Afrique numérique

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AFRIQUE NUMÉRIQUE

Transformation technologique pour l'emploi

Tania Begazo

Moussa P. Blimpo

Mark A. Dutz

AFRIQUE NUMÉRIQUE

AFRIQUE NUMÉRIQUE

Transformation technologique pour l'emploi

Tania Begazo

Moussa P. Blimpo

Mark A. Dutz

© 2023 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/La Banque mondiale

1818 H Street NW, Washington, DC 20433

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1 2 3 4 26 25 24 23

La publication originale de cet ouvrage est en anglais sous le titre de Digital Africa: Technological Transformation for Jobs en 2023. En cas de contradictions, la langue originelle prévaudra.

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ISBN (imprimé): 978-1-4648-1970-4

ISBN (digital): 978-1-4648-1737-3

DOI: 10.1596/978-1-4648-1970-4

Conception de la page de couverture : Bill Pragluski, Critical Stages, LLC

Numéro de contrôle de la Bibliothèque du Congrès : 2023909082.

Table des matières

v
Avant-propos ................................................................... xiii Remerciements xv À propos des auteurs xvii Principaux messages xix Abrégé ........................................................................ xxiii Abréviations ................................................................... xlvii CHAPITRE 1 Les technologies numériques : Facteurs de transformation technologique pour l’emploi 1 Qu’est-ce que les technologies numériques ? 1 Les défis de l’Afrique en matière d’emploi et de technologie 2 Impacts de l’utilisation des technologies numériques sur l’emploi et la pauvreté 14 Le retard d'usage d’internet en Afrique 25 Données et connaissances manquantes pour de futures études 35 Notes 41 Références 52 CHAPITRE 2 Entreprises : Créer de meilleurs emplois pour plus de personnes grâce à l’innovation .............................................................. 57 Utilisation des technologies numériques par les entreprises africaines 57 COVID-19 et fractures numériques 76 Facteurs incitant à utiliser des TN en entreprise 82 Des politiques technologiques pour des entreprises plus nombreuses et plus performantes 93 Notes 109 Références 114 CHAPITRE 3 Ménages : Promouvoir l’utilisation productive des TN pour un impact économique inclusif ............................................................. 117 L’utilisation d’internet par les ménages est faible, inégale, mais en progression 117 Paradoxe de la COVID-19 : Une utilisation accrue d’internet, mais des fractures numériques plus larges 124 Compréhension des contraintes des ménages à l’utilisation d’internet 127 Un cadre des politiques pour transformer l’utilisation en impact inclusif 142 Conclusion 148 Notes 149 Références 150
vi Table des matières
Infrastructure numérique et des données : Stimuler une plus grande disponibilité et une meilleure utilisation grâce à des réformes réglementaires et des politiques ................................................................ 153 Les défis du marché en matière de connectivité à internet : Accessibilité financière, utilisation et qualité 153 L’accessibilité financière pour accroître l’utilisation 165 Promouvoir la concurrence tout au long de la chaîne de valeur de l’infrastructure numérique 165 Permettre la réduction des coûts d’exploitation à l’aide de la réglementation 180 Disponibilité pour réduire la fracture numérique 185 Politiques réglementaires visant à étendre la couverture et l’utilisation 186 Interventions complémentaires d’appui à la demande et à l’offre 190 Infrastructure de données et réglementation visant l’accessibilité financière et la volonté d’utilisation 198 Regarder vers l’avenir : Intégration régionale et le changement climatique 208 Résumé des principales conclusions pour une utilisation plus inclusive 212 Annexe 4A Données complémentaires 215 Notes 216 Références 219 CARTES 3.1 Parts de la population ayant accès à l’électricité et à internet en Afrique, par pays, 2017 138 4.1 Coût d’un forfait haut débit mobile de 2 Go de données uniquement, en pourcentage du RNB par habitant, par pays, Afrique, 2021 157 4.2 Parts de la population bénéficiant d’une couverture internet (3G contre 4G), République démocratique du Congo, Nigeria et Tanzanie, 2021 162 4.3 Vitesses de téléchargement du haut débit mobile, dans quelques zones urbaines, Afrique, 2020 163 4.4 Estimation du coût public par utilisateur pour le haut débit universel 4G (sans fil), Afrique, valeur actuelle nette pour 2020–2030 192 4.5 État d’avancement de l’infrastructure des données en Afrique, par pays, 2020 200 ENCADRÉS 1.1 Qu’est-ce qu’un « bon emploi » ? 2 1.2 Cadre de la « transformation économique pour l’emploi » de la Banque mondiale 7 2.1 Diffusion rapide de la technologie des sites internet durant la COVID-19 77 2.2 Impact de la pandémie de COVID-19 sur l’utilisation des applications mobiles en Afrique 80 2.3 Intrants publics visant à renforcer les chaînes de valeur au Sénégal, au Kenya et au Pérou 105 2.4 Un programme de création d’emplois au Sénégal : Une conception efficace pour la transformation technologique 107 3.1 Le commerce électronique au service de l’inclusion économique dans les villages Taobao de la Chine 137 3.2 Une électricité fiable pour l’économie numérique 140
CHAPITRE 4

3.3 Smart Villages au Niger pour une disponibilité inclusive et une utilisation productive 148

4.1 La tarification régressive du haut débit limite son utilisation par les pauvres 158

4.2 Les prix élevés du haut débit et les offres limitées restreignent l’utilisation des données par les PME 159

4.3 Créer des institutions numériques dans des situations de fragilité, de conflit et de violence : Transformer le secteur en Somalie 176

4.4 L’accélération numérique au Sénégal : Rôle des réformes réglementaires en matière d’infrastructure 179

4.5 Évolution de la taxation des services numériques 184

4.6 Technologies alternatives pour la couverture des zones rurales et isolées 189

FIGURES

O.1 Cadre conceptuel pour l’analyse politique des impacts des TN sur la croissance de l’emploi et des revenus xxv

O.2 Effets de la disponibilité de l’internet mobile sur la création d’emplois et le bien-être des ménages au Nigeria et en Tanzanie xxvii

O.3 Écart entre la couverture et l’utilisation de l’internet mobile en Afrique subsaharienne et dans d’autres régions, 2010–2021 xxx

O.4 Association entre l’utilisation de TN plus sophistiquées par les entreprises et la croissance de la productivité et de l’emploi dans certains pays, 2019–2021 xxxi

O.5 Association entre l’utilisation des technologies par les microentreprises et l’augmentation de la productivité, des ventes et des emplois, 2017–2018 xxxii

O.6 Utilisation des smartphones et des ordinateurs, par taille d’entreprise, dans quelques pays, 2019–2021 xxxiii

O.7 Les corrélats de l’adoption des smartphones et des ordinateurs, 2017–2021 xxxiv

O.8 Approches des politiques visant à accroître l’adoption inclusive et l’utilisation productive des TN par les ménages xxxvii

O.9 Étendue des contraintes pesant sur la concurrence dans les structures de marché tout au long de la chaîne de valeur numérique, 2021 xxxix

Table des matières vii
1.1 Projection de la part de la main-d’œuvre mondiale, par continent, en 2025, 2050 et 2100 3 1.2 Utilisation de certaines technologies agricoles, par région, 2015 6 1.3 Cadre conceptuel pour l’analyse politique des impacts des TN sur la croissance de l’emploi et des revenus 10 1.4 Cadre conceptuel élargi pour l’analyse politique de l’impact des TN sur l’emploi et les revenus à travers le prisme de la fracture numérique 13 1.5 Impacts de la disponibilité de l’internet mobile sur la création d’emplois et le bien-être des ménages au Nigeria et en Tanzanie 16 1.6 Impact de l’outil d’aide à la décision sur les rendements et les bénéfices des riziculteurs nigérians 24 1.7 Disponibilité des réseaux compatibles avec internet (3G et 4G), par région, 2010–2021 25 1.8 Utilisation unique de l’internet mobile 3G+, par région, 2010–2021 26 1.9 Écart entre la couverture et l’utilisation de l’internet mobile en Afrique subsaharienne, 2010–2021 27 1.10 Utilisation d’internet et écarts, par région 28

1.11 Disponibilité et utilisation moyennes de l’internet mobile en Afrique subsaharienne par rapport aux autres régions, par type de technologie, 2010 et 2021

1.12 Écarts d’adoption de l’internet mobile en Afrique subsaharienne, par pays, 2021

2.1

2.2

viii Table des matières
29
30
58
Corrélations entre amélioration de la sophistication technologique et hausse de la productivité des entreprises dans certains pays africains, 2019–2021
africains
comparaison,
59
Corrélations entre l’utilisation de technologies plus sophistiquées et la croissance de la productivité et des emplois dans certains pays
et de
2019–2021
de TN par rapport
non-utilisatrices dans un échantillon de pays d’Afrique subsaharienne,
61
Lien
d’Afrique subsaharienne, 2017–2018 62
Sophistication technologique des entreprises
africains et de comparaison, par grand secteur, 2019–2021 65 2.6 Sophistication technologique des entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille d’entreprise, 2019–2021 67 2.7 Utilisation de TN par des entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille et fonctions générales de l’entreprise, 2019–2021 68 2.8 Utilisation de smartphones et ordinateurs par les entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille d’entreprise, 2019–2021 69 2.9 Utilisation de TN plus sophistiquées dans certains pays africains et de comparaison, 2019–2021 70 2.10 Moyenne d’adoption et d’utilisation des TN par les microentreprises dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par sous-groupe d’âge et de sexe du propriétaire, 2017–2018 71 2.11 Principaux pays d’Afrique subsaharienne affichant une forte densité d’entreprises numériques et d’investissements totaux, 2020 72 2.12 Parts locales et régionales et principaux sous-secteurs régionaux des fournisseurs de solutions numériques en Afrique subsaharienne, 2020 74 2.13 Principales plaques tournantes des entreprises numériques en Afrique, 2020 75 B2.1.1 Croissance du paiement électronique sur les sites en Afrique subsaharienne v. autres régions, 2019–2020 77 2.14 Accélération de l’adoption, de l’utilisation et de l’investissement des entreprises dans les solutions numériques après la pandémie de COVID-19 en Afrique subsaharienne par rapport à des pays de référence, par taille d’entreprise, 2020–2021 79 2.15 Augmentation de l’utilisation et des investissements dans les TN après le début de la pandémie de COVID-19 dans certains pays ASS, par taille d’entreprise, 2020–2021 80 B2.2.1 Évolution du nombre d’utilisateurs moyens mensuels d’applications numériques dans certains pays africains et de référence, avril 2020 à mars 2021 81 2.16 Effets d’une plus grande préparation technologique pré-COVID-19 sur les ventes post-COVID des entreprises, par quintile de sophistication technologique, 2021 82 2.17 Obstacles signalés à l’utilisation de technologies dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par taille d’entreprise, 2019–2021 85
2.3 Améliorations non conditionnelles des performances d’entreprises utilisatrices
aux
2017–2018
2.4
entre l’utilisation de technologies par les microentreprises et l’augmentation de la productivité, des ventes et des emplois dans certains pays
2.5
dans certains pays
Table des matières ix 2.18 Corrélats de l’adoption de smartphones et ordinateurs par les entreprises africaines, 2017–2021 87 2.19 Perception par les entreprises africaines de leur propre usage des technologies par rapport à d’autres entreprises du pays, 2019–2021 90 2.20 Corrélation entre les compétences des travailleurs et des gestionnaires et l’utilisation de meilleures technologies dans certains pays africains, 2019–2021 91 2.21 Corrélation entre les capacités de gestion et les pratiques organisationnelles et l’utilisation de meilleures technologies par les entreprises 92 2.22 Instruments de soutien à la génération et l’adoption de technologies numériques pour les GBF et les SBF 95 B2.4.1 Coordination des mécanismes de soutien complémentaire adaptés aux chaînes de valeur spécifiques 108 3.1 Utilisation d’internet en Afrique subsaharienne et par sous-région, 2000–2020 118 3.2 Couverture, écarts de couverture et écarts d’utilisation de l’internet haut débit sans fil en Afrique subsaharienne, par région, 2020 119 3.3 Utilisation d’internet dans 10 pays d’Afrique subsaharienne, 2008, 2012 et 2018 119 3.4 Corrélation entre le revenu des ménages et l’adoption des services mobiles et de l’internet mobile à haut débit dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par décile de revenu, 2017–2018 120 3.5 Écart d’utilisation de l’internet mobile entre les sexes dans l’ensemble des pays à revenu faible et intermédiaire et par région, 2017–2020 121 3.6 Consommation de données mobiles par habitant, par région, 2018 122 3.7 Corrélation entre l’utilisation d’internet et le RNB par habitant en Afrique subsaharienne et dans le reste du monde, 2019 123 3.8 Probabilité d’ajustement de l’emploi pendant la pandémie de COVID-19 par les entreprises d’Afrique subsaharienne et d’ailleurs (par groupe de revenu), 2020/2021 125 3.9 Changements dans les dépenses des ménages au Kenya et en Sierra Leone pendant ou après l’épidémie de COVID-19 126 3.10 Association des déterminants de l’utilisation d’internet dans certains pays d’Afrique de l’Ouest, 2018/2019 128 3.11 Corrélats de l’adoption d’internet dans neuf pays de l’Afrique subsaharienne, 2017/2018 130 3.12 Obstacles à l’utilisation d’internet dans certains pays de l’Afrique subsaharienne, 2017–2018 131 3.13 Corrélats de l’utilisation de l’internet mobile dans le monde, 2018 132 3.14 Adoption des smartphones par rapport aux téléphones mobiles basiques et accessibilité des prix de l’internet haut débit pour les données uniquement en Afrique et dans le monde 135 3.15 Part des travailleurs employés dans le secteur informel, le secteur formel et dans les ménages, avec et sans l’agriculture, en Afrique et par sexe et sous-région, 2016 142 3.16 Un cadre pour combler l’écart d’adoption des TN et améliorer le bien-être de leurs utilisateurs 143 4.1 Trafic de données mobiles par habitant, par sous-région et par groupe de revenu, Afrique, 2020 154
Corrélation entre le trafic de données mobiles par habitant, 2020, et le PIB, 2018 155
4.2
x Table des matières 4.3 Prix moyens des données et des smartphones, par région, sous-région africaine et groupe de revenu global des pays 156 B4.1.1 Comparaison des prix absolus et implicites des forfaits de données, par fournisseur, dans quelques pays africains, 2021 158 4.4 Vitesse d’internet, qualité du service et rapport moyen coût-vitesse, par région 161 4.5 Corrélation entre la disponibilité et l’utilisation des réseaux mobiles à haut débit, par pays, Afrique, 2022 164 4.6 Effets de la concentration du marché sur l’accessibilité financière et la pénétration de la 3G+4G+5G 166 4.7 Réduction du taux de pauvreté grâce à des politiques simulées visant à accroître la concurrence dans le secteur des télécommunications, dans certains pays d’Afrique subsaharienne, 2015–2018 167 4.8 Importance des contraintes concurrentielles dans les structures de marché de la chaîne de valeur numérique, 2021 168 4.9 Intégration verticale des grandes entreprises de télécommunications actives dans plus d’un segment de la chaîne de valeur numérique, 2021 170 4.10 Parts des opérateurs dans le nombre d’abonnés à la téléphonie mobile et dans les réseaux de télécommunications en fibre optique, par degré de propriété de l’État et par sous-région, Afrique, 2020 171 4.11 Capacité internet internationale, représentée par les câbles sous-marins et les stations d’atterrissage, Afrique subsaharienne, 2021 172 4.12 Alignement de la réglementation relative à l’infrastructure numérique sur les bonnes pratiques internationales, dans certains pays africains, 2020 173 4.13 Concentration moyenne du spectre dans les bandes 700/800 MHz, par région et sous-région africaine, 2020 175 4.14 Alignement de la réglementation des télécommunications sur les bonnes pratiques internationales, dans certains pays africains, 2020 177 4.15 Projection de l’adoption de la téléphonie mobile et d’internet, par scénario politique, Ghana, 2030 178 4.16 Détention de fréquences et qualité de la gestion du spectre, Afrique, 2020 180 4.17 Impact projeté des réductions fiscales sectorielles sur l’adoption de la téléphonie mobile et d’internet au Bénin et en République démocratique du Congo, 2030 183 4.18 Coûts du haut débit mobile universel et couverture rurale potentielle, Afrique et pays sélectionnés 187 4.19 Coût du haut débit universel avec partage des infrastructures, dans quelques pays d’Afrique subsaharienne 188 4.20 Projection de la couverture de l’internet à haut débit, des déficits de couverture, et de l’utilisation dans les scénarios de référence et de réforme des politiques, dans certains pays africains, d’ici 2030 191 4.21 Politiques visant à accroître l’utilisation d’internet, en fonction de la capacité des groupes d’utilisateurs à payer et de leur volonté d’utiliser internet 196 4.22 Résumé des réformes des politiques proposées pour une disponibilité d’internet à un coût abordable 197 4.23 Caractéristiques de l’infrastructure des données, 2020 199 4.24 Réalisation des bonnes pratiques en matière de facilitateurs et de sauvegardes pour l’utilisation et réutilisation des données, dans certains pays africains, 2020 203

4.25 Distance par rapport aux meilleures pratiques de réglementation des données selon les groupes de revenu des pays, Afrique subsaharienne par rapport aux groupes de

TABLES O.1 Principales recommandations pour les politiques visant à faire progresser l’utilisation des technologies numériques pour soutenir la croissance inclusive

Table des matières xi
revenu mondiaux,
204 4.26 Menaces perçues pour les marchés financiers, 2021 206 4.27 Couches du marché numérique régional et résultats visés 208 4.28 Mesures prises au niveau national
faciliter
intégration régionale plus poussée de la connectivité, des données et des marchés numériques 210 4.29 Contribution de l’infrastructure numérique et des données aux résultats écologiques 211
2020
pour
une
xlii 1.1 Écarts de couverture, d’utilisation et d’adoption au Nigeria et au Sénégal, par caractéristique des utilisateurs, 2018/2019 31 1.2 Comparaison des principaux facteurs d’adoption de l’internet mobile, par région sélectionnée 34 2.1 Sophistication technologique moyenne des entreprises dans certains pays d’Afrique et de comparaison, par type de fonction, 2019–2021 64 2.2 Cinq premiers sous-secteurs du numérique, classés par part d’investissement total dans les solutions de productivité B2B, par région, 2020 73 4.1 Résumé des recommandations de politiques et effets simulés des mesures sélectionnées 213 4A.1 Chaîne de valeur numérique simplifiée et caractéristiques du marché, par sous-région, Afrique, 2020 215
de l’emploi

Avant-propos

Avec l’augmentation constante de la population africaine, la création d’avantage d’emplois de qualité pour les jeunes sera essentielle à la réduction de la pauvreté et à la prospérité partagée. Ce rapport, intitulé Afrique numérique : Transformation technologique pour l’emploi, plaide pour placer les technologies numériques au cœur d’une stratégie en faveur de la creation d’emplois de qualité sur le continent.

L’aperçu des défis actuels présenté dans le rapport établit que, bien que la disponibilité de l’internet mobile ait augmenté en Afrique au cours des dernières années, tant l’infrastructure que la qualité des services internet disponibles restent en retard par rapport à ceux des autres régions. Les disparités dans la disponibilité de services numériques de qualité restent un problème dans tous les pays, en particulier dans les zones rurales, éloignées et pauvres.

En outre, l’Afrique est à la traîne des autres régions en ce qui concerne l’utilisation des services internet. Alors qu’en moyenne, 84 % de la population des pays d’Afrique subsaharienne vivent dans des zones où un niveau de qualité minimal des services internet mobiles 3G ou 4G est disponible, seuls 22 % d’entre eux l’utilisaient effectivement à la fin de 2021.

L’absence d’un acces abordable explique en partie cet important écart d’utilisation. Quelque 40 % des Africains vivent en dessous du seuil mondial d’extrême pauvreté, et même les forfaits de données mobiles de base peuvent représenter environ un tiers de leurs revenus. Les petites et moyennes entreprises africaines sont également confrontées à des plans de données plus coûteux que leurs homologues d’autres régions.

La résolution de ces contraintes produira des dividendes majeures pour le développement. Le rapport présente des preuves solides que la disponibilité d’internet peut augmenter les emplois et réduire la pauvreté. En outre, les nouvelles données empiriques fournies sur le Nigeria et la Tanzanie viennent s’ajouter à la littérature de plus en plus fournie traitant de l’impact direct de la disponibilité de l’internet mobile (couverture 3G ou 4G) sur l’emploi et le bien-être.

Le nouveau cadre conceptuel de ce rapport se concentre sur les politiques accordant la priorité aux outils numériques destinés à un usage productif, pour générer des retombées inclusives et liées à l’emploi tout en élargissant la couverture d’un internet à haut débit de meilleure qualité. Ces outils numériques peuvent faire naître une plus forte demande permettant, à son tour, d’accroître les investissements dans des technologies numériques et complémentaires de meilleure qualité. L’innovation est essentielle pour attirer les personnes moins qualifiées et stimuler leurs possibilités de générer des revenus plus élevés.

Les politiques stratégiques sont essentielles pour encourager l’utilisation des technologies numériques. Des interventions peuvent augmenter la competition parmis les fournisseurs afin de faire baisser les coûts, effectuer des investissements publics complémentaires et soutenir des programmes de crédit et de soutien de la demande pour surmonter les obstacles à l’accessibilité financière et permettre une connectivité internet de

xiii

qualité dans les zones mal desservies ou éloignées. Des politiques de données spécifiques sont également nécessaires pour permettre une plus grande disponibilité d’applications pertinentes et renforcer la confiance dans les services numériques. Le rapport recommande également de mettre l’accent sur le développement d’applications plus appropriées et plus accessibles, aidant les cadres et les travailleurs peu qualifiés à apprendre tout en travaillant.

La technologie numérique est un ingrédient absolument utile à la transformation économique, et elle joue un rôle dans la résolution de multiples défis, allant de l’éducation à l’énergie. Comme le montre ce rapport, il est impératif que les décideurs politiques augmentent la disponibilité et l’utilisation de services numériques de qualité à travers l’Afrique pour améliorer la vie de ses citoyens et libérer l’aptitude du continent à atteindre un développement inclusif.

Guangzhe Chen

Vice-président, Infrastructure

Banque mondiale

Ousmane Diagana

Vice-président régional pour l’Afrique occidentale et centrale

Banque mondiale

Victoria Kwakwa

Vice-présidente régionale pour l’Afrique orientale et australe Banque mondiale

xiv Avant-propos

Remerciements

Afrique numérique : Transformation technologique pour l’emploi est dédié au professeur émérite de l’Université de Princeton Robert (Bobby) Willig, en mémoire de sa passion et de son excellence à développer et enseigner la microéconomie dans le but d’améliorer les politiques publiques en matière du bien-être social. Son travail a profondément influencé l’orientation de cet ouvrage sur la productivité induite par l’innovation comme levier de croissance inclusive des emplois, soutenue par la concurrence dans les marchés d’infrastructures et l’entrepreneuriat local.

Ce rapport a été rédigé pour soutenir l’Initiative pour l’économie numérique en Afrique (DE4A) de la Banque mondiale. Il est le fruit d’une collaboration des équipes de la Banque mondiale au sein des vice-présidences Afrique, Infrastructure, et Croissance équitable, Finance et Institutions, sous la houlette du bureau de l’économiste en chef de la région Afrique et du bureau de l’économiste en chef de la vice-présidence Infrastructure. Sa rédaction a été codirigée par Tania Begazo, Moussa P. Blimpo et Mark A. Dutz.

Les principaux auteurs sont :

• Pour les chapitres 1 et 2  : Mark Dutz, avec les contributions aux recherches initiales pour l’Afrique de Carlos Rodríguez-Castelán et Takaaki Masaki sur les effets de la connectivité numérique sur le bien-être des ménages, de Xavier Cirera et Marcio Cruz sur l’adoption des technologies numériques par les entreprises, d’İzak Atiyas sur la disponibilité et l’utilisation de l’internet mobile ainsi que l’adoption des technologies numériques par les microentreprises, de César Calderón et Catalina Cantú sur les effets de la transformation numérique sur la croissance et le recul de la pauvreté, de Georges Houngbonon, Justice Mensah et Nouhoum Traoré sur les effets de la disponibilité des infrastructures numériques sur l’entreprenariat et l’investissement, de Juni Zhu sur l’analyse des activités numériques, et de Clara Stinshoff sur l’analyse des données d’Apptopia ;

• Pour le chapitre 3 : Moussa Blimpo, avec les contributions de Ramaele Moshoeshoe et le soutien d’Henry Aviomoh et de Tchapo Gbandi ; et

• Pour le chapitre 4 : Tania Begazo, avec les contributions de Clara Stinshoff, Estefania Vergara-Cobos, Xavier Decoster et Tim Kelly, ainsi que les recherches initiales d’Edward Oughton, Genaro Cruz et Kalvin Bahia sur les données géospatiales et l’internet haut débit en Afrique.

Les auteurs apprécient particulièrement la diversité des travaux de recherche élaborés pour cet ouvrage et cités tout au long de celui-ci.

Les travaux ont débuté par un atelier interne sur la réglementation des infrastructures numériques régionales en Afrique, qui s’est tenu à la Banque mondiale le 28 mars 2019 avec la participation de Penny Goldberg, de Paul Klemperer et du regretté Robert Willig.

xv

L’ouvrage a été enrichi de l’éclairage et des conseils précieux de Simon Andrews, Haroon Bhorat, Pablo Fajnzylber, Mary Hallward-Driemeier, Daniel Lederman, Aliou Maiga et Deepak Mishra, qui étaient tous présents lors des réunions de lancement et de prise de décision de ce livre. L’équipe a également pris en compte les avis des membres du comité consultatif sur le programme de recherche qui comptent notamment Daniel Björkegren, Ibrahim Elbadawi, Avi Goldfarb, Jonas Hjort, Ayhan Kose, Njuguna Ndung’u, Yaw Nyarko et Davide Strusani. L’équipe leur est reconnaissante pour leurs suggestions utiles.

Enfin, ce rapport phare a été rédigé sous la direction générale d’Albert Zeufack et de Vivien Foster, avec les contributions d’Andrew Dabalen. L’équipe leur est également reconnaissante des conseils généraux adressés par Hafez M. H. Ghanem, Riccardo Puliti, Boutheina Guermazi, Christine Qiang, Michel Rogy et Isabel Neto.

Merci à Beatrice Berman, Flore Martinant de Preneuf, Kelly Alderson et Breen Byrnes pour leurs merveilleux supports en matière de communication. Merci à Justice Mensah qui a aidé à superviser la finalisation de l’ouvrage depuis le bureau de l’économiste en chef pour la région Afrique. Merci à Nora FitzGerald, Mary Anderson et Nora Mara pour leur précieuse aide éditoriale. Merci à l’équipe de publication officielle de la Banque mondiale, le rédacteur en chef Mark McClure, la réviseuse Jewel McFadden et le coordinateur de l’impression Orlando Mota.

xvi Remerciements

À propos des auteurs

Tania Begazo est économiste senior au sein de l’Unité marchés et technologie du Groupe du pôle mondial d’expertise Commerce, investissement et compétitivité de la Banque mondiale. Elle dirige des initiatives analytiques et fournit des conseils techniques sur la politique de concurrence. Avant cela, dans le cadre du pôle mondial d’expertise du développement numérique, elle a supervisé d’importantes initiatives de politique économique et de recherche liées à l’infrastructure et à la politique numériques, destinées à éclairer la réflexion, la stratégie d’entreprise et les engagements opérationnels avec les clients, avec un accent sur l’Afrique. Elle a dirigé la diffusion de connaissances sur le développement numérique et contribué à la formulation et à la mise en œuvre de projets nationaux ciblant des réformes dans le secteur numérique, en s’appuyant sur la collaboration au sein du Groupe de la Banque mondiale et avec des partenaires extérieurs. Précédemment, elle a été la responsable mondiale de l’équipe chargée des marchés et de la politique de concurrence au sein du Groupe de la Banque mondiale, supervisant le portefeuille de la politique de concurrence couvrant plus de 60 pays et les domaines clés pour le leadership intellectuel et les partenariats externes. Elle a également travaillé pour l’Union internationale des télécommunications, APOYO Consultoría, et le régulateur péruvien des télécommunications (Osiptel). Elle est titulaire d’une maîtrise d’administration publique dans le développement international de l’université de Harvard.

Moussa P. Blimpo est professeur adjoint en inégalités économiques et sociétés à la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’Université de Toronto. Avant cela, il était économiste principal au Bureau de l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Afrique. Il est avant tout un économiste appliqué, principalement intéressé par diverses questions de recherche et de politiques dans les économies à revenu faible ou intermédiaire, en particulier en Afrique. Avant de rejoindre la Banque mondiale, il a été pendant trois ans professeur adjoint d’économie et d’études internationales à l’université d’Oklahoma. Il fut chercheur principal dans le Programme d’innovation énergétique et climatique en Afrique de Clean Air Task Force, chercheur affilie au Hub Energy for Growth, et a été le directeur fondateur du Centre de recherche et de sondages d’opinion, un groupe de réflexion du Togo qu’il a dirigé de 2011 à 2015. Il est titulaire d’un doctorat en économie de l’université de New York et a passé deux ans comme chercheur postdoctoral à l’Institut de recherche sur les politiques économiques de l’université de Stanford.

Mark A. Dutz est consultant au Département de recherche sur les politiques économiques de la Société financière internationale du Groupe de la Banque mondiale. Il contribue aux travaux sur la croissance de la productivité et son interaction avec la réduction de la pauvreté et la prospérité partagée. Il travaille à la Banque mondiale depuis 1990 et a acquis une expérience dans toutes les régions et au Bureau de

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l’économiste en chef ainsi que, plus récemment, comme économiste principal au Bureau de l'économiste en chef pour l'Afrique. Il a également travaillé comme consultant principal chez Compass Lexecon LLC, comme conseiller principal du ministre des Affaires économiques et du Trésor de la Turquie, comme économiste principal au Bureau de l’économiste en chef de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, et comme consultant auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques, de l’Organisation mondiale du commerce, de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, et des Réseaux de centres d’excellence du Canada. Il a publié des articles de revues et des livres sur la microéconomie appliquée, notamment sur la concurrence, l’innovation, l’adoption des technologies numériques, la productivité, le changement climatique et les questions d’investissement et de commerce, ainsi que sur leurs liens avec la croissance et l’inclusion. Il a également enseigné à l’université de Princeton, dont il est titulaire d’un doctorat en économie et d’une maîtrise en affaires publiques.

xviii À propos des auteurs

Principaux messages

La promesse de la transformation technologique : plus de main-d’œuvre en Afrique

Les technologies numériques (TN) sont apparues comme un élément essentiel d’une stratégie en faveur de la creation des emplois de qualite dans les pays africains. Afrique numérique : transformation technologique pour l’emploi présente les meilleures preuves disponibles des effets transformateurs des TN – montrant, par exemple, que l’utilisation d’internet augmente considérablement les emplois inclusifs sur le continent, dont la main-d’œuvre devrait devenir la plus nombreuse de toutes les régions du monde d’ici 2100.

La robuste analyse du rapport propose des stratégies à adopter pour tirer parti de ces preuves. Par exemple, là où un internet de qualité (3G ou 4G) était disponible depuis au moins trois ans, la participation à la population active a augmenté de 3 points de pourcentage au Nigeria et de 8 points en Tanzanie. En outre, les taux de pauvreté ont diminué de 7 points de pourcentage dans chacun de ces pays. Ces impacts sur le bien-être étaient plus élevés parmi les ménages les plus pauvres et les moins instruits.

En mettant en évidence de tels résultats, le rapport éclaire les politiques et les programmes d’adoption de la numérisation et des technologies complémentaires que les États africains peuvent mettre en œuvre pour obtenir un impact inclusif, à savoir des emplois générant une croissance des revenus pour tous, et en particulier une croissance plus rapide du revenu par habitant pour les 40 % les plus pauvres de la population de chaque pays, ainsi que pour les femmes et, plus généralement, pour les travailleurs peu qualifiés. Même s’il est particulièrement destiné aux conseillers techniques contribuant aux politiques publiques en faveur de la transformation économique et de la croissance en Afrique, le rapport devrait également intéresser tous les Africains. Les bénéficiaires faisant partie des pouvoirs publics comprennent les ministères et organismes de réglementation chargés de l’information et des communications, des finances, de l’industrie (agriculture, fabrication et services), de la concurrence, de la technologie et de l’innovation, ainsi que de l’emploi et de la réduction de la pauvreté.

Défis et fractures numériques de l’Afrique

Le principal défi pour l’Afrique est sa faible utilisation productive des TN. Tant les entreprises que les ménages doivent avoir une plus grande capacité de paiement et une plus grande volonté d’utiliser ces technologies de manière productive, comme le montrent les constatations suivantes :

• En moyenne, 84 % de la population des pays d’Afrique subsaharienne vivent dans des zones où des services internet mobiles sont disponibles, mais seuls 22 % les utilisaient à la fin de 2021. Ce taux d’utilisation est le plus faible au monde.

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• La numérisation des entreprises est également faible, et les forfaits de données destinés aux petites et moyennes entreprises africaines sont plus chers que dans les autres régions, tandis que 70 % des microentreprises interrogées ne perçoivent pas la nécessité d’utiliser les technologies liées à internet.

• En Afrique, 40 % de la population vit en dessous du seuil mondial d’extrême pauvreté, ce qui signifie que le coût des forfaits de données mobiles, même de base, représente environ un tiers de leurs revenus. Seuls quelque 5 % des ménages extrêmement pauvres sont connectés à internet.

• Le retard de l’Afrique en matière d’infrastructure internet et de qualité de service restreint la volonté des utilisateurs potentiels d’utiliser les TN. Bien que la disponibilité de l’internet mobile ait augmenté dans la région au cours des dernières années, elle reste à la traîne par rapport aux autres régions du monde, notamment en ce qui concerne la qualité des services numériques, qui doit être soutenue par une infrastructure fiable et résiliente.

Politiques stimulant l’utilisation de TN pour des emplois plus nombreux et de qualité

L’Afrique a besoin de politiques encourageant avec plus de vigueur l’utilisation des technologies numériques et complémentaires, en particulier de technologies a prix abordables, attrayantes et adaptées au context soutenant des emplois productifs et inclusifs. Ces politiques doivent cibler la capacité de tous les utilisateurs potentiels à payer pour ces technologies ainsi que leur volonté de les utiliser de manière productive. Comme détaillé ci-après, les politiques visant la capacité de payer devraient porter sur l’accessibilité financière d’internet, la disponibilité d’infrastructures supplémentaires, une infrastructure de données adéquate, et la disponibilité à un prix abordable des technologies complémentaires. Les politiques en faveur d’une plus grande volonté d’utilisation devraient se concentrer sur le développement d’applications plus attrayantes et sur la sensibilisation et l’éducation nécessaires à une adoption productive des TN. Cela comprend notamment des politiques d’innovation, des politiques et réglementations en matière de données, des programmes de soutien des capacités, et des stratégies nationales pour une utilisation productive des TN.

• Les politiques d’accessibilité financière d’internet comprennent des réglementations efficaces favorables à la concurrence pour réduire les coûts d’investissement, notamment des règles concernant l’octroi de licences et la domination du marché, l’accès et le partage des infrastructures, ainsi que la disponibilité et l’utilisation du spectre, idéalement à travers des marchés continentaux plus intégrés. Les réglementations visant à réduire les coûts d’exploitation comprennent des règles sur l’accès aux infrastructures essentielles contrôlées par des entreprises publiques, l’exploitation de réseaux en fibre optique à accès ouvert, et l’élimination progressive des droits d’accise.

• Les politiques visant à améliorer la qualité d’internet partout et à assurer sa disponibilité dans les zones non commercialement viables après la mise en œuvre des réformes réglementaires nécessitent des interventions ciblées. Des mesures d’incitation et de financement axées sur la demande (à l’aide de fonds dédiés, d’obligations sur les opérateurs et de fonds de service universels) peuvent stimuler l’utilisation, améliorer la qualité du service et soutenir le développement d’infrastructures résistantes au changement climatique.

xx Principaux messages

• Les politiques visant une disponibilité des infrastructures de données à un prix abordable comprennent des règles favorables à la concurrence pour la mise à niveau des points d’échange internet (IXP) susceptibles de devenir des centres de données régionaux et des installations d’informatique en nuage, afin de contribuer à réduire les coûts. La connectivité numérique transfrontalière et les marchés de données ont impérativement besoin d’une intégration régionale efficace pour réaliser des économies d’échelle et pour développer et moderniser les infrastructures de données.

• Les politiques visant à assurer un accès à un prix abordable aux technologies analogiques complémentaires nécessitent des interventions plus larges. L’amélioration des systèmes d’électricité, de transport et d’agriculture (tracteurs et irrigation) permettrait d’accroître le potentiel de génération de revenus de l’utilisation des TN et de renforcer la capacité de paiement des utilisateurs potentiels.

• Les politiques d’innovation peuvent réorienter le développement des technologies vers la production et la diffusion à large échelle de TN adaptées aux contextes. Pour permettre aux entreprises et aux ménages d’utiliser les TN et d’apprendre en travaillant, l’Afrique doit fournir des applications sophistiquées, inclusives et attrayantes utilisant des images sur écran tactile, ainsi que la voix et la vidéo dans des langues parlées par les utilisateurs potentiels. Le développement nécessite des investissements publics-privés dans des biens publics, tels que des adresses numériques disponibles à l’échelle nationale, des registres fonciers géolocalisés, et des cartes météorologiques locales, ainsi que des biens publics spécifiques aux chaînes de valeur. Des marchés continentaux plus intégrés permettraient aux entrepreneurs de concevoir et diffuser de manière rentable des applications attrayantes et a prix abordables, améliorant les revenus de la population.

• Des politiques de données sont nécessaires pour à la fois faciliter et protéger l’utilisation et réutilisation des données, afin de garantir le développement de nouvelles TN attrayantes et axées sur les données, dont l’utilisation présente un niveau de confiance approprié.

• Des programmes de soutien des capacités visant à améliorer l’utilisation productive des TN disponibles doivent être institutionnalisés pour les micros, petites et moyennes entreprises ainsi que pour les ménages. Ces programmes comprennent des services de conseil aux entreprises, des services d’information et de mise à niveau technologiques, et une formation des gestionnaires et des travailleurs, ainsi que des investissements à long terme dans un enseignement secondaire et supérieur de qualité.

• Des stratégies nationales sont essentielles pour soutenir la familiarisation avec les TN et leur utilisation en vue d’augmenter les revenus. Elles peuvent inclure des investissements dans des installations d’accès commun dans des cafés internet, des écoles locales ou des centres communautaires, en particulier pour les microentrepreneurs.

Principaux messages xxi

Abrégé

Impératif pour l’Afrique : des meilleures technologies pour de meilleurs emplois

L'Afrique a un besoin urgent de création d'emplois de qualité pour absorber sa main d'oeuvre jeune et croissante. Un environnement des affaires propice à la création d’emplois permettant un apprentissage productif est nécessaire pour soutenir une croissance des revenus au fil du temps.

Les défis en matière d’emploi et de technologie sont immenses et urgents. La part du continent dans la main-d’œuvre mondiale deviendra la plus importante d’ici au XXIIe siècle, passant de 16 % en 2025 à plus de 41 % en 2100. Plus de 23 millions d’Africains subsahariens de 15 à 64 ans rejoignent chaque année la population active, soit près de 2 millions de personnes par mois. Ce flux annuel de travailleurs devrait grimper à plus de 33 millions d’ici 2050 (ONU DAES, 2022). Il est donc impératif de créer de bons emplois pour ces millions de jeunes entrants sur le marché du travail et de meilleurs emplois pour les travailleurs actuels. Une plus large adoption de technologies améliorées et adéquates est une exigence essentielle et sous-estimée pour atteindre cet objectif. Le continent a besoin de meilleurs technologies pour produire plus efficacement ce dont les Africains ont besoin et à des prix à leur portée.

L’Afrique a le potentiel de générer plus d’emplois de qualité grâce à une plus large adoption de technologies permettant de produire à plus grande échelle et donc de générer de bons emplois dans des entreprises moyennes et grandes en expansion, des startups entrepreneuriales et des microentreprises informelles. Les technologies productives sont toutefois souvent conçues dans des pays à revenu élevé pour être utilisées par des travailleurs plus qualifiés ou pour remplacer des tâches effectuées par des personnes afin de réduire les besoins en main-d’œuvre. L’adoption de ces technologies en Afrique peut rendre les grandes entreprises locales plus productives et compétitives, mais génératrices de peu d’emplois supplémentaires. Les petites entreprises utilisent rarement ces technologies avancées, avec une productivité et une compétitivité plus faibles, et des emplois trop peu rémunérés. Et ces technologies ne conviennent souvent pas à une utilisation plus productive par les propriétaires, les gestionnaires et les travailleurs peu qualifiés des pays africains.

Il existe deux façons de combler le fossé entre les technologies conçues pour être utilisées dans les économies à revenu élevé et celles nécessaires dans les pays à revenu faible et intermédiaire, en particulier africain. La stratégie conventionnelle consiste à investir dans l’amélioration à plus ou moins long terme des compétences pour les amener au niveau pour lequel ces technologies ont été conçues. L’alternative est que les entrepreneurs conçoivent des technologies – nécessitant souvent des modifications pointues des produits existants – adaptées aux niveaux de compétences et aux besoins actuels, en veillant à ce qu’elles soient attrayantes et faciles à utiliser, augmentent la main-d’œuvre et soutiennent l’apprentissage continu ainsi qu’une plus grande productivité des travailleurs.

xxiii

Les économies africaines ont besoin d’une transformation technologique entraînant à la fois un apprentissage productif et une croissance de l’emploi. Le défi consiste à produire et à promouvoir l’utilisation élargie de technologies a prix abordables, attrayantes et adaptées aux compétences soutenant des emplois plus productifs et inclusifs, c’est-àdire, des emplois générant une croissance des revenus pour tous, y compris une croissance plus rapide du revenu par habitant pour les 40 % les plus pauvres de la population de chaque pays. Heureusement, la dynamique démographique de l’Afrique peut influer positivement sur l’utilisation des nouvelles technologies. Un fort potentiel réside dans la nombreuse et croissante population jeune du continent, où se retrouvent des entrepreneurs, gestionnaires et travailleurs férus de technologie et susceptibles de générer et utiliser de nouvelles technologies numériques et complémentaires. En utilisant de meilleures technologies, les Africains peuvent produire plus de biens et services destinés à la consommation sur les marchés locaux et à l’exportation, générant ainsi plus d’emplois de qualité pour les Africains.

Contributions du Rapport sur l’Afrique numérique

Nouvelles analyses pour soutenir les stratégies de croissance de l’emploi

Cet abrégé et le rapport complet fournissent de nouvelles analyses pour soutenir les efforts accrus déployés par les pouvoirs publics et le secteur privé pour stimuler une croissance de l’emploi plus inclusive avec des technologies appropriées et réduire la fracture numérique actuelle. Ces constatations peuvent éclairer la mise en œuvre de la Stratégie de l’Union africaine pour la transformation numérique de l’Afrique (2020-2030) (UA, 2020) et de l’initiative Économie numérique pour l’Afrique.1

L’abrégé résume également l’examen diagnostique des tendances et des moteurs actuels de la disponibilité des infrastructures numériques et des données ainsi que de l’utilisation des technologies numériques (TN) en Afrique. Au sens large, les TN comprennent non seulement l’infrastructure numérique et des données, l’internet haut débit, les smartphones, les tablettes et les ordinateurs, mais également un large éventail de solutions numériques plus spécialisées améliorant la productivité, allant des communications, de la mise à niveau de la gestion et de la formation des travailleurs jusqu’à la passation des marchés publiques, la production, le marketing, la logistique, le financement et l’assurance.

Les TN permettent des gains de productivité et une croissance de l’emploi dans l’ensemble de l’économie en catalysant l’adoption et l’utilisation de technologies complémentaires, dont beaucoup sont inaccessibles sans une infrastructure numérique et des données. En général, tirer parti des technologies de l’internet des objets nécessite des investissements à la fois dans l’« internet » et dans les « objets ». Dans le secteur agricole, par exemple, l’agriculture de précision nécessite, certes, une couverture internet, mais avant tout des tracteurs et des systèmes d’irrigation qui peuvent ensuite être équipés de capteurs, ainsi que des smartphones pour accéder aux prévisions météorologiques et télécharger des images de maladies végétales inhabituelles. Des applications appropriées, dotées d’interfaces vidéo ou vocales, permettent aux agriculteurs de s’intégrer dans les chaînes de valeur formelles, d’apprendre des fournisseurs de semences en amont et des acheteurs en aval, et d’avoir un meilleur accès au financement et aux marchés.

Les technologies complémentaires comprennent également des infrastructures essentielles pour des services tels que l’électricité, le transport et la logistique. Par conséquent, même si le rapport se concentre largement sur la fourniture et l’adoption de l’internet à haut débit, il doit être considéré comme un point d’entrée ou une passerelle vers une

xxiv Abrégé

discussion plus large du rôle de l’adoption des technologies – ou de son absence – dans la capacité des économies africaines à relever leurs défis de la création d’emplois.

Un nouveau cadre conceptuel pour les orientations politiques

Le rapport apporte des éléments de réponse à trois grandes questions de politiques :

• Quels sont les effets de l’infrastructure numérique et des données, ainsi que de l’utilisation des TN sur la productivité des entreprises, les emplois et le bien-être des ménages ?

• Quel est le degré de disponibilité des infrastructures numériques et des données et d’utilisation des technologies numériques et complémentaires, et quels sont les principaux obstacles à leur utilisation productive plus large et plus intensive par les entreprises et les ménages ?

• Quels sont les domaines clés où des interventions de politiques et réglementaires pourraient être mises en œuvre pour renforcer la capacité des consommateurs à payer et leur volonté d’utiliser les TN à des fins productives ?

Le cadre conceptuel du rapport jette les bases de cette analyse des politiques, soulignant que l’impact des TN sur la croissance inclusive de l’emploi dépend de deux facteurs : la capacité à payer des utilisateurs potentiels et leur volonté d’utiliser les TN (figure O.1). Premièrement, une condition préalable à une croissance inclusive de l’emploi est que les infrastructures numériques et des données soient disponibles à des coûts

Bases pour la transformation technologique

Facteurs numériques

• Connectivité et infrastructure des données

• Compétences et capacités

• Entreprises

• Finances

• Plateformes publiques

Technologies analogues et plus vertes (électricité, transport)

Entreprises

Individus ou ménages

Pouvoirs publics

Réduction nette des coûts ou des frictions et augmentation de la productivité (recherche, réplication, transport, suivi et vérification)

Emplois et revenus du travail

Entrepreneuriat et revenu du capital

Prix plus bas, plus grande variété et surplus du consommateur

Système de transfert de revenus

Gains non monétaires

Impacts dans l’ensemble de l’économie : croissance plus rapide et plus inclusive de l’emploi, réduction de la pauvreté, autres avantages sociaux

Politiques requises

Capacité à payer pour les TN : politiques de disponibilité à un prix abordable

Volonté d’utiliser les TN : politiques d’attractivité et de capacité

Abrégé xxv
Disponibilité
Utilisation productive des TN Impacts inclusifs
TN
des TN
des
+
FIGURE O.1 Cadre conceptuel pour l’analyse politique des impacts des TN sur la croissance de l’emploi et des revenus Note : Le texte en gras indique les principaux axes et thèmes de ce rapport, en mettant l’accent sur le côté production de l’économie (entreprises et travailleurs). TN = technologies numériques.

accessibles. Pour ce faire, y compris pour l’internet haut débit, l’électricité et les infrastructures de transport doivent l’être également. Deuxièmement, la croissance inclusive de l’emploi grâce aux TN nécessite la volonté de toutes les entreprises et de tous les individus d’utiliser ces technologies, ce qui implique que ces consommateurs trouvent leur utilisation attrayante, comprennent comment les employer, et soient convaincus qu’elles répondent à leurs besoins de productivité avec des opportunités d’apprentissage. Cela requiert, de plus, que les utilisateurs possèdent des compétences suffisantes pour utiliser les TN de manière productive.

Les TN peuvent conduire à une croissance plus rapide de l’emploi, à des emplois plus inclusifs et à une amélioration du bien-être des ménages, principalement grâce a) à des emplois et aux revenus du travail ; et b) à l’entrepreneuriat et aux revenus du capital (figure O.1). Pour le premier de ces canaux, l’utilisation productive des TN permet d’obtenir des emplois de qualité et plus inclusifs, ainsi que des revenus plus élevés pour un plus grand nombre de personnes. Pour le second canal, l’utilisation productive des TN augmente les emplois entrepreneuriaux et les revenus du capital, y compris les bénéfices réalisés, non seulement par les entrepreneurs et les propriétaires de grandes entreprises, mais aussi par les propriétaires de petites entreprises formelles et informelles.

En considérant essentiellement l’utilisation productive et les impacts inclusifs, le cadre conceptuel met en évidence la distinction essentielle entre deux visions de la politique de numérisation. La politique de numérisation traditionnelle accorde la priorité à la disponibilité universelle de l’infrastructure numérique, un point de vue largement orienté vers l’offre. Il souligne le rôle d’internet en tant que technologie à usage général, grâce à laquelle une disponibilité – et sans doute aussi une utilisation – généralisée augmentera la productivité économique globale au fil du temps. Toutefois, lorsque les ressources sont limitées, que les besoins sont considérables dans tous les secteurs, que les revenus sont faibles, et que les pays manquent de taille, cette approche se heurte à des défis majeurs sur le plan financier. Le nouveau cadre conceptuel de ce rapport se concentre plutôt sur une deuxième vision de la politique de numérisation, en accordant la priorité à une utilisation productive produisant des effets d’entraînement importants, inclusifs et liés à l’emploi, tout en élargissant la couverture d’un internet haut débit de qualité. Les innovations sont essentielles dans les technologies capables d’attirer les personnes dotées de moins de compétences numériques et de renforcer leurs capacités à générer des revenus plus élevés. Cette vision nuancée de la politique de numérisation met l’accent sur l’interdépendance entre la demande et l’offre : une plus forte demande d’utilisation productive, avec la capacité de payer pour ces services permettra d’augmenter les investissements dans des services de TN de meilleure qualité.

La transformation technologique : une voie vers une croissance inclusive de la productivité

Deux nouvelles études empiriques entreprises pour le rapport ont ajouté à la base croissante des preuves positives en explorant l’impact direct de la disponibilité de l’internet mobile (couverture de la technologie de communication mobile de troisième génération [3G] ou de quatrième génération [4G]) sur les emplois et le bien-être. Les études examinent les informations géospatiales sur le déploiement des tours internet mobiles au fil du temps, combinées à au moins deux séries de données sur les ménages recueillies sur six à sept ans (Bahia et coll., 2020, à venir). La figure O.2 résume les principaux résultats relatifs à l’emploi et au bien-être (consommation et pauvreté) pour le Nigeria et la Tanzanie.

xxvi Abrégé

FIGURE O.2 Effets de la disponibilité de l’internet mobile sur la création d’emplois et le bien-être des ménages au Nigeria et en Tanzanie

a. Nigeria, 2010-2016a

Participation à la population active Emploi salarié Consommation totale Pauvreté (1,90 USD par jour)

3 ans et plus de couverture 3G/4G

b. Tanzanie, 2008-2013b

Participation à la population active Emploi salarié Consommation totale Pauvreté (fondée sur les besoins essentiels)

3 ans et plus de couverture 3G/4G

Intervalle de conf. (95 %)

Source : Bahia et coll. 2020, à venir.

Note : Les études examinent les informations géospatiales sur le déploiement des tours internet mobile, combinées à trois séries de données sur les ménages recueillies sur sept ans au Nigeria et deux séries sur six ans en Tanzanie. Les estimations de la pauvreté et de la consommation incluent tous les individus ou ménages, tandis que les résultats relatifs au marché du travail ne comprennent que la population en âge de travailler (15 à 64 ans). Les résultats représentent l’évolution en pourcentage des lieux couverts après au moins trois ans d’exposition à un internet de qualité par rapport à ceux n’ayant pas une telle couverture après prise en compte des facteurs de confusion potentiels. La figure montre les estimations ponctuelles de la valeur moyenne de la différence-dans-ladifférence avec des intervalles de confiance de 95 %. 3G = technologie de communication mobile de troisième génération ; 4G = technologie de communication mobile de quatrième génération.

a. Le statut de pauvreté des ménages du Nigeria est calculé sur la base du seuil de pauvreté international de 1,90 USD par jour (en parité de pouvoir d’achat de 2011) et après application de l’indice des prix à la consommation (IPC) pour ajustement à l’inflation spatiale et temporelle.

b. Le statut de pauvreté des ménages de la Tanzanie est calculé sur la base du coût d’acquisition d’une quantité de nourriture suffisante pour fournir une alimentation quotidienne adéquate à une personne (seuil alimentaire) plus le coût de certains produits de première nécessité non alimentaires (composante non alimentaire).

Abrégé xxvii
Estimation
15
ponctuelle
10 5 0 –5 –10 –15
Impact de l’accès 3G /4 G (év olution en pour ce ntage) Impact de la co uverture 3G (évo lution en pour ce ntage) 20 15 10 5 0 –5 –10 –15

La disponibilité d’internet a amélioré les résultats relatifs à l’emploi et au bien-être au Nigeria et en Tanzanie. Au Nigeria, la participation à la population active et l’emploi salarié ont augmenté, respectivement, de 3 points de pourcentage et de 1 point de pourcentage dans les zones ayant trois ans ou plus d’exposition à la disponibilité d’internet par rapport à celles non couvertes, après prise en compte des facteurs de confusion potentiels.2 La consommation totale a augmenté d’environ 9 %, tandis que la proportion de ménages vivant en dessous du seuil d’extrême pauvreté (1,90 USD par personne et par jour) a diminué de 7 % après trois ans. Les ménages les plus pauvres et ceux vivant dans les zones rurales en bénéficient le plus, reflétant peut-être la connectivité internet déjà disponible pour la plupart des ménages urbains au cours de la période d’analyse.

Les estimations de l’emploi en Tanzanie sont tout aussi importantes. Les personnes en âge de travailler (15 à 64 ans) vivant dans des zones où l’internet est disponible ont enregistré des augmentations de 8 points de pourcentage de la participation à la population active et de 4 points de pourcentage de l’emploi salarié après trois ans ou plus d’exposition. La consommation totale par habitant des ménages résidant dans les zones où la 3G est disponible était d’environ 10 % supérieure à celle des zones non couvertes. De plus, la proportion de ménages vivant en dessous du seuil national de pauvreté fondé sur les besoins essentiels a diminué de 7 points de pourcentage.3 Les gains de bien-être étaient plus élevés parmi les ménages dirigés par des femmes, ceux à faible revenu et ceux moins instruits (n’ayant pas terminé l’école primaire). Des gains relatifs plus importants sont observés dans les zones urbaines, reflétant le déploiement plus précoce de la couverture zéro à la 3G au début des années 2010.

D’autres études empiriques mettent en évidence les impacts indirects de la disponibilité d’internet sur l’accès à des emplois de qualité grâce à des effets sur l’amélioration du rapprochement entreprise-travailleur et sur l’accroissement de la productivité des entreprises grâce à l’entrepreneuriat, à l’innovation et à l’investissement direct étranger (IDE). Une étude de fond effectuée pour ce rapport a trouvé des preuves de l’entrepreneuriat induit par l’internet dans 10 pays africains.4 La probabilité qu’un ménage crée une entreprise non agricole est supérieure de 17 points de pourcentage dans les zones où l’internet est disponible. Cette augmentation des activités entrepreneuriales est concentrée dans le secteur des services, vraisemblablement en raison du faible coût d’entrée de la création de nombreuses entreprises liées aux services par rapport à celles de l’agroindustrie et de la fabrication (Houngbonon, Mensah et Traoré, 2022).

La même étude a également trouvé des preuves d’un impact positif de la disponibilité d’internet sur l’innovation : la disponibilité d’internet augmente la probabilité qu’une entreprise se lance dans une innovation des processus et des produits, respectivement, de 20 points et 12 points de pourcentage. L’effet sur l’innovation des processus découle en grande partie de l’adoption des TN pour les fonctions commerciales, telles que les ventes, la distribution et le marketing, et est stimulé par l’existence de compétences numériques au sein de l’entreprise.

Une autre nouvelle étude réalisée pour ce rapport fournit des preuves que la disponibilité d’internet est associée à des augmentations de la probabilité d’IDE de 6 points de pourcentage dans le secteur des services financiers et de 3 points de pourcentage dans celui des services technologiques (Mensah et Traoré, 2022). Le nombre de projets d’IDE dans les services financiers a augmenté de près de 20 % à la suite de l’arrivée des câbles internet sous-marins.

xxviii Abrégé

La disponibilité d’internet élargit également le côté demande de la production et stimule la croissance globale. Les preuves fournies par une étude de fond sur le déploiement des réseaux internet 3G en Éthiopie (Abreha et coll., 2021) suggèrent que la disponibilité d’internet peut stimuler l’emploi en comblant les lacunes d’information entre les acheteurs et les vendeurs. Les entreprises opérant dans des zones où la 3G est disponible ont connu une baisse moyenne de 29 % des marges bénéficiaires, une augmentation de 18 % de la productivité des entreprises et une augmentation de 28 % des emplois. Ceci est interprété comme le résultat d’un accroissement de la concurrence dû au fait que les consommateurs prennent connaissance des informations sur les prix et des alternatives offertes sur les marchés voisins et que les entreprises réagissent à la concurrence accrue et à la compression des marges bénéficiaires en réduisant les coûts, l’amélioration de la productivité permettant d’augmenter la production et de créer des emplois.

Enfin, une autre étude entreprise pour ce rapport indique que la disponibilité d’internet stimule la croissance économique globale, l’expansion de l’emploi étant présumée accompagner l’expansion de la production couplée à une croissance plus rapide. Les données agrégées au niveau des pays montrent que l’augmentation des abonnements à l’internet mobile et de la part des internautes dans la population contribuent à la croissance de la production par travailleur et à la réduction de la pauvreté et des inégalités de revenus (Calderón et Cantú, 2021). L’utilisation d’internet a un effet significatif sur la réduction de la pauvreté, tandis que les connexions mobiles ont un effet significatif sur la réduction des inégalités de revenus.

Transformation numérique en Afrique : défis et écarts

Malgré les bonnes nouvelles concernant les impacts positifs et inclusifs de la disponibilité d’internet sur l’emploi et la pauvreté, l’Afrique souffre d’une utilisation insuffisante. Trop peu de personnes peuvent réellement accéder à ces avantages. Bien que la disponibilité de l’internet mobile ait augmenté, la couverture de l’infrastructure internet et la qualité des services disponibles sont encore à la traîne en Afrique par rapport aux autres régions. Les écarts dans la disponibilité de services numériques de qualité restent un problème dans tous les pays, en particulier dans les zones reculées et plus pauvres.

Cette fracture est aggravée par le large écart d’utilisation en Afrique (Atiyas et Dutz, 2022). Alors qu’en moyenne, 84 % de la population des pays d'Afrique subsaharienne bénéficiaient d’au moins un certain niveau de disponibilité de l’internet mobile 3G et que 63 % disposaient d’un certain niveau de services 4G, seuls 22 % utilisaient les services internet mobiles à la fin de 2021 (figure O.3, panneau a). Cela équivaut à un écart d’utilisation de 62 % en part de la population totale. L’écart d’adoption (utilisateurs d’internet là où l’internet est disponible) est de 74 %, en moyenne dans l'ensemble des pays (figure O.3, panneau b), le taux le plus élevé au monde.

Les récentes augmentations des investissements dans les infrastructures numériques après le début de la pandémie de COVID-19 n’ont pas été accompagnées d’augmentations similaires de l’utilisation. Au lieu de cela, des fractures numériques se sont creusées entre les grandes entreprises formelles et les microentreprises informelles ; entre les entreprises détenues par des hommes jeunes et celles détenues par des femmes plus âgées ; et entre les ménages plus riches, urbains et plus instruits et les ménages plus pauvres, ruraux et moins éduqués.

Abrégé xxix

FIGURE O.3 Écart entre la couverture et l’utilisation de l’internet mobile en Afrique subsaharienne et dans d’autres régions, 2010–2021

a. Disponibilité et utilisation de l’internet mobile en Afrique subsahariennea

b. Écart d’adoption, par régionb

internet mobiles uniques

Afrique subsaharienne

Amérique du Nord

Amérique latine et Caraïbes

Asie de l’Est et Pacifique

Asie du Sud

Europe et Asie centrale

Moyen-Orient et Afrique du Nord

Source : Atiyas et Dutz, 2022, fondé sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA). Note : La figure comprend des données de 2016 à 2021 mises à jour sur la base d’une méthodologie améliorée de calcul des abonnés uniques datant de 2022.

a. La disponibilité de l’internet mobile (couverture 3G+) et son utilisation (abonnés uniques à l’internet mobile) sont exprimées sous forme de moyennes non pondérées des parts en pourcentage de la population totale des différents pays. 3G+ = technologie internet mobile de troisième génération (ou ultérieure).

b. L’écart d’adoption est le pourcentage de personnes vivant dans l’empreinte d’un réseau mobile haut débit, mais n’utilisant pas l’internet mobile. L’Amérique du Nord comprend les Bermudes, le Canada et les États-Unis.

Entreprises : plus d’emplois pour plus de personnes

Pour accroître la disponibilité d’emplois, les entreprises africaines doivent investir pour faire avancer leur frontière technologique, qui semble relativement stagnante. Les entrepreneurs africains et mondiaux doivent également générer davantage de technologies numériques et complémentaires alignées sur le profil de compétences existant et le contexte de production actuel de l’Afrique (tel que les petites exploitations agricoles) et évoluant avec les travailleurs à mesure qu’ils améliorent leurs capacités. De plus, la plupart des entreprises doivent plus intensivement adopter et utiliser les TN et les technologies complémentaires. Ces technologies adaptées au contexte permettraient aux travailleurs, aux gestionnaires et aux propriétaires d’entreprises actuels et futurs d’augmenter leur productivité de manière continue et de générer des revenus plus élevés.

Gains de productivité et d’emplois dus à des technologies sophistiquées

Dans les pays africains, l’utilisation de TN plus sophistiquées et de technologies connexes est associée à une productivité plus élevée pour les entreprises employant au moins cinq employés à plein temps (Cirera, Comin et Cruz, 2022). Les entreprises dont la

xxx Abrégé
90
Part des non-utilisateurs d'internet parmi ceux disposant d'une couverture 3G+ (%) Part de la population (%)
80 70 60 50 40 30 20 10 0 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Couverture
Abonnements
3G+

FIGURE O.4 Association entre l’utilisation de TN plus sophistiquées par les entreprises et la croissance de la productivité et de l’emploi dans certains pays, 2019–2021

a.

b.

Source : Cirera, Comin et Cruz, 2022, fondé sur les données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021. Note : La figure montre les coefficients de régression (cercles) et les intervalles de confiance à 95 % (lignes verticales) des régressions par pays d’un nouvel indice de sophistication technologique reflétant la moyenne des technologies les plus intensivement utilisées dans les fonctions commerciales générales (FCG Int) pour chaque entreprise sur les niveaux de productivité (panneau a) et les changements dans le nombre des travailleurs à plein temps au cours des trois dernières années (panneau b), tenant compte du secteur, de la taille de l’entreprise, et de la région. Les échantillons de pays sont limités aux entreprises employant au moins cinq travailleurs à plein temps. Le Sénégal est le seul pays qui comprend un sous-échantillon représentatif d'entreprises informelles et formelles.

sophistication technologique moyenne est plus élevée ont une productivité moyenne plus élevée, avec des degrés de réactivité variables (figure O.4, panneau a). Fait intéressant, l’association entre l’utilisation de la technologie et la productivité est plus forte pour les entreprises sénégalaises informelles que formelles. Il existe également une association positive entre l’utilisation de technologies plus sophistiquées et la croissance de l’emploi au Sénégal (entreprises formelles) et au Ghana (figure O.4, panneau b).

Les constatations pour les microentreprises montrent une progression positive du nombre de TN plus sophistiquées (figure O.5, barres vertes) associée à des niveaux plus élevés de productivité, de ventes et d’emploi. Les utilisations de six TN fonctionnant avec internet et de trois sans internet (figure O.5, barres bleues) sont les seuls corrélats conditionnels significatifs de niveaux d’emploi plus élevés. Ainsi, l’utilisation d’une plus large gamme de TN plus sophistiquées basées sur des ordinateurs ou des smartphones compatibles avec l’internet est associée à des niveaux d’emploi plus élevés que ceux atteint en utilisant des TN basées uniquement sur des téléphones de deuxième génération (2G).

Malgré ces associations favorables, au Ghana, au Kenya, au Malawi et au Sénégal, l’entreprise africaine moyenne d’au moins cinq employés plein temps est à la traîne dans l’utilisation des ordinateurs par rapport au Brésil et dans l’utilisation des smartphones pour la plupart des groupes de taille d’entreprise. Les entreprises informelles (le Sénégal étant le seul pays disponible ayant des données représentatives au niveau national) sont nettement plus en retard (figure O.6). Les microentreprises sont encore plus à la traîne, avec de larges fractures numériques : seuls 7 % des microentreprises et

Abrégé xxxi
60 Valeur ajoutée par travailleur (USD) 1,0 FCG Int 40 20 0 Brésil 1,3 ViêtNam 2,0 Sénégal(formel) 4,0 Sénégal(informel) 1,4 Malawi 1,9 Ghana 1,2 Kenya
Association
la productivité 40 30 10 0 Évolution de l’emploi en pourcentage 20 0,16 FCG Int 0,15 ViêtNam Brésil 0,10 Sénégal(formel) 0,12 Sénégal(informel) 0,11 Malawi 0,23 Ghana 0,03 Kenya
avec
Association avec la croissance de l’emploi

utilisation d’un téléphone portable 2G

utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

utilisation de la voix pour communiquer avec les fournisseurs

utilisation d’AM pour recevoir les paiements des clients

utilisation d’AM pour payer les fournisseurs

utilisation du téléphone pour les opérations bancaires

utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

utilisation d’un smartphone 3G/4G

utilisation d’un ordinateurb

utilisation d’internet pour mieux comprendre les clients

utilisation d’un téléphone portable 2G

utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

utilisation de la voix pour communiquer avec les fournisseurs

utilisation d’AM pour recevoir les paiements des clients

utilisation d’AM pour payer les fournisseurs

utilisation du téléphone pour les opérations bancaires

utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

utilisation d’un smartphone 3G/4G

utilisation d’un ordinateurb

utilisation d’internet pour mieux comprendre les clients

utilisation d’un logiciel de comptabilitéa

utilisation d’internet pour les opérations bancaires en lignea

utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

utilisation d’AM pour payer les employés

utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

utilisation d’un ordinateurb

utilisation d’internet pour le courrier électronique

utilisation d’un logiciel de comptabilitéa

utilisation d’un logiciel de PDV/de contrôle des stocks

utilisation d’internet pour les opérations bancaires en lignea

utilisation d’internet pour le recrutement

Ordinateurs ou smartphones

connectés à internet requis Seuls les téléphones 2G sont nécessaires

Source : Atiyas et Dutz, 2023, fondé sur les données de l’enquête Research ICT Africa (RIA) 2017–2018.

Note : La figure montre l’association entre l’utilisation moyenne par l’entreprise de certaines technologies numériques (TN) et l’augmentation en pourcentage de la productivité, des ventes et des emplois. Les utilisations commerciales des TN – énumérées dans l’ordre des technologies d’accès simple aux utilisations plus sophistiquées – sont celles pour lesquelles les corrélats conditionnels sont significatifs au moins au niveau de 5 % sur la base des moindres carrés ordinaires (MCO) avec des erreurs standard robustes en utilisant des données non pondérées. Sont, entre autres, pris en compte le fait que l’entreprise a déjà obtenu un prêt, a accès à l’électricité, est dirigée par des entrepreneurs transformationnels, et a des liens avec des fournisseurs en amont ou des acheteurs en aval plus sophistiqués, ainsi que les effets fixes par pays. Les données couvrent 3 325 microentreprises formelles et informelles (l’entreprise médiane étant informelle et indépendante, sans travailleurs à plein temps) dans sept pays africains. Les barres bleues représentent les TN non compatibles avec internet ; les barres vertes représentent les TN compatibles avec internet. AM = argent mobile ; PDV = point de vente ; SMS = service de messages courts ; 2G = technologie de communication mobile de deuxième génération ; 3G = troisième génération ; 4G = quatrième génération.

a. La variable est significative pour les trois résultats de performance : productivité, ventes et emplois.

b. La variable est significative à la fois pour les ventes et les emplois.

3 % des microentreprises détenues par des femmes âgées de plus de 30 ans utilisent un smartphone. La fracture numérique dans l’utilisation de l’ordinateur est encore plus profonde : seuls 2 % des microentreprises appartenant à des femmes jeunes (30 ans ou moins) utilisent un ordinateur, alors que quatre fois plus (8 %) de microentreprises appartenant à des hommes jeunes le font (Atiyas et Dutz, 2023).

xxxii Abrégé
0,59 0,28 0,44 0,47 0,18 0,25 0,20 0,29 0,13 0,43 0,46 0,30 0,44 0,46 0,30 0,22 0,18 0,33 0,47 0,46 0,29 0,29 0,34 0,44 0,27 0,24 0,18 0,29 0,50 0,50 0,32 00,100,20 Augmentationdes points de log 0,300,400,500,60
FIGURE O.5 Association entre l’utilisation des technologies par les microentreprises et l’augmentation de la productivité, des ventes et des emplois, 2017–2018
Pour
Pour les emplois Pour les ventes
la productivité

FIGURE O.6 Utilisation des smartphones et des ordinateurs, par taille d’entreprise, dans quelques pays, 2019–2021

Avoir un smartphone Avoir un ordinateur

Source : Cirera, Comin et Cruz, 2022, fondé sur les données de l’enquête sur l’adoption de la technologie au niveau des entreprises (FAT – Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021.

Note : Les entreprises incluses sont celles employant au moins cinq travailleurs à plein temps. Les « grandes » entreprises comptent minimum 100 employés ; les entreprises « moyennes », de 20 à 99 employés ; et les « petites » entreprises, de 5 à 19 employés.

Facteurs affectant l’utilisation productive des TN

Le principal problème lié aux TN pour les entreprises africaines est la faible utilisation productive. Les principaux facteurs affectant l’utilisation en entreprise de smartphones, ordinateurs et TN plus sophistiqués s’appuyant sur ces technologies d’accès sont liés à la capacité de les payer et à la volonté de les utiliser (figure O.7). Ces facteurs sont relativement semblables dans les grandes entreprises (d’au moins cinq travailleurs) et les microentreprises.

Capacité de payer. La disponibilité des TN à un prix abordable est liée aux prix des services internet de qualité, des technologies d’accès et des applications par rapport aux revenus de l’entreprise, ainsi qu’à l’accès au financement pour aider à payer les TN. Les petites et moyennes entreprises africaines sont confrontées à des prix élevés et manquent d’offres commerciales adéquates en termes de débit et des offres de données proposées. La capacité de payer est également liée à la disponibilité à un prix abordable d’infrastructures complémentaires, en particulier pour une électricité fiable ainsi que des services de transport et de logistique.

L’accessibilité financière est influencée par le fait que les entreprises, qu’elles soient grandes ou micros, ont des prêts ; des informations existent également sur les lignes de crédit avec les fournisseurs dont disposent les microentreprises, un indicateur de leur solvabilité. L’accès au financement, reflété par le fait d’avoir un prêt, est l’un des principaux corrélats de l’utilisation. Les grandes entreprises disposant d’un prêt sont 12 % plus susceptibles que celles qui n’en ont pas d’utiliser des smartphones et 9 % moins susceptibles d’utiliser un téléphone 2G (Cirera, Comin et Cruz, 2022). Les microentreprises

Abrégé xxxiii
69 66 75 74 92 97 50 54 43 25 41 44 26 26 12 64 86 94 61 58 53 63 90 98 73 97 99 70 92 100 90 97 100 15 23 15 96 100 100 100 100 100 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Part des entreprises (%) 100 Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes
Ghana Kenya Malawi Sénégal formel Sénégal (informel) BrésilViêt Nam

FIGURE O.7 Les corrélats de l’adoption des smartphones et des ordinateurs, 2017–2021

a. Les corrélats de l’adoption pour les grandes entreprisesa

Âge de l’entreprise

Formel

Moyennes Grandes

Relation d’affaires avec des multinationales

Prêts pour l’achat de machines

Avoir de l’électricité

Situé dans la capitale

Femme propriétaire

Niveau d’instruction du gestionnaire

Expérience du gestionnaire dans les multinationales

–0,3–0,2–0,10,100,20,3

Âge de l’entreprise

Formel

Moyennes

Grandes

Grandes entreprises comme clients

Avoir un prêt

Avoir une ligne de crédit avec les fournisseurs

Avoir de l’électricité

Localisation urbaine

Femme propriétaire

Niveau d’instruction du gestionnaire

Formation professionnelle

Ordinateur Smartphone Mobile

Sources : Cirera, Comin et Cruz, 2022 ; Atiyas et Dutz, 2023.

b. Les corrélats de l’adoption pour les microentreprisesb

–0,3–0,2–0,10,100,2 0,3

Note : Les résultats rapportés sont des effets marginaux basés sur des régressions probit des caractéristiques des entreprises, prenant en compte les effets fixes des pays. Les barres d’erreur indiquent les intervalles de confiance à 95 %.

a. Fondé sur les données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021. Les « grandes » entreprises sont celles d’au moins cinq employés à plein temps.

b. Fondé sur les données 2017-2018 de Research ICT Africa (RIA). La « microentreprise » médiane est informelle et indépendante et ne compte aucun employé à plein temps.

ayant un prêt sont 18 % plus susceptibles d’utiliser des smartphones et près de 15 % moins susceptibles d’utiliser un téléphone 2G ; elles sont également plus de 9 % plus susceptibles d’utiliser un ordinateur (Atiyas et Dutz, 2023). Avoir de l’électricité et se trouver en zone urbaine sont associés à l’utilisation d’un ordinateur pour les grandes entreprises et à l’utilisation d’un smartphone pour les microentreprises.

Volonté d’utiliser. La volonté d’utiliser les TN est liée à la fois aux capacités des entreprises et à l’attractivité des TN, elle-même liée à la fois à la disponibilité d’informations sur les TN et à la capacité de celles-ci de répondre aux besoins productifs des utilisateurs.

En ce qui concerne les capacités, les compétences (en particulier au niveau managérial dans les grandes entreprises) et la formation professionnelle (dans les microentreprises), elles sont fortement associées à l’utilisation du smartphone et de l’ordinateur (Cirera,

xxxiv Abrégé

Comin et Cruz, 2022 ; Atiyas et Dutz, 2023). Les capacités technologiques de l’entreprise sont également affectées par :

• sa taille, les entreprises employant cinq travailleurs ou plus et les microentreprises plus grandes (par rapport aux autres microentreprises) étant plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs ;

• son âge, les entreprises en activité depuis plus longtemps étant moins susceptibles d’utiliser un smartphone que les entreprises plus jeunes ; et

• son statut de formalité, les entreprises formelles de toute taille étant plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs que les entreprises informelles.

L’attractivité des TN, et l'adoption conséquente des smartphones et des ordinateurs, est probablement motivée par la nécessité d’adopter des TN spécifiques lorsque les grandes entreprises entretiennent des relations d’affaires avec des multinationales et lorsque les microentreprises ont de grandes entreprises comme clients.

Facteurs commerciaux et socioéconomiques. Enfin, des éléments spécifiques de l’environnement des affaires (liés à l’accès au marché et aux incitations liées à la concurrence) et des facteurs socioéconomiques (lorsque les normes et règles sociales rendent difficile la détention des dispositifs d’accès par des femmes) affectent également l’utilisation des TN. Parmi les microentreprises, celles appartenant à des femmes sont moins susceptibles d’utiliser un smartphone ou un ordinateur que celles appartenant à des hommes (Atiyas et Dutz, 2023). Étant donné que la plupart des microentreprises sont détenues et gérées par des travailleurs indépendants sans employés rémunérés à plein temps, cette fracture numérique peut refléter les normes et règles sociales en vigueur qui rendent l’accès au financement et la possession de dispositifs d’accès plus difficiles pour les femmes.

Recommandations politiques publiques

Des politiques publiques et des investissements sont nécessaires pour encourager à la fois la création d’applications attrayantes, en particulier des solutions simples à utiliser et stimulant la productivité des entreprises dont les travailleurs sont peu qualifiés, et leur utilisation par les entreprises, notamment par des investissements dans les capacités. Trois types de recommandations pour les politiques découlent de ces constatations :

• Institutionnaliser la mise à niveau technologique et les programmes de soutien aux capacités des travailleurs et des cadres dirigeants.

• Soutenir les entrepreneurs de start-ups dans le développement de technologies mieux adaptées à l’actuelle et future base d’actifs de l’Afrique, notamment avec des incitations à la création de technologies adaptées aux compétences, une protection des droits de propriété intellectuelle et des réglementations facilitant un développement plus inclusif au niveau de l’emploi de l’apprentissage machine et d’autres formes d’intelligence artificielle.

• Faciliter le financement des entreprises pour la génération et l’utilisation des TN ainsi que des technologies complémentaires. Les politiques de soutien au financement public devraient inclure a) des garanties de crédit partielles ciblées, des subventions de contrepartie et des bons pour l’acquisition de technologies et des capacités nécessaires ;

Abrégé xxxv

et b) une infrastructure de crédit avec un accent sur les bureaux de crédit et les transactions sécurisées ainsi que des mécanismes pour accéder aux données clés pour les notations de crédit.

Ménages : impact inclusif grâce à une utilisation productive

Plusieurs facteurs peuvent expliquer le peu d’utilisation d’internet et la faible intensité d’utilisation par les ménages africains. Les dernières données de sept pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) révèlent que trois facteurs clés sont en corrélation avec une faible adoption (Rodriguez- Castelán et coll., 2021) :

• Disponibilité à un prix abordable, englobant la capacité de payer (influencée par les dépenses des ménages, le prix des services mobiles et la propriété d’actifs) ; l’accès à l’électricité ; et la localisation en milieu urbain ;

• Attractivité des modalités alternatives d’accès à l’internet ;

• Capacités, y compris le niveau d’études supérieures, la maîtrise de la langue française (dans les pays francophones), et le secteur d’emploi, ainsi que les facteurs socioéconomiques.

Contraintes pesant sur la capacité de payer et la volonté d’utiliser De nombreux Africains n’utilisent pas les TN parce que les coûts semblent l’emporter sur les avantages. Deux grands groupes de facteurs sous-tendent les faibles avantages perçus par rapport aux coûts : la capacité de payer pour les TN et la volonté de les utiliser.

La capacité de payer implique la disponibilité de services numériques de qualité ainsi que le prix et l’accessibilité financière des dispositifs d’accès, des forfaits de données et des applications par rapport au pouvoir d’achat. Un forfait couvrant quelques heures d’utilisation quotidienne de base – 1,5 gigaoctet de données sur 30 jours –équivaut à environ un tiers du revenu des 40 % d’Africains vivant en dessous du seuil mondial d’extrême pauvreté (1,90 USD par personne et par jour en parité de pouvoir d’achat de 2017). Les utilisateurs ayant une faible consommation sont confrontés à des prix par unité de données atteignant plus du double de ceux des utilisateurs ayant une forte consommation, ce qui freine l’intensité d’utilisation chez les utilisateurs à faible revenu.

L’attractivité des TN, et donc la volonté de les utiliser, est liée à de multiples facteurs : les utilisateurs ont-ils des informations sur l’existence des TN et la manière de les utiliser ? Les TN satisfont-elles les exigences minimales de vitesse et de latence pour une utilisation efficace ? Répondent-elles aux besoins productifs (et autres) des utilisateurs ? Sont-elles adaptées au niveau de compétence des utilisateurs ? Soulèventelles des problèmes de confiance liés à la protection des données, à la cybercriminalité ou à la surveillance des données ? Les avantages attendus de l’utilisation des TN l’emportent-ils sur les coûts des appareils, des forfaits de données et autres investissements ? En fin de compte, les capacités des membres du ménage – leurs compétences et leur sophistication technologique – affectent également leur capacité à tirer de la valeur des TN.

xxxvi Abrégé

Des politiques visant à élargir l’accès au crédit, de meilleures réglementations, et des réductions de prix induites par le marché peuvent contribuer à améliorer l’accessibilité financière. Des politiques capables d’entraîner le développement de TN faciles à utiliser et d’un contenu renforçant les capacités sont également nécessaires pour répondre aux besoins productifs des ménages, en particulier pauvres, qui sont confrontés à de nombreuses contraintes, notamment des lacunes en matière de compétences et un manque d’informations sur la manière dont l’utilisation d’internet pourrait leur être bénéfique. Fournir des informations aux ménages sur les diverses façons dont les TN peuvent les aider – à l’aide d’associations communautaires, de réunions publiques, d’organisations religieuses et de réseaux sociaux – pourrait contribuer à lever certaines de ces contraintes.

Options des politiques visant une utilisation productive d’internet par les ménages

Étant donné les faibles niveaux de revenu et les fortes inégalités existant en Afrique, une adoption plus large d’internet par les ménages n’est financièrement viable que si elle se traduit par des revenus plus élevés. Les décideurs politiques peuvent jouer un rôle dans la promotion et l’activation des utilisations productives.

La figure O.8 décrit un cadre pour l’accroissement de l’utilisation d’internet, offrant deux approches complémentaires : l'approche 1 considere l’adoption d’internet comme une fin en soi, tandis que l'approche 2 considère l’adoption comme un moyen d’améliorer les revenus et les moyens de subsistance des personnes et d’obtenir un impact économique plus important. L'approche 2 comblerait le deficit d'usage à un rythme plus lent, mais serait plus viable financièrement à long terme. L’objectif est de créer un cycle de renforcement positif où l’utilisation productive d’internet améliore les revenus et accroît ainsi l’utilisation des TN.

FIGURE O.8 Approches des politiques visant à accroître l’adoption inclusive et l’utilisation productive des TN par les ménages

Approche 1 : utilisation d’internet en tant que fin en soi

Écart d’utilisation large et croissant et faible intensité d’utilisation

Approche 2 : utilisation d’internet en tant que

Note : TN = technologies numériques.

Fournir plus d’informations, un contenu attractif, des compétences numériques, une accessibilité financière (subventions, crédit) ; faciliter la mobilisation des réseaux

Lever les obstacles à l’utilisation Utilisation productive

Pilier 1

Identifier les opportunités de gains de productivité grâce aux TN

Pilier 2

Encourager la production TN adéquates

Pilier 3

Regrouper avec des compléments adéquats (ex. électricité, compétences, capital de départ, etc.)

Source : Adapté de Blimpo et Cosgrove-Davies, 2019.

Gains plus élevés

• Accès universel (utilisateurs plus nombreux)

• Intensité d’utilisation plus faible (par rapport à l’approche 2)

• Non soutenable financièrement

• Utilisateurs plus nombreux

• Plus grande intensité d’utilisation

• Plus grande rétroaction dans plus d’utilisation

• Soutenable financièrement

Abrégé xxxvii
moyen
d’atteindre une fin

L’utilisation d’internet en tant qu’objectif final. Dans l'approche 1, les politiques se concentrent essentiellement sur la levée des obstacles symptomatiques à l’utilisation. Les interventions contribuent à atteindre plus rapidement l’objectif d’accès universel, en particulier quand les pays soutiennent l’adoption et l’utilisation avec des subventions importantes.

Avec cette l'approche, une utilisation accrue d’internet entraînerait idéalement une augmentation de la productivité, ce qui peut se produire dans certains ménages. Toutefois, sans la présence de compléments analogiques (tels que l’électricité et les compétences), l’utilisation productive et les rendements encourageant une utilisation ultérieure sont plus faibles. Cette stratégie peut donc être financièrement non soutenable, car elle nécessite un apport soutenu de crédit ou de subventions pour son adoption et son utilisation.

Utilisation d’internet en tant que moyen d’atteindre une fin. Dans l'approche 2, l’utilisation d’internet est considérée comme le moyen d’augmenter les revenus des ménages et de réduire la pauvreté. L’objectif des politiques est d’accroître l’utilisation productive d’internet afin d’augmenter les revenus des ménages, renforçant ainsi la capacité de payer et stimulant davantage l’utilisation d’internet. Cette approche considère l’internet et les TN connexes comme des intrants et des outils permettant la transformation technologique et une amélioration des revenus.

Comme pour de nombreux autres types d’intrants, les TN sont nécessaires, mais non suffisantes, pour générer des revenus. La disponibilité de l’électricité, une éducation et des compétences adéquates, l’accès routier et un financement accessible sont tous des compléments plus ou moins pertinents selon le contexte. (Cette alternative de politiques nécessite des synergies entre au moins trois types d’interventions, représentés par les trois piliers de la figure O.8.)

Ces interventions de politiques devraient accroître l’utilisation productive, qui à son tour augmenterait les revenus des ménages. Avec des revenus plus élevés, les ménages peuvent se permettre d’acheter des smartphones et des données mobiles à haut débit et d’augmenter l’intensité de l’utilisation d’internet.

Infrastructure numérique et des données : réformes des politiques pour accroître la disponibilité et l’utilisation

Deux ensembles de politiques complémentaires et se renforçant mutuellement sont nécessaires pour que les TN soutiennent une croissance inclusive de l’emploi en Afrique : le premier garantit la capacité de payer pour les TN et le second suscite la volonté de les utiliser à des fins productives (comme illustré plus haut dans la figure O.1). Les risques à la baisse comprennent la possible augmentation de la fracture numérique affectant les personnes à faible revenu concernées par l’adoption de technologies plus récentes et incapables de s’ajuster et de s’adapter. L’éventuelle utilisation abusive par les entreprises (protection des données, cybersécurité et protection des consommateurs) et les pouvoirs publics (surveillance et désinformation) doit également être gérée.

Politiques visant à garantir la capacité de payer

Les politiques visant à garantir la capacité de payer de tous les utilisateurs potentiels doivent rechercher l’accessibilité financière d’internet, la disponibilité d’infrastructures supplémentaires, des infrastructures des données adéquates, et la disponibilité à un prix

xxxviii Abrégé

FIGURE O.9 Étendue des contraintes pesant sur la concurrence dans les structures de marché tout au long de la chaîne de valeur numérique, 2021

Couche Vente fixe en gros (fibre)

Connectivité internationale (câbles sousmarins, passerelles) Couche d’infrastructure médiane 21 pays autorisant les ORMV, mais pas d’entrée

d’infrastructure en amont Commerce mobile de gros (itinérance, ORMV, partage) Vente fixe au détail Vente mobile au détail Argent mobile

Couche d’infrastructure

en aval Services numériques

Présence d’EP Services de données et en nuage Plateformes numériques

Plus de 5 000 entreprises numériques basées en Afrique

b. Moins de 5 % des pays sont des monopoles/duopoles = vert, 5 à 20 % des pays = orange, plus de 20 % des pays = rouge.

c. En ce qui concerne les nouvelles entrées, les nouvelles entrées dans moins de 5 % des pays = rouge, dans 5 à 20 % des pays = orange, dans plus de 20 % des pays = vert.

d. Présence d'entreprises publiques dans moins de 10 % des pays = vert, dans 10 à 50 % des pays = orange et dans plus de 50 % des pays = rouge.

abordable de technologies complémentaires. Le gros problème pour résoudre efficacement les questions d’accessibilité est que les structures de marché existantes ne permettent pas encore une concurrence suffisante dans beaucoup de pays africains. Les marchés sont concentrés (figure O.9). Des monopoles et duopoles existent encore dans de nombreux pays africains, y compris sur les principaux marchés goulets d’étranglement tels que la connectivité internationale. Les entreprises publiques (EP) restent importantes dans le secteur et peuvent entraver la concurrence.

De plus, l’intégration verticale des entreprises dominantes en Afrique crée des risques pour la concurrence : 53 entreprises dans 36 pays détiennent au moins 40 % de parts de marché dans le commerce de détail mobile ou la fibre et sont intégrées verticalement dans deux autres segments (Banque mondiale, à paraître).

Abrégé xxxix
AOA AN AOC Monopoles Duopoles Toute l’Afrique EP EAM Concentration (IHH)a Variable de structure du marché Structure du marchéb Nouvelle entrée (2017-2020)c
(majoritaires, minoritaires)d
La réglementation des opérateurs dominants est faible. L’accessibilité financière d’internet nécessite des réglementations efficaces de la concurrence pour réduire les coûts d’investissement, y compris des règles sur l’octroi de licences et la domination du Infrastructure passive (tours)
Source : Banque mondiale, base de donnée des acteurs du marché numérique africain (interne), 2021, basé sur des données issues de différentes sources, dont TeleGeography, Global System for Mobile Communications Association (GSMA), Africa Bandwidth Maps, Afterfibre.org, Policytracker, TowerXchange, PeeringDB, et Xalam Analytics
Note : Les cercles rouges représentent un risque, en moyenne, plus élevé pour la concurrence ; les cercles orange, un risque moyen ; et les cercles verts, un risque plus faible. L’échantillon couvre 54 pays africains pour la vente mobile au détail, 38 pour la vente fixe au détail, 52 pour la fibre, 26 pour les tours de télécommunications, 35 pour les câbles sous-marins, 25 pour les centres de données, et 15 pour l’argent mobile. AN = Afrique du Nord ; AOA = Afrique orientale et australe ; AOC = Afrique de l’Ouest et du Centre ; EAM = État en tant qu’actionnaire minoritaire ; EP = entreprise majoritairement ou entièrement détenue par l’État ; IHH = indice HerfindahlHirschman (mesure de la concentration du marché) ; ORMV = opérateur de réseau mobile virtuel ; — = non disponible.
a. Un marché dont l'IHH est inférieur à 1 500 est considéré comme ayant une structure de marché concurrentielle, il est modérément concentré quand son IHH est compris entre 1 500 et 2 500, et il est fortement concentré quand son IHH est de 2 500 ou plus.

marché, l’accès aux infrastructures et leur partage, ainsi que la disponibilité et l’utilisation du spectre radioélectrique, dans le contexte de marchés continentaux plus intégrés. Des réglementations sont également nécessaires pour réduire les coûts d’exploitation, y compris des règles sur l’accès aux infrastructures essentielles contrôlées par les entreprises publiques, l’exploitation de réseaux en fibre à accès libre, et la minimisation des droits d’accise.

Une analyse empirique de six pays effectuée pour ce rapport montre que les réformes des politiques de réduction des coûts (portant sur le spectre, le partage des infrastructures et la fiscalité) peuvent économiser 10 à 20 % du coût nécessaire pour atteindre une disponibilité quasi universelle, qui se traduirait par plus de 200 millions d’USD d’économies pour les États des pays inclus dans l’analyse (Banque mondiale, 2022). L’augmentation de la concurrence sur le marché peut apporter des avantages supplémentaires et atteindre des niveaux d’utilisation similaires à ceux stimulés par les subventions visant l’offre, comme le montrent les simulations pour le Ghana.

