : « On mélange le vin avec les ingrédients préparés dans le chai des infusions. » Ce chai, classé « secret défense », n’est pas visitable. C’est là que s’élabore la recette qui a fait le succès du Lillet, c’est-à-dire un mélange de quinquina, importé du Pérou et d’Équateur, d’écorces d’oranges amères et d’autres 07 1

L’Allemagne est le pays où le Lillet est le plus vendu : 8 millions de bouteilles En 2021, 90 000 hectolitres de vin ont été achetés dans les exploitations viticoles du Sud-Ouest Le nouveau chai de 1 500 m2 accueillera à terme 50 tonneaux de 40 000 litres chacun


“Pour faire une bouteille de Lillet, il faut mélanger le contenu de plusieurs tonneaux”

Quinquina du Pérou, écorces d’oranges amères et autres ingrédients secrets composent la recette du Lillet.

ingrédients mystères. « En intégrant l’entreprise Lillet, nous signons tous une clause de confidentialité qui nous interdit de révéler la recette », explique Alex, l’un des cavistes. Une fois le vin et la recette secrète mélangés arrive l’étape dite du collage. « On opère d’abord un traitement à la bentonite végétale afin de neutraliser les protéines de cuivre du vin, puis on laisse le Lillet dans des cuves de dépose, ce qui permet d’isoler la partie claire des bourbes. Enfin, on passe tous les Lillet à des températures entre - 7 et - 4 degrés durant une nuit, pour stabiliser le tartre », explique, passionné, Romain Saint-Martin. Après le collage vient la phase primordiale de l’élevage. Dans des foudres, c’est-à-dire des tonneaux de 40 000 litres de contenance et de 5 cm d’épaisseurs, fabriqués par le tonnelier de Charente et leader de son secteur, Seguin Moreau, à partir de chênes français issus de forêts gérées par l’ONF, le Lillet s’élève 3 à 4 mois en moyenne. « Le but c’est l’oxydation maîtrisée et l’élargissement de la palette

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aromatique » indique Romain SaintMartin. Avec ses « Lillet makers », il vérifie quotidiennement que la maturation se passe bien. « Nous goûtons tout le temps pour vérifier que la palette aromatique soit bonne », insiste Alex. « Le Lillet est un alcool assez stable, qui ne dévie pas, nous avons de la chance », rajoute Romain Saint-Martin. Une fois l’élevage arrivé à son terme, les Lillet makers procèdent à l’assemblage. « Pour faire une bouteille de Lillet, il faut mélanger le contenu de plusieurs tonneaux », prévient Cécile Bernhard : « C’est une question d’équilibre, pour que le Lillet ait toujours le même goût. » Comme pour l’ingrédient mystère, impossible de connaître les règles de ce « panachage ».

Circuit court et démarche écoresponsable À toutes ces étapes, l’équipe de Lillet fait appel aux services du laboratoire d’analyses œnochimiques Jacoby-Sourdès de Podensac pour vérifier teneurs et autres données. « C’est comme ça depuis trente ans », note Cécile Bernhard. En parallèle, l’entreprise utilise le logiciel de pilotage technique et de traçabilité viti-vinicole bordelais Lavilog. Pour l’embouteillage, dont 10 % sont assurés sur le site de Podensac – le reste l’étant notamment dans l’usine Ricard de Lormont –, c’est une chaîne


LILLET D’EXCEPTION Outre les traditionnels Lillet blanc, rouge et rosé, Lillet produit deux cuvées spéciales : le Lillet Grande réserve (blanc) et la réserve Jean de Lillet (rouge). Vendu uniquement chez les cavistes ou à la boutique de Podensac, ces deux Lillet sont préparés respectivement à partir d’un vin blanc d’un château AOC de la région et d’une cuvée millésimée d’un vin rouge d’AOC. Ils sont élevés en barrique pendant un an.

Quotidiennement, les « Lillet makers » vérifient la maturation du produit.

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Lillet 8 cours du Maréchal Foch 33720 Podensac

mobile qui en a la responsabilité. « Ils viennent embouteiller une semaine par mois ici », explique Cécile Bernhard. C’est pour ça que des rouleaux d’étiquettes et de contreétiquettes, dans toutes les langues et différentes selon les législations en vigueur sur l’alcool, occupent un coin de chai. « Nous jouons depuis toujours la carte de la proximité en travaillant le plus possible avec des entreprises locales. Et depuis 2021, nous développons aussi une démarche écoresponsable », souligne Cécile Bernhard. En effet, en un an, la marque Lillet a opéré un virage puissant en matière d’engagement en faveur de l’environnement. Les étiquettes sont bio-sourcées et fabriquées en Gironde, le carton est non blanchi. Les nouvelles bouteilles allégées de 110 grammes de verre sont 074

IDÉE RECETTE C’est l’apéritif le moins sucré dans la catégorie apéritif à base de vin, soit 85 grammes de sucres dans un Lillet blanc, 65 dans un rouge (contre 165 dans un pineau, par exemple). Pour l’été, la version Lillet Tonic est un incontournable : pour cela, mélangez une dose de Lillet blanc (5 cl) avec deux doses de tonic, une tranche de concombre, une demi-fraise et une feuille de menthe.

fabriquées dans le Puy-de-Dôme. « Avant une bouteille de Lillet c’était 600 grammes de verre, aujourd’hui ce n’est plus que 490 grammes », se félicite Cécile Bernhard. L’équipe vient d’ailleurs d’apprendre que Lillet était finaliste au concours 2022 de l’éco-conception Adelphe. Une réussite de plus !


Green ×

“Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements.” Charles Darwin

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Photos © DR

Chiner sans se ruiner

La Recyclerie a lancé en mai un appel à vide-maison pour l’été et propose dans ce cadre un service de retrait à domicile. Les manutentionnaires se déplacent sur Bordeaux métropole, de préférence après envoi de photos à : recycleriehdg@orange.fr

SECONDE MAIN. Ouverte depuis janvier 2022, la Recyclerie des Hauts de Garonne, portée par l’ARQC (Ateliers de réemploi et de qualification de Cenon), se donne trois objectifs : réduire les déchets, freiner le gaspillage et favoriser la réinsertion professionnelle. Dans un bâtiment de 550 m2, situé au Haut-Cenon, on trouve du mobilier, des appareils électroménagers, de la vaisselle, de la déco, des vêtements (homme, femme et enfants), des livres, des jeux, des disques, bref, tous les types de produits, toujours de seconde main, mais en bon état et vendus à des prix bradés allant de 20 centimes à 200 euros. La structure labellisée chantier d’insertion a recruté 14 personnes en contrat d’insertion (vente, manutention, administration) coordonnées par deux encadrants. Sur place, le lieu est pourvu d’une zone de déchargement où les particuliers peuvent déposer leurs produits. Attention, seuls les objets en bon état (ou ne nécessitant qu’une légère remise en beauté) sont acceptés. AC 076


Echoppe, français et écologique ZÉRO DÉCHET. C’est à St-Jean-d’Illac que Cyprien Bruel et son équipe fabriquent à la main des produits ménagers solides 100 % d’origine naturelle et biodégradables. Leur savon détachant et leur lessive sont d’une grande efficacité tout en respectant l’environnement, la peau et le portemonnaie ! MLS © DR

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KIDS. Quiconque a déjà géré une garde-robe de bébé connaît la vitesse à laquelle ses vêtements deviennent trop petits. Gabrielle Hurtelle, jeune maman dans l’air du temps, a créé Lili+Jude pour rendre la mode éthique accessible aux jeunes parents sans compromis de style. Grâce à un service d’abonnement flexible, elle permet aux familles de louer les vêtements de leur bébé en toute sérénité. À la croisée de la mode éthique, de l’économie circulaire et de la lutte anti-gaspi, son concept donne ainsi accès à de belles marques engagées en faveur de l’environnement. Des matières naturelles, biologiques ou recyclées, certifiées saines pour la peau fragile des bébés. MLS

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Louer plutôt qu’acheter


Rose ou Lilas, joliment végétal Une nouvelle boutique de fleurs se cache désormais à l’angle des rues Porte de la Monnaie et Camille Sauvageau, à quelques pas seulement de la célèbre Tupina. Derrière ce joli projet se cache Virginie Lalanne, fleuriste depuis vingt-deux ans. Cette passionnée de végétaux nous accueille dans sa boutique qui se veut naturelle et sans chichi.

Photos © Émilie Dubrul

Comment est née votre passion pour le métier de fleuriste ? Mon parcours est assez atypique car je n’ai pas commencé par faire des études dans ce domaine. C’est en acceptant un job dans une boutique de fleurs pendant la Saint-Valentin que j’ai été prise de passion pour le métier. On peut dire que j’ai eu un véritable coup de cœur pour les fleurs !

exemple retrouver des renoncules, des giroflées et des œillets. J’essaye au maximum de faire du local en m’approvisionnant au MIN mais aussi à Cadaujac, deux à trois fois par semaine.

Comment pouvez-vous expliquer cette alchimie que vous avez avec les végétaux ? En grandissant à la campagne, on ne peut qu’aimer la nature. C’est d’ailleurs pour ça que je ne cherche pas à transformer les fleurs, je préfère largement la beauté brute du végétal ! Comment avez-vous décoré votre boutique ? J’ai vraiment voulu garder l’esprit du quartier en chinant tous mes meubles. J’adore les objets qui ont du vécu, ça me permet d’imaginer l’histoire qu’ils ont traversée !

Comment sélectionnez-vous vos fleurs ? Je fais très attention à la provenance de mes produits en m’orientant essentiellement vers des fleurs fraîches de saison. Pendant l’été on pourra par 078

Comprenez-vous cet engouement pour les fleurs séchées ? J’approuve complètement la mouvance écolo, le fait de sécher ses fleurs permet de les garder indéfiniment. Par contre, quand les fleurs sont stabilisées et colorées, ce n’est plus du tout écologique ! Quelle est votre fleur préférée ? Pour moi, celle qui tient le mieux en plus de sentir très bon, c’est le lys oriental ! J’aime aussi beaucoup la fleur du camélia. MCH


ALTERNATIVE. Néoprène, résine polyester, wax en paraffine, la pratique du surf n’est pas sans conséquence sur le milieu aquatique. Créée en 2017 par Nicolas, Thomas et Basil, Nomad Surfing est une marque de produits de surf et lifestyle contribuant à la protection des océans. Hébergée par l’Arche éco-système (voir article page 82), l’entreprise bordelaise conçoit ses produits selon les principes de l’économie circulaire en utilisant des matériaux recyclés, recyclables ou bio-sourcés en France. La planche de surf, par exemple, élément indispensable à tout pratiquant, est réalisée à partir d’un pain de mousse bio-sourcée à 40 % ou partiellement recyclée. Idem pour la résine époxy qui la recouvre. « Sur certains modèles, nous remplaçons la latte centrale par de la fibre naturelle de lin et de basalte. » Ces planches sont stratifiées sous vide afin d’éviter les résidus de résine, quand les pads (l’élément collé à l’arrière de la planche de surf) sont fabriqués à partir de bouchons de vin par la société Aglolux dans les Landes. Le trinôme travaille également à la conception d’un leash (ligne de vie des surfeurs) à partir d’anciennes ceintures de sécurité et de combinaisons de surf recyclées. Distribués sur leur site et dans une quarantaine de surf shops en France et à l’étranger, ces équipements permettent aux amateurs de glisse de s’équiper sans culpabiliser, d’autant que 5 % du chiffre d’affaires de Nomad Surfing sont reversés à des associations de protection de l’océan. ED www.nomads-surfing.com

Photos © DR

Surfeurs ingénieux et éco-responsables


Le miel urbain de l’Essaim de la Reine

En 2018, Romain et Joanna Stiers fondent ensemble l’Essaim de la Reine, une marque de miels monofloraux dont certains sont issus de ruches urbaines. Rencontre.

Texte Aline Chambras Photos Nicolas Duffaure (sauf mention)

J

oanna Stiers parle du miel avec la passion d’une œnologue. Évoque ses palettes aromatiques, bergamote, agrume. Avoue en mettre partout, sur les bobos de ses enfants, dans ses cheveux roux le temps d’un masque réparateur, dans son mojito, ses vinaigrettes, pour faire cuire les magrets de canard. On sent la passion et l’amour. C’est d’ailleurs grâce à ces deux moteurs – puissants – que l’Essaim de la Reine a vu le jour en 2018. À l’époque, Joanna, originaire d’Orléans, et son mari Romain, du Gers, vivent à Bordeaux. Elle est directrice commerciale, lui cadre dans les énergies renouvelables. Mais le miel n’est pas loin. Il faut dire que Romain est fils d’apiculteur et que le miel pour lui est une affaire de famille, d’enfance et de transmission. Aussi quand son

père part à la retraite, le déclic est rapide : il rachète une partie des ruches paternelles et endosse l’habit d’apiculteur. Joanna le suit et opère elle aussi sa reconversion. C’est elle qui prend la tête de la partie « communication et commerce » de leur toute nouvelle entreprise, baptisée l’Essaim de la Reine.