La disponibilité des infrastructures dans les zones qui ne sont pas commercialement viables après la mise en œuvre des réformes réglementaires nécessite des subventions et un financement ciblés (à l’aide de fonds réservés, d’obligations sur les opérateurs, de fonds de service universel ou de solutions alternatives) pour encourager l’accès et le service universels et soutenir un développement résilient au changement climatique. Si les politiques axées sur la demande parvenaient à augmenter à 40 % l’utilisation potentielle de la 4G au-dessus du niveau actuel (moins de 5 %) des zones non couvertes des six pays africains étudiés, l’expansion deviendrait commercialement viable et la disponibilité de la 4G atteindrait le même niveau quasi universel, comme elles le feraient dans le cadre d’une pure subvention à l’offre. Cette constatation souligne l’importance des programmes axés sur la demande, non seulement pour l’augmentation de l’utilisation, mais aussi pour l’extension de la couverture. En outre, la disponibilité à un prix abordable de l’infrastructure des données nécessite des règles transparentes et favorables à la concurrence pour la mise à niveau des points d’échange internet et pour l’accès aux centres de données et à l’informatique en nuage afin de réduire les coûts.

Politiques visant à augmenter la volonté d’utiliser

Des politiques visant l’attractivité et les capacités sont nécessaires pour promouvoir l’utilisation des TN à des fins productives. Cela comprend des stratégies nationales d’utilisation productive des TN, des politiques d’innovation, des politiques et réglementations en matière de données et de programmes de soutien des capacités. La mise en œuvre de ces stratégies adaptées est essentielle pour soutenir la familiarisation avec les TN et leur utilisation ainsi que pour assurer des gains productifs à toutes les entreprises. Ces stratégies peuvent comprendre des investissements dans des installations d’accès commun et des démonstrations dans des cybercafés, des écoles locales ou des centres communautaires, en particulier pour les microentrepreneurs.

Pour que l’utilisation des TN soit inclusive, l’Afrique doit fournir des applications sophistiquées, mais simples à utiliser et attrayantes, utilisant des images sur écran tactile, la voix et des vidéos dans les langues parlées par la population, qui amèneraient les entreprises et les ménages à les vouloir, à les utiliser et à apprendre leur fonctionnement. L’Afrique doit réorienter les technologies vers les différents contextes de ses pays, en particulier vers ses différentes compositions de compétences. À cette fin, la participation des entrepreneurs est nécessaire pour adapter les TN existantes afin de permettre

xl Abrégé

leur utilisation productive et un apprentissage par tous les habitants de la région. Le développement de nouvelles TN par des entrepreneurs privés peut nécessiter des investissements publics-privés préalables dans des biens publics, tels que la disponibilité au niveau national d’adresses numériques, des registres fonciers géomarqués, et une cartographie météorologique locale. Des politiques de données sont nécessaires à la fois comme catalyseurs et comme garanties pour l’utilisation et la réutilisation des données, afin d’assurer le développement de nouvelles TN attrayantes et axées sur les données, ainsi que des niveaux de confiance appropriés dans leur utilisation.

Enfin, des programmes d’appui aux capacités doivent être institutionnalisés pour les micro, petites et moyennes entreprises ainsi que pour les ménages, afin qu’ils sachent comment faire un usage productif des TN disponibles. Ces programmes comprennent des services de conseil aux entreprises, des services d’information et de mise à niveau technologiques et une formation professionnelle des cadres et des travailleurs, ainsi que des investissements à plus long terme dans un enseignement secondaire et supérieur de qualité.

L'importance de la coopération régionale À l’avenir, les pays africains pourraient davantage bénéficier d’une intégration régionale plus poussée et de l’adoption de TN respectueuses de l’environnement pour faire avancer la transformation technologique du continent. L’Union africaine a élaboré et met en œuvre la stratégie de transformation numérique pour l’Afrique (2020-2030) pour stimuler l’utilisation et l’innovation des TN afin de promouvoir l’intégration de l’Afrique (UA, 2020).

La création d’un marché continental unique pour la connectivité et les données nécessitera l’harmonisation et la compatibilité des politiques et cadres réglementaires nationaux. La connectivité régionale intégrée et les marchés de données peuvent, à leur tour, faciliter l’évolutivité des TN à travers le continent, en stimulant les effets de réseau positifs, les économies d’échelle et de portée, et les avantages de la concurrence. Le fonctionnement de l’infrastructure continentale des données et de l’infrastructure de connectivité transfrontalière rendu possible par les cadres réglementaires nationaux et régionaux est fondamental pour un marché numérique unique. Le tableau O.1 présente comment les mesures de politiques nationales et régionales sont complémentaires pour garantir la capacité de payer pour les TN et la volonté de les utiliser en Afrique.

En outre, à mesure que les pays africains élargissent leur utilisation des données, le déploiement d’une infrastructure plus verte de connectivité et des données tirant parti des énergies renouvelables et d’une meilleure gestion des déchets électroniques deviendra plus important pour soutenir l’atténuation et l’adaptation climatique tout en rendant les TN plus durables du point de vue environnemental.

L’Afrique devrait encourager l’adoption de technologies créatrices d’emplois, entre autres l’informatique en nuage, l’intelligence artificielle et la robotique, de manière à améliorer le potentiel d’apprentissage et de revenu de la main-d’œuvre de chaque pays. Les impacts positifs ne peuvent se matérialiser que si les pouvoirs publics, les entreprises et les ménages soutiennent des mesures politiques audacieuses pour créer un environnement favorable pour plus d’emplois de qualité. Ce rapport offre un cadre fondé sur des données probantes pour stimuler l’action vers un avenir encore meilleur pour le continent.

Abrégé xli

TABLEAU O.1 Principales recommandations pour les politiques visant à faire progresser l’utilisation des technologies numériques pour soutenir la croissance inclusive de l’emploi

But Domaine des politiques Sujet Secteur émergenta Évolution entre « émergent » et « en transition » Secteur en transitionb

Accessibilité

financière d’internet Réglementation favorable à la concurrence

Octroi de licences et réglementation de la position dominante

Libéralisation de l’entrée : octroi plus simple de licences, pas d’exclusivités, y compris pour la connectivité transfrontalière

Règles permettant aux FSI de déployer une infrastructure, élimination des restrictions relatives à la voix par rapport au protocole internet (VoIP)

Règles PMS : désignation et recours ; contrôle des transferts/fusions de licences

Accès et partage des infrastructures essentielles

Règles d’interconnexion pour les réseaux nationaux

Partage des infrastructures/ accès aux infrastructures essentielles, réglementation de l’itinérance régionale et du transport transfrontalier

Règles pour les co-investissement et les réseaux de vente en gros uniquement

Réglementation réduisant les coûts

Gestion des radiofréquences

Politiques du spectre Publication du registre national des fréquences du spectre

Entreprises publiques EP ouvertes à l’actionnariat privé Restructuration des EP en vue d’une meilleure gouvernance

Taxes et redevances sectorielles

Élimination des taxes sectorielles (droits d’accise) sur les services de télécommunication

Disponibilité d’internet et des technologies complémentaires (infrastructure analogique)

Interventions des États pour compléter les marchés

Accès et service universels

Règles du spectre : allocation, assignation, tarification, partage/ transfert, coordination au niveau régional

Libre accès aux réseaux de fibre étatiques (énergie) ; responsabilisation des EP

Révision des taxes sur les services numériques

Frais réglementaires axés sur les coûts

Allocation et attribution du spectre 5G ; spectre sans licence et accès dynamique au spectre

PPP pour le réseau de fibre en libre accès, co-investissements pour les zones non couvertes

Harmonisation des redevances infranationales pour le déploiement des infrastructures

Adaptation climatique et résilience

Création du FSU

FSU transparent et plus efficace, axé sur la disponibilité de services et d’une utilisation répondant à la demande

Plans obligatoires de préparation aux situations d’urgence

Redéfinir la portée du FSU (afin que les TN tirent la demande internet) et la modalité de contribution (dépenses en capital contre contribution)

Politiques pour une conception, une construction et une exploitation résilientes et écologiques des infrastructures numériques

Disponibilité des données à un prix abordable

Infrastructure des données

PEI, centres de données et informatique en nuage

Amélioration de la gouvernance des PEI pour permettre la croissance, mise à jour des règles de télécommunication pour les PEI régionaux

Règles sur les flux de données transfrontaliers permettant la mise en place de centres de données régionaux et d’une informatique de pointe

Accent mis sur l’utilisation et la mise à niveau : soutien ciblé de la demande, règles de tarification pour les groupes vulnérables

Gestion des déchets électroniques ; incitations en faveur d’infrastructures numériques écologiques et économes en énergie

Centres de données neutres, règles pour faciliter le changement de fournisseur, y compris au niveau régional

xlii Abrégé
Politiques visant à garantir la capacité de payer
(suite)

TABLEAU O.1 Principales recommandations pour les politiques visant à faire progresser l’utilisation des technologies numériques pour soutenir la croissance inclusive de l’emploi (suite )

But Domaine des politiques Sujet Secteur émergenta Évolution entre « émergent » et « en transition »

Attractivité et capacités

d’utilisation des TN

Entrepreneuriat numérique Réduction des barrières et soutien aux facteurs d’entrée et d’expansion

Élimination des barrières administratives ; accès au financement (garanties partielles de crédit, subventions de contrepartie), incubateurs et accélérateurs

Accès aux données et portabilité effective des données, incitations à développer des TN favorables aux pauvres, création de plateformes de données d’intérêt public, élimination des obstacles à l’expansion régionale

Secteur en transitionb

Taxation appropriée des services numériques et application effective de la concurrence (entrée et sortie, fusions, abus de position dominante), incluant les approches régionales

Technologie et innovation Génération et utilisation des TN par les entreprises

Information pour accroître l’attractivité des TN, soutien à la numérisation de base, services publics en ligne pour stimuler la demande

Soutien aux services de conseil aux entreprises et de vulgarisation technologique ainsi qu’aux IDE et aux coentreprises pour le transfert de technologie, pour la génération et l’utilisation des TN

Bancs d’essai pour la génération et l’adoption de nouvelles TN dans des industries spécifiques, y compris des TN visant aux utilisateurs à faible niveau de compétences permettant un apprentissage au fil du temps

Politiques et réglementations relatives aux données

Facilitateurs des nouvelles TN et confiance ; garanties pour l’utilisation et la réutilisation des données

Des lois claires sur la protection des données, la cybersécurité, la cybercriminalité, les données ouvertes, les transactions électroniques et les flux de données transfrontaliers, alignées aux niveaux régional et mondial

Application effective par les autorités de protection des données, les agences de cybersécurité, etc.

Conformité et sensibilisation des jeunes entreprises et des PME Interopérabilité régionale des législations nationales

Espaces de données, partage de données entre les pouvoirs publics et le secteur privé et entre les entreprises

Convergence régionale et harmonisation des cadres

Inclusion sociale TN pour une utilisation productive par les individus et les ménages

Exposition aux TN grâce à un accès dans les centres communautaires, les écoles et les centres de santé, aux programmes étatiques, à la prestation de services publics numériques

Interventions globales complétant la disponibilité et l’accessibilité financière d’internet : compétences et capacités ; attractivité et information ; accessibilité financière et accès au financement, à l’électricité et aux transports ; normes sociales

Identification des utilisations productives des TN par les groupes à faible revenu, vulnérables et mal desservis ; programmes d’incitation à la génération et à l’utilisation des TN ciblant ces segments

Note : EP = entreprise publique ; FSI = fournisseurs de services internet ; FSU = fonds en faveur du service universel ;  IDE = investissement direct étranger ; PEI = point d’échange internet ; PPP = partenariat public-privé ; PME = petites et moyennes entreprises ; PMS = pouvoir de marché significatif ; TN = technologies numériques ; 5G = technologie internet mobile de cinquième génération.

a. Un « secteur émergent » fait référence à un secteur numérique où l’économie numérique est encore émergente et où l’utilisation d’internet est faible.

b. Un « secteur en transition » fait référence à un secteur numérique en transition vers l’utilisation universelle d’internet.

Abrégé xliii
Politiques
visant à garantir la volonté d’utiliser

Notes

1. L’initiative phare Économie numérique pour l’Afrique (DE4A – Digital Economy for Africa) est un partenariat entre la Banque mondiale, les gouvernements africains, l’Union africaine et d’autres partenaires au développement. Pour plus d’information, consultez le site Web de l’initiative DE4A : https://www.worldbank.org/en/programs/all-africa-digital-transformation.

2. Étant donné que les spécifications des régressions diffèrent selon le type de résultat, certaines sont exprimées en pourcentage de changement (lorsque les variables sont en logarithmes, comme le revenu) et d’autres en points de pourcentage (lorsque les variables sont binaires, comme la pauvreté et les résultats en matière d’emploi).

3. Le taux de pauvreté des ménages de la Tanzanie est basé sur le seuil national de pauvreté fondé sur les « besoins essentiels » : le coût d’acquisition d’une quantité de nourriture suffisante pour fournir une alimentation quotidienne adéquate à une personne (seuil alimentaire) plus le coût de certains produits de première nécessité non alimentaires (composante non alimentaire). Le seuil alimentaire est dérivé du coût d’achat de 2 200 calories par adulte et par jour selon les habitudes de consommation alimentaire prévalant dans la population dont la consommation réelle par adulte est inférieure à la médiane pendant une période de 28 jours, valorisée aux prix auxquels la population de référence est confrontée. La composante non alimentaire du seuil de pauvreté fondé sur les besoins essentiels utilise la part moyenne de la consommation non alimentaire de la population dont la consommation totale par adulte se situe dans les 25 % les plus pauvres.

4. Les pays étudiés comprenaient le Ghana, le Kenya, le Malawi, la Namibie, le Nigeria, l’Ouganda, la République démocratique du Congo, le Soudan, la Tanzanie et la Zambie.

Références

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Atiyas, İzak et Mark A. Dutz. 2022. “Digitalization in MENA and Sub-Saharan Africa: A Comparative Analysis of Mobile Internet Uptake and Use in Sub-Saharan Africa and MENA Countries.” Working Paper No. 1549, Economic Research Forum, Gizeh, Egypte.

Atiyas, İzak et Mark A. Dutz. 2023. “Digital Technology Uses among Microenterprises: Why Is Productive Use So Low across Sub-Saharan Africa?” Policy Research Working Paper 10280, Banque mondiale, Washington, DC.

Bahia, Kalvin, Pau Castells, Genaro Cruz, Takaaki Masaki, Xavier Pedrós, Tobias Pfutze, Carlos Rodríguez-Castelán et Hernan Winkler. 2020. “The Welfare Effects of Mobile Broadband Internet: Evidence from Nigeria.” Policy Research Working Paper 9230, Banque mondiale, Washington, DC.

Bahia, Kalvin, Pau Castells, Takaaki Masaki, Genaro Cruz, Carlos Rodríguez-Castelán et Viviane Sanfelice. À venir. “Mobile Broadband Internet, Poverty and Labor Outcomes in Tanzania.” World Bank Economic Review

Banque mondiale. 2022. “Using Geospatial Analysis to Overhaul Connectivity Policies: How to Expand Mobile Internet Coverage and Adoption in Sub-Saharan Africa.” Report No. 169437, Banque mondiale, Washington, DC.

Banque mondiale. À venir. “Regulating the Digital Economy in Africa: Managing Old and New Risks to Economic Governance for Inclusive Opportunities.” Rapport, Banque mondiale, Washington, DC.

Blimpo, Moussa P. et Malcolm Cosgrove-Davies. 2019. Electricity Access in Sub-Saharan Africa: Uptake, Reliability, and Complementary Factors for Economic Impact. Africa Development Forum Series. Washington, DC: Banque mondiale.

Calderón, César et Catalina Cantú. 2021. “The Impact of Digital Infrastructure on African Development.” Policy Research Working Paper 9853, Banque mondiale, Washington, DC.

Cirera, Xavier, Diego Comin et Marcio Cruz. 2022. Bridging the Technological Divide: Technology Adoption by Firms in Developing Countries. Washington, DC: Banque mondiale.

xliv Abrégé

Houngbonon, Georges V., Justice Tei Mensah et Nouhoum Traore. 2022. “The Impact of Internet Access on Innovation and Entrepreneurship in Africa.” Policy Research Working Paper 9945, Banque mondiale, Washington, DC.

Mensah, Justice Tei et Nouhoum Traore. 2022. “Infrastructure Quality and FDI Inflows: Evidence from the Arrival of High-Speed Internet in Africa.” Policy Research Working Paper 9946, Banque mondiale, Washington, DC.

ONU DAES (Nations Unies, Département des affaires économiques et sociales). 2019. Fichiers de données démographiques. New York : Organisation des Nations Unies. https://population.un.org /wpp/Download/Standard/Population/.

Rodríguez-Castelán, Carlos, Rogelio Granguillhome Ochoa, Samantha Lach et Takaaki Masaki. 2021. “Mobile Internet Adoption in West Africa.” Policy Research Working Paper 9560, Banque mondiale, Washington, DC.

(UA) Union africaine. 2020. “The Digital Transformation Strategy for Africa (2020–2030).” Document de stratégie, UA, Addis-Abeba, Éthiopie.

Abrégé xlv

Abréviations

2G Technologie de communication mobile de deuxième génération

3G Technologie de communication mobile de troisième génération

4G Technologie de communication mobile de quatrième génération

ABF Toutes les fonctions de l’entreprises (all business functions)

ATE Adoption de la technologie au niveau de l’entreprise

B2B D’entreprise à entreprise (business-to-business)

CT Centre de technologie

ECR Essai contrôlé randomisé

EMN Entreprise multinationale

EP Entreprise publique

FSE Fonctions sectorielles de l’entreprise (sector-specific business functions)

GBF Fonctions générales de l’entreprise (general business functions)

GPS Système mondial de géolocalisation (Global Positioning System )

GSMA Global System for Mobile Association (Association mondiale des opérateurs mobiles)

IA Intelligence artificielle

IDE Investissement direct étranger

IdO Internet des objets

ME Mesa ejecutiva (Pérou)

MPME Micro, petite et moyenne entreprises

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

PDV Point de vente

PGI Progiciel de gestion intégré

PIB Produit intérieur brut

PME Petites et moyennes entreprises

PRE Pays à revenu élevé

PTF Productivité totale des facteurs

R&D Recherche et développement

Abréviations xlvii

RIA Research ICT Africa

SaaS Logiciel en tant que service (software as a service)

SCE Services de conseil aux entreprises

SMS Service de messages courts (short messaging service)

SVT Services de vulgarisation technologique

TN Technologie numérique

xlviii Abréviations

CHAPITRE 1

Les technologies numériques

Facteurs de transformation technologique pour l’emploi

Qu’est-ce que les technologies numériques ?

L’Afrique a besoin de nombreux emplois de qualité pour sa population croissante. Les technologies numériques (TN) agissent comme des catalyseurs de la transformation économique pour l’emploi. Elles le font en aidant tous les individus à mieux travailler et à apprendre en travaillant, en catalysant l’adoption et la productivité de technologies complémentaires, et en stimulant ainsi la compétitivité, la production et les emplois dans toute l’économie.

Les technologies numériques (TN) sont des technologies qui saisissent, génèrent, stockent, modifient et transmettent des données à l’aide de chiffres binaires,1 et englobent

• Internet et les bases de données, outils de données et autres services d’information basés sur internet ;

• Tous les logiciels, ordinateurs et tablettes ;

• Les smartphones compatibles avec internet (c’est-à-dire utilisant les technologies de communication mobile 3G, 4G et 5G), qui combinent les fonctions informatiques et téléphoniques en une seule unité et permettent progressivement d’accéder plus rapidement à davantage de données et de les traiter ;

• Les caméras et vidéos numériques ;

• Les systèmes de géolocalisation ; et

• Les plateformes numériques, c’est-à-dire les marchés en ligne basés sur des logiciels et les systèmes d’intermédiation facilitant les transactions entre pairs, mettant en relation les acheteurs et vendeurs de biens et de services, et permettant les transactions participatives.

Les ordinateurs, tablettes et smartphones permettent un accès essentiel à la vaste gamme d’informations et de services numériques disponibles sur internet. En plus de relier les données recueillies par des capteurs sur toute une variété de biens de production et ménagers grâce à l’IdO (internet des objets), les TN améliorant la productivité comprennent également l’informatique en nuage, la disponibilité à la demande du stockage des données, et la puissance de calcul, si bien que les entreprises et les ménages, au lieu d’acheter les logiciels sous-jacents, peuvent acheter les services en ligne associés sur base de leur utilisation et cesser de les utiliser lorsqu’ils n’en ont plus besoin.

Elles comprennent également des offres d’intelligence artificielle (IA), généralement soutenues par l’apprentissage machine, qui sont des algorithmes analytiques prédictifs

1

améliorant leur efficacité au fil du temps grâce à l’utilisation de quantités de données de plus en plus importantes.

Parmi les autres TN disponibles, citons les chaines de blocs ou blockchains (des enregistrements numériques décentralisés et distribués, reliés entre eux par cryptographie pour être résistants à la modification et inviolables), les cryptomonnaies ou la monnaie numérique, basées sur des technologies de grands livres décentralisés, et l’impression 3D ou la fabrication additive, c’est-à-dire la construction d’objets à partir d’un graphique numérique en 3D.

Les TN permettent de réduire les coûts économiques de production et de transaction, notamment les coûts de recherche, de réplication, de transport, de suivi et de vérification.2

Les défis de l’Afrique en matière d’emploi et de technologie

L’impératif d’emploi et de technologie

Le défi de l’Afrique en matière d’emploi consiste à mettre en place des environnements commerciaux propices à la création de « bons emplois » durables pour sa main-d’œuvre croissante (encadré 1.1).3

ENCADRÉ 1.1

Qu’est-ce qu’un « bon emploi » ?

Ce rapport définit les « bons emplois » comme ceux a) générant un revenu suffisant pour que toute personne active et son ménage puissent échapper à la pauvreté et ne pas y retomber ; et b) permettant un apprentissage productif dans des entreprises permettant d’augmenter les revenus au fil du temps.

Divers auteurs proposent toutefois des définitions plus larges. Comme le reconnaissent Rodrik et Sabel (2022, 62), « la définition d’un “bon emploi” est nécessairement glissante ». Cependant, ils poursuivent, Nous pensons en premier lieu à un emploi stable, dans le secteur formel, accompagné de protections fondamentales de la main-d’œuvre, telles que des conditions de travail sûres, des droits de négociation collective et des réglementations contre les licenciements arbitraires. Un bon emploi permet au minimum une existence de classe moyenne, selon les normes d’une région, avec un revenu suffisant pour le logement, la nourriture, le transport, l’éducation et les autres dépenses familiales, ainsi qu’une certaine épargne. Plus largement, les bons emplois offrent aux travailleurs des perspectives de carrière claires, des possibilités d’épanouissement personnel, de la flexibilité, des responsabilités et de la satisfaction. La profondeur et l’étendue de ces caractéristiques peuvent dépendre du contexte : les niveaux de productivité et de développement économique, le coût de la vie, les écarts de revenus existants, etc. En outre, un bon emploi n’implique pas nécessairement un emploi classique à temps plein, mais peut permettre le partage d’emploi et la flexibilité du travail. Nous attendons de chaque communauté qu’elle fixe ses propres normes et aspirations, qui évolueront avec le temps.

Hovhannisyan et coll. (2022) définissent également les bons emplois de manière plus large que la définition bidimensionnelle adoptée pour ce rapport (revenu suffisant et possibilités d’apprentissage productif), en se basant sur quatre dimensions : revenu suffisant, accès aux avantages liés à l’emploi, stabilité de l’emploi et conditions de travail adéquates. Selon cette mesure quadridimensionnelle appliquée à l’emploi salarié, les pays d’Afrique subsaharienne affichent les niveaux les plus bas de qualité des emplois.

2 Afrique numérique

On estime que la main-d’œuvre de l’Afrique continentale triplera d’ici le vingtdeuxième siècle, passant de près de 875 millions de personnes en âge de travailler (15 à 64 ans) en 2025 à plus de 2,5 milliards en 2100 (ONU DAES 2022a). En conséquence, la part de l’Afrique dans la main-d’œuvre mondiale passerait de 16 % à plus de 41 %, dépassant l’Asie en tant que plus grande part mondiale d’ici 2100 (figure 1.1).

Cette augmentation est essentiellement le fait de l’Afrique subsaharienne, dont la population active devrait plus que tripler, passant d’un peu plus de 700 millions de personnes en 2025 à 1,3 milliard en 2050 et à 2,25 milliards en 2100. Dans le même temps, la population en âge de travailler devrait presque doubler en Afrique du Nord, passant de 170 millions à 294 millions de personnes.

Les défis de l’Afrique en matière d’emploi et de technologie sont immenses pour les années à venir – ils exigent une utilisation accrue de meilleures technologies et plus appropriées, de manière à soutenir de bons emplois locaux. De bons emplois requièrent des entreprises productives capables d’accroître leur production de manière rentable. Le défi de l’emploi offre aux entreprises, aux ménages, aux gouvernements et à la société civile, aux niveaux local, national et régional, la possibilité de faire les choses différemment et mieux. L’évolution de la démographie, des technologies et des marchés offre des perspectives de concevoir et mettre en œuvre des politiques et investissements porteurs de productivité générant une croissance de l’emploi pour tous et une prospérité véritablement partagée.

En même temps, des interventions appropriées des pouvoirs publics sont nécessaires, car le manque de bons emplois en Afrique peut être considéré comme une massive défaillance de type externalité négative de la part du marché. Autrement dit, les entreprises utilisent souvent les technologies existantes et disponibles et en adoptent de nouvelles pour maximiser leurs profits sans tenir compte des effets négatifs du chômage ou du

Afrique du Nord Asie du Sud Europe et Asie centrale Afrique de l’Est et du Sud Asie de l’Est et Pacifique

Amérique du Nord

Source : ONU DAES 2022a.

Afrique de l'Ouest et du Centre Amérique latine et Caraïbes Moyen-Orient

Note : Les projections sont basées sur la variante du taux de fécondité moyen, comme décrit dans ONU DAES (2022b). La « population active » comprend le nombre de personnes de 15 à 64 ans, sur la base des projections des Nations Unies (ONU) pour 2025 (volet a), 2050 (volet b) et 2100 (volet c). Les régions suivent les classifications de la Banque mondiale.

Les technologies numériques 3
c. 2100 3 % 23 % 16 % 22 % 15 % 6 % 7 % 4 % 4 % b. 2050 3 % 14 % 9 % 26 % 23 % 8 % 9 % 4 % 4 % a. 2025 3 % 8 % 5 % 25 % 31 % 8 % 11 % 5 % 4
FIGURE 1.1 Projection de la part de la main-d’œuvre mondiale, par continent, en 2025, 2050 et 2100

sous-emploi des travailleurs, qui comprennent notamment (Rodrik et Sabel, 2022 ; Rodrik et Stantcheva, 2021) :

• Les coûts d’efficacité économique et de croissance – c’est-à-dire les coûts associés à une production inférieure à ce que l’économie pourrait produire si elle fonctionnait efficacement et à un ralentissement de la diffusion de l’innovation des secteurs les plus avancés vers le reste de l’économie.

• Les coûts sociaux, tels que la criminalité et la persistance de la pauvreté liée à la sous-alimentation et aux faibles niveaux d’éducation.

• Les coûts politiques, qui comprennent l’encouragement de la montée du populisme autoritaire.

Ces interventions des pouvoirs publics doivent être audacieuses et adaptées au contexte, compte tenu de la rapidité de l’évolution technologique et de l’incertitude quant au caractère approprié des technologies dans le contexte de la base d’actifs de chaque pays.4 La création durable de bons emplois nécessite un environnement des affairs qui soutient et stimule l’adoption de technologies et l’augmentation de la productivité des entreprises, ainsi que l’expansion rentable des entreprises les plus productives, de manière à créer également de bons emplois pour tous.5

Promesse et défi de la main-d’œuvre jeune de l’Afrique

Offrir de bons emplois au grand nombre de jeunes entrant dans la vie active est l’un des premiers tests d’une croissance riche en emplois. En 2022, le flux annuel net des entrants dans la population active de l’Afrique subsaharienne (de 15 à 64 ans) était de plus de 23 millions de personnes, soit près de 2 millions par mois. Il devrait passer à 27 millions en 2030 et à plus de 33 millions en 2050 (ONU DAES, 2022a). En 2033, le nombre d’entrants nets dans la population active (28,5 millions) dépassera celui du reste du monde (28,0 millions), un total qui diminue au fil du temps.6

Cette explosion de la jeunesse est une source potentiellement immense d’entrepreneurs et de travailleurs flexibles, talentueux et férus de technologie, qui pourraient produire davantage pour les marchés locaux et les exportations et générer ainsi plus d’emplois. Ce défi pour une croissance riche en emplois requiert toutefois de nouveaux investissements privés importants, soutenus par des politiques et des investissements publics appuyant de manière adéquate l’éducation, les compétences et la mise à niveau des capacités nécessaires pour nourrir ces talents. Il faut également des règles des affairs ouvertes, transparentes et applicables, axées sur la concurrence et la collaboration en toute confiance. Deux questions pertinentes se posent dans ce rapport : Les entrepreneurs africains ontils la possibilité de développer leurs talents ? Où vont-ils affecter leurs talents et leurs investissements au cours des prochaines années ? Les règles des affairs doivent faire en sorte qu’il soit plus rentable pour les entreprises d’investir dans l’innovation (en adoptant de meilleures technologies et en entrant en concurrence pour les clients sur les marchés intérieurs et d’exportation) que de rechercher des faveurs spéciales auprès des pouvoirs publics. Les politiques d’appui aux entreprises et les actions des entreprises publiques ont malheureusement trop souvent restreint la concurrence du secteur privé et entravé une croissance plus inclusive. Lorsque des services commerciaux essentiels et d’autres intrants font localement l’objet d’une monopolisation et d’un verrouillage favorisant les entreprises en place, les jeunes entrepreneurs talentueux, mais dépourvus de relations sont susceptibles de partir pour des pays où les possibilités de croissance sont meilleures.7

4 Afrique numérique

Deux atouts latents complémentaires de la société africaine offrent des lueurs d’espoir pour aider à relever le défi auquel est confrontée la jeunesse africaine. Premièrement, l’Afrique a connu des niveaux élevés de mobilité sociale perçue et réelle, et la façon habituelle de progresser a été de travailler dur.8 Deuxièmement, les Africains sont très sceptiques à l’égard de l’autorité et sensibles à l’abus de pouvoir – non seulement de la part du pouvoir politique, mais aussi sur le marché. Ces attitudes peuvent constituer une base essentielle pour la mise en place de meilleures institutions politiques et économiques. Contraintes et opportunités liées à l’adoption tardive des TN

Un autre obstacle à une croissance riche en emplois est le retard technologique de l’Afrique dans une large gamme d’applications destinées aux entreprises, aux ménages et aux pouvoirs publics. Ce retard pourrait toutefois permettre aux entrepreneurs d’adapter et de créer des technologies spécifiques au contexte africain, notamment à son riche patrimoine linguistique. Ces TN sur mesure pourraient inciter les entreprises et les ménages à les adopter et à les utiliser intensivement.9

Les nouvelles technologies peuvent accélérer la création d’emplois dans l’agriculture et l’agroalimentaire, l’industrie manufacturière et les services, l’éducation, la santé, les communications, l’énergie, le transport et la logistique, ainsi que les services financiers (Nayyar, Hallward-Driemeier et Davies, 2021). Toutes les technologies ont besoin de capacités complémentaires et de capital physique. Des TN telles que l’IdO (objets physiques dotés de capteurs et de logiciels permettant de les connecter à d’autres appareils compatibles avec internet) requièrent des investissements dans internet (infrastructure numérique) et les « objets », ainsi que des investissements complémentaires essentiels dans les technologies matérielles et immatérielles telles que les tracteurs, les systèmes d’irrigation, les routes rurales et les capacités de gestion.

L’Afrique est en retard sur le reste du monde en ce qui concerne l’adoption de nombreuses technologies, tant numériques qu’analogiques. Cela en fait la dernière frontière, et la plus critique, pour les investissements dans de meilleures technologies.10 Par exemple, l’Afrique subsaharienne est en retard par rapport à d’autres régions à revenu faible ou intermédiaire en ce qui concerne l’adoption et l’utilisation de technologies agricoles telles que les tracteurs, les systèmes d’irrigation et les engrais (figure 1.2) – bien qu’aucune différence régionale dans les cultures et les conditions du sol ne justifie de tels écarts.

Le retard technologique de l’Afrique dans l’utilisation des intrants agricoles s’est creusé au fil du temps : même si, en 1960, l’Afrique disposait de plus de tracteurs pour 1 000 travailleurs agricoles que l’Asie de l’Est et du Sud (0,7 contre 0,2), en 2015, elle accusait un retard important en matière de technologies (Fuglie et coll. 2020, tableau 4.1). Fuglie et coll. (2020) soulignent que l’émergence de nouvelles technologies particulièrement adaptées aux petites exploitations – horticulture à forte intensité de main-d’œuvre, pompes à eau à énergie solaire, minitracteurs combinés à des marchés de location –permet l’introduction d’une agriculture hautement productive sur de petites parcelles. L’intensification de l’agriculture de précision grâce à des technologies de transfert de données qui émergent rapidement devrait encore réduire les avantages ou les inconvénients liés à la taille dans la gestion des cultures. Les auteurs concluent que si l’on considère l’utilisation globale des intrants, il n’est pas certain qu’il existe des différences systématiques d’efficacité économique liées à la taille de l’exploitation, et que les différences éventuelles peuvent s’atténuer avec les progrès technologiques et l’évolution vers des produits à plus forte valeur ajoutée.

Les technologies numériques 5

Source : Fuglie et coll., 2020.

Enfin, les défis liés à l’emploi et à la technologie du côté de l’offre des marchés des produits requièrent une demande accrue de la part des consommateurs pour fournir des débouchés rentables à une augmentation de la production générant des emplois – et une amélioration du bien-être de ménages consommant davantage. La faible consommation de nombreux produits de base en Afrique, qui est liée à des taux élevés de pauvreté, a déprimé la demande de production locale par rapport à celle destinée aux marchés d’exportation. Une modeste augmentation du revenu des ménages dans les pays africains pourrait néanmoins générer une forte demande refoulée pour des biens et services à bas prix, mais de meilleure qualité, tels que des produits frais et des aliments transformés riches en nutriments, ainsi que des services d’éducation, de santé, de divertissement, de transport et d’énergie de meilleure qualité.

L’adoption de meilleures technologies par les entreprises africaines pourrait également générer des emplois peu qualifiés, à condition que les avantages de la productivité de ces technologies entraînent une expansion suffisamment importante de la production. Ces effets d’expansion peuvent être plus probables en Afrique que dans d’autres régions, étant donné que la demande pour ces produits est nettement plus faible, et donc probablement plus élastique aux changements de productivité et de prix – à condition que la production ait lieu en Afrique. La situation de la région contraste ainsi avec celle des pays à revenu élevé, où la demande pour bon nombre des mêmes produits est plus satisfaite et inélastique dans sa réponse à toute nouvelle variation de la productivité et des prix.11

Potentiel des TN adaptées au context pour une transformation économique riche en emplois

La « transformation économique pour l’emploi » est un cadre permettant de transformer les défis décrits plus haut en opportunités au fil du temps (encadré 3.2). Ce terme

6 Afrique numérique
0 10 20 30 40 50 60 70 0 50 100 150 200 250 300 350
désigne Asie de l’EstAsie du SudAsie de l’Ouest et Afrique du Nord
% de la surface cultivée irriguée, Tracteurs pour 1 000 travailleurs Engrais kg/ha
Amérique Latine Afrique subsaharienne Engrais (lhs) Irrigation (rhs) Tracteurs (rhs) FIGURE 1.2 Utilisation de certaines technologies agricoles, par région, 2015 Note : Les valeurs sont des moyennes des pays de chaque région, sur la base des régions définies par la Banque mondiale. kg/ha = kilogrammes par hectare.

ENCADRÉ 1.2

Cadre de la « transformation économique pour l’emploi » de la Banque mondiale

La transformation économique pour l’emploi est désignée par l’acronyme « JET » (jobs and economic transformation – emplois et transformation économique) au sein du Groupe de la Banque mondiale (voir annexe A, figure A.1).

Dans ce cadre, la transformation économique est considérée comme une stratégie de développement économique radicalement différente des politiques de croissance « à effet de ruissellement ». Elle part plutôt de l’hypothèse que les politiques et les investissements en faveur de l’emploi inclusif doivent soutenir explicitement la croissance de la productivité des entrepreneurs et travailleurs à faible revenu et peu qualifiés, en leur permettant d’apprendre en travaillant et d’améliorer ainsi leur capacité à générer des revenus plus élevés.

La conception des politiques de croissance inclusive de la productivité suppose qu’il y faudra parfois faire des compromis entre une croissance générale plus rapide et une croissance plus inclusive et riche en emplois, et que les choix des politiques doivent être faits en faveur de la seconde.

les voies vers une croissance inclusive de la productivité générant davantage d’emplois et de revenus pour tous. Elle repose sur trois types de transformations sous-jacentes complémentaires – technologiques, sectorielles et spatiales – qui doivent être soutenues par des réformes et des investissements publics.

Ces réformes et investissements devraient directement promouvoir une croissance inclusive de la productivité à travers trois piliers :

• les compétences, y compris les investissements dans l’éducation de base ainsi que la formation professionnelle ou spécifique à une activité, orientée vers les besoins des employeurs potentiels, ainsi que l’apprentissage sur le tas ;

• Les infrastructures, y compris les investissements dans les infrastructures immatérielles (telles que les finances) et les infrastructures matérielles (telles que l’électricité et le numérique) dans tous les secteurs ;

• Les institutions, notamment la stabilité macroéconomique ainsi que la transparence et la redevabilité en matière de bonne gouvernance.

Ce rapport met l’accent sur la transformation technologique induite par l’innovation. La transformation technologique, en tant que voie vers une croissance plus inclusive de la productivité, intervient lorsque les entreprises et les ménages adoptent et utilisent plus intensivement les meilleures technologies actuellement disponibles ou modifient et créent de nouvelles technologies appropriées – générant plus d’emplois et de revenus pour tous.12 Les récents rapports de la Banque mondiale sur l’Afrique se concentrent sur les politiques de productivité pour améliorer l’allocation des ressources (Abreha et coll., 2021 ; Calderón et Cantú, 2021). Le présent rapport part du principe que les investissements dans la mise à niveau des technologies et des capacités associées, dans toutes les activités économiques où les entreprises africaines peuvent être compétitives sont aussi essentiels, sinon plus, que l’amélioration de l’allocation des ressources entre les entreprises et les activités économiques.

Les technologies numériques 7

Quelles que soient les régions géographiques, tant dans les pays à revenu faible et intermédiaire que dans ceux à revenu élevé, au moins deux tiers de la croissance de la productivité du travail entre 1995 et 2018 s’expliquent par des augmentations au sein même des secteurs plutôt qu’entre eux – par exemple, entre l’agriculture et l’industrie manufacturière ou entre l’industrie manufacturière et les services (Nayyar, Hallward-Driemeier et Davies, 2021, figure 1.5).13 La constatation que la mise à niveau technologique au sein des entreprises a représenté la majeure partie de la croissance de la productivité physique de la Chine et de l’Éthiopie entre 2000 et 2007 suggère que la mise à niveau technologique peut être le plus important moteur de la croissance de la productivité dans les pays où la plupart des entreprises arrivent à tirer parti du rattrapage technologique (Cusolito et Maloney, 2018).14

Les niveaux extrêmement bas des pratiques managériales moyennes constatés par Bloom et coll. (2016) dans les entreprises africaines, sur la base de Bloom et van Reenen (2007, 2010), mettent en évidence un autre obstacle auquel se heurte la mise à niveau technologique en Afrique. Ils montrent également le potentiel positif de technologies simples facilitant la mise à niveau de la gestion – telles que les solutions de point de vente permettant aux gestionnaires de comparer les niveaux des stocks et de proposer des offres alléchantes pour développer les ventes et les emplois. La mise à niveau de la gestion à l’aide des TN est sans doute un point d’entrée naturel pour la mise à niveau ultérieure d’autres technologies d’entreprise.15

Le monde connaît actuellement une transformation technologique importante qui modifie déjà la façon dont les entreprises et les ménages achètent, fabriquent, vendent et consomment des biens et services, ainsi que les endroits où sont créés plus d’emplois de qualité. Les TN basées sur internet réduisent les coûts ou les frictions dans l’économie et permettent une meilleure prise de décision basée sur les données.16 Une utilisation productive peut les transformer en opportunités économiques accrues pour toutes les entreprises et tous les ménages, y compris pour le grand nombre d’Africains peu qualifiés. Bien que l’utilisation des TN soutienne également les transformations sectorielles et spatiales en tant que voies supplémentaires et complémentaires vers de meilleurs emplois pour un plus grand nombre de personnes, la principale contribution des TN est de soutenir directement la transformation technologique.

Le défi du changement technologique basé sur les compétences

Les pays à revenu faible ou intermédiaire cherchant à trouver une voie de croissance plus inclusive de l’emploi en adoptant des TN se heurtent à des obstacles supplémentaires, car bon nombre des meilleures technologies qui pourraient être adoptées et utilisées par les entreprises locales privilégient les compétences.17 Ce problème est particulièrement aigu pour les pays africains, compte tenu du nombre de personnes déjà actives et de jeunes peu instruits entrant dans la vie active. La prépondérance de ces technologies est liée à l’abondance de main-d’œuvre qualifiée dans les pays à revenu élevé et au fait que la plupart des technologies y sont encore produites.18

La création d’un plus grand nombre d’emplois peu qualifiés grâce à l’adoption de technologies privilégiant les compétences nécessite des volumes de production et de vente suffisamment importants de la part des entreprises existantes et nouvelles. La plupart des technologies adoptées permettent aux entreprises de réduire leurs coûts de production ou d’améliorer la qualité de leurs produits. L’augmentation des ventes résulte des prix plus bas permis par des réductions de coûts. C’est l’accroissement de la production et les nouvelles tâches qui y sont associées qui génèrent la demande d’un plus grand nombre d’emplois incluant des travailleurs moins qualifiés.19

8 Afrique numérique

Ces progrès nécessitent a) une concurrence sur les marchés des intrants et des extrants pour que les entreprises les plus efficaces puissent se développer ; b) une réactivité suffisante de la demande des consommateurs à la baisse des prix stimulée par les technologies et la concurrence entre les produits ; et c) une complémentarité suffisante entre les technologies adoptées et les travailleurs peu qualifiés pour que leurs emplois soient améliorés plutôt que supprimés. Pour une croissance inclusive de la productivité, les technologies générées et adoptées doivent être axées sur les travailleurs peu qualifiés afin que les TN améliorent les communautés et apportent des emplois au lieu de remplacer les personnes et les emplois.

Potentiel des technologies adaptées aux compétences

La création, l’adoption et l’utilisation intensive par les travailleurs et les cadres des entreprises, ainsi que par les ménages impliqués dans des activités économiques informelles, de TN adaptées aux compétences constituent une voie complémentaire axée sur la technologie. L’évolution technologique a largement privilégié les compétences de haut niveau pendant la majeure partie du XXe siècle dans les pays à revenu élevé, car l’augmentation rapide de l’offre de travailleurs plus qualifiés a induit le développement de ces technologies.20

Contrairement aux technologies privilégiant les compétences, les technologies adaptées aux compétences sont axées sur l’utilisation productive et les besoins d’apprentissage des personnes peu qualifiées et favorisent donc directement ces dernières plutôt que les plus qualifiées, en augmentant leur productivité relative. Elles soutiennent également les travailleurs plus qualifiés avec les emplois créés pour générer ces technologies, qui nécessitent des ingénieurs spécialisés dans les logiciels sophistiqués pour développer les applications existantes afin de les rendre plus faciles et plus intuitives à utiliser, comme l’activation et la réponse vidéo dans une série de langues et de dialectes locaux.

Les emplois plus qualifiés sont également stimulés par les volumes de production plus élevés et les tâches plus sophistiquées que ces technologies permettent. Selon Acemoglu et Restrepo (2020, 25), « l’évolution technologique récente a privilégié l’automatisation sans porter une attention suffisante à la création de nouvelles tâches où employer de la main-d’œuvre de manière productive. Les conséquences de ce choix ont été la stagnation de la demande de main-d’œuvre, la diminution de la part de la main-d’œuvre dans le revenu national, l’augmentation des inégalités, et la baisse de la croissance de la productivité. »

Trajtenberg (2019, 185) a posé la question liée aux politiques de la façon suivante : « Il semblerait que les innovations améliorant l’homme (IAH) basées sur l’IA aient le potentiel de déclencher une nouvelle vague de créativité et de productivité humaines, en particulier dans les services, tandis que les innovations remplaçant l’homme (HRI) diminuent l’emploi ou créent des emplois indignes. Est-il possible de concevoir des stratégies pour influer sur la direction du changement technologique, dans le sens de la stimulation des IAH par rapport aux HRI ? Il est difficile de le dire, mais cette possibilité vaut certainement la peine d’être étudiée, étant donné l’énorme impact qu’un changement de direction peut avoir sur l’économie … Une certaine attention à la “direction” [du changement technologique plutôt qu’à son rythme] pourrait apporter des bénéfices nettement plus importants. »

De leur côté, Rodrik et Stantcheva (2021, 832) affirment que : « En toute logique, l’écart entre les compétences et la technologie peut être comblé de deux façons : soit en augmentant l’éducation pour répondre aux exigences des nouvelles technologies, soit en

Les technologies numériques 9

réorientant l’innovation pour qu’elle corresponde aux compétences de la main-d’œuvre actuelle (et future). La seconde stratégie, à laquelle pratiquement aucune attention n’est accordée dans les discussions politiques, mérite d’être prise au sérieux. »

Pour les personnes peu qualifiées en Afrique, il y a un avantage supplémentaire essentiel à concevoir des TN adaptées aux compétences permettant d’apprendre en travaillant. Cela transforme ce qui serait une augmentation ponctuelle de la productivité – à savoir l’adoption d’une nouvelle TN – en une croissance dynamique de la productivité. Cela permet également aux gens d’améliorer continuellement la productivité de leurs tâches ou de passer à des tâches plus qualifiées à mesure qu’ils acquièrent de nouvelles compétences.

Un cadre conceptuel – partant de la disponibilité des TN à des emplois inclusifs Ce rapport fournit de nouvelles données et analyses pour mieux comprendre l’étendue de l’utilisation des TN en Afrique – et la façon dont les résultats en matière d’emplois inclusifs peuvent être associés à une plus grande utilisation des TN et des technologies complémentaires. À cette fin, ce chapitre présente le cadre conceptuel du rapport (figure 1.3). Ce cadre établit un lien entre, d’une part, la disponibilité et l’utilisation des

conceptuel pour l’analyse politique des impacts des TN sur la croissance de l’emploi et des revenus

FIGURE

Fondements de la transformation technologique

Facteurs numériques

• Connectivité et infrastructure des données

• Compétences et capacités

• Entreprises

• Finances

• Plateformes publiques

+

Technologies analogues et plus vertes (électricité, transport)

Entreprises

Individus/ ménages

Pouvoirs publics

Réduction nette des coûts ou des frictions et augmentation de la productivité (recherche, réplication, transport, suivi et vérification)

Emplois et revenus du travail

Entrepreneuriat et revenu du capital

Prix plus bas, plus grande variété et surplus du consommateur

Système de transfert de revenus

Gains non monétaires

Impacts dans l’ensemble de l’économie : croissance plus rapide et plus inclusive de l’emploi, réduction de la pauvreté, autres avantages sociaux

Politiques requises

Capacité à payer pour les TN : politiques de disponibilité à un prix abordable

Volonté d’utiliser les TN : politiques d’attractivité et de capacité

Note : Le texte en gras (dans les encadrés bleus) indique les principaux domaines et thèmes couverts par ce rapport, avec un accent sur le côté production de l’économie (entreprises et travailleurs). Les « impacts inclusifs » sont ceux générant une croissance des revenus pour tous, y compris une croissance plus rapide du revenu par habitant pour les 40 % les plus pauvres de la population de chaque pays. TN = technologies numériques.

10 Afrique numérique
Disponibilité des TN Utilisation productive des TN Impacts inclusifs des TN
1.3 Cadre

TN et, d’autre part, la croissance des emplois inclusifs et la réduction de la pauvreté, selon différents aspects, notamment de meilleurs emplois pour un plus grand nombre de personnes.

Le cadre s’appuie sur la théorie du changement proposée dans l’initiative DE4A (Digital Economy for Africa) de la Banque mondiale.21 Il comprend cinq catalyseurs de la disponibilité des TN qui facilitent l’utilisation et l’impact de celles-ci : i) l’infrastructure de connectivité et des données ; ii) les compétences ; iii) les entreprises numériques (les principaux fournisseurs de solutions numériques) ; iv) la finance numérique ; et v) les plateformes publiques numériques.

Composantes du cadre de base

Disponibilité des TN. Dans le cadre conceptuel, la colonne de gauche concerne la disponibilité des TN. La disponibilité à un prix abordable, à la fois de l’infrastructure de connectivité (internet à large bande) et des données, et des infrastructures complémentaires d’électricité et de transport, est une condition nécessaire en tant que catalyseurs de l’économie.

Utilisation productive des TN. La colonne centrale du cadre couvre l’utilisation productive des TN par les entreprises, les particuliers et les ménages, ainsi que les pouvoirs publics. Les moteurs de l’utilisation par les entreprises et les particuliers sont liés à la capacité de payer, qui dépend elle-même de la disponibilité à un prix abordable des technologies d’accès (smartphones, ordinateurs et tablettes) et de l’électricité, ainsi que de l’existence d’un revenu disponible suffisant ou de l’accès au financement. La capacité de payer est facilitée par des prix reflétant les coûts, stimulés par a) les investissements dans les nouvelles technologies liées aux infrastructures et b) la concurrence pour les connexions aux infrastructures numériques disponibles.

Les facteurs influençant la volonté d’utiliser les TN comprennent l’attrait pour les utilisateurs, découlant des informations disponibles sur les TN, la pertinence de celles-ci dans le contexte local et leur facilité d’utilisation.

Impacts inclusifs des TN. Comme souligné dans la colonne de droite du cadre, les impacts inclusifs des TN sur l’emploi dépendent de l’intensité avec laquelle l’usage des TN augmente la productivite. L’environnement des affairs actuel, y compris l’intensité de la concurrence sur le marché des produits, influence également l’intensité de l’utilisation productive et les résultats découlant des TN – soit en incitant à l’utilisation et à l’expansion de l’utilisation par les entreprises et les ménages, soit en empêchant d’en tirer des gains suffisants, au point que l’adoption en devient peu attrayante.

Le cadre clarifie la façon dont les réductions de coûts et les augmentations de productivité ont des impacts inclusifs sur les personnes à travers cinq canaux :

• Emplois et revenus du travail découlant de l’utilisation productive par les entreprises et les personnes en tant que cadres et travailleurs

• Revenus de l’entrepreneuriat et du capital perçus par les propriétaires de grandes entreprises et d’entreprises familiales

• Surplus du consommateur, résultant de la consommation de biens et de services à des prix plus bas, de meilleure qualité ou plus variés22

• Système de transfert de revenus à travers des impôts et diverses formes de soutien des revenus.

Les technologies numériques 11

• Gains non monétaires tels que les avantages intrinsèques d’une meilleure santé et d’une meilleure éducation pour la société civile, de la dignité humaine et de l’autonomisation des individus, et d’autres aspects non pécuniaires de la qualité de vie.

Ce cadre centré sur les coûts et ses composantes mettent en évidence la façon dont l’utilisation des TN accroît les possibilités d’accès aux marchés locaux et mondiaux des produits, de la main-d’œuvre, des terres et financiers par les entreprises et les particuliers, car ces coûts comprennent la recherche, le rapprochement des emplois, le transport et d’autres coûts de transaction. Le cadre précise également que c’est grâce à la réduction de divers coûts que l’utilisation des TN facilite la continuité des affaires lorsque la production de biens et de services en présentiel est perturbée par la COVID-19 ou des risques sanitaires similaires.23

Dans la figure 1.3, le texte en gras représente les domaines auxquels une plus grande attention est accordée dans ce rapport, à savoir les entreprises et les ménages faisant un usage productif des TN pour des impacts sur l’emploi et les gains de réduction de la pauvreté. Les rôles des technologies complémentaires et des facteurs complémentaires ou fondamentaux soutenant la disponibilité des TN – tels que les compétences, les entreprises numériques (y compris les jeunes entreprises ainsi que les grandes plateformes numériques privées mondiales), la finance numérique, et les plateformes publiques – ne sont examinés que dans la mesure où ils soutiennent l’objectif du rapport.24

Un cadre élargi : les politiques de lutte contre la fracture numérique

La figure 1.4 développe le cadre conceptuel de base en clarifiant les défis posés par les différents types de fractures numériques parmi les entreprises et les particuliers. Par exemple, les grandes entreprises formelles sont généralement plus promptes à utiliser de manière plus intensive différentes TN. Les entreprises plus petites, et spécialement les microentreprises informelles, comptant moins de cinq employés à plein temps – y compris les entreprises familiales indépendantes sans employés rémunérés à plein temps –sont moins susceptibles d’utiliser les TN fournissant un accès à internet. De même, les ménages instruits des zones urbaines disposant de l’électricité sont plus susceptibles d’utiliser les TN que les ménages non instruits des zones rurales dépourvus d’électricité ou d’un approvisionnement fiable.

En ce qui concerne l’impact inclusif, dans la mesure où les TN privilégient les compétences, les travailleurs plus qualifiés sont plus susceptibles que les moins qualifiés de bénéficier de meilleurs emplois et de revenus du travail plus élevés dans les entreprises utilisant ces technologies. De même, les propriétaires masculins d’entreprises sont plus susceptibles que les propriétaires féminines d’utiliser les TN et d’en tirer des revenus du capital plus élevés. Les inégalités entre les sexes comprennent non seulement les normes et règles sociales favorisant la propriété masculine des TN, mais aussi la discrimination sur les lieux du travail, entraînant un moindre succès commercial pour les entreprises détenues par des femmes, utilisant des TN.

Les fractures numériques potentielles et la façon dont elles peuvent être réduites par l’utilisation de meilleures technologies, comme le montre la figure 1.4, sont mises en lumière par une récente analyse des mécanismes par lesquels les TN influencent les choix d’obtention de revenus des ménages les plus pauvres. Porto (2021) utilise des données sur les ménages du Kenya et du Sénégal pour étudier les implications d’une baisse des prix à la consommation du riz et d’une hausse des prix à la production et d’une baisse des prix des intrants pour l’arachide – des changements de prix rendus possibles par

12 Afrique numérique

FIGURE 1.4 Cadre conceptuel élargi pour l’analyse politique de l’impact des TN sur l’emploi et les revenus à travers le prisme de la fracture numérique

Disponibilité des TN

Fondements de la transformation technologique (facteurs numériques et analogiques)

Entreprises

Utilisation productive des TN Impacts inclusifs des TN

Plus grandes et formelles

Micros et informelles

Individus

Urbain, instruit, électricité

Rural, non instruit, sans électricité

Politiques de disponibilité à un prix abordable pour une capacité à payer inclusive

• Aborder la question de l’accessibilité financière du point de vue de la concurrence et de réglementations favorables à la concurrence en vue de réduire les coûts d’investissement et les marges prix-coûts (octroi de licences et position dominante, accès et partage, spectre) et de faire baisser les coûts d’exploitation (entreprises publiques et réseaux de fibres à accès ouvert, droits d’accises).

• Assurer la disponibilité d’internet à l’aide de subventions et de crédits soutenus par des fonds réservés (ou de nouveaux mécanismes) pour le service universel et les mesures d’adaptation au climat pour la résilience.

• Garantir l’infrastructure de données (IXP, centres de données et informatique en nuage) à l’aide d’une infrastructure numérique et d’une réglementation des données facilitant l’intégration régionale (interopérabilité des flux de données transfrontaliers).

• Soutenir la disponibilité de technologies analogiques et vertes complémentaires, y compris les infrastructures (électricité, transport, logistique) pour soutenir la génération de revenus.

Travailleurs plus qualifiés Travailleurs peu qualifiés

Propriétaires masculins jeunes/âgés

Emplois et revenu du travail Emplois entrepreneuriaux et revenu du capital Propriétaires féminines jeunes/âgées

Politiques d’attractivité et de capacité pour une volonté inclusive d’utilisation

• Mettre en œuvre une stratégie nationale d’ « utilisation productive des TN » pour soutenir la familiarisation avec l’utilisation et les gains de productivité des MPME et des ménages à faibles revenus et vulnérables.

• Mettre en œuvre des politiques d’innovation pour réorienter le développement technologique vers la génération et la mise à l’échelle de TN adaptées aux compétences, conçues pour être faciles à utiliser (voix, écran tactile et vidéo pour les personnes illettrées) et adaptées au portefeuille de compétences en évolution de l’Afrique, permettant aux travailleurs et aux gestionnaires peu qualifiés d’apprendre tout en travaillant – soutenues par des biens publics (adresses numériques, géolocalisation des registres fonciers, cartographie météorologique locale), des subventions de contrepartie et des garanties de crédit partielles.

• Adopter et mettre en œuvre des politiques et des réglementations en matière de données pour permettre de nouvelles TN et créer la confiance dans l’utilisation des TN grâce à l’utilisation et réutilisation des données (protection des données contre les abus publics, cybersécurité, protection des consommateurs contre les abus commerciaux).

• Institutionnaliser les programmes de soutien des capacités pour les MPME et les ménages : services de conseil aux entreprises, information et mise à niveau technologiques, formation des cadres et des travailleurs, et éducation plus générale.

Note : « Inclusif » fait référence aux impacts des politiques ou aux emplois générant une croissance des revenus pour tous, y compris une croissance plus rapide du revenu par habitant pour les 40 % les plus pauvres de la population de chaque pays. TN = technologie numérique ; IXP = points d’échange internet ; MPME = micro, petites et moyennes entreprises ; EP = entreprise publique.

Les technologies numériques 13

l’adoption de TN spécifiques.25 Une amélioration de la TN qui fait baisser les prix à la consommation du riz profite deux fois plus aux ménages pauvres qu’au ménage, et plus au ménage rural qu’au ménage urbain. Cela s’explique par le fait que le riz est davantage consommé par les ménages pauvres et que la plupart des ménages ruraux producteurs de riz sont également des acheteurs nets de riz. Les effets sur le bien-être d’une amélioration de la productivité de la production d’arachide sont nettement plus importants que ceux d’une augmentation du prix à la ferme (prix reçu par le producteur lors des ventes directes à l’exploitation), mais les différences d’ampleur dépendent de l’accès aux technologies.

Le cadre élargi de la figure 1.4 résume également les réponses politiques en matière de disponibilité, d’utilisation et d’impacts inclusifs. Les politiques visant à assurer une disponibilité à un prix abordable de l’infrastructure de connectivité et des données et les politiques de données visant à renforcer l’attrait des TN sont traitées au chapitre 4. Les politiques visant à accroître la volonté des entreprises et des ménages d’utiliser les TN qui reposent sur l’infrastructure de connectivité et des données sont principalement abordées dans les chapitres 2 et 3.

En général, pour être efficaces, les politiques et la conception institutionnelle, quel que soit le domaine, doivent respecter trois principes :

• La concurrence sur le marché, qui constitue une incitation essentielle à la disponibilité, l’utilisation et l’impact des TN.

• La coordination notamment a) le regroupement de technologies, de compétences, de capacités et d’aides financières complémentaires, de manière à surmonter les obstacles combinés à l’utilisation des TN par les entreprises et les ménages ; et b) la coordination entre les différentes entités d’aide publique et entre les pouvoirs publics et les entreprises.

• La contestabilité des politiques, à savoir le fait que leurs objectifs, y compris les défaillances du marché qu’elles cherchent à corriger, sont transparents et soumis à un suivi et une évaluation rigoureux identifiant des preuves d’impact permettant aux seules politiques les plus efficaces de rester opérationnelles. L’expérimentation des politiques, associée à l’évaluation de leur impact, est essentielle pour en savoir plus sur les types et les combinaisons spécifiques de politiques et d’investissements publics les plus efficaces dans différents contextes nationaux et sous-régionaux.

Impacts de l’utilisation des technologies numériques sur l’emploi et la pauvreté

Cette section présente les preuves empiriques de l’impact des TN sur l’emploi et la réduction de la pauvreté, en mettant l’accent sur les récents résultats obtenus en Afrique. Comme souligné plus haut, dans le cadre conceptuel, les TN peuvent réduire durablement la pauvreté et augmenter la consommation des ménages à faible revenu, en grande partie grâce à leur impact sur la création d’emplois de meilleure qualité pour un plus grand nombre de personnes, ainsi qu’à la réduction des prix et à l’amélioration de la qualité des produits consommés par les ménages les plus pauvres.

Le lien entre l’utilisation des TN et la création d’emplois de qualité passe par l’expansion de la production générée par l’adoption des TN et le besoin de plus de travailleurs qui en résulte, soit a) du côté de l’offre de production (en augmentant

14 Afrique numérique

directement la productivité du travail ou d’autres aspects des performances des  entreprises) ; soit b) du côté de la demande (en élargissant directement l’accès au marché des entreprises et des consommateurs et en remédiant aux frictions de l’information). 26

Impacts de l’utilisation et de la disponibilité d’internet

La bonne nouvelle est qu’il existe des preuves de plus en plus solides que la disponibilité d’internet a un impact inclusif causal sur la création d’emplois et la réduction de la pauvreté dans certains pays africains.27 La mauvaise nouvelle, comme le soulignera la section suivante, est que trop peu de personnes profitent de ces avantages, comme le montre le faible taux d’utilisation d’internet par rapport à sa disponibilité.

Impacts sur l’emploi au niveau régional

L’internet plus rapide en Afrique subsaharienne a été facilité par l’arrivée progressive des câbles sous-marins au cours des deux dernières décennies, qui ont considérablement accru la vitesse et la capacité des réseaux terrestres. Quand on compare les entreprises et ménages de l’Afrique subsaharienne vivant à proximité de ces réseaux à ceux des zones non connectées, la probabilité qu’un individu soit employé augmente en moyenne de 6,9 % dans un échantillon de huit pays de l’Enquête démographique et de santé (EDS) et de 13,2 % dans un échantillon de neuf pays de l’Afrobaromètre, ainsi que de 3,1 % dans une enquête séparée menée en Afrique du Sud (Hjort et Poulsen, 2019).28 Ces impacts attribuables à l’accélération d’internet sont des augmentations positives nettes de l’emploi, d’une ampleur appréciable, plutôt que des déplacements d’emplois depuis des zones non connectées.29

L’adoption plus rapide d’internet privilégie les compétences, c’est-à-dire que l’adoption d’internet complète les emplois plus qualifiés, comme cela a été démontré dans les pays à revenu élevé. 30 Les travailleurs moins instruits en bénéficient, même si ceux n’ayant pas achevé l’école primaire sont désavantagés : la variation en pourcentage de la probabilité d’emploi est significativement positive – de l’ordre de 6 % pour les travailleurs ayant un niveau d’éducation primaire, secondaire et supérieur –, mais pas statistiquement significative pour les travailleurs n’ayant pas achevé l’école primaire.

Une partie de l’augmentation des emplois s’explique par l’entrée nette d’entreprises (environ 23 % en Afrique du Sud), y compris une forte augmentation des entrées d’entreprises et une diminution des sorties d’entreprises d’ampleur similaire. Une autre partie de l’augmentation des emplois semble être due à l’augmentation de la productivité des entreprises manufacturières existantes (en Éthiopie). Selon les données de l’enquête sur les entreprises de la Banque mondiale, les entreprises du Ghana, du Kenya, de la Mauritanie, du Nigeria, du Sénégal et de la Tanzanie exportent davantage lorsqu’elles ont accès à un internet plus rapide, communiquent davantage avec leurs clients et forment davantage leurs employés.31 La productivité des travailleurs peu instruits (n’ayant pas achevé l’école primaire) peut avoir bénéficié d’une formation ciblée sur le lieu du travail offerte par les employeurs.

Études de cas de pays : Impacts sur les emplois, le bien-être des ménages et la pauvreté Trois études de cas nationales (sur le Nigeria, le Sénégal et la Tanzanie) renforcent cette base de données probantes en croissance rapide en explorant l’impact de la disponibilité

Les technologies numériques 15

de l’internet mobile (de troisième [3G] ou de quatrième génération [4G]) – au lieu du haut débit terrestre fixe – sur les emplois et le bien-être. Ces études exploitent des informations géospatiales sur le déploiement des tours de l’internet mobile au fil du temps, combinées à au moins deux séries de données sur les ménages au cours d’une période de six ans (Tanzanie) et de sept ans (Nigeria). La figure 1.5 résume les principaux résultats en matière d’emploi et de bien-être (consommation et pauvreté) pour le Nigeria et la Tanzanie.

Nigeria. Les estimations de l’emploi au Nigeria montrent que la disponibilité d’internet a eu des impacts positifs : la participation au marché du travail et l’emploi salarié ont augmenté, respectivement, de 3 points de pourcentage et de 1 point de pourcentage après trois ans ou plus d’exposition dans les zones où internet est disponible par rapport à celles qui ne sont pas couvertes (Bahia et coll., 2020).32 L’amélioration induite par internet des résultats sur le marché du travail est particulièrement importante chez les femmes. La disponibilité d’internet conduisant à ces effets sur l’emploi entraîne également des augmentations importantes et positives des niveaux de consommation des

FIGURE 1.5 Impacts de la disponibilité de l’internet mobile sur la création d’emplois et le bien-être des ménages au Nigeria et en Tanzanie

a. Nigeria, 2010–2016a

marchédutravailEmploisalariéConsommationtotale Pauvreté (1,90dollarUSparjour)

Sources : Bahia et coll., 2020, à paraître.

b. Tanzanie, 2008–2013b

Participationau marchédutravailEmploisalariéConsommationtotale

Besoins fondamentauxpauvreté

Note : Les études examinent les informations géospatiales sur le déploiement des tours de l’internet mobile, combinées à trois séries de données sur les ménages recueillies sur sept ans au Nigeria et à deux séries collectées sur six ans en Tanzanie. Les estimations sur la pauvreté et la consommation incluent tous les individus ou ménages, tandis que les résultats sur le travail n’incluent que les populations en âge de travailler (15 à 64 ans). Les résultats représentent les changements en pourcentage dans les localités couvertes après trois ans ou plus d’exposition à un internet de haute qualité par rapport aux localités non couvertes, après prise en compte des facteurs de confusion potentiels. Chaque point représente l’impact estimé de la couverture de l’internet mobile sur les résultats en matière de travail et de bien-être en utilisant des estimations de différence dans la différence avec des intervalles de confiance de 95 %. Les effets signalés sur la pauvreté dans le graphique ne sont pas comparables. 3G = technologie de communication mobile de troisième génération ; 4G = technologie de communication mobile de quatrième génération.

a. Le niveau de pauvreté des ménages du Nigeria est calculé sur la base du seuil de pauvreté international de 1,90 dollar US par jour (en parité de pouvoir d’achat de 2011) et après application de l’indice des prix à la consommation (IPC) pour tenir compte de l’inflation spatiale et temporelle.

b. En Tanzanie, le niveau de pauvreté des ménages est calculé sur la base du coût d’acquisition d’une quantité de nourriture suffisante pour assurer une nutrition quotidienne adéquate par personne (seuil alimentaire), plus le coût de certains éléments essentiels non alimentaires (composante non alimentaire).

16 Afrique numérique
Intervalle de conf. (95 %) −15 −10 −5 0 5 10 15
Participationau
Impact de la couverture 3G (changement en pourcentage) −15 −10 −5 0 5 10 15 20 Impact de la couverture 3G (changement en pourcentage)

ménages : ceux disposant depuis au moins un an du haut débit mobile augmentent leur consommation totale d’environ 6 %. Ces effets passent à environ 9 % après trois ans ou plus de couverture internet mobile.

La disponibilité de l’internet mobile réduit également la proportion de ménages vivant sous le seuil de pauvreté, une réduction due à une consommation alimentaire et non alimentaire plus élevée dans les ménages ruraux. La proportion de ménages se trouvant sous le seuil d’extrême pauvreté diminue de 4 points de pourcentage après un an de disponibilité de l’internet mobile et de 7 % après trois ans.33 Les résultats en matière de bienêtre sont plus élevés dans les ménages pauvres et ruraux, et sont pour la plupart statistiquement non significatifs dans les ménages urbains, ce qui reflète peut-être le fait que, sur la période d’analyse, la majeure partie des ménages urbains vivaient déjà dans des zones connectées.

Tanzanie. Les estimations d’emplois pour la Tanzanie sont tout aussi significatives, les données sur les emplois étant plus riches et permettant une exploration plus détaillée (Bahia et coll., à paraître).34 La disponibilité d’internet facilite la transition des emplois agricoles vers des emplois salariés et indépendants non agricoles. Le fait de vivre dans des zones couvertes par l’internet mobile réduit le travail indépendant agricole de 7 points de pourcentage après trois ans ou plus de couverture. De même, les personnes en âge de travailler vivant dans des zones où internet est disponible voient leur participation à la vie active, leur emploi salarié et leur travail indépendant non agricole augmenter de 8, 4 et 4 points de pourcentage, respectivement, après trois ans ou plus d’exposition.

Ce sont les hommes plus jeunes (moins de 30 ans), plus instruits (plus que l’enseignement primaire) et les hommes en général qui bénéficient le plus d’une participation accrue à la population active et d’un emploi salarié. La disponibilité de l’internet mobile n’a aucun effet sur la participation globale des femmes à la population active ou sur l’emploi salarié. Les femmes plus qualifiées, instruites et ayant achevé l’école primaire bénéficient néanmoins de l’abandon du travail agricole au profit d’un emploi indépendant non agricole et des entreprises familiales.35

La disponibilité d’internet entraînant ces effets sur l’emploi provoque également des augmentations importantes et positives des niveaux de consommation des ménages : la consommation totale par habitant des ménages résidants dans des zones où la 3G est disponible est environ 10 % plus élevée que dans celles sans couverture après trois ans ou plus d’exposition. La proportion de ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté national est réduite de 7 points de pourcentage après trois ans ou plus de couverture.36

Les gains de bien-être sont plus importants pour les ménages dont le chef est une femme, plus pauvre ou moins éduqué (n’ayant pas terminé l’école primaire).37

Sénégal. Les impacts estimés sur l’emploi au Sénégal sont également positifs pour certaines catégories d’emploi. La disponibilité de la 3G est associée à un emploi formel de 5 % plus élevé que dans les zones non couvertes, même si elle n’a pas d’impact significatif sur l’emploi global (Masaki, Ochoa et Rodríguez-Castelán, 2020).38

Les estimations du bien-être au Sénégal sont également conformes aux résultats obtenus au Nigeria et en Tanzanie, à savoir des effets importants sur la consommation des ménages et la réduction de la pauvreté.39 La consommation totale des ménages disposant d’une couverture 3G est supérieure de 14 % à celle des ménages non couverts, tandis que la consommation non alimentaire moyenne des ménages disposant d’une couverture 3G est supérieure de 26 % à celle des ménages non couverts. Les ménages disposant de la 3G affichent également un taux d’extrême pauvreté inférieur de 10 % à celui des ménages sans couverture.40

Les technologies numériques 17

La disponibilité de la technologie 3G est significativement et positivement corrélée avec la consommation totale et négativement associée à la pauvreté uniquement pour les ménages urbains. La corrélation est toutefois particulièrement prononcée avec la consommation alimentaire des ménages urbains, mais est significative et positive avec la consommation non alimentaire des ménages ruraux ainsi que des ménages plus pauvres. Les effets positifs de la disponibilité de la 3G sur la consommation non alimentaire sont particulièrement prononcés dans les ménages dirigés par un homme. Si l’on répartit l’échantillon par âge (en utilisant 50 ans comme seuil, soit à peu près l’âge médian des chefs de ménage), les effets positifs de la disponibilité des services 3G sur le bien-être sont également plus évidents dans les ménages dirigés par des personnes plus jeunes.

Canaux d’impact indirect

D’autres études empiriques sur l’Afrique examinent les effets indirects sur les de qualité causés par les impacts de la disponibilité d’internet sur l’amélioration de l’adéquation entreprise-travailleur, l’augmentation de la productivité des entreprises grâce à l’esprit d’entreprise, la stimulation de l’innovation et des investissements étrangers, l’extension de l’accès au marché, la diminution des frictions informationnelles, et la stimulation de la croissance économique générale. Le lien entre les emplois et la réduction de la pauvreté, que soulignent les études du Nigeria, du Sénégal et de la Tanzanie, n’est pas explicitement exploré dans la plupart de ces autres études. Avec des données appropriées sur les individus, les effets sur la pauvreté pourraient également être explorés à travers l’impact de la disponibilité d’internet sur les gains de surplus du consommateur pour les personnes à faible revenu et moins instruites.41

Mise en concordance entreprises-travailleurs. L’un des moyens à l’aide desquels internet peut accroître la productivité du travail et la qualité des emplois est l’amélioration de la mise en concordance des entreprises et des travailleurs. Les frictions liées à la recherche et à la mise en relation peuvent être particulièrement importantes dans les pays africains.42 Les TN réduisant les coûts de candidature à un emploi peuvent permettre aux employeurs d’attirer des candidats plus talentueux. Il a été démontré que la réduction des coûts de candidature à un emploi, par l’utilisation d’internet et l’élimination de la nécessité de postuler en personne, permet aux employeurs d’attirer des candidats plus compétents en incitant un réservoir de demandeuses d’emploi, inexpérimentées et sans emploi, ayant peu de chances d’obtenir rapidement un bon poste d’une autre manière. Ces résultats sont motivés par le fait que les coûts de candidature à un emploi sont généralement importants et hétérogènes, et que les candidats hautement qualifiés sont confrontés, en moyenne, à des coûts de candidature plus élevés (Abebe, Caria et Ortiz-Ospina, 2021).43 Les gains dynamiques potentiels de l’assouplissement de ces frictions pourraient être importants si les compétences des travailleurs sont complémentaires du capital et de la technologie.

Même les TN non liés à internet peuvent réduire les coûts de recrutement, notamment pour les agriculteurs à la recherche de travailleurs et pour les travailleurs désirant trouver des emplois dans les exploitations agricoles sur les marchés du travail ruraux. Une application de messagerie basée sur le système de messages courts (SMS) et conçue pour mettre en relation les travailleurs agricoles et les employeurs augmente la taille du marché du travail, en facilitant la prise en compte par les employeurs d’un nouvel ensemble de travailleurs qu’ils n’auraient pas embauchés dans le passé. L’application réduit de 16 à 40 % la dispersion des salaires au sein d’un même village, en incitant les employeurs qui offraient initialement des salaires plus élevés à les réduire et ceux qui offraient des salaires

18 Afrique numérique

plus bas à les augmenter (Jeong, 2020).44 L’application a aidé les employeurs et les travailleurs à mieux se connecter et a ainsi amélioré l’efficacité des marchés du travail ruraux localisés.

Productivité des entreprises, esprit d’entreprise et investissements étrangers. La disponibilité d’internet peut également améliorer la productivité des entreprises et conduire à de meilleurs emplois grâce à une augmentation de l’esprit d’entreprise, de l’adoption d’autres technologies complémentaires et des investissements étrangers. Il existe des signes d’un esprit d’entreprise induit par internet, né dans la foulée de l’arrivée progressive des câbles sous-marins et du déploiement ultérieur des réseaux terrestres en fibre optique à travers l’Afrique : la probabilité qu’un ménage crée une entreprise non agricole est supérieure de 17 points de pourcentage du fait de la disponibilite d’internet (Houngbonon, Mensah et Traore, 2022). Cette augmentation des activités entrepreneuriales est toutefois largement concentrée dans le secteur des services. Le faible coût d’entrée de la création de nombreuses entreprises de services par rapport à l’agroalimentaire et à l’industrie manufacturière est une explication plausible de ce résultat.

Il est également prouvé que la disponibilité d’internet stimule l’innovation dans les processus et les produits : elle augmente de 20 points de pourcentage la probabilité qu’une entreprise introduise une innovation dans les processus et de 12 points dans les produits. L’effet sur l’innovation des processus découle en grande partie de l’adoption de TN pour des fonctions commerciales telles que la vente, la distribution et le marketing, et l’effet est renforcé par la disponibilité de compétences numériques au sein de l’entreprise (Houngbonon, Mensah et Traore, 2022).45

Il est prouvé que la disponibilité d’internet joue un rôle dans la stimulation des investissements directs étrangers (IDE) dans les secteurs bancaire et technologique : elle est associée à une augmentation de 18 points de pourcentage de la probabilité d’IDE dans les services financiers et de 12 points dans les services technologiques (Mensah et Traore, 2022). De même, le nombre de projets d’IDE dans les services financiers a augmenté de 29 % après l’arrivée des câbles internet sous-marins, et la valeur (taille) des IDE a également augmenté. Cet effet est toutefois largement concentré dans les pays disposant d’un approvisionnement fiable en électricité – en grande partie parce que l’électricité est essentielle pour alimenter les dispositifs d’accès tels que les ordinateurs et les téléphones portables utilisant internet.46

Accès au marché. En plus de son impact direct sur l’emploi à travers la productivité de la main-d’œuvre et des entreprises en général du côté offre de la production, la disponibilité d’internet élargit également le côté demande. Une relation positive entre l’utilisation d’internet et les exportations a été constatée dans les pays africains (Hinson et Adjasi, 2009).47 Cette constatation est attribuée au fait que l’utilisation d’internet réduit les coûts d’entrée sur le marché et de recherche associés à l’exportation.

La disponibilité d’internet peut également accroître l’accès aux marchés en réduisant les frictions informationnelles associées à la vente aux grandes entreprises, aux pouvoirs publics et à d’autres gros acheteurs. Des preuves démontrent que les petites entreprises qui participent à un programme leur apprenant à vendre à des acheteurs plus importants obtiennent environ trois fois plus de contrats que les non-participantes, mais seulement si elles ont accès à internet (Hjort, Iyer et de Rochambeau, 2020).48

Frictions informationnelles. La disponibilité d’internet peut également développer la demande en réduisant les frictions informationnelles. Une illustration désormais classique des avantages des TN pré-internet est la réduction de la dispersion des prix

Les technologies numériques 19

associée à l’adoption des téléphones mobiles de deuxième génération (2G) par les pêcheurs et les grossistes dans l’État indien du Kerala (Jensen, 2007).49 Des preuves similaires sont disponibles en Afrique – par exemple, une réduction de 10 à 16 % de la dispersion des prix à la consommation du millet au Niger (Aker, 2010) et une réduction de 6 % de la dispersion spatiale des prix à la production du niébé, une denrée semi-périssable, également au Niger (Aker et Fafchamps, 2014). Ces deux résultats étaient liés au déploiement de la couverture de la téléphonie mobile 2G.

Le déploiement des réseaux internet 3G en Éthiopie (Abreha et coll., 2021) montre bien comment la disponibilité d’internet peut stimuler l’emploi en comblant l’asymétrie d’information entre acheteurs et vendeurs.50 Les entreprises opérant dans les zones où la 3G est disponible enregistrent une baisse de 29 % des marges, une hausse de 18 % de la productivité des entreprises, et une augmentation de 28 % des emplois. Ces résultats sont interprétés comme résultant d’une concurrence accrue, les consommateurs prenant conscience des informations sur les prix et de l’existence d’un plus grand nombre d’alternatives sur les marchés voisins, et les entreprises réagissant à la concurrence accrue et à la compression des marges bénéficiaires en réduisant leurs coûts – l’augmentation de la productivité permettant l’expansion de la production et la création d’emplois. Croissance économique globale. Enfin, il est prouvé que la disponibilité d’internet stimule la croissance économique globale, l’expansion de l’emploi étant supposée découler de l’expansion de la production accompagnant une croissance plus rapide. Un lien de causalité est démontré entre la disponibilité d’internet et la croissance économique, qui augmente en moyenne de 2 points de pourcentage dans les villes de 10 pays d’Afrique subsaharienne ayant bénéficié de l’arrivée des connexions par câble sous-marin, par rapport aux villes similaires pas encore connectées (Goldbeck et Lindlacher, 2021).51 Les régions qui se connectent plus tôt se retrouvent avec de plus fortes parts décroissantes de l’agriculture et croissantes de l’industrie manufacturière et des services que les régions qui se connectent relativement plus tard, ce qui suggère que l’augmentation de l’activité économique provient de l’évolution des parts de l’industrie induite par l’arrivée de la disponibilité d’internet. Une approche empirique complémentaire, basée sur des données agrégées au niveau national concernant les abonnements à l’internet mobile et la part de la population des utilisateurs d’internet, révèle également un impact causal sur l’augmentation de la croissance de la production par travailleur ainsi que sur la réduction de la pauvreté et des inégalités de revenus (Calderón et Cantú, 2021).52 Le rendement de l’investissement dans l’infrastructure numérique semble être plus important si l’on considère les connexions 3G et 4G conjointement plutôt qu’individuellement. En outre, l’expansion du réseau d’infrastructures numériques engendre des rendements de croissance plus élevés dans les pays dont le capital humain et le taux d’accès à l’électricité sont plus importants. La combinaison des connexions 3G et 4G par habitant a un impact sur la croissance économique principalement à travers la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF), tandis que les utilisateurs d’internet développent l’économie par le canal de l’accumulation du capital. Enfin, si l’on constate que l’utilisation d’internet a un effet significatif sur la réduction de la pauvreté, on constate également que les connexions mobiles ont un effet significatif sur la réduction des inégalités de revenus.

Impacts des TN liées à la finance et à l’agriculture

Dans l’ensemble des pays africains, la pauvreté est un phénomène essentiellement rural : 82 % des Africains pauvres sont des ruraux, qui gagnent leur vie principalement dans

20 Afrique numérique

l’agriculture ou dans des activités qui y sont liées quand ils travaillent en dehors d’une exploitation (Beegle et Christiaensen, 2019). Les microentreprises informelles sont la principale source d’emplois et de revenus non agricoles pour les personnes pauvres ou quasi pauvres. Il est frappant de constater que la pauvreté rurale est plus élevée dans les zones présentant un meilleur potentiel agroécologique. Cela indique un point d’entrée pour les politiques visant soit à renforcer les opportunités de revenus des personnes pauvres là où elles se trouvent, soit à les aider à se connecter à des opportunités de revenus ailleurs. Par conséquent, des TN simples à utiliser et adaptées aux compétences pourraient à la fois augmenter la productivité des personnes restant dans les emplois agricoles et aider à s’y connecter celles cherchant des emplois ailleurs.

Services financiers

Applications de monnais electroniques. La monnais electronique est la TN africaine la plus importante et la plus connue qui ajoute de la valeur à un téléphone numérique. Elle est simple à adopter et à employer, est largement utilisée par les ménages et les particuliers à faible revenu ainsi que par les entreprises et les pouvoirs publics pour effectuer et recevoir des paiements, et elle peut générer des avantages immédiats visibles.

Lancée en 2007 par Safaricom, l’application de monnais electronique M-Pesa était présente dans 97 % des foyers kenyans en 2014.53 Il existe des preuves causales robustes qu’un meilleur accès à la monnais electronique a conduit à de meilleurs emplois et à une réduction de la pauvreté au fil du temps. Au Kenya, les impacts à plus long terme de M-Pesa incluent des changements significatifs dans le choix de la profession, en grande partie chez les femmes ; par exemple, 185 000 femmes ont abandonné l’agriculture comme occupation principale au profit du commerce et de la vente au détail – des activités offrant un potentiel de revenus plus élevé (Suri et Jack, 2016).

Un meilleur accès aux services de monnais electroniques a également permis d’accroître la résilience financière, avec une augmentation significative de l’épargne totale. Les résultats sur le marché du travail et la résilience financière accrue sont à leur tour associés à une augmentation de la consommation des ménages et à une réduction des taux de pauvreté au Kenya : ces derniers ont diminué de 2 points de pourcentage, 196 000 ménages étant sortis de l’extrême pauvreté, avec des réductions plus marquées parmi les ménages dirigés par des femmes (Suri et Jack, 2016).54 Dans les zones rurales du nord de l’Ouganda, le déploiement de monnais electrinique a doublé le taux d’emploi indépendant non agricole, qui est passé de 3,4 % à 6,4 %, et a réduit la fraction des ménages à très faible sécurité alimentaire de 62,9 % à 47,2 % dans les zones éloignées d’une agence bancaire (Wieser et coll., 2019).55

En outre, M-Pesa a facilité Kilimo Salama, un indice météorologique et un programme d’assurance des récoltes, en servant de plateforme de paiement. Kilimo Salama aide les agriculteurs à mieux gérer les risques naturels tels que la sécheresse ou les précipitations excessives en s’appuyant sur les données des stations météorologiques automatisées. Les agriculteurs peuvent se prémunir contre les incertitudes de production, car ils sont indemnisés s’ils subissent des pertes. Les ménages sont ainsi incités à augmenter leur utilisation d’intrants pour améliorer la productivité des cultures (Sibiko et Qaim, 2020). L’adhésion annuelle des ménages à l’assurance a fortement augmenté, passant de 1,3 à 3,5 % en 2009, lorsque Kilimo Salama a été lancé au Kenya, à environ 34 % en 2012 (Kirimi, Njue et Mathenge, 2015). Elle est devenue ACRE (Agriculture and Climate Risk Enterprise Ltd) en 2014, avec des projets fournissant des solutions de gestion des risques pour réduire les risques agricoles et climatiques au Ghana, au Kenya, au Malawi, au Mozambique, en Tanzanie et en Ouganda.

Les technologies numériques 21

Il a également été démontré que l’accès aux services de monnais electronique augmente l’activité économique locale générale. Par exemple, il augmente l’intensité des lumières du soir d’environ 9 % (Fabregas et Yokossi, 2022).56 Les effets positifs sont plus prononcés dans les zones initialement plus riches, urbaines et reliées aux routes et aux banques. Ces résultats suggèrent que la présence d’infrastructures complémentaires peut renforcer le potentiel économique de la monnais electronique. Ils sont cohérents avec l’idée que l’argent mobile affecte la croissance économique globale plutôt que la simple redistribution des revenus des zones les plus riches vers les zones les plus pauvres – en permettant aux personnes à faible revenu de se connecter, d’échanger et de répartir les investissements au sein de leurs réseaux.

Accès au crédit. Une innovation de TN plus récente est l’utilisation de règles de notation ou d’algorithmes basés sur les enregistrements des transactions des utilisateurs pour accorder des crédits financiers. En 2011, la société kenyane Safaricom s’est associée à la Commercial Bank of Africa pour créer M-Shwari, un produit de microcrédit et de microépargne devenu l’un des produits de prêt numérique les plus populaires au monde.57 Il existe des preuves solides que ces prêts numériques peuvent réduire considérablement les coûts associés aux prêts et aux emprunts, ce qui entraîne une forte adhésion et une amélioration de la résistance des ménages aux chocs, réduisant ainsi la pauvreté (Suri, Bharadwaj et Jack, 2021).58

M-Shwari a un taux de pénétration global de près de 34 % au sein de la population éligible étudiée, et en l’espace de deux ans, ceux qui étaient initialement qualifiés ont obtenu 37 % de prêts supplémentaires. L’augmentation des crédits aux ménages est entièrement due au fait que M-Shwari a véritablement élargi l’accès au crédit.59 Les prêts améliorent la résilience des ménages et ont le potentiel de réduire la pauvreté en permettant une augmentation de leurs dépenses d’éducation : les ménages bénéficiaires sont 6,3 points de pourcentage moins susceptibles de renoncer à ces dépenses en raison de chocs négatifs.60

Assurance. L’une des applications potentiellement les plus transformatrices des services financiers numériques en Afrique est l’assurance, en particulier l’assurance agricole. En l’absence d’une protection adéquate contre les risques, une mauvaise récolte due à une pluviosité altérée par le changement climatique, à la sécheresse ou à d’autres phénomènes météorologiques volatils peut être catastrophique pour n’importe lequel des quelque 65 millions de petits exploitants agricoles. La diminution de l’épargne ou des ressources peut entraîner une réduction des quantités de semences, de la taille des exploitations et de la volonté d’adopter des variétés à plus haut rendement.

Pula, une entreprise de microassurance fondée en 2015 et basée à Nairobi, a créé un nouveau marché en offrant une protection d’assurance aux personnes à faible revenu qui n’ont pas accès à une couverture conventionnelle. Pula conçoit et fournit des produits d’assurance basés sur l’indice de rendement pour protéger les agriculteurs en proposant ses produits aux compagnies d’assurance et autres intermédiaires offrant une assurance aux agriculteurs. Elle dessert plus de 6 millions de petites exploitations agricoles dans plus de 15 pays d’Afrique et d’Asie à travers de tels intermédiaires.61

Ressources d’information et de connaissances

En plus de faciliter l’accès à un financement et à des produits d’assurance personnalisés capables d’aider les agriculteurs à acheter et à adopter de meilleures technologies agricoles, les TN peuvent directement augmenter la productivité agricole des agriculteurs individuels et favoriser la création d’emplois en fournissant des informations

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scientifiques et personnalisées pour cibler les intrants agricoles et augmenter les rendements. Cette aide est particulièrement utile face au stress environnemental et au changement climatique qui affectent les sols, l’eau et les conditions météorologiques des différentes cultures.62

Les messages de vulgarisation agricole simples, basés sur les SMS, ont certes un impact modeste dans l’ensemble, mais étant donné le faible coût des SMS, ces programmes peuvent être rentables pour modifier le comportement des agriculteurs. La répétition des mêmes messages a un effet statistiquement significatif sur l’adoption d’intrants (Fabregas, Kremer, Lowes et coll., 2019).63

Des SMS plus spécialisés peuvent avoir des impacts plus marqués, en particulier pour les agriculteurs les moins qualifiés. Par exemple, l’envoi de SMS à des petits exploitants de canne à sucre sous contrat pour leur indiquer à quel moment effectuer des certaines tâches agricoles a permis d’augmenter les rendements de 11,5 % par rapport à un groupe témoin ne recevant aucun message (Casaburi et coll., 2019). Ces effets sont concentrés parmi les agriculteurs qui n’avaient aucune formation en agronomie et peu d’interaction avec le personnel de la société de canne à sucre au départ.64 Les résultats fournissent des preuves que les TN peuvent affecter l’efficacité des chaînes d’approvisionnement agricoles.

Des vidéos en langues locales sur des tablettes et une application d’aide à la décision sur smartphone, utilisées par des agents de vulgarisation pour fournir des conseils personnalisés à des agriculteurs individuels, ont augmenté les rendements des cultures et les bénéfices des agriculteurs à faible revenu. En Ouganda, les petits exploitants de maïs à qui l’on a montré une courte vidéo sur les pratiques améliorées de culture du maïs obtiennent de bien meilleurs résultats à un test de connaissances, sont plus susceptibles d’appliquer les pratiques recommandées et d’utiliser des engrais que les ménages qui n’ont pas visionné la vidéo. Ces agriculteurs ont également obtenu des rendements de maïs supérieurs d’environ 10,5 % à ceux des ménages n’ayant pas regardé la vidéo (Campenhout, Spielman et Lecoutere, 2021).65 En Éthiopie, un service de vulgarisation décentralisé et un service de vulgarisation combiné à la vidéo augmentent tous deux les pratiques de gestion intégrée de la fertilité des sols pour les principales cultures céréalières des petits exploitants. L’intervention vidéo supplémentaire a eu un effet complémentaire significatif chez les agriculteurs des communautés de traitement qui n’ont pas participé activement aux activités de vulgarisation (Hörner et coll., 2019).66

Au Nigeria, les ménages riziculteurs qui ont reçu des conseils personnalisés sur la gestion des nutriments grâce à une application d’aide à la décision sur smartphone ont augmenté leurs rendements d’environ 7 % en moyenne et leurs bénéfices tirés du riz d’environ 10 %. Comme l’illustre la figure 1.6, les ménages ayant reçu des conseils personnalisés combinés avec une subvention finançant le niveau d’engrais recommandé ont augmenté leur rendement d’environ 20 % et leur bénéfice d’environ 23 % (Arouna et coll., 2021).67

L’utilisation de l’application tend à diminuer la quantité moyenne d’engrais utilisée. Les auteurs concluent que les recommandations personnalisées fournies à moindre coût par les TN pourraient améliorer la productivité et les moyens de subsistance en Afrique sans nécessairement augmenter la quantité globale d’engrais chimiques utilisés et leurs effets négatifs sur l’environnement.