Miels de cru et transhumance Pour le jeune couple, pas question de laisser leur miel partir dans les méandres des géants de la distribution. « Nous avons tout de suite fait le choix de commercialiser nous-mêmes notre miel et de ne produire que des miels monofloraux, insiste Joanna. On ne mélangerait pas un vin de Bourgogne avec un vin de Bordeaux, n’est-ce pas ? Alors pour le miel, c’est pareil ! », poursuitt-elle. Aujourd’hui, l’Essaim de la Reine commercialise sept miels 080

« de cru » : miel de tilleul, d’acacia, de bourdaine, de châtaignier, de tournesol, de bruyère, et leur dernier-né, le miel de callune, dont la particularité est d’avoir l’aspect d’une gelée. Leur miel de tilleul vient de ruches bordelaises, celles de Darwin et d’autres zones de la métropole. « C’est notre miel urbain, dont nous sommes très fiers, car nous avons toujours eu à cœur de créer des ponts entre villes et campagnes, d’autant qu’aujourd’hui la pratique des monocultures dans les campagnes n’est pas une bonne chose pour nos abeilles, alors qu’en ville, il y a des jardins et donc des fleurs ! », souligne Joanna. En effet, si leur miel est monofloral, le couple ne laisse jamais ses abeilles butiner toute l’année au même endroit : Romain pratique donc la transhumance, c’est-à-dire qu’il balade ses ruches dans toute la Nouvelle Aquitaine afin d’offrir à son



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ATTENTION ABEILLES EN DANGER Depuis dix ans, l’initiative Un toit pour les abeilles se mobilise pour sauver les populations d’abeilles en proposant aux entreprises ou aux particuliers de parrainer des abeilles chez les apiculteurs, via un soutien financier modeste. Parallèlement, des apiculteurs d’Un toit pour les abeilles ont entrepris de travailler main dans la main avec des agriculteurs voisins afin d’assurer des espaces de pollinisation pour leurs abeilles (sur des plantations bio), ce qui permet également d’augmenter le rendement des agriculteurs grâce à la présence de ces pollinisateurs. untoitpourlesabeilles.fr

“En septembre, on les emmène dans le Sauternais pour les acacias ou en Dordogne pour les châtaigniers” cheptel une nourriture diversifiée. « Les abeilles sont comme nous », note Joanna, « vous ne donneriez pas à manger que des pommes de terre à vos enfants pendant trois mois consécutifs ! » Romain déplace ainsi ses ruches en moyenne toutes les trois semaines, de nuit, « pendant que les abeilles dorment ». « En septembre, par exemple, on les emmène loin des milieux urbains où la pression des frelons asiatiques est forte, dans le Sauternais parce qu’il y a beaucoup d’acacias ou en Dordogne pour les châtaigniers », précise Joanna.

500 ruches Aujourd’hui, le couple possède 500 ruches et installe sa miellerie et ses bureaux à Auros sur le territoire 0 82

de la ferme-abbaye Sainte-Marie du Rivet, près de Langon. Leur miel est distribué dans toute la France, principalement dans des épiceries fines, des magasins spécialisés, chez des primeurs ou des coopératives de producteurs. Ils travaillent également avec de nombreux établissements comme le Saint-James, Ganache ou le Grand Hôtel à Bordeaux ou encore l’épicerie Mam et le restaurant la Seine à Paris. Ils vendent aussi du « pollen frais » exclusivement aux restaurateurs. En 2021, ils ont produit un peu plus de 10 tonnes de miel et investissent dans leur miellerie pour monter encore en qualité. La lune de miel a de beaux jours devant elle !


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L’Arche, le nouvel écosystème bordelais

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Fondateurs de la start-up BicyCompost, deux trentenaires réhabilitent une ancienne usine de peinture en un tiers-lieu dédié à l’émergence d’entreprises vertes et innovantes. Bienvenue à l’Arche, l’écosystème de demain.

Texte & Photos Émilie Dubrul (Sauf mentions)

À

Bordeaux, l’écosystème Darwin fait des petits. On ne peut que s’en réjouir ! Vestige de l’ère industrielle bordelaise et située dans le nord de la rive gauche, la zone d’activités Achard attire une nouvelle population, jeune et engagée, bien décidée à faire de cet ancien territoire ouvrier la nouvelle scène de l’économie sociale et solidaire. Et avec comme voisins bienveillants les Vivres de l’Art ou le Garage moderne.

Renaissance durable C’est soir de fête en ce premier jeudi de printemps à l’Arche écosystème. Une bonne centaine de personnes a répondu à l’invitation des locataires de ce nouveau tiers-lieu écologique, comptant bien profiter du premier « after-work » de l’année. Food truck, bières locales et musique… à l’Arche, on mise sur le réemploi et la remise en état des équipements d’origine : ici une vieille trémie a été transformée en brasero. Là des barils en métal servent de mange-debout, quand un hangar abrite la scène de concert. « Lorsque nous recherchions un terrain pour implanter notre activité, nous avons découvert cette friche en plein milieu de la zone », raconte Térence, le cofondateur de la start-up BicyCompost. « Les propriétaires des 7 hectares de la zone Achard, la famille Bret-Gaubaste, n’ont pas hésité à nous mettre à disposition gratuitement les 4 000 m2 de l’ancienne usine de peinture, pour éviter que le lieu ne soit squatté. Et pour lui donner une deuxième vie. »

En contrepartie, une opération de grand nettoyage à la charge des nouveaux usagers : exit les épaves de voitures, barils de peintures et autres couches de sable qui recouvrent le sol bétonné… Quelques mois après leur installation, l’endroit, irrigué d’une belle énergie, revit.

Économie mutualisée À ce jour, six structures profitent des 1 000 m2 « nettoyés » du site ; soit une vingtaine de personnes : la start-up 085

“Le compost est redistribué gratuitement par l’association Servir en local aux différents maraîchers de la région”


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“Nous proposons ainsi d’implanter des bacs à légumes clés en main dans les entreprises, les collectivités, les écoles et les Ehpad de la Métropole” BicyCompost donc, mais aussi les Nouveaux Potagers, l’association Servir en local, l’agence Ako qui accompagne les entreprises et les collectivités dans la gestion des déchets, Nomad Surfing et, depuis peu, une antenne de l’agence de communication Break out du Tarn qui vient ajouter une brique « utile » à ce nouvel incubateur. « Le lieu était trop grand pour BicyCompost et le

partage fait partie de nos valeurs, raconte Térence. Nous avons donc invité d’autres acteurs de l’économie sociale et solidaire à nous rejoindre. Des acteurs qui s’inscrivent dans la préservation des ressources naturelles et la promotion des principes de l’économie circulaire. L’idée est de partager aussi bien les bureaux, les hangars que nos réseaux. Quand tout le monde est là, c’est vivant. » À l’entrée, l’entreprise les Nouveaux Potagers a investi les quelques mètres carrés de terrasse pour installer des bacs potagers remplis de « légumes faciles à entretenir et surtout bons à manger ». Un showroom à ciel ouvert. « Nous travaillons sur la valorisation de l’agriculture en ville, détaille Olivier Mignon, le fondateur. Nous proposons ainsi d’implanter des bacs à légumes clés en main dans les entreprises, les collectivités, les écoles 086

et les Ehpad de la Métropole. Une façon de végétaliser certains lieux, de favoriser la biodiversité locale mais aussi d’aider les personnes les plus précaires en leur livrant des fruits et légumes de saison, produits localement. » Le but de l’entreprise étant qu’au final, au moins 50 % de la production soit livrée à la Banque alimentaire de Gironde. À l’Arche, les Nouveaux Potagers profitent également d’un hangar pour fabriquer et stocker leur matériel. « Un privilège à Bordeaux. » Ils bénéficient des services de BicyCompost, en récupérant le compost issu de leurs collectes en centre-ville. En échange de quoi ces derniers utilisent la camionnette des Nouveaux Potagers pour tester leur réseau de collecte hors de Bordeaux. « Nous avions à cœur de créer une chaîne hyper circulaire, poursuit Térence. Le compost


L’Arche éco-système propose un espace de bureaux partagés de 100 m2 et héberge une communauté d’entrepreneurs engagés.

est fabriqué par le groupe Péna Environnement, basé à Saint-Jeand’Illac. Ils nous le livrent ici avant d’être redistribué gratuitement par l’association Servir en local aux différents maraîchers de la région. Et Servir en local fait le lien entre les maraîchers et les restaurateurs. »

Malgré la déco joliment désuète et les huisseries hors d’âge, tout le monde semble ravi de partager les 100 m2 de coworking situé à quelques stations en tram du centreville. Alice, salariée de l’association Servir en local, peaufine justement sa mercuriale de la semaine : « Je suis en train de mettre à jour la liste des produits disponibles à destination des restaurateurs. » L’association travaille entre autres sur la question du circuit court pour les professionnels de la restauration, en leur mettant à disposition des légumes de saison cultivés par des maraîchers installés dans un rayon de 50 km autour de Bordeaux. « Nous sommes un peu les

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Boucle vertueuse


À Saint-Jean-d’Illac, Philippe Lacou est l’un des maraîchers partenaires de Servir en local

Chaque année en France, ce sont plus de 10 millions de tonnes de déchets alimentaires qui sont transportés en camion pour finir soit incinérés, soit enfouis. « Une absurdité » pour Térence et Pacôme, les deux fondateurs de la start-up BicyCompost. Officiellement créée en février 2021, BicyCompost est un service de collecte à destination des restaurateurs de Bordeaux. « La gestion des déchets alimentaires est une grosse problématique pour les restaurants » explique Térence. « Les aliments fermentent, dégagent des odeurs et peuvent attirer les nuisibles. D’ici 2024, selon la loi AGEC, tous les membres de l’Union européenne devront proposer des solutions pour valoriser leur biodéchets. Nous avons pris de l’avance en leur proposant une solution écologique. » Comment ça marche ? BicyCompost fournit le restaurant en seaux de 22 litres 100 % étanches et empilables. Une à deux fois par semaine selon la taille de l’établissement, les seaux sont collectés à vélo avec remorque électrique puis emmenés au hub de la zone Achard. Là, ils sont vidés dans une benne (qui sera collectée par le prestataire, Péna Environnement), lavés, dégraissés, désinfectés sur place avant de reprendre le chemin des restaurants. Les fondateurs de BicyCompost, fiers de comptabiliser 103 points de collecte depuis leurs débuts, sauvent ainsi 4 tonnes de biodéchets chaque semaine. « Pour être rentables, il faudrait maintenant qu’on atteigne les 160 points de collecte. » L’appel est lancé.

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VOUS AVEZ DIT BIODÉCHETS ?

“On ne travaille qu’avec des producteurs qui sont en bio ou en raisonné, sur des micro-fermes” VRP des petits producteurs », s’amuse Fred, le président bénévole venu prêter main forte ce jour-là. « On ne travaille qu’avec des producteurs qui sont en bio ou en raisonné, sur des micro-fermes, poursuit Alice. C’est ce qui nous permet d’avoir des légumes haut de gamme. Il y a Philippe à SaintJean-d’Illac, Cécile au Haillan, Alain à Marsas, Benjamin à SaintAndré ou encore Rachel à Floirac. Je me balade dans leurs champs, ils me font goûter, nous sommes garants de cette qualité. » Une fois que le restaurateur a passé sa commande, Alice envoie la liste des produits aux maraîchers qui ramassent en 088

quantité nécessaire, évitant ainsi les pertes et assurant des produits ultra frais. Le restaurant est livré moins de 24 heures après, toujours par ses soins. « Nous sommes une mini-centrale d’achat version durable, en quelque sorte. » Le Prince noir, Symbiose, Hortus, Chiochio… une quinzaine de restaurateurs bordelais leur font confiance et font appel en parallèle à BicyCompost pour la collecte de leurs déchets alimentaires. « Le compost, nous le donnons. C’est notre participation à l’agriculture locale », résume Térence. La boucle est bouclée !



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Les joyeux dessins d’Arnaud Faugas


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Depuis plus de trente ans, le Bordelais Arnaud Faugas croque à l’aquarelle et à l’encre de Chine des saynètes fantaisistes et légères. Rencontre.

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Texte Aline Chambras Photo Nicolas Duffaure

dans les années 80 n’était pas aimée, c’était une ville sombre, noire. Mais quand je suis revenu au début des années 90, Bordeaux était en pleine transformation, on nettoyait les façades, le tram débarquait, on virait les voitures, les Bordelais se réappropriaient leur ville, bref, la belle endormie se réveillait et c’est ça que j’ai eu envie de dessiner. » Avec des pastilles de couleur et de l’encre de Chine, il commence donc par peindre un Bordeaux joyeux, et s’inscrit d’emblée dans la grande tradition anglo-saxonne de l’illustration en disposant sur le papier touches de couleur et multiples détails, qui toujours racontent des histoires, avec poésie. Ses premières œuvres plaisent et un an à peine après s’être lancé dans l’illustration, une amie, Muriel Cultot, lui propose de présenter 40 tableaux à la Cité mondiale de Bordeaux. C’est sa première exposition, en 1993. « J’ai tout vendu ! », se souvient-il.

Le dessin le plus tragique que j’ai jamais fait est celui d’une petite fille qui vient de faire tomber son cornet de glace. » Arnaud Faugas ne s’en cache pas, et même le revendique : il a le dessin joyeux. Dans son atelier installé sous les toits de son appartement bordelais, « où jamais un aspirateur n’est venu », comme il aime à plaisanter, règne d’ailleurs un plaisant bazar. Au centre, une table à dessin, entourée de pots remplis de pinceaux, de crayons, des aquarelles, des gommes, un taille crayon, une plume et bien sûr du papier, de 300 grammes. L’illustrateur présente une de ses dernières créations accrochée à un mur : une toile grand format, une première pour lui. Avec Bordeaux, son thème de prédilection depuis toujours, pour sujet. Comme à son habitude, il peint sa ville natale comme si elle était un petit théâtre, une comédie, où les personnages dansent et virevoltent, heureux, où le tram peut porter un chapeau haut-de-forme et les ponts traverser les nuages. Il y a dans tout ça un petit côté jazz, Années folles et atemporel, qui depuis maintenant trente ans a fait le style et le succès d’Arnaud Faugas.

Des projets plein la tête Très vite, Arnaud Faugas se met à croquer toute la Nouvelle Aquitaine (le bassin d’Arcachon, le vin et la vigne), mais aussi des textes littéraires, et notamment Les Fables de La Fontaine. Les projets comme les commandes se multiplient : étiquettes de bouteille, livres pour les éditions Mollat, faire-part, portrait, dessins pour enfants, etc. Pourtant, il n’en vit pas encore. Pendant près de quinze ans, il travaille en parallèle pour les éditions bordelaises Horizons chimériques. C’est à 44 ans qu’il franchit le cap : comme dorénavant dessiner lui permet de payer son loyer, il devient illustrateur à temps complet. « Ça fait dix-huit ans maintenant que c’est mon métier. Je travaille comme un employé de bureau. À horaires fixes. Je commence toujours par élaborer un brouillon. Ça me permet de trouver la composition. Ensuite je rajoute mes petites idées. Et je m’autorise quelques échappées de temps en temps, comme dessiner en fermant les yeux, ou dessiner tout en noir, ou les dessins de fin de journée que je couche sur des petits bouts de papier, et qui représentent presque exclusivement des femmes. » À 62 ans, il ne compte pas reposer de sitôt les pinceaux. En juin dernier, une exposition lui a été consacrée à la maison Louis David à Andernos. Il a commencé à esquisser l’illustration de L’Homme et la Couleuvre de La Fontaine : une commande qui le ravit, lui le passionné de fables. Il a aussi ses grands formats sur Bordeaux à terminer. Et des dizaines d’autres envies en tête.

Illustrations libres Autodidacte, Arnaud Faugas découvre le dessin sur le tard. « Après mon bac, à Bordeaux, j’ai suivi un temps des études de droit, mais je n’ai rien compris, alors je suis parti vivre au Royaume-Uni puis aux États-Unis. » Outre-Atlantique, il s’installe sur l’île de Martha’s Vineyard au large de Boston, et ouvre un restaurant avec un ami. « Je m’occupais du vin. Nous avons tenu trois saisons, se rappelle-t-il, c’était de belles années. » Mais finalement, il décide de rentrer à Bordeaux. Il a 25 ans et « pas un sou en poche ». C’est là que, quelques années plus tard, à l’aube de la trentaine, le déclic se fait. « Je vivais de nouveau chez mes parents, et je m’ennuyais plutôt beaucoup. Un jour, je suis entré dans un magasin, j’ai acheté de quoi dessiner et j’ai adoré ça. » Les idées comme la forme s’imposent très vite. « Aux États-Unis, j’avais été très marqué par ce rapport anglo-saxon à l’illustration, par cette manière qu’ils ont de sur-interpréter, de dessiner ce qui n’existe pas dans la vraie vie, d’extrapoler une situation, sans verser dans la caricature, comme je l’ai découvert en lisant le New Yorker, notamment. » C’est donc ce modèle qu’il suit d’emblée. De même, Arnaud Faugas avait été frappé par la façon dont les Américains étaient fiers de leur ville, qu’ils soient New-Yorkais, Bostoniens ou autres. « En tant que Bordelais, ça m’avait étonné, car Bordeaux

www.faugas.net

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Dessins issus de la série Life in the City.

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10 HÉBERGEMENTS INSOLITES À 1 HEURE DE BORDEAUX

Éco-lodges du lac des Graves & Sauternais

© David Dalidec - Projet Carrelet

Roulotte, cabane, bulle… vous rêvez de vivre une expérience inoubliable sans aller à l’autre bout du monde ? Bordeaux et ses environs recèlent d’hébergements touristiques aussi insolites que qualitatifs. Sélection.


Le zoo de Bordeaux-Pessac UN SAFARI À PESSAC Le zoo de Bordeaux-Pessac propose de passer la nuit dans l’un de leurs deux lodges situés au cœur des enclos des tigres et des jaguars. Récemment construites, ces habitations invitent petits et grands à partager une expérience unique dans un cadre raffiné. D’une surface de 70 m², chaque lodge accueille jusqu’à six personnes et a été conçu avec des matériaux et du mobilier haut de gamme. La décoration est soignée et la qualité des services irréprochable : visite du zoo, bain nordique chauffé à 37 °C, expérience gastronomique via un chef à domicile, gâteau d’anniversaire… Et après une nuit en tête-à-tête avec les grands fauves et un petit-déjeuner gourmand, vivez un moment rare et privilégié avec leurs soigneurs animaliers. MLS

Photos © DR

× night-experience.com

Parcel Tiny House

Photos © DR

SLOW LIFE À ST-ÉMILION C’est à Saint-Émilion, en plein cœur des vignes, que Parcel a choisi de poser sa première tiny house. Le but, dormir en pleine nature et découvrir le meilleur des producteurs locaux comme Véronique et Pascal, viticulteurs passionnés qui sont ravis de faire visiter leurs chais et partager une dégustation de vin bio de leur domaine. Dans cette micromaison, tout est pensé pour accueillir deux personnes confortablement. Conçue pour respecter l’environnement, elle est 100 % autonome et responsable. Ici, pas de voisin, pas de wifi, ni de TV, l’essentiel est de profiter de cette parenthèse pour déconnecter. Perdus au milieu des vignes, dormez dans un hébergement respectueux de la nature et participez à un tourisme écoresponsable. MLS × parceltinyhouse.com 099


SÉLEC TI ON

Le château Malromé LA VIE DE CHÂTEAU À 40 minutes de Bordeaux, le château Malromé vous attend pour un séjour romantique. Dans un premier temps réservées aux propriétaires ou aux participants des retraites de yoga, ses cinq chambres d’hôtes sont désormais ouvertes à tous. Misia, Suzanne, Louise… chacune porte le nom de l’une des muses d’Henri de ToulouseLautrec. Spacieuses et très confortables, elles ont été pensées pour être reposantes. La décoration raffinée de la décoratrice Jennifer Brun fait la part belle aux teintes naturelles, dans des camaïeux de blanc, de vert ou rose poudré. De grands rideaux de lin viennent habiller les portes-fenêtres qui, ouvertes, invitent à la contemplation de la nature environnante. Après une dégustation des vins du domaine, un repas gourmand à la table de Sébastien Piniello ou une séance de massage, impossible de ne pas se sentir vacancier privilégié d’une très belle maison de famille. ED

Photos © DR

× Réservations sur intendance@malrome.com

Les roulottes Vesta

© Julien Fernandez

NOMADISME Au cœur des vignobles de Pessac-Léognan, laissezvous tenter par une nuit dans une authentique roulotte tzigane. Entièrement construites à la main, toutes de bois aménagées, les deux roulottes de Véronique Tonon offrent un cadre romantique et bohème incomparable. Elles sont situées dans un environnement calme, verdoyant, arboré et sans wifi ! Avec le petit-déjeuner (copieux et gourmand) en option, vous êtes assurés d’un séjour 100 % détente, déconnexion et sérénité. À noter, le lac Bleu de Léognan n’est qu’à 10 minutes à pied. AC × roulottes-vesta.fr 100


Les foudres du château Bonhoste

Photos © Eric Bouloumie

NUIT ROMANTIQUE Au milieu des vignes du domaine du château Bonhoste à Saint-Jean-de-Blaignac (à 10 kilomètres de Saint-Émilion), deux foudres vous attendent pour un séjour insolite. Pour les non-initiés, le foudre est un tonneau (très grand) qui sert habituellement à l’élevage et à la vinification des vins. Les deux foudres du château Bonhoste ont été conçus par l’expert charentais et leader mondial en tonnellerie, Seguin Moreau, et entièrement aménagés et équipés pour vous assurer des nuits calmes et confortables. Wifi, petit-déjeuner, visite guidée du domaine, dégustations des vins, et possibilité de panier pique-nique, la prestation assurée est complète et de qualité ! AC × coup2foudres.com

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SÉLEC TI ON

Éco-lodges du lac des Graves & Sauternais

Photos © David Dalidec - Projet Carrelet

LES PIEDS DANS L’EAU La Conque, le Mascaret, la Pibale, la Paloumayre, la Gabare, la Mayade ou encore l’Estey… Situés aux abords du lac du Golf de Graves et du Sauternais à Saint-Pardon-de-Conques, neuf éco-lodges haut de gamme ont été construits dans un esprit de développement durable. Imaginés par le designer et enfant du pays David Dalidec, ils sont agrémentés de hamacs géants conçus par l’entreprise bordelaise LoftNets. Ancrés dans un environnement privilégié, ces éco-lodges s’inspirent des fameux carrelets (les cabanes de pêcheurs sur les bords de la Garonne) et se fondent dans le paysage. Entre amis, en famille, entre golfeurs ou golfeuses, sur la route des vins de Bordeaux, pour une ou plusieurs nuits, ils sont une invitation à la détente et à la sérénité. ED × golf-des-graves.com

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Le domaine EcÔtelia BULLER DANS LA NATURE Le domaine EcÔtelia vous invite à passer un séjour atypique à moins d’une heure de Bordeaux. Leur concept, vous faire voyager aux quatre coins du monde à travers leurs différents types d’hébergements insolites. C’est en référence à la réserve naturelle de Fandjingshan située dans les monts Wulling en Chine que le domaine accueille ses invités dans cette bulle transparente. Aux abords de la forêt, en famille ou entre amis, vivez une nuit hors du commun, en dormant à la belle étoile tout en profitant d’un nid douillet. D’une surface de 28 m² et équipée de tout le confort moderne, cette bulle écologique peut héberger jusqu’à quatre personnes. Vivre une expérience au plus près de la nature pour donner envie de la protéger, c’est toute la mission que s’est fixée le domaine EcÔtelia. MLS

Photos © DR

× domaine-ecotelia.com

Center Parcs Domaine des Landes de Gascogne

Photos © DR

SOUS LES PINS DES LANDES Situé dans le Lot-et-Garonne, aux portes des Landes et du Sud-Gironde, le dernier-né des domaines Center Parcs, « Les Landes de Gascogne », est le tout premier du genre dans nos contrées. En couple, en famille ou entre amis, pour un court ou long séjour, ce nouveau village de vacances propose notamment un concept original : sensibiliser et éveiller petits et grands à la nature et son respect à travers la découverte de la permaculture dans les jardins et potagers du parc, une ferme pédagogique et des ateliers en lien avec la saisonnalité et les richesses locales. Un parti pris fort et original qui se déploie aussi bien dans l’offre de restauration que dans la superbe pinède typiquement landaise. Un soin particulier a également été apportée à l’architecture des bâtiments à dominante bois. Pour se mettre au vert et renouer avec mère Nature, il n’y a pas mieux. ED × centerparcs.fr/fr-fr/france/fp_LG_vacancesdomaine-les-landes-de-gascogne 103


SÉLEC TI ON

Les grottes de Matata CAVITÉS NATURELLES S’endormir en sachant que les eaux de la Gironde lèchent les pieds de la falaise, 20 mètres plus bas ? C’est possible dans l’une des six chambres de l’hôtel des Grottes de Matata. Dans cet établissement atypique construit au-dessus de grottes troglodytiques, toutes les chambres sont littéralement accrochées à la falaise et offrent une vue surplombant l’estuaire. Après une nuit à flanc de falaise, vous pourrez également visiter l’écomusée créé par le propriétaire. L’occasion de découvrir l’histoire de ces grottes qui, après avoir hébergé naufrageurs ou classes populaires, ont été prisées par une population plus huppée, venue prendre ses quartiers d’été sur le littoral, comme Marie Laforêt ou Samy Frey. AC

© JJ Gelbart

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× grottesdematata.com

Péniche Tango

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TRÈS EN VOGUE Amarrée ponton Yves Carlier, au pied du pont de Pierre, la péniche-hôtel Tango est une authentique péniche française de commerce construite à Nancy en 1931, entièrement aménagée comme hôtel de luxe sur l’eau depuis la fin des années 90. Elle dispose de trois cabines pouvant accueillir jusqu’à six personnes ; d’un salon, d’une terrasse couverte et d’une terrasse ouverte (pour se restaurer au frais ou au soleil couchant, selon ses envies) et d’un jacuzzi ! La péniche Tango et son atmosphère unique de paquebot version intimiste et vintage propose des séjours d’une nuit avec vue sur la rive gauche ou des croisières de six jours en pension complète entre Médoc et Entredeux-Mers, Garonne et Dordogne. AC × hoteltango.fr 104


Mode ×

“La mode, c’est ce qui se démode.” Jean Cocteau (1923)

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Bocage x 64 une collaboration entre 15 € et 110 €, à retrouver sur bocage.fr et 64.eu/fr

Surf et chill avec Bocage x 64 BIEN CHAUSSÉ. L’une est originaire de Vendée, l’autre de Guéthary. Alors quand la marque de maroquinerie Bocage rencontre la superstar du Pays basque 64, cela fait forcément des vagues ! Pour l’été 2022, ces deux griffes ont imaginé à quatre mains une collaboration à leur image. « Le “mariage” de nos deux marques a été tout de suite une évidence, précise Bocage. Nous partageons une vision, des valeurs et un territoire si proche : le couple, le local, le goût des belles choses, la durabilité, la créativité. » Des passions communes, sublimées par leurs identités complémentaires. « 64 nous a apporté cette nouvelle idée du cool à travers “la côte basque attitude”, et nous, notre touche Bocage, en injectant davantage de féminité à leur univers ! » Au programme, les indispensables de l’été revisités : des sandales à boucles colorées, des sneakers au look graphique, des paires de chaussettes ou encore des t-shirts homme et femme achèvent ce vestiaire mixte, fabriqué en Europe, s’il vous plaît. Une collaboration comme une invitation au voyage : entre le drap de bain marine qui donne envie d’enfiler fissa sa combi, et le logo représentant un van avec sa planche de surf, impossible de résister à l’appel d’un bon line-up… PG 106


À la bonne heure !