Services de mécanisation. Une autre application des TN adaptée aux compétences concerne la location de tracteurs et autres machines agricoles onéreuses pour permettre aux petits agriculteurs de profiter de services de mécanisation. Les constatations faites à ce jour indiquent des effets limités sur la réduction des coûts de transaction pour les

Les technologies numériques 23

FIGURE 1.6 Impact de l’outil d’aide à la décision sur les rendements et les bénéfices des riziculteurs nigérians

Source : Arouna et coll., 2021, figure 3.

Note : Les distributions des valeurs postérieures à l’expérience (regroupées pour 2016 et 2017) sont montrées par groupe de traitement pour les rendements et les bénéfices du riz. Les lignes verticales indiquent les valeurs moyennes par groupe de traitement. ha = hectares ; t/ha = tonnes par hectare.

agriculteurs, car le principal fournisseur, Hello Tractor, n’a pas encore proposé d’interface numérique aux agriculteurs (Daum et coll., 2021).68 Les effets sur les coûts de transaction sont également limités pour les prestataires de services ne possédant que quelques tracteurs, car ils s’appuient sur la fourniture conventionnelle de services de mécanisation, réduisant les coûts de transaction et les risques en se concentrant sur les clients de confiance. Ces TN semblent néanmoins réduire les coûts de supervision et de commercialisation des prestataires de services de tracteurs migrateurs à grande échelle, qui opèrent sur de grandes distances et avec des clients inconnus. Si Hello Tractor contribue

24 Afrique numérique Contrôle moyenne T1 moyenne T2 moyenne 0 0,1 0,2 0,3 0,4 Densité RiceAdvice (T1) 0 2,0 4,0 6,0 8,09,0 1,0 3,0 5,07,0
Contrôle moyenne T1 moyenne T2 moyenne Densité 0 0,0002 0,0004 0,0006 0,0008 01 000 500 1 500 –500 2 000 3 000 4 000 3 500 2 500 Contrôle
Bénéfice
a. Rendements du riz (C)
Rendement
du riz (t/ha) RiceAdvice + subvention (T2) (dollars US/ha) b. Bénéfices des exploitations rizicoles

à créer une plus grande offre de services de tracteurs, cela peut indirectement profiter aux petits exploitants agricoles. Un autre avantage est que les agents de réservation sont plus susceptibles d’accepter les demandes des agricultrices.69

Le retard d’usage d’internet en Afrique

L’écart d’adoption d’internet est resté irréductible en Afrique, tant dans l’absolu, en ce qui concerne la disponibilité d’internet sur le continent, que de manière relative, comparé à l’adoption d’internet dans d’autres régions. L’Afrique est la région du monde où l’écart d’adoption est le plus élevé en part de la population des pays africains où internet est disponible (74 % à la fin de 2021). Autrement dit, près des trois quarts des Africains bénéficiant d’une couverture 3G+ ne sont pas des utilisateurs d’internet.

Écarts entre l’Afrique et les autres régions

Écart de disponibilité d’internet

L’expansion des réseaux compatibles avec internet (3G et 4G) a augmenté la disponibilité, mais l’Afrique reste à la traîne des autres régions (Atiyas et Dutz, 2022). La figure 1.7 montre l’évolution des réseaux de services mobiles compatibles avec internet dans différentes régions du monde. Dans le cas des réseaux 3G (panneau a), la figure montre une nette convergence de la disponibilité dans toutes les régions au cours de la dernière

Asie de l’Est et Pacifique Moyen-Orient et Afrique du Nord

Europe et Asie centrale Amérique du Nord

Amérique latine et Caraïbes Asie du Sud Afrique subsaharienne

Source : Atiyas et Dutz (2022), basé sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA). Note : La figure intègre des données 2015-2021 actualisées, basées sur une méthodologie de 2022 améliorée pour le calcul des abonnés uniques. La disponibilité de l’internet mobile – le pourcentage de la population vivant dans des zones couvertes par des signaux de troisième génération (3G) ou de quatrième génération (4G) – est exprimée sous forme de moyennes non pondérées de l’ensemble des pays de chaque région, par rapport à la population totale des pays. En accordant une importance égale à chaque pays, l’hétérogénéité entre les pays est mise en évidence. Les régions sont définies selon les classifications de la Banque mondiale. L’« Amérique du Nord » comprend les Bermudes, le Canada et les États-Unis.

Les technologies numériques 25
FIGURE 1.7 Disponibilité des réseaux compatibles avec internet (3G et 4G), par région, 2010–2021
Part de la population (%) 2010 20112012201320142015201620172018201920202021 2010 20112012201320142015201620172018201920202021 Part de la population (%) 0 20 40 60 80 100
Disponibilité de la 3G
Disponibilité de la 4G 0 20 40 60 80 100
a.
b.

décennie – en particulier en Afrique subsaharienne au cours des dernières années, probablement, du moins en partie, grâce à l’augmentation des investissements répondant à la demande née au début de la pandémie de COVID-19. À la fin de 2021, les réseaux 3G étaient disponibles pour au moins 90 % de la population dans toutes les régions (89,4 % de la population en Asie du Sud), à l’exception de l’Afrique subsaharienne, où la disponibilité n’était que de 84 % – malgré l’augmentation notable par rapport aux 62,9 % de la fin de 2017.

Quant à la disponibilité des réseaux 4G (panneau b), au cours de la dernière décennie, toutes les autres régions du monde ont convergé vers le niveau nord-américain plus rapidement que l’Afrique subsaharienne, dont la disponibilité n’était que de 62,5 % en 2021. En 2012, la couverture 4G de la région était de 8,8 %, devant l’Asie du Sud (3,1 %), mais l’ordre s’inverse en 2021 avec 87,2 % en Asie du Sud contre 62,5 % en Afrique subsaharienne.

Écarts d’adoption et d’utilisation d’internet

L’adoption et l’utilisation de l’internet mobile ont également progressé en Afrique au cours de la dernière décennie, mais l’écart avec les autres régions s’est creusé (Atiyas et Dutz, 2022). Le nombre des abonnements uniques à l’internet mobile 3G+ a progressé au cours de la dernière décennie en Afrique subsaharienne, atteignant 22 % de sa population à la fin de 2021 (figure 1.8). Il subsiste toutefois un écart croissant, car l’adoption et l’utilisation d’internet ont augmenté plus rapidement dans d’autres régions.

Source : Atiyas et Dutz (2022), basé sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA).

Note : La figure intègre des données 2015-2021 actualisées, basées sur une méthodologie de 2022 améliorée pour le calcul des abonnés uniques. L’utilisation (abonnés uniques à l’internet mobile) est exprimée sous forme de moyennes non pondérées de l’ensemble des pays de chaque région, par rapport à la population totale des pays. En accordant une importance égale à chaque pays, l’hétérogénéité entre les pays est mise en évidence. Il y a une discontinuité en 2015 en raison d’un changement méthodologique, mais les tendances générales ne sont pas affectées. Les régions sont définies selon les classifications de la Banque mondiale. Les régions sont définies selon les classifications de la Banque mondiale. L’« Amérique du Nord » comprend les Bermudes, le Canada et les États-Unis.

26 Afrique numérique
FIGURE 1.8 Utilisation unique de l’internet mobile 3G+, par région, 2010–2021
0 10 20 30 40 5 60 70 80 Part de la population (%) 20102011201220132014201520162017201820192020 2021 Asie de l’Est et Pacifique Amérique du Nord Amérique latine et Caraïbes Moyen-Orient et Afrique du Nord Europe et Asie centrale Asie du Sud Afrique subsaharienne

Plus alarmant encore, l’utilisation de l’internet mobile a progressé nettement plus lentement que l’augmentation de la disponibilité (Atiyas et Dutz, 2022). La figure 1.9 montre l’évolution de la disponibilité de la couverture internet de 3G au moins par rapport à l’utilisation de l’internet mobile, définie comme les abonnements uniques à l’internet mobile en pourcentage de la population de l’Afrique subsaharienne pays par pays. La figure montre que le taux d’augmentation de la disponibilité (la pente de la courbe de la couverture) a été plus élevé que celui de l’utilisation : l’écart d’utilisation en pourcentage de la population totale, défini comme la distance entre les deux lignes, est nettement plus important en 2021 qu’en 2010. En 2021, la disponibilité des réseaux 3G atteignait 84 % de la population régionale, contre une utilisation de 22 %, soit un écart d’utilisation de 62 %.

L’écart d’utilisation de l’internet mobile (la proportion des utilisateurs non connectés par rapport au nombre total de personnes couvertes) de l’Afrique subsaharienne est le plus élevé du monde en raison de la faible augmentation de l’utilisation dans la région par rapport à la disponibilité au cours des dernières années. L’Afrique affiche l’écart d’utilisation le plus élevé (62 %) en part de sa population (figure 1.10, panneau a), ainsi que l’écart d’adoption le plus important (74 %) de toutes les régions du monde (figure 1.10, panneau b). Près des trois quarts des Africains couverts par la 3G+ ne sont pas connectés et n’ont pas d’abonnement (Atiyas et Dutz, 2022). En revanche, l’écart d’adoption des autres régions a continué de se réduire.

Malgré l’augmentation des investissements dans les infrastructures au cours des dernières années, l’adoption et l’utilisation n’ont pas augmenté en proportion. Cela semble indiquer que les faibles adoption et utilisation ne résultent pas principalement de la disponibilité physique des réseaux, même s’il est, au moins en partie, lié à l’accessibilité financière et à la qualité inégale des services, qui n’offrent souvent pas la vitesse et la latence minimales requises pour une utilisation efficace.

FIGURE 1.9 Écart entre la couverture et l’utilisation de l’internet mobile en Afrique subsaharienne, 2010–2021

201220132014201520162017201820192020

Couverture 3G+ Abonnements uniques à l’internet mobile

2021

Source : Atiyas et Dutz (2022), basé sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA).

Note : La figure intègre des données 2015-2021 actualisées, basées sur une méthodologie de 2022 améliorée pour le calcul des abonnés uniques. La disponibilité de l’internet mobile (couverture 3G+) et son utilisation (abonnés uniques à l’internet mobile) sont exprimées sous forme de moyennes non pondérées de l’ensemble des pays de l’Afrique subsaharienne, par rapport à la population totale des pays. En accordant une importance égale à chaque pays, l’hétérogénéité entre les pays est mise en évidence. L’Érythrée n’est pas incluse en raison du manque de données sur la couverture. 3G+ = technologie internet mobile de troisième génération (ou plus récente).

Les technologies numériques 27
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
Part de la population (%)
20102011

FIGURE 1.10 Utilisation d’internet et écarts, par région

a. Utilisation d’internet et écarts d’utilisation et de couverture, par région, 2021a

b. Écart d’adoption d’internet, par région, 2010-2021

Asiedel’EstetPacifiqueEuropeetAsiecentrale

AmériquelatineetCaraïbes

Moyen-OrientetAfriqueduNordAmériqueduNordAsieduSud

Afriquesubsaharienne

Utilisateurs d’internet Écart d’utilisation Écart de couverture

Part des non-utilisateurs d'internet parmi ceux ayant une couverture 3G+ (%)

Source : Atiyas et Dutz 2022, basé sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA).

Note : La figure intègre des données 2015-2021 actualisées, basées sur une méthodologie de 2022 améliorée pour le calcul des abonnés uniques. Ils sont calculés comme 1-(abonnements mobiles uniques/couverture 3G+) en pourcentage. La figure ne comprend pas l’Érythrée par manque de données sur la couverture. Les écarts d’adoption sont exprimés sous forme de moyennes régionales non pondérées de l’ensemble des pays (en accordant une importance égale à chaque pays, l’hétérogénéité entre les pays est mise en évidence). Les régions sont définies selon les classifications de la Banque mondiale. L’« Amérique du Nord » comprend les Bermudes, le Canada et les États-Unis. 3G+ = technologie internet mobile de troisième génération (ou plus récente).

a. Les écarts d’utilisation et de couverture sont définis en pourcentage de la population régionale totale.

b. Les écarts d’utilisation sont définis comme la part de toutes les personnes ayant accès à internet qui n’ont pas commencé à l’utiliser.

Écarts par catégorie de revenu des pays

Les niveaux relativement faibles de disponibilité et d’utilisation des services de l’internet mobile pourraient simplement refléter le fait que les pays sont plus pauvres, avec moins de revenus à consacrer à l’internet mobile. Pour explorer cette possibilité, la figure 1.11 compare les données relatives à la disponibilité et à l’adoption des services dans différents pays regroupés par catégorie de revenu en 2022 : faible revenu (28 pays, dont 24 en Afrique subsaharienne) ; revenu intermédiaire de la tranche inférieure (54 pays, dont 17 en Afrique subsaharienne) ; et revenu intermédiaire de la tranche supérieure (54 pays, dont 6 en Afrique subsaharienne). Pour chaque catégorie de revenu, la figure montre la disponibilité moyenne de la 3G et de la 4G, le nombre d’abonnés uniques à la téléphonie mobile (y compris les téléphones 2G et 2,5G) et le nombre d’abonnés uniques à l’internet mobile en Afrique subsaharienne et dans les pays extérieurs à la région pour les années 2010 et 2019.

La figure montre que l’Afrique subsaharienne est à la traîne dans toutes les catégories de revenu. Les écarts les plus importants sont observés pour les abonnés uniques à l’internet mobile dans les pays à revenu intermédiaire et pour la couverture 4G dans toutes les catégories de revenu. L’expansion de la disponibilité et de l’utilisation des services mobiles et de l’internet mobile en Afrique subsaharienne est en retard par rapport aux pays pairs dans la plupart des catégories de revenu. En outre, les écarts ne se sont pas

28 Afrique numérique
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Asie de l’Est et Pacifique Europe et Asie centralea
latine et Caraïbes Moyen-Orient et Afrique du Nord Amérique du Nord Asie du Sud Afrique subsaharienne 49 72 53 52 75 38 22 44 26 42 45 24 52 62 7 2 6 3 1 11 16 0 20 10 40 30 60 50 80 70 90 100
Amérique
Part de la population (%)

FIGURE 1.11 Disponibilité et utilisation moyennes de l’internet mobile en Afrique subsaharienne par rapport aux autres régions, par type de technologie, 2010 et 2021

Source : Bases de données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) et des Indicateurs du développement dans le monde.

Note : La figure exclut les données 2010 sur la couverture 4G en raison de leur faible disponibilité à l’époque et des données manquantes pour certains pays. Les catégories de revenus suivent la classification des revenus du Groupe de la Banque mondiale en 2022. 3G = technologie de communication mobile de troisième génération ; 4G = technologie de communication mobile de quatrième génération.

comblés au fil du temps. Il est important de noter que cette analyse comparative met en évidence le fait que la disponibilité et l’adoption relativement plus faibles en Afrique subsaharienne ne sont pas uniquement le reflet de revenus plus bas, mais que d’autres facteurs jouent également un rôle important.70

Écarts au sein et à travers l’Afrique

Les écarts d’adoption, presque tous supérieurs à 50 %, varient considérablement d’un pays d’Afrique à l’autre. Ils varient de 47 % et 51 % pour l’Afrique du Sud et les Seychelles, et à 90 % et 89 % pour le Soudan du Sud et la République centrafricaine (figure 1.12). Ils reflètent tous la non-utilisation d’un actif d’infrastructure devenu disponible.

Combler les écarts d’adoption requiert des politiques et des investissements stimulant l’adoption et l’utilisation, mais pas nécessairement des investissements supplémentaires dans les infrastructures de télécommunications – sauf dans la mesure où ils augmentent la concurrence sur le marché en tant que moteur de la réduction des prix et de l’amélioration de la qualité. Les mesures de l’écart d’adoption cachent à quel point les pays ont amélioré la disponibilité des infrastructures. Le Bénin, la Guinée-Bissau et l’Éthiopie présentent tous des écarts d’adoption supérieurs à 85 %, alors que la quasi-totalité de leur population est couverte par la 3G. A contrario, les écarts d’utilisation sont similaires en République centrafricaine, en République démocratique du Congo et en Guinée

Les technologies numériques 29
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
Autre Afrique subsaharienne
Autre Afrique subsaharienne Autre Afrique subsaharienne 2010 2021 2010 2021 2010 2021 Faible revenu Autre Afrique subsaharienne Part de la population (%) Intermédiaire de la tranche inférieure Intermédiaire de la tranche supérieure Couverture 4G Couverture 3G Pénétration unique de la téléphonie mobile Pénétration unique de l’internet mobile Autre Afrique subsaharienne
Autre Afrique subsaharienne

FIGURE 1.12 Écarts d’adoption de l’internet mobile en Afrique subsaharienne, par pays, 2021

Source : Données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) pour 2021. Note : Les écarts d’utilisation sont définis comme la part des personnes ayant accès à internet qui n’ont pas commencé à l’utiliser. Ils sont calculés comme suit : 1-(abonnements uniques à l’internet mobile/population ayant une couverture 3G+) en pourcentage. La figure ne comprend pas l’Érythrée en raison du manque de données sur la couverture. 3G+ = technologie de l’internet mobile de troisième génération (ou plus récente).

équatoriale, alors que moins de deux tiers de la population y sont couverts par la 3G. Les solutions pour combler les écarts d’utilisation et de couverture sont bien sûr multidimensionnelles et nécessitent des investissements supplémentaires dans les infrastructures de télécommunications ainsi que des politiques et des investissements stimulant l’adoption et l’utilisation.

En partant du principe que la réduction de la pauvreté est un objectif clé, une analyse des caractéristiques démographiques et socioéconomiques des utilisateurs d’internet est utile pour comprendre la complémentarité de la disponibilité et de l’accessibilité financière des infrastructures de télécommunication pour stimuler l’adoption et l’utilisation. Les écarts d’adoption basés sur la couverture et les écarts d’utilisation basés sur la population sont relativement similaires au Nigeria et au Sénégal : 65 % contre 62 % pour l’adoption, 51 % contre 58 % pour l’utilisation (tableau 1.1).71

L’écart d’utilisation plus faible au Nigeria reflète en partie le défi de disponibilité plus grand par rapport au Sénégal : 22 % contre 6 % de personnes n’ont pas accès à un service internet. Dans les deux pays, le manque de disponibilité est en grande partie un problème rural : plus de 95 % des personnes non couvertes vivent en milieu rural. Il est essentiel d’étendre la couverture à la population non couverte et de stimuler l’adoption des services par les personnes déjà couvertes. Au Sénégal, 13 % des personnes vivant sous le seuil de pauvreté de 3,20 dollars US par jour ne sont pas couvertes, alors que ce taux n’est que de 3 % pour les personnes vivant au-dessus du seuil de pauvreté. Cela indique que les personnes pauvres sont beaucoup plus susceptibles de vivre dans des zones non couvertes. En outre, parmi les pauvres vivant dans des zones couvertes, seuls 13 % ont indiqué utiliser internet72 – ce qui prouve que les écarts d’utilisation et d’adoption sont élevés parmi les personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté – alors que 45 % des personnes non pauvres déclarent l’utiliser.

30 Afrique numérique
76 86 58 76 75 52 75 89 83 85 78 73 81 86 71 89 75 73 78 88 69 72 83 81 79 85 63 52 70 64 82 74 76 80 51 73 87 47 90 73 75 69 78 75 78 69 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Angola Part de la population (%) Bénin BotswanaBurkinaFasoBurundiCaboVerdeCameroun République centrafricaineTchadComores République démocratiqueduCongoCongoGuinéeCôted'IvoireéquatorialeEswatiniÉthiopieGabon GhanaGuinée Guinée-BissauKenyaLesothoLibériaMadagascarMalawiMaliMauritanieMauriceMozambiqueNamibieNigerNigeriaRwandaSénégalSeychellesSierraLeoneSomalieAfriqueduSudSoudanduSudSoudanSãoToméetPrincipeTanzanie 80 Gambie Togo OugandaZambieZimbabwe

TABLEAU 1.1 Écarts de couverture, d’utilisation et d’adoption au Nigeria et au Sénégal, par caractéristique des utilisateurs, 2018/2019

Écart d’utilisation (en part de la population)

Écart d’adoption (en part de la population couverte)

Couverts par la 3G et connectés Écart d’adoption (en

Non couverts (3)

Couverts par la 3G et non connectés

part de la population couverte) Couverts par la 3G et connectés Moyenne de la

Moyenne de la population population Part de la population 21,9 50,9 65,2 27,2 100* 5,9 58,3 61,9 35,8 100,0 Seuil de revenu En dessous 34,1 51,6 78,4 14,2 44,3 8,6 69,0 75,5 22,4 58,3 Au-dessus 12,2 50,3 57,4 37,4 55,7 2,2 43,0 44,0 54,8 41,7 Seuil de pauvreté (3,20 dollars US) En dessous 13,0 74,1 85,2 12,9 27,9 Au-dessus 3,2 52,1 53,8 44,8 72,1 Urbain 1,1 50,1 50,7 48,8 29,2 0,7 47,8 48,1 51,6 52,6 Rural 30,5 51,2 73,9 18,1 70,8 11,7 69,8 79,1 18,4 47,4 Hommes 22,0 45,6 58,3 32,6 48,5 6,1 52,6 56,0 41,3 43,8 Femmes 21,8 55,9 71,8 22,0 51,5 5,8 62,7 66,6 31,5 56,2 Âge 15 à 24 ans 21,8 47,5 60,6 30,9 34,0 5,7 58,0 61,6 36,2 35,9 25 à 40 ans 21,9 48,8 62,8 29,0 37,9 5,7 49,9 52,9 44,4 35,9 41 ans et plus 22,0 57,3 73,5 20,6 28,1 6,5 69,3 74,1 24,3 28,2 Éducation Instruits 17,5 49,5 60,1 32,9 77,7 3,1 46,6 48,1 50,3 53,8 Analphabètes 37,3 55,4 87,8 7,7 22,3 9,2 71,8 79,1 19,0 46,2 (suite)

Les technologies numériques 31
Nigeria Sénégal
Groupes de distribution
Non couverts (3)

TABLEAU 1.1 Écarts de couverture, d’utilisation et d’adoption au Nigeria et au Sénégal, par caractéristique des utilisateurs, 2018/2019 (suite)

Infrastructures complémentaires

Source : Enquête générale auprès des ménages (EGM) du Nigeria 2018/2019, vague 4 ; Enquête harmonisée sur les conditions de vie des ménages (EHCVM) du Sénégal 2018/2019. Note : Alors que les « écarts d’utilisation » concernent les personnes couvertes par la 3G, mais non connectées par rapport à la population totale, les « écarts d’adoption » concernent les personnes non connectées à la 3G par rapport aux personnes couvertes par la 3G. Le seuil de pauvreté est de 3,20 dollars US (en parité de pouvoir d’achat de 2011). Les statistiques sont basées sur les individus de 15 à 64 ans. Les colonnes « Non couverts (3G) » indiquent le pourcentage des personnes vivant dans des zones non couvertes par le 3G. Les colonnes intitulées « Couverts par la 3G et non connectés » indiquent le pourcentage des personnes vivant dans des zones couvertes par la 3G qui ont indiqué ne pas utiliser internet (écart d’adoption), tandis que les colonnes intitulées « Couverts par la 3G et connectés » indiquent le pourcentage des personnes couvertes par la 3G qui ont indiqué effectivement utiliser internet. En raison de la conception de l’enquête GHS du Nigeria, il n’est pas possible de savoir comment les individus ont accédé à internet. Ainsi, la « connectivité » au Nigeria est définie comme l’utilisation d’internet en général, ce qui inclut l’internet à large bande fixe et mobile, même si l’appareil ou la connexion internet appartient à quelqu’un d’autre ; tandis qu’au Sénégal, la « connectivité » est exclusivement définie comme l’utilisation d’internet à l’aide de téléphones mobiles. Chaque tabulation est effectuée au niveau individuel en ajustant les poids d’échantillonnage. Pour le Nigeria, la somme des colonnes de couverture peut ne pas atteindre 100 % en raison des valeurs manquantes dans la variable d’accès à internet (5,4 % manquants). La non-couverture comprend tous les individus de l’échantillon, tandis que la couverture n’inclut qu’un souséchantillon d’individus pour lesquels des données sur la connectivité ou l’utilisation sont disponibles. En plus des sources de données de l’enquête, les données de couverture ont été fournies par GSMA intelligence pour le Nigeria et par les principaux fournisseurs de services mobiles pour le Sénégal.

32 A frique numérique
Nigeria Sénégal
Statut de la main-d’œuvre Dans la population active 21,0 51,3 64,9 27,8 63,0 5,4 54,4 57,4 40,3 57,9 Sans activité professionnelle 23,5 50,2 65,8 26,1 37,0 5,6, 61,9 65,6 32,5 42,1 Avoirs du ménage Propriétaire d’un ordinateur 4,4 22,3 23,2 74,0 4,8 1,1 31,7 32,0 67,2 12,4 Propriétaire d’un téléviseur 9,5 49,0 54,1 41,6 46,1 1,5 48,9 49,7 49,6 61,7
Groupes de distribution
Non couverts (3) Écart d’utilisation (en part de la population) Écart d’adoption (en part de la population couverte) Couverts par la 3G et connectés Moyenne de la population Non couverts (3) Couverts par la 3G et non connectés Écart d’adoption (en part de la population couverte) Couverts par la 3G et connectés Moyenne de la population
Accès à l’électricité 5,9 53,3 56,6 40,8 54,7 1,1 49,7 50,2 49,3 62,7

La disponibilité et l’adoption de l’internet mobile sont corrélées aux niveaux d’études atteints au Sénégal. Alors que la proportion d’analphabètes (9 %) vivant dans des zones non couvertes est supérieure à la part des personnes instruites (3 %), les premiers sont nettement moins susceptibles d’utiliser internet, même lorsqu’ils vivent dans des zones couvertes. Seuls 19 % des analphabètes vivant dans des zones couvertes ont indiqué utiliser internet, ce qui est étonnamment inférieur au pourcentage correspondant des personnes instruites (50 %).

On observe un schéma similaire au Nigeria : l’absence de couverture 3G est beaucoup plus fréquente chez les personnes les plus pauvres ou celles vivant en dessous de la médiane de la distribution des revenus ou de la consommation (34 %) ainsi que chez les analphabètes (37 %) par rapport à celles situées au-dessus de la médiane des revenus ou de la consommation (12 %) et aux personnes instruites (18 %). De même, les personnes plus pauvres ou illettrées sont beaucoup moins susceptibles d’utiliser internet73 même lorsqu’elles vivent dans des zones de couverture 3G. Seuls 14 % des personnes les plus pauvres et 8 % des personnes illettrées vivant dans des zones de couverture 3G ont indiqué utiliser internet.

En résumé, les écarts de disponibilité et d’utilisation ou d’adoption sont fortement corrélés au bien-être et à d’autres caractéristiques socioéconomiques telles que l’éducation. Il est important de noter que, même si la couverture 3G est disponible pour une part prédominante de la population globale des deux pays, l’utilisation d’internet reste faible, en particulier chez les pauvres et les analphabètes. Des politiques complémentaires doivent donc être mises en place pour résoudre les problèmes d’adoption d’internet, en particulier chez les pauvres, en plus d’investir dans l’expansion physique de l’infrastructure mobile à large bande.

Écarts dans les principaux facteurs d’adoption entre l’Afrique et les autres régions

Une comparaison globale de l’Afrique subsaharienne avec d’autres régions permet de mieux comprendre la nature critique des capacités, de l’accessibilité financière, de la politique de réglementation des infrastructures, et de la disponibilité d’actifs complémentaires pour expliquer l’écart d’adoption d’internet (tableau 1.2).

Capacités. Les trois premières lignes de données du tableau 1.2 montrent que l’Afrique subsaharienne souffre d’un profond écart de capacités. Les capacités déterminent dans quelle mesure les gens peuvent utiliser internet de manière productive ; elles sont donc des déterminants majeurs de l’attractivité des TN. L’écart de capacités est particulièrement important lorsqu’il existe une pénurie d’applications internet convenant à une utilisation productive par des utilisateurs peu qualifiés.

L’alphabétisation des adultes et surtout des jeunes est beaucoup plus faible en Afrique subsaharienne que dans les autres régions : le taux moyen d’alphabétisation des jeunes n’est que de 78 % en Afrique subsaharienne, alors qu’en Asie du Sud, la région où le taux d’alphabétisation des jeunes est le deuxième plus faible, il atteint 88 %. Dans toutes les autres régions, il est supérieur à 97 %.

Accessibilité financière. La deuxième série de données du tableau révèle une autre contrainte majeure à l’adoption d’internet en Afrique : l’accessibilité financière. Une comparaison des prix moyens, en dollars US, des forfaits mobiles voix et données suggère que dans l’absolu, les prix ne sont pas tellement plus élevés en Afrique subsaharienne que dans les régions d’Asie de l’Est et d’Amérique latine et des Caraïbes, même s’ils le sont

Les technologies numériques 33

TABLEAU 1.2 Comparaison des principaux facteurs d’adoption de l’internet mobile, par région sélectionnée

Facteurs, par catégorie

Source : Calculé à partir des indicateurs du développement dans le monde (WDI) de la Banque mondiale, de l’indice de capital humain (ICH) de la Banque mondiale, des données de l’Union internationale des télécommunications (UIT), et des données de TeleGeography (TeleG).

Note : Les chiffres sont des moyennes régionales non pondérées entre les pays (en accordant une importance égale à chaque pays, l’hétérogénéité entre les pays est mise en évidence). RNB = revenu national brut ; IHH = indice de concentration de Hirschman-Herfindahl ; TIC = technologies de l’information et de la communication.

34 A frique numérique
Asie de l’Est et Pacifique Amérique latine et Caraïbes Moyen-Orient et Afrique du Nord Asie du Sud Afrique subsaharienne Capacités Années d’études ajustées en fonction de l’apprentissage (ICH, 2020) 8,3 7,8 7,6 6,5 5,0 Alphabétisation des adultes (WDI, 2018) 93,6 94,7 92,2 70,2 67,2 Alphabétisation des jeunes (15 à 24 ans) (WDI, 2018) 97,5 98,8 98,9 88,3 77,6 Accessibilité financière Forfait mobile voix et données, utilisation élevée (dollars US) (UIT, 2020) 22,7 28,1 18,4 7,1 16,9 Forfait mobile voix et données, faible utilisation (dollars US) (UIT, 2020) 15,5 24,3 12,2 4,2 9,9 Forfait mobile voix et données, utilisation élevée (% du RNB) (UIT, 2020) 5,9 4,5 3,0 5,5 20,4 Forfait mobile voix et données, faible utilisation (% du RNB) (UIT, 2020) 3,4 3,5 1,9 3,5 12,3 Politique réglementaire Indice UIT de la réglementation globale des TIC (2018) 60,0 72,3 63,4 70,6 69,3 Tarif de terminaison d’appel mobile (dollars US) (TeleG, 2020) 0,027 0,013 0,010 0,002 0,018 IHH (sur base des parts de marché des abonnés de TeleG, 2020) 0,50 0,45 0,43 0,37 0,49
complémentaires : électricité Accès général à l’électricité (WDI, 2019) 93,7 97,3 94,8 93,9 49,4
Actifs

nettement plus qu’en Asie du Sud. Par contre, comparés en pourcentage du revenu national brut (RNB) – pour refléter la part des coûts de la téléphonie mobile par rapport aux revenus –, les prix en Afrique subsaharienne sont incomparablement élevés par rapport à ceux des autres régions. Les forfaits mobiles voix et données coûtent 10 à 20 % du RNB contre moins de 6 % dans d’autres régions. Cette proportion est le reflet des très faibles revenus de l’Afrique subsaharienne ainsi que de la forte contrainte que constitue le revenu pour une adoption et une utilisation plus intensive de ces services.

Politique réglementaire. La troisième série de données du tableau fait ressortir une autre source de contraintes à la fois pour la disponibilité et pour l’accessibilité financière des services internet : la politique réglementaire visant les opérateurs des réseaux mobiles et autres fournisseurs de services internet. La moyenne d’un indice de réglementation globale des technologies de l’information et de la communication (TIC) indique que l’Afrique subsaharienne ne semble pas afficher de mauvaises performances : l’indice de la région est supérieur à celui des régions Asie de l’Est et Moyen-Orient et Afrique du Nord. Il est basé sur une évaluation de jure de l’existence de lois et réglementations pertinentes, mais ne tient pas compte de leur degré d’application effective.

Les deux variables suivantes permettent de mieux cerner à quel point les autorités réglementaires adoptent une position favorable à la concurrence. Le tarif moyen de terminaison d’appel mobile est le tarif que les opérateurs mobiles facturent à leurs concurrents lorsqu’un abonné d’un concurrent appelle un abonné de l’opérateur récepteur ou de l’opérateur de terminaison. Plus le tarif de terminaison d’appel mobile est élevé, plus il est facile pour les opérateurs historiques d’empêcher l’entrée et l’expansion de concurrents plus petits. Le tarif de terminaison d’appel mobile est plus élevé en Afrique subsaharienne que dans les autres régions, à l’exception de l’Asie de l’Est. L’indice HerfindahlHirschman (IHH) est la somme des carrés des parts de marché des opérateurs mobiles. Un IHH élevé dénote un marché plus concentré et reflète généralement un degré de concurrence plus faible. L’IHH est assez élevé en Afrique subsaharienne, mais l’est également dans d’autres régions, à l’exception de l’Asie du Sud.

Actifs complémentaires. Enfin, l’accès à l’électricité est un atout complémentaire essentiel. En Afrique subsaharienne, seule la moitié de la population environ a accès à l’électricité, alors que ce ratio est supérieur à 90 % dans les autres régions.

Dans le cadre d’une régression transnationale combinant ces variables avec le revenu par habitant, il apparaît que les variables quantitativement la plus importantes, conditionnellement corrélée à l’utilisation d’internet, sont l’accessibilité financière, les compétences et l’électricité. Vient ensuite l’environnement réglementaire : la concentration du marché reste significative alors que les taux de terminaison d’appel mobile ne le sont pas, ce qui permet de penser que les mesures et le cadre réglementaires, y compris la manière dont ils influencent la nature et l’échelonnement des entrées sur le marché, peuvent avoir plus d’importance que les politiques visant spécialement les tarifs de terminaison d’appel mobile (Atiyas et Dutz, 2022 ; voir également le chapitre 3, figure 3.12).

Données et connaissances manquantes pour de futures études

Pour améliorer la formulation des politiques, il est essentiel et prioritaire de recueillir de meilleures données sur la disponibilité et l’utilisation des TN au cours du temps, afin de pouvoir en déduire l’impact causal sur les emplois et les revenus, y compris les effets distributifs sur les personnes à faible revenu et peu qualifiées ainsi que sur les femmes.

Les technologies numériques 35

La collecte systématique de données à l’aide d’enquêtes auprès des ménages et des entreprises est nécessaire.

Les types de données recueillies par l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology –Adoption de la technologie au niveau de l’entreprise) de la Banque mondiale constituent un bon point de départ pour les entreprises (Cirera, Comin et Cruz, 2022). La FAT recueille des données sur la sophistication des technologies – processus manuels, TN simples accédant à internet, ou TN plus complexes générant des prédictions basées sur des techniques d’apprentissage machine et d’intelligence artificielle – et sur l’utilisation de ces technologies. Il est important de noter que la FAT recueille également des données sur la manière dont les TN sont utilisées, que ce soit pour des fonctions générales de l’entreprise, telles que la comptabilité et d’autres pratiques de gestion, ou pour des fonctions sectorielles de l’entreprise, telles que la gestion des troupeaux (depuis la surveillance manuelle jusqu’aux dispositifs de suivi numérique fixés sur chaque animal).

Idéalement, ces données devraient être collectées par tous les organismes statistiques nationaux d’Afrique pour constituer un échantillon aussi large que possible d’entreprises formelles et informelles, sur la base de recensements représentatifs au niveau national. L’enquête FAT limite actuellement sa couverture aux entreprises comptant au moins cinq employés à temps plein, alors que la plupart des entreprises africaines sont de taille plus réduite. Un échantillon représentatif de petites entreprises informelles devrait également être inclus dans les futures enquêtes FAT.

Research ICT Africa (RIA) a entrepris une enquête complémentaire utile posant des questions connexes aux microentreprises.74 Elle devrait être poursuivie, renforcée et, idéalement, administrée par les organismes statistiques nationaux et comprendre des questions de la FAT appropriées pour les microentreprises. Les enquêtes de la Banque mondiale auprès des entreprises visant toutes les entreprises, y compris les microentreprises et les entreprises informelles, devraient intégrer des questions liées à l’utilisation des TN et d’autres technologies et être administrées par des organismes statistiques nationaux. La collecte de données complémentaires sur les entreprises devrait être consolidée pour parvenir à un ensemble de questions communes à tous les pays. En demandant à toutes les entreprises bénéficiant d’un soutien technologique financé par des fonds publics de remplir un questionnaire comportant des questions de la FAT, l’impact des programmes publics de soutien technologique pourrait être mieux évalué. De plus, cela permettrait aux entreprises de se comparer à d’autres entreprises ayant la même activité économique qu’elles et une taille similaire, à la fois dans leur pays et dans tous les pays où de telles enquêtes ont été mises en œuvre.

Les données doivent être collectées tous les deux à cinq ans, pour constituer un ensemble de données de panel longitudinal chronologique, où les entreprises qui en sont sorties sont remplacées. Ces initiatives de collecte sont indispensables pour pouvoir étudier les obstacles à l’adoption des technologies ainsi que l’impact des TN sur la productivité, la production et les ventes, les emplois et les revenus. Elles devraient également permettre une compréhension représentative de l’entrée de nouvelles entreprises sur le marché, de l’investissement et de l’expansion de la production, de la sortie des entreprises non rentables et des impacts des TN sur les emplois et les revenus pour tous les types d’entreprises et de travailleurs. Les enquêtes nationales auprès des ménages, telles que l’Enquête permanente sur les conditions de vie (EPCV), devraient également intégrer des questions clés sur l’utilisation des TN afin de créer des ensembles de données employeurs-employés appariés au niveau national. Le module sur les TN de l’Enquête téléphonique à haute fréquence COVID-19 de la Banque mondiale pourrait servir de

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point de départ. Des données fiables au cours du temps peuvent aider à identifier les écarts spatiaux potentiels dans l’utilisation des TN et leur façon d’évoluer, et permettre ainsi de mieux comprendre les implications économiques et de bien-être des fractures numériques.

Plusieurs questions de politiques publiques cruciales liant les TN aux performances des entreprises et au bien-être des ménages devraient faire l’objet de recherches futures.75

• Quelle est la contribution relative des différents facteurs expliquant l’effet des TN sur le bien-être et la pauvreté, y compris les synergies avec les technologies complémentaires ?

• Quel est le rôle actuel et futur d’une plus grande participation des jeunes et des femmes, au niveau des propriétaires ou des entrepreneurs, des cadres et des travailleurs de tous les secteurs ?

• Comment le niveau d’éducation et les compétences influent-ils sur la façon dont les individus bénéficient de l’accès à internet et aux TN qui y sont associées ?

• Quels sont les compléments essentiels renforçant les gains de l’adoption des TN ?

• Comment l’utilisation des plateformes numériques liées au commerce et à la finance électroniques affecte-t-elle l’efficacité et l’équité ?

• Qui bénéficierait le plus d’un déploiement rapide de la numérisation des fonctions gouvernementales, en particulier la prestation de services tels que l’initiative ID4D (identification numérique pour le développement) de la Banque mondiale, les registres d’actifs et les services de protection sociale atténuant divers risques en fournissant une assurance ?

• Quelles sont les fonctions des entreprises les plus pertinentes pour une croissance inclusive de la productivité ?

• Quelle est l’importance relative pour l’emploi et la réduction de la pauvreté de différentes TN (telles que des applications de services financiers numériques, de services d’assurance et de gestion telles que les logiciels de contrôle des stocks et de point de vente) ?

L’exécution de revues des dépenses publiques (RDP) des politiques et programmes de soutien aux entreprises est une priorité. Ces RDP peuvent être divisés en trois phases : a) une cartographie des instruments politiques soutenant l’adoption de technologies ainsi que la génération de nouvelles technologies et l’entrepreneuriat numérique ; b) une analyse fonctionnelle des programmes et instruments politiques existants ; et c) une analyse d’efficacité.

Une collaboration étroite avec les ministères de tutelle est nécessaire pour obtenir des détails sur les programmes de soutien aux entreprises, en mettant l’accent sur l’adoption de technologies et l’entrepreneuriat. Cet exercice s’est généralement avéré plus efficace lorsqu’il a été mis en œuvre en collaboration avec l’unité gouvernementale responsable de la hiérarchisation et de l’allocation des budgets (généralement les ministères des Finances). En fin de compte, une RDP des politiques et programmes de soutien aux entreprises doit être une activité continue aidant les décideurs à comprendre l’impact des dépenses et à améliorer les politiques et programmes au fil du temps, en utilisant des informations complémentaires tirées des données du panel d’entreprises.76 Ces RDP

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devraient être soutenues par un processus transparent de « suivi diagnostique », permettant aux nouveaux programmes de bénéficier d’expériences structurées soumises à un suivi prenant la forme de diagnostics mettant en évidence ce qui fonctionne et ne fonctionne pas et relevant constamment les avantages de chaque programme en utilisant les nouveaux apprentissages.77

Certains écarts de connaissances doivent être comblés par des expériences politiques et réglementaires propres à chaque pays, allant au-delà des diagnostics fondés sur des données. Cette expérimentation est nécessaire pour obtenir des informations sur la mise en œuvre basées sur des projets pilotes à petite échelle et des « bacs à sable » réglementaires, adaptés à des contextes nationaux et sous-régionaux variés.78 Les expériences ayant un impact positif peuvent ensuite être transposées à l’échelle nationale et sousrégionale pour avoir des effets significatifs sur la productivité, la production, les ventes et l’emploi dans toute l’Afrique.

Un soutien politique efficace éclairé par de solides données est indispensable pour stimuler la productivité, les emplois et les revenus, ainsi que les besoins de mise à niveau des travailleurs, des cadres et des propriétaires d’entreprise moins qualifiés et à faible revenu. Comme mentionné précédemment, il n’y a que deux façons de réduire l’écart de compétences dans l’utilisation des TN. La première consiste à fournir une formation pour améliorer les capacités des personnes les moins qualifiées. La seconde est de réorienter le changement technologique vers le niveau de compétences que la plupart des gens possèdent réellement, en concevant des TN plus simples à utiliser et favorisant l’apprentissage. Cette dernière approche n’a pas été suffisamment explorée. Des expériences sont nécessaires pour examiner le potentiel de TN plus simples à utiliser en tant que stratégie moins coûteuse et plus efficace que l’investissement de ressources importantes dans la formation aux compétences numériques. Actuellement, la formation est peutêtre trop générique pour les besoins productifs des personnes à faible revenu. En outre, l’approche dominante consiste à s’appuyer sur des intermédiaires pour utiliser les smartphones et les tablettes disponibles, plus sophistiqués et dotés d’applications internet, afin de saisir des données commerciales et d’obtenir des informations qui sont ensuite partagées avec les bénéficiaires visés. Cette approche ne permet pas aux bénéficiaires euxmêmes d’apprendre par la pratique. L’expérimentation est nécessaire pour mieux comprendre :

• Si des TN suffisamment simples permettraient aux bénéficiaires visés de les utiliser directement et si cette utilisation directe est susceptible de générer des avantages plus élevés en matière d’apprentissage, de productivité et d’emploi ;

• Les avantages et les coûts du soutien à l’amélioration de la productivité des propriétaires-entrepreneurs peu qualifiés exploitant des entreprises informelles, par rapport au soutien aux entreprises formelles à productivité plus élevée se sélectionnant elles-mêmes dans les programmes de soutien à la productivité des entreprises, ou si les deux types de programmes sont souhaitables ; et79

• Dans quelle mesure les compétences de gestion permettant d’améliorer la productivité peuvent être acquises par l’utilisation d’applications simples, telles que des solutions de contrôle des points de vente et des stocks. L’utilisation d’applications intuitives permettant de contrôler les produits qu’un détaillant vend plus rapidement et les niveaux de stock trop bas par rapport aux ventes peut constituer un premier pas vers la mise à niveau des capacités de gestion et l’amélioration de la productivité et de la rentabilité de l’entreprise.

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En résumé, les hypothèses qui pourraient bénéficier d’un apprentissage supplémentaire grâce à une expérimentation sur le terrain dans différents contextes nationaux sont les suivantes :

• Les compétences numériques requises ne constituent pas un obstacle fondamental à l’utilisation des TN par les personnes peu qualifiées. Sur les deux approches complémentaires visant à relever les défis liés aux compétences dans l’utilisation des TN, la simplification des applications pour permettre aux personnes moins qualifiées de les utiliser et d’apprendre au fur et à mesure est probablement moins coûteuse et plus efficace que l’investissement de ressources importantes dans la formation aux compétences numériques.

• Des gains d’apprentissage et de productivité sont possibles en simplifiant les applications internet accessibles sur les smartphones et autres appareils peu coûteux afin que les personnes peu qualifiées puissent les utiliser directement. Les bénéficiaires visés peuvent probablement apprendre davantage en utilisant directement les applications qu’en passant par des intermédiaires.

• Ce sont probablement les entreprises informelles qui peuvent réaliser les gains de productivité les plus importants dans la mesure où elles peuvent apprendre et ont les plus grands retards de productivité. Avant d’exiger que ces entreprises deviennent formelles, soutenir l’amélioration de leur productivité et démontrer ainsi les avantages de la formalisation est probablement une priorité.

• L’introduction d’applications numériques simples à utiliser enseignant des compétences de gestion de base est une approche rentable et efficace pour que les propriétairesentrepreneurs de microentreprises et petites entreprises commencent à acquérir de telles compétences. Il pourrait s’agir d’une première étape vers une mise à niveau plus systématique des capacités de gestion.

Un autre domaine complémentaire pour un travail de recherche plus appliqué est l’exploration des questions de politique à l’interface entre l’agriculture, une plus grande utilisation des TN et l’adaptation durable au changement climatique et à d’autres problèmes environnementaux. Une première série de questions concerne l’interface entre l’agriculture et une plus grande utilisation des TN, d’autant plus qu’en Afrique, la plupart des pauvres gagnent principalement leur vie dans des activités liées à l’agriculture et qu’ils ont tout à gagner de l’utilisation de TN adaptées à leurs compétences et permettant un apprentissage sur le tas. Des questions subsistent quant à la manière dont les agriculteurs peuvent bénéficier au mieux de l’amélioration de la productivité. On peut également se demander comment le numérique peut le mieux résoudre les problèmes de la chaîne d’approvisionnement, tels que la concurrence limitée et les marges élevées, ainsi que la falsification et la contrefaçon des intrants. L’étude des effets distributifs des différentes interventions reste un domaine d’investigation fructueux (Fabregas, Kremer et Schilbach, 2017).

Les défis climatiques et environnementaux croissants posent une série de questions supplémentaires concernant la manière dont les technologies numériques et complémentaires peuvent aider l’Afrique à dynamiser le plus efficacement possible son système alimentaire pour répondre à la croissance de sa population. La hausse et la variabilité des températures, l’imprévisibilité des précipitations, les inondations et les sécheresses, ainsi que l’élévation du niveau des mers sont principalement dues à la production excessive de

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carbone et aux émissions de gaz à effet de serre dans le reste du monde. L’Afrique a le moins contribué au changement climatique, mais est la plus touchée. D’autres problèmes liés à l’environnement sont néanmoins générés localement, notamment la pollution atmosphérique due aux feux de forets pour le défrichage des terres et à l’incinération des résidus de récolte, la déforestation et la perte de biodiversité qui en découle, les résidus chimiques agricoles et les déchets vivants, ainsi que les prélèvements d’eau excessifs. Pour résoudre la plupart de ces problèmes, il faut des connaissances générées localement, qui peuvent toutes être facilitées par les TN ainsi que par des investissements dans des technologies complémentaires. Trois ensembles connexes de pistes de recherche sur les politiques (Barrett, Ortiz-Bobea et Pham, 2021) s’articulent autour des points suivants :

• Les services de recherche et de vulgarisation en agriculture adaptative, y compris les services de recherche et de développement (R&D) après récolte, fondés sur les progrès de la génomique et de la biologie synthétique, nécessaires pour adapter les caractéristiques des variétés à l’évolution des conditions locales ;

• la désagrarisation, c’est-à-dire le remplacement de la terre par du capital physique, y compris l’agriculture en environnement contrôlé, telle que l’agriculture en intérieur et l’agriculture verticale pour produire des fruits et légumes de grande qualité ; et

• les services d’infrastructure rurale, qui comprennent non seulement une utilisation accrue d’internet, mais aussi une fourniture et une utilisation plus rentables de l’électricité et des routes rurales, afin de stimuler la croissance de la productivité agricole et de faciliter les marchés non agricoles complémentaires.

Ces trois domaines connexes nécessiteront des recherches et des expérimentations pour générer et transposer à grande échelle des solutions appropriées, efficaces et durables au niveau local.

Enfin, une question empirique essentielle reste ouverte : dans quelle mesure les réseaux de communication peuvent-ils recueillir auprès des agriculteurs et autres utilisateurs des informations précieuses à partager ? La généralisation des smartphones équipés de GPS et d’applications adaptées aux compétences devrait accroître ces avantages en permettant la diffusion d’informations personnalisées, la communication vidéo bidirectionnelle, et d’autres solutions incitant les agriculteurs à fournir des données au système, aussi bien en étant rémunérés et en bénéficiant de leur agrégation et d’un retour d’information à valeur ajoutée. Aux États-Unis, le Farmers Business Network (https://fbn.com) applique l’apprentissage machine à des centaines de milliers d’acresannées de données pour fournir des prévisions de rendement de haute qualité pour les variétés de semences. Les systèmes de téléphonie mobile pourraient être utilisés dans toute l’Afrique pour collecter des données qui serviraient d’intrants dans les applications d’apprentissage automatique, pour tirer des enseignements de l’expérience des agriculteurs avec des technologies agricoles spécifiques et pour faciliter la mise en réseau des agriculteurs de la manière la plus adaptée à leurs intérêts.

En ce qui concerne les politiques relatives à l’infrastructure numérique, une compréhension plus systématique des caractéristiques de l’environnement réglementaire, de sa mise en œuvre et des pratiques réussies serait utile pour établir la preuve de l’adoption de bonnes pratiques en Afrique. L’outil de suivi de la réglementation de l’UIT donne un premier aperçu du paysage réglementaire sur la base des informations fournies par les autorités nationales. Il s’agit d’un point de départ utile. L’initiative de veille réglementaire de

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la Banque mondiale vise à systématiser à la fois les informations sur les réglementations en vigueur et leur mise en œuvre sur la base d’une méthodologie fondée sur le jugement d’experts. Elle couvre environ la moitié des pays africains et des zones sélectionnées. Cette initiative pourrait être étendue, et des informations pourraient être collectées tous les deux ou trois ans pour comprendre l’évolution des pratiques réglementaires. Ces indicateurs peuvent aider les pays à identifier les domaines à améliorer et l’apprentissage entre pairs, et également faciliter l’analyse des effets des politiques publiques adoptées.

La mise en œuvre d’interventions du côté de la demande pour accroître l’adoption et l’utilisation d’internet nécessite des recherches sur les interventions les plus réussies dans le contexte des économies à revenu faible ou intermédiaire. Les évaluations d’impact des interventions visant à accroître l’accessibilité financière seraient utiles pour éclairer les décisions politiques. Elles comprennent des subventions ou un financement des moyens d’accès, des bons d’achat pour les ménages ciblés et les micros, petites et moyennes entreprises afin de réduire les prix d’internet, et des plans sociaux ciblant les consommateurs à faibles revenus. De même, l’impact des programmes visant à accroître l’attrait de l’utilisation d’internet devrait être évalué – y compris le renforcement des capacités, le développement de TN s’adressant spécifiquement aux utilisateurs peu qualifiés, l’accès à internet dans les écoles et les espaces publics pour accroître la familiarité avec les TN, et l’utilisation de moyens numériques pour effectuer des transferts sociaux. Il est également essentiel de mieux comprendre le comportement des consommateurs, en particulier à faible revenu et des zones rurales, à l’égard de l’adoption des smartphones et de la consommation de données, ainsi que leur réactivité aux prix, pour pouvoir affiner les interventions sur la demande visant l’accessibilité financière. Cela peut se faire à l’aide de données détaillées sur les consommateurs recueillies par les opérateurs de téléphonie mobile.80 Il est essentiel de disposer d’informations systématiques sur le statut des politiques nationales relatives aux données et sur les effets de certaines règles visant les données. Pour le Rapport sur le développement dans le monde 2021 : Des données au service d’une vie meilleure, la Banque mondiale a recueilli des informations sur les caractéristiques des politiques publiques relatives aux données dans 20 pays d’Afrique (Banque mondiale, 2021). Ce travail pourrait être élargi pour inclure des données sur leur mise en œuvre et les règles habilitantes en vue du développement de TN améliorant la productivité et l’emploi. Une recherche vitale porte sur les flux de données transfrontaliers : quels sont les meilleurs mécanismes pour équilibrer la protection et la libre circulation des données, et quels sont les effets des différentes approches des flux de données transfrontaliers en Afrique ? Enfin, à l’intersection du changement climatique et des infrastructures de connectivité et de données, une base de référence et une analyse des effets sont nécessaires pour comprendre les implications de la croissance de la consommation de données à la fois en matière de coûts et de co-avantages climatiques dans tous les secteurs.

Notes

1. Alors que les signaux radio des réseaux cellulaires de première génération (1G) étaient analogiques et convertissaient les données en rythmes électriques d’amplitudes multiples, les signaux radio des réseaux de deuxième génération (2G) et des générations suivantes sont numériques. Les téléphones 2G permettent également d’utiliser des services de données de base tels que les SMS (short message service) et les messages photo. Toutefois, même les « feature phones » 2,5G sont généralement trop lents pour permettre une utilisation productive d’internet, au-delà des simples paiements à l’aide de codes courts et d’une navigation limitée, ce qui nécessite des appareils de troisième génération (3G) et de générations ultérieures.

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2. Goldfarb et Tucker (2019) étudient comment les modèles économiques standard changent lorsque ces coûts diminuent considérablement et tendent vers zéro. Les coûts de surveillance sont réduits par la baisse conjointe des coûts de suivi et de vérification.

3. Ce chapitre et l’ensemble du rapport s’appuient sur les arguments et les résultats présentés dans Choi, Dutz et Usman (2020) pour l’ensemble de l’Afrique, et dans Cruz, Dutz et RodríguezCastelán (2021) pour le Sénégal. Le présent rapport fournit un cadre conceptuel plus riche, des résultats empiriques plus étayés et un ensemble plus spécifique de recommandations de politiques publiques pour les entreprises, les ménages et l’infrastructure numérique.

4. Tõnurist et Hanson (2020) décrivent un cadre émergent pour guider l’élaboration des politiques publiques dans des contextes complexes et incertains et posent quelques questions pour des recherches ultérieures dans le domaine de la gouvernance anticipative de l’innovation.

5. Voir Cirera et Maloney (2017) pour les défis auxquels sont confrontés les pouvoirs publics dans la formulation et la mise en œuvre du mix de politiques nécessaire pour aider les entreprises à construire les facteurs complémentaires de capital physique et humain – en particulier les capacités managériales des entreprises – nécessaires pour récolter les bénéfices du rattrapage technologique.

6. Les projections sont basées sur les hypothèses de fécondité moyenne d’ONU DAES (2022a), décrites dans ONU DAES (2022b). Les chiffres du stock sous-tendant la figure 1.1 sont dérivés du fichier de données démographiques POP/03-1 par grand groupe d’âge, tandis que ceux des flux annuels sont tirés du fichier de données POP/01-1 par âge. Pour calculer les flux nets d’entrants, le nombre de personnes de 65 ans (sortants) est soustrait de celui des personnes âgées de 15 ans (nouveaux entrants). La plupart des autres pays ont non seulement moins d’entrants, mais aussi plus de sortants.

7. Voir Baumol (1990) et Murphy, Shleifer et Vishny (1991) pour les premiers exposés de l’idée que les changements dans les règles du jeu spécifiant les gains relatifs des différentes activités entrepreneuriales peuvent jouer un rôle clé dans la détermination de la répartition du talent entrepreneurial. Voir également Dutz, Ordover et Willig (2000).

8. La mobilité sociale perçue par les Africains est, en moyenne, nettement plus importante que celle des Asiatiques ou des Latino-Américains, et les Africains s’attendent à ce qu’elle soit nettement plus élevée pour leurs enfants que dans les autres régions. La mobilité observée en Afrique est supérieure à celle de l’Asie du Sud, du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, ou de l’Amérique latine, bien qu’elle soit inférieure à celle des pays à haut revenu, de l’Asie de l’Est ou de l’Europe et de l’Asie centrale, selon les données sur la mobilité sociale dans l’éducation de la base de données mondiale sur la mobilité intergénérationnelle de la Banque mondiale (https://datacatalog. worldbank.org/search/dataset/0050771/global-database-on-intergenerational-mobility). Les Africains sont également beaucoup plus susceptibles de croire que le travail acharné est plus important que la chance et que les relations pour avancer (Henn et Robinson, 2021, section 3 et tableau A1).

9. Un troisième « atout latent » de la société africaine que Henn et Robinson (2021) mettent en évidence est le « cosmopolitisme », à savoir que les Africains sont les plus multilingues au monde (nettement plus susceptibles de parler plus d’une langue que les habitants de n’importe quelle autre partie du monde) ; ils ont des niveaux élevés de tolérance religieuse et sont accueillants envers les étrangers. Selon Henn et Robinson, l’expérience acquise dans le cadre de cette diversité linguistique et culturelle donne aux Africains les moyens de réussir dans un monde globalisé. Le défi du multilinguisme offre l’occasion de développer une nouvelle génération d’applications TN facilitant un apprentissage productif dans n’importe quelle langue.

10. En ce qui concerne l’agriculture, Fuglie et coll. (2020) concluent que les gains potentiels de croissance de la productivité résultant de la réaffectation sont probablement moins importants que prévu. Pour parvenir à une transformation économique plus rapide, il faut plutôt se concentrer sur la réalisation d’une croissance de la productivité à l’aide de progrès technologiques à la fois dans l’exploitation et en dehors d’elle.

11. Bessen (2019) analyse la dynamique de la croissance de la productivité et de l’emploi dans les industries du tissu de coton, de l’acier et des véhicules à moteur aux États-Unis, en soulignant comment, lorsque la demande de ces produits était élastique et pas encore tout à fait rassasiée, les

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fortes augmentations de la productivité s’accompagnaient d’augmentations encore plus importantes de l’emploi, suivies de baisses de l’emploi à des stades de maturité plus récents. L’auteur interprète ce schéma à l’aide d’un modèle de demande finale hétérogène évoluant dans le temps : les baisses de prix au cours des premières étapes de la croissance de la productivité rendent des produits auparavant prohibitifs accessibles à la consommation de masse, entraînant ainsi une réaction positive importante de la demande. Une fois que les grands besoins non satisfaits sont saturés et que la demande devient moins élastique, de nouveaux gains de productivité dans ces industries peuvent entraîner une réduction de l’emploi.

12. Pour un exposé complémentaire des politiques de transformation technologique axées sur une innovation créatrice d’emplois, voir Breznitz (2021). Selon lui, les décideurs politiques doivent comprendre la structure modifiée du système mondial de production et utiliser ces connaissances pour permettre aux communautés de reconnaître leurs propres avantages et favoriser l’innovation capable de conduire à de bons emplois pour tous.

13. Pour des constatations similaires basées sur des données antérieures, pour la plupart des économies à revenu élevé et en transition, et pour les accélérations de la croissance dans les pays d’Amérique latine, d’Asie et d’Afrique subsaharienne, respectivement, voir également Herrendorf, Rogerson et Valentinyi (2014) et McMillan, Rodrik et Verduzco-Gallo (2014). Dans le même ordre d’idées, Midrigan et Xu (2014) constatent, sur la base de données de niveau entreprise issues de la Chine, la Colombie et la République de Corée, que l’essentiel des pertes de productivité totale des facteurs (PTF) et de production dues aux frictions financières provient de distorsions dans les décisions d’entrée et d’adoption de technologies par les entreprises, seules de faibles pertes résultant d’une mauvaise répartition du capital entre les producteurs.

14. Dans Cusolito et Maloney (2018), le graphique 1.11 propose les premières décompositions, pour un échantillon de pays à revenu faible et intermédiaire et de marchés émergents, de l’efficience technique basée sur la PTF physique, dans lesquelles les marges (un élément de la PTF sur les revenus traditionnellement mesurée) ont été supprimées. La composante intraentreprise est relativement plus importante que la composante interentreprises dans quatre des six cas examinés, expliquant environ la moitié ou plus de la croissance de l’efficience dans ces économies, en particulier en Chine et en Éthiopie (les autres étant l’Inde 2000-2008 et la Malaisie 2005-2010).

15. Les pratiques de gestion moyennes les plus faibles de tous les pays étudiés dans le monde se trouvent en Afrique subsaharienne, notamment en Éthiopie, au Ghana, au Mozambique, en Tanzanie et en Zambie (Cusolito et Maloney, 2018, figure 2.12).

16. Les technologies à usage général (TUG) sont des technologies transformationnelles. Elles comprennent la machine à vapeur au moment de la révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle, le moteur électrique à la fin du XIXe siècle, et internet à la fin du XXe siècle. Les TUG sont caractérisées par leur omniprésence (utilisées comme intrants par de nombreuses industries en aval), leur potentiel inhérent d’amélioration technique et leur capacité à générer de nombreuses retombées positives. Lorsque les TUG sont adoptées dans l’ensemble de l’économie, elles génèrent des gains de productivité à l’échelle de l’économie. Voir l’article fondateur de Bresnahan et Trajtenberg (1995).

17. L’évolution technologique privilégiant les compétences (ETPC) est un changement dans la technologie de production de l’entreprise, généralement dû à l’adoption d’une nouvelle technologie (y compris un changement dans les méthodes de production ou dans l’organisation du travail) qui favorise les travailleurs plus qualifiés par rapport aux moins qualifiés dans la description des tâches qui doivent être effectuées. L’ETPC augmente la productivité relative des travailleurs plus qualifiés, et donc leur demande relative, à des salaires relatifs fixes. Pour cette définition et une application aux marchés du travail américains, voir Autor, Katz et Kearney (2008).

18. En se basant sur des données sur les entreprises, Diao, McMillan et Rodrik (2021) soutiennent que les entreprises africaines qui sont soit productives soit en train d’augmenter rapidement leur productivité ne peuvent pas générer des niveaux numériques d’emplois proportionnels en raison de choix technologiques inappropriés – à savoir, des modes de production manufacturière excessivement intensifs en capital physique et en compétences. Ils affirment que les technologies manufacturières disponibles sur les marchés mondiaux se sont progressivement éloignées des

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proportions de facteurs des pays africains à main-d’œuvre abondante et se sont orientées vers des biais plus importants de compétences et d’automatisation. Plus précisément, ils montrent que l’augmentation conséquente de l’intensité de capital dans les grandes entreprises manufacturières d’Éthiopie et de Tanzanie a largement dépassé l’approfondissement du capital dans l’ensemble de l’économie et a conduit à des courbes d’offre de travail moins sensibles aux prix.

19. Pour une illustration graphique de l’effet d’expansion de la production résultant de l’adoption de technologies privilégiant les compétences générant davantage d’emplois hautement qualifiés et peu qualifiés, voir Choi, Dutz et Usman (2020, figure B1.2.1 et encadré 1.2).

20. Acemoglu (2002) soutient que le début du XIXe siècle a été caractérisé par un changement technologique remplaçant les compétences supérieures (appropriées aux compétences inférieures) parce que l’offre accrue de travailleurs moins qualifiés dans les villes anglaises (résultant de la migration des zones rurales et de l’Irlande) a rendu l’introduction de ces technologies rentable.

21. L’initiative phare Économie numérique pour l’Afrique (DE4A – Digital Economy for Africa) est un partenariat entre la Banque mondiale, les États africains, l’Union africaine et d’autres partenaires au développement. Pour plus d’informations, consultez le site Web de DE4A : https://www. worldbank.org/en/programs/all-africa-digital-transformation. Voir également Banque mondiale (2020) pour une description plus détaillée des catalyseurs numériques proposés.

22. Le « surplus du consommateur » désigne le bénéfice obtenu par tous les consommateurs qui achètent un produit à un prix inférieur au prix hypothétique le plus élevé qu’ils seraient prêts à payer pour acquérir ce produit. Il augmente à mesure que les prix baissent – un gain à la fois pour les consommateurs existants et pour les nouveaux qui ne voulaient ou ne pouvaient pas acheter le produit à des prix plus élevés.

23. Les réductions de coûts sont à la fois explicites et implicites par rapport à la production traditionnelle sans TN. Par exemple, la consommation de TN a augmenté pendant la pandémie de COVID-19, pas vraiment à cause du faible coût explicite de l’utilisation de la TN par rapport à l’achat dans un magasin local traditionnel (où il n’y a pas les frais d’expédition appliqués dans la vente en ligne), mais plutôt parce que le coût implicite associé aux achats dans un magasin normal était l’exposition de l’acheteur à la COVID-19.

24. D’autres impacts des TN ne sont pas examinés dans ce rapport, notamment l’impact de leur utilisation sur la baisse des prix dans l’ensemble de l’économie, la plus grande variété et le surplus du consommateur, les services fiscaux publics numériques, la fourniture de services de santé et d’éducation, les transferts des indemnités d’assistance sociale, le renforcement des institutions publiques et le renforcement de la redevabilité et de la confiance des pouvoirs publics. Le rapport n’explore pas non plus l’impact des TN sur les effets non monétaires tels que les avantages intrinsèques d’une meilleure santé et d’une meilleure éducation pour la société civile, de la dignité humaine et de l’autonomisation des individus, et d’autres aspects non pécuniaires de la qualité de la vie.

25. L’étude de cas du Kenya complète les explorations du Sénégal pour illustrer l’effet sur les entreprises non agricoles, dont beaucoup sont informelles. Les entreprises non agricoles n’ont pas pu être considérées dans le cas du Sénégal en raison du manque de données détaillées.

26. Cette section, et notamment la première sous-section, bénéficie d’une analyse documentaire récente et utile qui distingue les recherches disponibles sur la connectivité à l’internet en impacts du côté de l’offre et en impacts du côté de la demande (Hjort et Tian, 2021).

27. L’accent mis par la recherche sur la disponibilité du réseau internet plutôt que sur son adoption et utilisation est empiriquement plus robuste, car il est indépendant ou extérieur aux décisions individuelles des ménages. Le fait que la disponibilité soit la variable d’intérêt permet de prendre en compte non seulement l’impact direct, mais aussi les effets d’entraînement. Pour éviter que le service internet ne soit déployé de manière non aléatoire, les opérateurs ayant tendance à cibler d’abord les zones les plus prospères, des tests sont effectués afin de s’assurer que l’hypothèse de tendances de prétraitement similaires pour les individus traités (ceux qui sont couverts) et les non traités (ceux qui ne sont pas couverts) reste fondée, entre autres techniques visant à garantir des résultats robustes et non biaisés.

28. L’échantillon de l’EDS couvre le Bénin, le Ghana, le Kenya, la Namibie, le Nigeria, la République démocratique du Congo, la Tanzanie et le Togo. L’échantillon de l’Afrobaromètre couvre l’Afrique

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du Sud, le Bénin, le Ghana, le Kenya, Madagascar, le Mozambique, le Nigeria, le Sénégal et la Tanzanie. L’enquête trimestrielle sur la population active de l’Afrique du Sud couvre chaque trimestre une section transversale représentative au niveau national. Au total, les trois ensembles de données couvrent 12 pays regroupant une population combinée d’environ un demi-milliard de personnes.

29. D’autres vérifications de la robustesse comprennent une analyse de sensibilité sur la définition de la connectivité en modifiant le rayon du réseau dorsal, en mesurant l’impact d’autres infrastructures, et les effets du déplacement de la main-d’œuvre résultant des trajets quotidiens domicile-travail, entraînant tous des changements indiscernables dans les résultats rapportés. La réponse en termes d’emplois ne semble pas provenir de la formalisation d’« emplois informels préexistants », et les enquêtes n’ont pas non plus trouvé de preuve d’une augmentation du nombre d’emplois dans les zones connectées avant l’arrivée des câbles sous-marins.

30. Comme constaté par Hjort et Poulsen (2019), l’effet d’augmentation de la production mis en évidence par Dutz, Almeida et Packard (2018) dans les pays d’Amérique latine constitue un mécanisme clé sous-tendant probablement les résultats concernant les emplois inclusifs découlant de la disponibilité d’un internet privilégiant les compétences. Dans des études empiriques complémentaires distinctes sur l’Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie et le Mexique qui y sont résumées, les travailleurs peu qualifiés bénéficient également de l’utilisation plus intensive d’internet, la productivité et la production des entreprises augmentant suffisamment pour surmonter la substitution des travailleurs peu qualifiés aux travailleurs plus qualifiés en combinaison avec des TN aux niveaux de production initiaux.

31. Dans des travaux antérieurs connexes basés sur un échantillon de 26 000 entreprises manufacturières de 15 pays africains et réalisés à partir des données de l’Enquête sur les entreprises de la Banque mondiale, Dutz, Kessides et coll. (2012) ont été les premiers à constater que l’activité d’innovation déclarée dans les produits et les procédés au niveau de l’entreprise est liée aux capacités et à l’utilisation d’internet, que cette activité d’innovation est à son tour liée à la croissance de l’emploi, et que celle-ci est liée à des impacts inclusifs puisque les emplois peu qualifiés et occupés par des femmes ont augmenté plus rapidement que l’emploi général.

32. L’hypothèse d’identification des effets causaux est liée au déploiement progressif du haut débit mobile sur une période de sept ans (2010-2016), sur la base des cartes de couverture de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) combinées aux données de trois cycles de l’Enquête générale par panel auprès des ménages. Les contrôles comprennent l’accès à l’électricité, la propriété du logement, la taille du ménage et un indice lié à la richesse mesurant les caractéristiques du logement. En plus de tester la similarité des tendances avant traitement, des spécifications supplémentaires sont exécutées qui exploitent le fait que certains ménages obtiennent une couverture mobile à large bande « non intentionnelle », ce qui est potentiellement quasi aléatoire. La population active est définie comme l’ensemble des individus en âge de travailler (15 à 64 ans) qui étaient employés ou au chômage (à la recherche d’un emploi) au cours des sept derniers jours. Les individus en âge de travailler ayant travaillé pour quelqu’un qui n’était pas un membre de leur famille au cours des sept derniers jours ont été considérés comme des salariés ou des employés. Les principaux résultats sont robustes aux spécifications incluant l’accès autodéclaré à internet comme contrôle.

33. Les seuils de pauvreté « extrême » et « modérée » sont, respectivement, de 1,90 dollar US par personne et par jour et de 3,20 dollars US par personne et par jour. Les impacts sur la pauvreté modérée ne sont pas statistiquement significatifs.

34. L’hypothèse d’identification des effets causaux est à nouveau liée au déploiement progressif du haut débit mobile – cette fois sur une période de six ans (2008-2013) – sur la base des cartes de couverture de la GSMA, combinées à trois cycles de l’Enquête nationale par panel.

35. Comme le rapportent Bahia et coll. (à paraître), ces résultats sont conformes aux études précédentes suggérant que, bien que les femmes puissent bénéficier des TN, elles rencontrent souvent de plus grandes difficultés à en tirer parti en raison d’un ensemble de normes sociales, de la dynamique au sein du ménage, du manque d’accès aux actifs productifs, et du fait qu’elles sont moins susceptibles que les hommes d’utiliser internet.

36. Les impacts sur les seuils internationaux de pauvreté « extrême » et « modérée » (1,90 dollar US par personne et par jour et 3,20 dollars US par personne et par jour, respectivement) sont négatifs,

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mais statistiquement non significatifs. Le « seuil de pauvreté national des besoins de base » de la Tanzanie est calculé sur la base du coût pour les ménages de l’achat de suffisamment de nourriture pour assurer une nutrition quotidienne adéquate par personne (seuil alimentaire) plus le coût de certains produits non alimentaires essentiels (composante non alimentaire).

37. Contrairement aux résultats obtenus au Nigeria, les gains de bien-être sont plus élevés en Tanzanie dans les zones urbaines, car les données reflètent un déploiement plus précoce de la couverture 3G dans les zones urbaines au début des années 2010. D’autre part, alors que les niveaux de consommation et de pauvreté des ménages dirigés par des femmes sont statistiquement significatifs en Tanzanie, ils ne le sont pas au Nigeria. Une raison suggérée est qu’au Nigeria, les femmes peuvent être confrontées à des obstacles importants par rapport aux hommes dans l’utilisation de l’internet mobile. Ces obstacles pourraient empêcher les femmes de profiter des avantages associés : par exemple, les femmes étaient 32 % moins susceptibles que les hommes d’utiliser l’internet mobile en 2017.

38. Les résultats du Sénégal reposent sur l’intégration de deux enquêtes sur le budget des ménages – la Deuxième enquête de suivi de la pauvreté au Sénégal (ESPS-II) de 2011 et l’Enquête légère expérimentale sur la pauvreté (ELEPS) de 2017-2018 – avec des données sur l’expansion de la couverture du haut débit mobile combinant la base de données Mobile Coverage Maps de Collins Bartholomew (https://www.collinsbartholomew.com/mobile-coverage-maps/mobile-coverage -explorer/) et des informations sur la couverture 2G-3G recueillies directement auprès des trois principaux opérateurs mobiles du Sénégal. Les résultats sont robustes lorsqu’on contrôle les données démographiques des ménages et d’autres caractéristiques spatiales, notamment les effets fixes de la région, la densité routière, l’éclairage nocturne et l’élévation au-dessus du niveau de la mer, ainsi que l’accès à une infrastructure numérique complémentaire.

39. Les résultats en matière de bien-être sont également robustes à une approche de variable instrumentale s’appuyant sur la distance par rapport à la couverture 3G dans les zones voisines.

40. Bien que la disponibilité de la 3G soit également corrélée négativement avec la pauvreté modérée (basée sur le seuil de pauvreté international de 3,20 dollars US par jour), son effet n’est pas robuste à l’inclusion de l’ensemble supplémentaire de contrôles.

41. Dutz, Orszag et Willig (2012) estiment un système de demande logit emboîté avec des variables instrumentales et permettant aux préférences de varier en fonction de la part des ménages ruraux dans chaque zone statistique métropolitaine américaine. Ils trouvent des avantages nets pour les consommateurs américains du haut débit domestique en 2008 de l’ordre de 32 milliards de dollars US par an. La volonté supplémentaire de payer pour le haut débit est significativement plus élevée parmi les ménages à revenu élevé, plus jeunes et plus instruits (diplôme de fin d’études secondaires ou plus par rapport au diplôme d’études secondaires ou moins), ce qui suggère que des tarifs plus bas pour les ménages à faible revenu, plus âgés et moins instruits pourraient entraîner une plus grande adoption par ces groupes démographiques.

42. En se basant sur des données internationales de 2000 à 2017, Lederman et Zouaidi (2020) ont établi une corrélation partielle négative et robuste entre les taux de chômage nationaux à long terme (chômage frictionnel) et l’utilisation d’internet, représentée par la part de la population adulte déclarant utiliser internet pour payer ses factures.

43. Ces constatations proviennent d’un essai contrôlé randomisé (ECR) portant sur un employeur qui souhaitait attirer des travailleurs talentueux pour un poste d’employé de bureau dans un environnement urbain à Addis-Abeba, en Éthiopie. Tous les candidats se sont vus offrir une incitation monétaire de 4,50 dollars US, calibrée de manière à leur rembourser à la fois les frais de transport (une candidature en présentiel était requise pour ce poste) et le coût d’opportunité de leur temps. Abebe, Caria et Ortiz-Ospina (2021) ont constaté que l’incitation à la candidature améliore la qualité de la réserve de candidats : le nombre de meilleurs candidats double.

44. Les résultats sont basés sur un ECR mis en œuvre dans 70 villages ruraux du Kilimandjaro et de Manyara, deux régions du nord de la Tanzanie, en février-mars 2019. L’application a été conçue pour imiter un portail d’emploi en ligne, sauf que les annonces étaient publiées sur des téléphones à fonctionnalités limitées dépourvus de données internet. Aucun effet n’a été constaté sur la création d’emplois ou le salaire moyen.

45. Comme dans Hjort et Poulsen (2019), la stratégie d’identification de Houngbonon, Mensah et Traore (2022) exploite des variations spatiales et temporelles plausiblement exogènes dans la

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disponibilité de l’internet à haut débit dans une conception de différence dans la différence ainsi qu’une approche de variable instrumentale. Ils associent des données spatiales sur le déploiement de l’internet à haut débit à des données géoréférencées sur les ménages et les entreprises. Les données sur l’entrepreneuriat proviennent de l’Étude sur la mesure des niveaux de vie-Enquêtes intégrées sur l’agriculture (LSMS-ISA – Living Standards Measurement Study-Integrated Surveys on Agriculture) pour l’Éthiopie, le Malawi, le Nigeria, la Tanzanie et l’Ouganda, tandis que les données sur l’innovation proviennent de l’Enquête de la Banque mondiale sur les entreprisesEnquête de suivi de l’innovation (WBES-IFS – World Bank Enterprise Survey–Innovation Follow-up Survey) menée entre 2011 et 2015 pour la République démocratique du Congo, le Ghana, le Kenya, le Malawi, la Namibie, le Nigeria, l’Ouganda, le Soudan, la Tanzanie et la Zambie.

46. Une stratégie d’identification est utilisée comme celle de Houngbonon, Mensah, et Traore (2022), basée sur des données sur l’IDE au niveau des projets provenant de fDiMarkets 2003-2018 pour tous les pays du continent africain.

47. Une augmentation de 1 % de l’utilisation d’internet est associée à une augmentation de 2,2 % des exportations, sur la base de données provenant de 43 pays africains sur la période 1996-2006 (Hinson et Adjasi, 2009). La variable dépendante est la valeur des exportations de biens et services ;  l’« utilisation d’internet » est la proportion d’utilisateurs d’internet pour 1 000 personnes. Les variables de contrôle comprennent le produit intérieur brut (PIB) par habitant, la population, la superficie et le taux de change. Le modèle est estimé avec des effets aléatoires. Comme mentionné précédemment, Hjort et Poulsen (2019) constatent également que les entreprises disposant d’internet exportent davantage.

48. Ces constatations sont basées sur un ECR réalisé en 2016 à Monrovia, au Liberia. Les entreprises traitées, officiellement enregistrées et comptant 14 employés en moyenne, ont reçu une formation de sept jours sur la façon de répondre aux appels d’offres d’acheteurs plus importants. La formation augmente le nombre d’appels d’offres auxquels les entreprises répondent, le nombre total de contrats remportés, les contrats hors appel d’offres remportés et les revenus tirés des contrats uniquement parmi les entreprises qui utilisaient internet à des fins commerciales au départ. Les avantages de la formation sont concentrés parmi les entreprises ayant un accès à internet, non seulement lorsque la demande en ligne est élevée, mais aussi lorsqu’elle est faible. Ceci soutient l’idée que l’utilisation d’internet convertit le marketing en ventes non seulement par un accès directement élargi au marché en ligne (certains contrats ne sont publiés qu’en ligne), mais aussi en réduisant les frictions de recherche et de communication – en facilitant la capacité des fournisseurs à rechercher des informations sur les acheteurs, à être trouvés par eux et à communiquer avec eux, que les contrats soient publiés en ligne ou non.

49. Les constatations sont fondées sur des données d’enquête au niveau micro-économique couvrant la période allant de 1997 (lorsque le service téléphonique 2G a été introduit) à 2001 (lorsque plus de 60 % des bateaux de pêche et la plupart des commerçants de gros et de détail utilisaient des téléphones mobiles pour coordonner les ventes). Le secteur de la pêche est passé d’un ensemble de marchés de pêche essentiellement autarciques à un état d’arbitrage spatial presque parfait. Le coefficient moyen de variation des prix entre les marchés (l’écart-type divisé par la moyenne) est passé de 60-70 % à 15 % ou moins (Jensen, 2007). De plus, le gaspillage, qui représentait en moyenne 5 à 8 % des prises quotidiennes avant l’arrivée des téléphones portables, a été éliminé. En outre, les bénéfices des pêcheurs ont augmenté en moyenne de 8 %, tandis que le prix à la consommation a diminué de 4 % et que le surplus du consommateur a augmenté de 6 % pour la sardine.

50. Le choc exogène permettant d’identifier les impacts est le passage des réseaux à haut débit 2G à 3G en 2008 et les changements induits dans la variation géographique entre les districts de la disponibilité des plans de données pour les ménages. Les données du recensement annuel des grandes et moyennes industries manufacturières (GMIM) de l’Éthiopie entre 2000 et 2014 – couvrant toutes les entreprises manufacturières publiques et privées ayant plus de 10 employés et utilisant l’électricité pour la production – sont combinées avec les Enquêtes sur les revenus, la consommation et les dépenses des ménages (ERCD) représentatives au niveau national en 2004-2005 et 2010-2011, qui incluent les dépenses liées aux cartes mobiles ; les niveaux de dépenses moyens sont utilisés pour sélectionner les districts traités et non traités.

51. S’appuyant sur Hjort et Poulsen (2019), Goldbeck et Lindlacher (2021) se concentrent sur la croissance économique locale dans les « villes connectées de manière fortuite » – à savoir les villes

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proches d’un point d’accès qui ne sont pas des villes nodales connectées de manière endogène – dans 10 pays africains : Angola, Bénin, Botswana, Éthiopie, Mali, Soudan, Sénégal, Togo, Zambie et Zimbabwe. Les points d’accès ont été installés le long d’autres infrastructures pouvant prêter à confusion, comme les routes, les chemins de fer et le réseau électrique. Ils constatent que la disponibilité d’internet entraîne, en moyenne, une augmentation de 7 % de la luminosité nocturne des villes vue par satellite dans les années suivant la connexion, ce qui se traduit approximativement par une croissance économique plus élevée de 2 points de pourcentage, en appliquant l’élasticité PIB-luminosité d’Henderson, Storeygard et Weil (2011). La constatation de Goldbeck et Lindlacher (2021) est relativement proche de l’estimation de Hjort et Poulsen (2019) d’une augmentation de 3,3 % des revenus moyens. Mensah (2021) fournit des résultats connexes sur l’impact infranational au niveau mondial dans 3 419 régions de 201 pays.

52. La croissance économique (PIB réel par travailleur), la PTF et la croissance du capital par travailleur (mesurée par la croissance annuelle moyenne sur une période de cinq ans sans chevauchement allant de 1990 à 2019) ainsi que l’indice de pauvreté et l’indice de Gini ont régressé, respectivement, sur le nombre d’abonnements à l’internet mobile par habitant (à partir d’une base de données GSMA Intelligence) et sur la part de la population des utilisateurs d’internet (à partir de la base de données des Indicateurs du développement dans le monde, fondée sur les données de l’Union internationale des télécommunications), pour 46 pays d’Afrique subsaharienne. Les estimateurs du système de la méthode généralisée des moments pour les variables instrumentales (GMM-IV) sont utilisés pour traiter les effets temporels non observés par l’inclusion d’intercepts spécifiques à la période. La méthode utilise ensuite la différentiation et l’instrumentation pour contrôler les effets sur les pays non observés et l’endogénéité probable et la causalité de réserve.

53. L’argent mobile se distingue des services bancaires mobiles, qui permettent d’accéder aux comptes bancaires existants à l’aide d’un smartphone. Il s’agit d’une application fonctionnant grâce à un logiciel installé sur une carte SIM (subscriber identity module – module d’identité d’abonné) et généralement utilisée sur des téléphones 2G ou 2,5G, même si les agents d’argent mobile ont besoin d’une connexion internet pour être pris en compte. Il s’agit d’un service financier ne nécessitant aucun compte bancaire et généralement fourni par les opérateurs de réseaux mobiles. Son utilisation reste principalement limitée aux paiements numériques de personne à personne (P2P), en grande partie pour les transferts sur de grandes distances ou comme paiement alternatif lorsque la détention d’espèces est risquée. Voir Suri (2017) pour un aperçu des opérations, des réglementations et des impacts de l’argent mobile dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

54. Entre 2008 et 2014, cinq cycles d’une enquête par panel auprès des ménages ont été réalisés (Suri et Jack, 2016). Pour identifier les effets causaux de M-Pesa sur le bien-être économique des ménages, les changements dans l’accès à l’argent mobile ont été utilisés plutôt que l’adoption elle-même. L’accès au service a été mesuré par la proximité géographique des ménages par rapport aux agents d’argent mobile.

55. La question sous-jacente de l’étude ougandaise (Wieser et coll., 2019) est de savoir si les zones de l’échantillon sont trop éloignées et trop pauvres pour bénéficier de l’argent mobile (car elles perçoivent peu de transferts de fonds et peuvent ne pas avoir suffisamment de revenus pour épargner). Pour mesurer l’effet de l’argent mobile dans les zones pauvres et reculées, la Société financière internationale a collaboré avec Airtel Uganda pour mettre en œuvre cet ECR dans le nord de l’Ouganda, où aucune des zones ne disposait d’agents d’Airtel Money au départ. Dans le groupe de traitement, les agents d’Airtel Money ont été déployés en 2017, et 46 % des zones ont reçu au moins un agent. Les auteurs concluent que les services d’argent mobile peuvent améliorer les moyens de subsistance, même dans les zones très pauvres et reculées, même si l’analyse ne trouve aucun effet direct sur l’épargne, les résultats agricoles ou la pauvreté.

56. Les données sont combinées à partir de l’expansion du réseau d’agents mobiles au Kenya pour la période 2000-2013, avec une mesure de la performance économique au niveau local, approchée à travers l’intensité de l’éclairage nocturne.

57. Pour prendre une décision de prêt, la TN demande l’autorisation de rechercher dans le téléphone du demandeur des données sur l’appareil, des informations de positionnement (GPS), des données des journaux d’appels et de SMS (y compris les achats de temps de communication et les transactions d’argent mobile), des données tirées des réseaux sociaux de Facebook et des listes de contacts. Un algorithme d’apprentissage automatique utilise ensuite ces données pour créer un

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score de crédit et prendre une décision de prêt. Une utilisation accrue se traduit par des taux d’intérêt moins élevés et des prêts plus importants. Voir Suri (2017).

58. La stratégie d’identification repose sur un modèle de régression discontinue autour du seuil à partir duquel les individus sont juste éligibles ou inéligibles au produit de prêt numérique, sur la base des données administratives de la banque pour les clients qui ont ouvert leurs comptes entre janvier et mars 2015. Ces données sont combinées avec des données d’enquêtes menées entre septembre 2016 et janvier 2017, et des données administratives sur un échantillon aléatoire de 10 000 clients de M-Shwari ayant ouvert leur compte entre janvier et mars 2016, pour lesquels il est possible de suivre toute l’évolution de leur historique de prêt et de leurs limites de crédit.

59. Ceci est important, car les ménages de l’échantillon ont un accès extrêmement limité à toute forme de crédit formel, étant donné qu’ils sont composés de personnes pauvres et vulnérables : seuls 6 % ont obtenu un prêt bancaire au cours des deux années précédant l’enquête ; seuls 2 % ont eu un prêt de microfinance ; seuls 5 % ont eu un prêt d’une coopérative d’épargne et de crédit ; et seuls 6 % ont emprunté à une association rotative d’épargne et de crédit (AREC), un mécanisme informel de prêt entre pairs.

60. Environ 68 % des membres du groupe de contrôle déclarent avoir dû renoncer à certaines dépenses en raison d’un choc négatif. Même si les ménages dépensent l’argent du prêt pour acheter, par exemple, des médicaments, les montants marginaux du prêt sont dépensés pour l’éducation – le poste qu’ils auraient ajusté s’ils n’avaient pas eu accès au prêt.

61. Pour plus d’informations, voir le site web de Pula, https://www.pula-advisors.com.

62. La valeur des informations sur les pratiques agricoles locales optimales pour les agriculteurs est confirmée par quatre essais évaluant la volonté de payer (VDP) des agriculteurs pour ces informations agricoles locales. La VDP moyenne pour les résultats d’analyses de sol locales se situe entre 0,20 et 4,80 dollars US, et pour les résultats de parcelles expérimentales locales, elle est de 2,30 dollars US. La VDP globale pour les informations sur les sols dans une zone donnée dépasse les coûts de production et de diffusion de ces informations dans des hypothèses plausibles : à l’échelle, on estime que les informations sur les sols sont produites et diffusées pour moins de 0,15 dollar US par agriculteur (pour 150 agriculteurs par test), ce qui est inférieur à la VDP de 0,20 dollar US par agriculteur dans le scénario conservateur où les agriculteurs devaient utiliser leur propre argent pour obtenir les informations. Voir Fabregas, Kremer, Robinson et Schilbach (2019).

63. Les estimations du rapport de cotes pour les effets des programmes sur les achats de chaux agricole sont de 1,21 – en d’autres termes, il y a une probabilité 1,21 fois plus élevée d’appliquer de la chaux pour réduire l’acidité du sol et augmenter les rendements par rapport au groupe témoin d’agriculteurs ne recevant pas les messages SMS. Les résultats sont basés sur six ECR mis en œuvre entre 2015 et 2017 auprès d’agriculteurs du Kenya et du Rwanda par trois organisations : i) Kenya Agriculture and Livestock Research Organization (KALRO), un organisme public ayant pour mandat de promouvoir la recherche et la diffusion agricoles ; ii) Precision for Development (PxD), conjointement avec Innovations for Poverty Action (IPA), un organisme de recherche à but non lucratif ; et le One Acre Fund (OAF), une entreprise sociale à but non lucratif pour les petits exploitants agricoles. Un calcul rapide montre un bénéfice de 0,41 dollar US par agriculteur traité. Si l’on considère que le coût moyen des programmes est de 0,04 dollar US par agriculteur, le rapport avantages-coûts est de 10. Toutefois, à l’échelle, avec un coût unitaire de 0,001 dollar US par SMS, le rapport avantages-coûts implicite serait de 100.

64. Les résultats proviennent d’une intervention basée sur les SMS effectuée en 2011-2013 dans un grand projet d’agriculture contractuelle de canne à sucre appartenant à l’une des plus grandes sociétés agroalimentaires d’Afrique de l’Est. L’amélioration des rendements a généré une augmentation d’environ 43 dollars US des bénéfices de l’entreprise et d’environ 54 dollars US des revenus des agriculteurs, tandis que le coût du programme par agriculteur est d’environ 0,30 dollar US par agriculteur. Un ECR de suivi de la même intervention n’a toutefois pas eu d’impact significatif sur les rendements. Les différences de saison, de caractéristiques des agriculteurs et d’autres spécificités de l’environnement sous-jacent peuvent expliquer ces différences de résultats.

65. L’expérience sur le terrain a concerné environ 4 000 ménages agricoles échantillonnés parmi la population des ménages cultivant du maïs dans cinq districts de l’est de l’Ouganda. Les vidéos montraient des agriculteurs-acteurs s’exprimant dans la langue locale d’une manière compréhensible pour les agriculteurs peu qualifiés, y compris les analphabètes. Elles ont été

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projetées sur des tablettes Android de 10 pouces et visionnées par un enquêteur de terrain formé au cours de réunions individuelles avec l’agriculteur ou avec l’homme et la femme co-chefs de famille. Les vidéos ont été vues deux fois par les ménages de l’échantillon, une fois avant la plantation du maïs (août 2017) et une fois au moment de la plantation (septembre 2017).