Vous proposez des montres au design minimaliste. Où puisezvous votre inspiration et comment vos nouvelles collections sontelles imaginées ? Les montres Mona sont inspirées de l’horlogerie des années 1940-1960. Dès notre première collection, « Heritage », nous avons voulu véhiculer les valeurs qui nous sont chères comme la tradition et la transmission en proposant des modèles sobres et intemporels. Nos équipes imaginent de nouvelles collections depuis nos bureaux situés à Mérignac avec toujours cette même exigence esthétique, un design minimaliste avec des matériaux nobles pour développer des modèles de montres qui plaisent aux hommes et aux femmes de 25 à 45 ans. Chaque collection est ensuite déclinée en différents coloris de cadrans, d’aiguilles ou de bracelets. D’où proviennent ces matériaux nobles que vous utilisez pour assembler vos montres ?

© Julien Fourcade

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Alexandre, Jamaïque et Florian sont tous trois originaires du Médoc. La logique aurait voulu qu’ils travaillent dans le milieu du vin mais leur passion des belles montres et leur amour pour l’horlogerie en a voulu autrement. En 2012, ils créent Mona watches, une marque de montres françaises créées, designées et assemblées à Bordeaux. Découverte.

Toutes les pièces que nous utilisons sont issues de pays européens. Le boîtier en acier inoxydable, le cadran et les aiguilles en laiton sont fabriqués en France, les bracelets en cuir viennent d’Italie et le mécanisme de Suisse. Chaque montre est assemblée à la commande dans notre atelier partenaire, Heurequal 33, situé rue Sainte-Catherine. Nous attachons une attention particulière à la production en circuits courts et à l’utilisation de matériaux respectueux de l’environnement jusque dans notre packaging. Nous travaillons actuellement une nouvelle gamme que nous souhaitons au maximum « from Gironde ». 1 07

Quelle sera la tendance de votre collection été 2022 ? La prochaine collection sortira en fin d’année et nous sollicitons d’ailleurs notre communauté sur Instagram pour imaginer et concevoir ensemble nos nouveaux modèles. Cependant, pour cet été, nous allons proposer pour chacun de nos modèles existants des bracelets NATO ; un bracelet en nylon résistant et adapté aux températures estivales. MLS

monawatches.com instagram.com/mona.watches


JAM6, c’est l’esprit de la fondatrice Alexia, ex-basketteuse professionnelle passionnée de mode qui, à travers son concept store en ligne, donne la possibilité à chaque femme d’exprimer toute sa singularité. Un univers « lifestyle » issu d’une sélection de marques de créateurs réunies sur jam6.fr pour que les femmes se sentent bien dans leurs baskets… et dans leur tête !

jam6.fr

Comment vous est venue l’idée de votre concept store en ligne ? À travers ma carrière sportive, j’ai dû souvent déménager et j’emportais systématiquement avec moi mes petits objets fétiches. Des sortes de grigris faisant ainsi partie de mon environnement rassurant. L’idée de rassembler mes coups de cœur à travers un concept store en ligne est venu naturellement. J’ai donc mis fin à ma vie de basketteuse professionnelle pour me consacrer à 100 % à cette aventure entrepreneuriale ! 108

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JAM6 habille la femme urbaine

Comment, à 32 ans, passe-t-on d’une carrière de basketteuse professionnelle à entrepreneuse dans le prêt-à-porter ? Après avoir consacré treize ans de ma vie au basket de haut niveau, j’avais soif de nouveaux défis. Comme pour beaucoup de personnes, l’année 2021 m’a apporté un certain recul et une prise de conscience. En quête de sens, j’ai souhaité me tourner vers un environnement que j’affectionne ; la mode et le bien-être. Je n’ai pas toujours eu confiance en moi et le choix de mes vêtements m’a souvent permis de gagner en assurance lors de moments clés de ma vie.

À quoi ressemble votre boutique en ligne ? Sur notre site nous réunissons des marques et des créateurs de talent pour proposer des looks à la fois urbains, classes et casuals. Des créateurs plus ou moins connus comme Baigure, Herbert Frère Sœur, Lapdip, Camalya, Valentinastore, American Vintage, Rainkiss, Serge Thoraval, Samou, Mouty artisanat… En plus d’un vestiaire de caractère, nous avons sélectionné des bijoux et accessoires mais aussi articles de décoration, bougies, papeterie, livres de voyage et autres ouvrages qui invitent à l’évasion. Toute une sélection d’objets qui contribuent à créer un environnement équilibré et harmonieux car j’en suis persuadée, une femme bien dans ses baskets est capable de grandes choses ! MLS


Divine on the beach CRÉATION. Nérée Swimwear, c’est la marque de maillots en tissu recyclé à shopper pour l’été. Dessinée à Bordeaux, conçue au Portugal, elle aide les femmes à se sentir bien dans leur peau avec ses modèles réglables, tout en maintien et confort. Nérée – clin d’œil au dieu protecteur des océans – prône une féminité libérée, avec « un petit côté sporty assumé ». « L’idée est de fédérer une communauté de femmes audacieuses, positives et proches de la nature. » Avec une belle échancrure… PG

Bobbies à Bordeaux, ça nous botte!

© Maude Roudier

© DR

neree-swimwear.com entre 95 € et 110 €

TENDANCE. À vous escarpins, espadrilles et salomés, petites sneakers branchées ! La griffe de souliers pointue Bobbies vient de prendre ses quartiers d’été au cœur de Bordeaux. Dans la très animée rue de la Porte Dijeaux, vous pouvez découvrir ce nouvel espace faisant la part belle à l’épure. Un écrin imaginé dans une démarche locale, où matériaux et artisans hexagonaux nous offrent un condensé du meilleur du savoir-faire français et assurent l’expansion de la griffe dans le tissu local bordelais. L’occasion rêvée de découvrir leur nouvelle collection de chaussures pour hommes et pour femmes. PG © DR

bobbies.com 109



Dans l’atelier de Petrusse

Texte Pauline Gallard Photos Nicolas Duffaure

À l’occasion des 25 ans de la marque, Florence Lafragette, l’heureuse présidente de la maison Petrusse, nous a ouvert les portes de son atelier lové dans une magnifique demeure de l’Entre-deux-Mers. Reportage.

L

e château Mauriac a beau se révéler dans la grisaille, l’accueil est résolument chaleureux. Tout sourire, Florence Lafragette amène le soleil dans le salon cossu aux murs parés d’étoffes colorées. Près de la cheminée, un espace à son image, moderne et élégant – des enceintes, un buste de jeune femme, des stères de bois –, éclairé par la lumière du jardin. « Une vraie tapisserie d’Aubusson vivante ! », s’enthousiasme la vestale de la maison Petrusse, gardienne du feu sacré de la griffe, célébrant cette année ses 25 ans. Dans ses cheveux, un foulard noué : « Ma signature, bien avant que cela ne soit à la mode ! », s’amuse Florence Lafragette. Depuis 2019, cette cheffe d’entreprise hors pair a pris la présidence et la direction artistique de la maison Petrusse. Cette artiste autodidacte nous guide au sein du château Mauriac à Langon, devenu siège de la marque en 2010, désormais studio de création et atelier de couture. Un lieu inspirant, à l’énergie mystique. En face, la villa Malagar, maison de famille de François Mauriac. Une éternelle source d’inspiration, miroir entre ces histoires familiales dont les contours semblent épouser ceux des pins que l’on observe depuis la maison Petrusse. Florence Lafragette a ce

jour-là une extinction de voix. Mais dans son cœur résonne si fort l’aventure de cette griffe aux étoles cultes, qu’elle semble s’éclaircir au fil du flot de nos échanges.

« Les belles rencontres sont souvent des évidences » Toute à sa joie, elle nous raconte comment elle a mis sa pierre à l’édifice Petrusse. « Les belles rencontres sont souvent des évidences, préciset-elle. D’abord parce que j’étais cliente. Il y a vingt-cinq ans, quand 111

Dans cet escalier qui mène à l’atelier de couture, des tissus indiens anciens, parés du motif cachemire emblématique, réinterprétés par Petrusse.

ma sœur et moi sommes parties faire nos études, ma mère nous a offert une étole Petrusse à chacune. » Une étole aux vertus presque magiques. « C’était certainement le côté rassurant, protecteur. J’adore ces histoires de lien. Une étole c’est un lien. C’est facile à offrir parce qu’il n’y a pas de


LOGO PETRUSSE Chaque symbole a une histoire, dont Florence Lafragette se fait la porte-parole. À l’intérieur de l’entrée prestigieuse, elle évoque la symbolique du logo de la maison Petrusse, déclinaison harmonieuse de motifs cachemires. « Ce motif cachemire symbolise un cyprès, un arbre aussi important en Orient qu’en Occident, la connexion entre la terre et le ciel. » De l’autre côté du perron, la villa Malagar et son allée de cyprès. « Faire cette connexion entre l’histoire de Mauriac, ces cachemires anciens, ces teintures anciennes, c’est une histoire très forte. »

Un sublime piano quart-de-queue nous accueille dans l’entrée du château. « Nous avions une collection qui s’appelait Songe d’une nuit d’été, l’idée était de transposer de la musique en étole. On a travaillé avec des chanteurs d’opéra, des musiciens. Le piano c’est notre connexion avec le monde de l’art », confie Florence Lafragette.

petrusse.com

problème de taille, cela fait toujours plaisir. Un morceau d’étole c’est très intime, on le porte contre soi. » Évidemment, on la questionne, après une décennie dans le vin et autant d’années chez L’Oréal. « J’ai toujours adoré les foulards : dans les cheveux, en ceinture, ceux de ma grand-mère que je customisais. Cette histoire de lien revient toujours. C’était une façon d’affirmer ma personnalité. » De la personnalité, la créatrice n’en manque pas, et Petrusse lui offre aujourd’hui toute la liberté pour pouvoir créer. « C’est la première fois que j’arrive à concilier mon côté créatif et entrepreneurial, à les faire vivre ensemble en leur donnant du sens. Ce que j’aime faire, c’est dessiner, raconter des histoires. » Le fil (de soie) rouge pour celle qui redynamise à sa façon la marque iconique. « Soit je créais une entreprise qui me ressemblait, soit je reprenais une pépite à développer, nous confie Florence Lafragette. Choisir une société 112

qui fête ses 25 ans aujourd’hui, c’est mon côté développement durable. Ces fondations sont très importantes, je les respecte beaucoup. »

Petrusse, vers une production locale et responsable Pérenniser oui, mais moderniser aussi. Florence Lafragette est une femme de son temps, bien consciente des enjeux de demain. « Quand j’ai repris Petrusse, mon premier objectif était de prendre le virage du responsable et du made in France. » Depuis, tout ce qui peut l’être est réalisé en France. « Encore mieux, dans nos ateliers ici, précise-t-elle. Nous avons quelques projets en Italie, et nous avons gardé nos racines indiennes, puisque cette maison est née d’un voyage en Inde. Dans nos boutiques, nous avons aussi voulu avoir de très jolies boîtes, réutilisables. Elles sont même made in Langon ! » Production locale, upcycling avec la création du concept Petrusse Plage, réutilisant des chutes de tissus,


Les équipes de design travaillent sous la direction de Florence Lafragette et imagine les motifs des futures étoles. Sur les murs, une multitude de moodboards, d’échantillons, de toiles donnent le ton de ce temple créatif.

ou encore nouveaux matériaux plus respectueux de l’environnement, Florence Lafragette suit son chemin éco-engagé. « Il est nécessaire de réfléchir à des matières responsables, innovantes, explique-t-elle. Quand l’équipe m’a présenté le cupro, j’ai trouvé ça formidable : c’est une soie végane, créée de façon responsable. Elle est à la fois très durable, biodégradable, et apporte une fraîcheur incroyable l’été avec un toucher aussi doux que la soie ! » Des produits durables, à l’image de l’étole reçue il y a vingt-cinq ans. « Quand un de nos clients achète un foulard, il vient pour un produit de qualité qu’il va garder. À chaque fois que l’on développe un produit, on réfléchit à sa durabilité. Ce foulard dans mes cheveux, ça fait des mois que je le porte, et il ne bouge pas. »

« La nature qui nous entoure nous anime » Florence Lafragette s’appuie sur l’acquis pour mieux dessiner le futur, avec ses valeurs fortes de liberté, créativité,

responsabilité, tournée sans cesse vers l’environnement. « Pour ma première collection, j’ai eu envie de revenir aux racines. J’ai dessiné un modèle, Ève : une toile de Jouy inspirée de la manufacture de Beautiran, ornée d’animaux fantastiques que j’ai dessinée avec mon fils. La nature qui nous entoure nous anime. » Une nature inspirante pour une cheffe d’entreprise qui l’est tout autant, alors que Petrusse va fêter ses 25 ans. « C’est une année très importante. Ça fait trois ans que j’ai repris Petrusse, et on dit souvent que c’est une date charnière. Pour les 25 ans de Petrusse, on lance un nouveau projet avec des objectifs encore plus forts en termes de développement durable. On espère bien continuer à donner de la joie, de la vie, de l’espoir à ceux qui portent nos produits. » 113

Au premier étage de la demeure d’exception, l’atelier de couture. Avec ses boîtes qui fourmillent de boutons et autres nécessaires à couture, l’on côtoie une grande tenture au motif Eve, des prototypes de produits comme ces robes paréos, des capes uniques et remarquables ornées de faussefourrure, des petits accessoires plus accessibles comme ses chouchous de cheveux réalisés à partir de chutes de tissus. C’est ici que sont réalisées les demandes sur-mesure des clients Petrusse.