66. L’ECR a été mis en œuvre dans trois régions des hauts plateaux dans le cadre du projet de gestion intégrée de la fertilité des sols de l’Agence allemande pour la coopération internationale (GIZ) en 2015-2018. Les personnages principaux de la vidéo ont été soigneusement choisis pour être, dans la mesure du possible, représentatifs du statut socioéconomique et du milieu de vie du public cible : étant donné les différences culturelles, linguistiques et agroécologiques entre le Tigré, l’Amhara et l’Oromia, trois couples d’agriculteurs différents ont été sélectionnés et mis en scène dans la version destinée à chaque région. La vidéo a été montrée dans des espaces publics tels que des centres de formation pour agriculteurs, des postes de santé ou des écoles, et a été suivie de discussions de groupe animées par des agents de vulgarisation. Malgré la taille plus importante de l’effet du traitement combiné par rapport à celui du traitement de vulgarisation seul il n’y a aucune preuve d’un effet complémentaire significatif de la vidéo sur l’adoption du paquet intégré ou d’un composant individuel.

67. L’expérience de terrain a porté sur 700 ménages échantillonnés dans 75 villages de cinq zones de production de riz irrigué dans l’État de Kano, la principale région productrice de riz au Nigeria en 2016-2017. L’application RiceAdvice, développée par AfricaRice en collaboration avec des partenaires nationaux, est un outil d’aide à la décision basé sur Android que les agents de vulgarisation utilisent pour fournir aux ménages agricoles des directives de gestion présaisonnières spécifiques au champ pour la production de riz. Les conseils de vulgarisation comprennent un plan de gestion des nutriments, une suggestion de calendrier des cultures et des informations concernant les pratiques modèles de la riziculture. Pour générer ces conseils, les agriculteurs fournissent des informations sur l’emplacement géographique de la parcelle, les mesures descriptives de la qualité du sol, les conditions locales de la riziculture, la variété de semences, les pratiques de gestion habituelles, la date de semis prévue, la disponibilité des engrais, les prix du marché pour les intrants et les coûts de production prévus.

68. Une méthode mixte a été appliquée, impliquant environ 400 répondants et comprenant un outil de cartographie participative, des discussions de groupe, des entretiens avec des propriétaires de tracteurs et d’autres parties prenantes, ainsi qu’une enquête auprès des agriculteurs menée en octobre 2018 dans le territoire de la capitale fédérale du Nigeria. La taille moyenne des terres desservies à la fois par Hello Tractor (4,6 ha) et par les prestataires de services conventionnels (5,3 ha) dans l’échantillon était nettement supérieure aux 2 ha souvent utilisés comme seuil pour définir la petite agriculture. La location d’un tracteur nécessite l’enregistrement de données telles que la taille des parcelles, le type d’équipement requis et l’état des terres, dont certaines ne peuvent être facilement soutenues par des outils visuels. De plus, peu de petits exploitants agricoles font suffisamment confiance aux services mobiles pour effectuer des transactions commerciales si celles-ci impliquent un paiement initial. Les agriculteurs s’engagent donc indirectement avec Hello Tractor à travers des agents de réservation et des appels téléphoniques plutôt qu’à l’aide d’une application sur smartphone.

69. Parmi les agriculteurs accédant aux services interrogés dans le cadre de cette étude, 11 % de ceux ayant fait appel à Hello Tractor étaient des femmes, tandis que les agriculteurs utilisant les méthodes traditionnelles existantes étaient tous des hommes, ce qui constitue une différence de moyens très significative sur le plan statistique. Les auteurs (Daum et coll., 2021) supposent que parce que les agents de réservation viennent de l’extérieur des communautés, souvent des zones urbaines, ils sont moins contraints par les normes et règles sociales favorisant les agriculteurs masculins.

70. Les régressions entre pays sur la période 2010-2020 soulignent que, bien que le revenu soit un facteur clé, l’écart d’utilisation de l’internet mobile entre l’Afrique subsaharienne et le reste du monde ne s’explique pas uniquement par le revenu (Atiyas et Dutz, 2022). L’adoption unique de l’internet mobile est régressée sur le PIB par habitant, au carré et au cube (pour tenir compte de la possibilité que l’association entre l’adoption et le revenu soit non linéaire). Le revenu explique à lui seul un peu plus de la moitié de la variation de l’adoption de l’internet mobile dans tous les pays et pour toutes les années. Lorsqu’une variable muette pour l’Afrique subsaharienne est ajoutée, son

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coefficient est négatif et statistiquement très significatif, ce qui suggère que même en tenant compte du revenu, le taux d’utilisation de l’internet mobile est inférieur d’environ 5,6 points de pourcentage à celui du reste du monde.

71. Ces chiffres diffèrent de ceux basés exclusivement sur les données de la GSMA, car ils reposent sur les réponses individuelles concernant l’adoption, basées sur des enquêtes auprès des ménages.

72. Pour le Sénégal, l’utilisation est basée sur les individus déclarant accéder à internet à l’aide de leur téléphone portable.

73. Pour le Nigeria, l’« utilisation » est basée sur les individus déclarant accéder à internet de manière générale, ce qui inclut l’internet à large bande fixe et mobile, même si l’appareil ou la connexion internet appartient à quelqu’un d’autre. Il n’est pas possible de distinguer le type d’appareil utilisé pour se connecter à internet.

74. Comme RIA ne disposait pas d’informations indépendantes sur la répartition des entreprises informelles, l’échantillonnage pour l’enquête auprès des entreprises a été effectué parallèlement à celui destiné à l’enquête complémentaire de RIA auprès des ménages. Plus précisément, l’échantillon du recensement national a été divisé en zones de recensement (ZR) urbaines et rurales. Ces ZR ont ensuite été échantillonnées par strate en utilisant une probabilité proportionnelle à la taille. Pour chaque ZR, deux listes ont été établies, l’une pour les ménages et l’autre pour les entreprises ; elles ont servi de base au sondage. Dans chaque ZR, 24 ménages et 10 entreprises ont été sélectionnés de manière aléatoire. L’application des poids d’échantillonnage permet d’obtenir des données représentatives au niveau de la ZR pour l’enquête sur les microentreprises de RIA. Voir Mothobi, Gillwald et Aguera (2020) pour une analyse descriptive de ces données.

75. Voir Suri (2017) pour une liste des questions de recherche en suspens liées à l’argent mobile.

76. Des investissements dans l’analyse des données administratives publiques et l’évaluation de l’impact peuvent débloquer un grand potentiel d’amélioration de la prestation des services publics dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Cette constatation s’appuie, entre autres, sur une analyse empirique de la diffusion d’un système de vulgarisation agricole par téléphone en Éthiopie par Figueiredo Walter et coll. (2021). Ceux-ci montrent comment de petits changements dans la conception du système de réponse vocale interactive peuvent avoir des effets substantiels sur la quantité des conseils agricoles auxquels les agriculteurs ont accès. Leur étude suggère que le développement du système n’a pas été freiné par un manque de volonté politique, mais plutôt par un manque de capacité des pouvoirs publics à identifier les changements bénéfiques du système. Le potentiel perdu d’amélioration du système semble dû à une défaillance passive plutôt qu’active des pouvoirs publics.

77. Sur le concept de suivi diagnostique ou « d’apprentissage par le suivi », voir Sabel (1994).

78. Campenhout, Spielman et Lecoutere (2021) encouragent la reproduction d’études similaires dans des contextes nationaux différents – tout en variant le choix des TN et les modèles expérimentaux selon lesquels elles sont introduites auprès des agriculteurs – dans de multiples contextes agroécologiques, sociaux et économiques.

79. Dans un récent ECR, un programme de formation comprenant un mentorat, proposé de manière aléatoire à des personnes dotées d’aptitudes et d’une volonté d’adhérer différentes, a donné des résultats significativement meilleurs que le même programme proposé à des personnes ayant choisi elles-mêmes de participer : le premier groupe a surpassé le second de 18 % sur le lieu de travail au cours des six mois suivants. Sandvik et coll. (2021) en concluent que : « les effets de l’application des programmes de mentorat formel sont les plus importants pour les travailleurs qui, autrement, choisiraient de ne pas y participer. Les caractéristiques démographiques et de personnalité sont des prédicteurs relativement faibles de la sélection dans le programme de formation, ce qui suggère que les programmes à large base sont probablement plus efficaces que les règles de ciblage alternatives ».

80. En utilisant les données des transactions de la quasi-totalité du réseau des abonnés rwandais à la téléphonie mobile pendant 4,5 ans, Björkegren (2019) estime que le passage d’une taxe sur les appareils à une taxe sur l’utilisation aurait augmenté le surplus des utilisateurs les plus pauvres d’au moins 26 %.

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CHAPITRE 2

Entreprises

Créer de meilleurs emplois pour plus de personnes grâce à l’innovation

Utilisation des technologies numériques par les entreprises africaines

Les technologies numériques (TN) et complémentaires sont associées à une productivité plus élevée, une production et des ventes plus importantes et de meilleurs emplois pour un plus grand nombre de personnes. Mais les entreprises africaines sont à la traîne des pays pairs dans l’utilisation des TN. Pour réduire cet écart technologique avec le reste du monde et parvenir à des emplois plus inclusifs, elles doivent générer et adopter des TN et des technologies complémentaires alignées sur l’avantage comparatif actuel de l’Afrique : le nombre important et croissant de travailleurs moins qualifiés. Elles doivent aussi adopter et utiliser ces technologies de manière beaucoup plus intensive pour permettre aux propriétaires d’entreprises, gestionnaires et travailleurs existants ou entrants sur le marché d’apprendre tout en travaillant, afin d’accroître leur productivité, de générer des revenus plus élevés et créer plus d’emplois au fil du temps.

Relation entre sophistication technologique et augmentation de la productivité et du nombre d’emplois Deux enquêtes complémentaires fournissent de nouvelles conclusions sur l’emploi des technologies et leurs résultats en matière de productivité, ventes, emplois et revenus : l’enquête de la Banque mondiale sur l’adoption de technologies par les entreprises (Firmlevel Adoption of Technology – FAT) se limite aux entreprises de cinq employés ou plus établies dans quatre pays africains, le Ghana, le Kenya, le Malawi et le Sénégal, ainsi qu’au Brésil et au Vietnam pour comparaison.1 L’étude After Access de Research ICT Africa (RIA) se concentre sur les microentreprises (celles de taille médiane étant des entreprises familiales indépendantes sans employé à plein temps) dans sept pays : le Ghana, le Kenya, le Mozambique, le Nigeria, le Sénégal, l’Afrique du Sud et la Tanzanie.2

L’enquête FAT a également révélé une importante disparité de sophistication technologique interne dans les fonctions générales de l’entreprise (General Business Functions – GBF) : une société peut utiliser des TN sophistiquées pour la comptabilité et le marketing, mais elle est susceptible de recourir dans le même temps à des technologies manuelles non numériques pour le contrôle de la qualité (Cirera et coll. 2021).

Gains de productivité

Dans les entreprises africaines, l’utilisation intensive de TN plus sophistiquées et de technologies complémentaires est associée à une productivité plus élevée. Il a été constaté

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qu’une sophistication moyenne plus élevée des technologies utilisées le plus intensément dans l’ensemble des fonctions de l’entreprise (All Business Functions – ABF) – couvrant à la fois les GBF et les fonctions sectorielles de (Sector-specific Business Functions – SBF) – est associée de manière positive et significative à une productivité plus forte de la maind’œuvre.3 Les entreprises affichant une sophistication technologique moyenne plus élevée enregistrent une meilleure productivité (figure 2.1).

Ce constat basé exclusivement sur des données collectées en Afrique implique que la relation entre l’intensité de la technologie et la productivité est plus forte dans les pays africains que dans les autres pays étudiés. Autrement dit, une progression donnée de la sophistication technologique moyenne des entreprises est associée à une productivité de la main-d’œuvre plus forte dans les pays africains que dans tous les pays pour lesquels des données étaient disponibles.4 Cela suggère que des augmentations de la sophistication technologique sont plus susceptibles de générer des gains de productivité en Afrique que dans le reste du monde.

En Afrique, l’utilisation de TN plus sophistiquées et de technologies complémentaires est également associée à une productivité plus élevée pays par pays, notamment dans les entreprises informelles. Au niveau des pays, les entreprises affichant un indice de sophistication technologique moyenne plus élevé enregistrent une productivité supérieure en moyenne, avec différents niveaux de réactivité : les entreprises formelles avec un score supérieur de 1 point dans l’indice d’adoption pour les technologies utilisées le plus

FIGURE 2.1 Corrélations entre amélioration de la sophistication technologique et hausse de la productivité des entreprises dans certains pays africains, 2019–2021

Source : Cirera, Comin et Cruz 2022 (figure 4.2), limité aux données disponibles de quatre pays africains.

Note : Cette figure résume les données de 4 835 entreprises (comptant au moins cinq employés) au Ghana, au Kenya, au Malawi et Sénégal. Ce n’est qu’au Sénégal qu’il a été possible de tirer un échantillon représentatif des entreprises informelles. L’échantillon du Sénégal comprend donc des sous-échantillons représentatifs des entreprises à la fois formelles et informelles. L’indice de sophistication technologique des fonctions de l’entreprise (ABF) mesure la sophistication des technologies les plus intensément utilisées par chaque entreprise, sur la base d’une moyenne établie sur l’ensemble de ses fonctions (fonctions générales et sectorielles). La « valeur ajoutée par travailleur » est une valeur ajoutée nominale (en USD, en parité de pouvoir d’achat 2019). Les tracés en pointillés représentent l’intervalle de confiance de 95 %, avec une dispersion de productivité supérieure pour les valeurs plus élevées de sophistication technologique due à un nombre moins important d’observations et une plus grande variation de disponibilité de données complémentaires.

58 Afrique numérique
16 15 14 13 12 1 2 Log de v aleur ajoutée par tr av ailleur
34 5
Indice de sophistication technologique ABF

FIGURE 2.2 Corrélations entre l’utilisation de technologies plus sophistiquées et la croissance de la productivité et des emplois dans certains pays africains et de comparaison, 2019–2021

a. Corrélation avec la productivité de la main-d’œuvre

b. Corrélation avec la croissance de l’emploi

Malawi Ghana Kenya

Malawi Ghana Kenya

Source : Cirera, Comin et Cruz, 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021.

Note : Cette figure montre les coefficients de régression (cercles) et les intervalles de confiance de 95 % (lignes verticales) à partir des régressions nationales de l’indice de sophistication technologique, en faisant la moyenne des technologies utilisées le plus intensément dans les fonctions générales de l’entreprise (GBF INT), pour chaque entreprise en termes de niveaux de productivité de la maind’œuvre (panneau a) et d’évolution du travail à plein temps au cours des trois années précédentes (panneau b), en tenant compte du secteur, de la taille de l’entreprise et de la région. Les valeurs GBF INT varient de 1 à 5 pour chaque GBF, 1 représentant le niveau de sophistication technologique le plus basique (non numérique) et 5 le niveau le plus élevé au monde. Les échantillons des pays sont limités aux entreprises de cinq employés ou plus. Ce n’est qu’au Sénégal qu’il a été possible de tirer un échantillon représentatif des entreprises informelles. L’échantillon du Sénégal comprend donc des sous-échantillons représentatifs des entreprises formelles et informelles.

intensément pour des tâches GBF sont associées à des augmentations de la productivité de la main-d’œuvre de 1,9 % au Ghana, de 1,2 % au Kenya, de 1,4 % au Malawi et de 2 % au Sénégal (figure 2.2, panneau a).5

Notons qu’au Sénégal, le lien entre l’utilisation de technologies et la productivité est bien plus fort pour les entreprises informelles que pour les entreprises formelles, la valeur ajoutée par travailleur d’une entreprise informelle étant deux fois plus élevée que pour une entreprise formelle grâce à l’utilisation de technologies plus sophistiquées, avec un niveau de productivité de la main-d’œuvre supérieur de 4 % pour les premières contre 2 % pour les secondes. Au Ghana, au Malawi et au Sénégal, le niveau de productivité associé à la sophistication technologique est également supérieur à celui de l’entreprise moyenne au Brésil et au Vietnam.6

Des emplois plus nombreux et plus inclusifs

L’utilisation plus intensive des TN et autres technologies sophistiquées est également clairement associée à des emplois plus nombreux et plus inclusifs. Au niveau des pays, une augmentation de 1 point de l’indice d’adoption des technologies qui sont le plus intensément utilisées pour les tâches GBF est associée à une augmentation statistiquement significative du nombre de travailleurs dans l’entreprise moyenne de 23 % au Ghana et de 10 % au Sénégal (figure 2.2, panneau b).7 L’entreprise ghanéenne moyenne a également une augmentation du nombre d’emplois associée à une augmentation de la sophistication technologique plus élevée que l’entreprise moyenne au Brésil et au Vietnam.

Entreprises 59
60 Valeur ajoutée par travailleur (USD) 10 13 20 40 14 FCG Int 19 12 40 20 0 Brésil VietnamSénégal(formel)Sénégal(informel)
40 30 10 0 Évolution de l’emploi en pourcentage 20 16 FCG Int 15 10 12 11 23 3 Brésil VietnamSénégal(formel)Sénégal(informel)

De plus, les entreprises sénégalaises (dans les deux sous-échantillons d’entreprises formelles et informelles) sont davantage susceptibles d’augmenter la proportion de travailleurs peu qualifiés. Même si de nouvelles TN peuvent économiser des emplois, la part des travailleurs peu qualifiés dans les entreprises sénégalaises augmente de façon non proportionnelle dans la progression totale des emplois : une augmentation de 1 point de l’indice d’adoption des technologies le plus intensément utilisées pour les tâches GBF est associée à une diminution de 7 % de la proportion de travailleurs plus qualifiés dans l’emploi total.8

Ces constats au niveau des pays s’appliquent également à un échantillon plus large d’entreprises au Bangladesh, au Brésil, au Ghana, en Inde, au Kenya, en République de Corée, au Sénégal et au Vietnam : une augmentation de 1 point de l’indice d’adoption des technologies pour les GBF à la marge intensive est associée à une augmentation de 8,9 % du nombre de travailleurs dans l’entreprise moyenne et à une réduction de 0,8 point de pourcentage de la proportion de travailleurs plus qualifiés.9 Ces associations ne permettent pas d’établir un lien de cause à effet entre la technologie, la productivité, les emplois et la part des emplois peu qualifiés. Cependant, confrontées aux constatations résumées au chapitre 1, elles corroborent l’idée selon laquelle, en moyenne, les entreprises qui utilisent plus intensément des TN plus sophistiquées et des technologies complémentaires génèrent plus d’emplois tout en augmentant la part de travailleurs peu qualifiés.

Gains de performance dans les microentreprises

Des constatations complémentaires sur les microentreprises s’appuient sur l’étude After Access du RIA. Les données permettent de comparer les performances des utilisateurs et non-utilisateurs de TN dans trois domaines : la productivité de la main-d’œuvre, les ventes totales et les emplois. Pour les technologies d’accès, les différences de performance associées à l’usage de téléphones sans internet (de deuxième génération [2G ou 2.5G]) par rapport à des ordinateurs et des smartphones connectés à internet (de troisième et quatrième génération [3G ou 4G]) sont étudiées. Les avantages supplémentaires en termes de performances liés à l’utilisation de ces technologies d’accès à des fins spécifiques et avec des TN supplémentaires sont également explorés.

Par ailleurs, l’utilisation basique de téléphones mobiles pour communiquer avec les clients et faire de la publicité via le service de messagerie (SMS) (compatible avec les téléphones 2G) est comparée à l’utilisation plus sophistiquée d’un logiciel de comptabilité, d’un logiciel de gestion des stocks et des points de vente (PDV) compatibles avec des technologies 3G ou plus depuis des ordinateurs. Cette technologie avancée a également des applications spécifiques, grâce à internet, pour trouver des fournisseurs, mieux comprendre les clients et accéder aux services bancaires en ligne. Une évaluation des corrélations statistiquement significatives entre ces utilisations des TN et les performances des entreprises fournit de précieuses informations qui permettent de mieux comprendre l’environnement des affairs des microentreprises dans les pays africains.

Résultats non conditionnels. Les microentreprises bénéficiant des TN via des ordinateurs ou des smartphones compatibles avec internet présentent des résultats non conditionnels en matière de productivité, de ventes et d’emplois qui sont supérieurs à ceux des microentreprises qui n’en utilisent pas, mais également de meilleurs résultats que les entreprises utilisant des téléphones 2G seulement (figure 2.3). Les microentreprises qui emploient des smartphones ont une productivité 2,8 fois plus élevée, des ventes

60 Afrique numérique

FIGURE 2.3 Améliorations non conditionnelles des performances d’entreprises utilisatrices de TN par rapport aux non-utilisatrices dans un échantillon de pays d’Afrique subsaharienne, 2017–2018

Ordre de grandeur de l’amélioration des performances avec des TN

Utilisation d’un téléphone portable 2G/2.5G

Utilisation d’un portable pour communiquer avec les clients

Utilisation d’un portable pour faire de la publicité par SMS

Utilisation de TN avec des téléphones 2G-2.5G

Utilisation d’un smartphone

Utilisation d’un ordinateur

Utilisation d’un logiciel de comptabilité

Utilisation d’un logiciel de gestion des stocks/PDV

Utilisation d’internet pour trouver des fournisseurs

Utilisation d’internet pour comprendre les clients

Utilisation de TN avec ordinateurs ou téléphones 3G-4G compatibles avec internet

Productivité de la main-d’œuvre Ventes totales Emploi total

Source : Atiyas et Dutz, 2023, à partir des données de l’enquête Research ICT Africa (RIA) 2017-2018.

Utilisation d’internet pour les opérations bancaires en ligne

Note : L’expression « non conditionnel » fait référence à l’étude comparative des utilisateurs et non-utilisateurs (non-utilisateurs = 1,0) de chaque technologie numérique (TN) spécifiée au Ghana, au Kenya, au Mozambique, au Nigeria, au Sénégal, en Afrique du Sud et en Tanzanie de 2017 à 2018, sans tenir compte d’autres corrélats d’utilisation des TN. La productivité de la main-d’œuvre est mesurée par la valeur ajoutée (les ventes totales moins les matières premières et les intrants intermédiaires plus l’eau et l’électricité utilisées pour la production) divisée par la somme des travailleurs à plein temps et le nombre de propriétaires. PDV = point de vente ; SMS = service de messages courts ; 2G = technologie de communication mobile de deuxième génération ; 3G = troisième génération ; 4G = quatrième génération.

6,0 fois plus importantes et un nombre d’emplois 1,9 fois supérieur aux entreprises qui n’en utilisent pas. Les entreprises qui emploient des ordinateurs affichent une productivité 2,4 fois plus élevée, des ventes 7,5 fois plus importantes et un nombre d’emplois 2,5 fois supérieur.

Pour l’ensemble des TN, la plus forte augmentation des ventes grâce aux TN passe par l’utilisation de logiciels de comptabilité (13,7 fois plus que chez les non-utilisateurs) et l’utilisation d’internet pour la banque en ligne. L’utilisation de logiciels de comptabilité et de gestion des stocks et des points de vente est associée à certaines des augmentations les plus fortes du nombre d’emplois (3,8 fois et 3,5 fois supérieures que chez les nonutilisateurs, respectivement).

Résultats conditionnels. Les microentreprises qui emploient des TN avec des ordinateurs ou des smartphones compatibles avec internet affichent également des résultats conditionnels en matière d’emplois qui sont supérieurs à ceux des microentreprises non utilisatrices, mais également de meilleurs résultats conditionnels que les entreprises employant des téléphones 2G seulement. La figure 2.4 présente les résultats des corrélations entre l’utilisation des TN et les performances des microentreprises en tenant compte explicitement du fait que l’entreprise a bénéficié d’un prêt, qu’elle a accès à l’électricité, qu’elle est dirigée par des entrepreneurs « transformationnels »,10 ou qu’elle

Entreprises 61
1,1 1,0 0,9 2,8 2,4 2,6 1,5 3,4 2,7 2,3 1,9 1,9 1,4 6,0 7,5 13,7 6,0 9,2 5,0 11,7 1,0 1,6 2,0 1,9 2,5 3,8 3,5 2,6 2,2 3,4 0 2 4 6 8 10 12 14 16

FIGURE 2.4 Lien entre l’utilisation de technologies par les microentreprises et l’augmentation de la productivité, des ventes et des emplois dans certains pays d’Afrique subsaharienne, 2017–2018

Utilisation d’un téléphone portable 2G

Utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

Utilisation de la voix pour communiquer avec les fournisseurs

Utilisation d’AM pour recevoir les paiements des clients

Utilisation d’AM pour payer les fournisseurs

Utilisation du téléphone pour les opérations bancaires

Utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

Utilisation d’un smartphone 3G-4G

Utilisation d’un ordinateurb

Utilisation d’internet pour mieux comprendre les clients

Utilisation d’un téléphone portable 2G

Utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

Utilisation de la voix pour communiquer avec les fournisseurs

Utilisation d’AM pour recevoir les paiements des clients

Utilisation d’AM pour payer les fournisseurs

Utilisation du téléphone pour les opérations bancaires

Utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

Utilisation d’un smartphone 3G-4G

Utilisation d’un ordinateurb

Utilisation d’internet pour mieux comprendre les clients

Utilisation d’un logiciel de comptabilitéa

Utilisation d’internet pour les opérations bancaires en lignea

Utilisation de la voix pour communiquer avec les clientsb

Utilisation d’AM pour payer les employés

Utilisation de SMS pour faire de la publicitéb

Utilisation d’un ordinateurb

Utilisation d’internet pour le courrier électronique

Utilisation d’un logiciel de comptabilitéa

Utilisation d’un logiciel de PDV/de contrôle des stocks

Utilisation d’internet pour les opérations bancaires en lignea

Utilisation d’internet pour le recrutement

Ordinateurs ou smartphones connectés à internet requis Seuls les téléphones 2G sont nécessaires

Source : Atiyas et Dutz, 2023, à partir des données de l’enquête Research ICT Africa (RIA) 2017-2018. Note : La figure montre l’association entre l’utilisation de certaines technologies numériques (TN) par une microentreprise moyenne et la productivité, les ventes et les emplois. Les utilisations commerciales des TN – énumérées dans l’ordre des technologies d’accès simple aux utilisations plus sophistiquées – sont celles pour lesquelles les corrélats conditionnels sont significatifs au moins au niveau de 5 % sur la base des régressions des moindres carrés ordinaires (MCO) (avec des erreurs standard robustes) de la variable des performances respectives en logs par rapport aux variables fictives représentant l’utilisation des TN individuelles par entreprise. Les TN avec ordinateurs ou smartphones sont représentées en vert, les TN non compatibles avec internet sont représentées en bleu. Chaque chiffre indique le nombre de points log obtenus par les microentreprises employant des TN pour la variable de performance correspondante par rapport aux microentreprises qui ne les utilisent pas. Il est tenu compte de l’âge du gestionnaire et du genre du ou des propriétaires, de leur éducation et de leur formation professionnelle, de l’âge et l’âge au carré de l’entreprise, l’accès à l’électricité, l’obtention d’un prêt et d’une ligne de crédit/facilité de crédit auprès des fournisseurs, le caractère transformationnel du propriétaire, les liens avec des fournisseurs et des clients qui utilisent des technologies plus sophistiquées en aval/amont, le statut informel et urbain/rural, le secteur ainsi que les effets fixes par pays. Les données concernent 3 325 entreprises, dont 73 % d’entreprises informelles au Ghana, au Kenya, au Mozambique, au Nigeria, au Sénégal, en Afrique du Sud et en Tanzanie de 2017 à 2018. La microentreprise médiane est indépendante et ne compte aucun employé à plein temps. La productivité est mesurée par la valeur ajoutée (les ventes totales moins les matières premières et les intrants intermédiaires plus l’eau et l’électricité utilisées pour la production) divisée par la somme des travailleurs à plein temps et le nombre de propriétaires. L’emploi correspond au nombre d’employés à plein temps plus les propriétaires. AM = argent mobile ; PDV = point de vente ; SMS = service de messages courts. 2G = technologie de communication mobile de deuxième génération ; 3G = troisième génération ; 4G = quatrième génération

a. La variable est significative pour les trois résultats de performance : productivité, ventes et emplois.

b. La variable est significative à la fois pour les ventes et les emplois.

62 Afrique numérique 0,59 0,28 0,44 0,47 0,18 0,25 0,20 0,29 0,13 0,43 0,46 0,30 0,44 0,46 0,30 0,22 0,18 0,33 0,47 0,46 0,29 0,29 0,34 0,44 0,27 0,24 0,18 0,29 0,50 0,50 0,32 00,100,20 Augmentation de points log 0,300,400,500,60
Pour les emplois Pour les ventes Pour la productivité

a des liens avec des fournisseurs en amont et/ou des clients en aval qui utilisent des technologies plus sophistiquées, entre autres variables pertinentes disponibles. Les effets fixes par pays sont également pris en compte.

Les résultats montrent que l’utilisation par les microentreprises d’une plus large gamme de TN plus sophistiquées basées sur des ordinateurs ou des smartphones compatibles avec internet (en vert) est associée à des niveaux d’emplois plus élevés que ceux atteints en utilisant des TN basées uniquement sur des téléphones 2G (en bleu). La progression du nombre de TN plus sophistiquées associée à des niveaux plus élevés de productivité, de ventes et d’emplois est positive. Six utilisations de TN compatibles avec internet et trois utilisations de TN non compatibles avec internet constituent des corrélats conditionnels des niveaux d’emplois plus élevés, de même que le genre et l’âge du gestionnaire (être un homme et plus jeune), le fait que le gestionnaire bénéficie d’une formation professionnelle, que le propriétaire soit un entrepreneur transformationnel et que l’entreprise ait des liens en amont et/ou en aval avec des fournisseurs et des clients qui utilisent des technologies sophistiquées. D’autres corrélats significatifs pour les entreprises incluent l’âge et la formalité des entreprises ainsi que le fait que l’entreprise a déjà bénéficié d’un prêt ou qu’elle a accès à l’électricité. Le niveau d’éducation du gestionnaire est également un corrélat conditionnel positif majeur de la productivité, des ventes et des salaires par travailleur.

Les usages de TN plus sophistiquées associés de manière conditionnelle et statistiquement significative à certaines performances incluent notamment l’utilisation d’un smartphone 3G-4G, l’utilisation d’un ordinateur, l’utilisation d’internet pour trouver des fournisseurs, mieux comprendre les clients et accéder à la banque en ligne, et l’utilisation de logiciels de comptabilité, de gestion des stocks ou de PDV. Plus spécifiquement, les principaux corrélats conditionnels positifs de niveaux d’emplois plus élevés sont l’utilisation d’internet pour le recrutement, l’utilisation d’un logiciel de comptabilité et l’utilisation d’un logiciel de gestion des stocks ou de PDV. Plus important encore, l’utilisation de TN pour ces simples fonctions de gestion est plus fortement associée à l’emploi que d’autres utilisations de TN rapportées par des microentreprises : des entreprises employant des logiciels de comptabilité et de gestion des stocks ou des PDV sont associées à une taille plus grande de l’entreprise d’environ 1,6 personne (0,47 et 0,44 point log, respectivement) que celles qui n’en utilisent pas.

Avantages généraux de l’utilisation des TN pour les entreprises et la croissance des emplois

Les corrélations importantes et statistiquement significatives établies entre l’utilisation des TN compatibles avec internet et des entreprises plus productives et génératrices de plus d’emplois suggèrent que l’utilisation des TN permet également de renforcer la compétitivité des entreprises, y compris des microentreprises informelles. En créant plus d’emplois, les entreprises sont encore plus susceptibles de tirer profit de ces technologies.

Comme souligné dans la section suivante, ces constatations montrent également que peu d’entreprises tirent profit de ces avantages. Ces constatations suggèrent que l’adoption de TN relativement simples avec des smartphones et des ordinateurs dans le but d’améliorer les fonctions de base de l’entreprise, ainsi que les communications, la formation, le recrutement et les services bancaires, doit constituer un élément critique d’un plan de développement visant des emplois plus inclusifs.

Entreprises 63

Déficit d’utilisation des TN dans les petites entreprises

Les disparités technologiques entre les entreprises africaines restent importantes. Malgré les avantages importants tirés de l’adoption et de l’utilisation de TN pour la productivité et la croissance de l’emploi, les entreprises recourent peu aux TN, notamment les entreprises agricoles par rapport aux entreprises manufacturières et de services, les petites entreprises par rapport aux grandes, les entreprises informelles par rapport aux entreprises formelles, et la plupart des entreprises des pays africains par rapport aux pays pairs.

Écart moyen entre toutes les entreprises africaines

En moyenne, les entreprises africaines accusent un retard dans l’utilisation des TN et technologies complémentaires. Sur la base du nouvel indice de sophistication technologique de l’enquête FAT précédemment (figures 2.1 et 2.2), le tableau 2.1 ci-dessous montre le niveau moyen de sophistication technologique des entreprises comptant au moins cinq employés à temps plein, par pays disponible, à travers trois mesures : le niveau moyen de sophistication technologique dans toutes les fonctions de l’entreprise (All Business Functions – ABF), la sophistication moyenne dans les fonctions générales de l’entreprise (General Business Functions – GBF) communes à toutes les entreprises, et la sophistication moyenne dans les fonctions sectorielles de l’entreprise (Sector-specific Business Functions – SBF).

Le tableau montre que dans tous les pays, la plupart des entreprises sont éloignées de la frontière technologique mondiale (un niveau maximum de 5 pour chaque fonction), et que les pays africains affichent une sophistication technologique moyenne dans les ABF inférieure à celle des pays pairs pour lesquels des données sont disponibles. L’entreprise moyenne de tous les pays africains se situe en dessous du niveau 2 (niveau où les TN

TABLEAU 2.1 Sophistication technologique moyenne des entreprises dans certains pays d’Afrique et de comparaison, par type de fonction, 2019–2021

Source : D’après les données de Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021.

Note : Ce tableau présente le niveau moyen de sophistication technologique des entreprises (comptant 5 employés à plein temps ou plus) par pays selon trois mesures : la sophistication technologique moyenne des entreprises dans l’ensemble des fonctions de l’entreprise (ABF) ; la sophistication moyenne dans les fonctions générales de l’entreprise (GBF) communes à toutes les entreprises ; et la sophistication moyenne dans les fonctions sectorielles de l’entreprise (SBF), couvrant les secteurs de la culture agricole, de la transformation alimentaire, de l’habillement et du commerce de détail. Par « Tous les pays », il faut entendre tous ceux qui figurent dans le tableau. Les moyennes estimées sont calculées à l’aide des pondérations d’échantillonnage. Les entreprises incluses dans l’enquête FAT emploient au moins cinq employés à temps plein.

a. Les données du Sénégal sont résumées à l’échelle du pays, puis désagrégées en entreprises formelles et informelles (ces dernières étant celles qui ne disposent pas d’un système comptable formel conforme à SYSCOA [normes comptables de l’Union économique ouest-africaine] ou à un autre système comptable formel harmonisé).

64 Afrique numérique
Pays ABF GBF SBF Brésil 2,3 2,5 1,9 Vietnam 1,9 1,9 1,8 Ghana 1,6 1,5 1,7 Kenya 1,6 1,6 1,5 Sénégala 1,3 1,3 1,3 Formelle 1,6 1,7 1,6 Informelle 1,2 1,2 1,2

commencent à être utilisées pour la plupart des fonctions de l’entreprise), indiquant que la plupart des sociétés africaines recourent encore à des technologies analogiques non numériques pour la plupart des fonctions. Le tableau montre également le grand écart de sophistication technologique entre l’entreprise moyenne formelle et informelle au Sénégal entre les ABF, les GBF et les SBF.

Écarts relativement plus importants dans le secteur agricole

L’écart de sophistication technologique entre les pays est plus élevé dans l’agriculture que dans le secteur manufacturier ou les services. C’est dans l’agriculture que l’on trouve à la fois l’indice de sophistication technologique le plus élevé et le plus faible de tous les pays pour l’ensemble des ABF des entreprises de secteurs spécifiques (figure 2.5).

BRE#Agriculture

BRE#Serv¡ces

BRE#Fabrication

VNM#Agriculture

KEN#Agriculture

VNM#Services

SEN:Formelle#Agriculture

GHA#Agriculture

VNM#Fabrication

KEN#Fabrication

KEN#Services

SEN:Formelle#Fabrication

GHA#Services

SEN:Formelle#Services

GHA#Fabrication

SEN:lnformelle#Fabrication

SEN:lnformelle#Agriculture SEN:lnformelle#Services

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021.

Note : Les valeurs de l’« indice technologique » sont les moyennes estimées dans les fonctions de l’entreprise (ABF), en utilisant des poids d’échantillonnage, en tenant compte des différences dans la composition sectorielle des entreprises dans chaque pays. Les valeurs de l’indice sont indiquées de la plus haute (en haut) à la plus basse (en bas). L’intervalle de confiance (- à +) reflète un niveau de confiance de 95 %. Les entreprises couvertes par les enquêtes FAT sont celles qui emploient au moins 5 employés à temps plein. Les données du Sénégal sont ventilées en entreprises formelles et informelles, ces dernières étant celles qui ne disposent pas d’un système comptable formel conforme à SYSCOA (normes comptables de l’Union économique ouest-africaine) ou d’un autre système comptable formel harmonisé.

Entreprises 65
1,0 1,5 2,0 Indice technologique 2,5
FIGURE 2.5 Sophistication technologique des entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par grand secteur, 2019–2021

Le fait que l’agriculture brésilienne affiche l’indice global le plus élevé signifie que son secteur agricole est assez sophistiqué sur le plan technologique, plus que son industrie manufacturière et son secteur des services – en intégrant l’utilisation de capteurs TN pour l’irrigation et la fertilisation de précision, de drones contrôlés par des logiciels avancés pour la détection des parasites, de tracteurs dotés de systèmes informatiques intégrés pour la formation, la taille et la récolte, et le conditionnement après récolte sous atmosphère modifiée (ajout d’une atmosphère gazeuse particulière pour prolonger la durée de conservation dans des emballages scellés) lié numériquement au processus de récolte. Le soja est la culture brésilienne la plus importante en valeur de production, les cultures de maïs, de canne à sucre, de café, de coton, de riz, de manioc et d’agrumes étant non moins importantes, entre autres. La sophistication technologique de l’agriculture brésilienne ne s’est donc pas développée uniquement à cause de quelques produits de niche spécialisés et technologiquement exigeants.

Le fait que l’agriculture informelle sénégalaise présente l’indice global le plus bas est sans doute représentatif de l’agriculture informelle en Afrique, même parmi les exploitations informelles comptant cinq employés ou plus. Et l’indice moyen de sophistication technologique du Sénégal — inférieur à 1,5 — indique que la plupart des entreprises sénégalaises utilisent des technologies analogiques, antérieures au numérique, pour la plupart des fonctions.

Écarts relativement plus importants dans les petites entreprises

Les petites entreprises africaines utilisent moins de TN et de technologies complémentaires que les grandes entreprises. Le figure 2.6 montre que, dans chaque pays, les petites entreprises formelles (5 à 19 employés) sont en retard par rapport aux grandes entreprises formelles (100 employés ou plus) en matière d’indice de sophistication technologique moyen dans les ABF. Il montre également que les grandes entreprises du Kenya et du Sénégal ont une sophistication technologique plus faible, en moyenne, que les petites entreprises du Brésil. Notons que si les petites et moyennes entreprises informelles sénégalaises ont des indices de sophistication technologique moyens parmi les plus bas, les grandes entreprises informelles affichent l’indice de sophistication technologique moyen le plus bas – suggérant qu’au moins certaines grandes entreprises informelles peuvent être confrontées à une concurrence plus faible sur le marché, sont protégées par des liens ethniques ou politiques, ou visent des objectifs d’optimisation à but non lucratif. 11

Le fait que les indices moyens de sophistication technologique des petites et grandes entreprises informelles et des petites entreprises des pays africains soient tous inférieurs ou proches de 1,5 indique que la plupart des petites entreprises utilisent des technologies analogiques, antérieures au numérique, pour la plupart des fonctions de l’entreprise.

Retard dans l’utilisation des TN de base pour les GBF. Les petites entreprises africaines sont particulièrement à la traîne des grandes entreprises africaines et à leurs homologues mondiales dans l’utilisation des TN les plus élémentaires pour les GBF. Les fonctions générales de l’entreprise (GBF) telles que l’administration, le marketing et le contrôle qualité sont celles où l’indice d’adoption de la technologie FAT correspond le plus directement à l’utilisation de TN. En d’autres termes, les options technologiques au-delà des processus analogiques non numériques pour les GBF — par exemple, au niveau de l’écriture manuelle ou du face-à-face (niveau 1 de l’indice technologique) — sont toutes des TN avec des niveaux de sophistication croissants, de la plus simple feuille de calcul Excel au logiciel ERP (Enterprise Resource Planning) intégré à la planification de la production.

66 Afrique numérique

FIGURE 2.6 Sophistication technologique des entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille d’entreprise, 2019–2021

SEN:Formelle#Grande

KEN#Grande

VNM#Moyenne

KEN#Moyenne

VNM#Petite

GHA#Moyenne

SEN:Formelle#Moyenne

KEN#Petite

SEN:Formelle#Petite

GHA#Petite

SEN:lnformelle#Petite

SEN:lnformelle#Moyenne

SEN:Informelle#Grande

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021.

Note : Les valeurs de l’« indice technologique » sont les moyennes estimées de sophistication technologique dans toutes les fonctions de l’entreprise (ABF), en utilisant des poids d’échantillonnage, en tenant compte des différences dans chaque pays dans la composition sectorielle des entreprises. L’intervalle de confiance (- à +) reflète un niveau de confiance de 95 %. Les entreprises couvertes par les enquêtes FAT emploient au moins cinq employés à temps plein. Les « grandes » entreprises comptent 100 employés ou plus ; les « moyennes » entreprises, 20 à 99 employés ; et les « petites » entreprises, 5 à 19 employés. Les données du Sénégal sont ventilées en entreprises formelles et informelles, ces dernières ne disposant pas d’un système comptable formel conforme à SYSCOA (normes comptables de l’Union économique ouest-africaine) ou d’un autre système comptable formel harmonisé.

En moyenne, aucune petite entreprise dans un pays africain pour lequel des données sont disponibles ne dépasse le niveau 2 de l’indice de sophistication technologique pour l’une des sept GBF identifiées comme communes à toutes les entreprises : toutes les lignes vertes (désignant les petites entreprises) restent à l’intérieur du niveau 2 pour le Ghana, le Kenya, le Malawi et le Sénégal (figure 2.7). En revanche, les moyennes et grandes entreprises des pays africains utilisent généralement des TN (au-delà du niveau 2) pour au moins une ou plusieurs des sept GBF. De même, les petites entreprises moyennes du Brésil et du Vietnam utilisent des TN (au-delà du niveau 2) pour au moins une ou plusieurs des sept GBF.

Retards dans les technologies d’accès de base. Les petites entreprises africaines sont également à la traîne des grandes entreprises africaines et de leurs homologues du monde entier dans l’utilisation des principales technologies d’accès à d’autres terminaux numériques connectés à internet, à savoir les smartphones et les ordinateurs. Au Sénégal, 25 à 26 % des petites entreprises utilisent des smartphones (une proportion similaire pour les entreprises formelles et informelles), contre 50 % des petites entreprises au Malawi, environ 70 % au Ghana et au Kenya, et environ 60 % au Brésil et au Vietnam (figure 2.8).

Entreprises 67 1,0 1,5 2,0 Indice technologique 3,0 2,5
BRE#Moyenne
BRE#Petite
BRE#Grande
GHA#Grande VNM#Grande

FIGURE 2.7 Utilisation de TN par des entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille et fonctions générales de l’entreprise, 2019–2021

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021. Note : Les diagrammes en radar montrent les niveaux relatifs (1-5) de l’indice de la technologie utilisée le plus intensivement par chaque entreprise pour chacune des sept fonctions générales (GBF), en faisant la moyenne de toutes les entreprises. Le niveau 1 représente les technologies analogiques, non numériques, et les niveaux 2 et plus représentent les technologies numériques (TN) plus sophistiquées. Les entreprises couvertes par les enquêtes FAT sont celles qui emploient au moins cinq employés à temps plein. Les « grandes » entreprises comptent 100 employés ou plus ; les « moyennes » entreprises, 20 à 99 employés ; et les « petites » entreprises, 5 à 19 employés. Ce n’est qu’au Sénégal qu’il a été possible de tirer un échantillon représentatif des entreprises informelles ; par conséquent, l’échantillon du Sénégal comprend des sous-échantillons représentatifs des entreprises formelles et informelles.

68 Afrique numérique Paiement 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Contrôle qualité Administration de l’entreprise 3 4 5 a. Ghana 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Paiement Contrôle qualité Administration de l’entreprise 3 4 5 b. Kenya 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Paiement Contrôle qualité Administration de l’entreprise 3 4 5 d. Sénégal 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Paiement Contrôle qualité Administration de l’entreprise f. Vietnam 3 4 5 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Paiement Contrôle qualité Administration de l’entreprise 3 4 5 e. Brésil 1 2 Planification de la production Recherche de sources d’approvisionnement Marketing Ventes Paiement Contrôle qualité Administration de l’entreprise 3 4 5 c. Malawi Petite Moyenne Grande

FIGURE 2.8 Utilisation de smartphones et ordinateurs par les entreprises dans certains pays africains et de comparaison, par taille d’entreprise, 2019–2021

Avoir un smartphone Avoir un ordinateur

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021. Note : Les entreprises incluses sont celles qui emploient au moins cinq employés à temps plein. Les « grandes » entreprises comptent 100 employés ou plus ; les « moyennes » entreprises, 20 à 99 employés ; et les « petites » entreprises, 5 à 19 employés. Les données du Sénégal sont ventilées en entreprises formelles et informelles, ces dernières étant celles qui ne disposent pas d’un système comptable formel conforme à SYSCOA (normes comptables de l’Union économique ouest-africaine) ou d’un autre système comptable formel harmonisé.

En règle générale, les grandes entreprises utilisent plus fréquemment des smartphones, notamment au Ghana, au Kenya, et parmi les entreprises formelles au Sénégal, ainsi qu’au Brésil. Cependant, au Malawi et au Vietnam, les grandes entreprises utilisent moins de smartphones que les petites entreprises. Ce sont les grandes entreprises informelles du Sénégal qui utilisent le moins de smartphones, ce qui reflète leur faible niveau d’indice de sophistication technologique (comme le montre la figure 2.6).

En ce qui concerne l’utilisation d’ordinateurs par les entreprises formelles, les petites entreprises africaines sont invariablement à la traîne des grandes entreprises : 63 % des petites entreprises au Ghana, 73 % au Kenya, 70 % au Malawi et 90 % au Sénégal utilisent des ordinateurs, contre 98 à 100 % des grandes entreprises. En revanche, au Brésil et au Vietnam, presque toutes les petites entreprises — 96 % et 100 %, respectivement — utilisent déjà des ordinateurs. Cela indique un retard significatif des petites entreprises africaines dans l’utilisation d’une TN devenue essentielle et omniprésente dans les petites entreprises des pays pairs dont les données sont disponibles. Encore une fois, la faible utilisation d’ordinateurs par les entreprises informelles au Sénégal est frappante, seulement 15 % des petites et grandes entreprises informelles étant dans ce cas.

Retard dans l’utilisation de TN plus sophistiquées. S’agissant de l’utilisation de TN plus sophistiquées accessibles avec des smartphones ou des ordinateurs connectés à internet, les petites entreprises sont également à la traîne par rapport aux grandes entreprises, et les entreprises africaines sont à la traîne par rapport au Brésil. La petite entreprise moyenne est à la traîne de la grande entreprise moyenne dans tous les domaines — dans les pays africains et dans les pays de comparaison mondiale que sont le Brésil et le Vietnam — tant pour l’utilisation de logiciels ERP à des fins commerciales que

Entreprises 69
69 66 75 74 92 97 50 54 43 25 41 44 26 26 12 64 86 94 61 58 53 63 90 98 73 97 99 70 92 100 90 97 100 15 23 15 96 100 100 100 100 100 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Part des entreprises (%) 100 Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes Petites Moyennes Grandes
Ghana Kenya Malawi Sénégal formel Sénégal informel BrésilVietnam

pour l’utilisation de données massives soutenue par des algorithmes d’apprentissage automatique basés sur l’intelligence artificielle (IA) (figure 2.9).

Les petites entreprises sont généralement censées avoir des problèmes de gestion moins complexes que les grandes entreprises. Cependant, le logiciel ERP, qui est généralement une suite d’applications de gestion, permet même aux petites entreprises de suivre les ressources de l’entreprise (liquidités, matières premières, capacité de production, ventes) et l’état des engagements commerciaux tels que les bons de livraison, les bons de commande et les salaires, et facilite ainsi une gestion plus efficace de l’entreprise.

Même les versions relativement simples de l’ERP sont généralement proposées en tant que produits SaaS (Software-as-a-Service), avec des téléchargements à partir du nuage (cloud). Les produits SaaS permettent aux entreprises de réaliser d’importantes économies en éliminant les investissements internes à coûts fixes pour l’acquisition et la mise à niveau régulière de ces outils de gestion. En transformant des coûts fixes traditionnellement élevés en coûts variables plus faibles, ils facilitent également l’entrée sur le marché et l’expérimentation, y compris pour les jeunes entreprises en phase de démarrage, car si le plan d’affaires initial ne fonctionne pas, l’entrepreneur peut expérimenter un nouveau concept avec différents outils commerciaux SaaS à faible coût. En effet, au Brésil, une petite entreprise sur trois utilise déjà ces services ERP (figure 2.9). De plus, les services numériques reposant sur des données massives, comme les prévisions météorologiques et les modèles de tarification des assurances, peuvent offrir de meilleurs services, même aux petites entreprises.

Il ne faut pas s’étonner qu’aucune entreprise informelle sénégalaise n’utilise un ERP — étant donné que ces données définissent l’« informalité » comme le fait de ne pas utiliser de système comptable formel. Cependant, en principe, même les entreprises informelles pourraient tirer profit des données massives pour obtenir des informations liées à la

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019–2021.

Note : Les données du Sénégal sont ventilées en entreprises formelles et informelles, ces dernières étant celles qui ne disposent pas d’un système comptable formel conforme à SYSCOA (normes comptables de l’Union économique ouest-africaine) ou d’un autre système comptable formel harmonisé. IA = intelligence artificielle ; ERP = progiciel de gestion intégré.

70 Afrique numérique
1 1 3 1 4 13 1 2 9 3 6 14 0 00 31 37 73 0 1 4 2 10 8 1 1 10 2 1 9 2 2 3 0 00 1 9 10 1 3 0 0 10 20 30 40 50 60 70 80 Petite Moyenne Part des entreprises (%) Grande Petite Moyenne Grande Petite Moyenne Grande Petite Moyenne Grande Petite Moyenne Grande Petite Moyenne Grande Petite Moyenne Grande Ghana Kenya Malawi Sénégal Formelle Sénégal Informelle Brésil Vietnam
ERP pour gestion administrative Utilise données massives/IA
Utilise
FIGURE 2.9 Utilisation de TN plus sophistiquées dans certains pays africains et de comparaison, 2019–2021

production et aux ventes. Toutefois, même parmi les grandes entreprises africaines, le pourcentage de sociétés utilisant un ERP est beaucoup plus faible qu’au Brésil : 3 % des grandes entreprises au Ghana, 13 % au Kenya, 9 % au Malawi et 14 % des grandes entreprises formelles au Sénégal utilisent un logiciel ERP, contre 73 % des grandes entreprises au Brésil.

Concernant l’utilisation des données massives dans les algorithmes d’apprentissage automatique basés sur l’IA, 8 % des grandes entreprises au Ghana, 10 % au Kenya, 9 % au Malawi et 3 % des grandes entreprises formelles au Sénégal déclarent utiliser ces TN dans la plupart des pays africains, ce qui est comparable aux grandes entreprises formelles du Brésil (également 10 %).

FIGURE

d’adoption et d’utilisation des TN par les microentreprises dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par sous-groupe d’âge et de sexe du propriétaire, 2017–2018

logiciel de comptabilité 49 21 15 11 6 3

d’un 13 8 2 3

Utilisation des TN avec des ORDINATEURS ou des Utilisation d’un portable pour faire de la publicité par SMS

d’internet pour comprendre les clients 17

logiciel de gestion des stocks/PDV 8 7 3 3 7 5 3 2 5 4 1 2 5 3 5 3

TÉLÉPHONES INTERNET 3G-4G 69 7171

jeunes Femmes plus âgées Hommes jeunes Hommes plus âgés propriétaires 76 62 58 42

d’internet pour trouver des fournisseurs 11 6 1 2 3 3

Utilisation d’internet pour les opérations bancaires en ligne

Entreprises 71
0 10 20 30 40 50 60 70 80 Utilisation de TN avec des téléphones 2G-2.5G Part des microentreprises (%)
Femmes
Utilisation d’un téléphone portable 2G/2.5G Utilisation d’un smartphone Utilisation d’un ordinateur Utilisation d’un
Utilisation
Utilisation
Utilisation
Les microentreprises sont particulièrement à la traîne. Les microentreprises sont encore plus à la traîne dans l’utilisation des TN, avec de grandes fractures numériques dans les sous-groupes d’âge et de sexe des propriétaires (figure 2.10). Parmi ces groupes, les microentreprises détenues par des hommes jeunes (30 ans ou moins) sont systématiquement les plus grands utilisateurs de TN sur internet. Seuls 13 % des microentreprises détenues par des hommes jeunes utilisent un smartphone, contre seulement 3 % de microentreprises détenues par des femmes plus âgées. La fracture Utilisation d’un portable pour communiquer avec les clients
2.10 Moyenne
Source : Atiyas et Dutz (2023), à partir des données de l’enquête 2017-2018 de Research ICT Africa (RIA).
Note : L’enquête After Access 2017–2018 de RIA a porté sur 2 174 microentreprises formelles et informelles qui ont répondu aux questions sur le sexe et l’âge du propriétaire (jeunes = 30 ans et moins) au Ghana, au Kenya, Mozambique, Nigeria, Sénégal, en Afrique du Sud et en Tanzanie. La microentreprise médiane est informelle et indépendante et ne compte aucun employé à temps plein. PDV = point de vente ; SMS = service de messages courts  ; 2G = technologie deuxième génération ; 3G = troisième génération ; 4G = quatrième génération.

numérique dans l’utilisation de l’ordinateur est encore plus grande : seulement 2 % des entreprises détenues par de jeunes femmes utilisent un ordinateur, alors que la part des entreprises appartenant à des hommes jeunes (8 %) est quatre fois plus élevée.

Comment les sociétés de développement numérique peuvent-elles faciliter l’utilisation des TN dans les entreprises ?

À ce jour, les entreprises africaines de développement numérique se sont implantées essentiellement sur les grands marchés anglophones, où elles ont reçu les investissements totaux les plus importants (Zhu et coll. 2022). Le Nigeria, le Kenya et l’Afrique du Sud (respectivement) sont les pays à la plus forte densité de sociétés digitales et d’investissements totaux par rapport au revenu par habitant (figure 2.11).

Ces trois pays figurent également parmi les 15 premiers pays au monde en termes de densité d’entreprises numériques et d’investissements totaux par revenu par habitant.12

Ces constats suggèrent que la taille du marché et le pouvoir d’achat sont des facteurs déterminants dans le lieu d’installation initial et les décisions des sièges sociaux des entreprises de développement numérique.

FIGURE 2.11 Principaux pays d’Afrique subsaharienne affichant une forte densité d’entreprises numériques et d’investissements totaux, 2020

a. Principaux pays hébergeant des sièges sociaux, par nombre d’entreprises numériques régionalesa

b. Quinze premiers pays par investissement total dans les entreprises numériques

Financement total (ratio PIB par habitant)

Source : Base de données Digital Business (2020) du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale. Note : Le nombre d’entreprises numériques par unité de produit intérieur brut (PIB) par habitant (panneau a) et les financements totaux (en millions USD) par unité de PIB par habitant (panneau b) – tous deux exprimés en USD courants 2019 – sont tirés de la base de données Digital Business 2020 de la Banque mondiale, qui regroupe 184 000 entreprises numériques extraites de CB Insights, Pitchbook et Briter Bridges par l’unité Marchés mondiaux et technologie du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale. Cela inclut les pays comptant au moins cinq entreprises numériques en activité sur leur territoire et où leurs sièges sociaux sont installés.

72 Afrique numérique 0,191 0,175 0,139 0,093 0,049 0,040 0,039 0,025 0,022 0,020 0,020 0,017 0,012 0,011 0,007 0,007 0,006 0,003 0,002 0,001 00,050,10
Financement
0,15
total (ratio PIB par habitant)
0,200,25 Entreprises numériques (ratio par unité PIB par habitant) Entreprises numériques (ratio par unité PIB par habitant) Nigeria Kenya Afrique du Sud Ouganda Ghana Rwanda Tanzanie Éthiopie Sénégal Zambie Mozambique Zimbabwe Malawi Soudan Côte d’Ivoire Cameroun Mali Angola Namibie Botswana 1,683 1,122 0,759 0,358 0,270 0,181 0,086 0,039 0,015 0,014 0,009 0,005 0,004 0,003 0,001 00,051,001,50 2,00 Nigeria Kenya Afrique du Sud Angola Ghana Tanzanie Zambie Éthiopie Sénégal Ouganda Zimbabwe Rwanda Botswana Namibie Côte d’Ivoire

L’Afrique est la seule région à faible revenu où les principaux sous-secteurs des entreprises de développement numérique sont tous liés à des services de renforcement de la productivité – une configuration prometteuse pour soutenir la croissance inclusive et stimuler l’adoption de TN par les entreprises utilisatrices. L’Afrique est également la seule région à faible revenu, avec les pays à revenu élevé, où les principaux sous-secteurs des entreprises numériques (en termes d’investissements totaux) fournissent des solutions numériques directement liées à la croissance de la productivité en B2B (d’entreprise à entreprise) (tableau 2.2). En outre, l’Afrique est la seule région à détenir le plus grand nombre d’investissements totaux dans le sous-secteur des télécommunications. Et c’est la seule région, avec le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et l’Asie du Sud, où les télécommunications figurent dans les 5 premiers sous-secteurs d’entreprises numériques grâce à ses investissements considérables dans les infrastructures numériques.13

Les cinq autres principaux sous-secteurs du numérique en Afrique sont la technologie financière (FinTech), le commerce électronique, la technologie logistique et la technologie de la santé. En revanche, les technologies du tourisme, de la mobilité, du divertissement, de l’agroalimentaire et des médias numériques – qui figurent tous dans les cinq premiers sous-secteurs des autres régions à revenu faible et intermédiaire – sont tous des sous-secteurs en B2C (d’entreprise à consommateur) centrés sur la vente directe et le profit tiré des ventes aux consommateurs plutôt que sur la vente de solutions numériques en B2B tout en soutenant l’amélioration de la productivité des entreprises.14

Notamment, la concentration d’investissements dans les 3 premiers sous-secteurs en Afrique – télécommunications, FinTech et commerce électronique – représentent conjointement plus de 40 % des investissements totaux des entreprises de développement numérique en Afrique. Ce modèle de concentration de l’investissement est également présent au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Asie du Sud. Les pays à revenu élevé, en revanche, affichent une répartition plus diversifiée de l’investissement, les cinq premiers sous-secteurs représentant seulement 36 % de l’investissement total dans ces pays.

TABLEAU 2.2 Cinq premiers sous-secteurs du numérique, classés par part d’investissement total dans les solutions de productivité B2B, par région, 2020

Source : Base de données Digital Business (2020) du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale.

Note : Ce tableau classe les cinq premiers sous-secteurs d’entreprises numériques dans chaque région en part d’investissement total (indiquée entre parenthèses). Les « pays à revenu élevé » sont ceux dont le revenu national brut (RNB) par habitant est supérieur ou égal à 12 536 USD. B2B = entreprise à entreprise.

Entreprises 73
ASS EAP EAC LAC MENA AS Pays développés Télécom (17 %) Tech. mobilité (10 %) E-commerce (22 %) FinTech (17 %) E-commerce (25 %) E-commerce (22 %) FinTech (10 %) FinTech (15 %) E-commerce (10 %) Tech. tourisme (8 %) Tech. logistique (10 %) Télécom (14 %) FinTech (14 %) Tech. santé (8 %) E-commerce (11 %) FinTech (7 %) FinTech (7 %) E-commerce (9 %) Tech. mobilité (7 %) Tech. gestion d’entreprise (10 %) E-commerce (7 %) Tech. logistique (8 %) Tech. tourisme (6 %) Médias numériques (6 %) Tech. divertissement (9 %) Médias numériques (5 %) Télécom (10 %) Tech. gestion d’entreprise (6 %) Tech. santé (4 %) Matériel technologique (6 %) Tech. divertissement (4 %) Tech. alimentation (7 %) Tech. gestion d’entreprise (5 %) Tech. tourisme (10 %) Big Data & Analyse (5 %)

Pour les fournisseurs de solutions numériques, l’Afrique représente un immense potentiel de développement sur le continent. Seules 3 % des entreprises numériques ayant leur siège social en Afrique subsaharienne (4 % de l’investissement total) sont des sociétés régionales présentes dans au moins deux pays de la région (figure 2.12, panneaux a et b). Ces entreprises numériques régionales sont principalement concentrées dans la FinTech et l’e-commerce (figure 2.12, panneaux c et d). Elles comprennent également d’autres sous-secteurs de solutions numériques B2B de renforcement de la productivité tels que les télécommunications, la technologie logistique, la technologie des assurances, le Big data et l’analyse, et les technologies de gestion d’entreprise. Notons que certaines entreprises numériques régionales de services B2C utilisant un modèle commercial basé sur une plateforme (en plus du commerce électronique et de la FinTech) incluent les médias numériques, les technologies de l’assurance, de la santé et de la mobilité, démontrant ainsi l’évolutivité des modèles commerciaux numériques soutenus par les plateformes dans le développement et l’intégration des régions.

a. Parts régionale et locale d’entreprises numériquesa

b. Parts régionale et locale d’investissement dans les entreprises numériques

Entreprises numériques locales (nb = 3537), 97 %

Entreprises numériques régionales ( = 98), 3 %

Entreprises numériques locales (nb = 907), 96 %

Entreprises numériques locales Entreprises numériques régionales

c. Principaux sous-secteurs, en nombre d’entreprises régionalesb

Entreprises numériques régionales (nb = 60), 4 %

d. Principaux sous-secteurs, en part d’investissements régionauxb

E-commerce

FinTech

Télécom

Tech. logistique

Tech. divertissement

Tech. assurance

Tech. santé

Big Data & Analyse

Tech. mobilité

Tech. gestion d’entreprise

53

48

40

48)

(nb = 60)

(nb = 22)

38 % (nb = 18)

15 % (nb = 10)

14 % (nb = 8)

13 % (nb = 18)

11 % (nb = 23)

10 % (nb = 12)

9 % (nb = 22)

050 100

régionales (%)

Source : Base de données Digital Business (2020) du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale. Note : Les entreprises régionales sont des fournisseurs de solutions numériques ayant leur siège social en Afrique subsaharienne et implantées dans au moins deux pays de la région.

a. Le camembert du panneau a montré la part relative des entreprises numériques locales et régionales basée sur le nombre d’entreprises.

b. Les histogrammes des panneaux c et d présentent les 10 principaux sous-secteurs d’entreprises numériques en nombre d’entreprises et en part régionale d’investissement, respectivement. Les pourcentages cumulés ne totalisent pas 100 pour cent, car certaines entreprises opèrent dans plusieurs sous-secteurs.

74 Afrique
numérique
65 % (nb = 64) 51 % (nb = 50) 23 % (nb = 23) 22 % (nb = 22) 22 % (nb = 22) 21 % (nb = 21)
% (nb
18 % (nb
18 % (nb
17 % (nb =
050 Part des entreprises
100 FinTech E-commerce Big Data & Analyse Tech. sécurité Télécom Tech. gestion d’entreprise Médias numériques Tech. santé Tech. marketing Tech. éducation
19
= 19)
= 18)
= 18)
17)
régionales numériques (%) Part d’investissement dans les entreprises numériques
% (nb =
%
%
FIGURE 2.12 Parts locales et régionales et principaux sous-secteurs régionaux des fournisseurs de solutions numériques en Afrique subsaharienne, 2020

Pour les grandes entreprises numériques B2B en Afrique subsaharienne, ces tendances révèlent des opportunités majeures d’extension de leurs services à d’autres pays de la région, contribuant potentiellement à placer ces pays sur une trajectoire d’adoption numérique plus rapide avec des coûts marginaux d’adoption plus faibles. Une expansion et une intégration régionales plus fortes permettraient également une mise à l’échelle et une maturation continues des entreprises de développement numérique plus avancées. Au cours de cette expansion, les décideurs et les régulateurs devront impérativement surveiller les risques de domination des marchés par de possibles pratiques commerciales ou acquisitions anticoncurrentielles des « vainqueurs », évitant que ces derniers étouffent les start-ups numériques locales.

Les entreprises régionales de développement numérique sont concentrées dans les grandes plaques tournantes numériques, le Kenya étant de loin le plus grand pôle régional africain avec 28 % du nombre total d’entreprises régionales (figure 2.13, panneau a),

FIGURE

plaques tournantes des entreprises numériques en Afrique, 2020

a. Principaux pays hébergeant des sièges sociaux, par nombre d’entreprises numériques régionalesa

b. Principaux pays hébergeant des sièges sociaux, en part d’investissement dans les entreprises numériques régionalesa

Kenya Afrique du Sud Ghana Nigeria Rwanda Maurice Côte d’Ivoire Ouganda

Sénégal

Tanzanie

Autres (Éthiopie, Sierra Leone, Zambie, Namibie, Zimbabwe, Burundi, Mozambique)

28 % (nb = 27)

11 % (nb = 11)

11 % (nb = 11)

11 % (nb = 11)

7 % (nb = 7)

7 % (nb = 7)

4 % (nb = 4)

4 % (nb = 4)

4 % (nb = 4)

3 % (nb = 3)

9 % (nb = 9) 20 40

Part des entreprises numériques régionales (%)

40,2 % (nb = 27)

28,42 % (nb = 11)

14,94 % (nb = 27)

12,09 % (nb = 11)

2 % (nb = 7)

1,9 % (nb = 2)

0,62 % (nb = 4)

0,62 % (nb = 7)

0,19 % (nb = 3)

0204060

Part de l’investissement total dans les entreprises régionales (%)

c. Empreintes régionales des entreprises numériques ayant leur siège social au Kenya, en Afrique du Sud et au Ghana

Les entreprises kényanes régionales se développent en…

Ouganda, Ghana, Tanzanie, Nigeria, Rwanda, Afrique du Sud, Côte d’Ivoire, Zambie, Malawi, Maurice, République démocratique du Congo, Libéria, Gabon, Éthiopie, Sénégal, Soudan

Les entreprises sud-africaines régionales se développent en…

Zambie, Kenya, Nigeria, Ouganda, Ghana, République démocratique du Congo, Zimbabwe, Maurice, Mozambique, Rwanda, Tanzanie

Les entreprises ghanéennes régionales se développent en…

Nigeria, Afrique du Sud, Kenya, Tanzanie, Maurice, Zambie, Zimbabwe, Cameroun, Niger

Source : Base de données Digital Business (2020) du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale. Note : Les entreprises régionales sont des fournisseurs de solutions numériques ayant leur siège social en Afrique subsaharienne et implantées dans au moins deux pays de la région.

a. Les panneaux a et b représentent les parts relatives des entreprises régionales par, respectivement, le nombre d’entreprises et la part totale d’investissement dans ces entreprises.

b. Le panneau c répertorie les pays dans lesquels elles sont présentes, par ordre décroissant du nombre d’entreprises régionales présentes.

Entreprises 75
Kenya
Ghana Nigeria Maurice Éthiopie Sénégal Rwanda Tanzanie 0
Afrique du Sud
2.13 Principales

suivi du Ghana, du Nigeria et de l’Afrique du Sud. La figure 2.13 (panneaux b et c) montre également l’importance relative des entreprises régionales au Ghana, au Kenya et en Afrique du Sud. La proximité physique peut expliquer en partie l’intégration régionale, mais cette géographie économique inégale s’explique aussi par le rôle unique d’un écosystème national dynamique d’entreprises numériques (Zhu et coll. 2022).

De nombreuses entreprises kényanes régionales sont actives dans les pays voisins. Toutefois, des entreprises kényanes et ghanéennes régionales se sont développées dans d’autres pays, indépendamment de leur proximité : des entreprises kényanes sont présentes au Nigeria, au Ghana et en Afrique du Sud, et des entreprises ghanéennes sont implantées au Kenya, en Tanzanie et en Afrique du Sud. Cela laisse à penser que des écosystèmes d’entreprises numériques nationales dynamiques peuvent servir de bancs d’essai pour trouver des solutions et faciliter le développement régional – probablement, au moins partiellement, grâce à leurs politiques en faveur des start-ups numériques et du marché financier. Les pays voisins peuvent bénéficier des retombées positives d’une meilleure intégration régionale et de coûts d’adoption plus faibles, tandis que des pays plus petits, moins connectés aux plaques tournantes, peuvent connaître une fracture numérique plus importante.

COVID-19 et fractures numériques

Accélération de l’adoption et l’utilisation de TN avec un fracture numérique grandissante

Les réponses des entreprises à la pandémie de COVID-19 ont engendré une accélération générale de l’adoption et de l’utilisation de TN, quoique de manière inégale, la pandémie ayant creusé la fracture numérique entre les pays et les types d’entreprises. La pandémie de COVID-19 ainsi que le confinement et les mesures de distanciation sociale mises en place dans de nombreux pays ont créé de nouvelles incitations à l’adoption ou à l’intensification des TN. En effet, ces technologies permettent aux entreprises de changer plus facilement leurs modèles de travail, d’approvisionnement, de financement, de production, de vente et de paiement, et de mieux les adapter lorsque les mesures de distanciation sociale limitent les interactions de production et de consommation en face à face et lorsque surviennent des pénuries d’intrants et des changements de modèles de consommation (encadré 2.1).

Si l’on compare l’Afrique à des pays à revenu faible d’autres régions, on constate que la pandémie a entraîné une augmentation à peu près similaire de l’adoption et de l’utilisation des TN, bien que l’écart d’adoption entre les petites et les grandes entreprises soit plus important et que la part des entreprises investissant dans les TN soit plus faible. Dans les enquêtes de la Banque mondiale sur les impacts de la COVID-19 sur les activités des entreprises (Business Pulse Surveys – BPS), réalisées dans les différents groupes de tailles d’entreprise, l’adoption et l’utilisation de TN a progressé dans 50 % environ des entreprises interrogées en Afrique et dans des pays à revenu faible et intermédiaire d’autres régions. L’écart entre les grandes et les petites entreprises est néanmoins plus important en Afrique (figure 2.14, panneau a).15

Concernant l’augmentation des investissements, la part des entreprises investissant dans les nouvelles TN est considérablement plus faible dans tous les groupes de taille en Afrique : 25 % des entreprises interrogées ont investi dans de nouvelles TN, contre 32 % dans d’autres pays à revenu faible et intermédiaire (figure 2.14, panneau b).16

76 Afrique numérique

ENCADRÉ 2.1

Diffusion rapide de la technologie des sites internet durant la COVID-19

La pandémie de COVID-19 a accéléré la transformation numérique dans le monde, mais nous connaissons encore mal la dynamique d’adoption de ces technologies dans les pays durant cette crise. Des faits probants issus d’une nouvelle base de données (BuiltWith) –contenant des données sur la quasi-totalité des sites internet et plus de 30 000 technologies intégrées – montrent une croissance rapide de trois types de technologies liées aux transactions en ligne en 2020 : le commerce électronique, les paiements en ligne et la publicité numérique. Fait plus important encore, leur croissance semble avoir réduit la fracture numérique entre les pays : ceux qui présentent la croissance la plus rapide en 2020 utilisaient moins intensément ces technologies en 2019.a

Les sites internet en Afrique subsaharienne utilisent moins de technologies que d’autres régions à revenu faible et intermédiaire et à revenu élevé. Ainsi, au début de la pandémie, seuls 31 % des sites internet africains intégraient une forme d’analyse, contre 45 % dans les autres pays à revenu faible et intermédiaire, et 7 % contenaient une technologie de paiement électronique contre un pourcentage à deux chiffres dans d’autres régions.b

Leur adoption s’est fortement accélérée durant la pandémie de COVID-19. Les sites internet créés en 2020 dans le monde étaient presque deux fois plus susceptibles d’utiliser le commerce électronique ou les paiements en ligne que les sites créés en 2019. Et la croissance a été bien plus rapide en Afrique subsaharienne, excédant la moyenne mondiale dans presque toutes les catégories et réduisant partiellement les écarts avec d’autres régions. Tout comme dans d’autres régions, les pays présentant initialement les plus faibles niveaux de technologie ont connu la croissance la plus rapide (figure B2.1.1). La pandémie a renforcé le développement numérique, tirant profit des technologies de plus en plus accessibles pour les transactions en ligne, telles que les sites internet de commerce électronique en vente libre, ainsi que des services financiers numériques comme l’argent mobile.

Part des sites internet utilisant le paiement électronique, 2019 (%) Afrique subsaharienne Autres régions

Source : Ragoussis et Timmis 2022.

Note : Le diagramme inclut les données sur l’utilisation du paiement électronique par les sites internet dans 119 pays à revenu faible et intermédiaire, dont 41 en Afrique subsaharienne. Le document complet analyse un échantillon de 185 pays dans l’ensemble des régions et groupes de revenus.

Entreprises 77
250 200 150 100 50 0 Croissance du paiement électronique, 2019-2020 (%) 010
FIGURE B2.1.1 Croissance du paiement électronique sur les sites en Afrique subsaharienne v. autres régions, 2019–2020
20 30 40
(suite)

ENCADRÉ 2.1

Diffusion rapide de la technologie des sites internet durant la COVID-19 (suite)

Malgré une amélioration de la sophistication technologique du site internet moyen, les données de BuiltWith et les Indicateurs du développement dans le monde de la Banque mondiale montrent que la densité de sites internet en Afrique subsaharienne reste la plus faible au monde, avec en moyenne 8 sites internet pour 10 000 habitants. La plupart des pays africains comptent moins d’un site pour 10 000 habitants, l’Afrique du Sud se démarquant particulièrement avec 121 sites pour 10 000 habitants. L’écart reste immense avec les économies à revenu élevé, qui comptent généralement plus de 300 sites pour 10 000 habitants, ainsi qu’avec les régions à revenu faible et intermédiaire plus avancées telles que l’Asie de l’Est et l’Amérique latine, qui affichent une moyenne de 50 sites pour 10 000 habitants.

Bien qu’elle ne soit pas clairement imputable aux confinements simultanés, l’augmentation du nombre de sites internet en Afrique suggère que le continent a rattrapé une partie de son retard pendant la pandémie. Le développement des sites y a été plus important que dans d’autres régions, deux fois plus rapide que la moyenne observée dans les économies à revenu élevé. Mais à ce faible niveau de densité de sites internet, une progression significative impliquerait un investissement majeur dans les infrastructures, les compétences et l’accès aux marchés numériques pour prospérer. L’Afrique a beaucoup à gagner de ce point de vue.

a. Nous prenons en compte les différences entre les pays, mais les données ne nous permettent pas d’analyser la fracture entre les entreprises au sein d’un même pays.

b. Les données ne font pas état du commerce électronique sur les plateformes de réseaux sociaux, il s’agit donc probablement d’une estimation basse sur l’ensemble de la diffusion des technologies.

On constate une forte disparite entre les pays africains, la pandémie ayant accéléré l’adoption et l’utilisation de TN dans tous les pays, tout en accentuant la fracture entre les petites et les grandes entreprises. Jusqu’à 88 % et 86 % des entreprises interrogées affirment avoir accéléré l’adoption et l’utilisation des TN en Afrique du Sud et au Kenya, respectivement, avec une variation importante selon les pays et les groupes de taille d’entreprise. Seuls 22% des petites entreprises ghanéennes et 23% des entreprises tanzaniennes ont augmenté leur taux d’adoption et d’utilisation des TN (figure 2.15, panneau a).

Concernant les nouveaux investissements, les grandes entreprises sont bien plus nombreuses que les petites à avoir investi dans de nouvelles TN : 66 % de grandes entreprises ont investi dans de nouvelles TN en Tanzanie, contre 7 % de petites entreprises, soit près de 10 fois moins. Au Kenya, 59 % de grandes entreprises ont investi dans de nouvelles TN contre seulement 27 % des petites entreprises (figure 2.15, panneau b).

Des informations complémentaires sur le téléchargement d’applications mobiles, qui rendent compte du comportement des individus et peuvent suivre de plus près le comportement des entreprises informelles et individuelles, montrent qu’un an après le début de la pandémie, le nombre d’utilisateurs actifs d’applications mobiles a diminué en moyenne dans des catégories telles que le financement, les affaires,17 les achats et les voyages (encadré 2.2). Si elles ne sont pas prises en compte, ces tendances risquent d’accentuer les écarts de productivité, de ventes et de revenus des propriétaires et des travailleurs sur la durée.

78 Afrique numérique

FIGURE 2.14 Accélération de l’adoption, de l’utilisation et de l’investissement des entreprises dans les solutions numériques après la pandémie de COVID-19 en Afrique subsaharienne par rapport à des pays de référence, par taille d’entreprise, 2020–2021

a. Accélération de l’adoption et de l’utilisation après le début de la pandémiea

b. Accélération de l’investissement après le début de la pandémieb

Source : Enquête sur les impacts de la COVID-19 sur les activités des entreprises (BPS), Banque mondiale. Note : Des enquêtes ont été réalisées auprès d’entreprises de cinq travailleurs à plein temps et plus de septembre 2020 à février 2021. Les diagrammes présentent les probabilités conditionnelles moyennes d’un début d’utilisation ou d’une accélération de l’utilisation de solutions numériques (panneau a) et d’investissement dans les solutions numériques (panneau b), en tenant compte de la taille de l’entreprise, du secteur et du pays. La taille de l’entreprise est basée sur les valeurs avant la pandémie. Tous les pays ont le même facteur de pondération. Échantillons non pondérés au sein des pays. Les barres d’erreur représentent les intervalles de confiance de 95 %. L’échantillon d’Afrique subsaharienne inclut le Bénin, le Ghana, le Kenya, Madagascar, le Malawi, le Sénégal, l’Afrique du Sud, la Tanzanie et la Zambie (total de 5 819 observations). Les « autres pays à revenu non élevé » (à revenu faible et intermédiaire) incluent le Brésil, la Bulgarie, le Cambodge, le Salvador, la Géorgie, le Guatemala, le Honduras, l’Indonésie, la Malaisie, la Moldavie, le Maroc, le Nicaragua, la Turquie et le Vietnam (7 698 observations).

a. Réponses formulées à la question « Cet établissement a-t-il commencé à utiliser ou a-t-il accéléré l’utilisation d’internet, des réseaux sociaux, des applications spécialisées ou des plateformes numériques en réponse à la pandémie de COVID-19 ? ».

b. Réponses formulées à la question « Cet établissement a-t-il investi dans de nouveaux équipements, logiciels ou solutions numériques en réponse à la COVID-19 ? »

Préparation technologique aux chocs imprévus

Les entreprises enregistrant des niveaux plus élevés de sophistication technologique avant la COVID-19 avaient une meilleure « préparation technologique » qui leur a permis de réaliser des ventes plus importantes pendant la pandémie (Cirera, Comin, et Cruz 2022 ; Comin et coll. 2022). L’effet moyen total sur les ventes découlant de la sophistication technologique pré-COVID s’élève à 6,5 points de pourcentage (figure 2.16).18 Il varie de 5,5 points de pourcentage pour les entreprises du deuxième quintile (par rapport à celles qui se situent dans les 20 % inférieurs de la distribution de la sophistication technologique) à près de 14 points de pourcentage pour celles du quintile supérieur.

Cet effet total combine (a) un effet direct relativement important lié à un taux d’adoption des TN plus important avant le début de la pandémie, permettant aux entreprises d’augmenter rapidement leur ventes en ligne et de passer plus facilement au travail à domicile pour les travailleurs disposant d’un ordinateur ; et (b) un effet indirect plus modeste lié à l’augmentation des investissements et à l’adoption de TN

Entreprises 79
Probabilité d’investissement dans le numérique (%) 60 40 20 0
Petite (5–19) Moyenne (20–99) Grande (100+) Afrique subsaharienne
80 Probabilité d’une utilisation accrue du numérique (%) 60 40 20 0
Autres pays à revenu faible et intermédiaire Afrique subsaharienne Autres pays à revenu faible et intermédiaire

FIGURE 2.15 Augmentation de l’utilisation et des investissements dans les TN après le début de la pandémie de COVID-19 dans certains pays ASS, par taille d’entreprise, 2020–2021

a. Utilisation accrue après le début de la pandémiea

b. Investissement accru après le début de la pandémieb

Source : Enquête sur les impacts de la COVID-19 sur les activités des entreprises (BPS), Banque mondiale. Note : Des enquêtes ont été réalisées auprès d’entreprises employant au moins cinq travailleurs à plein temps de septembre 2020 à février 2021. Les diagrammes présentent les probabilités conditionnelles moyennes d’un début d’utilisation ou d’une accélération de l’utilisation de solutions numériques (panneau a) et d’investissement dans les solutions numériques (panneau b), en tenant compte de la taille de l’entreprise, du secteur et du pays. La taille de l’entreprise est basée sur les valeurs avant la pandémie. Tous les pays ont le même facteur de pondération. Échantillons non pondérés au sein des pays. Les barres d’erreur représentent les intervalles de confiance de 95 %. En termes de pays et de nombre d’observations, BEN = Bénin (981), GHA = Ghana (979), KEN = Kenya (816), MDG = Madagascar (490), MWI = Malawi (789), SEN = Sénégal (425), TZA = Tanzanie (457), AS = Afrique du Sud (363) et ZMB = Zambie (507).

a. Réponses formulées à la question « Cet établissement a-t-il commencé à utiliser ou a-t-il accéléré l’utilisation d’internet, des réseaux sociaux, des applications spécialisées ou des plateformes numériques en réponse à la pandémie de COVID-19 ? ».

b. Réponses formulées à la question « Cet établissement a-t-il investi dans de nouveaux équipements, logiciels ou solutions numériques en réponse à la COVID-19 ? »

ENCADRÉ 2.2

Impact de la pandémie de COVID-19 sur l’utilisation des applications mobiles en Afrique

La pandémie de COVID-19 a bouleversé la vie quotidienne des habitants du monde entier, y compris la façon dont les entreprises et les individus utilisent les technologies numériques et à quelle fréquence. La veille informationnelle des applications permet d’analyser la manière dont la pandémie a influencé l’utilisation d’applications mobiles dans le monde, informant ainsi sur l’effet de la pandémie sur l’utilisation des données mobiles et la capacité des Africains à s’adapter aux défis sanitaires et des confinements.

Le choc initial de la propagation du virus et les restrictions de déplacement et les confinements nationaux se sont répercutés sur l’utilisation des applications internet mobiles au cours des mois suivants. Entre les mois d’avril et mai 2020, le nombre d’applications téléchargées chaque mois par les utilisateurs a augmenté de 46,2 % en moyenne dans le monde.

De même, le nombre total de sessions des applications a augmenté d’environ 10 % entre avril et mai 2020. À la fin de l’année 2021, ce nombre est resté plus élevé de 8,6 % dans le monde par rapport à son niveau d’avant la pandémie. Toutefois, les premiers effets positifs de la pandémie sur les téléchargements et les sessions d’applications étaient plus limités en Afrique subsaharienne que dans d’autres régions. En outre, seule l’Afrique subsaharienne a connu une diminution des téléchargements et du nombre total de sessions d’applications

80 Afrique numérique 100 80 60 40 20 0 KEN Probabilité d’une utilisation accrue des solutions numériques (%) ASSENMDGTZABENMWIZMBGHA Probabilité d’une utilisation accrue des solutions numériques (%)
100 80 60 40 20 0
KENASSEN MDG TZABEN MWI ZMB Petite (5-19) Moyenne (20-99) Grande (100+)
(suite)

ENCADRÉ 2.2

Impact de la pandémie de COVID-19 sur l’utilisation des applications mobiles en Afrique (suite)

depuis le début de la pandémie (-11,3 % et -1,1 %, respectivement, entre février 2020 et décembre 2021).

Dans les quatre principales catégories d’applications – les affaires, financement, achats et voyages et infos locales –, le nombre total d’utilisateurs actifs mensuels (UAM) des 50 applications les mieux classéesa pour 100 000 habitants a diminué de 1,5 % en moyenne la première année de la pandémie en Afrique, contre une augmentation de 0,2 % dans un échantillon d’autres pays à revenu faible et intermédiaire (figure B2.2.1).

FIGURE B2.2.1 Évolution du nombre d’utilisateurs moyens mensuels d’applications numériques dans certains pays africains et de référence, avril 2020 à mars 2021

Finance A aires Achats Voyages et infos locales

Afrique Autres PRFI

Source : Sur la base des données d’Apptopia.

Note : L’échantillon de pays africains inclut le Burkina Faso, la République arabe d’Égypte, le Ghana, le Kenya, le Malawi, le Nigeria, le Sénégal, l’Afrique du Sud et la Tunisie. Les autres pays à revenu faible et intermédiaire sont l’Argentine, le Brésil, la Bulgarie, la Colombie, l’Inde, l’Indonésie, la Malaisie, le Mexique, le Pakistan, le Pérou, les Philippines, la Roumanie, la Fédération de Russie, la Thaïlande, la Turquie, l’Ukraine, la République bolivarienne du Venezuela et le Vietnam.

Dans les quatre principales catégories d’applications – les affaires, financement, achats et voyages et infos locales –, le nombre total d’utilisateurs actifs mensuels (UAM) des 50 applications les mieux classéesa pour 100 000 habitants a diminué de 1,5 % en moyenne la première année de la pandémie en Afrique, contre une augmentation de 0,2 % dans un échantillon d’autres pays à revenu faible et intermédiaire (figure B2.2.1).

L’impact de la pandémie et des confinements sur l’utilisation individuelle des applications (mesurées par UAM) semble légèrement moins prononcé en Afrique que sur d’autres marchés des pays à revenu faible et intermédiaire dans les catégories financement et gestion de l’entreprise, tandis que l’effet est inversé sur la catégorie voyages et infos locales. Si l’utilisation d’applications financières dans les pays africains a connu une accélération en 2020 par rapport à d’autres pays à revenu faible et intermédiaire, la croissance a stagné en 2021 – à 0,3 % seulement, contre 1 % dans ces autres pays. Parmi les pays africains, ce sont le Sénégal, le Burkina Faso et l’Afrique du Sud (respectivement) qui ont connu en 2020 la plus forte augmentation du nombre d’utilisateurs mensuels d’applications financières, tandis que seul le Nigeria a vu cette catégorie d’utilisateurs progresser en 2021 par rapport à 2020.

a. La concentration sur un échantillon d’applications présentant des chiffres élevés de téléchargements et d’engagements renforce la fiabilité des données basées sur une estimation.

Entreprises 81
–10 –8 –6 –4 –2 0 2 4 6 8 Variation des utilisateurs moyens mensuels (%)

FIGURE 2.16 Effets d’une plus grande préparation technologique pré-COVID-19 sur les ventes post-COVID des entreprises, par quintile de sophistication technologique, 2021

Source : Cirera, Comin, et Cruz 2022, figure 5.14.

Note : Les coefficients estimatifs sont basés sur les données combinées de trois pays (Brésil, Sénégal et Vietnam) à la fois sur (a) les mesures de l’état de préparation technologique avant la COVID-19 à partir de l’enquête FAT 2019-2021 ; et (b) les informations sur la réponse numérique et la performance des entreprises après le début de la pandémie de COVID-19 déterminées à partir des enquêtes COVID Business Pulse Surveys (BPS) de la Banque mondiale auprès des entreprises employant cinq travailleurs à temps plein ou plus, réalisées de septembre 2020 à février 2021. « L’effet total » comprend les effets directs et indirects de l’adoption accrue de technologies numériques et d’investissements plus importants avant et après le début de la pandémie. pp = points de pourcentage.

supplémentaires en réponse à la crise. Cet effet indirect est également plus important pour les entreprises technologiquement plus sophistiquées. Alors qu’en moyenne, une augmentation d’une unité de sophistication technologique est associée à une augmentation de 17 points de pourcentage de la probabilité de commencer ou d’augmenter l’utilisation de différents types de TN, la probabilité supplémentaire pour les entreprises faisant partie des 60 % les plus avancées est d’au moins 35 points de pourcentage.

Facteurs incitant à utiliser des TN en entreprise

De toutes les régions disposant d’un service internet, l’Afrique est celle qui compte le plus grand nombre d’utilisateurs non connectés au monde. Mais les entreprises sont plus susceptibles que les ménages d’utiliser des smartphones et des ordinateurs. Puisque l’utilisation des TN en entreprise est associée à une augmentation de la productivité et du nombre d’emplois, comme nous l’avons vu précédemment, pourquoi l’utilisation de ces technologies (lorsqu’elles sont disponibles) n’est-elle pas généralisée dans toutes les entreprises ? Cette section présente des données inédites des enquêtes FAT et RIA pour identifier les principaux facteurs d’utilisation des TN en entreprise. Il est important de comprendre ce qui pousse les entreprises à utiliser ces technologies, à commencer par les technologies d’accès telles que les smartphones et les ordinateurs, pour formuler des politiques publiques efficaces visant à réduire les obstacles et à renforcer les facteurs positifs de leur utilisation productive.

82 Afrique numérique E et total (direct + indirect) sur la variation des ventes par rapport aux 20 % inférieurs de sophistication technologique (pp) 14 12 10 8 6 4 2 0 Q2 Q3 Q4 Q5 Average Quantiles dans la distribution de la sophistication technologique E et indirect E et direct

Principaux facteurs incitant à l’utilisation de TN

Les principaux facteurs incitant à utiliser des smartphones et des ordinateurs en entreprise ainsi que des TN plus sophistiquées basées sur ces technologies d’accès sont liés à la capacité à payer et à la volonté d’utiliser, ainsi qu’à d’autres facteurs :19

Capacité à payer. L’accessibilité financière, c’est-à-dire la capacité à payer pour les TN, est liée à la fois aux coûts (par rapport aux rendements améliorés attendus des revenus de l’entreprise) et à l’accès au financement, notamment la mesure dans laquelle les systèmes financiers locaux permettent de financer les équipements et logiciels sousjacents.

L’accessibilité financière des infrastructures complémentaires peut être interprétée comme relevant de la capacité à payer des utilisateurs, la disponibilité à un prix abordable du service internet étant facilitée par celle des infrastructures non numériques complémentaires. Cela inclut le coût, la disponibilité et la fiabilité de l’électricité ainsi que les routes et la logistique pour les applications nécessitant des services de transport associés.

Volonté d’utiliser. L’attractivité, à savoir la demande et la volonté sous-jacentes d’utiliser les TN (au-delà des questions d’accessibilité financière), est affectée par la disponibilité de l’information sur l’existence des TN, la facilité d’utilisation et la pertinence des réponses apportées aux besoins productifs des utilisateurs. Ces variables sont influencées par la mesure dans laquelle la conception des TN est adaptée au niveau de compétence de l’utilisateur, par leur disponibilité dans la langue de l’usager et la mesure dans laquelle l’apprentissage sur le tas est facilité. L’attractivité est également influencée par les exigences en matière de connectivité à internet, notamment une capacité de haut débit suffisante (vitesse à laquelle circulent les données), une faible latence (aucun délai perceptible dans l’apparition des données recherchées) et la fiabilité (toujours stable). Notons que l’attractivité est également affectée par l’incertitude autour des avantages économiques de l’adoption associée aux préférences et aux biais d’aversion au risque ou aux pertes des utilisateurs individuels, y compris des facteurs tels que l’excès ou le manque de confiance, le biais du statu quo, la désinformation et la confiance.

La volonté des entreprises d’utiliser les TN dépend également de leurs capacités, notamment des compétences de leurs ressources humaines et de leurs capacités technologiques. Les compétences des ressources humaines comprennent la capacité des travailleurs, des gestionnaires et des propriétaires à extraire de la valeur des TN, et cette capacité est affectée par les niveaux et la qualité de l’instruction de base et de l’éducation et de la formation techniques et professionnelles ultérieures, ainsi que le savoir-faire accumulé avec l’expérience.

Les capacités des entreprises comprennent le besoin et la capacité à utiliser les TN. Ces capacités sont liées à la complexité des intrants, des processus de production et de la qualité des produits exigés par les marchés, y compris les pratiques managériales et organisationnelles, ainsi que l’étendue de l’utilisation des technologies, de la recherche et des activités de recherche et développement (R&D) entreprises (permettant à l’entreprise d’accumuler des actifs de savoir-faire pertinents au-delà de ceux qui peuvent être achetés sur les marchés). Compte tenu du faible taux d’alphabétisation moyen et de la faible qualité de l’éducation dans la plupart des pays africains, les TN peuvent contribuer à diffuser des connaissances pour améliorer la qualité de l’éducation et combler les pénuries de compétences en Afrique afin de favoriser une croissance plus élevée de la productivité et la création d’emplois.

Entreprises 83

Facteurs commerciaux et socioéconomiques. D’autres éléments de l’environnement des affaires – dont la disponibilité et le coût de la main-d’œuvre qualifiée et de certains types de capitaux, ainsi que les incitations à la concurrence pour stimuler l’adoption de technologies et la création de nouvelles technologies – sont liés à l’accès à des marchés nationaux et internationaux plus vastes et aux réglementations gouvernementales qui uniformisent les règles du jeu. Ces réglementations, par exemple, visent à éviter de favoriser les entreprises en place ou d’en entraver l’entrée ou l’expansion. Elles visent plutôt à permettre à toute start-up d’entrer et d’expérimenter, de se développer rapidement et de se retirer et de revenir si l’idée commerciale initiale n’était pas bien exécutée et ne répondait pas suffisamment aux besoins du marché.

Pour les autres facteurs socioéconomiques, il convient de savoir si les normes et les règles sociales constituent un obstacle à la propriété de technologies d’accès par les femmes.

Effets de réseau. Les smartphones, les ordinateurs et plusieurs autres TN, y compris les plateformes numériques, ont des effets de réseau. En d’autres termes, la valeur de la TN augmente avec le nombre d’utilisateurs, y compris ceux qui accèdent aux plateformes numériques. Les effets de réseau s’accompagnent de facteurs supplémentaires qui affectent l’adoption et l’utilisation des TN, notamment

• Les problèmes de coordination, y compris l’attentisme par rapport aux autres membres du réseau, la faiblesse ou l’absence d’interopérabilité et l’égalité d’accès sur les marchés (liés aux normes et à la réglementation) ; et

• Les questions de confiance, liées à d’éventuelles lacunes aux niveaux juridique et réglementaire des gouvernements (dont l’absence de lois appropriées sur la responsabilité, la protection des consommateurs en ligne, la signature électronique, la protection des données personnelles et la cybersécurité) et au niveau de l’opérateur de la plateforme (dont l’absence de certifications par des tiers et de procédures simples de résolution des différends).

Obstacles perçus à l’utilisation des TN

Les principaux obstacles signalés à l’utilisation des nouvelles technologies en entreprise, y compris les TN, sont le manque de capacités, une demande limitée et l’incertitude ainsi que le manque de financement. Ces résultats sont basés sur l’enquête FAT, qui demande directement aux entreprises de cinq salariés à temps plein ou plus d’identifier les trois principaux obstacles à l’adoption de nouvelles technologies, y compris les TN. Les résultats obtenus dans tous les pays africains pour lesquels des données sont disponibles (Ghana, Kenya, Malawi et Sénégal) sont classés en fonction de la part la plus importante des réponses des petites entreprises (figure 2.17).

Il est communément admis que les deux principaux obstacles rencontrés par les entreprises africaines sont le manque de capacités et le manque d’attractivité des technologies. Pour les petites entreprises, l’obstacle le plus souvent cité est le manque de capacités, 78 % d’entre elle le désignant comme l’un de leurs trois principaux obstacles, devant le manque de demande et d’attractivité des technologies (qui inclut l’incertitude), 75 % des petites entreprises donnant cette réponse. Le manque de financement et d’accessibilité financière est le troisième obstacle principal signalé par 38 % des petites entreprises. Les réglementations gouvernementales et les infrastructures médiocres sont perçues comme

84 Afrique numérique

FIGURE 2.17 Obstacles signalés à l’utilisation de technologies dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par taille d’entreprise, 2019–2021

Manque de capacités

Manque de demande et incertitude

Manque de financement Réglementations gouvernementales

Autres

Mauvaise infrastructure

0255075 100

Part des réponses (%)

Petite Moyenne Grande

Source : D’après Cirera, Comin et Cruz 2022, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021.

Note : Les entreprises ont sélectionné les trois obstacles les plus importants rencontrés « pour adopter de nouveaux équipements, machines, logiciels ou processus afin d’améliorer leurs performances ». « Le manque de capacités » couvre à la fois les compétences individuelles et les capacités technologiques de l’entreprise. « Le manque de demande et l’incertitude » réduisent l’attractivité des technologies. « Le manque de financement » concerne les questions d’accessibilité financière. La figure indique la part de toutes les entreprises africaines interrogées au Ghana, au Kenya, au Malawi et au Sénégal pour chaque réponse principale, par taille d’entreprise. Les « petites » entreprises comptent 5 à 19 employés à temps plein ; les « moyennes » entreprises, entre 20 et 99 ; et les « grandes » entreprises, 100 ou plus. Les obstacles sont classés en fonction de la plus grande part des réponses des petites entreprises. Ce n’est qu’au Sénégal qu’il a été possible de constituer un échantillon représentatif d’entreprises informelles ; par conséquent, l’échantillon du Sénégal comprend à la fois des entreprises formelles et informelles.

des obstacles relativement moins importants, 10 % et 8 % des petites entreprises choisissant ces réponses, respectivement.

Parmi les moyennes et grandes entreprises, l’obstacle le plus souvent cité est la demande limitée et le manque d’attractivité des technologies, 82 % et 73 % des moyennes et grandes entreprises choisissant cette réponse, respectivement, suivie du manque de capacités, choisi par 79 % des moyennes entreprises et 65 % des grandes entreprises. Le manque de financement et d’accessibilité financière se classe une fois de plus en troisième position parmi les principaux obstacles signalés, 28 % et 33 % des moyennes et grandes entreprises ayant choisi cette réponse, respectivement. La médiocrité des infrastructures est perçue comme plus importante pour les grandes entreprises que pour les moyennes : 25 % des grandes entreprises et 10 % des moyennes entreprises la signalent comme un obstacle majeur, et 20 % des grandes entreprises et 8 % des moyennes entreprises sélectionnent les réglementations gouvernementales comme un obstacle majeur.

Parmi les raisons de la non-utilisation d’internet déclarées par les microentreprises, le manque d’attractivité est la contrainte la plus importante, citée par 7 non-utilisateurs sur 10 (Atiyas et Dutz 2023). La disponibilité du service internet n’est pas une contrainte

Entreprises 85

majeure, puisque moins de 20 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête RIA l’ont considérée comme une contrainte.20 L’accessibilité financière est une contrainte majeure pour environ un tiers (35 %) des microentreprises interrogées ; elle est probablement liée à l’incapacité à payer un smartphone, un ordinateur ou un service internet, ou au manque d’accès à l’électricité ou à l’incapacité de la payer.

Cependant, l’accessibilité financière n’explique pas à elle seule pourquoi la majorité des plus de 93 % des microentreprises ne disposent pas de smartphone ou d’ordinateur pour accéder à internet. Comme indiqué plus haut, la plus grande partie des nonutilisateurs interrogés – plus de 70 % – a indiqué que le manque d’attractivité (« pas de besoin ») était la principale contrainte, probablement parce que (a) aucune application utile dans leur langue locale n’est disponible pour répondre à leurs besoins productifs ; (b) leur niveau de compétence général ne leur permet pas de comprendre comment utiliser les applications disponibles  de manière productive ; ou (c) la qualité du service disponible est si médiocre (pas de téléchargement ou téléchargement limité d’informations utiles lorsqu’elles sont nécessaires) que cela ne leur est pas utile. Enfin, environ un autre tiers des non-utilisateurs (34 %) a indiqué avoir un manque de capacités ou de compétences, probablement parce que les applications ne sont pas conçues en fonction du niveau de compétence numérique des utilisateurs et ne sont pas suffisamment intuitives et faciles à utiliser.

Corrélats de l’utilisation de smartphones et ordinateurs en entreprise

Les principaux facteurs factuels de l’utilisation des smartphones et des ordinateurs sont associés à la capacité à payer pour internet (liée à l’accessibilité financière et à la disponibilité d’infrastructures complémentaires) et à la volonté d’utiliser les TN (liée à l’attractivité et aux capacités d’utilisation des TN).21 Les facteurs d’utilisation sont relativement similaires dans les grandes entreprises (cinq employés ou plus) et les microentreprises (figure 2.18). Ces résultats sont fondés sur des données objectives recueillies dans le cadre des enquêtes FAT et RIA (Cirera, Comin et Cruz 2022 ; Atiyas et Dutz 2023), qui permettent d’explorer les corrélats conditionnels de l’utilisation des smartphones et des ordinateurs en entreprise, en fonction de l’ensemble des facteurs d’utilisation en entreprise.22

Prêts et lignes de crédit. L’accessibilité financière est représentée par le fait que les grandes entreprises ont des prêts pour acheter des machines et des équipements et que les microentreprises ont un prêt. Des informations sont également disponibles pour savoir si les microentreprises disposent d’une ligne de crédit auprès de leurs fournisseurs, ce qui pourrait également être un indicateur de leur solvabilité. L’accès au financement, tel qu’il est reflété par les prêts accordés, est l’un des corrélats les plus importants de l’adoption de TN, en plus des compétences et de la nature sectorielle de l’activité industrielle pour les grandes entreprises (c’est-à-dire l’industrie manufacturière et les services par rapport à l’agriculture).

Les grandes entreprises bénéficiaires d’un prêt sont 12 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser des smartphones et 9 points moins susceptibles d’utiliser un téléphone 2G ; il n’y a pas de lien statistiquement significatif entre l’utilisation d’un ordinateur et le fait d’avoir un prêt. Les microentreprises qui ont un prêt sont 18 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser des smartphones et presque 15 points moins susceptibles d’utiliser un téléphone 2G ; elles sont également plus de 9 points plus susceptibles d’utiliser un ordinateur.

86 Afrique numérique

FIGURE 2.18 Corrélats de l’adoption de smartphones et ordinateurs par les entreprises africaines, 2017–2021

a. Corrélats d’adoption pour les grandes entreprisesa

b. Corrélats d’adoption pour les microentreprisesb

Formelle

Moyenne Grande

Relations de l’entreprise avec des multinationales

Prêts pour l’achat de machines

Dispose de l’électricité

Situé dans la capitale

Femme propriétaire

Niveau d’instruction du gestionnaire

Expérience du gestionnaire dans les multinationales

−0,3−0,2−0,10,100,20,3

Sources : Cirera, Comin et Cruz 2022 ; Atiyas et Dutz 2023.

Grande

Grandes entreprises clientes

Dispose d’un prêt

Dispose d’une ligne de crédit auprès des fournisseurs

Dispose de l’électricité

Localisation urbaine

Femme

Note : Les résultats présentés sont des effets marginaux basés sur des régressions probit sur les caractéristiques des entreprises, en tenant compte des effets fixes des pays. Les barres d’erreur indiquent des intervalles de confiance de 95 %.

a. D’après les données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021 sur les entreprises employant au moins cinq salariés à temps plein dans quatre pays africains pour lesquels les données sont disponibles : Ghana, Kenya, Malawi et Sénégal. Les « grandes » entreprises (comptant 100 employés ou plus) et les « moyennes » entreprises (20-99 employés) sont comparées au groupe des « petites » entreprises (5-19 employés). Ce n’est qu’au Sénégal qu’il a été possible de constituer un échantillon représentatif d’entreprises informelles ; l’échantillon du Sénégal comprend donc à la fois des entreprises formelles et informelles. MNC = multinationales.

b. D’après les données de l’enquête RIA (Research ICT Africa) 2017-2018 sur les microentreprises au Ghana, au Kenya, au Mozambique, au Nigeria, au Sénégal, en Afrique du Sud et en Tanzanie. Les « grandes » microentreprises (comptant au moins trois employés à temps plein) et les « moyennes » microentreprises (1 à 2 employés à temps plein) sont comparées au groupe des « petites » microentreprises (0 employé à temps plein).

Électricité et localisation urbaine. La fiabilité de l’électricité et la vie en milieu urbain sont associées à l’utilisation d’ordinateurs pour les grandes entreprises et à l’utilisation de smartphones pour les microentreprises. Les données sur les infrastructures complémentaires sont limitées aux réponses des entreprises sur l’électricité. Le fait que les entreprises soient situées dans une ville ou une capitale est utilisé comme indicateur de la disponibilité d’autres infrastructures complémentaires, notamment l’accès à de meilleures routes et à des services logistiques.

Les grandes entreprises ayant accès à l’électricité sont 12 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un ordinateur, tandis que les grandes entreprises de la capitale sont près de 10 points plus susceptibles d’en utiliser un ; les relations entre l’accès à

Entreprises 87
Ordinateur Smartphone Téléphone mobile
Formelle Moyenne
Âge de l’entreprise
Formation professionnelle −0,3−0,2−0,10,100,2 0,3
propriétaire Niveau d’instruction du gestionnaire
Âge de l’entreprise

l’électricité et la localisation urbaine et l’utilisation d’un smartphone ne sont pas statistiquement significatives. 23 Les microentreprises disposant de l’électricité sont 5 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un smartphone et 4 points plus susceptibles d’utiliser un ordinateur. Les microentreprises situées en milieu urbain sont 4 points plus susceptibles d’utiliser un smartphone.

Relations commerciales. L’attractivité des TN – probablement motivée par l’obligation d’adopter des TN spécifiques lorsque les entreprises ont des relations commerciales avec des multinationales et lorsque les microentreprises ont de grandes entreprises comme clients – est également fortement associée à l’utilisation de smartphones et d’ordinateurs. L’attractivité et les capacités affectent conjointement la demande sousjacente et la volonté d’utiliser des TN spécifiques.

L’attractivité dépend des informations disponibles sur l’existence des TN et leur capacité à répondre aux besoins productifs des entreprises utilisatrices. Il s’agit ici de savoir si les grandes entreprises ont des relations commerciales avec des multinationales et si les microentreprises ont de grandes entreprises comme clients, les multinationales et les grandes entreprises exigeant probablement l’utilisation de certaines TN pour leurs interactions. Ces deux éléments sont associés de manière hautement significative et positive à l’utilisation de smartphones et ordinateurs.

Les grandes entreprises qui entretiennent des relations commerciales avec des multinationales sont 9 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser des smartphones et près de 8 points moins susceptibles de ne pas utiliser de téléphone à des fins professionnelles ; elles sont près de 8 points plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs. Les microentreprises ayant pour clients de grandes entreprises sont 4 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser des smartphones et plus de 5 points plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs.

Niveau d’instruction du gestionnaire. Les compétences relationnelles sont fortement associées à l’utilisation de smartphones et d’ordinateurs. Cela est particulièrement vrai pour le niveau d’instruction des gestionnaires des grandes entreprises et le niveau de formation professionnelle dans les microentreprises. Les capacités influent sur la volonté d’utiliser les TN en grande partie en permettant de comprendre comment les utiliser et en extraire une valeur productive.

La dimension « compétences » des capacités est représentée par (a) l’année de scolarité la plus élevée du gestionnaire de l’entreprise pour les grandes entreprises et les microentreprises ; (b) la formation technique sous la forme de l’expérience du gestionnaire dans les multinationales pour les grandes entreprises ; et (c) les certificats de formation professionnelle détenus par le gestionnaire pour les microentreprises.

Le niveau d’instruction du gestionnaire est statistiquement très significatif, associé à la fois à l’adoption du smartphone et de l’ordinateur. Les entreprises dont les gestionnaires ont une année de scolarité de plus que les autres gestionnaires d’entreprises similaires sont associées à une probabilité de 12 % et de 0,2 % plus élevée (dans les grandes entreprises et les microentreprises, respectivement) d’adopter un smartphone et à une probabilité plus élevée de 7 % d’adopter un ordinateur.24 Ces chiffres sont importants pour les grandes entreprises, car il s’agit d’effets marginaux dont l’ampleur doit être revue à la hausse dans la mesure où certains gestionnaires peuvent avoir plusieurs années de scolarité de plus que leurs homologues d’autres entreprises s’ils ont poursuivi leurs études au-delà du primaire et achevé leurs études secondaires. Chez les gestionnaires de microentreprises, la formation professionnelle est associée à une probabilité plus élevée

88 Afrique numérique

de 4 points de pourcentage d’adopter un smartphone et à une probabilité plus faible de ne pas adopter de téléphone mobile.

Comme on pouvait s’y attendre, l’expérience des gestionnaires de grandes entreprises avec les multinationales est associée négativement à la possession d’un téléphone 2G, mais positivement à la non-possession d’un téléphone (bien que dans une très faible mesure). Les entreprises dont le gestionnaire a une expérience des multinationales ont une probabilité de 2,7 points de pourcentage plus élevée d’adopter un ordinateur.

Taille, âge, formalité et secteur de l’entreprise. Les capacités technologiques des entreprises sont liées à la complexité des intrants, de la production et de la qualité des extrants exigés par les marchés. Elles sont représentées par la taille, l’âge, le statut formel et le secteur d’activité de l’entreprise, avec l’hypothèse que les entreprises plus grandes, plus jeunes et plus formelles, ainsi que les entreprises de l’industrie manufacturière et des services, sont susceptibles d’avoir plus de savoir-faire et un plus grand besoin d’utiliser des smartphones et des ordinateurs.25

Les entreprises comptant cinq travailleurs ou plus (« entreprises de 5 employés et plus ») sont plus susceptibles d’utiliser un ordinateur : les grandes entreprises (100 employés et plus) et les moyennes entreprises (20 à 99 employés) sont respectivement 20 points de pourcentage et environ 14 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un ordinateur que les petites entreprises (5 à 19 employés). Les microentreprises employant 3 travailleurs ou plus sont 3,5 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un ordinateur que celles qui en ont moins. La relation entre la taille de l’entreprise et l’utilisation du smartphone n’est pas statistiquement significative.

Concernant l’âge de l’entreprise, les entreprises employant 5 travailleurs ou plus et les microentreprises plus anciennes (la microentreprise médiane ayant quatre ans dans tous les pays) sont moins susceptibles d’utiliser un smartphone que les entreprises plus jeunes. Les entreprises formelles comptant 5 employés ou plus ainsi que les microentreprises formelles sont plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs que leurs homologues informelles. En effet, les entreprises formelles comptant 5 travailleurs ou plus sont environ 23 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser des ordinateurs, tandis que les microentreprises formelles sont environ 3 points de pourcentage plus susceptibles d’en utiliser.26 La relation entre le statut formel et l’utilisation d’un smartphone n’est pas statistiquement significative pour les entreprises employant 5 travailleurs ou plus. Pour ce qui est des microentreprises, celles qui sont formelles sont 2 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un smartphone.

En ce qui concerne les secteurs d’activité des entreprises, les entreprises de l’industrie manufacturière ainsi que du commerce de gros et de détail comptant 5 travailleurs ou plus sont 22 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un smartphone que celles de l’agriculture, tandis que celles des autres services sont 16 points de pourcentage plus susceptibles de le faire. De même, les entreprises employant 5 travailleurs ou plus du commerce de gros et de détail et des « autres services » sont respectivement 18 et 16 points de pourcentage plus susceptibles d’utiliser un ordinateur que celles de l’agriculture.

Propriété féminine. La seule autre variable socioéconomique disponible est de savoir si l’entreprise appartient à une ou plusieurs femmes.27 Pour les entreprises comptant plus de 5 travailleurs, la relation entre la propriété féminine et l’utilisation de smartphones et d’ordinateurs n’est pas statistiquement significative. On peut présumer que dans ces entreprises, où les propriétaires sont généralement éloignés de la gestion quotidienne des entreprises, le sexe des propriétaires n’est pas aussi pertinent pour l’adoption de technologies qu’il ne l’est pour les microentreprises.

Entreprises 89

Cependant, parmi les microentreprises, les entreprises détenues par des femmes sont moins susceptibles d’utiliser un smartphone ou un ordinateur. Elles sont respectivement 2 et 3 points de pourcentage moins susceptibles d’utiliser un smartphone et un ordinateur que les entreprises détenues par des hommes. Étant donné que la plupart de ces microentreprises sont indépendantes et sans employés rémunérés à temps plein et que le propriétaire est également le gestionnaire, cette fracture numérique peut refléter les normes et règles sociales en vigueur qui rendent la possession de ces dispositifs d’accès relativement plus difficile pour les femmes.

Données probantes sur l’attractivité, les capacités et l’infrastructure comme facteurs d’utilisation en entreprise

L’attrait des nouvelles technologies numériques comme facteur d’adoption est étroitement lié à l’incertitude des avantages économiques qui en résultent, une incertitude associée aux biais comportementaux, notamment l’excès de confiance, le statu quo et l’exposition à la désinformation. Pour répondre à cette question, l’enquête FAT interroge les entreprises sur l’auto-évaluation des technologies utilisées par rapport à leur perception de l’emploi des technologies par les autres entreprises de leur secteur et de leur pays.

La quasi-totalité des entreprises sont convaincues d’utiliser des technologies plus sophistiquées qu’elles ne le sont en réalité par rapport aux autres entreprises nationales (figure 2.19). L’écart plus important entre les auto-évaluations et la sophistication technologique réelle des entreprises africaines et des entreprises d’autres régions pourrait être lié à une sophistication technologique plus faible en Afrique et, par conséquent, à des

FIGURE 2.19 Perception par les entreprises africaines de leur propre usage des technologies par rapport à d’autres entreprises du pays, 2019–2021

Source : Cirera, Comin et Cruz 2022, figure 6.10, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021 restreintes aux pays africains disponibles.

Note : La ligne à 45 degrés indique le point où les auto-évaluations et les chiffres réels coïncident. La ligne rouge montre l’ajustement quadratique avec un intervalle de confiance de 95 %. L’indice technologique des fonctions générales de l’entreprise (GBF) (panneau a) et l’indice technologique des fonctions sectorielles (SBF) (panneau b) ont régressé sur leur auto-évaluation par rapport aux autres entreprises du pays, tout en tenant compte du pays, du secteur, de la taille de l’entreprise et des régions. La question posée est la suivante : « Sur une échelle de 1 à 10, où 10 signifie que l’établissement utilise les processus de production les plus avancés disponibles dans son secteur, où pensez-vous que cet établissement se situe par rapport aux entreprises de votre pays ? ». Les auto-évaluations sont rééchelonnées de 1 à 5. Les données étaient disponibles auprès des entreprises employant au moins cinq personnes à temps plein dans quatre pays africains couverts par l’enquête FAT : le Ghana, le Kenya, le Malawi et le Sénégal.

90 Afrique numérique
5 1 Auto-évaluation technologique 1 2 Indice technologique GBF INT 34 5 2 3 4
GBF Auto-évaluation technologique Indice technologique GBF INT 5 1 12 34 5 2 3 4
a.
Sur l’indice
b.
Sur l’indice SBF

possibilités moindres pour les entreprises africaines de se comparer à des entreprises proches utilisant des technologies plus sophistiquées. Cet excès de confiance est susceptible de dissuader les sociétés qui n’estiment pas nécessaire d’atteindre le niveau de leurs concurrents nationaux.

Les compétences des travailleurs et des gestionnaires ont une incidence sur la capacité à tirer profit des technologies numériques et complémentaires. Les entreprises comptant une plus grande proportion de travailleurs ayant suivi un enseignement et une formation techniques et professionnels, et en particulier une plus grande proportion de diplômés d’une université, sont nettement plus susceptibles d’utiliser des technologies plus sophistiquées, notamment les technologies numériques, dans les fonctions de l’entreprise (figure 2.20, panneau a). Les entreprises africaines comptant une plus grande proportion de travailleurs diplômés du secondaire ne sont pas associées à une plus grande sophistication technologique pour les technologies sectorielles, contrairement aux données de tous les pays disponibles, suggérant que la qualité de l’enseignement secondaire peut ne pas préparer adéquatement à l’utilisation efficace de ces technologies.

Les gestionnaires diplômés du secondaire ayant étudié à l’étranger, et surtout ceux titulaires d’un diplôme de troisième cycle, sont également plus susceptibles de travailler dans des entreprises utilisant des technologies plus sophistiquées, notamment les technologies numériques (figure 2.20, panneau b). Les conclusions du rapport, basées exclusivement sur des données provenant d’Afrique, montrent que, dans tous les pays dont les données sont disponibles, les gestionnaires titulaires d’un diplôme de troisième cycle ont

FIGURE 2.20 Corrélation entre les compétences des travailleurs et des gestionnaires et l’utilisation de meilleures technologies dans certains pays africains, 2019–2021

Source : Cirera, Comin et Cruz 2022, figures 6.14 et 6.12, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021 restreintes aux pays africains disponibles.

Note : Chaque indice technologique des entreprises (aux marges extensive et intensive) est en régression sur une variable muette pour (dans le panneau a) le pourcentage de travailleurs ayant différents niveaux d’instruction (secondaire, formation professionnelle et études supérieures) et (dans le panneau b) l’éducation du gestionnaire (école secondaire ou université, licence et plus et études à l’étranger) tout en tenant compte du pays, du secteur, de la taille de l’entreprise et des régions. Toutes les estimations sont pondérées par les poids d’échantillonnage et du pays. Les barres plus sombres indiquent les coefficients, et les barres d’erreur les intervalles de confiance à 95 % des régressions. Les données étaient disponibles auprès des entreprises employant au moins cinq personnes à temps plein dans quatre pays africains ayant répondu à l’enquête FAT : le Ghana, le Kenya, le Malawi et le Sénégal. GBF = fonctions générales de l’entreprise ; SBF = fonctions sectorielles de l’entreprise ; EXT = marge extensive (si une quelconque technologie est utilisée) ; INT = marge intensive (technologie utilisée le plus intensivement).

Entreprises 91
GBF EXT GBF INT SBF EXT SBF INT 0,8 0,6 0,4 0,2 0 Coefficient Lycée ou université Troisième cycle Études à l’étranger 0,015 0,010 0,005 Coefficient –0,005 % de travailleurs titulaires d’un diplôme secondaire % de travailleurs ayant suivi une formation professionnelle % de travailleurs titulaires d’un diplôme universitaire 0
a. Travailleurs et sophistication technologique b. Gestionnaires et sophistication technologique

presque deux fois plus de chances que les titulaires d’un diplôme du secondaire ou supérieur de travailler dans des entreprises utilisant des technologies plus sophistiquées. Cela suggère donc que les pays africains ont une pénurie relative de cadres bien formés et que les entreprises disposant de technologies plus sophistiquées ont une plus forte demande de cadres titulaires de diplômes supérieurs.

Les capacités de gestion et les pratiques organisationnelles des entreprises ont également une incidence sur l’adoption des technologies numériques et complémentaires. Les entreprises utilisant des incitations formelles pour que les travailleurs trouvent de meilleurs moyens de produire des biens ou de fournir des services (figure 2.21, panneau a), et les entreprises contrôlant les performances par le biais d’un plus grand nombre d’indicateurs de performance clés (IPC) (figure 2.21, panneau b) sont bien plus susceptibles d’utiliser des technologies plus sophistiquées, notamment les technologies numériques, pour les fonctions générales et sectorielles de l’entreprise. En ce qui concerne l’utilisation d’un grand nombre (10 ou plus) d’indicateurs de performance clés, les résultats montrent que les entreprises qui surveillent les performances avec une plus large gamme d’indicateurs sont, encore une fois, presque deux fois plus susceptibles d’utiliser des technologies plus sophistiquées que les entreprises de tous les pays dont les données sont disponibles. La signification statistique des résultats dans les deux panneaux laisse penser que l’amélioration des capacités de gestion et des pratiques organisationnelles est complémentaire à l’adoption de meilleures technologies numériques et d’autres technologies.

FIGURE 2.21 Corrélation entre les capacités de gestion et les pratiques organisationnelles et l’utilisation de meilleures technologies par les entreprises

a. Incitation pour les travailleurs et sophistication technologiquea

b. IPC et sophistication technologiqueb

Source : Cirera, Comin et Cruz 2022, figure 6.12, à partir des données de l’enquête FAT (Firm-level Adoption of Technology) 2019-2021 restreintes aux pays africains disponibles.

Note : Chaque indice technologique des entreprises (aux marges extensive et intensive) est régressé sur une variable muette pour (dans le panneau a) fournir des incitations formelles et (dans le panneau b) des indicateurs de performance clés (IPC) tout en tenant compte du pays, du secteur, de la taille de l’entreprise et des régions. Toutes les estimations sont pondérées par les poids d’échantillonnage et du pays. Les barres plus sombres indiquent les coefficients, et les barres d’erreur les intervalles de confiance à 95 % des régressions. Les données étaient disponibles auprès des entreprises employant au moins cinq personnes à temps plein dans quatre pays africains ayant répondu à l’enquête FAT : le Ghana, le Kenya, le Malawi et le Sénégal. GBF = fonctions générales de l’entreprise ; SBF = fonctions sectorielles de l’entreprise ; EXT = marge extensive (si une technologie est utilisée) ; INT = marge intensive (technologie utilisée le plus intensivement).

a. Les participants à l’enquête devaient répondre par oui ou non à la question suivante : « Cet établissement propose-t-il des incitations formelles aux travailleurs, sous forme d’argent, de cadeau ou de reconnaissance, pour suggérer et/ou utiliser de meilleures méthodes de production de biens ou de prestation de services ? ».

b. Les personnes interrogées ont été invitées à préciser le nombre d’indicateurs de performance clés (IPC) suivis, en donnant, à titre d’exemple, « des indicateurs sur la production, les coûts, les déchets, la qualité, les stocks, l’énergie, l’absentéisme et les livraisons en temps opportun ».

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Incitations formelles 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 Coefficient GBF
EXTGBF INTSBF EXTSBF INT
IPC 1-2 IPC 3-9 IPC
0,8 0,6 0,4 0,2 0 Coefficient
10+

En ce qui concerne l’infrastructure numérique, la proximité géographique des nœuds du réseau internet au Sénégal explique de manière causale l’adoption de technologies plus sophistiquées, dont des TN pour les GBF (Berkes et coll., à paraître)28. Toutefois, l’infrastructure numérique ne peut pas à elle seule expliquer de manière causale, avec une signification statistique, laquelle des technologies sera utilisée le plus intensivement pour les fonctions générales de l’entreprise, pas plus que l’infrastructure numérique à elle seule ne peut expliquer l’adoption et l’utilisation de différents niveaux de sophistication technologique pour les fonctions sectorielles de l’entreprise.

Ce résultat confirme l’importance de l’infrastructure numérique en tant que facteur d’adoption des TN par les entreprises. Il souligne également que de nombreux autres facteurs expliquent conjointement l’adoption et l’utilisation intensive de différents niveaux de sophistication technologique dans les entreprises et que l’adoption et l’utilisation intensive de technologies plus sophistiquées pour les fonctions sectorielles de l’entreprise, en particulier pour l’agriculture et le secteur manufacturier, ne sont pas seulement liées aux TN mais aussi généralement intégrées dans des technologies complémentaires relativement sophistiquées et onéreuses, notamment différents types de machines et d’équipements.

Des politiques

technologiques pour des entreprises plus nombreuses et plus performantes

Des politiques publiques sont nécessaires pour stimuler l’adoption de TN disponibles par les entreprises utilisatrices dans chaque pays africain. Il faut ainsi s’attaquer aux facteurs d’adoption identifiés, notamment en diffusant des informations sur les technologies numériques, en améliorant les compétences des personnes et les capacités des entreprises, et en fournissant un soutien financier. Des politiques publiques sont également nécessaires pour orienter le changement technologique en encourageant la production de technologies numériques plus adaptées aux besoins des pays à faible revenu en matière d’emploi, notamment des solutions adaptées aux personnes peu qualifiées qui sont faciles à utiliser et stimulent la productivité des propriétaires-entrepreneurs, gestionnaires et travailleurs à faible revenu et peu qualifiés. Les trois domaines stratégiques qui soutiennent ces objectifs sont :

• La mise à niveau technologique et les programmes de soutien aux capacités des travailleurs et des cadres dirigeants.

• Les politiques visant à soutenir la génération de technologies plus appropriées pour la base d’actifs actuelle et future de l’Afrique, avec notamment la protection des fournisseurs et des droits de propriété intellectuelle et des réglementations facilitant le développement adapté de l’apprentissage automatique et d’autres formes d’IA.

• Un soutien financier dont des garanties partielles de crédit ciblées, des subventions de contrepartie et des bons pour l’adoption de technologies et l’acquisition des capacités nécessaires, ainsi qu’une infrastructure de crédit axée sur les bureaux de crédit, des transactions sécurisées, l’utilisation éthique des données pour l’évaluation de la solvabilité, et des règles bancaires transparentes.

Pour être efficaces, les politiques plus spécifiques dans ces trois domaines doivent être soutenues par des politiques plus complètes sur l’environnement des affaires qui favorisent la concurrence sur le marché tout en facilitant l’adaptation économique et

Entreprises 93

sociale connexe. La concurrence sur le marché est une incitation essentielle, mais elle nécessite souvent une adaptation, y compris une reconversion, des travailleurs des entreprises moins productives.

Outre la promotion de la concurrence sur le marché, la coordination d’activités de soutien complémentaires et la contestabilité des politiques fondée sur des données probantes constituent deux autres principes d’une conception efficace des politiques et des institutions. La coordination consiste à regrouper des technologies, des compétences, des capacités et un soutien financier complémentaires de manière à surmonter les multiples obstacles à une adoption plus large des technologies numériques, évoqués dans la section précédente. Il s’agit également de la coordination entre les différentes entités de soutien public, entre les pouvoirs publics et les entreprises, et l’harmonisation régionale pour faciliter l’extensibilité dans la région. Pour que les politiques soient contestables, leurs objectifs, y compris les défaillances du marché qu’elles cherchent à corriger, doivent être transparents et accompagnés d’un suivi-évaluation avec des preuves d’impact permettant de renforcer les programmes réussis et de mettre fin à ceux qui ne fonctionnent pas29. L’application des principes de la réglementation agile pour l’élaboration participative des politiques, l’expérimentation et la flexibilité pour la correction des trajectoires gagnent en importance dans le contexte de la transformation numérique.

Accélération de l’adoption de technologies

L’accélération de l’adoption des technologies numériques et complémentaires relève d’un ensemble plus large de politiques de soutien comprenant également la génération et le financement des technologies. La figure 2.22 résume la multitude d’instruments politiques généralement utilisés pour soutenir l’adoption et la génération de technologies30. Ces instruments politiques visent principalement les micro, petites et moyennes entreprises (MPME).

Pour aider les entreprises à utiliser les technologies numériques, l’instrument le plus courant est le service de conseil aux entreprises (SCE). Le SCE prend en charge les types de GBF qui nécessitent de nombreuses TN, notamment les capacités générales de gestion d’entreprise ainsi que les plateformes plus spécifiques de marketing, de vente et d’ecommerce. Avec les services de développement technologique (SDT) et les centres technologiques (CT), qui soutiennent les SBF, ils sont le principal objet d’intérêt de cette sous-section et fournissent généralement à la fois des services et un soutien financier.

Le soutien public à la mise à niveau numérique des fonctions GBF est généralement fourni par des programmes de conseil aux entreprises existants ou plus ciblés. Les programmes généraux de conseil aux entreprises comprennent la fourniture directe de conseils spécialisés ou l’accès à ces derniers dans des domaines tels que les services financiers et comptables, la gestion des ressources humaines, le marketing et la publicité, les stratégies de tarification, la gestion de la chaîne d’approvisionnement et la gestion de la qualité. Ils remédient aux lacunes des marchés privés en matière d’accès à l’information pour les petites et micro-entreprises, notamment l’excès de confiance des petites entreprises dans leurs capacités, le problème étant plus répandu dans les entreprises utilisant des technologies moins sophistiquées (comme le montre la figure 2.21).

Ils permettent également de combler les lacunes des marchés privés en matière de coordination, en incitant des groupes de MPME à bénéficier conjointement de services de conseil.

94 Afrique numérique

FIGURE 2.22 Instruments de soutien à la génération et l’adoption de technologies numériques pour les GBF et les SBF

Renforcement des capacités d’absorption

Soutien à la génération, la commercialisation et au transfert de technologies

Entreprises

Adoption de technologies Transfert de technologies

Services de conseil aux entreprises

Subventions pour l'innovation (des processus)

Extension technologique

Centres technologiques/ de R&D

Génération de technologies

Parcs scientifiques/ technologiques

Bureaux de transfert de technologies

Universités/ Institutions de recherche

Prêts pour l'innovation (équipement)

Innovation ouverte

Source : Cirera et coll. 2020, figure 4.5. Note : Outre les subventions pour les technologies « douces » et les prêts subventionnés pour les technologies « matérielles » (équipement), un soutien financier public peut également être nécessaire pour aider à lever d’autres obstacles liés aux capacités, à l’attractivité et à l’accessibilité financière, qui sont des moteurs de l’utilisation des technologies numériques, ainsi que pour la génération de nouvelles technologies (y compris la modification de la direction du changement technologique), soit en combinaison avec les services de conseil aux entreprises, le développement technologique et les centres technologiques, soit séparément. Les options de financement sont abordées dans la sous-section consacrée à la facilitation du financement des entreprises. R & D = recherche et développement.

Voici quelques éléments de conseils aux entreprises bien conçus :

• Un diagnostic initial des capacités de l’entreprise qui peut fournir une analyse comparative et fonctionner comme un dispositif de sélection pour un soutien public supplémentaire.

• Un plan d’action ultérieur avec un soutien individuel ou conjoint.

• Une liste approuvée de fournisseurs dont les antécédents satisfont d’autres entreprises.

• Un modèle de prestation (soit par le biais de bons individuels ou de subventions pour l’achat de services privés, soit par la prestation directe) correspondant aux besoins actuels.

Notons que des programmes plus généraux de services de conseil aux entreprises ont été un instrument politique déterminant au Japon et à Singapour (Cirera et Maloney 2017). Un examen des programmes de mise à niveau numérique dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) souligne qu’au moins 40 % des pays font appel à des services de conseil aux entreprises comme principal instrument, 36 % utilisant des bons financiers et 27 % des subventions directes. La plupart des programmes soulignent que l’assistance technique doit s’accompagner d’investissements supplémentaires (Balbontin et coll. 2021)31

Entreprises 95

Le soutien public à la mise à niveau numérique pour les fonctions sectorielles de l’entreprise est généralement fourni par l’intermédiaire des services de développement technologique et des centres technologiques. Les services de développement technologique sont des services directs d’assistance technologique sur site et de formation aux compétences destinés aux petites et moyennes entreprises (PME) par le biais du personnel de développement. Ils se concentrent sur le soutien à des technologies de production spécifiques et le soutien à l’adoption et l’utilisation de TN, comme des capteurs numériques pour la production agricole, pour la production manufacturière et le contrôle qualité, et pour des services tels que la géolocalisation, le suivi de la température et de la vitesse des expéditions liées au transport. Ils s’intéressent également aux améliorations complémentaires des technologies analogiques.

Les services de conseil aux entreprises et de développement technologique sont souvent proposés de manière séquentielle32. Les centres technologiques sont des lieux physiques spécifiques à un secteur qui proposent généralement des services de conseil aux entreprises et de développement technologique ainsi que des services supplémentaires, notamment la formation de la main-d’œuvre à l’utilisation de technologies plus complexes. Les centres technologiques impliquent souvent l’utilisation partagée entre PME d’équipements de fabrication, d’installations de conception et de fabrication de produits plus onéreux (reposant davantage sur les imprimantes 3D), d’initiatives de développement et de démonstration de technologies pour adapter les technologies au contexte local, et de services de certification33. Ils peuvent être soit entièrement détenus par les pouvoirs publics, soit mis en œuvre sous forme de partenariats public-privé avec des associations du secteur. La plupart des centres technologiques fonctionnent avec au moins un certain niveau de subventions publiques, souvent importantes au départ et plus faibles au fil du temps avec l’augmentation des contributions des entreprises sous forme de frais d’utilisation. Un autre canal important pour la mise à niveau numérique est le transfert de technologies, souvent facilité par de grandes entreprises nationales et internationales de fournisseurs ou d’acheteurs dans des chaînes de valeur spécifiques dans lesquelles l’entreprise bénéficiaire mène ses activités.

Soutien à la génération de technologies adaptées à l’emploi

Certaines TN conçues dans les pays à revenu élevé ne sont pas appropriées aux besoins d’emplois convenables dans les pays africains moins qualifiés et à la main-d’œuvre relativement abondante. Comme défini au chapitre 1, les « bons » emplois permettent l’apprentissage et génèrent des revenus suffisants pour permettre aux ménages de sortir durablement de la pauvreté.

De nombreuses TN, notamment les technologies d’automatisation et l’IA, ont été conçues pour des personnes vivant dans des pays à revenu élevé et disposant de niveaux de compétences relativement plus élevés et d’une plus grande quantité de capital physique par rapport à la taille de la main-d’œuvre. Cependant, même aux États-Unis et dans d’autres pays à revenu élevé, l’automatisation des tâches routinières (robotisation) a eu des effets négatifs sur une partie de la main-d’œuvre, avec une diminution des emplois de la classe moyenne et des salaires réels des travailleurs peu qualifiés, et une augmentation conséquente des inégalités (Acemoglu 2021a)34. Si le développement mondial des technologies de l’IA se poursuit selon les tendances actuelles et continue d’échapper aux réglementations, il pourrait engendrer des dommages économiques encore plus marqués, notamment en automatisant le travail de manière plus excessive et

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en remplaçant davantage les travailleurs moins qualifiés effectuant des tâches de routine, en alimentant davantage les inégalités, en diminuant de manière inefficace les salaires réels des travailleurs moins qualifiés et en ne parvenant pas à améliorer la productivité (Acemoglu 2021b).

Les chaînes de valeur mondiales (CVM) sont un mécanisme clé par lequel ces technologies sont transférées vers les pays à faible revenu, des grandes entreprises mondiales qui achètent aux entreprises fournisseurs locales. Les entreprises africaines participant à ces chaînes de valeur mondiales finissent donc par être beaucoup plus intensives dans l’utilisation du capital physique et des travailleurs plus qualifiés que les dotations en capital et en compétences du reste du pays. Les entreprises liées aux CVM et capables d’être compétitives au niveau mondial ne peuvent donc pas absorber la majeure partie de la main-d’œuvre peu qualifiée de chaque pays. À l’inverse, la majeure partie des entreprises qui peuvent absorber la main-d’œuvre de chaque pays ne peut pas être compétitive au niveau mondial (Diao et coll. 2021). Le déploiement mondial de l’automatisation dans les pays à revenu élevé risque de modifier la division internationale du travail, entraînant une désindustrialisation plus rapide dans les pays à faible revenu.

De nombreuses TN peuvent être adaptées et réorientées, notamment en tant que technologies adaptées à un faible niveau de qualification. Les TN peuvent renforcer les capacités humaines plutôt que d’automatiser à outrance. Pourquoi ? Parce que des TN spécifiques peuvent prendre en charge du contenu sur écran tactile, la commande vocale et les vidéos d’instruction, dans n’importe quelle langue locale, de manière particulièrement appropriée pour faciliter l’apprentissage. Et parce qu’il est possible de modifier et de simplifier les technologies numériques existantes pour obtenir des applications intuitives et faciles à utiliser, ne nécessitant idéalement aucune compétence numérique préalable, afin de permettre aux travailleurs peu qualifiés d’effectuer des tâches plus complexes et d’apprendre sur le tas35

En principe, les fonctions d’enregistrement, de suivi et de vérification des TN peuvent permettre aux agriculteurs ruraux et aux autres producteurs locaux qui possèdent de précieuses données localisées d’importer ces dernières afin qu’elles puissent être agrégées. Elles seraient ainsi valorisées, permettant aux travailleurs d’être rémunérés et de bénéficier de manière juste et équitable de ces flux de données sur les marchés des intrants, de la production et de la logistique. Une approche similaire est envisageable à partir des données balisées indiquant où, comment et par qui les aliments et autres produits ont été fabriqués, dans la mesure où ces données sont appréciées par les consommateurs finaux.

Des TN spécifiques peuvent également permettre à des travailleurs qui ne savent pas faire des calculs de base d’accepter des paiements pour des biens ou des services rendus, comme l’ont fait efficacement les applications de mobilité de type Uber. Dans le domaine de la santé, les outils d’IA peuvent améliorer les capacités de diagnostic et de traitement du personnel infirmier, des aides-soignants et d’autres techniciens médicaux, permettant ainsi à des praticiens moins qualifiés d’effectuer des tâches que seuls les médecins ayant suivi une formation professionnelle de plusieurs années réalisent généralement (voir Acemoglu et Restrepo 2020). Dans le domaine de l’éducation, l’IA peut renforcer les capacités des enseignants au lieu de les remplacer. Dans la finance, l’IA peut permettre aux travailleurs qui ne disposent pas des formes traditionnelles de garantie d’accéder aux services de crédit et d’assurance en démontrant au fil du temps leur capacité à effectuer de petits achats et à faire de petites économies dans leur budget.

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Les politiques visant à encourager la création de TN plus attrayantes pour les besoins liés à l’emploi des pays africains à faible revenu devront s’appuyer sur des politiques complémentaires portant sur la disponibilité, les capacités, l’attrait et l’accessibilité financière des TN existantes. La création et la commercialisation rentable de nouvelles TN adaptées aux compétences peu développées nécessitent un environnement commercial qui récompense suffisamment les jeunes entrepreneurs ainsi que les acheteurs mondiaux et les fournisseurs d’intrants pour qu’ils conçoivent des solutions locales destinées aux personnes à faible revenu. Cela permettrait de regrouper les achats de valeur relativement faible (dictés par la capacité à payer) de nombreux utilisateurs à faible revenu. Ces utilisateurs potentiels doivent à leur tour trouver les technologies numériques suffisamment attrayantes et être en mesure d’assumer les coûts de la connectivité numérique et des smartphones, tablettes ou autres technologies d’accès sous-jacentes36.

Les investissements publics dans les systèmes de données publics et les politiques d’ouverture des données peuvent constituer des conditions préalables pour que les jeunes entrepreneurs locaux et les entreprises mondiales puissent élaborer des modèles commerciaux viables et investir dans la conception de ces nouvelles TN adaptées à des compétences peu développées. Les systèmes de données publics, y compris dans le cadre de partenariats avec des entreprises privées, pourraient fournir une cartographie spatiale comprenant des adresses numériques pour tous les emplacements, la géolocalisation des registres fonciers et la cartographie de la météo locale. Ces éléments seraient ainsi disponibles comme un ensemble de biens publics de ressources communes. La disponibilité commune de ces biens publics, accessibles par le biais de redevances d’utilisation, semble être une alternative préférable à des entreprises concurrentes, chacune investissant dans la cartographie numérique spatiale pour les zones où elle mène ses activités, créant ainsi des droits privés sur ces données et empêchant l’accès de tous les entrepreneurs et autres utilisateurs cherchant à ajouter de la valeur à ces données. Les domaines clés de l’expérimentation et l’apprentissage stratégiques comprennent : a) la mesure dans laquelle l’innovation, notamment par la création et le développement des TN par les entreprises numériques, peut être réorientée par les politiques et les investissements publics en faveur des entrepreneurs et des travailleurs moins qualifiés, et b) la mesure dans laquelle les entrepreneurs et les travailleurs moins qualifiés adopteront et utiliseront intensivement ces technologies numériques. Des politiques plus larges sont également nécessaires pour favoriser l’innovation et le développement de technologies numériques productives et créatrices d’emplois qui répondent aux besoins de l’Afrique. Les entrepreneurs numériques ont besoin d’un environnement dans lequel ils peuvent s’approprier les avantages du développement de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d’affaires numériques. Un tel environnement doit protéger de manière adéquate non seulement les innovations, grâce à des cadres efficaces de droits de propriété intellectuelle, mais aussi l’accès à ces innovations par l’octroi de licences pour les brevets essentiels standard à des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires. Une meilleure clarté sur la brevetabilité des algorithmes de calcul (comme pour l’apprentissage automatique ou l’IA) générerait plus de certitude.

La charge réglementaire liée au déploiement de nouvelles TN peut également affecter le développement de ces dernières, avec notamment des exigences complexes en matière d’immatriculation des entreprises, des autorisations sectorielles peu claires et des considérations fiscales complexes. La capacité des entrepreneurs numériques à se développer peut pâtir des cadres de concurrence faibles qui n’empêchent pas les pratiques d’exclusion ou les pratiques d’enveloppement des grands fournisseurs de TN37.

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Facilitation du financement des entreprises

Les TN sont de puissants outils qui facilitent l’accès au financement tant pour l’adoption que pour la génération de technologies, notamment à travers une évaluation et une gestion améliorées des risques liés au financement. Les investissements dans l’adoption de technologies par des entreprises et dans leur génération par des start-ups et autres entreprises doivent être facilités par des financements.

Parmi les incertitudes créées par les nouvelles technologies, il y a celle de savoir si ces investissements seront suffisamment productifs et rentables pour justifier une extension du financement aux entreprises utilisatrices (dans leur adoption et l’accumulation de nouvelles compétences et capacités requises) et aux entreprises génératrices de TN. Les asymétries d’information entre les bailleurs de fonds et les entrepreneurs compliquent davantage l’évaluation par les premiers de la viabilité des idées non testées des seconds. Ces incertitudes ont été aggravées par la pandémie de COVID-19, par les risques liés à l’apparition de nouvelles souches plus virulentes et résistantes aux vaccins, et les perturbations locales et mondiales de l’offre et de la demande.

Ces incertitudes entraînent généralement une réduction des financements, en particulier pour les MPME et les start-ups privées d’accès aux autres sources de financement et aux types de garanties dont les grandes entreprises bien établies peuvent disposer.

Fourniture de données pour améliorer la visibilité et les recours des bailleurs de fonds L’incapacité des MPME à utiliser des garanties telles que des actifs mobiliers due au manque d’efficacité ou à l’absence de régimes de transactions sécurisés limite davantage l’offre de financement. Les TN liées aux services financiers, soutenues par de meilleures données et capacités et par une infrastructure et des réglementations financières appropriées, peuvent faciliter le financement des entreprises en améliorant la visibilité et la disponibilité des recours.38

Par visibilité, on entend la capacité des bailleurs de fonds à accéder à des informations opportunes pour prédire la capacité et la volonté des bénéficiaires de respecter leurs obligations de remboursement. Une meilleure visibilité permet aux prêteurs de mieux prévoir la probabilité de défaut de chaque emprunteur. Les TN contribuent à lever l’opacité informationnelle sur les bénéficiaires des financements.

Par recours, on entend la capacité des bailleurs de fonds à agir en cas de non-respect des obligations de remboursement. L’amélioration des recours permet aux prêteurs de mieux prévoir et réduire les pertes anticipées en cas de défaut. Les TN contribuent à renforcer les possibilités de recours des bailleurs de fonds, qui permettront aux prêteurs d’élargir le marché des garanties et la validité des garanties qui atténueront toute perte en cas de défaut.

L’amélioration de la visibilité et des recours contribue à atténuer les risques de financement et facilite le financement des entreprises mal desservies. Outre le soutien au bon fonctionnement des marchés financiers privés par la promotion des solutions FinTech axées sur les TN par les fournisseurs de services financiers existants et nouveaux, les politiques publiques de soutien financier comprennent des garanties de crédit partielles ciblées, des subventions et des bons de contrepartie pour l’adoption des technologies et des capacités nécessaires, et une infrastructure de crédit axée sur les bureaux de crédit et les transactions sécurisées.

Les approches axées sur les TN visant à améliorer la visibilité et les recours incluent des données alternatives et de nouveaux outils de modélisation des risques. Dans le contexte

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de la numérisation accrue des activités économiques, un large éventail de données transactionnelles permet aux bailleurs de fonds de mieux comprendre les risques liés à l’extension du financement, y compris le suivi de l’activité commerciale et des flux de trésorerie en cours, ainsi que l’évolution en temps réel de la rentabilité après l’adoption de technologies et les investissements associés à la génération de technologies.

Les données transactionnelles pertinentes sont les historiques de transfert d’argent mobile,39 les dépôts, retraits et financements antérieurs obtenus, le service de prêts, les paiements destinés aux services publics, la paie, le loyer, les commandes et les livraisons d’intrants, les bons de commande et les factures, ainsi que les informations fiscales. Elles peuvent être combinées avec les données personnelles du propriétaire et du(des) gestionnaire(s) de l’entreprise, notamment l’âge, le sexe, l’éducation, les actifs patrimoniaux, la taille et la localisation du ménage, les contacts, la géolocalisation et les images satellite, et un éventail d’informations basées sur l’utilisation des TN, dont le système d’exploitation du téléphone portable, les habitudes d’appel, l’historique des recharges et paiements complémentaires, l’empreinte laissée sur les réseaux sociaux et les plateformes de commerce électronique, et les données psychométriques. Les modèles de notation de crédit basés sur les techniques d’apprentissage automatique et d’IA peuvent intégrer ces données en temps réel et à haute fréquence de manière à faciliter un réajustement constant en fonction de l’évolution du contexte économique.

Par rapport aux grandes entreprises et à celles implantées dans des zones urbaines, les entreprises de petite taille ou installées dans des villes peu développées et des zones rurales bénéficient plus souvent de l’utilisation par les prêteurs FinTech de ces données exclusives issues des opérateurs mobiles, des fournisseurs de paiements numériques, et de grandes entreprises technologiques, lorsqu’elles sont disponibles. Cela leur permet de compenser le manque de données traditionnelles pour les évaluations de crédit.40 Ces modèles sont encore naissants sur la plupart des marchés : ils représentent en 2019 environ 6 % du stock global de crédit pour le secteur privé au Kenya, 2 % en Chine, 1 % en Indonésie, et moins de 1 % sur les autres grands marchés (Cornelli et coll., 2020). Les initiatives liées aux données bancaires ouvertes facilitent également le partage d’informations sur les transactions et d’autres données financières des banques et institutions financières non bancaires, fournissant ainsi des données clés aux développeurs de technologies financières. L’open-banking pourrait donc soutenir l’inclusion financière et l’innovation en Afrique.41

Modification des produits financiers pour la réduction des risques

Les bailleurs de fonds peuvent également gérer les risques importants du financement de la génération et de l’adoption de technologies en modifiant la teneur et les caractéristiques de leurs produits de financement. Les TN réduisent les coûts d’extension du financement à court terme en automatisant la souscription, le suivi et le recouvrement des crédits, et en mettant en œuvre des processus de décaissement et de remboursement numériques à faible coût, qui améliorent la viabilité des prêts à court terme accordés aux MPME. Les TN peuvent aider les entreprises non bancarisées à construire ou reconstruire leur historique de crédit, puis à accéder à des prêts plus importants et à plus long terme ainsi qu’à d’autres formes de financement. Ainsi, en 2019, 14 % des adultes avaient contracté des prêts numériques à court terme au Kenya, contre seulement 9 % des adultes ayant accès à des sources traditionnelles de crédit bancaire et non bancaire (Gubbins, 2019).

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Les produits de financement contextuels et intégrés facilités par les TN, notamment via les plateformes de e-commerce et les relations de la chaîne d’approvisionnement, permettent à un plus grand nombre de types d’entreprises d’obtenir une gamme plus large d’opportunités de financement. Par exemple, les chauffeurs routiers des MPME et les exploitants de petites flottes de transport au Ghana, au Kenya, au Nigeria, au Togo et en Ouganda peuvent utiliser la plateforme africaine de logistique en ligne Kobo-360 pour accéder au financement de véhicules. La plateforme Kobo-360 souscrit des prêts de fonds de roulement en utilisant des données exclusives sur l’historique des trajets et des revenus du chauffeur ou de l’exploitant d’une petite flotte, avec une visibilité directe sur l’offre, la demande et les réservations. La plateforme fournit également un aperçu d’une part importante des flux de trésorerie des exploitants de flottes de camions, offrant également la possibilité d’automatiser les remboursements de prêts (Amosun et Unger, 2020 ; Maylie, 2020).

Avec l’élargissement du recours à des systèmes numériques de commande, d’inventaire et de paiement, à la numérisation des processus de la chaîne d’approvisionnement de bout en bout, et à l’établissement des historiques des petits emprunteurs et des instruments de la chaîne d’approvisionnement, les actifs de créances pourront être consolidés et transférés, de sorte que les financements pourront passer des bilans d’entreprises aux bilans bancaires, aux marchés des capitaux ou à d’autres véhicules d’investissement.

Garanties de crédit, subventions et autres soutiens

Les garanties partielles de crédit constituent un outil d’amélioration du crédit qui peut inciter les prêteurs privés à offrir plus de crédit pour le financement à haut risque de l’adoption et la génération de technologies. En cas de défaillance de l’emprunteur, elles permettent aux prêteurs de se tourner vers le garant, absorbant ainsi une partie de leurs pertes tout en rehaussant leur tolérance au risque, laquelle est généralement insuffisante d’un point de vue social étant donné les externalités sociales positives associées à l’adoption et à la génération de technologies.42 Les garants sont généralement des gouvernements ou des bailleurs de fonds, bien qu’il existe des garanties privées comme l’assurance-crédit pour le financement du commerce. Le passif éventuel est direct lorsque les garanties sont émises et administrées par le gouvernement central, et indirect lorsque les garanties passent par des entités publiques indépendantes, comme au Maroc.

Les programmes de soutien doivent être financièrement viables et conçus de manière à profiter aux entreprises bien gérées qui nécessitent un soutien.43 Les TN peuvent également être utiles ici en facilitant la collecte et l’analyse de données pour surveiller et évaluer en toute transparence la performance des garanties de crédit. Les gouvernements peuvent fixer un plafond pour les emprunteurs éligibles et d’autres critères d’éligibilité ciblés afin que les rares ressources soient concentrées sur les investissements des petites entreprises dans l’adoption et la génération de technologies. Les gouvernements peuvent également fixer des primes de garantie appropriées pour empêcher les emprunteurs d’utiliser cet instrument de manière excessive.

Les subventions et les bons de contrepartie pour l’acquisition de nouvelles technologies et les services de conseil pour l’acquisition des compétences et des capacités nécessaires, ainsi que les subventions de R&D pour la génération et l’adoption de technologies, sont généralement les instruments les plus courants.44 Comme le soulignent Cirera et Maloney (2017), la diffusion des technologies dans les pays à revenu faible ou intermédiaire représente une externalité aux proportions historiques justifiant fortement les subventions :

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à long terme, les améliorations de la productivité peuvent représenter la moitié de la croissance du produit intérieur brut (PIB) (Easterly et Levine, 2001), l’adoption de technologies en constituant une part non négligeable. Cependant, dans la pratique, l’impact des subventions de contrepartie et des fonds non remboursables sur la productivité est mitigé, bien que l’intensité des activités de R&D ait généralement augmenté.

Les subventions à la R&D peuvent contribuer à stimuler les investissements en R&D des start-ups et des entreprises en croissance, à favoriser l’activité entrepreneuriale et à améliorer la productivité des PME, mais les données probantes sont encore rares dans ce domaine, comme en attestent les données provenant des pays à revenu faible et intermédiaire sur le financement des risques à un stade précoce pour les start-ups (Cin, Kim et Vonortas, 2017). Les programmes axés sur la productivité et la croissance des entreprises, quelle que soit leur taille, et qui ont touché des PME en croissance et exportatrices qui investissent dans les TN ont généralement produit des résultats plus positifs. Certains programmes semblent ne générer un impact que sur l’innovation des jeunes entreprises incapables de réaliser les investissements nécessaires, contrairement aux entreprises plus anciennes qui utilisent les subventions pour remplacer les investissements privés qu’elles prévoyaient déjà de réaliser.45

Amélioration de l’infrastructure de crédit et de la réglementation

L’amélioration de l’infrastructure de crédit constitue un élément essentiel du cadre réglementaire du secteur financier. Elle permet un meilleur accès au financement pour l’adoption et la génération de technologies. En particulier, les politiques du secteur privé axées sur le marché et visant à réduire les asymétries d’information par la mise en place et l’amélioration de la couverture des bureaux de crédit et la réforme des régimes de transactions sécurisés peuvent avoir un impact important sur la stimulation de la productivité et de la croissance des entreprises. L’amélioration de l’accès au crédit par une meilleure couverture des bureaux de crédit a un impact positif substantiel sur la productivité du travail et la croissance de l’emploi dans les PME (Ghassibe, Appendino et Mahmoudi, 2019).

L’élargissement de l’éventail des actifs acceptés en garantie par la modernisation des cadres juridiques des transactions garanties et l’introduction de registres numérisés des actifs mobiliers, notamment en tirant parti des technologies de registres distribués, permet aux prêteurs de trouver des recours efficaces lorsque des garanties matérielles ne sont pas disponibles.46 Dans les pays qui ont introduit des régimes et des registres d’actifs mobiliers, le nombre d’entreprises accédant au financement a augmenté de 10 % en moyenne, les taux d’intérêt ont baissé, et les durées ont été prolongées, en particulier pour les entreprises plus petites et plus jeunes (Love, Martinez Pería et Singh, 2016).

Plus généralement, les cadres de réglementation et de supervision du secteur financier devront être mis à jour, tant pour soutenir l’innovation dans l’utilisation des TN et des données associées que pour protéger les besoins et les intérêts des clients. À titre d’exemple, les fournisseurs de prêts à court terme et de faible valeur basés sur des applications au Kenya ont opéré en dehors du périmètre réglementaire entre 2016 et 2019. Bien que l’accès à des services financiers soit passé de 0,6 % à 8,3 % des adultes, de nombreux comportements irresponsables ont été observés (CBK, 2019).

Les régulateurs peuvent bénéficier d’une meilleure information numérique et expérimenter la conception de meilleures réglementations en utilisant des centres d’innovation réglementaires et des « bacs à sable » réglementaires. Les régulateurs et superviseurs financiers peuvent également tirer parti des TN pour améliorer la surveillance du marché,

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faire respecter les normes de conduite sur le marché et les normes de protection des consommateurs, et répondre plus efficacement aux plaintes (Banque mondiale, 2021a). Notons que les cadres de données doivent garantir la transparence et la responsabilité algorithmiques afin de réduire les risques de biais définitifs dans les modèles de décision de l’IA. Ainsi, si un ensemble de données n’inclut pas de statistiques sur les performances des prêts des microentreprises rurales gérées par des propriétaires-dirigeants peu instruits, par exemple, un algorithme pourrait continuer à exclure ce segment ou attribuer la performance du prêt à des caractéristiques de prêt non représentatives du bassin plus large de demandeurs.

Dans le domaine de la protection des consommateurs, la sensibilisation, les connaissances et les compétences des utilisateurs en matière de produits et de services financiers peuvent les aider à éviter des risques tels que le surendettement, la fraude et les abus de cybersécurité.47 Les gouvernements doivent fournir d’autres méthodes d’apprentissage complémentaires en proposant des messages d’éducation financière simples, exploitables et accessibles via les canaux numériques. Enfin, un renforcement de la collaboration régionale entre les régulateurs et les superviseurs financiers nationaux est essentielle pour promouvoir et gérer les dimensions transfrontalières et intersectorielles croissantes des services financiers.

Une conception adaptée pour des politiques et des institutions efficaces

Promotion de la concurrence sur le marché

Pour renforcer l’efficacité des politiques et des institutions, un premier principe consiste à s’assurer que les politiques sur l’environnement des affaires favorisent la concurrence et le fonctionnement efficace des marchés tout en facilitant l’ajustement économique et social associé. Une concurrence équitable sur les marchés stimule la productivité nécessaire à la survie de l’entreprise (Aghion, Antonin et Bunel, 2021 ; Syverson, 2011).

Dans un environnement dynamique, la productivité est renforcée par l’adoption de meilleures technologies et la génération de nouvelles technologies plus appropriées. En offrant aux meilleurs fournisseurs des rétributions pour l’investissement dans de meilleures technologies, les marchés concurrentiels fournissent des incitations complètes à adopter ce comportement dynamique. En n’empêchant pas les entreprises d’entrer sur les marchés, de rivaliser entre elles et de se développer pour répondre aux besoins des clients, une concurrence non faussée par l’octroi de rentes à des entreprises privilégiées garantit que les clients seront servis par les fournisseurs les plus aptes à innover et que les demandes seront satisfaites au coût le plus bas possible.

Il est donc largement reconnu que la concurrence sur le marché élimine l’inefficacité, encourage la productivité et le progrès technologique, et profite de manière générale à la société en fournissant une combinaison de biens et services (a) dont les qualités et les attributs sont adaptés à la demande des consommateurs, et (b) dont la fourniture consomme le moins de ressources possible.48 La concurrence rentabilise également le développement de la production des entreprises et de l’emploi en stimulant les gains de productivité induits par l’innovation.

Les politiques visant à promouvoir la concurrence sur le marché peuvent favoriser le renforcement de la protection juridique de la liberté commerciale, des droits de propriété et des contrats afin de préserver les avantages liés à l’innovation productive. Elles impliquent également la suppression des politiques qui limitent le démarrage et la croissance des entreprises (ainsi que leur fermeture si l’exécution d’un plan d’affaires n’est

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pas rentable). Dans l’ensemble, ces stratégies englobent l’introduction d’une politique de concurrence plus active du côté de l’offre, en mettant l’accent sur l’égalité d’accès aux services commerciaux essentiels et aux autres intrants locaux nécessaires, et notamment ceux qui sont vulnérables à la monopolisation et à la saisie.49

Coordination du soutien complémentaire

Pour renforcer l’efficacité des politiques et des institutions, un deuxième principe réside dans la coordination des activités de soutien complémentaires. Cette coordination comprend le regroupement de l’adoption de TN et de technologies complémentaires, l’acquisition des compétences et des capacités nécessaires, et un soutien financier pour surmonter les obstacles à l’adoption tout en renforçant la coordination entre les entités de soutien public et entre le gouvernement et les entreprises. Il est nécessaire de mettre en place une coordination entre les différents organismes gouvernementaux et privés, par exemple, pour les investissements publics dans des plateformes numériques qui fournissent une cartographie spatiale, y compris des adresses numériques pour tous les sites géographiques, la géolocalisation des registres fonciers et la cartographie météorologique locale, afin que ces éléments soient disponibles sous forme d’un ensemble de biens publics de ressources communes.

Il est possible de faciliter la coordination et de renforcer l’impact des politiques publiques en ancrant les programmes de soutien public dans les chaînes de valeur verticales du secteur où les problèmes de coordination public-privé peuvent être résolus par le biais de groupes de travail ciblés et spécifiques au secteur, soutenus par un plan d’exécution ponctuel et une unité de mise en œuvre efficace. Ces programmes de soutien à la chaîne de valeur verticale du secteur, comme pour des produits agricoles spécifiques, devront se concentrer sur la résolution des problèmes de coordination qui surgissent. Les programmes de soutien public des pays africains (pour la vulgarisation technologique et l’amélioration des capacités des entreprises en termes d’accès aux marchés nationaux et d’exportation, pour la promotion de la création d’entreprises et de l’innovation, pour l’accès au financement, et pour le développement et la mise à l’échelle de solutions numériques dans ces domaines) pourraient tirer profit de cet ancrage dans ces chaînes de valeur.

Une production efficace, en plus des investissements privés dans l’adoption de meilleures technologies, nécessite souvent des intrants publics spécifiques, notamment des lois, des réglementations et des permis spécifiques au secteur ; des compétences spécifiques au secteur, des pratiques de travail, des normes de qualité et des accréditations ; et des infrastructures spécifiques au secteur et au site, avec le financement associé. Ces intrants publics constituent une forme d’externalité de coordination positive, qui profite à toutes les entreprises du secteur. Des intrants sont souvent nécessaires dans des ensembles spécifiques à la chaîne de valeur et aux besoins de certains types de producteurs, tels qu’une combinaison de technologie, de formation professionnelle, de financement, d’assurance et d’accès aux marchés pour les exploitations agricoles dans des chaînes de valeur horticoles spécifiques (encadré 2.3).

Contestabilité fondée sur des preuves

Pour renforcer l’efficacité des politiques et des institutions, le troisième principe de conception réside dans la contestabilité des politiques fondée sur des donnees probantes. Les politiques doivent être conçues avec un cadre logique explicite et adéquat, indiquant l’identification des défaillances du marché auxquelles chaque politique cherche à

104 Afrique numérique

ENCADRÉ 2.3

Intrants publics visant à renforcer les chaînes de valeur au Sénégal, au Kenya et au Pérou

Regroupement des intrants au Sénégal et au Kenya

Un essai contrôlé randomisé (ECR) examine la mesure dans laquelle un nouvel accord contractuel affecte la chaîne de valeur de l’arachide au Sénégal. En partenariat avec deux coopératives agricoles du bassin arachidier du Sénégal, Deutschmann, Bernard et Yameogo (2022) ont proposé de manière aléatoire à des micro-exploitants agricoles de 40 villages un contrat offrant un regroupement de crédits pour acheter :

• Une technologie d’amélioration de la qualité, en particulier le produit de lutte biologique

Aflasafe SN-01, un nouveau traitement des cultures visant à empêcher l’aflatoxine de se développer sur les cultures (produit soumis à l’approbation réglementaire et mis sur le marché en 2019) ;

• Une formation sur l’utilisation de la technologie ; et

• Un accès au marché, sous forme d’une bonification garantie conditionnée à une certification de qualité.

L’effet moyen du traitement était de 79 points de pourcentage (avec une participation de 89 % dans les villages où les agriculteurs ont reçu l’offre de contrat, contre 10 % dans les villages témoins). Les agriculteurs des zones à haut risque étaient 49 % plus susceptibles de se conformer aux normes internationales les plus strictes. Et les agriculteurs ayant appliqué le traitement ont augmenté les ventes totales de leur production à la coopérative d’environ 65 %.

Une étude connexe menée dans l’ouest du Kenya examine l’impact sur les petits exploitants agricoles du programme du Fonds One Acre qui regroupe les compétences et la technologie (formation sur les pratiques agricoles améliorées), le financement (prêts d’intrants) et l’assurance-récolte. L’assouplissement de plusieurs contraintes de productivité dans ces zones a simultanément entraîné des augmentations statistiquement et économiquement significatives de 26 % de la production de maïs et de 16 % des bénéfices (Deutschmann et coll., 2021).

Coordination du soutien à la chaîne de valeur verticale et horizontale au Pérou

Les intrants groupés ne sont généralement pas suffisamment disponibles sur les marchés privés en l’absence d’intervention gouvernementale dans l’intérêt public au sens large. Leur absence peut empêcher une croissance de la productivité, tandis que leur présence peut l’améliorer. L’exemple des « mesas ejecutivas » (ME, ou « bureaux exécutifs » en français) du Pérou démontre bien que ces problèmes de coordination public-privé peuvent être résolus. Les ME sont des groupes de travail public-privé visant à identifier et supprimer des goulots d’étranglement spécifiques et à ajouter les intrants publics manquants.

Entre décembre 2014 et mai 2016, le ministère péruvien de la Production a créé huit ME : six ME sectoriels ou verticaux (foresterie, aquaculture, industries créatives, textile, gastronomie et exportations agricoles, dans cet ordre chronologique) ; et deux ME intersectoriels ou horizontaux (logistique et entrepreneuriat à fort impact).

Le gouvernement a contribué à gérer des intrants publics spécifiques identifiés, tels que l’aide à la mise en conformité aux exigences techniques pour les nouveaux marchés d’exportation ou à la conception d’un programme de formation sectoriel spécifique, mais il n’a pas fourni d’exonérations fiscales ni de crédits subventionnés. Par exemple, le ME forestier a obtenu une coordination entre différentes entités publiques dans les ministères de tutelle et différents niveaux de gouvernement pour résoudre des goulots d’étranglement spécifiques, identifiés conjointement, de type bien public.

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(suite)

ENCADRÉ 2.3

Intrants publics visant à renforcer les chaînes de valeur au Sénégal, au Kenya et au Pérou (suite)

Les réalisations du ME forestier comprenaient les éléments suivants :a

• Une nouvelle loi et une nouvelle réglementation reconnaissant les plantations d’arbres comme des cultures, supprimant l’exigence de permis pour extraire le bois des plantations, et réduisant d’un an à trois jours le délai d’enregistrement des actifs de plantation

• Un nouveau protocole comprenant la même norme pour les ressources en bois aux niveaux national, infranational et local

• Un processus lancé par des investisseurs et des entreprises de reboisement afin d’établir, pour la première fois, une association qui représente leurs intérêts

• Des investissements au Pérou par certains des plus grands fonds forestiers mondiaux.

Pour une mise en œuvre efficace de ce soutien, un plan d’action limité dans le temps convenu au sein de la chaîne de valeur peut s’avérer décisif, avec des objectifs clairs qui peuvent être suivis sur un tableau de bord facile à surveiller par une unité de mise en œuvre efficace.b

a. Voir Ghezzi (2017), qui souligne trois conditions principales préalables à la réussite d’un ME : (a) un secteur privé capable et intéressé par la résolution des problèmes ; (b) un secteur public désireux de participer et capable de fournir des résultats ; et (c) un facilitateur très haut placé dans le gouvernement et capable d’induire la coopération entre les différentes parties prenantes, de résoudre les différends, de promulguer des réglementations et d’allouer le budget requis.

b. Voir Sabel et Jordan (2015) pour un examen détaillé de l’Unité de gestion de la performance et de mise en œuvre (PEMANDU). Il s’agit d’une innovation institutionnelle pour l’élaboration, le suivi et la révision de plans de réforme ambitieux impliquant une coordination entre acteurs publics et privés et entre entités gouvernementales. Les objectifs sont traduits en indicateurs de performance clés (IPC). Les progrès sont suivis dans un cycle régulier de réunions entre les différents départements, agences et (parfois) entités du secteur privé ou de la société civile. Ce suivi permet de révéler des problèmes de coordination ou des failles dans les objectifs initiaux, d’en diagnostiquer les causes et de concentrer ses efforts sur des solutions. Si les participants accumulent des informations ou se retrouvent dans une impasse, les différends sont « renvoyés » devant des organes d’examen de niveau supérieur. Si l’impasse persiste, le contrôle de la situation passe aux autorités supérieures, avec des résultats qui risquent d’aggraver la situation de tous les participants. Cette démarche inflige ce que les auteurs appellent une « pénalité par défaut » et incite ainsi à éviter les impasses.

remédier et les impacts attendus, sur la base d’une projection des avantages attendus par rapport aux coûts. Pour que l’évaluation soit efficace, il est essentiel que chaque politique soit assortie d’un objectif clair et transparent. Le public doit être informé de la mesure dans laquelle les politiques parviennent à atteindre leur objectif et connaître leur coût. Cela doit constituer une contribution essentielle aux examens des dépenses publiques (EDP) périodiques qui évaluent les programmes publics soutenant l’adoption et la génération de technologies pour, entre autres raisons, faciliter la réaffectation des ressources budgétaires limitées à des politiques de soutien aux entreprises plus efficaces ou à d’autres priorités présentant un intérêt public supérieur.

La conception des politiques et des programmes de soutien devrait idéalement inclure des évaluations avant leur mise en œuvre pour permettre d’allouer sans contraintes des ressources aux programmes qui s’avèreront les plus efficaces et les plus rentables. Ces évaluations devraient inclure une analyse de l’incidence sur le revenu des divers programmes pour comprendre la mesure dans laquelle des politiques et des programmes spécifiques profitent aux personnes à faible revenu. Des politiques efficaces nécessitent des processus de conception et de mise en œuvre solides, assortis de mécanismes d’apprentissage intégrés afin de faciliter l’amélioration continue des programmes existants à la lumière des informations recueillies. La conception de cadres et de processus

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institutionnels efficaces devrait inclure des examens d’évaluation périodiques ainsi que la création de départements d’évaluation spécialisés au sein des ministères de tutelle mandatés pour évaluer leur portefeuille d’instruments.

Incitations compatibles avec le marché

Enfin, des politiques efficaces de soutien aux entreprises doivent, dans la mesure du possible, recourir à des incitations compatibles avec le marché. Dans les cas où une politique publique est nécessaire pour remédier à une défaillance du marché, notamment des programmes de formation et de mise à niveau technologique, l’utilisation d’incitations compatibles avec le marché peut conduire à une meilleure allocation des ressources. Par exemple, les coûts marginaux des politiques de conseil aux entreprises, des politiques de vulgarisation, de formation et de soutien technologique devraient être payés par les bénéficiaires, par le biais, entre autres, de subventions de contrepartie, même si c’est à travers des contributions en nature aux bénéficiaires à très faible revenu. Et comme on le voit pour certains programmes de formation (O’Connell et Mation, 2021), lorsque le secteur privé est impliqué dans la conception des priorités de formation, le programme affiche de meilleurs résultats.50 Les subventions de contrepartie, les dialogues public-privé et les analyses comparatives en contrepartie de la fourniture de données de l’entreprise constituent d’autres exemples d’incitations compatibles avec le marché (encadré 2.4).

ENCADRÉ 2.4

Un programme de création d’emplois au Sénégal : Une conception efficace pour la transformation technologique

Le programme d’accélération de la compétitivité et de la création d’emplois du Sénégal est axé sur l’amélioration de la compétitivité du secteur privé grâce à la mise à niveau technologique des entreprises pour la productivité et la génération de bons emplois. Il vise à atteindre cet objectif grâce à des interventions sur trois niveaux :

• Au niveau de l’entreprise : en soutenant l’accès à la technologie et aux capacités avec des subventions de contrepartie complétées par un accès au financement par le biais de garanties de crédit partielles et d’investissements en actions

• Au niveau de la chaîne de valeur : en remédiant aux défaillances du marché tout au long de chaînes de valeur spécifiques, notamment en fournissant des biens dits « de club »

• Au niveau de l’ensemble de l’économie : en soutenant les services d’infrastructure publique complémentaires insuffisamment disponibles.

Le programme quadriennal constitue également un sous-ensemble du pilier « Transformation économique et croissance » du Plan d’actions prioritaires ajusté et accéléré (PAP2A) du Plan Sénégal Émergent (PSE) du gouvernement sénégalais.

À la base, le programme vise à promouvoir la transformation technologique pour l’emploi en accordant des subventions de contrepartie aux micro, petites et moyennes entreprises (MPME) pour faciliter l’adoption de technologies, stimuler la productivité et développer la production et les emplois. Au niveau de l’entreprise, les subventions publiques de contrepartie visent à soutenir l’adoption de technologies et de capacités numériques et complémentaires liées aux fonctions générales de l’entreprise (pratiques de gestion, y compris la comptabilité, le marketing, les paiements et le contrôle qualité), ainsi que des fonctions sectorielles dans certaines chaînes de valeur (par exemple, les systèmes d’irrigation modernes et la logistique post-récolte pour l’horticulture et d’autres produits

Entreprises 107
(suite)

ENCADRÉ 2.4

Un programme de création d’emplois au Sénégal : Une conception efficace pour la transformation technologique (suite) agricoles, la fabrication de certains produits pharmaceutiques, la vente au détail, le tourisme et les services numériques). Un guichet spécial est dédié aux microentreprises, y compris informelles.

Au niveau de la chaîne de valeur, un Groupe de travail sur la compétitivité mènera des dialogues public-privé pour remédier aux réglementations inappropriées ou manquantes ainsi qu’à des goulots d’étranglement spécifiques à certaines chaînes de valeur dans l’accès au marché et la coordination (figure B2.4.1). Le programme vise en parallèle à remédier aux contraintes de financement auxquelles sont confrontées les MPME dans le cadre de l’acquisition de technologies. Les mécanismes comprennent un système de garantie partielle de crédit avec partage des risques pour le secteur bancaire afin de faciliter l’accès au crédit, ainsi qu’un fonds pour les petites et moyennes entreprises (PME) afin de fournir directement des fonds propres et des quasi-fonds propres aux PME en croissance éligibles. Le programme soutient également la structuration de projets de partenariat public-privé qui fournissent des biens publics complémentaires pour des chaînes de valeur spécifiques ainsi que des services d’infrastructure à l’échelle de l’économie.

Enfin, l’indice de l’enquête sur l’adoption de technologies au niveau de l’entreprise (FAT) sera utilisé avant et après les interventions du programme pour mesurer à la fois l’étendue et l’intensité de l’utilisation des technologies suite à la participation au programme. Les entreprises bénéficiaires rempliront chacune un questionnaire FAT dans le cadre de la sélection initiale. Cela permettra aux entreprises de se comparer à des entreprises similaires dans leur secteur et qui ont la même taille. Cela facilitera également la conception de services pertinents de conseil aux entreprises et de vulgarisation technologique.

FIGURE B2.4.1 Coordination des mécanismes de soutien complémentaire adaptés aux chaînes de valeur spécifiques

Moteurs de la chaîne de valeur

AgroalimentairePharmaceutique

Accès à la technologie et aux capacités

Facilitateurs

Accès au financement

Commerce de détail

Tourisme

Numérique

Environnement des a aires, y compris les biens publics

Source : Banque mondiale, 2021b.

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Notes

1. Les données de l’étude FAT utilisées dans ce rapport ont été collectées de 2019 à 2021 dans les pays suivants : données 2021 au Ghana (1 262 observations) ; données 2020 au Kenya (1 305 obs.) ; données 2019-2020 au Malawi (482 obs.) ; données 2019 au Sénégal (1 786 obs.) ; données 2019 au Ceará, l’un des États les plus pauvres de la région nord-est du Brésil (711 obs.) ; et données 2019 au Vietnam (1 499 obs.). Les données collectées au Sénégal permettent de distinguer les entreprises formelles et informelles, avec 78 % d’entreprises identifiées comme informelles (selon la définition, elles n’utilisent pas de système comptable réglementaire). L’État Ceará au Brésil et le Vietnam ont été sélectionnés comme pays pairs, car les données relatives aux mesures d’adoption de ces nouvelles technologies n’étaient disponibles que dans ces pays au moment de la rédaction de ce rapport. Le Ceará compte environ 9 millions d’habitants et se classait dans la moitié inférieure des États brésiliens en termes de revenu par habitant (18e sur 27) en 2019, selon l’Institut brésilien de géographie et de statistiques (IBGE). Voir Cirera, Comin et Cruz (2022).

2. Le travail du RIA définit les entreprises formelles comme les entreprises légalement inscrites (a) au registre national général ou auprès des autorités fiscales du pays ; (b) auprès de l’autorité locale ou de la commune ; (c) les deux. Les entreprises informelles ne sont pas du tout enregistrées. L’étude du RIA porte sur 3 325 observations de 2017 à 2018. Bien que le RIA couvre également le Rwanda et l’Ouganda, le manque de données suffisantes sur des variables importantes n’a pas permis d’inclure ces pays dans cette étude.

3. La productivité des entreprises est mesurée par la valeur ajoutée nominale en dollars US divisée par le nombre d’employés. Cette relation tient compte des effets fixes par pays, d’autres variables observées au niveau des entreprises et indicateurs fictifs pour les 12 secteurs pour lesquels des technologies spécifiques sont disponibles.

4. Par exemple, une entreprise africaine moyenne dont l’indice de sophistication technologique progresse de 2 à 3 est associée à une augmentation de la productivité d’environ 1 point log, passant de 13 à près de 14, tandis que la même progression de 2 à 3 pour une entreprise moyenne (sur la base des données disponibles des 10 pays) est associée à une augmentation de productivité inférieure à 0,5 point log, passant de 10 à moins de 10,5.

5. Il est important de prendre en compte le coût immédiat d’une modernisation technologique en amont, élément qui doit être comparé aux avantages potentiels en termes de gains de productivité et d’emplois en réponse à une éventuelle augmentation de la demande du marché.

6. Le Sénégal est le seul pays pour lequel il a été possible d’obtenir un échantillon représentatif d’entreprises informelles. L’entreprise « moyenne » au Ghana, au Malawi, au Brésil et au Vietnam désigne donc une moyenne de toutes les entreprises formelles, tandis que la moyenne au Sénégal inclut à la fois des entreprises formelles et informelles. Ces associations avec le niveau de productivité tiennent compte de la taille de l’entreprise à la fin de la période de l’étude, du statut administratif, du secteur et de la région. Se reporter aux références spécifiques par pays de Cirera, Comin et Cruz (2022).

7. Bien que cette estimation ponctuelle de la corrélation entre l’utilisation des technologies et l’augmentation du nombre d’emplois soit supérieure pour les entreprises informelles (par rapport aux entreprises formelles) au Sénégal (12 % contre 10 %), l’erreur type plus élevée pour les entreprises informelles indique que cette estimation de 12 % n’est pas très différente statistiquement de zéro au niveau de confiance de 5 %.

8. Ces associations avec la croissance de l’emploi tiennent compte de la taille initiale des entreprises, de l’âge des entreprises, du statut administratif, du secteur et de la région ainsi que de leur caractère multinational et de leur statut en matière d’exportation. La part des directeurs généraux et des gestionnaires, des professionnels et des techniciens dans l’effectif total sert de référence pour les travailleurs plus qualifiés, tandis que la part des assistants, de la production et des travailleurs du secteur tertiaire sert de référence pour les travailleurs moins qualifiés. La différence dans la part de travailleurs plus qualifiés entre 2016 et 2018 sert de variable dépendante. (Voir les rapports de l’étude FAT spécifique par pays de Cirera, Comin et Cruz 2022.)

9. Ces estimations sont basées sur les régressions au niveau national sur les données résumées par Cirera, Comin et Cruz (2022, figures 4.6 et 4.8).

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10. Le fait de savoir si les propriétaires sont des entrepreneurs « transformationnels » est une référence sur leurs aptitudes inhérentes à l’entrepreneuriat productif, d’après leurs réponses à la question de l’étude du RIA « Quelle est la principale raison pour laquelle vous avez créé votre entreprise ? ». Ces entrepreneurs transformationnels sont des propriétaires qui ont répondu « Ma propre entreprise me rémunère plus que si j’étais salarié ». Cette réponse suggère qu’ils ont choisi d’être entrepreneurs car la possession d’une entreprise offre l’opportunité de réaliser des profits. Les autres entrepreneurs (de subsistance) ont répondu soit « Pour compléter mon salaire » ou « Sans cela, je n’avais pas d’emploi ». Ces réponses suggèrent que l’entrepreneuriat est une nécessité ou un choix de subsistance pour compléter ses revenus ou parce qu’aucun emploi salarié plus intéressant n’était disponible.

11. Les grandes entreprises informelles en Afrique de l’Ouest sont différentes des entreprises formelles et des petites entreprises informelles. Elles tendent à opérer dans l’import-export, le commerce de gros et de détail, le transport et la construction. Ce sont généralement à l’origine de petits opérateurs dotés d’une éducation de base qui finissent par agrandir leur entreprise grâce à des capacités et des efforts entrepreneuriaux supérieurs, avec l’aide de groupes commerciaux ethniques et religieux. Souvent, une seule personne y contrôle la plupart des GBF. Voir Benjamin et Mbaye (2012).

12. Les 20 premiers pays du monde en termes de densité d’entreprises numériques sont, par ordre décroissant, le Kenya, les États-Unis, l’Estonie, Israël, le Royaume-Uni, l’Inde, le Rwanda, la Nouvelle-Zélande, la Finlande, Singapour, la Suède, le Canada, l’Ouganda, le Cambodge, l’Islande, l’Afrique du Sud, le Ghana, le Pakistan, la Chine et la Bulgarie (selon la base de données Digital Business 2020 du Pôle mondial d’expertise Finance, compétitivité et innovation de la Banque mondiale).

13. Le sous-secteur des télécommunications inclut, sans s’y limiter, les fournisseurs de services de télécommunications, les développeurs d’infrastructures de télécommunications et les services de connectivité à internet, aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises.

14. Tandis que les fournisseurs de solutions numériques dans les secteurs des télécommunications, de la FinTech et des technologies de la logistique soutiennent directement l’amélioration de la productivité des entreprises, le commerce électronique permet à toutes les entreprises de s’approvisionner et de vendre plus efficacement, et même de trouver les meilleures combinaisons. En principe, les technologies de la santé aident l’ensemble des travailleurs, employés, gestionnaires et propriétaires d’entreprises à rester en bonne santé, à prévenir les maladies et à être plus productifs.

15. Concernant l’adoption, l’écart entre les pays d’Afrique subsaharienne et d’autres pays à revenu faible et intermédiaire en termes d’accélération de l’utilisation des TN par les petites entreprises (42,8 % contre 48,7 %) et l’écart de 20,5 % entre les petites et les grandes entreprises en Afrique subsaharienne sont les deux comparaisons qui présentent une différence majeure statistiquement significative (à un niveau de confiance de 1 %).

16. Concernant les investissements, l’écart entre l’Afrique subsaharienne et d’autres pays parmi les petites entreprises (19,0 % contre 23.6 %), les entreprises de taille intermédiaire (28,2 % contre 33,0 %) et les grandes entreprises (38,7 % contre 48,4 %), ainsi que l’écart de 19,7 % entre les petites et les grandes entreprises en Afrique subsaharienne constituent des différences importantes statistiquement significatives (au niveau de confiance de 1 %).

17. La catégorie Professionnel du Play Store de Google inclut des applications de visioconférence et de collaboration comme Zoom, Microsoft Teams et Google Hangout, ainsi que des applications de célèbres plateformes de livraison à domicile (par exemple, Uber et DoorDash), de recherche d’emploi, d’ERP qui aident à rationaliser certaines opérations de l’activité, dont la paie, l’approvisionnement, la comptabilité, etc.

18. Une estimation distincte de l’effet causal de l’adoption de TN supplémentaires sur les variations des ventes en utilisant l’appariement avec le voisin le plus proche donne un effet total de 6,9 points de pourcentage (Comin et coll. 2022).

19. Pour un examen de la littérature théorique et empirique sur l’adoption et la diffusion des technologies, voir Cirera, Comin et Cruz (2022), chapitre 6. Pour les facteurs d’adoption des TN, y compris celles qui ont des effets de réseau (comme les plateformes numériques), voir

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Cusolito (2021). Le retard numérique des petites et moyennes entreprises dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est attribué à des facteurs similaires, bien qu’avec une importance relative différente, notamment l’insuffisance de capital et l’absence d’actifs complémentaires (capacité à payer), le manque d’information et de sensibilisation, et les lacunes en matière de compétences (volonté d’utilisation). Voir OCDE (2021) et les références qui y figurent.