“À chaque fois que l’on développe un produit, on réfléchit à sa durabilité”


Texte Pauline Gallard Photos DR (sauf mentions)

Asphalte, pour une mode meilleure L’industrie textile, l’une des plus polluantes au monde, serait-elle en train d’apprendre de ses erreurs ? Certains acteurs du secteur semblent déterminés à inverser la tendance. Avec un nouveau concept : celui de la précommande. La production se fait après l’achat, pour une consommation plus réfléchie, en privilégiant les circuits courts. Zoom sur les précurseurs du genre qui font du bien à la planète. 114


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© DR

“On est allés voir des clients, et on leur a demandé ce qu’ils voulaient”

William Hauvette, l’énergique chef d’entreprise aux commandes d’Asphalte

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u cœur des Chartrons, dans une petite rue tranquille de ce quartier vibrant, se trouve le siège de la griffe bordelaise désormais incontournable, Asphalte. Difficile d’imaginer qu’ici se trouvait un ancien hangar à bateau, réhabilité dans son jus, avec un immense toit cathédrale dont le squelette métallique surgit. « Il y avait de la terre battue au sol, on a repensé tout l’espace, créé un étage. » Le fondateur William Hauvette n’est pas du genre à se prendre la tête. À 35 ans, ce chef d’entreprise nous accueille casquette vissée à l’envers, hoodie rouge. Des prototypes signés Asphalte. Asphalte, c’est sa marque qui fleure bon le voyage, le bitume chauffé par le soleil, l’aventure. Une

invitation à faire crisser les pneus de votre Honda Gold Wing sur la route 66. Ou l’autoroute des Landes, c’est selon. Mais pas question de parler de marque de mode, William fait un vestiaire de vêtements. Des fringues, pas de la mode. « On est une équipe de gens au service d’autres gens qui ont besoin de s’habiller tous les jours, analyse le fondateur. On fait de l’usage, même si c’est important de donner envie. »

Une start-up innovante dans la mode Asphalte, née en 2016, a révolutionné le genre. Un coup du destin après quelques années de galère, comme le confie volontiers l’entrepreneur pressé. « J’avais très 116

envie d’entreprendre. Je n’ai jamais lu, à part à 18 ans l’autobiographie de Richard Branson. Tu connais ? » Vaguement, oui. Le ton est donné, le jeune homme a l’ambition de ses icônes, tranquille mais déterminé. Car il n’en est pas à son premier coup. Issu d’une famille d’entrepreneurs, son père a travaillé dans l’événementiel sportif (« c’est lui qui a importé le VTT en France ! »), William s’est lancé dans l’aventure textile avec une première marque de gilet baptisée Six et Sept. « J’avais du mal à trouver des pulls donc j’ai eu envie de créer les miens. Ni une bonne, ni une mauvaise idée, une idée. » Sans réseau, sans argent. Une belle histoire, mais « pas facile » de son propre aveu. Pendant quatre ans, la griffe vivote. « J’ai réalisé que j’avais monté une marque de fringues à l’ancienne, alors que je suis passionné d’innovations. Je voulais faire une start-up dans la mode ! » OK. On rembobine. William repart de zéro. Se sépare – « bons amis » – de son associé, récupère la société et relance le projet avec ses deux employés clés. « J’ai fait les choses à l’envers, précise-t-il. J’ai commencé par rencontrer des gens du secteur, pour voir comment ça fonctionnait, et après on a essayé d’appliquer les règles. Avec Asphalte, nous avons fait le contraire. On est allés voir des clients, et on leur a demandé ce qu’ils voulaient. »

« Des vêtements simples, mais de très bonne qualité et qui durent » Ils privilégient un modèle ultra direct, celui de la précommande.


Bobines de fil multicolores, métier à tisser robuste et poétique, Emmanuel Lang est un tisserand d’exception en Alsace, avec lequel Asphalte nourrit des liens très forts.

« Il n’y a pas de stock, pas d’invendus, pas de revendeurs, poursuit le chef d’entreprise. Le but était de faire tout un vestiaire, à la base sur l’homme, de vêtements simples, mais de très bonne qualité et qui durent. Et on va réussir à les vendre pas cher parce qu’on fera moins de marge que ce qui se fait traditionnellement sur le marché. » Mais une seule contrainte : faire patienter le client 2-3 mois. En parallèle, William s’installe à Bordeaux, retourne à Paris chaque semaine. Asphalte décolle peu à peu du bitume, l’équipe s’étoffe. « Quand la boîte a atteint 1015 personnes, que j’étais moins présent, je leur ai proposé de venir à Bordeaux. » Une nouvelle ville pour un nouveau départ. « Bordeaux dégage clairement une énergie, confie William Hauvette. On ressent très fortement l’esprit nature et le sport. Plus particulièrement le skate, le surf qui font partie des inspirations qui 117


nous ont attirés dans le Sud-Ouest. On a quelques surfeurs dans l’équipe. Le fait d’être proche de la nature colle bien avec la vision de la marque mais aussi la culture de la boite où on pousse chacun à profiter de la vie, chacun est libre de gérer son temps comme il le souhaite. » Un bon vent offshore et un bon swell ? Chez Asphalte c’est OK de partir à 16 h pour aller surfer. « Être bien dans son taf, c’est être bien dans ses pompes ! », s’amuse le chef d’entreprise.

Une communauté engagée

En haut : l’esprit surf and skate signé Asphalte. Avec le « sweatshirt parfait », véritable best de leur collection femme. Ci-dessus : Céline Lescure-Inquel, créatrice et modèle de sa marque Plume Paris.

Bien dans sa peau donc, mais aussi bien dans son boulot, que William ré-imagine complètement. Il avait des boutiques ? Son nouveau projet sera purement digital. William change les codes, les siens, et imagine un questionnaire. « En démarrant ce nouveau projet, on voulait commencer par le pull, parce que c’est ce que je savais faire. 118

On s’est dit qu’on voulait faire le pull parfait. » Mais plutôt que de foncer tête baissée, le jeune homme temporise et imagine un questionnaire pour ses futurs clients. « Ça nous a paru évident de demander : “C’est quoi pour vous le pull parfait ?” On a partagé ça sur les réseaux sociaux, et ça a été un carton immédiat. » Elle est bien là l’idée de génie, la clé de leur succès, leur colonne vertébrale : fédérer une communauté autour d’un projet qui fait sens. Donner du sens, même (et surtout ?) pour des fringues. Car quoi de plus trivial mais aussi de plus essentiel que de créer de la bonne fringue qui dure ? Après trente années de fast fashion, d’une société de consommation multirécidiviste du pire, loin de nos considérations RSE, la planète mode prend feu et il est temps d’éteindre l’incendie. À son échelle, Asphalte sort la sienne. La griffe réinvente le circuit de production court, valorise les matières premières éco-engagées, réduit les intermédiaires pour le plus grand bonheur de ses clients, qui sont là, immédiatement. Être au plus près des considérations des consommateurs, c’est le créneau gagnant de William Hauvette et sa team un brin utopiste, qui compte désormais près de 80 collaborateurs. Une obsession plus qu’une ambition de créer mieux, que partagent de plus en plus de marques de mode. Alors est-ce l’esprit surf et nature du Sud-Ouest ?

La Nouvelle-Aquitaine, eldorado d’une mode plus green La région peut se targuer d’accueillir d’autres griffes fondées sur la précommande. Si Asphalte imagine un vestiaire de vêtements, d’autres revendiquent l’esprit mode. À l’image de Plume Paris, qui comme son nom ne l’indique pas, est à Bordeaux. « On peut être


rendre un peu plus accessibles nos vêtements. » À terme, les créatrices aimeraient encore plus développer de cocréations (comme Nomad Surfing, lire page 77) en relation étroite avec leur communauté. « Cela nous permettra de récolter leurs avis et envies avec l’idée de créer une communauté engagée avec laquelle nous pourrons avancer main dans la main pour répondre au mieux à leur besoin. » Une communauté engagée, c’est aussi la clé du secret de nos marques pionnières de la précommande, modèle initié dès le départ par Asphalte, qui s’ouvre depuis octobre

L’esprit de famille avant tout pour Claire et Charlotte, les fondatrices de 15:45. « Un vestiaire pour tous, pour tous les jours, dans de jolies couleurs vives et des matières douces. »

© C. Palanque

à la mode tout en proposant de la précommande, précise Céline Lescure-Inquel, la fondatrice de la marque. Il s’agit de prendre les codes des tendances les plus désirables, pour qu’elles puissent durer le plus possible ! » Cette quadra dans le vent, ex-start-uppeuse incubée à la Station F, a elle aussi envie de créer une marque qui fait la différence. En 2020, elle lance sa griffe, bercée par « une féminité passionnée, intuitive, élégante et généreuse ». Son dressing est composé au gré de ses envies, de ses voyages, « de pièces fortes, de qualité, conçues pour être aimées et durer ». Des pièces qui twistent un vestiaire casual, saupoudrées de cette petite touche d’originalité. « La précommande est tombée sous le sens, poursuit Céline. Il nous a fallu observer le monde dans lequel nous vivons et l’impact que nous infligeons à notre environnement en consommant sans réfléchir. » Un déclic également partagé par les fondatrices de 15:45. Après le lancement d’une première marque classique dédiée aux tout-petits en 2018, les deux sœurs, Claire et Charlotte, veulent réinstaurer un équilibre dans leur production. «Nous avons revu tout notre système. Nous n’allions plus produire en série mais mettre en place une fabrication uniquement à la commande, analyse Charlotte. Ainsi, nous allions revenir à l’essentiel : le besoin du consommateur. » Et au pays de la précommande, chacun a le droit de surfer sa vague sans taxer celle des autres. Le positionnement de 15:45 se distingue de ses pairs, et propose un vestiaire pour petits et grands, essentiellement composé de sweats et de shorts en molleton (pour l’instant). Tout est imaginé, dessiné, fabriqué dans leur atelier de Gironde, pour un vêtement 100 % made in France. « Comme notre objectif est de démocratiser le made in France, nous avons réduit nos marges au maximum pour

dernier à la femme. « On n’a pas de directeur artistique, on en a des milliers ! Notre rêve, c’est qu’Asphalte révolutionne la mode, avec un nouveau modèle économique. Quand on imagine une marque avec un impact vraiment positif, des vêtements plus qualitatifs, mieux fabriqués, c’était cohérent pour nous de nous ouvrir à la femme. » La précommande pour tous a de beaux jours devant elle. C’est en tout cas ce qu’on peut se souhaiter pour un monde – et une mode – meilleurs. 119

“On n’a pas de directeur artistique, on en a des milliers !”

Infos pratiques asphalte.com | 15h45.fr plume-paris.fr


Les confidences de Morgane Sézalory Amies bordelaises, bonne nouvelle : Sézane s’installe définitivement à Bordeaux ! Laissez-vous porter par son vestiaire romantique et dans l’air du temps, ses matières délicates et délicieuses, avec ce je-ne-sais-quoi si français. Morgane Sézalory, cheffe d’orchestre de Sézane (contraction de son nom et de son prénom), nous raconte cette nouvelle aventure en Gironde, ses projets, ses hits de l’été… Rencontre ensoleillée. Propos recueillis par Pauline Gallard Photos Voir mentions

Depuis votre arrivée fin 2021 place Puy-Paulin, vous avez créé une petite révolution à Bordeaux. Comment expliquez-vous cet engouement ? Nous avons la chance de pouvoir compter depuis le lancement de la marque sur des clientes bordelaises très fidèles. Nous tenions vraiment à aller à leur rencontre à travers des lieux qui donnent du sens à nos projets, avec ce petit supplément d’âme. Lors de notre première ouverture à Bordeaux, nous avons immédiatement eu un coup de cœur pour cet espace avec ses murs en pierres typiques de la région, ses grandes baies vitrées et son esprit très atypique.