20. La part des microentreprises citant le manque de disponibilité d’internet correspond à peu près à la moyenne de 29 % des personnes qui n’avaient pas de couverture 3G+ en 2018 dans les pays d’Afrique subsaharienne (Atiyas et Dutz 2023). On peut s’attendre à ce que la proportion d’entreprises qui manquent de disponibilité (20 %) soit plus faible dans le cadre de l’enquête du RIA, étant donné que les zones de dénombrement échantillonnées pour les microentreprises se sont largement concentrées sur les zones résidentielles où la couverture est censée être plus élevée. Pour une explication plus détaillée des zones de dénombrement dans les données de l’enquête RIA, voir Mothobi, Gillwald et Aguera (2020).

21. Étant donné que les éléments de l’environnement des affaires varient largement selon les pays (les données ne sont pas disponibles pour explorer les effets différentiels de l’environnement des affaires entre les régions d’un même pays), ils sont pris en compte par les effets fixes du pays et il n’est pas possible de les distinguer des autres effets au niveau du pays.

22. Les résultats rapportés sont des effets marginaux basés sur des régressions logit ou probit multinomiales sur les caractéristiques des entreprises, en tenant compte des effets fixes du pays. L’adoption du smartphone est modélisée comme une régression logit multinomiale avec le choix de l’entreprise pouvant être soit smartphone, soit téléphone 2G ou 2,5G (sans fonctionnalité internet complète) ou pas de téléphone, tandis que l’adoption de l’ordinateur est modélisée comme un simple choix entre oui et non. Les pays de l’enquête FAT comprennent le Ghana, le Kenya et le Sénégal, tandis que les pays de l’enquête RIA comprennent l’Afrique du Sud, le Ghana, le Kenya, le Mozambique, le Nigeria, le Rwanda, le Sénégal et la Tanzanie. Les résultats sont limités aux associations statistiquement significatives et ne permettent pas de tirer des conclusions sur la causalité.

23. L’enquête FAT n’a pas posé de questions sur l’utilisation de l’électricité au Ghana. Dans la spécification rapportée, il a été supposé que toutes les entreprises du Ghana ont accès à l’électricité.

24. Les corrélats pour les microentreprises sont beaucoup plus faibles que pour les grandes entreprises en raison des niveaux moyens de scolarité beaucoup plus bas chez les gestionnaires de microentreprises par rapport à ceux des grandes entreprises.

25. D’après les résultats de l’enquête FAT, la sophistication technologique est systématiquement plus élevée pour chaque pays dans le secteur agricole par rapport à l’industrie manufacturière et aux services, comme le résume l’indice moyen de sophistication de l’entreprise dans toutes les GBF et les SBF du secteur particulier. Voir Cirera, Comin et Cruz (2022), figure 2.3.

26. Le fait que les entreprises formelles employant 5 travailleurs ou plus soient 22,7 % plus susceptibles que les entreprises informelles d’utiliser des ordinateurs est la corrélation conditionnelle la plus importante parmi toutes les variables. Cette comparaison est en grande partie relative aux entreprises informelles du Sénégal, définies comme celles qui n’utilisent pas les systèmes de comptabilité agréés nécessaires aux entreprises formelles pour leurs déclarations de revenus. La part des entreprises informelles dans l’échantillon du Ghana et du Kenya est négligeable.

27. En cas de multipropriété, l’entreprise est considérée comme appartenant à des femmes si au moins 50 % des propriétaires sont de sexe féminin.

28. L’identification causale est basée sur la distance entre l’entreprise et le nœud central utilisé comme variable instrumentale. La distance par rapport au nœud central est un facteur prédictif de l’accès à internet. On suppose en outre que la distance par rapport au nœud central n’affecte l’adoption de la technologie que par le biais de l’internet. Toutes les spécifications contrôlent les effets fixes de la région et du secteur, ainsi que les caractéristiques des entreprises.

29. Pour un guide pratique à l’intention des décideurs des pays à revenu faible et intermédiaire afin de mieux formuler les politiques d’innovation, notamment pour l’adoption et la génération de

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technologies, voir Cirera et coll. (2020). On y trouve une typologie rigoureuse des instruments de politique d’innovation, notamment les types de capacités institutionnelles nécessaires aux pouvoirs publics pour mettre en œuvre de manière efficace ces outils stratégiques dans les pays en développement, ainsi que des preuves des effets des politiques.

30. Des informations plus détaillées sur les questions abordées dans cette sous-section sont fournies par Cirera, Comin et Cruz (2022), chapitre 7 (sur les politiques visant à accélérer l’adoption des technologies).

31. Les programmes de mise à niveau numérique examinés, notamment pour accroître la participation des entreprises aux plateformes numériques, proviennent du Chili, de Corée du Sud, du Danemark, d’Espagne, de Malaisie, du Royaume-Uni et de Singapour.

32. Dans les pays de l’OCDE, l’utilisation de programmes de services de développement technologique financés par les pouvoirs publics et ciblant les PME s’est développée au cours des dernières décennies. Pour l’OCDE, voir l’encadré 1.6 et le tableau 1.4.

33. L’un des réseaux de centres technologiques les plus connus est la société Fraunhofer en Allemagne, qui compte 69 centres de recherche appliquée collaborant étroitement avec le secteur et avec d’autres parties du secteur de la recherche. Le réseau est associé à la diffusion des technologies de l’industrie 4.0. Il a été démontré qu’une augmentation de 1 % des dépenses se traduit par une hausse de 1,4 point de pourcentage du chiffre d’affaires et de 0,7 point de pourcentage de la productivité (Comin et coll. 2019).

34. Selon Acemoglu et Restrepo (2021), 50 à 70 % de la dynamique négative de la structure des salaires aux États-Unis entre 1980 et 2016 est due aux technologies d’automatisation. Cette dynamique est en grande partie vécue par les travailleurs spécialisés dans les tâches routinières des secteurs en cours d’automatisation, avec un remplacement plus rapide des emplois existants par rapport à une réintégration plus lente des nouveaux emplois, et avec de nouvelles tâches bien plus intensives en compétences. Les effets négatifs sur les salaires sont concentrés dans les sept déciles inférieurs de la distribution des salaires, ce qui aggrave les inégalités. L’« automatisation excessive », qui remplace la main-d’œuvre sans créer suffisamment de nouvelles tâches et sans réaliser de gains de productivité significatifs (l’impact sur la productivité totale des facteurs [PTF] pouvant même être négatif), est due à la concurrence mondiale, à des modèles commerciaux liés à la taille croissante des grandes entreprises technologiques, à des institutions du marché du travail qui ne défendent pas suffisamment les intérêts des travailleurs et à des subventions nettes accordées au capital physique (en grande partie par le biais du système fiscal).

35. Il serait judicieux d’approfondir la question de savoir si les compétences numériques de base (utiliser un smartphone, naviguer sur internet, télécharger des applications et les utiliser) doivent être enseignées séparément avant la mise en pratique, ou si l’utilisation des smartphones et des applications spécifiques associées peut être conçue pour être facile et intuitive au point de permettre aux utilisateurs d’apprendre au fur et à mesure de leur utilisation, si elles sont suffisamment attrayantes et permettent un usage productif.

36. Les enseignements positifs tirés des énergies renouvelables montrent qu’une réorientation importante du changement technologique est possible, si elle est appuyée par des subventions, un cadre de mesure et des changements dans les normes sociales et les pressions de la société (Acemoglu 2021a).

37. On parle d’« enveloppement » lorsqu’une plateforme numérique (privée) pénètre un autre marché en acquérant une entreprise et en combinant ses propres fonctionnalités et données avec celles de la cible.

38. Cette sous-section utilise et s’inspire du cadre et des exemples du chapitre 4 du Rapport sur le développement dans le monde 2022 de la Banque mondiale consacré au financement des entreprises (Banque mondiale, 2022).

39. Le nombre de comptes d’argent mobile en Afrique subsaharienne a dépassé les 500 millions en 2020 (GSMA, 2021).

40. Voir Gambacorta et coll. (2019) et Huang et coll. (2020) sur l’expérience récente de MYbank, une banque en ligne au service des MPME en Chine créée par Ant Group (filiale du groupe Alibaba, anciennement Ant Financial Services Group et Alipay). La souscription de crédit de MYbank

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utilise les techniques d’apprentissage automatique pour intégrer les données de paiement et de transaction avec d’autres données émanant des plateformes de commerce électronique du groupe Alibaba et des services financiers d’Alipay. Environ 80 % des clients de MYbank comptent moins de 10 employés et la plupart d’entre eux disposent d’un accès limité ou nul au financement des banques traditionnelles. MYbank a indiqué dans une interview s’appuyer sur l’imagerie satellite pour estimer la production agricole des micro et petits agriculteurs.

41. Pour obtenir de plus amples détails sur les régimes d’open banking, voir Plaitakis et Staschen (2020).

42. Les systèmes de garantie de crédit ont été largement utilisés par les gouvernements des pays à revenu élevé et de plusieurs pays à revenu faible et intermédiaire pour répondre à l’environnement à haut risque de la COVID-19. En 2020, les systèmes publics de garantie de crédit représentaient environ 2 % du produit intérieur brut (PIB) mondial (Calice, 2020). En Espagne, par exemple, ces systèmes ont amélioré l’accès au financement des MPME et imposé une charge budgétaire plus réduite par rapport aux subventions gouvernementales ou aux prêts directs (Corredera-Catalán, di Pietro et Trujillo-Ponce, 2021).

43. Les principes visant à guider le bon fonctionnement des garanties publiques partielles de crédit comprennent la réduction de l’ingérence politique, l’encouragement de la participation privée, et le maintien d’un certain niveau de prise de risque par les prêteurs (Banque mondiale et FIRST Initiative, 2015).

44. Voir OCDE (2021), tableau 1.4, pour une liste d’initiatives de soutien financier comprenant des subventions, des bons, et des subventions financières directes pour la préparation de stratégies numériques et le renforcement de l’adoption et de l’utilisation des TN, y compris les services en nuage, le e-commerce et le télétravail dans une série de pays, dont l’Argentine, le Chili, la Colombie, Israël, la Hongrie, le Japon, la Corée, la Malaisie, la Slovénie et la Turquie. Voir OCDE (2021), tableau 1.5, pour les programmes de développement des compétences ; tableau 1.6 pour la gouvernance et la protection des données dans les PME ; et tableau 1.8 pour l’administration en ligne et les services en ligne pour les PME.

45. Voir les exemples fournis dans la sous-section « Innovation, R&D et adoption de technologies de renforcement de la productivité » dans Banque mondiale (2021c). Howell (2017) a constaté qu’en Chine, les subventions basées sur la production pour la modernisation technologique amélioraient l’intensité de l’innovation, mais pas la productivité. Cela peut signifier qu’un financement spécifique de la génération et de l’adoption de technologies (plutôt que de la production générale) fournira de meilleurs résultats.

46. Les registres de garantie modernes, y compris les registres des actifs mobiliers, peuvent bénéficier de l’utilisation de TN telles que les technologies de registres distribués (également appelées chaînes de blocs), qui permettent aux prêteurs de mieux suivre l’emplacement de la garantie, de surveiller son utilisation et de la désactiver afin d’exiger le remboursement (Banque mondiale, 2020).

47. Selon des enquêtes récentes, plus de 50 % des utilisateurs de services financiers numériques au Kenya et au Nigeria ont été victimes de fraude ou de tentative de fraude depuis le début de la pandémie de COVID-19 (Blackmon, Mazer et Warren, 2021).

48. La concurrence des importations chinoises a augmenté le nombre de dépôts de brevets, l’adoption des technologies de l’information (TI) et la productivité jusqu’à 30 % de l’augmentation totale en Europe à la fin des années 1990 et au début des années 2000 (Bloom, Draca et Van Reenen, 2016).

49. Voir Dutz, Ordover et Willig (2000) sur la nécessité que les politiques publiques favorisent l’entrepreneuriat productif en protégeant la liberté commerciale, les droits de propriété et les contrats, en empêchant la saisie et en permettant l’accès aux services commerciaux essentiels et aux autres intrants locaux nécessaires. Cela inclut un accès équitable aux données et à la connectivité (technologies de l’information et de la communication [TIC], transport et logistique), l’électricité et les services financiers, les sites de production et les marchés fonciers connexes, les services professionnels aux entreprises, la main-d’œuvre qualifiée et les infrastructures institutionnelles nécessaires.

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50. O’Connell et Mation (2021) montrent que le volet informé par les employeurs du programme national de formation professionnelle du Brésil a presque doublé l’effet à court terme sur les emplois et les revenus des stagiaires par rapport au programme traditionnel. Les effets accrus sur l’emploi dans le cadre du programme informé par les employeurs proviennent du fait que les stagiaires trouvent un emploi dans des grandes entreprises à forte croissance situées dans des municipalités à faible croissance. Les résultats indiquent qu’une contribution limitée et structurée du secteur privé semble améliorer l’alignement entre les compétences fournies en formation et la demande de compétences.

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116 Afrique numérique

CHAPITRE 3

Ménages

Promouvoir

L’utilisation d’internet par les ménages est faible, inégale, mais en progression

Les technologies numériques (TN) peuvent aider les États africains à faire progresser leurs efforts de réduction de la pauvreté et d’inclusion, à condition que davantage d’innovations dans les solutions numériques s’attaquent aux contraintes auxquelles les pauvres sont confrontés dans l’utilisation productive des TN. Comme le montre le chapitre 1, l’utilisation d’internet est généralement déficiente dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, et encore plus en Afrique subsaharienne.1 Deux facteurs principaux la limitent dans la région. Premièrement, une combinaison de contraintes de marché et de réglementations inefficaces restreint l’offre d’infrastructures numériques de qualité a un prix abordable. Deuxièmement, et plus important encore, la demande de services internet et des technologies numériques (TN) offertes sur internet est faible, dans les marges aussi bien extensive qu’intensive. Ces facteurs sont à l’origine des trois écarts liés à l’utilisation globale d’internet (Banque mondiale, 2021b) :

1. Écart de disponibilité : manque d’accès à internet dû à un manque d’infrastructures ;

2. Écart d’adoption : faible demande (ou adoption) de services internet même lorsque ceux-ci sont disponibles (marge extensive) ;

3. Écart de consommation : faible usage ou demande de données, même parmi ceux qui sont connectés à des services internet (marge intensive).

Le chapitre 4 traite du premier écart – l’écart de disponibilité – et des défis de l’infrastructure numérique en Afrique subsaharienne. Le présent chapitre se concentre plutôt sur les écarts d’adoption et de consommation chez les ménages et les individus du continent, en mettant l’accent sur la façon dont l’adoption et l’usage d’internet peuvent leur être bénéfiques à de multiples égards : réduction des prix des biens et des services, augmentation de la productivité et amélioration des possibilités d’emploi. Avec seulement 22 % de la population connectée à l’internet mobile à haut débit et un écart d’adoption d’internet de 74 % (Atiyas et Dutz, 2022), l’Afrique subsaharienne pourrait tripler l’utilisation d’internet à 75 % sans aucune expansion de l’infrastructure. Cela indique que le principal défi est la faible adoption des services internet, même lorsque l’infrastructure est disponible.

117
l’utilisation productive des TN pour un impact économique inclusif

Utilisation croissante avec des écarts grandissants entre les sous-régions africaines

L’utilisation des services internet et des TN basées sur internet par les particuliers a considérablement augmenté en Afrique subsaharienne au cours des vingt dernières années (pour atteindre 33 % en 2020), mais cette augmentation a été plus rapide en Afrique de l’Ouest et centrale qu’en Afrique de l’Est et australe, creusant ainsi l’écart d’utilisation entre ces sous-régions (figure 3.1) qui est passé de 0,8 point de pourcentage en 2010 à 8 points de pourcentage en 2020.

L’examen des quatre régions de l’Afrique subsaharienne révèle des différences encore plus importantes. Du plus bas au plus élevé, 19 % de la population de l’Afrique centrale a utilisé internet en 2020, 20 % en Afrique de l’Est, 29 % en Afrique de l’Ouest et 30 % en Afrique australe (figure 3.2).

L’Afrique de l’Est affiche l’écart d’adoption le plus élevé (59 %), soit 10 points de pourcentage de plus que l’Afrique australe (la région présentant le deuxième plus grand écart d’adoption), bien que la couverture de l’infrastructure numérique soit la même dans les deux régions. Ces énormes différences d’écart d’adoption sont sans doute principalement dues aux différences d’accessibilité financière d’internet entre les pays des régions. Le plus faible taux d’adoption se retrouve dans des pays très peuplés tels que la République démocratique du Congo, l’Éthiopie et la Tanzanie (comme nous le verrons plus en détail dans la section 3).

Écarts au sein des sous-régions africaines

Au sein de chaque sous-région de l’Afrique subsaharienne, l’utilisation d’internet varie selon les pays. Par exemple, le taux de pénétration d’internet relativement élevé en Afrique australe est principalement dû à l’Afrique du Sud et au Lesotho (figure 3.3).2

Selon l’enquête 2017-2018 auprès des ménages, l’Afrique du Sud comptait 53 % de la population utilisant internet, suivie du Lesotho avec 32 %. L’utilisation d’internet était

Source : Banque mondiale, à partir des données de la base de données des Indicateurs du développement dans le monde.

Note : L’« utilisation » d’internet est définie comme la part de la population totale utilisant internet, indépendamment de la couverture internet. Les sous-régions suivent les définitions de la Banque mondiale.

118 Afrique numérique
FIGURE 3.1 Utilisation d’internet en Afrique subsaharienne et par sous-région, 2000–2020
Part de la population utilisant internet (%) Afrique orientale et australe Afrique occidentale et centrale Afrique subsaharienne 0 5 10 15 20 25 30 35 40 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020

FIGURE 3.2 Couverture, écarts de couverture et écarts d’utilisation de l’internet haut débit sans fil en Afrique subsaharienne, par région, 2020

Source : Global System for Mobile Communications Association (GSMA) Intelligence, données de 2020, https:// www.gsmaintelligence.com/data/.

Note : L’« internet haut débit sans fil » fait référence aux connexions internet mobiles de troisième et quatrième générations (3G et 4G). L’« utilisation » d’internet est définie comme la part de la population totale utilisant internet, indépendamment de la couverture internet. Les sous-régions suivent les définitions de la Banque

FIGURE 3.3 Utilisation d’internet dans 10 pays d’Afrique subsaharienne, 2008, 2012 et 2018

Source : Données de l’enquête After Access de Research ICT Africa (RIA), 2008, 2012 et 2018, adaptées de Gillwald et Mothobi (2019), figure 10.

Note : Les chiffres ne comprennent ni les données de 2008 pour l’Afrique du Sud ni celles de 2012 pour le Lesotho et le Sénégal, car ces pays n’étaient pas inclus dans les enquêtes After Access de l’AIR pour ces années. Ils excluent également les pays d’Afrique centrale en raison de l’absence de données comparables. L’« utilisation » d’internet est définie comme la part de la population totale utilisant internet, indépendamment de la couverture internet.

Ménages 119
33 49 18 31 49 20 22 66 12 21 44 35 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Afrique australeAfrique occidentaleAfrique orientaleAfrique centrale Part de la population (%) Connecté Écart d’utilisation Écart de couverture
mondiale.
2008 2012 2018 55 Utilisation d’internet (%) 15 26 27 32 1 11 10 13 18 29 2 6 9 10 31 34 53 15 2 3 14 2 8 14 28 13 6 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 Ghana Kenya Leosotho Mozambique Nigeria Rwanda SénégalAfriqueduSud Tanzanie Ouganda 0

généralement faible en Afrique de l’Est, allant de 9 % au Rwanda à 27 % au Kenya. En Afrique de l’Ouest, en revanche, le Sénégal, le Nigeria et le Ghana avaient des taux d’utilisation d’internet relativement élevés : 31 %, 29 % et 28 %, respectivement.

Écarts au sein des pays africains

Les différences d’utilisation d’internet observées au sein de l’Afrique subsaharienne existent également au sein des pays et s’expliquent par plusieurs facteurs socioéconomiques. Il existe également des différences d’accès à internet au sein des pays selon plusieurs dimensions (Atiyas et Doganoglu, 2022 ; Rodríguez-Castelán et coll., 2021) :

Revenu. Les déciles de revenus élevés sont plus connectés à internet que les déciles de revenus inférieurs. Dans 9 pays d’Afrique subsaharienne étudiés, le taux d’utilisation d’internet chez les 10 % de la population situés au sommet de l’échelle des revenus est presque 4 fois plus élevé que chez les 40 % les plus bas (figure 3.4). En Afrique du Sud, Gillwald et Mothobi (2019) constatent que tous les ménages de la tranche de revenu supérieure utilisent internet, tandis qu’aucun ménage de la tranche de revenu inférieure ne l’utilise.

Zone de résidence. La population est deux fois plus connectée à internet dans les zones urbaines que dans les zones rurales. En Afrique subsaharienne, l’utilisation de l’internet mobile en milieu rural s’élevait en 2019 à 16 %, contre 40 % en milieu urbain, ce qui

FIGURE 3.4 Corrélation entre le revenu des ménages et l’adoption des services mobiles et de l’internet mobile à haut débit dans certains pays d’Afrique subsaharienne, par décile de revenu, 2017–2018

Source : Adapté d’Atiyas et Doganoglu (2022), sur la base des enquêtes After Access 2017-2018 auprès des ménages et individuelles par pays de Research ICT Africa (RIA).

Note : L’« adoption » d’internet est définie comme la part de la population totale utilisant internet par rapport à la population ayant une couverture internet. Les « services mobiles » comprennent les appels vocaux, les services de messages courts (SMS) et les connexions internet mobiles (2G, 3G et 4G), tandis que l’« internet mobile à haut débit » fait référence aux connexions internet de troisième et quatrième générations (3G et 4G). Les enquêtes ont porté sur neuf pays d’Afrique subsaharienne : Afrique du Sud, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal et Tanzanie (12 450 observations). Les déciles de revenu répartissent la distribution des revenus des ménages (pour l’ensemble de l’échantillon de pays) en 10 parties égales ; chaque décile de revenu représente un pourcentage des ménages (de 10 % au décile 1 à 100 % au décile 10) dont le revenu est égal ou inférieur à ce décile. Le revenu des ménages est exprimé en dollars US corrigés par la parité de pouvoir d’achat (PPA) ; l’indice est obtenu à partir de la base de données des Indicateurs du développement dans le monde.

120 Afrique numérique
100 Adoption (%) 80 60 40 20 0 1 23 45 Décile de revenu des ménages 67 89 10 Services internet Services mobiles

implique que les habitants des zones rurales sont 60 % moins susceptibles d’utiliser internet que leurs homologues urbains (Bahia et Delaporte, 2020).

Âge. L’utilisation d’internet est plus élevée chez les jeunes (15 à 34 ans) que chez les personnes plus âgées (35 à 55 ans et plus) (Gillwald et Mothobi, 2019).

Éducation. Il existe des disparités dans l’utilisation d’internet entre les personnes ayant un niveau d’études plus élevé en général (secondaire et plus) et celles qui n’ont pas (ou moins) d’éducation (primaire ou moins) (Gillwald et Mothobi, 2019).

Sexe. Enfin, les hommes ont un accès à l’internet mobile à haut débit plus élevé que les femmes. Seuls 6 % des ménages dirigés par des femmes disposent d’une connexion internet active, contre 10 % des ménages dirigés par des hommes (Mothobi et Gillwald, 2021). En outre, parmi les propriétaires d’un smartphone, 17 % des hommes et 11 % des femmes avaient utilisé internet au moins une fois par jour en 2017 (Atiyas et Doganoglu, 2022).

Cet écart d’accès à internet entre les sexes a peu bougé. En 2020, les femmes étaient 37 % moins susceptibles que les hommes d’utiliser internet (figure 3.5). Les disparités entre les sexes en matière de scolarisation, de revenus, d’emploi et d’autres services complémentaires, tels que l’accès à l’électricité, peuvent expliquent ce large écart d’utilisation d’internet entre les sexes (Atiyas et Doganoglu, 2022). En outre, dans certains pays, des raisons culturelles peuvent entraver l’utilisation des téléphones et empêcher ainsi l’accès à l’internet mobile à haut débit, même lorsque ces services sont disponibles.

FIGURE 3.5 Écart d’utilisation de l’internet mobile entre les sexes dans l’ensemble des pays à revenu faible et intermédiaire et par région, 2017–2020

Tous les PRFIAsie de l’Est et Pacifique Europe et Asie centrale

Source : Delaporte et Bahia 2021.

Moyen-Orient et Afrique du Nord

Amérique latine et Caraïbes

Asie du SudAfrique subsaharienne

Note : L’« écart entre les sexes » indique dans quelle mesure une femme est moins susceptible d’utiliser l’internet mobile qu’un homme. La figure présente les résultats de l’enquête et les données modélisées pour les adultes de 18 ans et plus. PRFI = pays à revenu faible ou intermédiaire (selon la classification des revenus de la Banque mondiale).

Ménages 121
5 5 4 4 67 58 50 36 37 38 37 36 18 17 17 19 6 2 1 2 5 4 3 3 25 22 19 15 0
2017 2018201920202017 2018201920202017 2018201920202017 2018201920202017 2018201920202017 2018201920202017 201820192020 10 20 30 Différence entre l'utilisation des hommes et femmes (%) 40 50 60 70

Écarts d’usage entre l’Afrique et les autres régions

Même parmi les personnes connectées à internet, la consommation de données est plus faible en Afrique subsaharienne que dans les autres régions du monde. La figure 3.6 montre ces inégalités de consommation des données mobiles ainsi que l’écart de consommation par rapport aux références d’utilisation des données de base et étendue du Rapport sur le développement dans le monde 2021 (Banque mondiale, 2021b).

Quelle quantité de données mobiles est-elle suffisante pour répondre aux besoins des individus ? Chen et Minges (2021) estiment que 660 mégaoctets (Mo) par mois et par habitant constituent un forfait de données adéquat pour répondre aux besoins et services de base tels que la gouvernance en ligne, les achats en ligne, la consultation des actualités, les informations éducatives, etc.3 Toutefois, ils reconnaissent qu’un tel forfait ne serait pas suffisant pour qu’un individu passe ne serait-ce qu’une heure par jour sur les médias sociaux (Chen et Minges, 2021). C’est pourquoi un forfait mensuel de données de 1,5 Go, estimé par l’Union internationale des télécommunications (UIT), a été adopté pour les besoins de base dans la figure 3.6.

Chen et Minges (2021) ont également calculé qu’un forfait élargi – permettant à une personne de satisfaire ses besoins et services de données de base, plus d’autres services de divertissement tels que la navigation sur les médias sociaux et le streaming vidéo – nécessiterait un minimum de 6 Go par mois et par habitant (voir également la figure 3.6).4 La figure montre que la consommation de données mobiles en Afrique subsaharienne est inférieure de près de 80 % à celle requise pour répondre aux besoins de base quotidiens et ne représente que 5 % du forfait de données minimum nécessaire pour une utilisation élargie.

Moyen-OrientetAfriqueduNord EuropeetAsiecentraleAmériqueduNord Asiedel’EstetPacifique AmériquelatineetCaraïbes AsieduSud Afrique subsaharienne

Source : adapté de Banque mondiale (2021b), figure 5.6.

Note : Données pour 2018. Le forfait de données « pour les besoins de base » fait référence au 1,5 gigaoctet (Go) de données mensuelles par habitant, suffisant pour répondre aux besoins et services de base (estimé par l’Union internationale des télécommunications). Le forfait de données « étendu » correspond aux 6 Go de données mensuelles permettant de répondre aux besoins et aux services de données de base, plus d’autres services de divertissement tels que la navigation sur les médias sociaux et la diffusion de vidéos en continu (estimation de Chen et Minges, 2021). L’« Amérique du Nord » comprend les Bermudes, le Canada et les États-Unis.

122 Afrique numérique
FIGURE 3.6 Consommation de données mobiles par habitant, par région, 2018
7,4 8 Consommation de données (Go par habitant et par mois) 6 4 2 1,5 0
5,0 4,5 4,2
Forfait de données pour les besoins de base 2,4 1,1 0,3
Forfait de données élargi

En outre, la consommation de données dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord est presque 25 fois plus élevée que celle de l’Afrique subsaharienne, tandis que l’Asie du Sud est environ 3,7 fois plus importante.

Écarts d’utilisation par niveau de revenu des pays

L’utilisation d’internet est faible en Afrique subsaharienne, en particulier dans les pays à faible revenu. Cette faible utilisation par rapport au reste du monde (RdM), déjà soulignée dans le chapitre 1 (figure 1.10, panneau a), ne résulte pas uniquement de niveaux de revenus plus bas, mais aussi d’autres facteurs jouant un rôle important.

La figure 3.7 montre l’utilisation d’internet en fonction du niveau de développement des pays représenté par le revenu national brut (RNB) par habitant. Elle montre que la plupart des pays d’Afrique subsaharienne sont regroupés dans la zone des pays à faible revenu et faible utilisation d’internet (quadrant inférieur gauche). Toutefois, pour les pays à revenu moyen de la tranche inférieure (se situant entre 7 et 8 unités logarithmiques ou un RNB par habitant compris entre 1 096 et 2 981 dollars US), l’utilisation d’internet dans un pays typique d’Afrique subsaharienne est inférieure à celle d’autres pays ayant le même niveau de développement.

En outre, à mesure que la région se développe, l’utilisation d’internet ne semble pas y rattraper son retard. L’écart d’utilisation d’internet entre l’Afrique subsaharienne et le reste du monde demeure constant jusqu’à ce que le RNB par habitant dépasse 9,7 unités logarithmiques (soit environ 16 318 dollars US). Cela suggère que, en

FIGURE 3.7 Corrélation entre l’utilisation d’internet et le RNB par habitant en Afrique subsaharienne et dans le reste du monde, 2019

Reste du monde

(dollars US)

ajustée du RdM

ajustée de l’Afrique subsaharienne

Source : Représentation utilisant les données 2019 de la base de données des indicateurs du développement mondial.

Note : RNB = revenu national brut ; RdM = reste du monde.

Ménages 123
Angola Burundi Bénin Burkina Faso Botswana République centrafricaine Côte d’Ivoire Cameroun République démocratique du Congo Cabo Verde Éthiopie Gabon Ghana Gambie Kenya Libéria Lesotho Mali Maurice Malawi Namibie Nigeria Rwanda São Tomé et Príncipe Seychelles Tchad Togo Tanzanie Ouganda Afrique du Sud Zambie 0 20 40 Part de la population utilisant internet (%) 60 80 100 06 78 log RNB par
9101112 Guinée Zimbabwe Guinée-Bissau Sierra Leone Mozambique Soudan Sénégal Mauritanie
habitant
Afrique subsaharienne Valeur
Valeur

l’absence d’intervention, l’Afrique subsaharienne pourrait atteindre l’accès universel à internet à un niveau de revenu plus élevé que le RdM. En d’autres termes, l’Afrique subsaharienne pourrait prendre plus de temps pour atteindre l’objectif d’accès universel. Comme le souligne le chapitre 1 (figure 1.10, panneau b), l’Afrique subsaharienne a un taux d’utilisation d’internet de 22 % et un écart d’adoption d’environ 74 %.

L’Afrique subsaharienne pourrait ainsi tripler l’utilisation d’internet en s’attaquant aux contraintes liées à la demande et à l’offre sans devoir étendre la couverture. Plus loin, la section sur les « Contraintes à l’utilisation par les ménages » analyse ces facteurs de plus près.

Paradoxe de la COVID-19 : Une utilisation accrue d’internet, mais des fractures numériques plus larges

La pandémie de COVID-19 et le confinement qu’elle a entraîné ont modifié les contraintes rencontrées par les ménages dans l’utilisation d’internet, dont l’accès est devenu presque indispensable, accroissant ainsi les incitations à l’adoption. En même temps, la crise a réduit le revenu moyen des ménages et rendu internet inabordable pour la plupart des gens. L’impact global de la COVID-19 sur l’adoption et l’utilisation d’internet dépend donc des tensions entre le besoin accru et l’accessibilité financière.

Incitations à l’adoption

Bien que l’accès à internet soit déjà considéré comme un besoin fondamental par les personnes à revenu élevé et la plupart des résidents urbains ayant un emploi formel, la pandémie en a fait une nécessité pour les ménages pauvres et ruraux, et ce pour plusieurs raisons :

• Les restrictions dues à la COVID-19 ont intensifié l’utilisation des TN pour maintenir une communication efficace avec les membres de la famille et les amis.

• Pendant le confinement, les gens devaient passer par internet pour accéder aux services publics tels que l’éducation.

• De nombreuses entreprises ont été contraintes d’adopter des politiques de travail à domicile facilitées par les applications de productivité et de vidéoconférence.

• La pandémie a suscité un renouveau du gouvernement électronique. Plusieurs États, même parmi ceux peu présents sur le web en Afrique, ont de plus en plus adopté les médias sociaux (Facebook, Twitter, WhatsApp, etc.) pour communiquer des informations de santé publique (Bosman, 2021 ; Chen et Minges, 2021). Cette évolution est susceptible d’accroître le contenu local sur internet ainsi que son adoption et usage.

Une autre retombée positive potentielle de cette adoption accrue est l’émergence de nouveaux types d’emplois. Même si la covid-19 a stimulé la croissance du commerce électronique dans la région, la plupart des pays ont peu de chances d’exploiter ce potentiel, car ils ne disposent pas des infrastructures complémentaires nécessaires. La Chine a délibérément élargi l’accès à internet à des fins productives pour de nombreux habitants des zones rurales (voir l’encadré 3.1, plus loin dans ce chapitre). Les pays du monde entier ont fait des choix de politiques similaires pour étendre l’électrification rurale et l’accès à d’autres services clés d’infrastructure.

124 Afrique numérique

Contraintes à l’adoption

De nombreux ménages ont perdu une part importante de leurs revenus de manière temporaire ou permanente en raison de la fermeture temporaire ou permanente d’entreprises (Wieser et coll., 2021 ; Banque mondiale, 2021a). À la suite de la pandémie, les entreprises ont souvent préféré réduire les heures de travail et les salaires ou mettre les employés au chômage technique plutôt que les licencier (figure 3.8).

Malgré cela, les travailleurs d’Afrique subsaharienne ont davantage souffert que ceux des pays à faible revenu des autres régions et des pays à revenu élevé. Les entreprises de l’Afrique subsaharienne sont plus susceptibles de réduire les heures de travail et les salaires que celles des pays des autres régions. Par exemple, la probabilité de réduction des heures de travail des employés est de 39 % pour les entreprises d’Afrique subsaharienne – une probabilité supérieure de 12 points de pourcentage à celle des entreprises des autres pays à revenu non élevé et de 22 points dans les pays à revenu élevé.

En outre, entre 56 % et 87 % des ménages d’Afrique subsaharienne ont subi une baisse de leurs revenus pendant la pandémie de COVID-19 (Egger et coll., 2021). L’impact est probablement concentré sur les pauvres et les travailleurs du secteur informel. En Éthiopie, par exemple, 80 % des personnes qui n’avaient pas les moyens d’acheter de la nourriture après le début de la pandémie ont cité la baisse de leurs revenus comme principale raison (Wieser et coll., 2021).

Les retombées de la COVID-19 ont également contribué à la hausse des prix des denrées alimentaires (Egger et coll., 2021). Les pauvres dépensent davantage pour les produits alimentaires de base. Les pauvres consacrent, en conséquence, une part encore plus importante de leurs revenus à l’alimentation de base, ce qui restreint la demande d’internet malgré l’importance accrue de son utilisation chez les pauvres (figure 3.9).

FIGURE 3.8 Probabilité d’ajustement de l’emploi pendant la pandémie de COVID-19 par les entreprises d’Afrique subsaharienne et d’ailleurs (par groupe de revenu), 2020/2021

Afrique subsaharienne Revenu non élevé (hors Afrique subsaharienne)

Revenus élevés (hors Afrique subsaharienne)

Source : COVID-BPS (Business Pulse Surveys), Banque mondiale.

Note : Les enquêtes auprès des entreprises employant cinq travailleurs à temps plein ou plus ont été mises en œuvre de septembre 2020 à février 2021. Le graphique présente les probabilités moyennes ajustées issues des régressions probit prenant en compte la région, la taille et le secteur, ainsi que le moment de l’enquête. Les régions prises en compte dans les régressions sont l’Afrique subsaharienne, les pays à revenu non élevé hors Afrique subsaharienne et les pays à revenu élevé (selon la classification des revenus de la Banque mondiale). Les barres d’erreur représentent les intervalles de confiance à 95 %.

Ménages 125
Probabilité moyenne prédite 50 40 30 20 10 0
5 21 38 31 39 7 17 38 18 27 14 22 49 14 17
Engagé Licencié Absence autorisée Salaires réduits Heures réduites

FIGURE 3.9 Changements dans les dépenses des ménages au Kenya et en Sierra Leone pendant ou après l’épidémie de COVID-19

a. Dépenses alimentaires et non alimentaires, Kenya

b. Dépenses alimentaires, Sierra Leone

1 23 45 67 89 1011 12 34 56 78 91011

Dépenses alimentaires. Changement moyen = 11 % Dépenses non alimentaires. Changement moyen = –29 %

Source : Egger et coll., 2021, figure 1.

Dépenses alimentaires. Changement moyen = 6 %

Note : La figure ci-dessus montre la différence en pourcentage par rapport au niveau de référence pour les dépenses alimentaires et non alimentaires dans les zones rurales du Kenya et de la Sierra Leone pendant la pandémie mondiale de COVID-19 par rapport aux niveaux pré COVID-19 (c’est-à-dire avant mars 2020) ou COVID-19 précoce. Les niveaux pré COVID-19 sont issus de questions rappelant les données de mars. Les niveaux post COVID-19 sont issus de questions rappelant les données des 7 jours précédents et d’une combinaison (des 7 jours précédents pour les dépenses alimentaires et des 2 semaines précédentes pour les dépenses non alimentaires dans le panneau a). Les semaines sur l’axe horizontal font référence au début de la période de rappel pour chaque observation plutôt qu’à la période durant laquelle les données ont été collectées.

Lorsqu’ils empruntent, les ménages le font principalement pour acheter de la nourriture (Banque mondiale, 2021a). Les résidents urbains ont été les plus touchés, en particulier les pauvres des villes (Wieser et coll., 2021).

Résultat : des fractures numériques plus larges

Il est probable que la pandémie ait creusé la fracture numérique au sein des pays d’Afrique subsaharienne et entre eux, tant pour les ménages que pour les entreprises. Au sein des pays, l’écart d’utilisation d’internet s’est potentiellement élargi selon plusieurs dimensions telles qu’entre autres, le revenu, l’éducation, le statut professionnel, le sexe, l’âge et la profession. En ce qui concerne la marge extensive, la demande d’internet dans les zones couvertes par la 3G ou la 4G a potentiellement chuté chez les pauvres et les personnes marginalement pauvres en raison du manque d’accessibilité financière. En même temps, internet devenant une nécessité, la demande est susceptible d’avoir augmenté parmi les personnes à hauts revenus et les jeunes qui n’étaient pas connectés auparavant (Saka, Eichengreen et Aksoy, 2021).

L’écart d’adoption et d’utilisation entre les sexes a également augmenté. Pendant la crise, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de perdre leur emploi ou leurs revenus (Dang et Nguyen, 2021). La baisse des dépenses non alimentaires (figure 3.9, panneau a) est par conséquent probablement plus importante chez les femmes et les ménages dirigés par des femmes que chez les hommes et les familles dirigées par des hommes.

126 Afrique numérique
40 Pourcentage de changement Pourcentage de changement –60
avril
mars
juin –40 –20 0 20 40 –60 –40 –20 0 20
Pre Pre 31 mai 19
mars 22
28

L’utilisation d’internet parmis ménages pauvres et ruraux pourrait avoir diminué, tandis que celle des ménages à revenus élevés et des jeunes peut avoir augmenté. Cela risque de creuser l’écart d’utilisation en Afrique subsaharienne. L’augmentation de la consommation de données mobiles est en grande partie due à l’utilisation accrue des médias sociaux et des vidéoconférences chez les personnes à hauts revenus. Cette interprétation est conforme aux résultats antérieurs (présentés au chapitre 1, figure 1.10, panneau b) montrant que l’écart d’adoption d’internet a légèrement augmenté en Afrique subsaharienne entre 2019 et 2021 alors qu’il diminuait dans toutes les autres régions, ce qui suggère soit que l’augmentation de l’infrastructure numérique au cours de cette période ne s’est pas accompagnée d’une augmentation de l’adoption, soit que pour un même niveau de disponibilité des infrastructures, l’utilisation a diminué.

Compréhension des contraintes des ménages à l’utilisation d’internet

Pourquoi l’adoption d’internet est-elle faible dans le grand public, et que peut-on faire pour y remédier ? Théoriquement, pour que les gens soient disposés à payer pour utiliser internet, il faut que le coût soit a la portee de leur budget et qu’ils en retirent des avantages suffisants par rapport à leurs autres besoins et désirs concurrents. Le premier point concerne l’accessibilité financière, le second les facteurs importants liés à la volonté d’utiliser, notamment l’information et les compétences.

En effet, sur la base des preuves d’impacts potentiellement importants et inclusifs observés dans de nombreux pays africains (comme indiqué au chapitre 1), les principales explications possibles de la faible utilisation d’internet peuvent être une combinaison a) d’un manque d’informations ou de connaissances sur les bénéfices de l’utilisation d’internet, et b) de contraintes de crédit – si l’utilisation d’internet s’avère rentable. Tout d’abord, les ménages peuvent ne pas disposer de suffisamment d’informations sur l’utilisation d’internet, ni d’éducation et de compétences pour internaliser pleinement l’impact potentiel de l’utilisation d’internet sur leur vie et leurs moyens de subsistance. Les compétences pour traiter l’information et celles pour sélectionner et utiliser des applications appropriées à un usage productif sont importantes dans tous les aspects du choix du consommateur. Ainsi, le relativement faible niveau moyen de l’alphabétisation et, plus largement, le faible niveau d’éducation et de compétences dans de nombreux pays pourraient rendre difficile de combler l’écart d’information et de potentiellement réduire le plein impact sur les adoptants.

Deuxièmement, même s’ils sont conscients des avantages, les appareils donnant accès à internet et les frais d’utilisation peuvent être trop chers pour leur niveau de revenu. La suppression des contraintes de crédit serait un point d’entrée clé, étant donné que l’accès et l’utilisation d’internet sont vraisemblablement rentables s’ils sont utilisés pour améliorer la productivité. De nombreux autres facteurs peuvent néanmoins affecter les ménages différemment. Cette section examine les corrélats de l’adoption d’internet et évalue un mécanisme financièrement viable permettant aux ménages, y compris à faibles revenus, d’adopter les TN, de les utiliser de manière productive, de payer pour elles et d’en bénéficier.

Déterminants directs de l’adoption pour un meilleur ciblage Comme indiqué précédemment, les taux d’adoption d’internet varient considérablement au sein des pays de l’Afrique subsaharienne et entre eux – les habitants des zones rurales, les femmes, les ménages les plus pauvres et les personnes moins instruites restant à la traîne

Ménages 127

par rapport à leurs homologues urbains, masculins, plus riches et plus éduqués. Chacun de ces schémas fournit des explications supplémentaires et des leviers de politiques pour un meilleur ciblage afin d’encourager une plus large adoption des services internet.

Résultats d’une enquête en Afrique de l’Ouest

Les dernières données des enquêtes harmonisées sur les dépenses des ménages de sept pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) mettent en évidence plusieurs déterminants directs de la faible adoption d’internet (figure 3.10) : la

FIGURE 3.10 Association des déterminants de l’utilisation d’internet dans certains pays d’Afrique de l’Ouest, 2018/2019

Dépenses parhabitant Prix TailleduménageUrbainFemme15à24ans25à40ans Faibleniveaude compétences Niveauélévéde compétencesAgricultureIndustrieServicesFrançais

Déterminants de l’adoption

Source : Rodríguez-Castelán et coll., 2021.

Note : Données issues des enquêtes harmonisées sur les dépenses des ménages de 2018/2019 dans sept pays d’Afrique de l’Ouest : Bénin, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo. Les points rouges désignent la valeur précise de l’estimation et les barres d’erreur l’intervalle de confiance de 95 %. Pour le logarithme des dépenses par habitant, le prix et la taille du ménage, les effets marginaux sont calculés sur la base d’une augmentation d’une unité de l’écart-type, équivalant respectivement à 36 400 francs CFA (65 dollars US) par habitant et par mois, et à 2 000 francs CFA (3,60 dollars US) par mois et environ quatre membres du ménage. La variable dépendante binaire est l’accès à l’internet mobile, qui fait référence aux individus accédant à internet à l’aide de leurs appareils de téléphonie mobile. Le prix est obtenu en calculant la dépense médiane des cartes de téléphonie mobile prépayées et du temps de communication ou des transferts de données chez les utilisateurs de l’internet mobile dans la zone géographique de chaque pays où l’enquête est représentative. Cette valeur est ensuite calculée en tant que part de la consommation totale au même niveau géographique pour tenir compte du coût de la vie. Cette valeur est ensuite attribuée à chaque individu observé dans les microdonnées. La variable muette de référence pour l’âge est de 41 ans et plus. La variable de base pour les catégories d’éducation est constituée des individus ayant un niveau d’études inférieur au primaire. L’« éducation de base » fait référence aux individus ayant une éducation primaire et secondaire inférieure, l’« éducation secondaire » à ceux ayant une éducation inférieure à l’éducation tertiaire, mais supérieure à l’éducation de base, et l’« éducation tertiaire » à ceux ayant une éducation tertiaire ou plus. La catégorie de base pour « français » fait référence aux langues nationales, aux autres langues et aux personnes ne sachant ni lire ni écrire. L’âge du téléphone portable est la valeur médiane pour la zone de dénombrement du temps pendant lequel le ménage a possédé l’appareil. La variable de base dans l’ensemble des secteurs du marché du travail fait référence aux inactifs et aux chômeurs. Le secteur de l’agriculture comprend les emplois dans la culture, la pêche et l’élevage. Le secteur de l’industrie comprend les emplois dans les industries extractives et autres, ainsi que dans les travaux publics et la construction. Le secteur des services comprend les emplois dans le commerce, la restauration/ hôtellerie, les transports, les communications, l’éducation, la santé, ainsi que les services à la personne et autres. Les dépenses par habitant, la taille du ménage, l’accès à l’électricité et la possession d’un ordinateur, d’une tablette ou d’un téléviseur sont des variables au niveau du ménage. Tous les résultats sont statistiquement significatifs, à l’exception de l’éducation primaire et secondaire, de l’âge médian du téléphone portable et des ménages possédant une tablette.

128 Afrique numérique
20 E ets marginaux (%)
15 10 5 0 –5 –10
AccèsàlamaisonAccèsautravail AccèsdansuncybercaféAccèsàl’école/universitéÂgedutéléphoneportable
Accèsà l’électricitéPossèdeun téléviseur Possèdeun ordinateur Possèdeune tablette

disponibilité à un prix abordable (capacité à payer) ; le prix des services mobiles et la possession d’actifs ; l’accès à l’électricité ; la localisation urbaine ; l’attractivité (autres modalités d’accès) ; et les capacités (éducation tertiaire, jeunesse, niveau en langue française, secteur d’emploi), en plus de facteurs socioéconomiques (être un homme) (Rodríguez-Castelán et coll., 2021).

Le fait que le français, l’une des langues officielles des pays de l’UEMOA, soit associé à une augmentation de la probabilité d’adoption d’internet montre que la maîtrise de la langue dans laquelle les affaires officielles sont menées est essentielle. En outre, les déterminants sont souvent interdépendants : l’effet de genre combine l’effet des écarts d’éducation et de revenus, ainsi que des normes sociales. Il subsiste toutefois de nombreux modèles inconditionnels, tels qu’une adoption plus faible chez les femmes que chez les hommes et chez les ruraux que chez les résidents urbains.

Bien que l’éducation primaire ne soit associée à aucun effet différentiel dans les résultats de l’UEMOA, un niveau d’éducation tertiaire est associé, en moyenne, à une augmentation de 15 points de pourcentage de l’adoption d’internet. L’accès à l’électricité est associé à une augmentation différentielle de 3 points de pourcentage du taux d’adoption. Cette association souligne l’importance du rôle des infrastructures complémentaires dans l’adoption de l’internet mobile. L’emploi dans le secteur des services est associé à une augmentation d’environ 5 points de pourcentage de l’adoption, tandis que le travail dans l’agriculture diminue la probabilité d’adoption de 3 points de pourcentage.

Les résultats couvrant les sept pays reflètent certaines variations observées sur le continent. Par exemple, la consommation des ménages et le sexe sont plus importants dans les pays où la pénétration d’internet est plus élevée. Au Sénégal, l’impact des dépenses des ménages par habitant est presque le double de celui du Bénin. En Côte d’Ivoire, les femmes sont plus de deux fois moins susceptibles d’adopter l’internet mobile (7 points de pourcentage) que les femmes du Niger (3 points de pourcentage). En Côte d’Ivoire, les personnes sachant lire et écrire en français – l’une des principales langues du contenu numérique de la région – sont 23 points de pourcentage plus susceptibles d’adopter le haut débit mobile, contre seulement environ 3 points de pourcentage au Niger.

Parmi tous les facteurs associés aux différences de taux d’adoption, les considérations d’accessibilité financière sont le dénominateur commun. Le prix élevé des services internet et la situation économique (représentés par les dépenses de consommation) sont les deux principaux obstacles à l’adoption du haut débit mobile. Une augmentation de la consommation des ménages – équivalente à 36 400 francs CFA (environ 65 dollars US) par habitant et par mois – est associée à une augmentation de 7 points de pourcentage de la probabilité d’adoption de l’internet mobile. De même, une diminution du prix du service internet de 2 000 francs CFA (environ 3,60 dollars US) par mois est associée à une augmentation de 2 points de pourcentage de la probabilité d’adoption.

Résultats tirés d’un échantillon interrégional

Une autre source de données couvrant neuf pays d’Afrique subsaharienne – dont les plus grands pays dotés des marchés les plus dynamiques, tels que l’Afrique du Sud, le Ghana, le Kenya, le Nigeria, l’Ouganda et la Tanzanie – met en évidence des résultats qualitativement similaires en évaluant les facteurs associés à l’adoption et à l’utilisation d’internet ou des données mobiles par les ménages (figure 3.11). L’adoption et l’utilisation de l’internet mobile (désigné comme « mobile avec données » dans la figure) sont définies comme le fait de posséder un téléphone mobile basique ou un smartphone et d’utiliser internet sur un téléphone mobile ou une tablette au moins une fois par jour.

Ménages 129

FIGURE 3.11 Corrélats de l’adoption d’internet dans neuf pays de l’Afrique subsaharienne, 2017/2018

Revenu (en milliers) Avoir un téléviseur, un réfrigérateur et/ou une voiture

Avoir l’électricité

Urbain

Femme

Années d’études

Travail

26 à 35 ans

36 à 45 ans

46 à 55 ans

56 à 65 ans

65 ans et plus Amis utilisant un mobile Données sur l’utilisation des amis

Source : Atiyas et Doganoglu (2022), sur la base des enquêtes After Access 2017-2018 auprès des ménages et individuelles par pays de Research ICT Africa (RIA).

Note : La figure présente les résultats de la régression des effets marginaux d’un modèle logit multinomial d’adoption utilisant les données d’enquête de neuf pays d’Afrique subsaharienne : Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Rwanda, Sénégal, Afrique du Sud, Tanzanie et Ouganda (12 450 observations). Les catégories d’âge sont relatives aux 1625 ans. « Années de scolarité » mesurées par le nombre d’années. Les pourcentages de changement font référence à la probabilité de changement des variables sur l’axe des y.

Les données concernent la disponibilité à un prix abordable (revenu et richesse, travail, localisation urbaine) ; l’attractivité (nombre d’amis utilisant des données) ; et les capacités (années d’études, jeunes) en plus des facteurs socioéconomiques (écarts entre les sexes). Le fait d’avoir l’électricité réduit la probabilité de ne pas avoir un téléphone mobile, mais n’est pas significativement associé à l’utilisation de services mobiles avec ou sans données. L’effet de réseau, c’est-à-dire le fait d’avoir des amis utilisant internet, augmente la valeur de l’utilisation d’internet et constitue ainsi un facteur d’attractivité supplémentaire. La probabilité d’utiliser l’internet mobile est négativement corrélée avec le nombre d’amis utilisant uniquement des téléphones mobiles 2G ou 2,5G (non compatibles avec le haut débit) et positivement corrélée avec le nombre d’amis utilisant l’internet mobile.

La faible consommation chez les personnes utilisant internet en Afrique subsaharienne est également due aux prix de détail élevés des services de données mobiles et aux contraintes techniques pesant sur la performance des réseaux, un autre ensemble important de composantes de la disponibilité à un prix abordable (figure 3.11). Une grande partie des habitants des pays de l’Afrique subsaharienne – Afrique du Sud, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal et Tanzanie –mentionnent les coûts des smartphones et des services internet comme le principal obstacle à l’utilisation de l’internet mobile à haut débit (figure 3.12) (voir également Banque mondiale, 2021b).

130 Afrique numérique
–20 0 Pourcentage 20 40
Sans mobile Mobile sans données Mobile avec données

FIGURE 3.12 Obstacles à l’utilisation d’internet dans certains pays de l’Afrique subsaharienne, 2017–2018

Coût élevé : équipement et données Pas disponible

ma région Ne sait pas comment utiliser internet

N’a pas besoin d’internet Préoccupé par la confidentialité

Source : Adapté de Gillwald et Mothobi 2019, à partir des données de l’enquête After Access de Research ICT Africa (RIA), 2017-2018.

Note : La figure présente les résultats de l’enquête, dans neuf pays d’Afrique subsaharienne, pour les répondants n’utilisant pas internet, qu’ils soient ou non couverts là où ils vivent. Certaines barres n’ont pas un total de 100 en raison de données manquantes (par exemple, certains répondants ont refusé de répondre ou ont répondu « Je ne sais pas » à la question).

Ce n’est pas une surprise, car les données mobiles en Afrique subsaharienne sont parmi les plus chères au monde – 6 des 10 pays les plus chers au monde (pour les données) et seulement 1 des 10 pays les moins chers au monde se trouvent dans la région (Howdle, 2021). Le coût d’un forfait de 1 Go atteint 4,2 % du PIB mensuel par habitant, soit deux fois plus que dans la région Asie de l’Est et Pacifique (Bahia et Suardi, 2019). La qualité des services internet n’est malheureusement pas à la hauteur des coûts. La vitesse de téléchargement d’internet par dollar US et par Go (c’est-à-dire l’indice vitesse-prix) est la plus faible en Afrique subsaharienne, principalement en raison de la faible qualité de la connexion internet (Kearney et Lipfert, 2022).

Après les coûts de l’équipement et des données mobiles, une part significative des personnes interrogées mentionne également que le principal obstacle est qu’ils « ne savent pas comment utiliser internet », un signe potentiel de leur manque de compétences. De plus, au Ghana, au Kenya et au Nigeria, une proportion relativement élevée des personnes dit qu’elle « n’a pas besoin d’internet » comme raison de ne pas l’utiliser, ce qui est potentiellement dû à une information limitée sur internet et son utilité. Il n’est donc pas surprenant que, en raison de ces facteurs, l’Afrique subsaharienne ait la consommation de données la plus faible au monde – 25 fois moindre que celle de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Banque mondiale, 2021b, figure 5.6). Par conséquent, s’attaquer à l’accessibilité financière, en général, devrait considérablement réduire l’écart d’utilisation, comblant ainsi le fossé entre les riches et les pauvres et améliorant la qualité de l’internet mobile, entre autres déterminants (Bahia et Suardi, 2019).

Ménages 131
0 Mozambique 75 3 2 146 0 55 51 44 43 39 39 34 27 15 24 17 735 75 231 27 25 5 4 10 18 615 1 1 16 19 1 11 19 6 4 13 29 0 25 4 3 1 15 77 5 0 Sénégal Afrique du Sud Ouganda Rwanda Ghana Kenya Nigeria Lesotho 20 40 Part des répondants (en pourcentage) Raison de ne pas utiliser internet (%) 60 80 100
dans
sécurité
accès
ailleurs
et la
A
à internet

Résultats quantitatifs globaux pour les déterminants de l’adoption

L’importance de l’accessibilité financière de l’utilisation d’internet est également illustrée par la figure 3.13, qui présente une évaluation de l’importance quantitative relative des différents déterminants associés à l’utilisation unique de l’internet mobile dans l’ensemble des pays disponibles au niveau mondial. Toutes les variables ont été normalisées et les effets marginaux des variables sont indiqués, montrant la variation en écarts-types de l’adoption de l’internet mobile lorsque chacune des variables associées augmente d’un écart-type. Du point de vue quantitatif, la variable la plus importante associée à l’adoption d’internet est le PIB par habitant en tant que variable de remplacement de l’accessibilité financière moyenne par les ménages : une augmentation de 1’écart-type du PIB par habitant est associée à une augmentation de 0,64 de l’écart-type de l’adoption de l’internet mobile.

Cette constatation est conforme au caractère central de l’accessibilité financière pour l’utilisation de l’internet mobile par les ménages. Viennent ensuite, en importance relative, a) les niveaux d’instruction nationaux (nombre moyen d’années d’études ajusté aux scores aux tests harmonisés en tant qu’indicateur de qualité) comme variable de remplacement des capacités, et b) l’accès à l’électricité (en pourcentage de la population totale). Dans le cas des capacités, une augmentation d’un écart-type des années d’études ajustées à l’apprentissage est associée à une augmentation de 0,25 écart-type de l’adoption de l’internet mobile. Une augmentation de 1’écart-type de l’accès à l’électricité est associée à une augmentation de 0,16 écart-type de l’adoption de l’internet mobile.

PIB par habitant, en PPA constant

Corrélats de l’utilisation d’internet

Années d’études ajustées à l’apprentissage

Accès à l’électricité (% de la population)

Prix, données et voix faibles, PPA

Part des 10 % les plus élevés des revenus

Indice IHH (données TeleG) –2020

Effets marginaux moyens

Source : Atiyas et Dutz (2022).

Note : L’« utilisation » d’internet fait référence à un ménage ou à un individu utilisant internet. Les résultats sont basés sur une seule année (2018) de données nationales comparables dans 137 pays couvrant toutes les régions et tous les niveaux de revenus. Les points désignent la valeur précise de l’estimation et les barres d’erreur l’intervalle de confiance de 95 %. Basé sur une régression couvrant 2018 et utilisant des variables normalisées, égales à la valeur originale moins la moyenne divisée par l’écart-type. Tous les régresseurs entrent dans l’équation de régression de manière linéaire, à l’exception du PIB par habitant (en parité de pouvoir d’achat [PPA] constante), pour lequel un terme au carré est également utilisé. La figure présente les effets marginaux moyens des variables normalisées, c’est-à-dire le nombre d’écarts-types dont l’adoption de l’internet mobile varie lorsque chaque variable de droite augmente d’un écart-type. Indice IHH = indice de concentration Hirschman-Herfindahl.

132 Afrique numérique
FIGURE 3.13 Corrélats de l’utilisation de l’internet mobile dans le monde, 2018
0
406080

Arrive enfin l’environnement réglementaire du pays à l’égard de l’industrie des opérateurs de réseaux mobiles du côté de l’offre : une diminution d’un écart-type de l’indice national de concentration Hirschman-Herfindahl (IHH) des fournisseurs de services internet mobiles est associée à une augmentation de 0,11 écart-type de l’adoption de l’internet mobile.5 Les résultats suggèrent également que le niveau des prix des données et le niveau national d’inégalité sont quantitativement moins importants, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas statistiquement significatifs en tant qu’associés distincts de l’adoption d’internet, lorsqu’on tient également compte du revenu moyen des ménages, des compétences moyennes, de la part de la population ayant accès à l’électricité et de la position réglementaire du pays à l’égard du secteur, exprimée par l’IHH. En raison de contraintes liées à la disponibilité des données, ces résultats sont basés sur une seule année (2018) où les données nationales étaient comparables dans 137 pays. Ils doivent être interprétés comme suggestifs et complémentaires aux résultats des données sur les ménages dans les pays d’Afrique subsaharienne.

À la lumière de ces résultats, les mesures de politiques publiques susceptibles d’avoir un plus fort impact direct à court terme peuvent éventuellement cibler les non-utilisateurs parmi les jeunes et les citadins ayant des niveaux d’alphabétisation et d’instruction plus élevés, si l’objectif est de réduire plus rapidement les écarts d’adoption. L’effet de réseau suggère que les plateformes mettant les personnes et entreprises en relation joueront un rôle dans la croissance de l’adoption d’internet. Il peut être économiquement avantageux d’inciter les premiers adoptants, qui peuvent servir de pionniers ou de modèles pour d’autres, à créer des réseaux plus fournis dans des groupements sociaux tels que les lycées, les universités et les syndicats.

L’adoption d’internet comme un moyen et non une fin en soit

Plus d’une douzaine de déterminants présentent une corrélation significative avec l’adoption d’internet, et certains d’entre eux ont un dénominateur commun, qui indique le statut économique global des utilisateurs et non-utilisateurs. Par exemple, l’accès à l’électricité, la possession d’un téléviseur et la consommation par habitant sont tous liés au statut économique du ménage. C’est pourquoi, en réfléchissant aux politiques visant à accroître l’adoption, il est essentiel de distinguer les symptômes et les causes profondes de la faible adoption. Dans un contexte où plus de 40 % du continent vit en dessous du seuil d’extrême pauvreté, il est raisonnable d’envisager l’accès à internet comme un moyen d’atteindre un objectif plutôt que comme une fin en soi.

En examinant comment l’adoption d’internet peut contribuer à améliorer les revenus et les moyens de subsistance des ménages – pour leur permettre de payer pour une utilisation accrue d’internet et une série d’autres achats –, on peut considérer les obstacles à l’adoption comme des compléments entrant dans la fonction de production d’un ménage. Le but d’une telle approche n’est pas nécessairement l’adoption d’internet, mais plutôt le bien-être ou la prospérité en général, pour lesquels le revenu peut être une variable de remplacement. Un faible niveau d’éducation et de compétences est associé à une adoption plus faible d’internet. Toutefois, il n’est peut-être pas utile de poursuivre une politique visant à augmenter le niveau global d’éducation et de compétences dans le seul but d’accroître l’adoption d’internet. L’éducation et les compétences devraient plutôt être considérées comme des facteurs supplémentaires qui, avec l’utilisation d’internet, peuvent aider certains ménages à gagner plus et à améliorer leur bien-être général. En ce sens, l’accès à internet devrait être traité a priori dans le cadre d’un ensemble plus large

Ménages 133

d’autres contraintes auxquelles les ménages sont confrontés. Il convient donc d’évaluer dans quelle mesure internet entre dans la fonction de production du ménage, avec comme résultat principal l’augmentation des revenus et l’amélioration des moyens de subsistance, plutôt que l’accès à internet.

Il est essentiel d’aborder l’accès à internet sous l’angle de sa contribution aux revenus des ménages, car le service internet reste coûteux et hors de portée pour la plupart des individus du continent. Pour commencer, le coût des smartphones, le premier obstacle à l’accès à internet, est élevé pour un ménage type d’Afrique subsaharienne. C’est pourquoi l’utilisation des smartphones, et donc l’adoption d’internet en Afrique, est faible et en déclin (figure 3.14, panneau a). Ensuite, les coûts d’internet sont eux aussi élevés, limitant encore l’intensité de l’utilisation d’internet. Par exemple, le coût moyen du forfait de données le moins cher – 1,5 Go de données internet à haut débit (avec au moins 256  k ilo- o ctets par seconde) pour 30 jours, un forfait nécessaire pour quelques heures d’utilisation quotidienne de base6 – représente nettement plus de 19 % du revenu des deux tiers de la population vivant sous le seuil de pauvreté de 3,20 dollars US par jour, et 32 % du revenu des 40 % vivant sous le seuil d’extrême pauvreté mondial de 1,90 dollar US par jour. En outre, l’UIT a évalué le coût de 1,5 Go d’internet 3G par rapport au RNB dans différentes régions du monde et a constaté qu’un tel forfait coûte plus de trois fois la médiane de 183 pays. Le coût d’internet en pourcentage du revenu national (1,5 Go de données coûte environ 6,4 % du RNB en Afrique) est plus de deux fois supérieur à la moyenne des autres pays à revenu faible ou intermédiaire (figure 3.14, panneau b). En outre, l’accès à internet nécessite une dépense ponctuelle considérable pour acquérir un smartphone, ce qui est hors de portée de la plupart des gens. Seule une infime partie de la population possède donc un smartphone sur le continent (figure 3.14, panneau a), ce qui limite l’accès à internet. L’accès à l’appareil est essentiel. La discussion ci-dessus montre clairement que l’accessibilité financière d’internet est essentielle. Toutefois, le fait de subventionner l’accès des ménages et de réduire le prix des smartphones peut certes immédiatement augmenter l’utilisation d’internet, mais une telle stratégie peut ne pas accroître le revenu des ménages en l’absence d’interventions complémentaires. La sous-section suivante explique cette logique à l’aide de l’expérience de la Chine, qui a, en partie, abordé l’accessibilité financière d’internet en augmentant la productivité des ménages et donc leurs revenus.

Faire que l’accès à internet ait un impact pour les pauvres : l’expérience de la Chine

Le commerce électronique peut être l’un des meilleurs facilitateurs d’avantages plus inclusifs de la numérisation, car il s’accompagne de divers services connexes, notamment la commercialisation de nouveaux produits qu’il ne serait pas rentable d’amener sur les marchés physiques et divers services de livraison. En outre, il réduit considérablement les coûts de transaction liés aux achats, aux ventes, à l’exploitation et à la gestion des stocks.

La Chine a connu un développement rapide du commerce électronique au cours des vingt dernières années. Le montant total des ventes du commerce électronique a énormément augmenté, passant de zéro à 750 milliards de dollars US entre 2000 et 2016 (Liu et coll., 2020). Cela fait de la Chine le plus grand marché du commerce électronique au niveau mondial, où sa part atteint plus de 40 % (Liu et coll., 2020). En 2021, le commerce électronique chinois s’élevait à 1,3 trillion de dollars US, soit près du double du chiffre de

134 Afrique numérique

FIGURE 3.14 Adoption des smartphones par rapport aux téléphones mobiles basiques et accessibilité des prix de l’internet haut débit pour les données uniquement en Afrique et dans

a. Nombre de téléphones mobiles basiques et de smartphones en Afrique et dans le reste du monde, 2017-2019a

b. Prix du haut débit mobile pour les données uniquement par pays, région ou groupe de revenu, 2019 et 2020

Sources : Blimpo, Maruta, Zeufack (2021) sur base des données de l’International Data Corporation (panneau a) ; données de l’UIT et d’A4AI, adaptées d’UIT (2021), figure 3 (panneau b).

Note : Dans le panneau a, les « téléphones mobiles basiques » sont des téléphones mobiles capables d’effectuer des fonctions de base telles que les appels vocaux, les textos, la radio FM, etc., généralement avec des entrées à l’aide de touches et un petit écran non tactile, mais ne disposant pas de toutes les capacités d’un smartphone. Le panneau b montre l’adoption et l’accessibilité financière des smartphones par région du monde et niveau de développement, exprimées en pourcentage du revenu national brut (RNB) mensuel par habitant, 2019-2020. Les médianes sont déterminées sur 183 économies pour lesquelles des données étaient disponibles pour les deux années. Les pays sont comparés en fonction du prix d’un forfait d’entrée de gamme pour les données uniquement, défini comme l’abonnement au haut débit mobile pour les données uniquement le moins cher disponible au niveau national, avec un minimum de 1,5 Go d’allocation mensuelle des données et une technologie 3G ou supérieure. L’« objectif d’accessibilité financière de 2 % » fait référence à l’objectif fixé en 2018 par la Commission des Nations Unies sur le haut débit pour le développement durable, qui consiste à faire passer les prix des services haut débit d’entrée de gamme en dessous de 2 % du RNB mensuel par habitant d’ici 2025 (UIT, 2021). CEI = Communauté des États indépendants.

Ménages 135
le monde 77 19 84 18 83 17 488 218 484 230 424 250 0 100 200 300 400 500 2017 2018 2019 2017 2018 2019 Afrique Reste du monde Groupes régionaux Monde Groupes de revenu Téléphones mobiles basiques Smartphones 2019 2020 Objectif d’accessibilité financière de 2 % 7,2 6,4 1,8 1,4 1,4 1,4 1,5 1,2 0,8 0,6 2,7 2,4 1,9 1,7 16,6 10,8 3,2 2,8 1,9 1,7 0,8 0,7 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 Étatsarabes
CEI
Revenumoyendela tranche
% du RNB par habitant Nombre total de téléphones (en millions)
AsieetPacifique
EuropeAmériques Monde Faiblerevenu
inférieure RevenumoyendelatranchesupérieureRevenuélevé
Afrique

2016, et il devrait atteindre 2 trillions de dollars US d’ici 2025 (Buchholz, 2021). Les zones rurales et les populations pauvres n’ont pas été laissées pour compte dans ce processus de développement. C’est le résultat d’une planification minutieuse à long terme, impliquant d’investir dans les infrastructures critiques et les compléments tels que l’électricité et l’éducation, qui sont essentiels à l’adoption d’internet et au développement en général. Les structures socioéconomiques de nombreux pays africains reflètent celles de la Chine d’il y a quelques décennies, et certaines des expériences de ce pays peuvent être adaptées pour relever des défis similaires.

Tout comme dans l’Afrique subsaharienne d’aujourd’hui, il y a trente ans, près des deux tiers de la population chinoise vivaient avec moins de 1,90 dollar par jour, et la plupart de ces pauvres résidaient dans les zones rurales. La Chine a adopté une stratégie recherchant des compléments analogiques au développement. Elle a pris des mesures réfléchies de politique publique pour que les zones rurales, où vit une grande partie de la population pauvre, ne soient pas exclues de la transformation économique et plus tard de la numérisation.

La numérisation de la Chine, y compris des zones rurales, s’est carrément concentrée sur les capacités de production, sans faire de l’accès à internet un objectif final. Dans le cadre de cet effort, elle a amélioré les infrastructures physiques, l’éducation et les compétences, ainsi que le climat des affaires (Banque mondiale et Alibaba Group, 2019). Par exemple, les politiques chinoises visaient le développement de l’industrie de la logistique moderne en 2009, la réduction des coûts logistiques en 2014, et l’amélioration des systèmes logistiques ruraux en 2015 (Liu et coll., 2020). Ces mesures ont augmenté le nombre des ménages ruraux qui utilisent internet de manière productive en participant au commerce électronique dans les zones proches des régions plus développées de la Chine. Les ménages ruraux à faible revenu et ceux résidant dans les régions orientales et centrales de la Chine ont donc diversifié leurs revenus. Ainsi, l’amélioration des installations rurales à large bande, associée à l’éducation et aux infrastructures telles que les routes et l’électricité, contribue à accroître l’adoption d’internet et son utilisation productive par les ménages ruraux, qui augmentent à leur tour la diversification des revenus (Leng et coll., 2020). Cela crée un cercle vertueux où l’augmentation des niveaux de revenus accroît l’adoption et l’utilisation d’internet. Les villages Taobao illustrent ces efforts (voir encadré 3.1).

L’utilisation productive nécessite une planification et une coordination intersectorielles pour investir dans des compléments adéquats dans les zones rurales. En 2013, la Chine a lancé la stratégie « Le haut débit en Chine » pour étendre les réseaux à large bande dans tout le pays, en particulier dans les zones rurales. Depuis 2013, le nombre des politiques axées sur la fourniture d’internet en milieu rural a considérablement augmenté, en même temps que celles axées sur internet à l’échelle nationale (Liu et coll., 2020). Entre 2010 et 2016, l’utilisation d’internet a donc augmenté en Chine d’environ 60 % à l’échelle nationale et dans les zones rurales passant, respectivement, de 457 millions à 731 millions d’utilisateurs et de 125 millions à 201 millions d’utilisateurs.

L’utilisation d’internet et le commerce électronique n’auraient pas pu se développer en Chine sans des infrastructures clés telles que l’accès à l’électricité. En 1990, alors que le PIB par habitant de la Chine en parité de pouvoir d’achat était inférieur à la moitié de celui du Nigeria, l’accès à l’électricité était déjà de 90 % en Chine, un accès quasi universel. Avec d’autres investissements dans les infrastructures mentionnées plus haut, cette base a mis les zones rurales en position de tirer profit de l’économie numérique lorsque l’occasion s’est présentée au début du siècle. L’accès à une électricité fiable et

136 Afrique numérique

ENCADRÉ 3.1

Le commerce électronique au service de l’inclusion économique dans les villages Taobao de la Chine

La Chine a pris des mesures réfléchies pour combler l’écart d’accès à internet et veiller à ce que les communautés rurales en bénéficient également. Les Africains peuvent s’inspirer de certaines de ces mesures alors que le commerce électronique gagne du terrain sur le continent tout en restant concentré dans les villes. Dans les zones rurales chinoises, la vente au détail en ligne a augmenté de 153 %, passant de 353 milliards de yens en 2015 à 895 milliards de yens en 2016, soit nettement plus que le taux de croissance de 26 % de la vente au détail en ligne à l’échelle nationale. L’Afrique peut s’inspirer du parcours de Taobao pour soutenir l’inclusion numérique.

Les villages Taobao sont des groupes d’entrepreneurs ruraux vendant leurs produits sur Taobao, une plateforme chinoise de vente en ligne. Ils comptent plus de 100 boutiques en ligne actives. Tous les villages Taobao disposent d’infrastructures numériques de haut niveau, notamment d’un accès à l’internet à haut débit et à un réseau mobile.

En outre, plus de 50 % des habitants de ces villages accèdent à internet à l’aide de smartphones, et les ménages Taobao ont un niveau d’éducation plus élevé. Le Taobao rural joue un rôle essentiel dans la fourniture de services en ligne aux personnes socialement vulnérables, notamment l’éducation, les services médicaux et les déplacements. Le développement des villages Taobao a généré, dans la Chine rurale, de nouvelles opportunités d’emploi, telles que la conception graphique, la photographie, les services de livraison express, le stockage de marchandises, les techniciens en technologies de l’information (TI) et autres.

Il est également évident dans les villages Taobao que le commerce électronique contribue potentiellement à la création d’emplois inclusifs dans la Chine rurale en abaissant le seuil de compétences requis, ce qui permet aux personnes moins instruites de participer aux activités commerciales et de générer des revenus. À son tour, ceci contribue à réduire la pauvreté et à moderniser les zones rurales. L’autre aspect de l’inclusivité des villages Taobao est que les femmes entrepreneuses représentent la moitié des 10 millions d’entreprises et start-ups. Le bon fonctionnement du commerce électronique nécessite des infrastructures et une logistique développées, ainsi que des compétences et un esprit d’entreprise, et l’encouragement des environnements commerciaux est crucial. Dans les villages Taobao, des investissements massifs dans l’offre d’un large éventail de formations au commerce électronique ont aidé à augmenter l’engagement dans le commerce électronique ainsi que les gains qui en découlent dans les zones rurales de la Chine (voir Luo et Niu, 2019). En outre, les retours au pays des migrants vers les zones urbaines ont aidé à relever plusieurs défis, notamment à réduire l’écart de compétences.

De même, le commerce électronique est en train de devenir une partie intégrante de l’activité économique de presque tous les pays africains, bien que, pour l’instant, principalement dans les villes, et d’ouvrir de nouvelles opportunités à l’Afrique. Selon un rapport de 2018 de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), le nombre d’acheteurs en ligne a augmenté de 18 % par an en Afrique depuis 2014. En outre, en 2017, environ 21 millions de personnes ont fait des achats en ligne en Afrique, ce qui indique un énorme potentiel de développement du commerce électronique (CNUCED, 2018). Un large éventail d’obstacles s’oppose toutefois à la réalisation de ce potentiel, entre autres, des déficits d’infrastructure et de logistique et une connectivité internet insuffisante.

Il ne sera peut-être pas facile pour les pays africains d’adopter le modèle de commerce électronique de la Chine. L’esprit de planification et l’approche de l’accès à internet sous l’angle de l’utilisation productive n’en restent pas moins une leçon essentielle. Le succès du commerce électronique dans la promotion du développement rural et la promesse qu’il porte dépendent de divers facteurs. Il est crucial d’identifier les produits locaux prometteurs, agricoles en particulier ; de développer les technologies numériques (TN) et les infrastructures de transport dans les zones rurales ; et de proposer des plateformes de commerce électronique fiables, offrant des services stables afin que les villageois aient les mêmes chances de se lancer dans l’entrepreneuriat. L’Afrique peut apprendre et s’adapter à l’expérience de la Chine pour faire de l’inclusion une réalité dans l’espace numérique.

Ménages 137
Source : adapté de Blimpo, Maruta, et Zeufack (2021).

abordable est une contrainte majeure qui peut menacer un développement numérique efficace et inclusif. La carte 3.1 montre qu’un meilleur accès à une électricité fiable est associé à un meilleur accès à internet en Afrique (Aviomoh et coll., à paraître).

La décision des ménages de se connecter à internet influence leur décision d’adopter l’électricité et vice versa, surtout lorsqu’il s’agit de l’adoption d’internet pour des utilisations productives, qui nécessite obligatoirement un accès à l’électricité pour alimenter les équipements de technologie de l’information (TI). L’accès à l’électricité est associé à un plus grand nombre d’abonnés à la téléphonie mobile et à une plus large possession de smartphones, qui sont essentiels pour l’adoption d’internet (Houngbonon, Mensah et Traore, 2022).

Il existe une solide corrélation entre l’accès à l’électricité et l’utilisation d’internet aux niveaux national, sous-national et individuel dans 36 pays d’Afrique subsaharienne, à la fois dans les zones avec et sans couverture électrique (Aviomoh et coll., 2021). La pénétration de l’électricité est toutefois inférieure à celle de la téléphonie mobile, ce qui

CARTE 3.1 Parts de la population ayant accès à l’électricité et à internet en Afrique, par pays, 2017

138 Afrique numérique
Maurice Madagascar Seychelles Comores Lesotho Afrique du Sud Eswatini Botswana Namibie Zimbabwe Mozambique Malawi Zambie Rwanda Burundi Tanzanie Kenya Ouganda Somalie Éthiopie Gabon Cameroun Soudan Soudan du Sud Érythrée Djibouti Niger Algérie Tunisie Libye République arabe d’Égypte Maroc Mali Burkina Faso Bénin Nigeria Togo Guinée équatoriale São Tomé et Príncipe Ghana Côte d’Ivoire Libéria Sierra Leone Guinée Guinée-Bissau Sénégal Mauritanie Gambie Cabo Verde Tchad République centrafricaine République du Congo République démocratique du Congo Angola Pourcentage de la population ayant accès à l'électricité 0–25 25–50 50–75 75–100 Pas de données IBRD 47071 | FÉVRIER 2023 a. Accès à l’électricité Sahara occidental (suite)

(encadré 3.2). L’Afrique peut tirer parti des énergies vertes (éolienne, géothermique, solaire et hydroélectrique) pour offrir une infrastructure numérique plus écologique.

L’importance de l’accès à l’électricité en tant que complément à l’utilisation d’internet dans la fonction de production des ménages a été mise en évidence en Afrique subsaharienne. Au Sénégal et en Tanzanie, la couverture du haut débit mobile (3G) augmente le bien-être des ménages (représenté par la consommation totale par habitant), en particulier pour les personnes hautement qualifiées, les jeunes et les habitants des zones urbaines où l’infrastructure est relativement bonne, y compris l’électricité (Bahia et coll., 2020 ; Bahia et coll., 2021). Sous réserve de différents facteurs, dont la localisation, l’accès à l’électricité est fortement associé à l’utilisation d’internet (Atiyas et Doganoglu, 2022 ; Rodríguez-Castelán et coll., 2021). Ces résultats expliquent en partie le succès du modèle de commerce électronique des villages Taobao. Nous avons souligné plus haut que la Chine s’est appuyée sur un accès élevé à l’électricité et sur le retour vers les zones rurales de nombreux jeunes migrants hautement qualifiés pour développer son modèle de commerce électronique dans les villages Taobao. Comme dans ce modèle (voir l’encadré 3.1), les effets positifs sur le bien-être de l’accès à internet en Tanzanie passent par le marché du travail : participation élevée à la population active, emploi salarié et travail indépendant non agricole (Bahia et coll., 2021).

ENCADRÉ 3.2

Une électricité fiable pour l’économie numérique

Les technologies numériques offrent aux pays du monde entier des possibilités de diversifier leur économie, notamment en développant les technologies de l’information et de la communication (TIC) en tant que secteur et en augmentant leur utilisation dans les entreprises. Parmi les éléments fondamentaux de l’infrastructure numérique figurent les centres de données. Ces installations sont un moteur essentiel de l’économie numérique : elles permettent de stocker des données, d’héberger des sites web et de mettre en œuvre des applications en nuage. Les centres de données sont des usines virtuelles utilisant l’électricité de manière productive, avec un impact économique mesurable sur le produit intérieur brut, l’emploi et les recettes fiscales de l’État.

Les centres de données consomment une quantité considérable d’électricité pour alimenter les équipements informatiques et les maintenir au frais. En 2011, Google a déclaré avoir utilisé 260 mégawatts d’énergie électrique pour ses centres de données, soit plus que la capacité installée dans 19 pays africains en 2014. Les centres de données doivent être d’une grande fiabilité pour garantir un flux de données fluide et sans interruption. Les normes industrielles définissent la fiabilité dans une fourchette de disponibilité allant de 99,67 % (avec pas plus de 29 heures d’interruption par an pour les centres de données de niveau 1) à 99,995 % (avec seulement 0,8 heure d’interruption par an pour les centres de niveau 4 les plus élevés).

La plupart des pays africains auraient du mal à respecter les normes de fiabilité de niveau 1. Même les économies les plus grandes et les plus avancées technologiquement, telles que le Nigeria et l’Afrique du Sud, signalent d’importes difficultés en matière de fiabilité de l’approvisionnement en électricité. Les normes exigent également une source garantie d’électricité de secours capable d’alimenter le centre pendant au moins une demijournée.

Source : Blimpo et Cosgrove-Davies (2019).

140 Afrique numérique

Dans quelle mesure la coordination intersectorielle induite par des liens tels que celui existant entre les infrastructures numériques et énergétiques, est-elle prise en compte dans la conception des projets et des politiques d’infrastructure ? Aviomoh et coll. (2021) ont examiné 106 documents d’évaluation de projet (PAD – Project Appraisal Document) de projets d’infrastructure approuvés en Afrique subsaharienne par la Banque mondiale et relevant des Pratiques mondiales « Développement numérique » et « Énergie et industries extractives » entre 2010 et 2020. La coordination intersectorielle globale n’est pas profonde. Toutefois, les PAD de la Pratique mondiale « Développement numérique » de la Banque sont d’environ 33 % plus susceptibles de mentionner des composantes énergétiques au stade de la conception que leurs homologues de la Pratique mondiale « Énergie et industries extractives ». Cela n’a rien de surprenant étant donné qu’internet a besoin d’électricité pour fonctionner, et non l’inverse. La synergie devrait pourtant être motivée par le fait que les deux sont des compléments mutuels pour les fonctions de production des entreprises et des ménages. Les interventions intersectorielles peuvent également générer une plus grande efficacité du côté de l’offre, y compris des possibilités de partage des infrastructures, et contribuer à réduire les coûts.7

Il existe des possibilités d’accroître l’accès à internet à l’aide d’un meilleur ciblage, de facilités de crédit et de paiement, et d’une réduction des coûts pour attirer les utilisateurs potentiels en dépit des divers obstacles à l’adoption examinés dans cette section. Ces mesures de politiques risquent toutefois de ne pas suffire à elles seules à accroître sensiblement l’adoption. Les faibles niveaux de revenus moyens et les niveaux de pauvreté élevés dans la plupart des pays, ainsi que des contraintes difficiles à changer telles que l’alphabétisation des adultes, font obstacle à une adoption universelle dans le cadre d’un statu quo. Sans une augmentation suffisante du revenu des ménages, il est peu probable que l’écart d’adoption soit comblé assez rapidement d’une manière financièrement viable pour les ménages et les prestataires de services.

La question stratégique est donc de savoir comment combler les écarts d’adoption et d’utilisation d’internet d’une manière abordable et financièrement viable pour les ménages et les fournisseurs de services. La réponse à cette question dépend de la manière dont l’adoption accrue d’internet entraîne une augmentation des revenus. Inversement, les ménages sont susceptibles d’adopter et utiliser davantage internet à mesure que leurs revenus augmentent, quelle que soit la source de la croissance de leurs revenus. Il est donc essentiel que l’utilisation productive soit un point d’entrée et un élément central des stratégies d’expansion d’internet.

Une grande partie de la structure de la plupart des économies et des marchés du travail de la majorité des pays africains est caractérisée par un niveau élevé d’informalité et de travail indépendant (figure 3.15). La ligne floue qui en résulte entre un ménage et l’entreprise offre une opportunité d’utilisation productive des TN par les ménages.

L’adoption et l’utilisation d’internet par les entreprises et les ménages sont alors les mêmes pour la plupart des ménages africains. En Afrique subsaharienne, près de 9 travailleurs sur 10 sont employés sur des marchés du travail informels, et plus de 70 % des travailleurs sont des indépendants informels – jusqu’à 92 % en Afrique de l’Ouest – souvent des membres de la famille non rémunérés. Un défi majeur pour stimuler l’impact inclusif des TN est d’augmenter leurs utilisations liées au travail afin que les ménages puissent apprendre tout en travaillant et gérer des microentreprises, souvent au niveau du ménage, de sorte que l’utilisation d’internet améliore la productivité de ces activités économiques.

Ménages 141

FIGURE 3.15 Part des travailleurs employés dans le secteur informel, le secteur formel et dans les ménages, avec et sans l’agriculture, en Afrique et par sexe et sous-région, 2016

Dans le secteur informel Dans le secteur formel Dans les ménages Agriculture comprise

Source : OIT, 2018.

Note : L’« emploi informel » est défini comme « tout travail rémunérateur (tant indépendant que salarié) qui n’est pas enregistré, réglementé ou protégé par les cadres juridiques ou réglementaires existants, ainsi que le travail non rémunérateur effectué dans une entreprise productrice de revenus » (OIT, 2013). Les pourcentages sont ceux de l’ensemble des travailleurs en âge de travailler (15 ans et plus).

Il existe des possibilités pour que les technologies numériques fassent la différence dans le secteur informel, comme l’indique une récente évaluation du paysage de l’« E-conomie » en Afrique (Google et SFI, 2020). Par exemple, au Nigeria, une plateforme de distribution appelée TradeDepot s’est largement appuyée sur les TN pour améliorer la gestion de la chaîne d’approvisionnement des détaillants informels, en permettant leur connexion avec les fabricants. En 2018, le nombre de détaillants actifs sur les plateformes de l’entreprise a bondi de 2 000 à 15 000. Des services comme TradeDepot ont le potentiel de servir des millions de détaillants au Nigeria et sur tout le continent.

Les entreprises du secteur informel africain, qui sont souvent étroitement liées aux ménages, sont confrontées à de nombreux défis qu’une économie internet peut contribuer à atténuer de manière significative. Certains de ses avantages comprennent une réduction des coûts de transaction permettant d’accéder au financement, aux pratiques commerciales et aux prix, ainsi qu'une diminution du nombre des divers intermédiaires qui rognent souvent les bénéfices des pauvres. Les interventions de TN visant à améliorer la productivité des microentreprises peuvent donc contribuer à réduire les inégalités entre les sexes en matière d’accès à internet et de revenus. Environ 79 % des femmes en Afrique et 95 % en Afrique de l’Ouest travaillent à leur compte dans le secteur informel.

Un cadre des politiques pour transformer l’utilisation en impact inclusif

Un cadre des politiques centré sur l’utilisation productive nécessite une compréhension fine du rôle des TN pour les microentreprises et le travail indépendant informel. Il est

142 Afrique numérique
100 Part de l’emploi informel (%) 85,8 82,7 89,7 68,5 89,2 86,4 92,1 91,0 87,1 95,2 91,6 94,0 40,2 38,4 38,2 34,4 36,1 82,1 72,3 76,6 88,2 73,2 78,8 82,8 71,6 76,8 41,5 59,7 56,3 42,4 92,4 95,0 92,3 81,0 87,0 89,8 89,1 62,2 67,3 78,6 67,7 71,9 80 60 40 20 0 AfriqueAfrique du Nord Afrique subsaharienne Afrique centrale Afrique de l’Est Afrique australe Afrique de l’Ouest Afrique subsaharienne HommesFemmes TotalHommesFemmes TotalHommesFemmes TotalHommesFemmes TotalHommesFemmes TotalHommesFemmes TotalHommesFemmes Total

également essentiel de créer un environnement propice à la génération de TN améliorant la productivité et adaptées aux besoins des pauvres. Enfin, étant donné que les pauvres, les travailleurs indépendants et les autres microentreprises sont souvent confrontés à des contraintes multiples, l’adoption d’internet peut ne pas être suffisante à elle seule pour permettre son utilisation productive par les ménages. Une meilleure compréhension des complémentarités entre les différents intrants est donc essentielle pour regrouper les services comprenant des TN. Une attention particulière doit donc être accordée à ces spécificités contextuelles dans le cadre d’une stratégie nationale d’« utilisation productive des TN ».

Le cadre de l’« utilisation productive » pour combler l’écart d’adoption d’internet

L’approche dominante pour combler l’écart d’adoption d’internet dépend du fait que l’adoption d’internet est a) un objectif des politiques en soi, ou bien b) un moyen d’atteindre un objectif plus large d’amélioration des moyens de subsistance des personnes, d’augmentation de la productivité et de hausse des revenus. La figure 3.16 propose un cadre de réflexion sur les moyens de combler l’écart d’adoption d’internet.

Une des approches pourrait entraîner une adoption plus rapide, mais avec un retour d’impactes plus faible et un risque de non-viabilité financière si l’accès à internet ne contribue pas concrètement à accroître les revenus des ménages. L’autre approche considère les gains de productivité et les revenus comme l’objectif principal et évalue le rôle d’internet dans la réalisation de celui-ci. De ce point de vue, l’objectif ultime est de créer un cercle vertueux dans lequel l’adoption d’internet améliore les revenus, ce qui se traduit par une utilisation accrue. L’adoption d’internet n’étant pas nécessairement l’objectif en soi, le rythme de réduction de l’écart d’adoption peut être plus lent, mais financièrement viable.

FIGURE 3.16 Un

Approche 1 : Utilisation d’internet en tant que fin en soi

Écart d’utilisation

large et croissant et faible intensité d’utilisation

Approche 2 : Utilisation d’internet comme moyen d’atteindre une fin

d’adoption des TN et améliorer le bien-être de leurs utilisateurs

S’attaquer aux obstacles à l’utilisation

Fournir davantage d’informations, offrir un contenu attrayant, disposer de compétences numériques, assurer une accessibilité financière (subventions, crédit) ; faciliter l’exploitation des réseaux.

Utilisation productive

Pilier 1

Identifier les possibilités de gains de productivité grâce au DT

Pilier 2

Encourager la production de TN adéquates

Pilier 3

Grouper avec des compléments adéquats (électricité, compétences, capital de départ, etc.)

Source : adapté de Blimpo et Cosgrove-Davies, 2019.

Revenus plus élevés

• Accès universel (plus d’utilisateurs)

• Intensité d’utilisation plus faible (par rapport à l’approche 2)

• Insoutenabilité financière

• Plus d’utilisateurs

• Plus grande intensité d’utilisation

• Meilleur retour d’information pour une utilisation accrue

• Viabilité financière

Note : L’« adoption » d’internet fait référence à l’utilisation d’internet lorsqu’il existe une couverture internet. TN = technologie numérique.

Ménages 143
cadre pour combler l’écart

Approche 1. Dans le cadre de l’approche 1, la politique se concentre principalement sur l’élimination des obstacles symptomatiques à l’adoption. Cela implique de mettre en œuvre plusieurs interventions de concert :

• Renforcer les compétences numériques pour faciliter l’utilisation d’internet par les individus.

• Fournir des informations sur l’utilité et la valeur de l’utilisation d’internet.

• Fournir des crédits et/ou des subventions pour les smartphones et les données mobiles à haut débit afin de résoudre le problème de l’accessibilité financière. Mais étant donné l’ampleur de la pauvreté en Afrique subsaharienne, cela impliquerait des subventions importantes.

Ces interventions contribueront à atteindre plus rapidement l’objectif d’accès universel. Dans cette approche, on espère que l’augmentation de l’utilisation d’internet conduise à une amélioration de la productivité, ce qui peut se produire dans certains ménages. Toutefois, sans la présence de compléments analogiques, l’utilisation productive et le mécanisme d’impacte pour une plus grande adoption sont faibles dans cette approche. Cette stratégie est donc potentiellement non viable financièrement, car elle nécessite une fourniture soutenue de crédit et/ou de subventions pour l’adoption.

Approche 2. Au lieu de cela, dans l’approche 2, l’adoption d’internet est considérée comme un moyen d’atteindre une fin (augmenter les revenus des ménages et réduire ainsi la pauvreté). L’objectif des politiques est d’accroître l’utilisation productive d’internet afin d’augmenter les revenus des ménages et de stimuler l’adoption d’internet grâce à une meilleure capacité de paiement. De plus, dans ce contexte, faciliter une utilisation plus intensive d’internet par les entreprises et les non-pauvres peut être hautement souhaitable pour l’inclusion si cela peut aider à créer des emplois pour les pauvres. L’utilisation productive nécessite des synergies entre au moins trois types d’interventions, dans le cadre des trois piliers de la figure 3.16 :

1. La première étape, dans le cadre du pilier 1, consiste à identifier les possibilités ou les activités économiques où les TN peuvent être plus utiles pour accroître le bien-être des ménages. Par exemple, identifier les activités économiques auxquelles se livrent les ménages les plus pauvres (et les microentreprises) et dans lesquelles les technologies liées à internet peuvent améliorer les revenus.

2. La deuxième étape, dans le cadre du pilier 2, consiste à encourager le développement de ces applications. Cela peut impliquer, par exemple, l’octroi d’incitations aux entreprises et la mise en place de politiques de garantie de marché pour le développement de TN adaptées à un faible niveau de compétences.

3. La troisième et dernière étape, le pilier 3, consiste à regrouper les interventions identifiées dans le cadre des piliers 1 et 2 avec des compléments adéquats, qui peuvent impliquer l’accès à des infrastructures telles que l’électricité ou des routes, ou l’amélioration de leur qualité. Par conséquent, les initiatives de renforcement des compétences (mises en avant dans le cadre de l’approche 1, par exemple) mettront l’accent sur l’amélioration de l’instruction ou des compétences générales (pas nécessairement des compétences en matière de TN) pour permettre aux individus de faire des choix éclairés en général et d’internaliser pleinement la valeur de l’utilisation d’internet.

144 Afrique numérique

Ces interventions de politiques conduiront à une adoption accrue d’internet pour une utilisation productive, ce qui entraînera une augmentation des revenus des ménages. Avec des revenus plus élevés, ces derniers devraient pouvoir se permettre d’augmenter leur consommation de données et d’internet à haut débit selon leurs besoins. Dans cette approche, une utilisation accrue d’internet entraîne de nouvelles augmentations de la productivité et des revenus, menant à une adoption accrue d’internet. L’approche 2 est plus spécifique au contexte que l’approche 1, car elle dépend à la fois de la structure du marché et de la disponibilité (ou non) des compléments.

L’adoption d’internet comme moyen d’atteindre une fin : comprendre les trois piliers du cadre de l’utilisation productive

Pilier 1 : Comprendre la structure et la composition des activités économiques

L’impact direct des TN sur les ménages et les microentreprises peut varier considérablement en fonction de la nature de l’activité et de la structure des marchés connexes. Par exemple, dans l’agriculture qui occupe une grande partie de la main d’œuvre, les intermédiaires jouent un rôle crucial en reliant les agriculteurs au marché dans toute l’Afrique subsaharienne (Fafchamps, Gabre-Madhin, et Minten, 2005). La question est de savoir si les TN ciblent et aident davantage les intermédiaires ou les agriculteurs pauvres. Par exemple, les TN peuvent aider les petits exploitants à accéder en temps opportun à des informations – notamment à l’aide de la voix et en langue locale – sur la météo, les prix des intrants et les pratiques agricoles.

Toutefois, les mêmes TN ciblant uniquement les informations sur les prix peuvent ne pas être pertinentes pour les agriculteurs dont l’exploitation est trop petite pour pouvoir profiter des prix plus élevés pratiqués sur des marchés plus éloignés, en raison des coûts de transport. En revanche, la même application peut être essentielle pour les intermédiaires qui regroupent les produits des petits agriculteurs en vue de les revendre ailleurs. Les gains de productivité obtenus par les intermédiaires peuvent ne pas améliorer le bien-être des agriculteurs si les premiers ne répercutent pas les avantages liés aux prix sur les seconds. Par exemple, une répercussion importante sur les agriculteurs a eu lieu en Côte d’Ivoire lorsque les taxes ont été réduites d’un côté du pays, alors divisé pendant la periode de rebellion, pour les exportateurs de cacao (Soumahoro, 2017). Et lorsque les coûts de transport ont été réduits pour les commerçants et les agriculteurs en Sierra Leone grâce à l’amélioration des routes de desserte, les prix des produits agricoles ont chuté (Casaburi, Glennerster et Suri, 2013).

L’effet des TN sur le bien-être de l’agriculteur reste par conséquent ambigu ; il dépend de l’ampleur de la baisse des prix des intrants due aux TN et de l’étendue des contraintes de capacité de production. En outre, les effets potentiels des baisses de prix (dues aux TN) sur le bien-être de l’agriculteur dépendent également du fait que les ménages (petits agriculteurs) soient des consommateurs ou des producteurs nets des produits concernés (Porto, 2020). Toutes choses restant par ailleurs égales, les prix bas des produits augmenteront le bien-être si les ménages sont des consommateurs nets (c’est-à-dire que la part de leur revenu provenant du produit est inférieure à la part de leurs dépenses consacrée au produit) et vice versa.

Les TN peuvent également jouer un rôle dans une série d’activités économiques dans lesquelles les ménages pauvres sont engagés, allant du petit commerce, des vendeurs de rue aux micro-transformateurs de produits alimentaires. Comme l’illustre le cas de l’agriculture, l’ampleur de l’impact nécessite une compréhension spécifique au contexte d’un

Ménages 145

ensemble de facteurs, notamment les activités économiques dans lesquelles les ménages pauvres ou de microentrepreneurs informels sont engagés. Quels rôles les différentes TN (y compris les différentes applications) peuvent-elles jouer pour résoudre les problèmes liés aux gains de productivité dans ces activités ? Ces TN sont-elles disponibles et accessibles ? Par exemple, les TN augmentant les prix à la ferme pourraient entraîner des gains de bien-être pour les petits exploitants informels qui sont des producteurs excédentaires d’une culture donnée – par exemple, l’arachide (Porto, 2020).

Pilier 2 : Promouvoir le développement des TN pour la productivité des ménages

Une génération de solutions numériques axées sur le marché sans aucune intervention de l’État risque de privilégier les personnes hautement qualifiées, de répondre de manière disproportionnée aux besoins des plus éduquées et des plus à même de les acquérir, et de retarder le moment où les pauvres pourront bénéficier pleinement des TN. Une stratégie efficace et inclusive d’« utilisation productive » des TN peut nécessiter de modifier l’orientation du changement technologique vers des TN renforcant la main-d’œuvre au lieu de la remplacer, aidant les cadres et les travailleurs à résoudre les problèmes liés à la productivité et apprenant en les utilisant.

La création de TN adaptées à un faible niveau de compétences fait partie intégrante de la stratégie. Elle implique des politiques encourageant les jeunes développeurs de logiciels à créer des applications permettant une utilisation productive par les ménages, et facilitant l’adoption de ces applications. Étant donné que le taux d’analphabétisme des adultes reste relativement élevé dans de nombreux pays, les applications ayant un contenu en langue locale et utilisant la voix ou des illustrations visuelles ont plus de chances de convenir à une part nettement plus importante de la population. Les décideurs politiques devraient créer un environnement favorable permettant aux entrepreneurs locaux de générer ces solutions à partir de la base (Blimpo et coll., 2017).

Des milliers de jeunes Africains travaillent, à travers tout le continent, sur de nouvelles idées et de nouveaux produits susceptibles de résoudre des problèmes. La plupart d’entre eux échoueront, quelques-uns réussiront, et certains pourront être transformateurs. Beaucoup d’entre eux lèvent déjà des fonds à hauteur de millions de dollars grâce à la valeur marchande de leurs idées et de leurs produits. Pour créer les conditions nécessaires à l’essor d’initiatives partant de la base, les pouvoirs publics africains doivent accorder beaucoup plus d’attention que celles-ci n’en ont reçue.

Parfois, il suffit de ne pas se mettre en travers du chemin ! Les pays africains doivent accepter le risque et abandonner l’incrémentalisme pour accélérer les changements transformationnels que leurs populations méritent. Les changements significatifs ont parfois des conséquences inattendues, certaines positives, d’autres négatives. Prendre des risques, c’est aussi être capable d’observer et d’ensuite adapter l’environnement réglementaire aux nouvelles technologies. Un environnement réglementaire flexible favorise l’innovation en permettant de tester de nouveaux modèles d’entreprise et de diffuser les innovations. Il en va de même pour la facilité d’accès des entrepreneurs au financement. Enfin, le changement se heurtera toujours à une résistance. Bon nombre des technologies qui changent la vie et que nous considérons comme acquises aujourd’hui se sont heurtées au début à une forte résistance, parfois de la part de sources improbables. Les pouvoirs publics doivent jouer un rôle essentiel en veillant à ce que les idées s’affrontent de manière constructive afin que les meilleures et celles qui sont socialement souhaitables l’emportent (Juma, 2016).

146 Afrique numérique

Pilier 3 : Soutenir des ensembles d’intrants complémentaires pour une utilisation productive

Comme nous l’avons vu précédemment, les TN sont des intrants dans la fonction de production de diverses activités économiques modernes, mais il en va de même pour de nombreux autres intrants tels que l’électricité, l’infrastructure routière, les compétences et l’accès au crédit. Pour favoriser un impact plus inclusif, il est essentiel de comprendre les compléments nécessaires pour amplifier l’impact économique de l’utilisation d’internet et la meilleure façon de les soutenir.

Certaines des interventions les plus récentes qui font la différence pour sortir durablement les ménages de la pauvreté sont les programmes “Graduation” mis en œuvre en Éthiopie, au Ghana, au Honduras, en Inde, au Pakistan et au Pérou (Banerjee et coll., 2015). Ils constituent une approche multidimensionnelle visant à répondre aux contraintes auxquelles les pauvres sont confrontés. Bien que les interventions aient eu lieu dans le cadre de programmes de protection sociale, le principe de soutien à des bouquets d’intrants complémentaires à usage productif s’applique généralement.

La raison d’être d’un tel programme est fondée sur le fait que les pauvres sont souvent confrontés à des obstacles multiples collectivement, mais pas individuellement contraignants. Par exemple, au Sénégal, un arrangement contractuel avec les agriculteurs d’une coopérative de culture d’arachide combinait un contrat assurant des prix avantageux avec une formation et un crédit contribuant à encourager et à soutenir l’achat d’une nouvelle technologie améliorant la qualité. L’assouplissement simultané de ces trois obstacles à la productivité a augmenté d’environ 65 % la production totale vendue à la coopérative par les agriculteurs bénéficiaires (Deutschmann, Bernard et Yameogo, 2020).

Le même principe sous-tend certains modèles d’entreprise du secteur privé ayant une forte composante d’entrepreneuriat social. Au Sénégal, la Laiterie du berger (LdB) est un bon exemple de ce type de regroupement d’intrants complémentaires. La LdB a aidé à organiser des éleveurs locaux disparates en une coopérative de production de lait pour la fabrication locale de yaourts (voir Danone Communities, s.d.). L’entreprise a connu une croissance significative au fil des ans, en partie grâce aux services complémentaires que la LdB fournit aux éleveurs en matière d’intrants pour l’alimentation animale et de compétences d’appui à un assainissement correct et à l’amélioration de la production laitière, tant en quantité qu’en qualité.

Les TN ont joué un rôle important dans ce type d’initiatives, en contribuant à réduire divers coûts de transaction, à atténuer les asymétries d’information, à améliorer le suivi et l’attribution des crédits, et à faciliter les transferts de technologie et de compétences. Le programme Smart Village au Niger offre également un exemple d’intervention visant à accroître non seulement la disponibilité, mais aussi l’utilisation productive des TN pour l’accès au financement et comme complément aux activités agricoles des populations vulnérables, notamment les populations rurales et les femmes (encadré 3.3).

L’expansion des TN devrait donc cibler les compléments nécessaires déjà en place ou susceptibles d’être fournis de manière groupée là où ils font défaut. Tous les obstacles ne peuvent être éliminés efficacement et simultanément, et tous ne se présentent pas sous la forme d’intrants complémentaires. Si des contraintes clés telles que l’accès à l’électricité et au crédit sont transversales, d’autres, telles que les compétences et les technologies, dépendent des contextes locaux. Des études supplémentaires seront nécessaires pour identifier les principales contraintes complémentaires dans chaque contexte spécifique.

Ménages 147

ENCADRÉ 3.3

Smart Villages au Niger pour une disponibilité inclusive et une utilisation productive

Le programme Smart Villages (villages intelligents), mis en œuvre par les pouvoirs publics du Niger avec le soutien de la Banque mondiale, est un exemple d’intervention intégrée de l’offre et de la demande pour l’inclusion sociale. La population rurale et les femmes ont été ciblées pour stimuler l’utilisation de la connectivité rendue disponible par le programme.

Cette initiative de six ans, lancée en octobre 2020, vise à améliorer la connectivité numérique ainsi que les services financiers numériques dans les zones rurales. Le Niger compte 24 millions d’habitants répartis sur 1,2 million de kilomètres carrés, principalement dans le désert du Sahara. Associée à un risque sécuritaire élevé, cette faible densité démographique, en particulier dans les zones rurales, rend difficile l’investissement dans les infrastructures rurales par les acteurs du secteur privé, y compris dans les services numériques et financiers. Grâce à cette initiative de 100 millions de dollars US, l’État du Niger améliorera la pénétration du haut débit en milieu rural, qui passera de 12 % actuellement à au moins 25 %, tout en augmentant l’attractivité des TN axées sur les services financiers. La connectivité permettra la fourniture de services financiers numériques, dont le taux d’adoption actuel n’est que de 9 %, et permettra à 240 000 adultes, en priorité des femmeschefs d’entreprise et des agricultrices, d’effectuer et recevoir pour la première fois des paiements mobiles numériques.

Depuis janvier 2022, le programme a entamé la première phase de déploiement de 150 centres numériques afin d’offrir à la population rurale un large éventail de services numériques et une formation à la culture numérique. Cela vise à accroître la familiarité avec les TN et à améliorer les compétences numériques pour stimuler l’utilisation productive. Le programme construira également 2 100 sites de connectivité mobile dans les zones rurales du Niger sur la base d’un mécanisme d’enchères inversées où les opérateurs de télécommunications recevront une subvention catalytique pour étendre leur couverture mobile aux zones rurales dépourvues de toute connectivité.

Note : Pour plus d’informations sur ce programme, visitez la page web du projet de la Banque mondiale Smart Villages for Rural Growth and Digital Inclusion : https://projects.worldbank.org/en/projects-operations /project-detail/P167543.

Conclusion

L’utilisation d’internet par les particuliers et les ménages est faible en Afrique. Mais étant donné l’étendue de la couverture internet, l’adoption individuelle peut être plus que doublée en s’attaquant aux multiples contraintes (telles que l’éducation et les compétences, l’accessibilité financière, les réseaux, etc.) qui restreignent l’adoption par les ménages.

En outre, internet et les TN connexes offrent la possibilité de réaliser des gains de productivité inclusifs. Les premières données recueillies dans les pays africains font état d’impacts économiques positifs associés à une plus grande adoption et utilisation des TN. Toutefois, le taux d’adoption est resté faible, avec une grande fracture au détriment des pauvres, des habitants des zones rurales et de la population moins éduquée.

De nombreuses contraintes font obstacle à l’adoption d’internet, si bien que près de la moitié de la population a des services à disposition, mais ne les utilise pas. Les considérations liées à la demande doivent être abordées parallèlement à la contrainte sur l’offre, et les deux sont souvent liées. Par exemple, bien qu’elle soit en grande partie une

148 Afrique numérique

question de demande, l’accessibilité financière peut être résolue par une baisse des prix induite par des gains d’efficacité du côté de l’offre. De même, la faible adoption est due à l’inadéquation du contenu ou des fonctionnalités des applications numériques, mais l’offre d’un contenu recherché et d’applications attrayantes peut contribuer à résoudre le problème.

Compte tenu du niveau et de la répartition actuels des revenus en Afrique, à moins que l’adoption et la consommation d’internet ne contribuent à augmenter les revenus pour permettre aux ménages de payer, l’écart d’adoption d’internet risque de persister. À cause de la forte prévalence de l’informalité et du travail indépendant, la ligne séparant les ménages et les microentreprises est floue, ce qui ouvre la porte à une utilisation productive par les ménages – avec des compléments adéquats tels que l’électricité et des applications répondant aux besoins des ménages. La priorité doit donc être accordée à l’incitation à la génération et à l’adoption de TN répondant aux besoins productifs des ménages à faible revenu.

Pour l’avenir de la numérisation de l’Afrique subsaharienne, il faut impérativement du côté de l’offre, des infrastructures adéquates et bien entretenues ainsi que des améliorations réglementaires visant à réduire les inefficacités de l’offre afin que les prix permettant de recouvrer les coûts soient abordables pour une part nettement plus importante de la population. Le chapitre 4 examine les questions essentielles liées à l’infrastructure numérique de base.

Notes

1. L’« utilisation d’internet » est un terme général faisant référence à une combinaison de couverture de l’infrastructure et d’adoption. L’« utilisation » est définie comme la part de la population globale utilisant internet, indépendamment de la couverte internet, tandis que l’« adoption » est la part des personnes qui ont une couverture et utilisent le service.

2. Voir également le chapitre 1, figure 1.12. Il existe des différences mineures entre l’accès à internet mesuré à l’aide des données de l’enquête de Research ICT Africa (RIA) (relatives à la demande) et celui mesuré au moyen des données administratives de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) (relatives à l’offre), en partie en raison de la prévalence de plusieurs cartes SIM par utilisateur. Le tableau général reste toutefois similaire.

3. Cette estimation très prudente est basée sur a) une évaluation de seulement six pays à revenu faible ou intermédiaire de la tranche inférieure, dont un seul est un pays d’Afrique subsaharienne ; et b) un nombre limité de services en ligne excluant les services de streaming qui sont essentiels pour l’enseignement et l’apprentissage en ligne.

4. Une session Zoom d’une heure nécessite environ 500 Mo de données (Chen et Minges, 2021). Par conséquent, le forfait de données de 6 Go peut ne pas être suffisant dans certains contextes, tels que l’enseignement en ligne. Alliance for Affordable Internet (A4AI) estime que le forfait de base nécessite 1 Go de données. Toutefois, en raison de la pandémie de COVID-19 et de l’augmentation de la demande de données qui en a résulté, l’A4AI appelle désormais à une « connectivité significative » ou à une connectivité et à une consommation de données illimitées (A4AI, 2020).

5. Le fait que l’IHH soit statistiquement significatif, mais que les tarifs de terminaison d’appel mobile (TAM) ne le soient pas peut à la fois refléter le petit nombre d’observations pour les TAM et suggérer que les mesures et le cadre réglementaires, y compris la façon dont ils affectent la nature et le séquençage de l’entrée, peuvent être plus importants que les politiques visant spécialement les TAM (Les TAM sont les prix que les opérateurs paient à leurs rivaux pour que ceux-ci terminent un appel débutant dans leur propre réseau ; des TAM élevés permettent aux opérateurs de faire plus facilement une différence entre les appels hors réseau et sur réseau, ce qui constitue un désavantage pour les petits opérateurs et fournit aux opérateurs en place un instrument important pour empêcher l’entrée ou l’expansion de nouveaux rivaux plus petits).

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6. Depuis 2018, l’Union internationale des télécommunications (UIT) utilise le forfait de 1,5 Go pour le haut débit mobile comme forfait de données de base (ensemble de données « ICT Price Basket(IPB) », UIT, https://www.itu.int/en/ITU-D/Statistics/Dashboards/Pages/IPB.aspx).

7. Le chapitre 4 examine plus en détail les contraintes liées à l’offre.

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152 Afrique numérique

CHAPITRE 4

Infrastructure numérique et des données

Stimuler une plus grande disponibilité et une meilleure utilisation grâce à des réformes réglementaires et des politiques

Les défis du marché en matière de connectivité à internet : Accessibilité financière, utilisation et qualité

Les chapitres précédents ont examiné les effets transformationnels que les technologies numériques (TN) peuvent avoir sur les entreprises et l’innovation, en permettant d’offrir de meilleurs emplois à un plus grand nombre de personnes. Ces effets requièrent l’adoption et une utilisation intensive des TN par les entreprises et les ménages. Une pénétration limitée d’internet, une faible consommation des données, des prix élevés et une mauvaise qualité des services de l’internet mobile constituent les principaux défis du marché en Afrique. Cette situation est en grande partie due à l’absence de règles de marché favorables à la concurrence et d’interventions adéquates des pouvoirs publics pour encourager la concurrence et faciliter la fourniture de services de qualité à des prix abordables, en particulier aux tranches de population à faible pouvoir d’achat et là où la fourniture de services est coûteuse.

Bien que les connexions mobiles à haut débit (troisième et quatrième génération – 3G et 4G, respectivement) aient rapidement augmenté – à un taux annuel moyen de 30,2 % entre 2016 et 2022 – le nombre d’abonnés uniques à l’internet mobile a augmenté plus lentement, à un taux annuel de 10,3 % au cours de la même période.1 La disponibilité de la connectivité à haut débit (couverture) reste un problème pour environ 151 millions de citoyens en Afrique (dont 146 millions en Afrique subsaharienne).2

L’utilisation limitée d’internet persiste également. En moyenne, les abonnés uniques à l’internet mobile ne représentent que 22 % de la population de l’Afrique subsaharienne, 34 pays comptant moins de 25 abonnés uniques à l’internet mobile pour 100 habitants en 2021. Comme indiqué au chapitre 1 (figure 1.10, panneau b), l’écart d’adoption entre la disponibilité et l’utilisation est resté presque constant depuis 2010, et en 2021, l’Afrique affichait l’écart d’adoption (en pourcentage de la population couverte) le plus large par rapport à d’autres régions.

En outre, le trafic de données par habitant reste faible, même par rapport aux pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure d’autres régions (figure 4.1), le trafic le plus faible se situant en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale (0,6 gigaoctet [Go] par habitant et par mois). Même en tenant compte des niveaux du produit intérieur brut par habitant, le trafic de données par habitant est plus faible qu’attendu : la plupart des pays

153

FIGURE 4.1 Trafic de données mobiles par habitant, par sous-région et par groupe de revenu, Afrique, 2020

Afrique de l’Est et australe

Sous-région africaine

Afrique du Nord Revenu intermédiaire de la tranche inférieure

Source : Données du marché TeleGeography 2020.

Revenu intermédiaire de la tranche supérieure

Revenu élevé

l’Afrique)

Note : Ce graphique montre le trafic mensuel moyen de données mobiles par habitant (nombre de gigaoctets [Go] provenant des réseaux d’un pays donné) en Afrique et dans d’autres pays par groupe de revenu (à l’exclusion des pays africains) en 2020. L’échantillon total comprend 76 pays, dont 19 en Afrique.

africains se situaient dans le quadrant inférieur gauche tant en 2018 qu’en 2020 (figure 4.2).

En outre, bien que les prix aient baissé avec le temps, l’accessibilité financière reste un problème majeur pour l’adoption d’internet. Alors que les prix nominaux moyens simples de l’Afrique (en dollars US) pour 1 Go de données ont chuté de 64 % entre 2015 et 2020,3 deux pays (Cabo Verde et les Seychelles) ont connu des baisses de prix inférieures à 20 %, et les prix ont même augmenté de jusqu’à 2 % dans six pays : le Maroc, le Gabon, la Namibie, São Tomé et Principe, le Tchad et le Togo.

Les prix des données ont considérablement baissé en Afrique par rapport au revenu national brut (RNB) par habitant (figure 4.3, panneau a). Ils restent néanmoins élevés en pourcentage du RNB mensuel par habitant : le coût moyen de 2 Go en pourcentage du RNB par habitant était de 7,2 % en Afrique (8,9 % en Afrique subsaharienne) en 2021, et de plus de 20 % au Tchad, en République centrafricaine, en Guinée équatoriale et au Zimbabwe (carte 4.1). Ce coût est nettement supérieur à l’objectif de 1 Go pour moins de 2 % du RNB mensuel par habitant fixé par la Commission du haut débit pour le développement durable. 4

En outre, le prix des appareils est également un obstacle (figure 4.3, panneau b). Par exemple, le prix des smartphones en pourcentage du RNB par habitant est plus élevé en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale que dans les pays à revenu faible ou intermédiaire d’autres régions. Les consommateurs à faible utilisation, généralement des particuliers ou des chefs d’entreprise à faible revenu, paient des prix nettement plus élevés par unité de données que les consommateurs à forte utilisation et à revenu élevé (encadré 4.1).

154 Afrique numérique
0,6 1,1 3,3 4,0 8,7 11,9 0 2 Trafic mensuel de données par habitant (Go) 4 6 8 10 12 14
Afrique de l’Ouest et centrale
Groupe de revenu (à l’exclusion de

FIGURE 4.2 Corrélation entre le trafic de données mobiles par habitant, 2020, et le PIB, 2018

Soudan

Zambie

Yémen, Rép.du

Islande

Suède

Thaïlande Turquie Ouganda

de Lettonie Lituanie Malaisie Malte Mongolie

Serbie

Pérou Philippines

Slovénie

Singapour

Indonésie Irlande Italie Japon

Suisse

Royaume-Uni

Log PIB par habitant

Sources : Banque mondiale, 2021e pour les données de 2018 et TeleGeography, 2020 pour les données de marché.

Note : Ce graphique montre le trafic de données mobiles par habitant (gigaoctets [Go] par mois) par rapport au PIB par habitant, pour 2018 (lignes et points bleu clair) et 2020 (lignes et points bleu foncé).

Infrastructure numérique et des données 155 Afghanistan Albania Argentina Australia Bangladesh Benin Brazil Cameroon Canada Chad Chili China Colombia Costa Rica Cōte d'Ivoire Croatie Egypt Eswatini France Gabon Géorgie Ghana Guinea Guinea-Bissau Honduras Indonésie Iran Ireland Italy Kazakhstan Kenya Korea, Rep. Liberia Madagascar Malawi Malte Mongolie Myanmar Namibia Nepal Pays-Bas Niger Nigeria Pakistan Pérou Philippines Poland Portugal Russian Federation Rwanda Serbie Singapore Slovak Republic Slovenia Portugal South Africa Soudan Sweden Tanzania Thailand Tunisia Uganda Ukraine United States Vanuatu Vietnam Albania Algérie Bangladesh Colombia Congo, Rép.du France Allemagne Ghana Guinea Guinea-Bissau Kazakhstan Kenya Mexique M… Namibia Norvège Pakistan Roumanie Rwanda Spain Tunisia Zimbabwe –5 0 5 10 15 20 25 30 35 2,5 3,0 3,5 4,0 4,5 5,0 Trafic mensuel total de données par habitant (Go)
Japan République tchèque Greece Hong Kong SAR, China Spain Algérie Arménie Autriche Bahreïn Biélorussie Belgique Cambodge Congo, Rép.du Danemark Estonie Éthiopie Allemagne Hongrie Islande Inde Irak Jordanie République kirghize Lettonie Lituanie Malaisie Mexique Moldavie Nouvelle-Zélande Norvège Roumanie
Arabie saoudite
Sri Lanka Turquie Uruguay Ouzbékistan
Zambie Autriche Autriche Bahreïn
Biélorussie Chili Chine Croatie Danemark Honduras
Hong Kong SAR, Chine Inde
Corée,
Rép.
Pays-Bas
Fédération de Russie
États-Unis Uruguay

FIGURE 4.3 Prix moyens des données et des smartphones, par région, sous-région africaine et groupe de revenu global des pays

a. Prix moyen d’un gigaoctet de données, 2013–20

Sources : Union internationale des télécommunications (UIT) ensemble de données « Prix TIC » 2021 (https://www .itu.int/en/ITU-D/Statistics/Pages/ICTprices/default.aspx) ; Alliance for Affordable Internet (A4AI), ensemble de données « Device Pricing 2021 » (https://a4ai.org/research/device-pricing-2021/).

Note : Le panneau a montre 1 Go de 2013 à 2016, 1,5 Go de 2017 à 2020, en utilisant les classifications des revenus des pays de la Banque mondiale. Le panneau b donne le prix moyen des smartphones en pourcentage du RNB mensuel par habitant en Afrique et dans les autres pays par groupe de revenu (à l’exclusion des pays africains) en 2021. Go = gigaoctet ; RNB = revenu national brut.

L’accessibilité financière est un problème pour les particuliers et les entreprises. Les forfaits de données pour les petites et moyennes entreprises sont également plus coûteux en Afrique que dans d’autres régions, les vitesses sont plus faibles et les allocations de données sont plus limitées, notamment le volume restreint dans les forfaits mobiles ou l’absence d’offres illimitées dans les forfaits d’internet fixe. Dans au moins 11 pays d’Afrique subsaharienne, les opérateurs n’ont pas d’offre standard garantissant une

156 Afrique numérique
25 20 15 10 5 0 2012 2014 Prix m oy en en pourcentage du RNB mensuel par habitant 2016
2018 2020 Amérique
Afrique subsaharienne
et
Moyen-Orient
Europe
centrale Asie de l’Est
Asie du Sud 46,3 44,2 Sous-région africaine Groupe de revenu des pays (à l’exclusion de l’Afrique) 24,8 35,1 30,8 4,7 Prix m oye n en pourcentage du RNB mensuel par habitant 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 Afrique orientale et australe Afrique du Nord Revenu intermédiaire de la tranche supérieure Revenu élevé Afrique de l’Ouest et Afrique centrale à revenu élevé Revenu intermédiaire de la tranche inférieure
b. Prix moyen d’un smartphone, 2021
latine et Caraïbes
Canada
États-Unis
et Afrique du Nord
et Asie
et Pacifique

CARTE

République du Congo Rép. dém. du Congo

Coût en pourcentage du RNB par habitant

≤1

>1 to ≤2

>2 to ≤5

>5 to ≤10

>10

Non disponible

Source : Union internationale des télécommunications (UIT), ensemble de données ICT Price Baskets (IPB) 2021 (https://www.itu.int/en/ITU-D/Statistics/Dashboards/Pages/IPB.aspx).

Note : La carte montre le coût total d’un forfait haut débit de 2 Go – le forfait de données utilisé pour la comparaison des prix – exprimé en pourcentage du revenu national brut (RNB) par habitant.

vitesse de téléchargement d’au moins 25 mégabits par seconde (Mbps), soit la vitesse approximative nécessaire pour une navigation légère sur le web et le courrier électronique pour un maximum de cinq travailleurs et l’utilisation d’un terminal de point de service (encadré 4.2).

Dans 10 pays d’Afrique subsaharienne, aucun forfait avec une allocation de données illimitée n’était disponible. Ce manque affecte le type de contenu et de technologies numériques qui peuvent être proposés en ligne et limite l’expérience du consommateur (pour les entreprises et les particuliers), empêchant la demande d’être attirée par les services numériques en ligne, comme elle devrait l’être.

Une faible vitesse et une latence élevée – c’est-à-dire de longs temps d’attente – ont des effets profonds sur la qualité du service et l’expérience de l’utilisateur. Bien que la vitesse moyenne de téléchargement ait été multipliée par plus de cinq en Afrique entre 2014 et 2021, elle n’atteint que 23 Mbps,5 soit moins que les 30 Mbps considérés comme un haut

Infrastructure numérique et des données 157
Mauritius Madagascar Seychelles Comoros Lesotho Afrique du Sud Eswatini Botswana Namibie Mozambique Malawi Zambie Rwanda Tanzanie Kenya Ouganda Somalia Éthiopie Gabon Cameroun Soudan Soudan du Sud Érythrée Djibouti Algérie Tunisia Libye République arabe d’Égypte Maroc Sahara occidental Bénin Nigeria Togo Equatorial Guinea São Tomé and Príncipe Ghana Côte d’Ivoire Liberia Sierra Leone Guinée Guinea-Bissau Sénégal Mauritanie The Gambia Cabo Verde Angola Maurice Afrique Namibie Zimbabwe Malawi Burundi Soudan Tchad Niger arabe Sahara occidental Mali Burkina Faso Guinée équatoriale São Tomé et Príncipe
Gambie République centrafricaine
4.1 Coût d’un forfait haut débit mobile de 2 Go de données uniquement, en pourcentage du RNB par habitant, par pays, Afrique, 2021

ENCADRÉ 4.1

La tarification régressive du haut débit limite son utilisation par les pauvres

Les stratégies régressives de discrimination tarifaire – notamment les dates d’expiration courtes pour les forfaits de données et les prix plus bas à des moments qui ne conviennent pas à une utilisation productive (la nuit et les week-ends) – compromettent l’utilisation d’internet par les consommateurs à faible revenu. Dans des pays tels que le Gabon, les prix par mégaoctet pour les petits consommateurs sont plus de sept fois supérieurs à ceux des gros consommateurs. L’analyse montre que ces stratégies sont utilisées aussi bien par les grands que par les petits opérateurs.

La discrimination tarifaire pratiquée par les opérateurs de téléphonie mobile se traduit par des remises unitaires croissant en même temps que la consommation de données, avec des prix unitaires plus élevés pour les petits consommateurs. Les prix unitaires implicites par mégaoctet pour une consommation de 100 à 300 mégaoctets sont plus de deux fois plus élevés que pour 5 à 10 gigaoctets dans des pays comme le Gabon, l’Afrique du Sud et l’Ouganda, tandis que la discrimination est moins prononcée en Sierra Leone (figure B4.1.1).

d.

Source : Sites web des opérateurs.

Note : L’axe horizontal indique la quantité de données incluses dans un forfait en mégaoctets (Mo) pour la Sierra Leone, le Gabon et l’Ouganda et en gigaoctets (Go) pour l’Afrique du Sud. Les données ont été collectées en août-septembre 2021. Le « prix absolu » (axe de gauche) est le prix nominal d’un forfait de données. Le « prix implicite » (axe de droite) résulte de la division du prix absolu par la quantité d’unités de données (Mo ou Go) incluses dans le forfait. Les barres représentent les prix moyens non pondérés à l’intérieur de la fourchette d’allocation de données.

158 Afrique numérique
0 1 2 3 4 5 6 7 8 0 5 10 15 20 1 2 8 10 20 100 150 Prix implicite (dollars US par Go) Prix absolu (dollars US) a. Discrimination tarifaire de MTN en Afrique du Sud 0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 4,0 0 5 10 15 20 25 30 35 40 Prix implicite (dollars US par Go) Prix absolu (dollars US)
Discrimination tarifaire d’Orange en Sierra Leone Données (Go) Données (Go) Données (Go) Données (Go) 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 0 5 10 15 20 25 30 35 40 <0,1 0,1to≤0,3>0,3to≤1 >1to≤2 >2to≤5 >5to≤15 >15to≤20 <0,1 0,1to≤0,3>0,3to≤1 >1to≤2 >2to≤5 >5to≤15 >15to≤20 <0,1 0,1to≤0,3>0,3to≤1 >1to≤2 >2to≤5 >5to≤15 >15to≤20 Prix implicite (dollars US par Go) Prix absolu (dollars US)
Discrimination tarifaire d’Airtel au Gabon 0 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 4,0 4,5 0 2 4 6 8 10 12 14 16 Prix implicite (dollars US par Go) Prix absolu (dollars US)
FIGURE B4.1.1 Comparaison des prix absolus et implicites des forfaits de données, par fournisseur, dans quelques pays africains, 2021
b.
c.
Discrimination tarifaire d’Africel en Ouganda Prix absolu Prix implicite
(suite)

ENCADRÉ 4.1

La tarification régressive du haut débit limite son utilisation par les pauvres (suite)

De nouvelles stratégies de tarification et des interventions des pouvoirs publics doivent être testées afin de rendre les services plus abordables pour les pauvres. Dans le cas de l’Afrique du Sud, l’enquête sur le marché des données a mis en évidence ce problème ; c’est pourquoi Vodacom et MTN ont accepté de réduire les prix des plans avec de faibles forfaits de données. Des tarifs sociaux ciblés pourraient être utilisés pour réduire les prix pour les utilisateurs à faible revenu. La conception des nouveaux systèmes de tarification doit, en outre, tenir compte du contexte de l’internet mobile où la consommation a lieu au niveau de l’individu et non du ménage, et où le regroupement des services, la différenciation multidimensionnelle des produits et la contestabilité entrent en jeu.

ENCADRÉ 4.2

Les prix élevés du haut débit et les offres limitées restreignent l’utilisation des données par les PME

L’impact économique de l’adoption du numérique est potentiellement plus important que celui des anciennes technologies à usage général telles que les chemins de fer et l’électricité (OCDE, 2008). L’utilisation d’internet par les petites et moyennes entreprises (PME) est liée à l’augmentation de la productivité, aux processus d’internationalisation, aux activités d’exportation et aux pratiques de réduction des coûts. Hélas, l’adoption d’internet par les PME reste limitée dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire, principalement en raison du manque d’infrastructures, de prix abordables et de disponibilité de services adéquats. En Afrique subsaharienne, les PME se connectent à internet principalement à l’aide de forfaits mobiles ou de produits mobiles tels que des routeurs Wi-Fi mobiles qui offrent généralement des vitesses inférieures à celles des connexions par fibre optique et comprennent des plafonds de données. Afin d’étudier les options disponibles pour les PME dans les différentes régions, des informations sur les prix et les caractéristiques des forfaits de services à large bande fixes et mobiles ont été collectées pour 70 pays à revenu faible ou intermédiaire.a La collecte de données s’est concentrée sur les forfaits offrant une vitesse et un volume de données suffisant pour qu’une PME de un à cinq employés puisse utiliser le courrier électronique de base, naviguer en ligne et télécharger de gros fichiers. Cela comprend a) les forfaits fixes offrant une vitesse de téléchargement d’au moins 25 mégabits par seconde (Mbps) et une utilisation illimitée des données, et b) les forfaits mobiles proposant un total mensuel d’au moins 10 gigaoctets (Go). Notons que des vitesses plus élevées (25-50 Mbps) seraient nécessaires pour que les PME puissent utiliser la vidéoconférence en ligne, gérer le commerce électronique de base, dresser des inventaires, mener des activités logistiques et utiliser des terminaux points de vente, ainsi que pour accéder à des sauvegardes en ligne.

L’Afrique offre les forfaits internet fixes les plus lents et les plus chers, et moins d’options de forfaits fixes. Les pays africains ont également le niveau de données le plus bas et la vitesse la plus faible pour les forfaits mobiles, avec une vitesse de téléchargement médiane de 35 Mbps pour les forfaits fixes (contre 40 Mbps en Asie et 43 Mbps en Amérique latine) et une médiane de 133 Go de données incluses dans les forfaits mobiles (contre 150 Go en Asie et 164 Go en Amérique latine). En outre, les vitesses proposées sont inférieures à ce qui serait nécessaire pour permettre aux PME de travailler en ligne, d’envoyer des courriels et d’organiser des vidéoconférences. Parmi les 70 pays à revenu faible ou intermédiaire étudiés dans le monde, 11 pays d’Afrique subsaharienne (en plus de l’Afghanistan, du Sri Lanka et de l’Ouzbékistan) ne disposent pas de forfait haut débit standard offrant une vitesse d’au moins 25 Mbps.

Infrastructure numérique et des données 159
(suite)

ENCADRÉ 4.2

Les prix élevés du haut débit et les offres limitées restreignent l’utilisation des données par les PME (suite)

La plupart des pays africains ont des prix par Go et par Mbps de vitesse de téléchargement supérieurs aux moyennes mondiales (pour les forfaits fixes et mobiles). En moyenne, les pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ont les forfaits mobiles et fixes les plus chers, les taxes associées les plus élevées et le rapport prix/vitesse de téléchargement le plus élevé pour les forfaits fixes (5 dollars US par Mbps). Les pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe ont le prix moyen par Go le plus élevé, et l’Afrique du Nord offre, en moyenne, les forfaits mobiles et fixes les moins coûteux du continent. Les prix de l’Afrique par unité de vitesse et par unité de données élevés par rapport aux autres régions mettent en évidence les problèmes d’accessibilité financière et de qualité rencontrés par les PME du continent.

Source : Vergara-Cobos, 2021, d’après les données recueillies par Tarifica a. Basé sur les données collectées par Tarifica entre juin et septembre 2020 sur les sites web des opérateurs. Les plans tarifaires comparés ici sont uniquement ceux considérés comme convenant à une utilisation par les PME et ils excluent les lignes louées dédiées. Les forfaits fixes choisis sont ceux offrant une vitesse de téléchargement d’au moins 25 Mbps, et les forfaits mobiles choisis sont ceux incluant un total d’au moins 10 Go de données.

débit à faible vitesse et que les 78 Mbps disponibles en moyenne dans les pays à revenu élevé (figure 4.4, panneau a). Dix-huit pays d’Afrique subsaharienne ont des vitesses de téléchargement moyennes inférieures à 25 Mbps, et aucun n’a une vitesse de téléchargement moyenne supérieure à 100 Mbps.

Les technologies mobiles 4G plus rapides ne sont souvent disponibles que dans les villes, soulignant ainsi les écarts de couverture de l’internet haut débit entre les zones rurales et urbaines (carte 4.2). En outre, la faible latence – qui est essentielle pour les applications interactives et l’industrie 4.0 – reste élevée (figure 4.4, panneau b), ce qui témoigne d’une infrastructure de données limitée dans la région. Enfin, bien que le rapport coût-vitesse ait diminué en Afrique au cours des dernières années, il était encore en 2021 de 50 % plus élevé qu’en Europe et de 25 % plus élevé qu’en Asie et dans le Pacifique (figure 4.4, panneau c).

Lorsque des améliorations de la qualité et de la vitesse ont eu lieu, elles ont été inégalement réparties, avec des différences marquées dans les vitesses de téléchargement au sein des pays, des régions et même des villes. Les vitesses de téléchargement ont tendance à être plus rapides dans les villes. Par exemple, la vitesse de téléchargement médiane de Vodacom Afrique du Sud est supérieure d’environ 34 Mbps à celle de l’ensemble du pays. Dans d’autres pays, cette différence est plus faible, mais en moyenne, les villes affichent des vitesses de téléchargement médianes plus élevées que le reste du pays (Kechiche, 2022).

Toutefois, même au sein des villes, la distribution de l’internet rapide n’est pas égale. Les vitesses médianes de téléchargement peuvent varier considérablement d’un quartier à l’autre (carte 4.3).6 Les zones où les vitesses de téléchargement sont très élevées (plus de 50, 60, voire 80 Mpbs) sont souvent très proches de celles où les vitesses sont inférieures à la moyenne du pays. Par exemple, plusieurs zones d’Abidjan et d’Accra ont des vitesses médianes de téléchargement inférieures à 7 Mbps et 5 Mbps, alors que les médianes globales pour la Côte d’Ivoire et le Ghana sont d’environ 8,6 Mbps et 9,4 Mbps, respectivement. Dans l’ensemble, parmi un groupe de

160 Afrique numérique

FIGURE 4.4 Vitesse d’internet, qualité du service et rapport moyen coût-vitesse, par région

Sources : Basé sur les données de la plateforme Speedtest Intelligence d’Ookla et des ensembles de données de l’Union internationale des télécommunications (UIT).

Note : Dans le panneau b, le terme « latence » désigne le délai de transmission d’un message, en millisecondes (ms). Dans le panneau c, le « rapport coût-vitesse » est le rapport entre a) le coût de 2 gigaoctets de données et b) la vitesse moyenne de téléchargement, en mégabits par seconde (Mbps). Les panneaux utilisent les régions de l’UIT.

grandes villes, les différences au sein d’une même ville allaient d’environ 40 Mbps à Lagos, au Nigeria, à près de 80 Mbps à Abidjan, en Côte d’Ivoire (carte 4.3). Cet écart montre que, malgré l’amélioration de l’infrastructure de connectivité, une grande partie de la population peut encore être exclue de l’internet mobile rapide, même dans les villes.

Les pays africains doivent atteindre deux objectifs principaux en matière d’infrastructure numérique : a) améliorer l’accessibilité financière pour accroître l’utilisation, et b) étendre la disponibilité pour réduire la fracture numérique. Les deux sections suivantes présentent les défis et les recommandations pour les politiques dans ces domaines. En fonction de l’importance relative des écarts d’utilisation et de disponibilité, les pouvoirs publics peuvent choisir la meilleure combinaison parmi quatre instruments politiques principaux (avec des chevauchements) : une réglementation favorable à la concurrence,

Infrastructure numérique et des données 161
50 40 30 20 10 0 201420152016 Vi te sse de té léchargement mo ye nne (Mbps) Temps de latence m oy en (ms) 201720182019 300 350 200 250 100 150 0 50 20142015201620172018 2019 Afrique Moyen-Orient Asie et Pacifique Canada et États-Unis Amérique latine et Caraïbes Europe de l’Est Europe occidentale 0 1 2 3 4 5 6 7 20142015201620172018201920202021
d’internet (téléchargement), 2014-2019
a. Vitesse
b. Temps de latence, 2014-2019
Rapport coût-vitesse
c. Rapport coût-vitesse, 2014-2021

CARTE 4.2 Parts de la population bénéficiant d’une couverture internet (3G contre 4G), République démocratique du Congo, Nigeria et Tanzanie, 2021

Pourcentage 10–020–1030–2040–3050–4060–50 70–6080–70 90–80100–90

Sources : Banque mondiale 2022, sur la base d’une analyse par la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) des données des opérateurs de téléphonie mobile, de la plateforme GSMA Intelligence, du Facebook Connectivity Lab, d’enquêtes auprès des ménages du Center for International Earth Science Information Network (CIESIN) et du Group on Earth Observations

Note : La couverture de la population se rapporte à la population totale. 3G = technologie de communications mobiles de troisième génération ; 4G = technologie de quatrième génération.

162 Afrique numérique
c. Nigeria (3G) d. Nigeria (4G) a. République démocratique du Congo (3G) b. République démocratique du Congo (4G) e. Tanzanie (3G) f. Tanzanie (4G) Kisangani Mbuji-Mayi Kano Abuja Arusha Dodoma Dar es Salaam Mwanza Arusha Dodoma Dar es Salaam Mwanza Ibadan Lagos Kano Abuja Ibadan Lagos Lubumbashi Kinshasa Kisangani Mbuji-Mayi Lubumbashi Kinshasa

CARTE 4.3 Vitesses de téléchargement du haut débit mobile, dans quelques zones urbaines, Afrique, 2020

Source : Basé sur l’analyse des données Speedtest Intelligence d’Ookla pour juin 2020, au 24 septembre 2022.

Note : Les cartes montrent les vitesses de téléchargement médianes du haut débit mobile pour chaque zone d’environ 70 kilomètres carrés en juin 2020. La « vitesse de téléchargement » mesure la rapidité avec laquelle les données peuvent être transférées d’un serveur sur internet vers un appareil, mesurée en mégabits par seconde (Mbps). Les données sont basées sur des échantillons mobiles, dont le nombre varie en fonction du lieu.

Infrastructure numérique et des données 163
b. Accra, Ghana e. Lagos, Nigeria f. Nairobi, Kenya d. Johannesburg, Afrique du Sud c. Le Caire, Égypte
Mbps 0.18+ 6.29+ 9.3+ 13+ 80+ Mbps 0.85+ 4.34+ 8.29+ 13+ 47+ Mbps 0.62+ 9.79+ 13+ 17+ 43+ Mbps 0.34+ 10+ 16+ 24+ 58+ Mbps 0.96+ 6.24+ 8.71+ 11+ 41+ Mbps 0.89+ 6.42+ 9.54+ 14+ 69+
a. Abidjan, Côte d’Ivoire

visant à réduire les coûts, et pour la couverture rurale et des règles de service universel. La politique de service universel peut également favoriser l’accessibilité financière si elle est spécialement ciblée sur les segments vulnérables du marché.

La disponibilité et l’utilisation des réseaux mobiles à haut débit varient, mettant en évidence les priorités d’action pour l’amélioration de l’accessibilité financière et de la disponibilité. En moyenne, les pays africains ont une couverture 3G ou 4G de plus de 80 %, mais le niveau d’utilisation (abonnés uniques à l’internet mobile en pourcentage de la population) n’est que de 26,4 % en moyenne, soit moins que la moyenne des pays à revenu élevé, qui est de 65,5 % (figure 4.5).

La littérature suggère l’existence d’une masse critique pour la diffusion du haut débit, à partir de laquelle les avantages deviennent plus importants (voir Koutroumpis, 2009), mais la plupart des pays africains sont en dessous de ce seuil (50 %). En outre, près de 20 % de la population rurale africaine n’est pas couverte par le haut débit mobile, et seuls 62 % de la population rurale y ont accès, contre 99 % dans les zones urbaines (UIT, 2021).

Notons également que même la couverture 2G (deuxième génération) varie d’un pays à l’autre, allant d’une couverture quasi universelle au Bénin et au Rwanda à une couverture plus limitée dans d’autres pays tels que la République démocratique du Congo (75 % au niveau national et seulement 52 % dans les zones rurales). En outre, l’écart

FIGURE 4.5 Corrélation entre la disponibilité et l’utilisation des réseaux mobiles à haut débit, par pays, Afrique, 2022

São Tomé et Príncipe

Rwanda

Égypte, Rép. arabe Libye

Afrique du Sud

Utilisation (nombre d’abonnés uniques à l’internet mobile en % de la population)

Source : Élaboration basée sur les données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA), consultées en novembre 2022 à l’aide de la plateforme propriétaire GSMA Intelligence

Note : Les lignes pointillées bleu clair représentent les moyennes de la couverture et de l’utilisation pour l’Afrique ; la ligne verticale bleu foncé est un niveau de référence correspondant à la masse critique. L’axe des y indique la moyenne de la couverture de la population par les technologies de communication mobile de troisième génération (3G) ou de quatrième génération (4G) dans chaque pays.

164 Afrique numérique
Burundi Comores Djibouti Éthiopie Éthiopie Kenya Madagascar Malawi
Mayotte Mozambique
Somalie Tanzanie Ouganda Zambie Zimbabwe Angola Cameroun Tchad Congo, Rép.du Congo, Rép. dém. du Gabon
Maurice
Seychelles
Algeria
Maroc Soudan Tunisie
Namibie
Botswana Eswatini Lesotho
Bénin Burkina Faso
d’Ivoire Gambie Ghana Guinée Guinée-Bissau Liberia Mali Mauritanie Niger Nigeria Sénégal Sierra Leone Togo 40 50 60 70 80 90 100 10 20 30 40 50 60 Couverture (% de la population couverte par la 3G ou la 4G)
Cabo Verde Côte

d’utilisation est également considérable pour les services mobiles vocaux et textuels soutenus par la 2G. Par exemple, en République démocratique du Congo, l’utilisation de la téléphonie mobile dans les zones rurales est inférieure à 20 %, alors que la couverture est de 52 % (Banque mondiale, 2022).

L’accessibilité financière pour accroître l’utilisation

Les mesures favorisant l’accessibilité financière de la connectivité à internet contribueront à accroître l’adoption et l’utilisation des TN en Afrique. Comme nous l’avons vu dans les chapitres 2 et 3, l’accessibilité financière et les niveaux de revenus déterminent l’aptitude à payer, tandis que les capacités déterminent la volonté de payer. Les politiques d’accessibilité financière devraient viser à promouvoir la concurrence dans la fourniture d’infrastructures numériques et à réduire les coûts opérationnels en utilisant des instruments favorisant l’efficacité de l’allocation et de la production.

Une analyse transnationale pour la période 2010-2020 (Aviomoh, Begazo et Golla, à paraître) montre que la concentration du marché (une variable de remplacement pour la faiblesse de la concurrence) est liée à un taux d’adoption plus faible (mesuré par le nombre d’abonnés uniques à l’internet mobile et par le nombre d’abonnements 3G plus 4G) – voir figure 4.6. Les politiques en faveur de la concurrence peuvent influer sur la capacité à payer avec des forfaits de données plus abordables. Elles peuvent également influer sur la volonté d’utiliser grâce à une meilleure qualité de service qui permet des applications et des contenus numériques plus attrayants. Dans un environnement concurrentiel, les interventions des pouvoirs publics visant à réduire le coût de la fourniture des services – en éliminant des réglementations et des redevances trop lourdes – devraient permettre aux fournisseurs de diminuer davantage les prix facturés aux utilisateurs finaux.

Promouvoir la concurrence tout au long de la chaîne de valeur de l’infrastructure numérique

La concurrence et les mesures favorables à la concurrence ont des effets positifs sur la dynamique du marché, notamment sur les prix et la qualité. La réglementation en faveur de la concurrence réduit la concentration, mesurée par l’indice Herfindahl-Hirschman (IHH), et fait baisser les prix sans nuire à la qualité, réduire les investissements ou les recettes fiscales (Faccio et Zingales, 2017, à partir de données sur les télécommunications mobiles provenant de 148 pays). La concurrence peut à la fois faire baisser les prix et inciter à investir, comme cela s’est produit au Rwanda (Björkegren, 2020). La présence d’un plus grand nombre de fournisseurs de services dans le secteur de la téléphonie mobile est associée à une baisse des prix, et la présence de concurrents perturbateurs influence les stratégies de tarification sur les marchés de la téléphonie mobile en faveur des utilisateurs (Ofcom, 2016). Enfin, la concurrence peut également agir sur la mise à niveau technologique et l’offre de produits : une concurrence accrue accélère l’adoption de nouvelles technologies et augmente le ciblage des services (Seim et Viard, 2011, sur la base des changements structurels survenus dans le secteur des télécommunications aux États-Unis entre 1996 et 1998).

Les interventions en faveur de la concurrence peuvent également accroître le bienêtre des ménages. Le renforcement de la concurrence sur le marché des télécommunications peut contribuer à une réduction du taux de pauvreté de 0,02 à 0,82 point de

Infrastructure numérique et des données 165

FIGURE 4.6 Effets de la concentration du marché sur l’accessibilité financière et la pénétration de la 3G+4G+5G

a.

global

b. Échantillon de l’Afrique

Source : Aviomoh, Begazo et Golla, à paraître.

Note : Modèle des moindres carrés à trois niveaux utilisant des données de panel au niveau des pays pour la période 2012-2018, la variable dépendante de chaque équation étant indiquée au bas des graphiques. Échantillon total, 616 observations ; échantillon Afrique, 147 observations. Résultats similaires si l’on considère le taux de pénétration des abonnés uniques à l’internet mobile au lieu des connexions 3G+4G+5G (technologie de communication mobile de troisième, quatrième et cinquième génération). Les contrôles pour l’électricité, la scolarisation, l’urbanisation et la densité de population sont significatifs. Le contrôle de l’âge du régulateur n’est pas significatif. Go = gigaoctet ; IHH = indice de concentration de Herfindahl Hirschman ; PMS = [réglementation des opérateurs disposant] d’un pouvoir de marché significatif.

Niveau de signification : * = 10 %, ** = 5 %, *** = 1 %.

166 Afrique numérique −0,119*** IHHRègles pour le service universel Opérateur fixe privatisé Pénétration de la 3G+4G en 2010 PMS Règles du spectre Partage des infrastructures IHH en 2010 IHHRègles pour le service universel Opérateur fixe privatisé Pénétration de la 3G+4G en 2010 PMS Règles du spectre Partage des infrastructures IHH en 2010 0,051*** 0,045*** 3G+4G+5G par 100 habitants IHH 3G+4G+5G par 100 inhabitants IHH 0,555*** −0,099*** −0,015* −0,033** 0,0001*** −0,3 −0,2 −0,1 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 −0,1043*** −0,0086 0,0768*** 0,0973 −0,1311*** 0,0272* −0,0631** 0,0001*** −0,2 −0,1 0 0,1 0,2 0,3 0,4 Coefficient Coefficient
Échantillon

pourcentage (figure 4.7), et à une augmentation de l’accès aux services de 0,06 à 5,37 points de pourcentage, même sans tenir compte des effets de la participation au marché du travail.7 En outre, la réglementation des tarifs de terminaison d’appel mobile peut être beaucoup plus bénéfique pour les consommateurs que l’entrée,8 et les consommateurs à revenu élevé et les citadins pourraient en bénéficier davantage sous la forme d’une augmentation du surplus du consommateur (Hawthorne et Grzybowski, 2019 pour l’Afrique du Sud). En outre, les retards dans la réglementation qui permettent ou facilitent l’entrée peuvent réduire considérablement le bien-être social (Björkegren, 2020, pour le Rwanda). Les structures du marché ne permettent toutefois pas encore la concurrence sur les marchés africains de l’infrastructure numérique et les principaux marchés des services numériques. Le manque de concurrence sur le marché en général a été souligné comme un défi majeur dans la plupart (54 %) des évaluations nationales de l’Initiative de l’économie numérique pour l’Afrique (DE4A) de la Banque mondiale en Afrique de l’Est et de l’Ouest. Comme indiqué précédemment, les résultats du marché tels que les prix élevés et la faible qualité reflètent le fait que, parmi d’autres causes liées aux économies d’échelle et de portée, les structures du marché limitent la concurrence tout au long de la chaîne de valeur. Des monopoles et duopoles existent encore dans de nombreux pays africains (figure 4.8 ; voir l’annexe A pour une vue d’ensemble régionale). De nombreux monopoles persistent sur des marchés clés à goulets d’étranglement, tels que la connectivité internationale, qui sont nécessaires pour échanger des données avec le monde entier et utiliser

FIGURE 4.7 Réduction du taux de pauvreté grâce à des politiques simulées visant à accroître la concurrence dans le secteur des télécommunications, dans certains pays d’Afrique subsaharienne, 2015–2018

Djibouti Éthiopie Ghana Kenya Mauritanie Ouganda Scénario de base PED plus élevée PED inférieure

Source : Vergara-Cobos, Malasquez et Granguillhome, à paraître.

Note : Les résultats présentés dans ce graphique proviennent d’une simulation des effets de différentes politiques favorables à la concurrence appliquées dans chaque pays. Par exemple, dans le cas du Ghana, la politique simulée est celle où la part de marché du principal concurrent passe de 65 % à 49 %. Les résultats sont sensibles à l’élasticité de la demande par rapport au prix (PED – price elasticity of demand), c’est pourquoi les résultats sont présentés pour une gamme de valeurs de la PED. Les estimations ponctuelles concernent les scénarios d’élasticité. pp = points de pourcentage.

Infrastructure numérique et des données 167
Variation du taux de pauvreté par tête (p p) 0,20 0 –0,20 –0,40 –0,60 –0,80 –1,00 –1,20 –1,40

FIGURE 4.8 Importance des contraintes concurrentielles dans les structures de marché de la chaîne de valeur numérique, 2021

Couche d’infrastructure en amont

Couche d’infrastructure intermédiaire

Couche d’infrastructure en aval Services numériques

de structure du marché

Concentration (IHH)a

Connectivité internationale (câbles sous-marins, passerelles)

Infrastructure passive (tours)

Vente en gros de services

fixes (dorsale en fibre optique)

Vente en gros de services mobiles (itinérance, ORMV, partage)

Vente au détail de services fixes

Vente au détail de services mobiles Argent mobile

Données et services en nuage Plateformes numériques

Plus de 5 000 entreprises numériques ayant leur siège en Afrique

Structure du marchéb

Nouvelles entrées (2017-2020)c

Présence de l’État (majoritaire, minoritaire)d

21 pays autorisent les ORMV, mais pas d’entrées

Source : Banque mondiale, base de données des acteurs du marché numérique en Afrique (interne), 2021, fondé sur les données issues de nombreuses sources, notamment TeleGeography, Global System for Mobile Communications Association (GSMA), Africa

Bandwidth Maps, Afterfibre.org, Policytracker, TowerXchange, PeeringDB et Xalam Analytics

Note : Les cercles rouges représentent un risque plus élevé pour la concurrence, en moyenne ; les cercles orange, un risque moyen ; et les cercles verts, un risque plus faible. L’échantillon couvre 54 pays africains pour le commerce de détail mobile, 38 pour le commerce de détail fixe, 52 pour les dorsales en fibre optique, 26 pour les tours de télécommunications, 35 pour les câbles sousmarins, 25 pour les centres de données et 15 pour l’argent mobile. AOA = Afrique orientale et australe ; AOC = Afrique occidentale et centrale ; IHH = indice de Herfindahl-Hirschman (mesure de la concentration du marché) ; ORMV = opérateur de réseau mobile virtuel ; AN = Afrique du Nord ; EAM = État en tant qu’actionnaire minoritaire ; EP = entreprise détenue majoritairement ou entièrement par l’État ; – = non disponible.

a. Un marché dont l’IHH est inférieur à 1 500 est considéré comme ayant une structure concurrentielle, un IHH compris entre 1 500 et 2 500 est modérément concentré et un IHH supérieur ou égal à 2 500 est fortement concentré.

b. En termes de monopoles et de duopoles, moins de 5 % des pays sont des monopoles/duopoles = vert, 5 à 20 % des pays = orange, plus de 20 % des pays = rouge.

c. Les nouvelles entrées dans moins de 5 % des pays = rouge, dans 5 à 20 % des pays = orange, dans plus de 20 % des pays = vert.

d. Présence d’entreprises publiques dans moins de 10 % des pays = vert, dans 10 à 50 % des pays = orange, et dans plus de 50 % des pays = rouge.

des solutions numériques reposants sur des services en nuage. Ils persistent également dans les réseaux fixes nationaux, qui sont essentiels pour que la dorsale et les liaisons terrestres étendent le haut débit au-delà des grandes zones urbaines et fournissent des connexions à haut débit dans les zones urbaines et industrielles.

La bonne nouvelle est que le niveau d’offre et de diversité des câbles sous-marins et des réseaux terrestres en fibre optique augmentent. Cependant, dans plus de 25 pays, les entreprises publiques9 restent des acteurs du marché, ce qui leur permet soit d’entraver la concurrence, soit de permettre la participation du secteur privé aux marchés liés si l’accès aux installations est transparent, ouvert, non discriminatoire et axé sur les coûts.10

Les évolutions du marché, telles que les activités de fournisseurs de tours, d’opérateurs de réseaux mobiles virtuels (ORMV) et de fournisseurs d’argent mobile

168 Afrique numérique
Variable
AOA AN AOC Monopoles Duopoles Toute l’Afrique EP EAM

indépendants, devraient modifier la structure du marché et influer positivement sur sa dynamique, en stimulant la concurrence. Cependant, des défis ont transformé cette amélioration attendue du paysage. L’apparition de monopoles et duopoles sur le marché des tours (par exemple, au Tchad, au Gabon, en Ouganda et en Zambie) maintient encore l’infrastructure mobile passive entre quelques mains. L’exploitation des ORMV est beaucoup plus limitée qu’on ne l’espérait au départ ; il a fallu près de deux ans pour qu’Equitel puisse opérer au Kenya en tant qu’ORMV.11 Bien que 21 autres pays africains autorisent les ORMV, aucun n’est opérationnel à ce jour.

En ce qui concerne les opérateurs d’argent electronique, ceux qui sont intégrés verticalement ont exacerbé les effets de concentration du marché des réseaux, ce qui a eu pour effet de maintenir ou de renforcer le pouvoir de marché des opérateurs de réseaux mobiles (ORM).12 Les marchés de l’argent electronique sont désormais plus concentrés que ceux de la téléphonie mobile de détail, par exemple au Kenya et en Somalie. La concentration des marchés du stockage de données et de l’informatique en nuage est plus faible que pour les infrastructures, mais reste modérément ou fortement concentrée dans 19 pays.13 En revanche, la concentration du marché14 des solutions numériques est très faible, et les marchés des entreprises de solutions numériques sont dynamiques avec l’arrivée de nouvelles entreprises dans 37 pays africains (14 en Afrique occidentale et centrale, 17 en Afrique orientale et australe, et 4 en Afrique du Nord).15 Le défi consiste à éviter que les acteurs dominants dans l’infrastructure numérique ne limite la concurrence dans les services numériques ou ne réduise leur adoption, étant donné le coût élevé et la faible qualité des services internet sous-jacents.

L’intégration verticale des entreprises dominantes crée des risques pour la concurrence tout au long de la chaîne de valeur. L’intégration verticale est courante dans l’infrastructure numérique étant donné l’existence d’économies de gamme et d’incitations à l’intégration pour éviter les problèmes d’immobilisation compte tenu des problèmes d’accès typiques avec l’infrastructure à goulet d’étranglement. En Afrique, 81 % des entreprises opèrent dans au moins trois des neuf segments décrits dans la figure 4.8.

Outre les marchés concentrés en amont, au milieu et en aval, les grands acteurs du marché de la téléphonie mobile de détail et des réseaux en fibre optique sont intégrés verticalement dans d’autres segments. Vingt-et-un opérateurs détenant plus de 40 % de parts de marché dans la vente au détail de services mobiles sont intégrés dans deux autres segments ou plus (principalement l’argent electronique et l’infrastructure des tours) (figure 4.9, cadre a), tandis que 17 grands opérateurs de réseaux en fibre optique sont présents dans au moins deux autres segments (figure 4.9, cadre b). En outre, pour la connectivité internationale, six des huit monopoles dans les passerelles internationales sont intégrés verticalement dans des réseaux en fibre optique ou dans la vente au détail de services fixes ou mobiles. Dans seize pays africains, les opérateurs sont intégrés verticalement et détiennent plus de 40 % de parts de marché tant dans la vente au détail de services mobiles que dans les réseaux en fibre optique.16 Cela souligne l’importance d’introduire une réglementation des marchés goulets d’étranglement pour permettre la concurrence tout au long de la chaîne de valeur.

Les entreprises publiques sont des acteurs importants de l’infrastructure numérique en Afrique, en particulier dans le domaine de la fibre optique, mais la faiblesse de la gouvernance pourrait limiter la concurrence en aval. Les États détiennent des participations totales ou majoritaires dans des ORM représentant plus de 17 % de l’ensemble des abonnés africains à la téléphonie mobile, et des participations minoritaires dans des ORM représentant au moins 20 % supplémentaires des abonnés à la téléphonie mobile

Infrastructure numérique et des données 169

FIGURE 4.9 Intégration verticale des grandes entreprises de télécommunications actives dans plus d’un segment de la chaîne de valeur numérique, 2021

a. Entreprises de vente au détail de services mobiles actives dans d’autres segments

b. Entreprises du secteur de la fibre actives dans d’autres segments

Source : Banque mondiale, à paraître.

Note : Les graphiques présentent les résultats des entreprises ayant une part de marché de 40 % ou plus – un seuil commun de présomption de position dominante basé sur la jurisprudence de l’Union européenne. Nombre total d’entreprises considérées : 1 163 dans 55 pays africains. Pour les segments considérés, voir la figure 4.8.

(figure 4.10, panneau a). En outre, 60 % du réseau en fibre optique des opérateurs de télécommunications est entièrement ou majoritairement détenu par l’État (figure 4.10, encadré b). Du fait de cette propriété, les États sont dans une position clé pour permettre un accès orienté vers les coûts à cette infrastructure, afin de permettre des marchés concurrentiels en aval ; certains pays tels que le Nigeria et le Sénégal explorent ce type d’intervention. Si l’on considère les réseaux en fibre déployés dans d’autres secteurs tels que l’électricité et les transports, ce pourcentage augmente. En outre, les entreprises publiques peuvent influencer l’ensemble du secteur lorsqu’elles contrôlent des infrastructures essentielles. Sur un échantillon de 37 entreprises publiques ou liées à l’État dans 20 pays africains, 15 sont des monopoles dans au moins un segment (tel que les passerelles internationales, la vente au détail fixe et les réseaux en fibre optique).

Une mauvaise gouvernance permet aux entreprises publiques de continuer à fonctionner même lorsqu’elles nuisent à la situation budgétaire. Par exemple, en Angola, aucune entreprise publique détenue en totalité ou en majorité par l’État n’a versé de dividendes au Trésor, et certaines entreprises publiques, dont Angola Telecom, ont déclaré des pertes de plus de 107 millions de dollars US (Banque mondiale 2019b). En outre, la dette de Comoros Telecom, principalement envers la China EXIM Bank, représente environ 40 % de la dette nationale totale du pays. Des problèmes se posent non seulement en ce qui concerne la séparation des activités politiques et commerciales, mais aussi en ce qui concerne la faible transparence et redevabilité : en Afrique, seuls 17 % des 135 entreprises numériques publiques ou liées à l’État disposant d’un site internet divulguent des informations financières au public (Banque mondiale, à paraître).

Les monopoles dans les segments clés de la connectivité internationale créent des goulets d’étranglement entre la capacité des câbles sous-marins internationaux et l’infrastructure nationale à large bande. La capacité internationale d’internet s’est considérablement accrue, avec notamment plus de 49 câbles sous-marins atterrissant dans au moins 37 pays côtiers, ce qui facilite la connexion des pays enclavés. Elle comprend également des projets de câbles parrainés par des fournisseurs de contenu, tels que 2Africa (Facebook) et Equiano (Google), qui promettent une capacité sans précédent au cours des prochaines années. 17

170 Afrique numérique
17 10 14 6 9 1 4 0 67 16 33 4 13 1 5 0 0 20 40 60 80 Deux segments Nombre d’entreprises
Nombre d’entreprises Trois segments Quatre segments Deux segments Trois segments Quatre segments Cinq segments ou plus Cinq segments ou plus 0 5 10 15 20 Nombre d’entreprises
Nombre d’entreprises détenant une part de marché de plus de 40 %
actives

FIGURE 4.10 Parts des opérateurs dans le nombre d’abonnés à la téléphonie mobile et dans les réseaux de télécommunications en fibre optique, par degré de propriété de l’État et par sous-région, Afrique, 2020

Source : Banque mondiale, à paraître, à partir de la base de données interne de la Banque mondiale sur les acteurs du marché de l’infrastructure numérique en Afrique (panneau a) et des cartes de la bande passante en Afrique d’Hamilton Research au quatrième trimestre 2020 (panneau b).

Note : PPP = partenariat public-privé ; EP = entreprise publique.

Des pays comme l’Afrique du Sud, le Ghana, le Maroc, le Nigeria et la République arabe d’Égypte possèdent cinq câbles ou plus, et 57 % des autres pays côtiers possédant des câbles en ont au moins deux. Cependant, par rapport aux câbles sous-marins – dans plusieurs cas, détenus et exploités par des entreprises publiques en place – le nombre de stations d’atterrissage est restreint. Le Ghana et le Nigeria ont respectivement cinq et six câbles, mais une seule station d’atterrissage (figure 4.11). En outre, malgré les efforts déployés pour libéraliser les points d’accès internationaux, certains pays maintiennent un monopole de l’accès à la capacité internationale entre les mains de l’opérateur historique ou de l’acteur dominant. Par exemple, la Côte d’Ivoire possède quatre câbles, mais une seule station d’atterrissage exploitée par Côte d’Ivoire Telecom et un monopole sur la passerelle internationale. L’Algérie et l’Angola ont tous deux trois stations d’atterrissage avec trois et quatre câbles, respectivement, mais aussi un monopole sur les passerelles internationales.

Une réglementation sectorielle efficace et favorable à la concurrence est nécessaire pour stimuler la concurrence et obtenir de meilleurs résultats sur le marché. Les marchés restent concentrés avec un taux d’entrée limité (comme le montre la figure 4.8), principalement en raison de politiques qui soit restreignent l’entrée et renforcent la position dominante, soit découragent la rivalité fondée sur des règles du jeu équitables. L’octroi de licences, l’accès aux infrastructures, le contrôle des opérateurs disposant d’un pouvoir de marché significatif et la gestion du spectre sont essentiels pour la concurrence sur les marchés nationaux,18 tandis que les règles d’exclusivité et de libre accès sont vitales pour

Infrastructure numérique et des données 171
7 28 51 14 0% 53 46 1 28 13 41 18 0102030 Part de marché des abonnés
a. Part de marché moyenne des abonnés mobiles
405060 Afrique
et
et
du Nord Entièrement détenue par l’État Privé Minoritairement détenue par l’État Majoritairement détenue par l’État 0 50 100 150 200 250 300 350 400 201620202016202020162020 Afrique orientale et australe Afrique occidentale et centrale Afrique du Nord Kilomètres, en milliers Majoritairement détenue par l’État PPP Consortium Entièrement détenue par l’État Minoritairement détenue par l’État Privé
b. Extension des réseaux en fibre optique, 2016 et 2020
orientale
australe Afrique occidentale
centrale Afrique

FIGURE 4.11 Capacité internet internationale, représentée par les câbles sous-marins et les stations d’atterrissage, Afrique subsaharienne, 2021

Égypte, Rép. arabe d’

Nombre de points d’atterrissage

Congo, Rép.du

Congo, dém.du

Gambie

Guinée

Guinée-Bissau

Liberia

Mauritanie

São Tomé et Príncipe

Seychelles

Sierra Leone

Togo

CaboVerde Bénin Gabon

Mozambique Namibie

Algérie Comores Équatorial

Guinée

Madagascar Somalie

Libye Maurice Angola

Tunisie Côte d’Ivoire Sénégal Soudan Tanzanie

Maroc Cameroun (6)

Kenya

Ghana

Nigeria (6)

Djibouti (9)

Nombre de câbles sous-marins

Source : Banque mondiale, à paraître, à partir de bases de données internes (Regulatory Watch Initiative, Phase 2 de la Banque mondiale), publiques (« Level of Competition in International Gateways » de l’Union internationale des télécommunications) et privées (Global Internet Geography de TeleGeography).

Note : Dernières informations disponibles en décembre 2021. Les pays en rouge indiquent un monopole sur les passerelles internationales ; en jaune, une certaine concurrence ; et en vert, une libre concurrence. Les pays en noir sont ceux pour lesquels aucune information n’était disponible.

la concurrence dans le domaine de la connectivité internationale. Des politiques générales visant à responsabiliser et à protéger les consommateurs, ainsi que des mécanismes efficaces de règlement des litiges pour les fournisseurs de services, sont des compléments essentiels. La négociabilité des licences d’utilisation du spectre, la portabilité des numéros de téléphone mobile et l’ouverture à l’entrée d’opérateurs étrangers se sont avérées associées à une plus faible concentration et à une réduction des prix (Faccio et Zingales, 2017). De même, on a constaté que la baisse des frais de terminaison d’appel mobile et le plafonnement des prix de l’itinérance internationale étaient associés à une baisse significative des prix de détail ajustés en fonction de la qualité, tant pour les tarifs à bas prix sans engagement que pour les tarifs contractuels classiques avec engagement (Nicolle, Grzybowski et Zulehner, 2018).

En Afrique, la réglementation n’est pas toujours bien alignée sur les bonnes pratiques internationales. En moyenne, le niveau de réalisation des bonnes pratiques est d’environ 60 % pour cinq domaines clés : l’octroi de licences, l’interconnexion, la réglementation des opérateurs disposant d’un pouvoir de marché significatif, la gestion du spectre et les règles relatives à la connectivité internationale (figure 4.12).19 C’est dans le domaine de l’interconnexion que les résultats sont les plus faibles (49 % en moyenne), un domaine essentiel

172 Afrique numérique
5 4 3 2
1 3 4 56+ 12

FIGURE 4.12 Alignement de la réglementation relative à l’infrastructure numérique sur les bonnes pratiques internationales, dans certains pays africains, 2020

Licences Interconnexion SMP Gestion du spectre Connectivité internationale

Source : Élaboré à partir de la phase 2 de l’initiative de veille réglementaire (RWI – Regulatory Watch Initiative) de la Banque mondiale, 2021 (base de données interne).

Note : Informations datées d’octobre 2020 couvrant 23 pays d’Afrique du Nord, d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique de l’Est. Alignement complet sur les bonnes pratiques = 1 pour chacun des cinq domaines. PMS = [réglementation des opérateurs disposant] d’un pouvoir de marché significatif.

pour les pays où les services vocaux et les systèmes de messages courts (SMS) sont importants. Le niveau le plus bas suivant concerne la connectivité internationale et la gestion du spectre.20 Les réglementations de l’entrée sur le marché par l’octroi de licences et leur mise en œuvre sont les plus alignées sur les bonnes pratiques (65 % en moyenne). Dans les évaluations nationales de la DE4A, l’inefficacité a été désignée comme un obstacle majeur à la mise en place d’une économie numérique dans 20 pays africains et l’absence de lois et de réglementations l’a été dans 10 pays africains, soulignant la nécessité d’améliorer les lois et les réglementations ainsi que les pratiques réglementaires. Les services d’interconnexion sont essentiels pour la concurrence. Les tarifs élevés de terminaison mobile (TTM) des appels et messages SMS peuvent limiter l’aptitude des petits fournisseurs de services à réduire leurs tarifs hors réseau pour rivaliser dans la recherche d’abonnés, entraînant ainsi la création de clubs qui renforcent le pouvoir de marché des plus grands fournisseurs de services.21 Étant donné l’importance des communications vocales et des SMS en Afrique (qui représentent plus de 60 % des recettes des opérateurs), la concurrence sur ces marchés peut déterminer le choix des opérateurs de réseau mobile pour l’internet à haut débit. En Afrique du Sud, la réduction des RMP entre 2009 et 2017 a entraîné une baisse des prix tant prépayés que postpayés ajustés en fonction de la qualité, avec une convergence des prix on-net et off-net (Hawthorne, 2018). Une première vague de réduction des RMP a été observée en Afrique entre 2009 et 2013, suivie par des réductions de prix importantes (par exemple, au Kenya, au Mozambique, en Afrique du Sud et en Tanzanie). Les pays ont récemment lancé des révisions des RMP et les ont considérablement réduits, comme au Kenya (CA, 2021).

La mise en œuvre de règles favorables à la concurrence à l’aide d’obligations imposées aux opérateurs dominants peut éliminer les obstacles à l’entrée ou à l’expansion des fournisseurs de services, fournir un accès à l’infrastructure orienté vers les coûts, et réduire les coûts de changement de fournisseur pour les consommateurs. Toutefois, un seul des

Infrastructure numérique et des données 173
Score (1–5) 0 1 2 3 4 5 Bénin BurkinaFaso
Côted’IvoireGambieGhanaGuinéeGuinée-BissauLiberia MaliNigerNigeriaSénégalSierraLeoneTogoMarocAlgérieTunisieÉgypte,Rép.arabed’KenyaRwandaTanzanieOuganda
CaboVerde

huit opérateurs détenant plus de 65 % de parts de marché (présumés disposant d’un pouvoir de marché significatif selon les normes de l’UE) dans le secteur des services mobiles est soumis à des obligations, ce qui pose divers problèmes de mise en œuvre. Par exemple, le Kenya n’a pas imposé d’obligations à Safaricom, même après avoir réalisé une analyse de marché en 2016 (Piot, Bates et Edmunson, 2018), et l’Afrique du Sud vient de publier un projet de réglementation imposant des conditions à deux opérateurs déclarés comme disposant d’un pouvoir de marché significatif (ICASA, 2021), alors que des problèmes existaient depuis de nombreuses années (Purfield et coll., 2016). Au Sénégal, Sonatel a obtenu le statut d’opérateur PMS sur 12 marchés de gros en 2014, mais la loi sur les télécommunications n’a été mise à jour qu’en 2018. L’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP) du Sénégal a alors imposé l’obligation d’accorder un accès équitable, transparent et non discriminatoire aux infrastructures essentielles.

Le partage des infrastructures peut permettre aux petits opérateurs d’étendre leur couverture et d’être compétitifs. Il comprend des actifs passifs (tours et conduites) ou actifs (câbles en fibre optique et réseau d’accès radio). Il permet aux opérateurs existants de donner accès à leurs actifs à des opérateurs plus petits ou à de nouveaux entrants. Les accords d’itinérance sont un autre moyen d’accorder l’accès aux services d’infrastructure. La réglementation peut garantir la non-discrimination, empêcher les refus déraisonnables de fournir un accès et faciliter les accords à des conditions raisonnables de coûts et de services. Les mécanismes de règlement des litiges sont également essentiels pour la mise en œuvre des accords.

L’accès au spectre est également crucial pour pénétrer les marchés et améliorer l’offre de services et la concurrence. La concentration du spectre réduit la probabilité d’avoir des marchés mobiles compétitifs. Une politique du spectre favorable à la concurrence est donc essentielle pour garantir un nombre suffisant de fréquences aux fournisseurs de services dans le cadre d’un processus transparent. Plus que dans d’autres régions, le spectre mobile est très concentré dans les pays africains, en particulier d’Afrique du Nord (figure 4.13). La forte concentration du spectre nécessite des mesures de sauvegarde de la concurrence pour permettre l’entrée de nouveaux opérateurs ou l’expansion des plus petits. Toutefois, les mesures de sauvegarde en faveur de la concurrence, telles que les plafonds de spectre, les réserves ou les crédits d’appel d’offres, sont rarement prises en considération pour la gestion du spectre en Afrique subsaharienne (Pop et Coelho, 2021a). En ce qui concerne la connectivité internationale, la libéralisation des stations d’atterrissage des câbles et des passerelles internationales n’est pas achevée, et l’accès aux installations monopolistiques n’est pas réglementé dans toute l’Afrique. Certains pays ont libéralisé les stations d’atterrissage des câbles et les passerelles internationales, du moins sur le papier. Toutefois, la mise en œuvre fait défaut, entraînant un monopole de fait, comme au Togo, où Togo Telecom domine la capacité internationale (Banque mondiale, 2021b). En outre, l’absence de réglementation du transit PI (protocole internet) et les frais de connexion croisée facturés par les opérateurs dominants dans les passerelles internationales peuvent entraîner des coûts excessifs pour l’accès à la capacité des câbles sous-marins internationaux par les fournisseurs d’accès internet (FAI) nationaux. Dans certains pays, les procédures d’octroi de licences pour les stations d’atterrissage des câbles et les passerelles internationales, et de permis pour les infrastructures sous-marines sont peu claires et imprévisibles, et une analyse au cas par cas ainsi qu’un engagement avec les différentes autorités sont nécessaires.

Il existe au moins 54 autorités nationales de régulation des télécommunications en Afrique, avec un âge institutionnel moyen de 18 ans en 2020 pour un échantillon de

174 Afrique numérique

FIGURE 4.13 Concentration moyenne du spectre dans les bandes 700/800 MHz, par région et sous-région africaine, 2020

IHH par région (bandes 700/800 MHz)

IHH moyen (pays à revenu élevé)

IHH moyen (pays à revenu faible ou intermédiaire)

Sources : Élaboré à partir des bases de données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA), de TeleGeography et de PolicyTracker Spectrum

Note : IHH = indice de concentration de Hirschman-Herfindahl ; MHz = mégahertz.

43 pays, ainsi que de nouvelles autorités, comme en Somalie (encadré 4.3). Leur niveau d’indépendance – mesuré par le mode de nomination et de révocation du président et des membres – varie. Certaines autorités sont placées sous la supervision du ministère de tutelle. Tant le niveau que la source de financement influent sur la possibilité de prendre des décisions techniques indépendantes et solides. Une analyse de 23 pays africains montre que seuls 9 d’entre eux ont des revenus provenant du secteur, des budgets adoptés par l’autorité (au lieu d’être alloués par le parlement ou le gouvernement) et la publication de comptes audités. L’aptitude des régulateurs à attirer et à retenir le personnel technique est également un défi, compte tenu de la concurrence du secteur privé. La transparence du processus décisionnel dans l’établissement et l’application de la réglementation est également importante pour créer des freins et contrepoids. Les pays africains ne sont pas tous alignés sur les bonnes pratiques internationales en matière d’indépendance, de financement et de transparence (figure 4.14).

Compte tenu de la rapidité de l’évolution technologique, les régulateurs sont encouragés à adopter un mode de décision et d’analyse plus collaboratif impliquant les parties prenantes et d’autres régulateurs (tels que les autorités chargées de la concurrence, du secteur financier et de la protection des données) ; à revoir leurs pouvoirs pour leur permettre d’intervenir si nécessaire ; à adapter leur structure organisationnelle ; à appliquer des approches agiles et expérimentales (telles que les bacs à sable ou les bancs d’essai) ; et à utiliser les données numériques pour une régulation plus efficace et plus réactive (par exemple, pour accroître la transparence concernant la couverture et la qualité du service).22

Les autorités de la concurrence peuvent contribuer à façonner le marché par des actions de sensibilisation (enquêtes de marché et recommandations d’adoption de règles favorables à la concurrence), des mesures correctives ou des règlements résultant

Infrastructure numérique et des données 175
0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000 6 000 AmériqueduNord
etCaraïbes Asiedel’EstetPacifiqueAfriqueorientaleetaustraleAfriqueduNord AsieduSud IHH
Europeet AsiecentraleMoyen-OrientetAfriqueduNord(autres)AfriqueoccidentaleetcentraleAmériquelatine

ENCADRÉ 4.3

Créer des institutions numériques dans des situations de fragilité, de conflit et de violence : Transformer le secteur en Somalie

En Somalie, le secteur de l’infrastructure numérique a commencé à se transformer avec l’adoption récente de la loi sur les communications. Le fonctionnement de l’Autorité nationale des communications (ANC) a créé un environnement de plus en plus stable qui favorise l’accessibilité financière et la disponibilité. Les données de l’Union internationale des télécommunications (UIT) indiquent que le prix d’un panier de services mobiles pour un petit utilisateur en Somalie – 70 minutes d’appels, 20 messages courts (SMS) et 500 mégaoctets (Mo) de données – est passé de 15,40 dollars US en 2015 à 3,70 dollars US en 2019, soit une baisse de 76 %. Même s’il s’agit d’une tendance générale du secteur, la Somalie dispose désormais d’un environnement réglementaire plus stable et plus prévisible où les opérateurs sont plus responsables. La Somalie est passée du bas de l’échelle de l’ITU (16 points sur 100) à 63 points, ce qui lui permet de se rapprocher de ses homologues régionaux dont les marchés sont nettement plus mûrs. Toutefois, dans un environnement aussi fragile, la route est encore longue avant que l’ANC émerge en tant qu’autorité de régulation politiquement et financièrement indépendante.

Le renforcement des capacités réglementaires fourni au ministère de tutelle et à l’autorité de régulation a permis l’adoption d’un premier ensemble de règlements et de lignes directrices sur la numérotation, l’attribution des fréquences et l’interconnexion. Le ministère des Communications et de la Technologie a également élaboré une politique quinquennale en matière de technologies de l’information et de la communication, qui offre à la Somalie une vision et une stratégie pour orienter les investissements dans le secteur. Le rapatriement des noms de domaine de premier niveau pour la Somalie (.so) et l’établissement d’un point d’échange internet (IXP) sont également des développements clés contribuant à l’amélioration des performances du secteur.

L’amélioration du cadre institutionnel a également permis d’accroître la contribution du secteur des télécommunications au trésor public, alors qu’avant 2014, il n’y contribuait pas. En 2014, les opérateurs de téléphonie mobile ont commencé à contribuer, mais sur la base d’un accord négocié avec les principaux opérateurs. À la fin de 2020, un système de contribution plus transparent a été mis en place, la plupart des recettes provenant des droits de licence. Le renforcement de l’établissement progressif de l’ANC en tant qu’autorité de régulation forte et indépendante permettra d’apporter des contributions plus importantes au trésor national à l’avenir.

Source : Banque mondiale : Rapport d’achèvement du projet 2021 de la Banque mondiale, ICT Sector Support in Somalia Phase II (P152358).

d’affaires antitrust, et des conditions de fusion.23 En outre, les décisions relatives aux pratiques anticoncurrentielles peuvent prévenir ou faire cesser les abus de position dominante ou les accords entre concurrents qui empêchent l’entrée sur le marché ou permettent l’exploitation.

Lorsque les règles sectorielles présentent des lacunes ou que leur mise en œuvre laisse à désirer, les opérateurs ont parfois fait appel aux autorités de la concurrence. Par exemple, les interventions de la Commission de la concurrence d’Afrique du Sud (CCSA –Competition Commission South Africa) ont permis de mettre en œuvre des changements réglementaires sur l’interconnexion (Purfield et coll., 2016), des éléments favorables à la concurrence dans la gestion du spectre et des actions visant à réduire les prix des données. En 2017, la CCSA a lancé une « enquête sur le marché des services de données », étudiant les prix élevés des données et formulant des recommandations (CCSA, 2019). Puis, en 2020, elle a signé des accords avec Vodacom et MTN pour réduire les prix des données de 34 % et détaxer le prix des données pour certains sites web (Bonakele, 2020). La CCSA a

176 Afrique numérique

FIGURE 4.14 Alignement de la réglementation des télécommunications sur les bonnes pratiques internationales, dans certains pays africains, 2020

Source : D’après Banque mondiale, 2021b.

Note : Informations datées d’octobre 2020 couvrant 23 pays d’Afrique du Nord, d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique de l’Est.

également analysé les fusions impliquant le spectre déclenchées par les retards dans la clarification de la politique relative aux fréquences et a fourni des recommandations sur les règles d’attribution du spectre. Enfin, en 2020, l’Independent Communications Authority of South Africa (ICASA) a fixé des règles d’attribution du spectre intégrant la plupart des recommandations favorables à la concurrence de la CCSA, et elle a lancé une enquête sur le marché des données afin de fixer des obligations pour les opérateurs disposant d’un pouvoir de marché significatif. L’exemple de l’Afrique du Sud montre la complémentarité et l’application mutuelle des mesures prises par les autorités de la concurrence et les régulateurs des télécommunications, et donc les avantages de la collaboration.

Dans un autre cas, l’Autorité de la concurrence du Kenya (CAK – Competition Authority of Kenya) est intervenue, réglant des affaires d’abus de position dominante dues aux contrats exclusifs des principaux ORM et opérateurs d’argent electronique avec les agents d’argent mobile, ainsi que des pratiques d’exploitation et de discrimination dans la fourniture aux prestataires de services financiers de services supplémentaires pour données non structurées (USSD – Unstructured Supplementary Service Data) (Nkhonjera, 2017 ; Ochieng, 2014). Le CAK a également analysé les fusions dans le secteur, impliquant le transfert de spectre et a mené une étude sectorielle des marchés du prêt numérique au Kenya (Nyawira, 2020). En général, les autorités de la concurrence peuvent être un allié efficace pour les régulateurs de l’infrastructure numérique, mais seuls 36 pays africains ont adopté des lois sur la concurrence, et 26 disposent d’autorités opérationnelles (Pop et Coelho, 2021b). En outre, les faibles budgets24 et le manque d’indépendance institutionnelle, en particulier vis-à-vis du pouvoir exécutif, limitent leur efficacité (Nyman et Falco, 2020).