Pourquoi Bordeaux ? C’est un endroit très cher à notre cœur depuis toujours. Bordeaux est une ville à la fois très vivante et qui a su conserver son authenticité! J’ai toujours aimé me perdre dans ses ruelles du centre-ville. Nous avons quelques adresses incontournables pour nos escapades, comme les brunchs et petits déjeuner de Suzzi Kafe ou chez Chamade. Les chantiers de la Garonne pour déguster un plateau de fruits de mer les pieds (presque) dans le sable ! Ou encore les délicieuses glaces de la glacerie Dumas pour un goûter sous le soleil. 120

Êtes-vous une habituée de la région ? J’aime passer du temps l’été sur le Bassin, un véritable petit coin de paradis à préserver selon moi. On profite de ce temps en famille pour se ressourcer, cuisiner, et lire… lire énormément ! Je voyage toujours avec un de mes livres favoris : Puissance de la douceur, d’Anne Dufourmantelle. Un essai lumineux, qui m’apporte beaucoup de force. Je vais également me plonger dans le livre d’Anne et Claire Berest, Gabriële, dont l’histoire de cette femme indépendante, féministe et avant-gardiste me fascine.


© DR

“Bordeaux est une ville vivante et authentique”


Comme chaque saison, Sézane donne le ton. Quelles sont les pièces fortes chez Sézane pour l’été 2022 ? Nos paniers restent mes indispensables pour les vacances. Ils sont parfaits pour y glisser un pique-nique, mes livres des vacances, une paire d’espadrilles, mon maillot de bain. J’aime beaucoup les robes fluides et légères comme la Luce ou la Victoria qui fonctionnent pour toutes les occasions, journée ou soirée. Sans oublier une jolie maille, comme le Gaspard, en plusieurs coloris pour les soirées plus fraîches.

Vos coups de cœur qui seront dans votre valise ? Des chemises Sézane & Octobre à glisser sur son maillot de bain et pour le soir, la robe Georgia, très féminine et estivale avec ses broderies colorées. Votre destination des beaux jours ? Une plage sauvage, un petit coin de paradis du Sud-Ouest, de Corse ou même dans le sud de la France. Un endroit calme et authentique. Sézane est une marque très engagée, notamment à travers votre programme DEMAIN. L’ADN de la marque est solidaire à 100 %. Nous avons choisi de travailler toute l’année pour plusieurs associations, à travers notre programme solidaire DEMAIN qui a pu collecter

plus de 4 millions d’euros jusqu’à maintenant. Nos actions ne s’arrêtent pas là puisque nous travaillons avec plusieurs associations locales ­internationales tous les mois. Bien sûr, la route est encore longue, mais nous continuerons d’agir pour espérer et imaginer de meilleurs lendemains. Les enjeux écologiques de l’industrie textile sont-ils au cœur de vos réflexions ? Notre obsession est d’améliorer sans cesse tout ce qui peut l’être. L’obtention de la certification B Corp est une immense satisfaction ! Aujourd’hui, plus des trois quarts des matières que nous travaillons sont écoresponsables, plus de la moitié de nos pièces sont certifiées. Nous avons recyclé plus de 13 000 pièces, baissé considérablement notre emprunte carbone, et changé tous nos packagings au profit de cartons recyclés. Notre objectif est de dépasser les 80 % de matières écoresponsables cette année et d’aller encore plus loin à tous les niveaux. Après dix ans de folie, entre nous, c’est quoi la recette du succès Sézane ? Beaucoup de passion, d’engagement, de jolis projets. De sourires, de rires, d’insouciance et de jeux d’enfants surtout !

Photos © Ludovic Balay

“Nos appartements sont de véritables lieux de vie”

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Déco ×

“Le principe fondamental de la restauration, c’est la réversibilité. Il faut que, dans le temps, mes réparations ne soient pas éternelles.” Marie-Gaëlle Doutreloux p. 128

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DES BOUGIES SINGULIÈRES

© DR

Sur son site ekrushop.com, Roxane offre la possibilité de personnaliser chaque bougie en sélectionnant la couleur, le marbrage ou la finition, offrant ainsi la possibilité à ses clients de créer un modèle unique qui leur ressemble. Des bougies si jolies à admirer qu’il devient difficile de les brûler !

Ekru, des bougies poétiques FÉMINITÉ. Roxane Maetz a quitté son job en janvier dernier pour se consacrer à 100 % à la création de ses bougies décoratives. Chacun de ses modèles est unique et travaillé de manière artisanale. Dans son atelier situé dans le centre de Bordeaux, la jeune femme conçoit, démoule, colorie et lisse chacune de ses créations à la main. Ses bougies végétales sont composées de cire de colza européenne et végane (pas de cire d’abeille ni de paraffine) ainsi que d’une mèche en coton. À travers sa marque Ekru, Roxane développe des modèles originaux et inédits comme les « corps de femme » qui mettent en lumière la beauté du corps féminin sous toutes ses forme ; enceinte, celle avec des vergetures, la pulpeuse, la pudique, la sensuelle… Ses collections « spirales » et « design » apportent quant à elles un coup de peps à votre intérieur. Une nouvelle gamme qu’elle a cœur de développer dans les mois à venir. MLS 124


Pop culture

© Émilie Dubrul

RIVE DROITE-RIVE GAUCHE. Après trois ans et six mois rue de la Benauge, David Dewolf s’est finalement résolu à traverser la Garonne en installant sa jolie boutique de curiosités contemporaines non loin de la place Gambetta « pour s’offrir un nouveau souffle ». Dans ce nouvel espace cosy, tout de bleu vêtu, on retrouve pêle-mêle le mobilier rétro design les Gambettes, la marque japonaise Kinto, les mosaïques Invaders, les bougies parfumées rigolotes YesCire ! ou encore les puzzles en série limitée et made in France Sulo. Si les vinyles sont repartis chez son partenaire Total Heaven, David continue d’explorer l’univers des affiches artistiques (art print) avec une sélection très pointue. www.leshopbordeaux.fr

Parfum d’ambiance

© Studio Papi aime Mamie

BIEN-ÊTRE. Il existe mille et une façons de parfumer son intérieur. Parmi les astuces cocooning très en vogue, exit la bougie incandescente ! Il faut désormais compter sur le parfum d’ambiance. La diffusion à froid est même devenue le nouveau terrain de jeu des grandes maisons de parfums ou de cosmétiques. Pour la marque girondine Soin de soi, la Rochelaise Valérie Demars, à l’origine nez de l’aromaparfumerie (à base d’huiles essentielles) a imaginé un parfum 100 % naturel aux notes de citron, bergamote, petit grain, rose, cardamome, vanille et violette. Vaporisé dans l’air ou sur le linge, le parfum d’ambiance Soin de soi a l’avantage de rafraîchir l’air instantanément. ED www.soindesoi.fr/fr/ 125


Veni, Vidi, Vintage BOUTIQUE. Vous avez forcément déjà croisé leur univers vintage, au détour d’une affiche colorée à la typo rétro. Loopita est née de l’imagination de Bérengère et Laurent. Ce couple dans le travail comme à la ville, a imaginé en duo ce studio de création pluriel, déclinant son imaginaire teinté de douceur d’antan sur des supports multiples : sur les affiches et cartes postales jouant la régionalité (Mimizan-les-Bains, Bordeaux), à travers les coussins, le best de leur collection est le sac à chaussures. Leur credo : « Ce qui nous distingue, c’est la simplicité, le côté très graphique. » Un univers à retrouver dans leur somptueuse boutique bordelaise. © DR

À découvrir sur loopita.fr

Engagée pour la planète EN LIGNE. Hysorée est une marque française écoresponsable, fondée par deux amies. Toutes leurs créations sont imaginées à Bordeaux et fabriquées dans le respect de l’environnement, en France ou en Europe : bougies, articles de papeterie,mais aussi t-shirts ou sweats brodés… Hysorée se distingue par ses lignes épurées et modernes. Les affiches et les cartes sont imprimées sur du papier recyclé à Toulouse, les vêtements sont fabriqués en coton bio. Des modèles basiques pour une collection intemporelle à l’opposé de la fast fashion. MLS © DR

À découvrir sur hysoree.com 126


Une déco qui fait Tilt

D’où vous vient cette passion pour la déco et l’univers de l’enfant ? Sûrement du fait que je sois fille de décorateur ! L’univers de l’enfant m’a toujours intéressée. Je pense que j’étais l’une des premières abonnées aux magazines Milk et Doolittle.

Quels services proposez-vous à vos clients ? La plupart du temps, j’accompagne les futurs et jeunes parents dans l’aménagement et le choix des matériaux et du mobilier pour la chambre du bébé. Je conseille également des familles qui souhaitent revoir leur

Photos © DR

Sarah Tissandié a toujours été passionnée par l’univers de l’enfant avant même d’être maman. La période du confinement lui a été bénéfique puisqu’elle lui a permis de mûrir son projet entrepreneurial. En décembre 2021, elle crée Tilt ; un service de conseil en décoration écoresponsable pour les petites et grandes tribus.

De cette passion vous avez fait votre métier ? J’ai commencé ma carrière comme opticienne car j’aimais l’aspect esthétique des montures de lunettes, pour ensuite être vendeuse chez Bonton à Paris et Bordeaux. Depuis toute petite, j’aime bricoler et accessoiriser des objets et des meubles pour leur donner plus de style et une certaine singularité. J’adore chiner, parcourir les brocantes pour dénicher une jolie pièce dans le but de lui donner une seconde vie. À travers Tilt, j’ai réuni mes deux passions : être utile aux familles et à la planète.

intérieur pour créer des espaces kids : chambre, salle de jeux ou coin dans le salon. Je fourmille d’idées pour imaginer des aménagements modulables, ingénieux et fonctionnels et surtout respectueux de la santé des enfants et de la planète. En quoi votre démarche est-elle écoresponsable ? Après m’être formée à l’école Boulle puis au métier de décoratrice d’intérieur à distance, j’ai entamé un long travail de sourcing auprès de boutiques et d’artisans locaux afin de proposer un catalogue de mobilier et d’objets de décoration sains et écoresponsables. Je ne pousse pas à la consommation, j’apporte des solutions pratiques et utiles en fonction du style de vie de chaque famille. Je propose également des produits de seconde main. Une vieille commode peut tout à fait faire office de table à langer, par exemple. MLS

Pour une visite conseil ou un aménagement de A à Z : tilt-deco.fr 127


Restaurer, tout un art

Aux Chartrons, dans la bien nommée rue du Faubourg des Arts, Marie-Gaëlle Doutreloux redonne vie à vos objets préférés dans le respect de leur histoire. Nous avons poussé les portes de son petit atelier.

Texte & Photos Émilie Dubrul (Sauf mentions)

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n vase chinois signé, une statue canine de dalmatien très années 70, un coffre en bois du XVIIIe siècle dont les émaux relatant la vie d’Henri IV se sont effacés… Au milieu de cet inventaire de pièces usées ou cassées, Marie-Gaëlle Doutreloux s’attelle à la restauration d’un imposant bas-relief en terre cuite réalisé par un artiste de l’entre-deux guerres. « Ces deux scènes de la vigne et du vin étaient accolées à la façade d’une maison donc altérées par la mousse. Après un bon nettoyage, j’ai d’abord traité le châssis en bois. Maintenant je reconstitue les lettres par des retouches de patine dont j’ai dû recréer la couleur. Mais pas de manière uniforme, pour ne pas effacer les marques de la vie de l’objet. » C’est là tout l’art du travail de la restauratrice ; réparer sans renier le passage du temps. « Le principe fondamental de la restauration, c’est la réversibilité. Il faut que, dans le temps, mes réparations ne soient pas éternelles. 128

Au bout d’un moment, les vernis, les teintes jaunissent, les choses s’altèrent. Le temps marque son empreinte. » Paradoxalement, aux objets qui arrivent en mille morceaux, MarieGaëlle parvient à donner l’illusion qu’ils n’ont jamais été cassés « par des techniques de collage, de comblement de lacunes et de manques, de peinture, de vernis. Et toujours à froid, sans four, car on ne peut pas recuire la céramique. »

Solide parcours C’est avec les objets du quotidien que ce goût pour la restauration a d’abord commencé. « J’ai toujours vu ma mère refaire des fauteuils, parer le cuir, redonner vie à de vieux livres. Ça a posé les jalons de ma pratique artistique mais j’ai eu le déclic avec un encrier marocain qui me semblait fichu. Ça été une véritable révélation que je puisse redonner vie à un objet comme ça. » Après une licence d’arts plastiques à l’université Bordeaux-Montaigne où elle acquiert les connaissances



Photos © DR

nécessaires en histoire de l’art en parallèle des différentes techniques employées à travers les siècles, Marie-Gaëlle Doutreloux s’est d’abord orientée vers la restauration de tableau avant de se former à la restauration de céramique auprès de Brigitte Louwerse. Aujourd’hui, son métier de restauratrice convoque de nombreuses disciplines et nécessite souvent de réfléchir à la façon dont elle abordera la réparation, d’anticiper les potentiels problèmes liés à la matière. Sur l’étagère, des objets en attente, un abat-jour fabriqué dans une défense (sans doute d’éléphant)

Atelier Doutreloux 14, rue du Faubourg des Arts, 33300 Bordeaux 05 57 87 37 59

évidée et découpée en dentelle, qui a subi les affres du temps. Si les hommes taillent et sculptent l’ivoire depuis la préhistoire, l’utilisation de ce matériau organique est très contingentée en France, même dans le cadre de restauration. « J’ai donc dû trouver une solution pour remplir les manques. Avec l’aide de mon voisin d’atelier céramiste, nous avons finalement créé un moule en silicone puis fabriqué des parties manquantes en résine. Mais cet objet va me demander encore beaucoup de réflexion. » Et c’est justement ce qui fait la richesse de son métier. « Je ne m’ennuie jamais, j’en apprends tous les jours. » Sans oublier de mentionner l’affect que l’objet mobilise parfois. « Dernièrement, j’ai travaillé sur une faïence bordelaise de la fin du XVIIe ou début XVIIIe qui aurait pu être une pièce de musée : un énorme pot à pharmacie qui avait par miracle traversé les siècles et s’est retrouvé en miettes. Le client était 130

quasiment en pleurs lorsqu’il m’a appelée. Il faut aussi savoir gérer l’humain. Mes cours de psycho à la fac me sont utiles », précise-t-elle, amusée.

Philomathique de Bordeaux Pour répondre à une demande qui évolue aussi avec les modes, Marie-Gaëlle a dû diversifier son panel de restauration. Sur un coin du bureau, de très beaux livres sur les céramiques du XXe siècle : Pol Chambost, Mado Jolain ou encore Roger Crapon, Jacques Blin, Jean Lurçat, des signatures de l’école de Vallauris dont les objets se vendent aujourd’hui à prix d’or et qui font la joie de notre passionnée d’art contemporain. « Je m’apprête à faire un stage de dorure à la philomathique de Bordeaux. En céramique, l’aspect doré n’est obtenu que par la cuisson. Or là, je vais apprendre à travailler la feuille d’or et c’est un savoir-faire particulier », conclut-elle.


“Le principe fondamental de la restauration, c’est la réversibilité.”


Texte & Photos Émilie Dubrul (sauf mentions)

La Touton’s Touch Revigorer avec style une jolie maison de famille ? Vite, Touton Studio ! Derrière cette agence bordelaise, trois jeunes architectes d’intérieur attentives à l’histoire des lieux pour mieux les révéler.

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© Touton Studio


de la bibliothèque, lampe Haute volière de Mathieu Challières.

➁ Fauteuil « BeauHaus » signés JC de Castelbajac pour Acrila.

➂ Lampe à poser « Pipistrello » éd. Martinelli Lucé.

➃ Autour de la table réalisée par Atelier du bois, à Léognan, fauteuil de bureau Baumann chiné et chaises achetées chez Cabanes & Châteaux, rue Notre-Dame et maison Sersk, cours Alsace-Lorraine.

© Touton Studio

➀ Dans la niche

I

nsoupçonnable depuis la rue, abritée des regards par un imposant portail en fer forgé, la maison construite en 1880 prend place au milieu d’un magnifique parc arboré, à l’époque un domaine viticole. Avec l’urbanisation de ce village rural devenu faubourg de Bordeaux, les vignes ont cédé la place à des quartiers résidentiels. Rénovée par les actuels propriétaires il y a plus de vingt ans, cette belle demeure avait besoin d’un coup de jeune qui respecterait son style et son âme d’enfant. Dans le salon qui invite à la flânerie, un bol de caramels mous et autres douceurs donne le ton. Artiste peintre, la propriétaire des lieux a toujours été sensible à l’art, tout en assumant un goût prononcé pour l’insolite, l’art du détournement, le mélange des genres. 134

À la manière d’un tableau Pour ce qui est de la rénovation, tout serait parti d’une collection d’objets décoratifs chinés au fil du temps. Service à café, assiettes en porcelaine, pot à graisse en terre cuite émaillée, vases chinois… des pièces qui dormaient paisiblement au fond d’un meuble fermé. « Agnès, la propriétaire, est une amoureuse des objets. Lorsqu’elle nous a appelées pour repenser la décoration de ses pièces de vie, la première chose à laquelle nous avons pensé a été la bibliothèque de la salle à manger, réalisée sur mesure, en noyer massif français par un artisan local » raconte Juliette Touton. Essence de la Renaissance italienne par excellence, le noyer apporte un côté très chic à la pièce. « On a calepiné chaque niche pour y faire entrer tous les objets ou


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“On a calepiné chaque niche pour y faire entrer tous les objets ou tableaux qu’elle souhaitait mettre en avant”

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➀ Voir sans voir, telle est l’idée de cette porte réalisée sur mesure, esprit « moucharabieh ».

➁ Dans le salon désormais ouvert sur la cuisine par une fenêtre intérieure, table basse Caravane et rideaux en voilage Pierre Frey réalisés par Atelier Ambiance.

➂ La terrasse accueille un ensemble de jardin en céramique Habitat, joliment patiné par le temps.

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tableaux qu’elle souhaitait mettre en avant. » À la manière d’une toile XXL, la propriétaire peut ainsi composer à l’envi des tableaux très colorés. « Et au diable la poussière ! » Au centre de cette très belle pièce inondée de lumière naturelle, les architectes ont également dessiné et fait fabriquer à l’ancienne (assemblée par tenons-mortaises) une imposante table à manger en s’inspirant de Charlotte Perriand. Dans un coin de la pièce, un meuble très contemporain, où jouent subtilement la forme, l’image, la transparence et la lumière entre en résonance avec le travail de la designer française. Pour animer l’ancienne niche qui accueillait des étagères, Touton Studio a fait intervenir l’artiste pluridisciplinaire Mathilde Labrouche qui manipule la peinture, le textile mais aussi les miroirs patinés qu’elle collecte dans toute l’Europe et auxquels elle redonne vie. « Pour ce miroir sur mesure, je suis partie d’un motif floral rose (une pivoine), une couleur qu’affectionne Agnès. J’ai ensuite découpé et recomposé un patchwork de miroirs en comblant l’argenture manquante par des morceaux de papiers peints anciens représentant des roses ou du végétal, détaille l’artiste. Dans ces miroirs d’un autre temps, on ne se voit pas. En tout cas pas vraiment comme on est. J’aime jouer avec cette image un peu imparfaite, assez poétique, pour exprimer que la perfection n’existe pas. »

Jeu de regard Pour révéler tout le potentiel de la cuisine, l’une des pièces centrales de la maison, les trois architectes ont

fait le choix du bois brut. Le chêne s’est imposé sur toutes les façades mais de façon très minimaliste, parfois en transparence façon moucharabieh, permettant ainsi de voir à travers du meuble sans en voir totalement le contenu. « L’histoire et l’époque du lieu restent présentes grâce à la conservation d’un esprit maison de campagne présent dans toutes les pièces. Les objets et la décoration de différents styles apportent un côté très personnel et chaleureux à cette maison bourgeoise. » Pour faire communiquer la salle à manger et le salon, une fenêtre a été créée à partir d’une ancienne porte rebouchée dans un mur plein. Cela redonne une perspective vers le jardin lointain et les gigantesques bottes de jardin de l’artiste Lilian Bourgeat. « Dès qu’on pense un projet, on pense matière et non objet. On réfléchit aux matériaux qui mettront en avant le lieu, poursuit Juliette Touton. Chez nous, l’aspect environnemental est très important. Artisans locaux, matières sourcées localement, manufacture européenne… Nous faisons attention aux choix de nos artisans. Le plan de travail par exemple, en lave émaillée extraite dans le Massif central, a été choisi pour durer. » Mais en laissant une part à l’imprévu, « aux derniers détails qui se jouent sur le chantier, c’est quand même plus marrant », Touton Studio parvient à fabriquer des lieux uniques, authentiques et très chaleureux. « Chaque projet est différent mais nous veillons à garder une cohérence éthique entre chacun d’eux. » touton-studio.fr

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Photos © Touton Studio

“Chez nous, l’aspect environnemental est très important. Artisans locaux, matières sourcées localement, manufacture européenne…”

TOUTON STUDIO Ouvertes à des projets aussi divers qu’une maison particulière, le bureau d’un professionnel ou la petite librairie de quartier, Coraline, Nina et Juliette ne refusent rien, « et surtout pas en termes de budget ». Architectes diplômées avant d’être décoratrices d’intérieur, les trois jeunes femmes ont une approche du détail qu’elles aiment intégrer dès le début du chantier. Elles aiment la déco pour son côté « plus humain, en lien avec la vie des gens, leurs sensibilités, leurs goûts ».


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× “Celui qui voyage sans rencontrer l’autre ne voyage pas, il se déplace.” Alexandra David-Néel (Voyage d’une Parisienne à Lhassa, 1924)

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Expériences œnoludiques RDV D’ÉTÉ. En plein cœur de Saint-Émilion, le couvent des Jacobins, édifié au XIVe siècle, invite les visiteurs à une véritable pause hors du temps. Ce lieu singulier a su préserver l’empreinte quotidienne des moines à travers son architecture, ses jardins de prière, sa boulangerie ainsi que ses caves monolithes situées à 12 mètres de profondeur. Cet été, de nouvelles expériences attendent les visiteurs : atelier vins et chocolat, initiation à l’assemblage, jeux olfactifs, l’incontournable brunch dominical, des séances de ciné en plein air et bien d’autres surprises. ED

© DR

couvent-jacobinssaint-emilion.com

L’arbre qui cache… la forêt d’art contemporain

© DR

ITINÉRANCE. Depuis quelques années, d’étranges installations ont trouvé refuge au cœur du massif forestier des Landes de Gascogne. Point de galerie ou de musée. En guise de lieu d’exposition, un vaste écrin de verdure le long d’un parcours de plusieurs dizaines de kilomètres entre les Landes et la Gironde. Un itinéraire imaginé par Christophe Doucet, artiste plasticien né à Talence qui vit et travaille sur ces terres et cette forêt landaise portant encore les stigmates de la tempête Klaus. La dernière œuvre du parcours, la 25e, est nichée dans une application mobile qui permet de découvrir l’ensemble de l’installation : entre nature onirique et technologie, biosphère et cybersphère, cette œuvre d’Angelo Plessas intitulée L’Œil d’Angelo, est une invitation à la découverte des Landes de Gascogne. ED laforetdartcontemporain.com 140


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Bien-être avec vue Voyager tout en cultivant un mode de vie sain, tel est l’alléchante proposition de nombreux établissements hôteliers misant sur les offres bien-être. À l’image de la Réserve à Saint-Jean-deLuz qui a lancé au printemps ses premières retraites de yoga. INSPIRER. EXPIRER. Tel pourrait être le nouveau mantra de la Réserve, le très bel hôtel 4 étoiles qui domaine la baie de Saint-Jeande-Luz. « En yoga, il est important de bien expirer avec le nez, la tête

légèrement repliée sur le menton et non par la bouche. Cela vous permettra de respirer lentement et profondément » explique Clémence Calvet aux quelques non-initiés qui participent à son cours ce jour-là. À raison de trois fois par semaine, cela fait deux ans que cette professeure de yoga vinyasa investit de ses ondes positives le cadre idyllique de la Réserve. Elle y anime des séances de yin yoga et de méditation pour ses élèves réguliers mais aussi pour les clients de l’hôtel en quête de bien-être. Après quelques longueurs dans le bassin de nage, une leçon de tennis ou avant des soins du corps à l’institut Esthederm, ces cours de yoga sont tellement appréciés que la directrice de l’établissement, Marie-Eugénie Hernandez, a lancé 141

au printemps la première retraite de yoga et renouvelle l’expérience du 5 au 7 octobre 2022.

Un décor ressourçant C’est donc sur un tapis de verdure, lové entre ciel et mer, profitant des embruns de l’océan et du splendide panorama que Clémence Calvet vous permettra de vous reconnecter à votre corps, à vos sens, en pratiquant des activités apaisantes comme le yoga et la méditation. Vous bénéficierez bien sûr de tout le confort de la Réserve : ses chambres avec terrasse, son parc arboré et sa table dirigée par le jeune et talentueux chef Pierre Boffo, résolument healthy. Un bon moyen de rester en forme tout en voyageant. Ou de se ressourcer sans partir à l’autre bout du monde. ED


Escale iodée

Texte & Photos Émilie Dubrul (Sauf mentions)

Nature, gastronomie, sport et patrimoine : à 2 heures de Bordeaux, l’île de Ré, c’est le dépaysement assuré tout au long de l’année. Territoire aux mille facettes, Ré la blanche, comme la surnomment ses habitants, est une destination qui respire les vacances.


A

Situé au cœur du village, le bassin du port protégé du vent par les remparts accueille aussi bien des bateaux de pêcheurs que des plaisanciers de passage pour une escale très prisée. Bordé de commerces et notamment de restaurants, Saint-Martin invite aux déambulations et à la détente. Au vu de la file d’attente interminable devant la boutique La Martinière dès 10 h du matin, on se dit qu’il ne faut pas quitter cette oasis sans goûter les douceurs glacées de la famille Cathala. Avec ses 63 parfums parmi lesquels l’incroyable glace à l’huître et au caviar, François-Xavier Cathala (qui a pris la suite de ses parents fondateurs en 2001) est l’artisan incontournable de l’île. En face, sur l’îlot Saint-Martin, le Bistrot du marin est le rendez-vous des locaux où

se poser autour d’un petit café. Mais aussi l’adresse où se retrouver autour d’une belle assiette de couteaux en persillade arrosée d’un verre de rosé… de l’île. Car Ré ne vit pas que du tourisme. Elle est aussi une terre de producteurs qui ont à cœur depuis bien longtemps de fournir les commerces locaux. Les moines cisterciens du Moyen Âge, à l’origine d’une solide tradition viticole insulaire, furent en quelque sorte les précurseurs du mouvement locavore. Ce sont eux également qui ont construit les marais salants. Viticulture et saliculture occupent à nouveau une place importante dans la vie économique de l’île, avec un autre produit phare : la pomme de terre primeur AOP. Les amateurs de houblon ne sont pas oubliés grâce aux fameuses bières artisanales de Ré, aux saveurs délicates,

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DORMIR

© Villa Clarisse

Port d’attache

© Studio Incognito

ussitôt le pont franchi, les embruns de l’océan nous chatouillent les narines, les plages sauvages de sable blanc bordées de pins invitent aux pieds nus et les villages de caractère nous ouvrent les bras. L’île s’allonge sur des paysages diversifiés, des hectares de vignes et de marais salants que l’on traversera de préférence à vélo grâce au superbe réseau de pistes cyclables, 134 kilomètres au total. Nous nous sommes posés sur le port de Saint-Martin-de-Ré, citadelle fortifiée par l’ingénieur Vauban au XVIIe siècle pour se protéger de nos chers voisins anglais, allemands et hollandais qui ne pratiquaient pas encore le tourisme.

Villa Clarisse C’est un havre de paix logé dans un ancien hôtel particulier du XVIIIe siècle. Acquis il y a une dizaine d’années par la famille Le Calvez (également propriétaire de l’hôtel de Toiras sur le port), cette luxueuse villa de pierre et de verdure cultive le goût du secret. À l’abri du tumulte du port voisin, elle offre neuf chambres spacieuses et confortables ainsi qu’une piscine chauffée. La décoration de style flamand, épurée et lumineuse, a été pensée pour que les clients se sentent ici comme dans une véritable maison de famille. Le petit plus : comme à l’hôtel de Toiras, un majordome est présent H24 pour assurer le bienêtre de ses hôtes. villa-clarisse.com


“Le dur mais beau métier de saunier est l’art de réguler les débits d’eau”

Après avoir mis cap au nord, en direction du phare des Baleines et avant de gravir ses 257 marches, une pause à Loix (prononcez Loi) s’impose. Entouré de marais salants, ce village est relié au reste de l’île de Ré par deux pistes cyclables. Celle qui longe la mer vous mènera jusqu’à la passerelle du moulin à

marée, ultime vestige de l’âge d’or du commerce du sel, car on y lavait l’or blanc ; la fleur de sel. Sur la route du retour, à quelques coups de pédales d’Ars-en-Ré, faites le plein chez les Salicorniers. Eddy est producteur de sels et de salicornes depuis vingtcinq ans et tient lui-même boutique entre deux récoltes. Il n’hésitera pas à vous parler du dur mais beau métier de saunier qui est « l’art de réguler les débits d’eau ». La récolte s’étend de juin à septembre. Pour le voir à l’œuvre manipuler son râteau et former ses erreux (tas de sel), c’est à l’aube pour le gros sel et en fin d’après-midi pour la fleur.

George’s C’est le nouveau spot chic de Saint-Martin-de-Ré. Avec sa vaste terrasse toute de blanc vêtue donnant sur le port, difficile de passer à côté ! On y vient pour passer un agréable moment autour d’un petit déjeuner matinal, d’un déjeuner mérité après une balade à vélo ou d’un dîner devant le spectacle d’un beau coucher du soleil. Aux manettes de cette

nouvelle adresse tant attendue, le chef Gregory Vingadassalon qui a peaufiné son art au Gabriel à Bordeaux aux côtés du chef François Adamski ou encore au Saint-James avec le chef étoilé Nicolas Magie. Sa cuisine raffinée, mélange de saveurs à la fois puissantes et délicates, est teintée d’influences lointaines qui subliment l’ancrage résolument local : les huîtres bio de Frédéric Voisin, le Saint-Pierre et son écrasé de pommes de terre de l’île de Ré, la tempura de crevettes impériales, mayonnaise cajun ainsi que des desserts gourmands tels que le chocolat, praliné, fleur de sel, ou le baba au rhum, crème légère. Une cuisine gourmande dans l’air du temps !

nées des mains d’un maître brasseur autrichien, M. Baumgartner, grand amoureux de l’île. Située à SainteMarie au sud de l’île, la brasserie se visite toute l’année, mais uniquement sur rendez-vous.

L’art du saunier

Eddy Erbelding, saunier et salicornier

SE RESTAURER

La Cible Pour grignoter sur le pouce après quelques heures à la plage, on file à la Cible ; un restaurant accueillant au décor cosy et exotique. À la carte, rouleaux de printemps, accras de cabillaud, assiettes d’huîtres à partager, mais aussi pêche du jour ou tartare de thon et crevettes marinées. Tout est ultra frais et cuisiné avec passion. Réservation conseillée au 05 46 67 38 82

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C A R N E T D’ ADRESSES

Culture

Wine

CAPC 7 rue Ferrere, 33000 Bordeaux 05 56 00 81 50

Château Guiraud 1 Château Guiraud, 33210 Sauternes 05 56 76 61 01

MADD 39 rue Bouffard, 33000 Bordeaux 05 56 10 14 00 Institut culturel Bernard Magrez 16 rue de Tivoli, 33000 Bordeaux 05 56 81 72 77

Clos Louie 1 Terres Blanches 33350 Saint-Gènes-deCastillon 05 57 74 46 63

Bocage 8 rue Sainte-Catherine, 33000 Bordeaux 05 56 44 49 51

Villa Clarisse 5 rue du Général Lapasset, 17410 Saint-Martin-de-Ré 05 46 68 43 00

Pétrusse Château Mauriac, 3 chemin de Cantau, 33210 Langon 05 56 31 74 74

La Cible Avenue de la Plage, 17410 Saint-Martin-de-Ré 05 46 67 38 82

Sézane 1 place Puy-Paulin, 33000 Bordeaux

Château de Ferrand Saint-Hippolyte, 33330 Saint-Émilion 05 57 74 47 11

Déco

Librairie Mezzanine 8 esplanade Jean Valleix, 33110 Le Bouscat 05 56 96 31 52

Château d’Arsac 1 allée du Comte, 33460 Arsac 05 56 58 83 90

Loopita 15 rue du Palais de l’Ombrière 33000 Bordeaux 05 58 07 17 17

La Caisse 61 rue du Château d’Eau, 33000 Bordeaux

Green

Food

Recyclerie des Hauts de Garonne 2 rue Haroun Tazzief, 05 57 61 11 52

Ayawaska Cocktail Club 19 rue des Bahutiers, 33000 Bordeaux 06 10 35 24 02 La Chocolaterie Nathalie et Arnaud 7 rue Maucoudinat, 33000 Bordeaux 05 40 05 46 34

Sauvage Poésie Rue Porte Dijeaux, 33000 Bordeaux

Soin de soi 3 bis rue de la Vieille Tour, 33000 Bordeaux 05 57 60 14 56

Nomad Surfing 130 rue Achard, 33300 Bordeaux 06 16 29 78 96

Le Shop 65 rue Saint-Sernin, 33000 Bordeaux 09 81 84 83 84

Rose ou Lilas 27 rue Porte de la Monnaie, 33800 Bordeaux 05 56 84 26 24

Delizia da Bartolo 54 rue du Palais Gallien, 33000 Bordeaux 05 33 89 49 27

L’Essaim de la Reine 87 quai des Queyries, 33100 Bordeaux 06 65 01 00 15

Hôtel de Pavie 5 place du Clocher, 33330 Saint-Émilion 05 57 55 07 55

L’Arche l’écosystème de demain 30 rue Achard, 33300 Bordeaux 06 47 99 20 15

La Baratte bordelaise 4 rue du Parc, 33110 Le Bouscat Gueuleton 5 place du Palais, 33000 Bordeaux 05 57 83 96 07

Mode

Bobbies 75 rue de la Porte Dijeaux, 33000 Bordeaux 05 86 85 01 98

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Atelier Doutreloux 14 rue du Faubourg des Arts, 33300 Bordeaux 05 57 87 37 59 Touton Studio 23 cours Barbey, 33800 Bordeaux 05 57 93 13 60

Escapades

La Réserve Pointe Sainte-Barbe, 1 av. Gaëtan Bernoville, 64500 Saint-Jean-de-Luz 05 59 51 32 00 Les Salicorniers 3 chemin du Boutillon, 17590 Ars-en-Ré 05 46 29 07 80

Top 10

Center Parcs Landes de Gascogne 47700 Beauziac 05 54 70 05 33 Parcel Tiny House Lieu-dit Champion, 33330 Saint-Christophedes-Bardes 01 76 40 29 90 Roulottes Vesta 29 chemin de la Peyre, 33850 Léognan Domaine Ecôtelia 5 Tauzin, 33430 Le Nizan 05 56 65 35 38 Les foudres du Château Bonhoste Chateau de Bonhoste, 33420 Saint-Jean-deBlaignac 05 57 84 12 18 Hôtel des Grottes de Matata 67, bd de la Falaise, 17132 Meschers-sur-Gironde 05 46 02 70 02 Péniche Tango Ponton Yves Carlier, 33000 Bordeaux 06 08 25 46 00 Lac de Seguin 33210 St-Pardonde-Conques 05 56 62 25 43 Zoo de Pessac 3 chemin du Transvaal, 33600 Pessac 05 57 89 28 10 Château Malromé 33490 Saint-André-du-Bois 05 56 76 25 42


LE BORD EAU X D E …

Hela Mansour

De mars à octobre, lorsque notre hémisphère retrouve le soleil, Hela Mansour, guide-conférencière et cofondatrice du Bordeaux Walking Tours, élargit son terrain de jeu en invitant le voyageur à profiter de l’exceptionnelle richesse de notre grande région.

E

Des escapades sur mesure Aujourd’hui entourée d’une dizaine de guides tout aussi sympathiques, cultivés et polyglottes qu’elle, notre passionnée d’histoire a étoffé son offre par des séjours dans le Périgord pourpre, du côté de La Rochelle et même le long de la côte océanique à la voile. Lors de ces visites semi-privées ou privées, aucun détail de votre séjour ne lui échappera, « c’est pourquoi il est fortement conseillé de prendre les devants ». En cette veille

SES ADRESSES Se cultiver ? L’église Saint-Bruno, qui est à côté de chez moi, hors des sentiers battus. Elle abrite deux statues de Bernin très peu connues, que j’adore venir admirer. Manger ? Chez Racine. Le patron est anglophone et en plus écossais. C’est abordable et très fin. Ou encore Davoli au marché Saint-Pierre.

© Émilie Dubrul

lle connaît les Landes de Gascogne, le patrimoine gastronomique du Béarn ou les églises romanes du Poitou sur le bout des doigts et peut vous raconter ces trésors comme autant de livres ouverts. Mais Hela a d’abord fait le pari de faire découvrir Bordeaux, prenant le parti de visites intimistes, romantiques ou authentiques. « Lorsque j’ai créé Bordeaux Walking Tours avec ma partenaire [aujourd’hui repartie aux États-Unis], je me suis spécialisée dans les visites en langue anglaise. Mes clients sont majoritairement étrangers et j’en ai vu arriver des États-Unis juste pour la visite “Judaïsme et éminents personnages”. » Adepte de la petite foulée, Hela emboîte également le pas avec son « sight jogging » ou « jogging culturel » de 6 à 8 kilomètres ; un tourisme en version cool et énergique pour le moins original qui se termine par la visite d’une brasserie artisanale.

de vacances d’été, Hela apporte d’ailleurs la dernière touche à ses demandes d’automne, durant lesquelles elle prévoit d’emmener ses clients participer aux vendanges de prestigieux châteaux. Et lorsque l’été touche à sa fin, Hela, française d’origine égyptienne, prend la route du grand sud. Depuis 2019, elle organise des croisières féeriques sur le Nil ou le lac Nasser à bord d’une dahabiya, un somptueux voilier traditionnel. Une façon de plonger ses hôtes au cœur de ses propres racines et de leur montrer que l’Égypte ne se résume pas aux pyramides. ED

Virée shopping ? J’adore les pièces anciennes pour leur qualité et aussi, j’avoue, par ce que je n’aime pas être comme les autres. Donc je vais souvent à Saint-Michel ou dans le Village Notre-Dame. Sortir ? Je suis une « party girl ». Les meilleurs fêtes se font chez moi (Rires). Sinon j’aime beaucoup le quartier Saint-Michel car c’est un milieu très cosmopolite qui me ressemble.

Bordeaux Walking Tours, 205 rue Judaïque, 33000 Bordeaux +33 6 80 44 18 24 / info@bordeauxwalkingtours.com / bordeauxwalkingtours.com

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