La concurrence est essentielle pour l’adoption de l’internet mobile. Au Ghana, les gains d’adoption de la téléphonie mobile et de l’internet mobile résultant des innovations technologiques et de la concurrence induites par le marché sont comparables aux gains

Infrastructure numérique et des données 177
0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 Bénin BurkinaFasoCaboVerde Score (1–3) Côted’Ivoire GambieGhanaGuinéeGuinée-Bissau LiberiaMali NigerNigeria SénégalSierraLeone Togo Maroc Algérie Tunisie Égypte,Rép.arabed’ Kenya Rwanda Tanzanie Ouganda Indépendance Financement Transparence

résultant d’une réduction des taxes, associée à des innovations technologiques et à un partage actif des infrastructures. En outre, l’augmentation de la concurrence associée à la réduction des taxes, à la stimulation de l’innovation et au partage actif des infrastructures pourrait permettre des niveaux d’adoption de la téléphonie mobile et de l’internet mobile plus élevés que ceux qui résulteraient de la mise en œuvre de toutes ces politiques avec des subventions aux infrastructures plutôt qu’avec des niveaux de concurrence plus élevés (figure 4.15, panneau a). De même, l’innovation technologique associée à la concurrence pourrait se traduire par des gains plus importants d’adoption de l’internet mobile et de couverture 4G que l’innovation technologique associée à un partage actif des infrastructures (figure 4.15, cadre b).

Le Sénégal offre un bon exemple de réformes réglementaires renforçant la concurrence et s’accompagnant de mesures visant à réduire les coûts d’exploitation et d’interventions destinées à développer l’utilisation du réseau. Les réformes favorables à la concurrence ont permis l’entrée de nouveaux opérateurs dans l’infrastructure de données et l’expansion d’un opérateur relativement plus petit grâce à l’accès au spectre (encadré 4.4). Ces réformes ont été complétées par des interventions visant à réduire les coûts opérationnels grâce à l’utilisation d’une infrastructure dorsale déployée par les

Source : Élaboration basée sur le modèle de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) développé pour la Banque mondiale 2022.

Note : Le panneau a montre une projection de l’adoption de la téléphonie mobile d’ici 2030 au Ghana, et le panneau b, une projection de l’adoption de l’internet mobile. Ces graphiques supposent un scénario de base (sections bleu foncé) correspondant à la situation actuelle ainsi que des ajouts de divers types de développement et de mise en œuvre de politiques réglementaires qui pourraient augmenter l’adoption de la téléphonie mobile d’ici 2030 au Ghana, comme l’innovation technologique par les opérateurs de réseaux mobiles, le partage actif de l’infrastructure et la réduction des taxes spécifiques à l’industrie. En outre, il montre également quels seront les gains d’adoption supplémentaires si une concurrence plus forte est appliquée en plus des scénarios simulés (indiqués par des sections bleu clair). Ce scénario de « concurrence accrue » suppose une baisse de la part de marché du principal opérateur, MTN, de 58,1 % à 40 %, et une élasticité des prix selon l’indice Herfindahl-Hirschman (IHH) égale à 2,037 (Genakos, Valletti et Verboven, 2018).

178 Afrique numérique
FIGURE 4.15 Projection de l’adoption de la téléphonie mobile et d’internet, par scénario politique, Ghana, 2030
Scénario de base Plus une concurrence accrue 55,5 66,2 4,2 67,0 4,4 71,7 2,4 72,3 2,7 74,4 0,6 Part de la population (%) 45 50 55 60 65 70 75 ActuelInnovationtechnologiquePartagedesinfrastructuresRéductiondestaxesSubventiondel’infrastructureSubventiondestéléphones ActuelInnovationtechnologiquePartagedesinfrastructuresRéductiondestaxesSubventiondel’infrastructureSubventiondestéléphones Part de la population (%) 37,0 52,8 4,6 53,4 4,3 57,9 2,7 59,1 2,9 65,4 1,2 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70
a. Adoption du téléphone portable b. Adoption de l’internet mobile

ENCADRÉ 4.4

L’accélération numérique au Sénégal : Rôle des réformes réglementaires en matière d’infrastructure

Les autorités du Sénégal ont mis en œuvre une vague de réformes sectorielles pour soutenir l’infrastructure numérique.a Ces réformes visaient à accroître la concurrence en ouvrant davantage le secteur des télécommunications, notamment en facilitant l’entrée de trois nouveaux fournisseurs de services internet et en attribuant une deuxième licence de quatrième génération (4G) au deuxième plus grand opérateur de réseau mobile du pays, Free Sénégal (anciennement Tigo). Les autorités ont également contribué à la mise en œuvre d’un partenariat public-privé pour la gestion du réseau public en fibre optique de 4 050 kilomètres, actuellement exploité par l’Agence de l’informatique de l’État (ADIE). D’autres mesures comprenaient notamment le renforcement de la réglementation du secteur sur les acteurs dominants, la réduction des frais de spectre, ainsi que la restructuration et l’accélération de l’utilisation du Fonds de service universel. b

Grâce à ces réformes, certains indicateurs sectoriels, tels que la qualité et le prix des abonnements à internet, se sont déjà améliorés. Le prix de détail moyen d’un mégabit de données a diminué de 50 % depuis l’arrivée des trois fournisseurs de services internet, ce qui a entraîné une augmentation de la vitesse des offres internet et une réduction des délais d’installation (d’un mois à cinq jours), bien que la part de marché des nouveaux venus reste apparemment limitée, selon les statistiques des autorités (moins de 1 %, soit seulement 3 500 abonnés en juin 2020).

Plus récemment, en s’appuyant sur une série d’études et d’engagements d’assistance technique, notamment le diagnostic pays de l’économie numérique pour l’Afrique (DE4A) du Sénégal (Banque mondiale, 2019a), le ministère de l’Économie numérique et des Télécommunications et le ministère des Finances et du Budget ont entrepris la conception d’un nouveau programme « Accélération de l’économie numérique au Sénégal ». Ce programme, qui vise à réduire la fracture numérique, est conçu pour a) renforcer un environnement juridique, réglementaire et institutionnel favorable à l’économie numérique ;

b) favoriser l’inclusion numérique grâce à l’expansion de l’infrastructure numérique et à l’amélioration des compétences numériques ; et c) soutenir la transformation numérique du secteur public en numérisant des plateformes et services publics.

Conformément aux principes de la Banque mondiale de maximisation des financements en faveur du développement, le programme soutiendra l’expansion de la dorsale nationale en fibre optique et l’achèvement de la connectivité du dernier kilomètre dans les zones en retard de développement où la pauvreté est élevée, mais où le potentiel économique est également important. Le projet soutiendra la transformation numérique des principaux systèmes et services étatiques, en mettant l’accent sur les impôts et les douanes ainsi que sur les fondements techniques des services d’administration en ligne.

a. Certaines de ces actions ont été soutenues par une série d’opérations de financement des politiques de développement (FPD) de la Banque mondiale : les premier, deuxième et troisième projets FPD de réforme structurelle multisectorielle du Sénégal (P159023, P164525 et P170366, respectivement) ; et le premier projet FPD de redressement équitable et résilient au Sénégal (P172723).

b. Ce fonds est un compte du Trésor public alimenté par une allocation unique de 5 % de la contribution financière versée par les opérateurs suite à l’attribution d’une licence et par une contribution annuelle des titulaires de licences d’un montant équivalent à 0,75 % de leur chiffre d’affaires (hors taxes et net des coûts d’interconnexion).

pouvoirs publics et à des changements dans la tarification du spectre. Le Sénégal a restructuré l’utilisation de son fonds de service universel afin d’accroître la disponibilité. Les pouvoirs publics approfondissent actuellement les réformes réglementaires et les accompagnent d’une numérisation des services publics et de mesures visant à soutenir l’entrepreneuriat numérique afin d’améliorer l’utilisation des TN.

Infrastructure numérique et des données 179

Permettre la réduction des coûts d’exploitation à l’aide de la réglementation

Compte tenu de la faible capacité à payer pour la connectivité à internet et des coûts d’exploitation plus élevés que dans d’autres régions, l’environnement réglementaire des pays africains doit contribuer à réduire les coûts d’exploitation. Les politiques visant à atteindre cet objectif sont notamment :

• Politique du spectre : neutralité technologique dans l’attribution des fréquences et disponibilité du spectre à des prix raisonnables ;

• Gestion de la dorsale en fibre optique appartenant à l’État et gestion de l’infrastructure passive : accès fondé sur les coûts, non discriminatoire, opportun et de qualité ;

• Partage des infrastructures : règles visant à faciliter les accords commerciaux de partage des infrastructures avec des garanties en matière de concurrence ;

• Politique fiscale actualisée : suppression progressive des droits d’accises indus, des surtaxes sur la valeur ajoutée ou des droits d’importation trop élevés. Politique du spectre. Les pouvoirs publics peuvent utiliser plus efficacement la politique du spectre pour réduire les coûts opérationnels. Le niveau de spectre attribué en Afrique est relativement faible, ce qui limite le déploiement de nouvelles technologies plus rentables (figure 4.16, panneau a). En outre, les fréquences dites du dividende numérique, libérées dans le cadre de la transition de la télévision analogique à la télévision

FIGURE 4.16 Détention de fréquences et qualité de la gestion du spectre, Afrique, 2020

a. Parts du spectre, par région

b. Alignement sur les pratiques modèles de gestion du spectre, pays africains sélectionnés

Transparence et clarté des procédures d’affectation Transparence et méthode de calcul des redevances

Source : Bases de données TeleGeography et Spectrum PolicyTracker (données 2020) ; Banque mondiale, 2021b, fondé sur les données internes 2020 de l’Initiative de veille réglementaire (RWI – Regulatory Watch Initiative).

Note : Dans le panneau b, l’alignement complet sur les pratiques modèles donne un score de 1 pour chaque catégorie de transparence, pour un score total possible de 2. MHz = mégahertz.

180 Afrique numérique
3 4 5 9 16 24 29 40 221 0 50 100 150 200 250 Spectre pour 100 000 habitants (MHz) Score AmériqueduNordAsieduSudAfriqueduNord AfriqueoccidentaleetcentraleAfriqueorientaleetaustraleAsiedel’EstetPacifiqueAmériquelatineetCaraïbes Autrespaysdu Moyen-Orient etd’AfriqueduNordEuropeetAsiecentrale 0 0,5 1,0 1,5 2,0 BurkinaBéninFasoCaboVerdeCôted’IvoireGambieGhanaGuinéeGuinée-Bissau LiberiaMali NigerNigeriaSénégalSierraLeone Togo Maroc Algérie Tunisie Égypte,Rép.arabed’ Kenya Rwanda Tanzanie Ouganda

numérique, doivent encore être attribuées et utilisées dans certains pays (comme le Ghana et l’Afrique du Sud).

Les redevances initiales médianes pour l’utilisation du spectre sont quatre fois plus élevées en Afrique que dans les pays à revenu élevé et deux fois plus élevée que la médiane mondiale (Pedros et coll., 2020). Des simulations de l’impact des frais de spectre sur le déploiement du réseau 5G montrent que des frais de spectre élevés pourraient augmenter les coûts privés de jusqu’à 30 % au Kenya ou au Sénégal (Oughton et coll., 2022).25 En outre, la transparence et la clarté des procédures d’attribution du spectre sont essentielles, de même que la transparence et la clarté des méthodes de fixation des redevances, afin de permettre une utilisation efficace du spectre. Ces bonnes pratiques sont peu suivies en Afrique, sauf dans quelques pays (figure 4.16, panneau b). Partage et gestion des infrastructures. Le partage des infrastructures et l’accès aux infrastructures essentielles sont cruciaux pour faciliter la concurrence en aval et réduire les coûts de déploiement. Toutefois, bien que de nombreux pays imposent ou encouragent le partage des infrastructures, certains problèmes compromettent la réussite de sa mise en œuvre, entre autres, le manque de capacité réglementaire, la faiblesse des mécanismes de règlement des litiges, les incitations à conserver l’avantage du premier arrivé en matière de couverture, le manque de confiance et les problèmes technologiques (Arakpogun et coll., 2020).

En outre, l’absence de réglementation concernant l’accès à la fibre optique limite la possibilité d’accéder à cette infrastructure essentielle. Environ 60 % de la fibre optique en Afrique est contrôlée par des entreprises publiques ou des opérateurs avec des participations de l’État. Mais, dans la plupart des cas, les conditions d’accès à ces réseaux (telles que la non-discrimination et un prix raisonnable) ne sont pas réglementées, et les normes de service ne sont pas appropriées pour que d’autres opérateurs puissent s’appuyer sur ces réseaux. Des pays comme le Burkina Faso, le Nigeria et le Sénégal étudient des initiatives visant à utiliser plus efficacement l’infrastructure dorsale des entreprises publiques. L’accès à l’infrastructure passive présente des défis similaires. Les sociétés de pylônes jouent un rôle important dans le déploiement des réseaux et le partage des infrastructures passives, notamment pour réduire les coûts d’investissement et d’exploitation.

Pour les services mobiles, les stratégies de partage passif (par exemple, des tours) permettent de réaliser des économies substantielles – de 26 à 44 % pour 30 Go par mois par utilisateur de capacité et de 18 à 34 % pour 10 Go par mois (Oughton, 2022). Il existe toutefois plusieurs difficultés de mise en œuvre, notamment des problèmes de réglementation, de confiance ou de technologie (Arakpogun et coll., 2020).

Notons que, dans certains cas, le partage obligatoire des infrastructures en vue de réduire les coûts de déploiement des infrastructures peut également imposer des obstacles à l’expansion. Par exemple, au Bénin et au Niger, les opérateurs doivent obtenir l’autorisation des régulateurs pour déployer une infrastructure en fibre optique, et les demandes peuvent être refusées si l’on pense qu’elles font double emploi avec l’infrastructure de l’opérateur historique ou qu’elles lui font concurrence. De même, les politiques visant à « creuser une seule fois » peuvent parfois entraîner des obstacles pour la concurrence. Par conséquent, une mise en œuvre équilibrée des politiques de partage des infrastructures est importante pour préserver les avantages de la concurrence en matière d’infrastructures.

Une politique fiscale actualisée. L’adoption des bonnes pratiques dans la politique fiscale peut entraîner des gains de disponibilité et d’utilisation. Les pays africains

Infrastructure numérique et des données 181

appliquent un large éventail de surtaxes et taxes parafiscales sur les services de télécommunications :

• Droits d’accise : par exemple, 17 % en Tanzanie, 18 % en Zambie et d’autres dans neuf autres pays.

• Frais d’enregistrement pour les nouveaux téléphones : par exemple, 7,00 dollars US par an pour les téléphones 3G ou 4G en République démocratique du Congo.

• Taxes sur les appels internationaux entrants : par exemple, 0,16 dollar US par minute au Niger, et d’autres taxes dans au moins quatre autres pays.

• Droits d’importation pour les téléphones portables : par exemple, 12 % en Afrique du Nord et 10 % en Afrique occidentale et centrale, contre environ 2 % en Afrique orientale et australe, en moyenne.

Les taxes et redevances spécifiques au secteur peuvent atteindre 31 % (en Guinée) contre 4 % en Europe ou en Amérique latine (Pedros et coll., 2020). Le taux d’imposition effectif moyen pour les télécommunications en Afrique s’est avéré plus élevé que pour l’extraction de l’or (Rota-Graziosi et Sawadogo, 2022).26 Environ 1 dollar US d’impôts supplémentaires nécessite généralement 1 dollar US de subventions compensatoires pour réduire les coûts et couvrir les zones rurales, sans compter les coûts d’administration des pouvoirs publics (Oughton, 2022).

Dans ce contexte, les réformes fiscales visant à supprimer progressivement les taxes excessives pourraient favoriser l’adoption de l’internet mobile, comme le montrent les exemples du Bénin et de la République démocratique du Congo (figure 4.17). En outre, le remplacement des taxes sur les appareils connectés à internet à des taxes d’utilisation pourrait accroître le bien-être des ménages d’au moins 26 % (Björkegren, 2020). De telles réformes pourraient aller de pair avec un réalignement de la fiscalité sur les secteurs générant des externalités négatives, par exemple en tenant compte de l’impact sur le climat, ou en élargissant l’assiette de la taxe sur la valeur ajoutée en imposant les biens et services fournis en ligne – au lieu de pénaliser les secteurs ayant des externalités positives comme la connectivité numérique – et en tirant parti de l’expansion des transactions en ligne pour améliorer l’administration fiscale. La bonne nouvelle, c’est que certains pays sont en train de revoir la fiscalité sectorielle et que d’autres ont commencé à réduire les taxes. En janvier 2022, par exemple, le Tchad a supprimé les droits d’importation sur les appareils numériques. Associées à des interventions en faveur de la concurrence, ces mesures devraient se traduire par des réductions d’impôts répercutées sur les consommateurs.

Des taxes sur les services numériques ont également été introduites, avec une efficacité limitée dans la collecte fiscale, mais avec un effet négatif sur l’accessibilité et l’utilisation des TN. Certains pays imposent des taxes sur l’utilisation des plateformes numériques (par exemple, une taxe sur les médias sociaux de 0,055 dollar US par jour en Ouganda) ainsi que des taxes sur les paiements mobiles (par exemple, au Cameroun, au Ghana, au Kenya, au Malawi, en Ouganda, en République démocratique du Congo, et en Tanzanie).

Étant donné les alternatives aux paiements numériques mobiles, les taxes ne font que décourager l’inclusion financière, en particulier pour les personnes à faible revenu. Par exemple, la taxe sur les médias sociaux introduite en Ouganda en 2018 pour diminuer le temps que les citoyens passent en ligne et pour réduire la propagation de fausses informations n’a pas réussi à générer des revenus significatifs – atteignant moins de 20 % de

182 Afrique numérique

FIGURE 4.17 Impact projeté des réductions fiscales sectorielles sur l’adoption de la téléphonie mobile et d’internet au Bénin et en République démocratique du Congo, 2030

Source : Banque mondiale, 2022, sur la base d’une analyse effectuée par la Global System for Mobile Communications Association (GSMA) des données des opérateurs de téléphonie mobile, de la plateforme GSMA Intelligence, du Center for International Earth Science Information Network (CIESIN) et du Group on Earth Observations

Note : La couverture existante est calculée sur la base des données du site fournies entre le quatrième trimestre 2018 et le premier trimestre 2020. La couverture peut avoir augmenté depuis la fin de la collecte des données.

l’objectif, principalement en raison de l’évasion fiscale (par exemple, à l’aide de VPN – ou réseaux privés virtuels) et de difficultés administratives (Kavuma et coll., 2020). Dans le même pays, après la taxe de 1 % imposée en 2018 sur les transactions de monnai electronique, le volume moyen des transactions commerciales a chuté de 24 %, et la valeur des transactions de personne à personne de plus de 36 %, les consommateurs ayant opté pour d’autres solutions (AFI, 2021).

La taxation des services numériques est un sujet brûlant dans le monde entier, et les pays ont adopté diverses approches alors que des discussions mondiales ont lieu pour convenir d’un système plus efficace et plus équitable (encadré 4.5).

En plus des taxes, les services de télécommunications sont soumis à d’autres redevances et contributions qui ne sont pas monnaie courante et qui alourdissent indûment la charge réglementaire pesant sur le secteur. Par exemple, certains pays ont mis en place des plateformes qui surveillent le trafic international ou national afin de vérifier les recettes globales et de les comparer aux déclarations des opérateurs. Ces systèmes sont coûteux. Par exemple, le contrat de construction-exploitation-transfert (BOT) du Ghana avec une société d’assurance des recettes prévoit l’engagement de payer des frais annuels de 1,5 million de dollars US pour la gestion du système et un coût d’investissement de 90 millions de dollars US. L’analyse technique démontrant l’efficacité de ce type de système fait défaut, tout comme la corrélation réelle entre les volumes de trafic suivi et la valeur des revenus supplémentaires déclarés. Ces plateformes sont généralement

Infrastructure numérique et des données 183
Adoption sans réforme fiscale Adoption avec réforme fiscale 56,1 44,7 7,1 5,5 0 10 20 Part de la population totale (%) 30 40 50 60 70 Congo, Rép.dém.du 50,3 36,9 7,4 6,4 Bénin Adoption de la téléphonie mobile (2030) Adoption de l’internet mobile (2030) Adoption
la téléphonie
(2030)
(2030)
de
mobile
Adoption de l’internet mobile

ENCADRÉ 4.5 Évolution de la taxation des services numériques

Alors que l’économie numérique se développe, les pouvoirs publics s’efforcent de partager pleinement sa valeur en en tirant des recettes fiscales, tout en créant un environnement propice à l’utilisation et au développement des technologies numériques. La politique fiscale doit prendre en compte a) la manière de créer des conditions de concurrence équitables entre les entreprises numériques et analogiques ; b) la manière d’adapter les règles et l’administration des impôts indirects – tels que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou la taxe sur les produits et services (TPS) – pour taxer les biens et services vendus en ligne par les entreprises numériques (en particulier par les plateformes d’intermédiation numérique non présentes au niveau national) ; et c) la manière d’adapter les règles de l’impôt direct (tel que l’impôt sur le revenu des sociétés) pour tenir compte de la valeur immatérielle créée dans les pays où les entreprises numériques n’ont pas de présence physique (Banque mondiale, 2021e).

Extension de la fiscalité indirecte aux biens et services numériques

Des progrès ont été réalisés dans l’adaptation des règles de la fiscalité indirecte afin de créer des conditions de concurrence équitables entre les biens et services achetés en ligne et ceux achetés de manière traditionnelle. En effet, la fiscalité indirecte de l’économie numérique est acceptée au niveau international : l’Organisation de coopération et de développement économiques a publié des directives internationales et d’autres documents relatifs à la TVA et à la TPS, et les pays étendent de plus en plus le champ d’application des impôts indirects (TVA ou TPS) aux fournitures numériques. En 2021, plus de 80 pays, dont 10 en Afrique subsaharienne, devraient avoir introduit avec succès des taxes à la consommation sur les biens et services numériques.

Des efforts supplémentaires sont également déployés pour développer des mécanismes permettant de collecter efficacement la TVA ou la TPS lorsque le fournisseur n’est pas situé dans la juridiction fiscale (la juridiction du marché), ainsi que pour définir le rôle des plateformes numériques dans la collecte de la TVA ou de la TPS sur les ventes en ligne. En outre, les transactions numériques entre entreprises et consommateurs impliquent un niveau de complexité supplémentaire pour l’administration fiscale, car les fournisseurs numériques non résidents ou les agents fiscaux (plateformes numériques) sont responsables de la collecte de la TVA ou de la TPS auprès des utilisateurs et du versement des taxes collectées aux administrations fiscales des juridictions du marché dans lesquelles ces utilisateurs sont situés.

Lorsqu’ils conçoivent des impôts indirects (TVA ou TPS), les pays doivent également éviter les distorsions inutiles et les problèmes de double imposition qui pourraient résulter de l’aspect transfrontalier. L’analyse économique et l’expérience des pays montrent que la mise en œuvre d’une TVA efficace et efficiente sur l’économie numérique aurait un impact positif significatif non seulement sur la collecte des recettes, mais aussi sur la concurrence (commerce numérique par rapport au commerce traditionnel) et l’équité (compte tenu des modèles de consommation, la répartition de la charge fiscale serait progressive).

Défis liés à l’imposition directe des entreprises numériques

Les autorités fiscales sont confrontées à des défis plus importants dans la collecte des revenus provenant des bénéfices générés par les entreprises numériques (telles que les plateformes numériques) qui offrent des services sans présence physique et peuvent déplacer les obligations fiscales au-delà des frontières internationales (Banque mondiale, 2021e). Ces défis ont été exacerbés par la numérisation croissante qui a suivi la pandémie de COVID-19 dans un contexte de contraintes fiscales strictes. Le débat actuel porte sur la question de savoir si les pays où se trouvent les utilisateurs ont le droit de taxer la valeur que les utilisateurs apportent aux entreprises numériques résidant fiscalement à l’étranger. Ces revendications fiscales sont intimement liées à la notion d’établissement permanent (présence imposable) et à celle d’imposition à la source (source de revenus imposables).

Une approche multilatérale serait utile, mais les progrès ont été lents dans le cadre du Groupe des Vingt et du Cadre inclusif de l’Organisation de coopération et de développement économiques, et certains pays ont

184 Afrique numérique
(suite)

ENCADRÉ 4.5

Évolution de la taxation des services numériques (suite)

commencé à mettre en œuvre des mesures visant à taxer les revenus des services numériques. L’accord politique conclu en octobre 2021 pourrait accélérer la mise en œuvre d’une approche multilatérale, bien que la proposition en cours d’élaboration soit encore trop complexe pour être adoptée par les pays à faible capacité.

Sur les 141 juridictions incluses dans le cadre inclusif, 23 sont africaines et toutes, à l’exception du Kenya et du Nigeria, ont approuvé la déclaration fournissant un cadre à la réforme des règles fiscales internationales susceptibles de s’appliquer aux entreprises multinationales les plus grandes et les plus rentables (environ 100). En Afrique, le Kenya, le Nigeria, la Sierra Leone, la Tunisie et le Zimbabwe ont mis en œuvre des mesures fiscales alternatives visant à taxer les entreprises numériques, tandis que d’autres, comme l’Afrique du Sud, attendent une solution globale.

En outre, le Forum africain d’administration fiscale a publié en 2020 une « Approche suggérée pour la rédaction d’une législation sur la taxe sur les services numériques » afin de fournir des conseils aux membres qui envisagent la mise en œuvre d’une taxe sur les services numériques (TSN). Le forum souligne l’importance d’éviter les effets négatifs des TSN sur la croissance du secteur numérique dans les pays africains, en particulier les start-ups et les petites et moyennes entreprises, et recommande d’envisager un robuste seuil de minimis, afin de s’assurer que la TSN ne cible que les entreprises numériques établies et rentables (ATAF, 2020). Le forum suggère également d’envisager un engagement à abroger les TVD une fois qu’une solution internationale aura été convenue dans le cadre inclusif.

financées par l’introduction de taxes parafiscales supplémentaires (sur les appels internationaux ou nationaux), ce qui fausse encore plus le marché (d’autant plus que la perception de ces redevances n’est pas toujours transparente). Ce type de système existe au Burundi, aux Comores et au Niger. Le Burundi, par exemple, a introduit ce système en 2015, en accordant une licence exclusive à la société de services ITS pour gérer le trafic international entrant et recevoir 50 % des taxes sur ce trafic (0,16 dollar US par minute), avec un paiement minimum fixe. L’introduction de l’obligation pour les opérateurs de faire passer le trafic international par l’intermédiaire d’ITS a entraîné une baisse de 60 % du trafic international entrant au cours des 15 premiers mois,27 ce qui signifie qu’après le paiement du minimum convenu à ITS, la licence a généré des recettes négatives pour l’État.

Disponibilité pour réduire la fracture numérique

Outre l’amélioration de l’accessibilité financière – grâce à la concurrence et aux réductions de coûts induites par la réglementation – pour les familles et les entreprises bénéficiant d’une couverture de l’internet mobile, les pays devraient s’efforcer d’accroître la couverture afin de réduire la fracture numérique. Le manque de couverture réseau a été identifié comme un problème clé dans 18 des 28 évaluations nationales de la DE4A,28 soulignant la pertinence des efforts visant à étendre la couverture. La majorité des zones urbaines disposent ou devraient disposer d’une couverture 3G ou 4G d’ici 2025, mais la plupart des populations non couvertes se trouveront dans des zones peu peuplées avec

Infrastructure numérique et des données 185
Sources : Cebreiro-Gómez et coll., 2021 ; Lucas-Mas et Junquera-Varela, 2021 ; Banque mondiale, 2021e.

des niveaux de développement socioéconomique plus bas – par exemple, dans le nord du Ghana et en dehors des régions occidentales de la Sierra Leone. Pour combler le fossé géographique, il faut intervenir à la fois sur l’offre et sur la demande. Pour les zones commercialement non viables, un ensemble de politiques réglementaires constitue une première étape pour étendre la couverture et l’adoption. Une deuxième étape consiste à envisager la mise en œuvre d’interventions complémentaires de manière à minimiser les distorsions du marché : des subventions à l’offre plus efficaces ou des subventions à la demande ciblées et des programmes de stimulation de la demande.

Politiques réglementaires visant à étendre la couverture et l’utilisation

Les cadres réglementaires en matière de couverture rurale peuvent se concentrer sur la réduction des coûts de déploiement et d’exploitation des infrastructures dans les zones rurales et sur l’incitation au déploiement des réseaux, notamment à l’aide de politiques en matière de spectre. Compte tenu des fréquences utilisées pour la 4G, la couverture par une station de base peut être plus importante que pour la 3G. En moyenne, la 4G est de 10 à 57 % moins chère que la 3G lorsqu’elle utilise une liaison sans fil ou par fibre pour fournir 10 Go de données par mois et par utilisateur, ou de 20 à 47 % moins chère pour 30 Go par mois et par utilisateur (figure 4.18). Cela peut être une raison de faire un bond en avant vers un environnement sans contraintes de spectre, avec une demande suffisante. Malheureusement, des obstacles à la demande limitent cette possibilité, tels que la disponibilité de smartphones abordables29 et la sensibilisation aux utilisations potentielles de l’internet à haut débit.30

Faciliter le déploiement de technologies plus efficaces grâce à la neutralité technologique, libérer le spectre et permettre l’essai de nouvelles technologies (en accordant du spectre pour les essais) peut contribuer à faciliter la mise à niveau technologique et ouvrir la possibilité de faire des bonds en avant pour accroître la couverture. Dans une perspective d’avenir, l’adoption d’accords de partage du spectre pour les réseaux infranationaux ou ruraux pourrait être étudiée, en particulier pour la 4G et la 5G – par exemple, en suivant l’approche adoptée en Nouvelle-Zélande (RSM, n.d.), au Royaume-Uni (Ofcom, 2019), ou aux États-Unis (FCC, 2020). En complément, les règles de tarification et d’octroi de licences pour les connexions sans fil devraient être ajustées pour faciliter l’utilisation de cette technologie, en particulier dans les zones rurales.

Dans certains pays, la couverture du haut débit mobile peut être étendue en garantissant la disponibilité du spectre inférieur à 1 GHz (moins de 1 gigahertz). Il est important de disposer d’une couverture suffisante dans les bandes inférieures à 1 GHz dans les zones rurales afin de réduire le nombre de sites nécessaires. Tous les opérateurs n’ont pas accès au spectre inférieur à 1 GHz pour la 4G, parfois pour des raisons commerciales, mais aussi parce que les pouvoirs publics n’ont pas attribué tout le spectre disponible ou ont imposé des redevances élevées qui découragent l’utilisation de certaines bandes. Pour donner aux opérateurs la souplesse nécessaire à l’introduction de nouvelles technologies plus efficaces, il est important à la fois a) d’achever la migration vers la libération des dividendes numériques dans le spectre inférieur à 1 GHz, et b) de garantir la neutralité technologique. Le manque de prévisibilité concernant la libération et les conditions d’utilisation des fréquences inférieures à 1 GHz pour le déploiement de la 4G limite les possibilités d’utiliser cette technologie pour atteindre les zones rurales ou accroître la disponibilité d’une connectivité internet plus rapide dans les zones urbaines. Tel a été le

186 Afrique numérique

FIGURE 4.18 Coûts du haut débit mobile universel et couverture rurale potentielle, Afrique et pays sélectionnés

a. Coûts financiers du haut débit universel en Afrique, par technologie

b. Parts de la couverture rurale 4G commercialement viable lors du déploiement des bandes de fréquences de 700/800 MHz par rapport aux bandes de 1 800 MHz

Coût privé (dollars US)

Coût public (dollars US)

Couverture avec 1 800 MHz

Couverture ajoutée avec 700/800 MHz

Source : Oughton, 2022 (panneau a) ; Global System for Mobile Communications Association (GSMA) à partir des données de sites fournies entre le quatrième trimestre de 2018 et le premier trimestre de 2020 (panneau b). Note : Le panneau a est basé sur un objectif de capacité de 10 gigaoctets (Go) par mois et par utilisateur, les résultats étant obtenus en calculant le coût financier moyen par utilisateur pour chaque décile de population dans un échantillon de pays, puis en estimant le coût de connexion de tous les utilisateurs à travers l’Afrique. Les valeurs indiquées représentent la valeur actuelle nette pour 2020-2030. Les estimations sont ventilées en fonction de la composition des coûts privés et publics. Le « coût privé » fait référence à l’investissement privé, et le « coût public » à l’investissement de l’État ou public par le biais de subventions à l’offre. Comme le montre le graphique, l’option la moins chère est l’utilisation de la technologie de quatrième génération (4G) avec une liaison sans fil, à environ 0,4 billion de dollars pour le scénario d’adoption de base. Les barres d’intervalle (en rouge) reflètent les estimations pour les scénarios à coût faible et élevé. Le panneau b montre les estimations de la couverture 4G dans les zones rurales qui seraient viables pour un opérateur d’ici 2025, sur la base d’une analyse de l’offre et de la demande 3G/4G pour les sites en friche et les sites vierges. Lorsque des bandes de fréquences inférieures à 1 GHz – c’est-à-dire des bandes de 700/800 MHz – sont utilisées, la population couverte pour chaque site sera plus élevée que lorsque des bandes de fréquences plus élevées (1 800 MHz) sont utilisées. Le modèle prend en compte les coûts de mise à niveau vers une couverture 4G et détermine si la mise à niveau du site est financièrement viable pour générer un rendement positif, compte tenu de la demande attendue et du revenu moyen par utilisateur. F = réseau fixe ; GHz = gigahertz ; MHz = mégahertz ; W = réseau sans fil.

cas en Afrique du Sud, où le régulateur a pris beaucoup de retard dans la mise aux enchères des fréquences inférieures à 1 GHz, et où la migration numérique des radiodiffuseurs des bandes 700 MHz et 800 MHz n’a pas été achevée.

La promotion du partage des infrastructures peut également contribuer à accroître la portée des services dans les zones non desservies.31 Le partage des infrastructures passives est relativement plus courant en Afrique, où 44 % des tours appartiennent à des sociétés de tours (« towercos »), tandis que le partage actif et les accords d’itinérance sont moins utilisés. Le partage des infrastructures peut permettre d’accroître la concurrence et le choix des consommateurs dans les zones où des réseaux multiples ne sont pas commercialement viables en raison d’une demande insuffisante. Il peut également réduire les besoins d’investissement, libérant ainsi des capitaux pour le déploiement d’infrastructures dans des endroits moins attrayants (mais toujours rentables) au lieu de dupliquer des infrastructures dans des endroits où il y a déjà un autre fournisseur. Le partage des infrastructures peut toutefois atténuer la concurrence, ce qui souligne l’importance de la protéger.

Infrastructure numérique et des données 187
42,9 10,8 63,6 3,5 62,3 7,6 85,7 4,2 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 4G (W) 4G (F) 3G (W) 3G (F) 0 –0,5 0,5 Trillions de dollars US Part de la population rurale couverte (%) 1,01,5 2,0 Sierra Leone Ghana TanzanieNigeria

L’analyse géospatiale réalisée pour le Bénin et la Tanzanie montre que le partage actif des infrastructures permettrait d’étendre la couverture des populations rurales par rapport au partage passif des infrastructures – de 9 points de pourcentage supplémentaires pour le Bénin et de 22 points pour la Tanzanie si l’on considère les réseaux 4G et les trois réseaux (Banque mondiale, 2022). Un réseau rural partagé (RRP) qui permet le partage du réseau d’accès radio (RAR) uniquement dans les zones rurales (par exemple, celui mis en œuvre au Royaume-Uni)32 offre également des gains d’efficacité, en préservant la concurrence entre les infrastructures dans les zones urbaines et suburbaines, avec une économie par rapport à la ligne de base (sans partage des infrastructures)33 de 11 à 47 % pour 10 Go par mois et de 18 à 52 % pour 30 Go par mois et par utilisateur dans les six pays inclus dans l’analyse (figure 4.19).

b. Kenya

Base de référence

Base de référence Passif

Base de référence

Base de référence

Passif

Coût (milliards de dollars US)

Coût (milliards de dollars US)

Coût (milliards de dollars US)

Coût (milliards de dollars US)

Source : Oughton, 2022.

Base de référence

Base de référence

Coût (milliards de dollars US)Coût (milliards de dollars US)

Élevé Base de référence Faible

Note : La figure montre les économies de coûts financiers possibles grâce aux stratégies de partage des infrastructures dans les scénarios d’adoption faible, de référence et élevé, avec une capacité cible de 10 Mbps par utilisateur, en utilisant les technologies 4G et micro-ondes (pour 30 Go par mois et par utilisateur). Le coût financier est la valeur actuelle nette de la somme des coûts privés (coûts d’investissement et d’exploitation) et des subventions publiques pour atteindre la couverture universelle haut débit sur une période de 10 ans. Le modèle fixe un seuil de 10 % de marge bénéficiaire et suppose que le bénéfice supplémentaire est réinvesti pour étendre la couverture. Dans la « base de référence », chaque ORM construit son propre réseau pour desservir sa part de marché, sans partage. Les barres d’intervalle reflètent les estimations des scénarios de coûts « élevés » et « faibles ». Le « partage passif » fait référence au partage du mât physique et de l’approvisionnement en énergie ; le « partage actif » au partage du réseau d’accès radio [RAR] (site, mât, station émettrice-réceptrice de base, liaison de retour et contrôleurs de station de base) ; et le « RRP » à un réseau rural partagé. Go = gigaoctet ; Mbps = mégabits par seconde ; ORM = opérateur de réseau mobile.

188 Afrique numérique
FIGURE 4.19 Coût du haut débit universel avec partage des infrastructures, dans quelques pays d’Afrique subsaharienne
Actif RRP
Passif Actif RRP
Actif RRP
0102030
0102030 Passif
01020
a. Côte d’Ivoire c. Mali d. Sénégal e. Tanzanie f. Ouganda
30
Actif RRP 0102030
Actif RRP 0102030
Actif RRP
Passif
Passif
0102030

Une intervention de politiques est nécessaire pour faire du partage des infrastructures une option viable. Un environnement favorable aux co-investissements privés et aux accords de partage est nécessaire – y compris une transparence accrue à propos des caractéristiques de l’infrastructure disponible, une prévisibilité des autorisations et de l’évaluation des accords entre partenaires, et une clarté des garanties de concurrence pour préserver la rivalité. Cet environnement permettrait des co-investissements pour la connectivité par fibre optique, tels que le co-investissement de Liquid Telecom et Facebook en République démocratique du Congo (Thomas, 2021). Des mesures complémentaires –notamment l’accès à prix abordables à des dorsales en fibre optique et des infrastructures passives appartenant à l’État, ainsi qu’une garantie de qualité des services – sont essentielles pour réduire les coûts d’exploitation et d’investissement. Cela est particulièrement important dans les 27 pays (dont 22 en Afrique subsaharienne) où les entreprises publiques contrôlent plus de 40 % du réseau en fibre optique.34

L’établissement d’obligations de couverture pour atteindre les zones rurales est une autre alternative politique. Des simulations réalisées pour six pays africains (Côte d’Ivoire, Kenya, Mali, Ouganda, Sénégal et Tanzanie) montrent que, si des obligations de couverture étaient fixées pour aboutir à une marge bénéficiaire maximale de 10 % par site, 60 à 100 % de la population pourrait être couverte par un réseau 4G, avec une connexion sans fil soutenant 30 Go par mois en période de pointe, sans que des subventions publiques soient nécessaires (Oughton, 2022).

Enfin, pour minimiser les coûts, il est important de disposer d’un cadre pour les licences et le spectre qui permette de tester et déployer différentes technologies dans les zones rurales. Les technologies sans fil sont plus rentables que les réseaux fixes, mais les coûts des infrastructures sans fil peuvent être prohibitifs dans les zones rurales, notamment les équipements radio, le génie civil pour les infrastructures passives (tours), l’approvisionnement en énergie et les liaisons de transmission. L’industrie a apporté des innovations dans tous ces domaines : équipements radio alternatifs, tours plus légères, transmission optimisée et nouvelles technologies (y compris le laser), et sources d’énergie alternatives (solaire) (encadré 4.6). En outre, de nouveaux modèles commerciaux offrant la connectivité rurale en tant que service se sont développés, réduisant les coûts pour des opérateurs

ENCADRÉ 4.6

Technologies alternatives pour la couverture des zones rurales et isolées

Les zones rurales et éloignées constituent un défi pour l’infrastructure de réseau en raison de la topologie difficile, de la faible densité de population et de la demande limitée due aux bas niveaux de revenus. La structure des coûts ou le modèle économique du déploiement de l’infrastructure dans les zones urbaines n’est souvent pas viable dans les zones rurales et éloignées. C’est pourquoi de nouvelles technologies sont conçues pour couvrir ces régions éloignées tout en restant rentables pour les opérateurs de réseaux mobiles ; cependant, il n’existe pas encore de solution universelle pour l’accès à distance.

La technologie SuperCell, testée par Facebook, en est un exemple. Cette solution a prouvé qu’elle pouvait offrir des niveaux de propagation plus élevés en utilisant des tours très hautes (jusqu’à 250 mètres) et des antennes à secteur étroit pour accroître la portée et la

Infrastructure numérique et des données 189
(suite)

ENCADRÉ 4.6

Technologies alternatives pour la couverture des zones rurales et isolées (suite)

capacité de la couverture mobile. Cette technologie a démontré qu’elle permettait de couvrir une zone jusqu’à 65 fois plus grande que les macro-stations de base rurales standard (fondées sur une tour de 30 mètres). Une SuperCell pourrait remplacer 15 à 25 macrocellules traditionnelles, avec un coût inférieur de 33 % lorsqu’elle est déployée en grappe (Tiwari, 2020).

L’utilisation d’un aérostat captif transportant des charges utiles permettrait également de couvrir de vastes zones dans les régions rurales et éloignées. Grâce à sa portance assurée par un gaz plus léger que l’air, l’un de ses principaux avantages est qu’il peut être facilement déplacé d’un endroit à l’autre. En outre, selon l’altitude et la taille de l’aérostat, il pourrait remplacer plusieurs petits sites ou sites macros, en ne nécessitant un raccordement que sur un seul site. Cependant, étant donné sa nature, il est peu fiable face à des conditions météorologiques difficiles, par exemple des vents violents. Les ballons stratosphériques, capables d’atteindre de hautes altitudes à des coûts relativement faibles, constituent une alternative similaire pour couvrir de vastes zones. Cette technologie a été testée, mais Google a interrompu le déploiement de son projet Loon.

Parmi les autres solutions à faible coût, on peut citer les solutions modulaires de liaison par micro-ondes, les constellations en orbite terrestre basse (LEO – low Earth orbit, à une altitude de 500 à 2 000 kilomètres de la terre) et en orbite terrestre moyenne (MEO –medium Earth orbit, à une altitude de 2 000 à 36 000 kilomètres). Les constellations de satellites internet sont des satellites artificiels capables de fournir un internet à faible latence et haut débit. Leur développement en tant que réseaux n’est pas pour tout de suite, mais les constellations LEO pourraient devenir compétitives par rapport aux options terrestres à condition que les trois principales constellations LEO restent sous des densités d’utilisateurs données (Osoro et Oughton, 2021). Le projet Kuiper d’Amazon est un exemple d’initiative de constellation LEO à long terme visant à fournir des services à haut débit et faible latence aux zones mal desservies.

En Afrique, une forme de communication optique sans fil est testée pour relier les régions éloignées séparées par le fleuve Congo (Erkmen, 2021). Les communications optiques sans fil du projet Taara constituent un système ou les liaisons se pointent et se suivent, trouvant l’alignement optique et créant une connexion à large bande passante. Bien que la technologie ait des limites, telles que la fiabilité en cas de changements environnementaux, elle pourrait constituer une solution « approximative » pour les personnes qui ne sont pas du tout connectées.

tels que Africa Mobile Networks et iSAT Africa. La disponibilité du spectre sans licence (par exemple, pour le Wi-Fi 6)35 et l’adoption de règles autorisant les solutions d’« espace blanc » pour la télévision permettent également l’utilisation d’un large éventail de technologies alternatives pour la connectivité du dernier kilomètre.

Interventions complémentaires d’appui à la demande et à l’offre

Les réformes réglementaires augmenteront considérablement la connectivité, mais les écarts de couverture et d’adoption persisteront si des programmes d’appui à l’offre et à la demande ne sont pas mis en œuvre. L’application de réformes des politiques visant à libérer le spectre, à faciliter le partage des infrastructures et à réduire les surcharges fiscales,

190 Afrique numérique

accompagnée d’obligations strictes de couverture universelle, permettra d’obtenir des gains significatifs de couverture et d’adoption (figure 4.20). En outre, ces réformes des politiques permettraient d’économiser 10 à 20 % du coût nécessaire pour parvenir à une couverture 4G quasi universelle dans les pays analysés, entraînant des économies de plus de 200 millions de dollars US pour les États des pays inclus dans l’analyse (Banque mondiale, 2022).36

Le renforcement de la concurrence dans le secteur permettra d’accroître encore l’adoption, comme l’ont montré les simulations pour le Ghana (voir figure 4.15). Toutefois, dans certaines régions – et en particulier dans les ménages à faible revenu et les petites entreprises informelles – l’adoption sera limitée, nécessitant des politiques complémentaires visant à la fois la demande (telles que les compétences numériques et la sensibilisation aux avantages des TN) et l’offre (telles que des prix compétitifs), ainsi que des politiques socioéconomiques plus larges pour renforcer la volonté d’utiliser les services numériques et de payer pour eux.

Les coûts privés et publics de la couverture universelle en haut débit sont élevés dans certaines régions, rendant ainsi les objectifs universels difficiles à atteindre (carte 4.4). Les obligations de couverture autorisant les subventions croisées des ORM devraient être complétées par des subventions publiques pour la couverture universelle (par exemple,

FIGURE 4.20 Projection de la couverture de l’internet à haut débit, des déficits de couverture, et de l’utilisation dans les scénarios de référence et de réforme des politiques, dans certains pays africains, d’ici 2030

Connecté Écart d’utilisation Écart de couverture

Source : Banque mondiale, 2022, sur la base des estimations de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA). Note : L’« écart d’utilisation » correspond à la part de la population qui dispose d’une couverture internet à haut débit, mais ne l’utilise pas. L’« écart de couverture » désigne l’absence de couverture internet à haut débit. Les « réformes des politiques » ne comprennent que la libération du spectre inférieur à 1 GHz et la réduction des surtaxes. Elles ne tiennent pas compte des politiques visant à promouvoir la concurrence ou à faciliter le partage des infrastructures.

Infrastructure numérique et des données 191
45 51 37 44 53 58 54 61 43 44 54 60 41 47 46 44 33 33 36 35 39 34 56 55 26 22 46 44 10 5 30 23 11 77 4 11 20 18 13 8 0 10 Part de la population (%) 20 30 40 50 60 70 80 90 100
RéformesdespolitiquesRéférenceRéformesdespolitiquesRéférence
RéformesdespolitiquesRéférenceRéformesdespolitiquesRéférenceRéformesdespolitiquesRéférenceRéformesdespolitiques Bénin Congo,
dém.duGhanaNigeriaRwandaSierra LeoneTanzanie
Référence
RéformesdespolitiquesRéférence
Rép.

CARTE 4.4 Estimation du coût public par utilisateur pour le haut débit universel 4G (sans fil), Afrique, valeur actuelle nette pour 2020–2030

Source : Oughton, 2022 ; utilisé avec l’autorisation d’OpenStreetMap (CC BY-SA 2.0).

Note : Les estimations des coûts publics (en dollars US par utilisateur) concernent les réseaux 4G avec liaison hertzienne pour fournir un haut débit universel avec une capacité de 30 gigaoctets par mois et par utilisateur, avec une valeur actuelle nette sur 10 ans. Dans la légende, le terme « viable » fait référence aux zones qui ne nécessiteront pas de contribution financière de la part des pouvoirs publics.

dorsale, raccordement, sites) afin de réduire la fracture numérique. Les obligations de couverture peuvent être incluses dans les attributions concurrentielles de fréquences ; sinon, les coûts d’extension des infrastructures aux zones non couvertes peuvent être déduits des redevances d’utilisation du spectre résultant d’enchères (comme en Colombie), ou des coinvestissements peuvent être réalisés par les opérateurs et les pouvoirs publics dans le cadre d’accords de partage d’infrastructures (comme pour le RRP au Royaume-Uni).

Dans les zones non couvertes, les subventions de l’offre pourraient contribuer à augmenter l’adoption, mais elles doivent être complétées par des interventions du côté de la

192 Afrique numérique
Coût par utilisateur (dollars US) viable $100 $200 $300 $400 $500 $600 $700 $800 $900 $1 000 >$1 000 30 20 10 –10 –100 10 20 30 40 50 –20 –30 0 (C ) OpenStreetMap contributors (C ) CARTO contributors

demande, telles que des programmes améliorant les compétences numériques et d’autres augmentant la valeur perçue de l’utilisation des TN. D’après une analyse réalisée pour sept pays d’Afrique subsaharienne, même si l’infrastructure universelle 4G était subventionnée pour en accroître la disponibilité, l’adoption de l’internet mobile n’augmenterait que de 1 à 3 points de pourcentage, car la demande resterait limitée. Si l’adoption potentielle de la 4G atteignait 40 % dans les zones non couvertes grâce à des politiques axées sur la demande, la couverture 4G atteindrait alors les mêmes niveaux que ceux qui seraient atteints avec une simple subvention de l’offre (Banque mondiale, 2022).

Les politiques courantes susceptibles de stimuler la demande comprennent les subventions et les garanties de prêt pour les appareils. L’expérience des subventions pour les appareils a été mitigée en raison de problèmes liés au ciblage, à la revente des appareils et à la volonté de payer pour les données. Une analyse des subventions pour les appareils en 2008 dans les zones rurales du Rwanda montre que les avantages ont surtout profité aux utilisateurs urbains et que les bons destinés aux utilisateurs précoces dans les zones rurales auraient pu être plus efficaces (Björkegren et Karaca, 2022).

L’ampleur des effets des interventions portant sur les téléphones varie : lors d’un essai contrôlé randomisé en Tanzanie, l’octroi d’un smartphone a eu des effets sur la consommation 3 fois plus importants que ceux résultant de la remise d’un téléphone de base et 3,6 fois plus importants que ceux résultant d’une subvention en espèces (Roessler et coll., 2021). Toutefois, un taux de rotation élevé des appareils peut réduire la durabilité de ces effets : dans l’expérience tanzanienne, seuls 34 % des femmes avaient conservé les smartphones offerts au bout de 13 mois. D’autres modèles commerciaux visent le financement d’appareils qui pourraient être soutenus par des garanties publiques ou des fonds permettant d’allonger la période de remboursement.

Le ciblage des programmes de soutien de la demande et le suivi sont importants pour l’efficacité. L’analyse des données géospatiales, de la consommation et de la disponibilité des infrastructures, entre autres, pourrait être utile pour cibler les ménages ou les utilisateurs vulnérables présentant un plus grand potentiel de retombées. En outre, les données relatives à la consommation des paiements mobiles pourraient être utilisées par les opérateurs ou d’autres acteurs pour l’évaluation du crédit afin d’accorder des prêts pour l’achat de smartphones. D’autres solutions pour rendre les appareils plus abordables consistent à éliminer les droits d’importation sur les appareils et les composants, à supprimer la TVA sur les smartphones à bas prix (comme en Colombie) et à soutenir les marchés des téléphones d’occasion.

Les interventions visant à réduire les prix pour les consommateurs à faible revenu peuvent également stimuler la demande. En Afrique du Sud, les accords conclus entre la Commission de la concurrence et Vodacome et MTN (à la suite de l’enquête de marché qui a mis en évidence des prix élevés par unité de données pour les consommateurs à faible consommation) permettraient de réduire les prix des forfaits internet à faible consommation et d’accorder un accès gratuit à certains contenus. D’autres pays, comme la Colombie37, le Royaume-Uni38 et les États-Unis39, ont ciblé les réductions de prix des services internet sur les consommateurs à faible revenu ou vulnérables. D’autres ont proposé de fournir un accès gratuit aux services de données 2G pour permettre aux utilisateurs d’expérimenter l’utilisation d’internet avec une vitesse inférieure (Song, 2016).

Les opérateurs ont également mis en œuvre des programmes de réduction des prix d’internet et des compléments pour les groupes à faibles revenus, avec des résultats variables. Dans le cadre de son approbation de la fusion Comcast-NBCU en 2011, la Commission fédérale des communications (FCC – Federal Communications Commission)

Infrastructure numérique et des données 193

des États-Unis a demandé à Comcast de mettre en place un programme de haut débit pour les personnes à faibles revenus, « Internet Essentials (IE) ». En conséquence, l’adoption du haut débit par les ménages éligibles – ceux dont les enfants en âge scolaire ont droit à des repas scolaires gratuits ou à prix réduit – a augmenté davantage dans les zones où Comcast fournissait un service internet à haut débit (Rosston et Wallsten, 2020). Zou (2021) a étudié les effets du même programme à large bande pour les faibles revenus et a constaté que les participants affichaient des taux d’emploi et des revenus plus élevés, et qu’ils adoptaient davantage internet lorsqu’ils participaient au programme IE.

Une autre initiative subventionnant l’accès à internet dans les zones rurales et isolées du Pérou a permis d’accroître l’utilisation d’internet et la possession de téléphones portables, avec des effets plus marqués et plus étendus sur cette dernière (Guerrero Barreto et Ritter Burga, 2014). L’étude montre également une augmentation de l’emploi des personnes éduquées, célibataires et jeunes, ainsi que des prix plus élevés pour les produits des agriculteurs.

Les pouvoirs publics ont financé des programmes visant à connecter les écoles et les kiosques internet publics afin de stimuler l’utilisation d’internet, et il existe des preuves des retombées de l’accès à internet à l’école. Goolsbee et Guryan (2006) ont étudié un programme californien visant à subventionner l’accès à internet dans les écoles et n’ont constaté aucun effet significatif sur les performances des élèves. Belo, Ferreira et Telang (2016) ont étudié l’effet de l’utilisation d’internet par les enfants à l’école sur l’adoption d’internet à la maison et les effets de contagion sur les ménages voisins équipés d’une connexion à large bande au Portugal. Ils ont constaté des effets causaux positifs, en particulier lorsque les enfants utilisent intensivement internet à l’école.

La discussion sur les interventions du côté de la demande pour l’adoption du haut débit ultrarapide souligne l’importance de l’accès au bureau, à l’école ou dans les bibliothèques publiques (Bourreau, Feasey et Hoernig, 2017). Une corrélation positive entre le nombre de bibliothèques disposant d’un accès au haut débit et l’adoption de celui-ci par les ménages n’a été constatée que dans les comtés ruraux des États-Unis, mais aucun lien de causalité n’a été trouvé (Whitacre et Rhinesmith, 2015). Enfin, en utilisant des données d’enquête sur 134 000 personnes entre 2009 et 2014 en Afrique du Sud, Hawthorne et Grzybowski (2019) ont constaté que le fait de disposer d’un ordinateur et d’avoir accès à une connexion internet au travail ou à l’école est plus important que la réduction de 10 % des prix des données mobiles pour favoriser la pénétration du haut débit. Des interventions visant à accroître la volonté d’utilisation (par exemple, la culture numérique et une plus grande sensibilisation aux avantages apportés par les TN) ont également été testées. Au Rwanda, les autorités ont lancé le programme Ambassadeurs numériques, qui a formé 50 jeunes Rwandais dans cinq districts en vue de les envoyer former, entre la fin de 2017 le milieu de 2018, environ 17 000 personnes à l’utilisation des services numériques et au potentiel des outils numériques. Une première évaluation a montré l’efficacité du programme pour l’amélioration des compétences numériques et de la confiance en soi dans l’utilisation des TN, pour l’augmentation de la sensibilisation et l’adoption des services électroniques, et pour la stimulation de l’utilisation quotidienne des TN (DOT, 2019). Les leçons tirées de la phase pilote comprennent, entre autres, l’augmentation de la portée communautaire, le soutien au contenu local, le renforcement des liens avec d’autres programmes, et l’utilisation d’approches d’enseignement alternatives (Banque mondiale, 2021c). Au Nigeria, les autorités de l’État de Kaduna ont soutenu les compétences numériques et l’entrepreneuriat à l’aide de formations à l’utilisation de services numériques, tels que les plateformes de travail en ligne et la mise en relation des

194 Afrique numérique

offres et demandes d’emploi. Le programme a réussi à générer une augmentation des revenus des participants (Banque mondiale, 2019c).

Les interventions visant à accroître l’utilisation d’internet peuvent être financées par un fonds de service universel (FSU), des subventions croisées par les opérateurs répondant à la réglementation ou aux accords, ou des budgets provenant d’autres secteurs ou du budget général. Les fonds de service universel sont des contributions légalement obligatoires des opérateurs (prélèvements industriels) destinés à financer des projets visant à accroître l’accès aux services de télécommunications et, en fin de compte, à réduire la fracture numérique (Bleeker, 2019). Certains pays ont également des obligations de service universel (OSU) en même temps que les FSU – ou à la place de ceux-ci – et, dans ce cas, les opérateurs sont tenus d’offrir des paquets de services spéciaux aux consommateurs à faible revenu (comme en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis) ou d’étendre la connectivité dans certaines zones (Ajibulu et Nyman, 2019).

En Afrique, la plupart des pays ont mis en place des FSU, mais diverses études indiquent qu’à quelques exceptions près, ils n’ont pas été couronnés de succès. Par exemple, GSMA (2014) et A4AI (2018) rapportent que la plupart de ces fonds n’ont même pas été utilisés. Cet échec est dû à une mauvaise formulation des politiques, à un engagement inadéquat des parties prenantes, à un manque de redevabilité, à de faibles taux de décaissement des fonds, à des données inexactes, à des plans inefficaces de déploiement du haut débit dans les zones rurales, et à l’influence politique (Arakpogun, Wanjiru et Whalley, 2017 ; Bleeker, 2019). Le Ghana, le Lesotho, le Nigeria, l’Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie ont néanmoins mis en œuvre des FSU avec succès (Arakpogun, Wanjiru et Whalley, 2017).

Bien que les subventions de l’offre et de la demande puissent être financées par des fonds de garantie américains, de nombreux défis doivent être relevés pour qu’ils soient efficaces. Les FSU peuvent limiter l’utilisation efficace des ressources : s’ils sont basés sur les revenus, les FSU laissent sans emploi des capitaux qui pourraient autrement être investis de manière productive, ce qui peut fausser les décisions de tarification et réduire l’efficacité économique. En 2020, le FSU du Bénin n’avait déboursé aucun financement, les décaissements n’atteignaient que 5 % en Tunisie, et 2,5 % des fonds collectés au Sénégal étaient alloués aux télécommunications contre 97,5 % au Fonds de soutien à l’énergie (Niesten et Begazo, 2021). On estime que 408 millions de dollars US n’ont pas été décaissés dans l’ensemble des 37 pays africains dotés de FSU (A4AI, 2018).

Parmi les autres problèmes de gouvernance affectant le fonctionnement des FSU, on peut citer l’absence de rapports. En 2020, seuls 13 des 23 pays africains disposaient de FSU qui déboursaient et publiaient des données sur la collecte et l’utilisation des fonds (Banque mondiale, 2021 b). En outre, dans de nombreux pays, seuls les opérateurs actuels peuvent accéder aux fonds, ce qui réduit la possibilité d’entrer sur les marchés ruraux, y compris le soutien aux réseaux communautaires.

Les FSU et les politiques connexes devraient être réorientés afin de traiter les questions d’utilisation à l’aide de politiques solides. Tout d’abord, il est essentiel d’améliorer le fonctionnement des FSU, y compris la transparence et la redevabilité. D’autres options pourraient être envisagées, telles qu’un système «  play or pay » (jouer ou payer) dans lequel, au lieu de contribuer aux FSU, les opérateurs acceptent des obligations de couverture ou réduisent les prix (tarifs sociaux) (UIT et Banque mondiale, 2020). Les interventions axées sur la demande doivent tenir compte de l’objectif spécifique d’une population donnée, en fonction de la capacité et de la volonté d’utilisation de celle-ci (figure 4.21).

L’introduction de réglementations et de programmes visant à créer des forfaits de données sociaux ou à faible coût subventionnés – avec des tarifs bas pour les « amis et la

Infrastructure numérique et des données 195

FIGURE 4.21 Politiques visant à accroître l’utilisation d’internet, en fonction de la capacité des groupes d’utilisateurs à payer et de leur volonté d’utiliser internet

Des règles efficaces en faveur de la concurrence et des règles de réduction des coûts pour stimuler l’accessibilité financière

Des subventions ciblées axées sur la demande, telles que

• Tarifs sociaux ou forfaits de survie, bons de réduction pour les données ; et

• Subventions ou financement pour les smartphones ou autres appareils devices

• Réglementations visant à faciliter la disponibilité (couverture) dans les lieux où se trouvent les utilisateurs

• Pas de besoin de fonds publics (subventions de l’offre ou de la demande)

• Exposition aux services internet et aux services numériques (dans les écoles, les institutions publiques et les points d’accès publics, ainsi que par la création d’« applications géniales » destinées aux groupes à faibles revenus) afin d’accroître la volonté d’utilisation (capacités et attrait)

• Forfaits sociaux avec des tarifs réduits pour les amis et la famille afin d’accroître l’accessibilité financière

• Exposition aux services internet et aux services numériques (dans les écoles et les institutions publiques et par la création d’« applications géniales » destinées aux analphabètes numériques et aux groupes vulnérables) afin d’accroître la volonté d’utilisation (capacités et attrait)

• Programmes d’incitation financière à la mise à niveau et à l’amélioration de l’expérience utilisateur (financement de smartphones, d’ordinateurs portables)

• Justification limitée des subventions du côté de l’offre

famille » pour stimuler les effets de réseau et des bons ciblés pour les services de données – peut être complétée par l’utilisation du FSU pour faciliter le financement des appareils ou l’accès à ces derniers. Pour ceux dont la volonté d’utilisation est faible en raison d’une sensibilisation et d’une exposition limitées, le FSU pourrait financer des programmes stimulant la demande, tels que la connectivité dans les écoles et les points d’accès public. Le coût de la connexion des institutions de recherche et d’éducation en Afrique est estimé à 52 milliards de dollars US en 2021-2025 (Melhem et coll., 2021). Le renforcement des capacités et les programmes permettant une utilisation productive d’internet sont d’autres options pour encourager l’adoption et l’utilisation.

En résumé, les réformes des politiques visant à améliorer la connectivité numérique dépendent de la promotion de la concurrence, de la réduction des coûts opérationnels de la fourniture des services, et de la réforme du service universel avec des institutions plus efficaces (figure 4.22). Des réformes réglementaires doivent être envisagées en premier lieu et complétées, si nécessaire, par des programmes ciblés de soutien de l’offre et de la demande. Les programmes publics de soutien, y compris les subventions dans certains cas, sont généralement justifiés en raison des retombées positives de l’utilisation des TN sur l’emploi et la productivité (voir chapitre 1) et pour des raisons sociales d’équité et d’inclusion (Clarke et Wallsten, 2002). Le secteur privé a également un rôle important à jouer dans le cofinancement et la recherche d’innovations dans les mécanismes visant à

196 Afrique numérique
(ba s) –V olonté d’utiliser internet (é le vé )+ (bas)– Capacité à payer pour internet(élevé)+
Source : Élaboré à partir de Bourreau, Feasey et Hoernig, 2017.

FIGURE 4.22 Résumé des réformes des politiques proposées pour une disponibilité d’internet à un coût abordable

Secteur en transition

Accessibilité financière Entrée sur le marché et concurrence effective

Octroi de licences et réglementation ex ante de la position dominante

Accès et partage des infrastructures

Gestion du spectre Réduction des coûts

Libéralisation de l’entrée (licence unifiée) ; élimination des monopoles (par exemple, passerelle internationale)

Règles d’interconnexion (basées sur les coûts, non-discrimination, résolution efficace des litiges)

Règle permettant aux FSI de déployer des infrastructures, élimination des restrictions en matière de VoIP

Partage des infrastructures (fondé sur les coûts, nondiscrimination, transparence, résolution des litiges) Partage intersectoriel des infrastructures, droits de passage, octroi de licences pour l’exploitation d’infrastructures passives

Règles relatives aux PMS, désignation des PMS et mesures correctives ; contrôle des transferts de licences et des fusions

Règles pour le coinvestissement et les réseaux de gros uniquement afin de déployer des réseaux à grande capacité ; base de données des infrastructures publiques et privées disponibles

EP, actifs de l’État et PPP Impôts et cotisations sectoriels

Politique du spectre ; publication du registre national des fréquences du spectre

Ouverture des EP à l’actionnariat privé ; restructuration des EP

Règles relatives au spectre: attribution, méthodes d’attribution, tarification, partage/transfert/location, conditions de licence

Accès ouvert aux réseaux en fibres optiques de l’État (énergie) ; transparence et redevabilité des EP

Attribution et assignation du spectre 5G ; spectre sans licence ou accès dynamique au spectre

PPP pour les réseaux en fibres optiques à accès ouvert, les projets de connectivité publics (tels que les réseaux d’enseignement supérieur)

Disponibilité Interventions subsidiaires des pouvoirs publics pour compléter les marchés

Accès ou service universel

Élimination des taxes sectorielles (accises) sur les services de télécommunications

Création de FSU ; FSU transparents et plus efficaces, axés sur la disponibilité de services répondant à la demande et sur l’utilisation

Révision des taxes sur les services numériques ; règles pour fixer des redevances réglementaires orientées vers les coûts

Cadre national visant à harmoniser les redevances infranationales pour le déploiement des infrastructures

Redéfinition du champ d’action du FSU (services numériques dans les secteurs pour attirer la demande) et des modalités de paiement (CAPEX vs contribution)

Concentration sur l’utilisation et la modernisation : nouvelles mesures ciblées d’aide à la demande ; règles de tarification pour les groupes vulnérables

Institutions et gouvernance réglementaire

Atténuation du changement climatique et adaptation

Réglementation efficace et transparente

Plans d’urgence obligatoires

Politique en faveur d’une conception, d’une construction et d’une exploitation résilientes et écologiques des infrastructures TIC

Gestion des déchets électroniques ; incitations à l’efficacité énergétique et aux TIC vertes (normes, objectifs)

Loi générale sur les TIC ; autorité de régulation indépendante et redevable

Source : Adapté de Aviomoh, Begazo et Golla, à paraître.

Transparence des finances et des décisions de l’autorité de régulation des télécommunications ; élaboration concertée des politiques

Stratégie pour l’économie numérique ; collaboration interinstitutionnelle ; utilisation des données numériques pour une meilleure réglementation

Note : La figure présente une liste non exhaustive de politiques. 5G = technologie de communication mobile de cinquième génération ; CAPEX = dépenses d’investissement ; TIC = technologies de l’information et de la communication ; FSI = fournisseur de services internet ; PPP = partenariat public-privé ; EP = entreprise publique ; PMS = [opérateurs disposant] d’un pouvoir de marché significatif ; FSU = Fonds de service universel ; VoIP = voice over internet protocol (transmission de la voix par internet).

Infrastructure numérique et des données 197
Objectif Domaine des politiques Sujet Secteur émergent

accroître la disponibilité et l’adoption, comme l’a souligné la Broadband Commission (Gallegos et coll., 2019). Pour s’attaquer à la fracture numérique, il est nécessaire de passer d’une politique descendante axée sur l’investissement à une politique fondée sur la demande et centrée sur l’utilisateur. Des recherches et des expérimentations supplémentaires sont toutefois nécessaires pour identifier la combinaison de politiques la plus efficace pour stimuler l’adoption d’internet en vue de l’utilisation des TN dans le contexte de chaque pays d’Afrique.

Infrastructure de données et réglementation visant l’accessibilité financière et la volonté d’utilisation

La disponibilité de TN attrayantes est influencée par le fonctionnement de l’infrastructure des données et les caractéristiques de la réglementation des données. L’infrastructure des données permet aux entrepreneurs numériques de développer et lancer des TN à l’aide de l’informatique en nuage et des services de stockage. En même temps, une plus grande disponibilité de l’infrastructure des données améliore l’expérience de consommation des utilisateurs des TN, facilitant ainsi leur adoption. De même, la réglementation des données permet l’utilisation et réutilisation des données pour produire et exploiter des TN plus attrayantes, tout en établissant des garde-fous pour une plus grande confiance et une plus grande volonté d’utiliser les TN.

L’infrastructure des données est essentielle pour améliorer l’accessibilité et la qualité du service, et elle permet un échange local du trafic internet et un accès plus direct au contenu mondial – grâce à des serveurs miroirs, à des performances du web plus rapides grâce à des réseaux de diffusion de contenu, à des rampes d’accès au nuage partant des centres de données pour accéder à l’informatique en nuage mondiale, et à des serveurs périphériques rapprochant le calcul et le stockage des données des sources et des utilisateurs. La disponibilité de cette infrastructure peut réduire la latence et la consommation internationale de bande passante, permettant ainsi une meilleure qualité de service et une réduction des coûts de transmission des données.40 En outre, l’informatique de pointe et l’accès facile à l’informatique en nuage peuvent contribuer au développement et à l’accès à des solutions numériques répondant aux besoins de l’Afrique – des solutions telles que l’internet des objets pour l’agriculture de précision, la logistique et la fabrication, ou des services d’administration publique en ligne plus fiables. Le secteur des centres de données est dynamique et vise à offrir plus de capacité et de meilleurs services pour soutenir l’utilisation des TN, mais un environnement favorable et prévisible doit encore être mis en place pour accélérer l’expansion, la mise à niveau et l’innovation.

L’infrastructure des données s’est considérablement développée en Afrique, et certains pays sont passés de l’échange de trafic internet de base à des centres de données avec un accès direct à l’informatique en nuage. L’Afrique dispose d’environ 64 points d’échange internet (IXP)41 – soit seulement 8,5 % de l’ensemble des IXP du monde entier – alors que le continent représente 27,7 % des pays42 et 17,5 % de la population mondiale. L’Afrique subsaharienne ne compte que 0,1 centre de données pour 1 million d’habitants, contre 0,5 dans le monde et 3,1 en Amérique du Nord (figure 4.23, panneau a). La faible concentration des centres de données (figure 4.22, panneau a) et des IXP (figure 4.23, panneau b) est associée à de faibles vitesses de téléchargement et à une latence importante, ainsi qu’à des coûts d’utilisation plus élevés des données internationales (Aviomoh et coll., 2021).

198 Afrique numérique

FIGURE 4.23 Caractéristiques de l’infrastructure des données, 2020

a. Densité des centres de données, par vitesse de téléchargement

Centres de données par million d’habitants

b. Densité des IXP, par temps de latence

Source : Élaboré par Aviomoh et coll., 2021, à partir de données provenant de la base de données des indicateurs du développement dans le monde ; Ookla Speedtest Intelligence (panneau a) ; et la base de données des indicateurs du développement dans le monde et Data Center Map (https://www.datacentermap.com) (panneau b).

Note : Les pays africains (points bleus) sont désignés par leur code ISO alpha-3. La « latence » (panneau b) désigne le délai de transmission d’un message, en millisecondes (ms). IXP = point d’échange internet ; Mbps = mégabits par seconde.

Infrastructure numérique et des données 199
80 60 40 20 0 24 Vi te sse de té léchargement m oy enne (Mbps) La te nce mo ye n (m s)
IXP par million d’habitants 68 10 150 MRT MUS GAB TRM NAM DZA BWA BEN RWA KEN ZAF TGO DJI MAR TZAEGY MLI TUN SEN AGO CIV ZIM NGA BFA MOZ BFA DZA CMR AGO NGA MOZ BEN ZAF MAR MLI ZWE TGO RWA GHA NAM TUN BWA GAB MUS 100 50 00,2 0,40,6 0,8 1 Autres pays Pays africains Valeurs fixes Autres pays Pays africains Valeurs fixes

grande clarté dans l’octroi des licences permettant d’acheminer le trafic étranger, de l’échanger et de le livrer à d’autres pays, ainsi que d’un accès à une connectivité régionale et internationale fiable.

Comme indiqué précédemment, il existe encore diverses restrictions à la connectivité internationale. Les politiques relatives aux flux de données transfrontaliers affectent également la possibilité d’agréger la demande régionale, et l’existence de règles et de concepts juridiques différents d’un pays à l’autre accroît la charge réglementaire. Parmi les pays africains étudiés dans le cadre du Rapport sur le développement dans le monde 2021 (Banque mondiale, 2021e), la moitié (13 pays) ont adopté une « approche adéquate » (sauvegardes préautorisées) qui permet les transferts de données vers des pays garantissant un niveau équivalent de protection des données. Les pays restants ont adopté soit une « approche de redevabilité » (où le contrôleur est tenu de s’assurer que le destinataire respecte les lois en matière de protection des données à caractère personnel), soit une « approche d’autorisation » où les autorités permettent les transferts si le contrôleur s’assure que les données sont protégées par des clauses contractuelles ou des règles internes (Chen, Daza et Begazo Gomez, 2021). Dans certains pays, certaines données doivent être stockées dans le pays (par exemple, les données des abonnés et des consommateurs des télécommunications au Nigeria), tandis que d’autres pays autorisent le transfert de données avec une copie stockée dans le pays (comme dans le projet sud-africain de politique nationale sur les données et le nuage). Le besoin de coordination et d’interopérabilité est flagrant en Afrique, et certaines initiatives telles que le Cadre des politiques de données de l’Union africaine (UA), le Réseau africain des autorités de protection des données et le Programme de protection des données de la Smart Africa ont commencé à y travailler.

En outre, les problèmes liés à l’exploitation et à la modernisation des installations de données doivent être abordés plus avant, et des sauvegardes doivent être mises en place pour éviter les distorsions du marché. Les pouvoirs publics ont été proactifs en facilitant la création d’IXP43, mais des interventions actualisées sont nécessaires pour faciliter la croissance des IXP et leur mise à niveau vers des installations de données plus avancées. Ces mises à jour comprennent la réévaluation de la gouvernance des IXP et le renforcement des capacités techniques et financières, ainsi que l’autorisation pour les non-FSI (tels que les institutions publiques, les fournisseurs de services financiers, les fournisseurs de contenu étranger, et autres) d’échanger du trafic (Aviomoh et coll., 2021).

Le fonctionnement optimal de l’infrastructure des données dépend de la fiabilité et de la disponibilité de l’énergie, en particulier pour la climatisation – un défi dans de nombreux pays africains où les pannes et les fluctuations de courant et les prix élevés de l’énergie sont encore des contraintes. Enfin, pour préserver la dynamique de la concurrence, il est également important que des politiques visent à garantir la neutralité des centres de données de colocation afin de favoriser des conditions de concurrence équitables et de réduire les coûts de changement pour les utilisateurs. De telles politiques permettraient d’apaiser les craintes de voir des entreprises intégrées verticalement exploiter leur pouvoir de marché dans l’infrastructure numérique (télécommunications) ou les services numériques mondiaux pour offrir des services de stockage des données et d’informatique et empêcher les utilisateurs de passer d’un centre de données ou d’un fournisseur d’informatique à l’autre. À cette fin, des cadres antitrust solides sont importants, de même que des garanties de concurrence dans la conception des initiatives d’investissement public dans les infrastructures de données et des normes minimales de protection et de sécurité des données pour les centres de données afin de faciliter le passage d’un centre à l’autre.

Infrastructure numérique et des données 201

Une réglementation des données et des institutions appropriées sont essentielles pour créer un environnement de confiance encourageant la volonté d’utiliser les TN (à l’aide de sauvegardes) et un environnement commercial où les données sont utilisées pour offrir des solutions numériques adaptées (à l’aide de facilitateurs). Les « sauvegardes » sont des réglementations visant à promouvoir un environnement en ligne sûr, à minimiser les risques et à limiter les dommages potentiels. Elles prennent la forme de la cybersécurité, de la protection des données personnelles, de la protection des consommateurs en ligne, de la réglementation des pratiques commerciales déloyales, et de moyens de garantir une utilisation appropriée de l’intelligence artificielle (IA). Les « facilitateurs » sont, en revanche, des initiatives réglementaires facilitant l’utilisation et réutilisation des données, en promouvant l’interaction entre les différents acteurs et en réduisant le coût du traitement et du partage des données. Il s’agit notamment de politiques liées aux données ainsi qu’à la législation antitrust et à la propriété intellectuelle.

En avril 2021, 25 pays africains avaient introduit une législation générale sur la protection des données, alors que les cadres relatifs à la cybersécurité ou à la cybercriminalité n’en sont encore qu’à leurs débuts. Ces deux domaines sont essentiels pour garantir la confiance dans les transactions numériques. La plupart des pays africains ont mis en œuvre des stratégies réglementaires pour prévenir la cybercriminalité, en criminalisant la dégradation, l’effacement, la détérioration, l’altération ou la suppression non autorisés de données personnelles. Néanmoins, les pays africains ont pris du retard dans la réglementation de la cybersécurité. Le renforcement des exigences en matière de cybersécurité pour les processeurs ou les contrôleurs de données et pour le traitement automatisé des données personnelles, ainsi qu’une stratégie nationale de cybersécurité, permettront de créer un espace en ligne plus cohérent et plus fort.

La réglementation de la protection des données est plus avancée que la cybersécurité dans les pays africains, même si des solutions plus innovantes doivent encore être mises en œuvre. Selon le Global Data Regulation Diagnostic (GDRD)44, seuls 15 des 27 pays africains ne sont pas encore tout à fait à mi-chemin de la mise en place de bons cadres de réglementation des données pour les sauvegardes (figure 4.24) – y compris les limitations sur le stockage, l’utilisation de la prise de décision algorithmique, la protection de la vie privée dès la conception,45 et la cybersécurité pour le traitement des données.

Pour les données, les facilitateurs peuvent jouer un rôle prépondérant dans le développement de solutions numériques plus attrayantes et adaptées aux compétences et permettre l’utilisation de la TN dans diverses industries, mais les pays africains sont encore plus éloignés des meilleures pratiques dans ce domaine. En ce qui concerne les règles d’habilitation liées à la réutilisation des données publiques et privées, telles que les données ouvertes, l’accès à l’information, la portabilité des données, le commerce électronique, la signature numérique et l’identification numérique, seuls 8 des 27 pays ont atteint au moins 40 % des bonnes pratiques (figure 4.24). Cela souligne la nécessité de créer un meilleur environnement pour l’utilisation et réutilisation des données afin de générer plus de valeur économique pour les citoyens africains. Par exemple, les systèmes d’identification numérique peuvent faciliter les exigences de connaissance numérique du client (eKYC – electronic Know Your Customer), et renforcer ainsi l’industrie des technologies financières ; les lois sur le commerce électronique peuvent faciliter les plateformes numériques pour l’échange de biens ; et les données ouvertes peuvent permettre des solutions spécifiques à l’industrie (comme dans le domaine de l’agriculture).

202 Afrique numérique

FIGURE 4.24 Réalisation des bonnes pratiques en matière de facilitateurs et de sauvegardes pour l’utilisation et réutilisation des données, dans certains pays africains, 2020

Source : Banque mondiale, à partir des données de Banque mondiale, 2021e, chapitre 6.

Note : Données recueillies en juillet 2020. Un score de 100 = bonne pratique. Selon la définition de Chen (2021), les « sauvegardes » désignent les réglementations visant à promouvoir un environnement en ligne sûr, à minimiser les risques et à limiter les dommages potentiels (telles que la cybersécurité, la protection des données personnelles, la protection des consommateurs en ligne, la réglementation des pratiques commerciales déloyales et l’utilisation appropriée de l’intelligence artificielle) ; les « facilitateurs » désignent les réglementations visant à faciliter l’utilisation et réutilisation des données, à promouvoir l’interaction entre les différents acteurs et à réduire le coût du traitement et du partage des données (telles que les politiques liées aux données ainsi qu’à la législation antitrust et à la propriété intellectuelle).

Cependant, seuls 3 des 27 pays africains inclus dans le GDRD permettent aux fournisseurs de services du secteur privé de vérifier ou d’authentifier numériquement l’identité d’une personne par rapport aux données stockées dans le système d’identification, et la moitié des pays africains analysés ne disposent pas d’une législation sur les données ouvertes ou d’une politique de données ouvertes applicable à l’ensemble du secteur public. En outre, la portabilité des données peut offrir plus de possibilités aux consommateurs, aux emprunteurs et aux petits vendeurs sur les plateformes numériques. Cependant, dans plus de 85 % des pays africains étudiés dans le cadre du GDRD, les individus n’ont pas le droit de demander que leurs données soient transférées à un autre fournisseur de services. Si l’on ne considère que les règles en vigueur, les pays d’Afrique subsaharienne sont loin des pays à revenu élevé et des bonnes pratiques en ce qui concerne l’utilisation des données à usage tant public que privé et les flux transfrontaliers (figure 4.25), mais ils ont de bons résultats en ce qui concerne les facilitateurs du commerce électronique.

La réglementation des flux de données transfrontaliers varie considérablement d’un pays à l’autre. Les transferts transfrontaliers permettent l’utilisation de l’informatique en nuage pour le développement d’applications par des start-ups locales ainsi que pour la viabilité des infrastructures de données régionales, mais des restrictions ont tendance à être imposées aux flux de données transfrontaliers un peu partout dans le monde (Cory et Dascoli, 2021), et l’Afrique ne fait pas exception à la règle. Trois grandes approches de

Infrastructure numérique et des données 203
0 Part des bonnes pratiques réalisées Nigeria Tanzanie Congo,Rép.dém.duAfriqueduSud RwandaLiberiaGambieSierraLeoneÉthiopieCamerounMalawi Gabon MadagascarBurkinaFaso Mali KenyaAngolaOugandaSénégalTogoCôted’IvoireGhanaMauriceBéninÉgypte,Rép.arabed’ Maroc Tunisie 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Facilitateurs Sauvegardes

FIGURE 4.25 Distance par rapport aux meilleures pratiques de réglementation des données selon les groupes de revenu des pays, Afrique subsaharienne par rapport aux groupes de revenu mondiaux, 2020

Commerce électronique/transactions

Transactions/flux transfrontaliers de données

Cybersécurité et cybercriminalité

Protection des données non personnelles

Permission d’utiliser des données à usage public

Permission d’utiliser des données à usage privé

Protection des données personnelles

élevé Revenu intermédiaire de la tranche inférieure Afrique subsaharienne

Revenu intermédiaire de la tranche supérieure Faible revenu

Source : Chen, Daza et Begazo Gomez, 2021.

Note : Le diagramme en radar représente les données de 24 pays d’Afrique subsaharienne sur un échantillon mondial de 80 pays, avec des informations collectées en juin 2020. Il présente les performances (allant de 0 à 100 %) en tant que distance par rapport aux « bonnes pratiques » (100 %) dans sept domaines réglementaires.

transfert des données peuvent être identifiées : un modèle de transfert limité, un modèle de transfert conditionnel et un modèle de transfert ouvert (Banque mondiale, 2021e). Ces approches vont des plus restrictives (exigeant que les données soient stockées dans le pays d’origine) à des cadres plus ouverts (où les données peuvent être transférées sans presque aucune exigence).

Ces différences existent également entre les pays africains. Par exemple, le Kenya a adopté un modèle de transfert limité qui requiert l’approbation des pouvoirs publics pour garantir que les lois du pays vers lequel les données sont transférées sont équivalentes et que le transfert est nécessaire. Au Ghana, le contrôleur est tenu de s’assurer que le destinataire se conformera à la réglementation, sans approbation des autorités. La limitation des restrictions imposées aux flux transfrontaliers de données, aux circonstances où il est nécessaire de protéger la vie privée des consommateurs et les intérêts essentiels en matière de sécurité, la facilitation de la portabilité des données et de l’accès à celles-ci, et l’élaboration de règles interopérables sur l’ensemble du continent africain permettraient de créer un environnement plus fécond pour les TN.

Avec le développement des pôles de données, l’augmentation du taux de pénétration d’internet et les avancées de l’apprentissage machine, l’IA s’est imposée dans le monde entier comme un moyen de trouver des solutions de développement innovantes (Banque mondiale, 2021a). Elle a également le potentiel de réduire le coût d’entrée pour les

204 Afrique numérique
0 20 40 60 80 100
Revenu

entrepreneurs, de créer de nouveaux modèles d’affaires, d’améliorer les diagnostics de santé, d’élargir l’accès au crédit et aux services financiers, et d’améliorer l’ensemble de la chaîne logistique (SFI, 2020). Le développement et l’utilisation productive de ces technologies restent néanmoins fortement concentrés dans les pays à revenu élevé. À l’exception de l’Égypte, de Maurice, de l’Afrique du Sud et de la Tunisie, les pays africains sont moins bien classés que la moyenne mondiale pour l’indice de préparation à l’IA Oxford Government AI Readiness (Shearer, Stirling et Pasquarelli, 2020). Le manque d’infrastructures et l’absence de cohérence des stratégies nationales sont autant d’obstacles à l’IA. La mise en place d’un environnement prévisible sera essentielle pour développer et utiliser des solutions d’IA de manière sûre et transparente, en particulier dans des secteurs tels que la finance.

Le développement d’une culture de la gouvernance des données est également crucial. Pour ce faire, des institutions techniques, indépendantes et responsables doivent adopter une approche réglementaire agile favorisant l’innovation en matière de TN tout en appliquant des sauvegardes. En septembre 2021, seuls 13 des 30 pays membres de Smart Africa disposaient d’une autorité indépendante de protection des données, dans 8 pays un ministère supervisait la protection des données, et les autres n’avaient aucune autorité de ce type (Sense Strategy, 2021).

Il est également nécessaire de mieux sensibiliser les citoyens et les entreprises à la protection, à la cybersécurité, aux droits des consommateurs et aux avantages de l’utilisation de solutions basées sur les données. Les entretiens avec des professionnels du droit dans certains pays africains ont mis en évidence les difficultés de mise en œuvre, telles que la faible sensibilisation des entreprises, l’absence d’application et de conformité, la lourdeur et le peu de clarté des procédures, et le manque de ressources des entités chargées de la protection des données. Dans le cas de la cybersécurité, sur les 44 pays africains étudiés par l’Union internationale des télécommunications en 2019, seuls 13 pays disposaient d’une équipe nationale d’intervention en cas d’urgence informatique (CERT – Computer Emergency Response Team) composée d’experts en sécurité de l’information protégeant des incidents de cybersécurité, les détectant et y répondant, et 14 disposaient d’un centre national de cybersécurité (NCSC – National Cyber Security Centre) offrant des conseils et un soutien en matière de cybersécurité (UIT, 2021). Les capacités techniques et l’équipement constituent également un défi pour les pays africains.

Du côté positif, les pays ont commencé à déployer des stratégies intégrées pour renforcer la protection des données et la cybersécurité, tandis que des initiatives visent à développer l’adoption des TN. Au Rwanda, les autorités mettent en œuvre un programme d’accélération numérique en faveur de a) l’accès et l’inclusion numériques, b) la prestation de services publics numériques, et c) l’innovation numérique et l’esprit d’entreprise, comprenant un soutien à des politiques, des réglementations, des institutions et une application plus efficaces dans le domaine de la protection des données et de la cybersécurité. 46

Alors que les TN jouent un rôle de plus en plus important dans la vie quotidienne, les cyberrisques ne cessent de croître. Ils affectent la confidentialité, la disponibilité et l’intégrité des informations (Cebula et Young, 2010). Le Global Risks Report du Forum économique mondial classe les cyberrisques parmi les trois principaux risques mondiaux en ce qui concerne la probabilité d’occurrence, après les catastrophes naturelles et les événements météorologiques extrêmes, et en sixième position pour la gravité de leurs impacts sur les victimes (WEF, 2018, 3). Dans son enquête annuelle sur les risques existants et émergents susceptibles d’affecter le système financier mondial, la Depository

Infrastructure numérique et des données 205

Trust and Clearing Corporation (DTCC) a classé le cyberrisque comme la première menace (DTCC, 2022), comme le montre la figure 4.26.

La multiplication des applications de TN à la suite de la COVID-19 a amplifié les risques préexistants. Les rapports sur les menaces numériques et les cyberactivités malveillantes se sont multipliés en Afrique, allant du sabotage d’infrastructures publiques à l’espionnage et au crime organisé, et entraînant des pertes liées à la fraude numérique, aux flux financiers illicites et aux atteintes à la sécurité nationale (Allen, 2021). Les entreprises financières ont été exposées à des cybermenaces telles que l’hameçonnage et les attaques de logiciels malveillants (Bhasin, 2007 ; Leukfeldt, Kleemans et Stol, 2017), les attaques de ransomware (Ren et coll., 2020), et le vol et la manipulation de données ainsi que d’identités. Le secteur de la santé a subi des cyberattaques au milieu de la pandémie (Khan, Brohi et Zaman, 2020), y compris une cyberattaque dans un hôpital sud-africain (Walker, 2020). Des rançons sont souvent payées pour pouvoir rétablir la fonctionnalité des systèmes informatiques de ces institutions. Les cybermenaces sont considérées comme inquiétantes, en particulier pour les petites entreprises disposant de peu de moyens pour acquérir et mettre en œuvre des outils de protection de la cybersécurité (Sulayman et coll., 2012). L’absence de politiques structurées en matière de cybersécurité et de capacité de réaction aux menaces pourrait accroître la vulnérabilité des utilisateurs à la cybercriminalité face à l’utilisation croissante des technologies de l’information et de la communication.

Pour remédier à la vulnérabilité aux cyberattaques et aux violations de données en Afrique, il faut un engagement plus fort des différentes parties prenantes en faveur de la gouvernance des données. Cela implique, entre autres, de déployer des technologies et

Source : DTCC, 2022.

2022 Prévision des risques 2021 Prévision des risques

Note : La figure montre les principaux risques systémiques pour l’ensemble de l’économie identifiés par les répondants à l’enquête annuelle du Baromètre du risque systémique menée par la Depository Trust and Clearing Corporation (DTCC). Les prévisions de risque pour 2022 reflètent les résultats de l’enquête menée au quatrième trimestre 2021. Les prévisions pour 2021 correspondent aux résultats de l’enquête menée au quatrième trimestre 2020.

206 Afrique numérique
FIGURE 4.26 Menaces perçues pour les marchés financiers, 2021
0 10 20 30 40 50 60 70 80 CyberrisqueMaladies infectieuses/ pandémies (coronavirus) Risques géopolitiques et tensions commerciales Changement climatique InflationDette mondiale excessive Part des répondants à l’enquête (%)

des infrastructures pour détecter et atténuer la cybercriminalité, en s’appuyant sur des investissements à grande échelle visant à renforcer les capacités de cybersécurité afin de protéger le cyberespace de chaque pays. Les approches technologiques de la cybersécurité comprennent les logiciels de détection des intrusions surveillant un réseau à la recherche d’activités malveillantes pour détecter les tentatives d’accès non autorisé ou les accès réussis ; les logiciels de détection des intrusions basés sur les anomalies, déployés pour détecter et signaler les écarts par rapport au comportement d’utilisation normal et contribuer à la protection contre les attaques malveillantes ; et la détection basée sur les signatures, utilisée principalement pour identifier les menaces connues qui tentent d’exploiter un logiciel d’application ou un système (Kabanda, Tanner, et Kent, 2018).

Pour lutter contre la cybercriminalité, une coopération est également nécessaire entre toutes les parties prenantes, y compris les pouvoirs publics, les entreprises et les organisations civiles, ainsi qu’entre les pays, en raison de l’absence de frontières dans le cyberespace (UIT, 2021). La coopération entre les pays est essentielle en ce qui concerne les cyberpolitiques et l’application de la loi afin de renforcer les stratégies de cybersécurité. Il est également crucial de restructurer les programmes de cours pour permettre aux étudiants de comprendre la cybersécurité. Enfin, il est capital de former et de retenir des experts en cybersécurité : Irons et Ophoff (2016) proposent de développer les compétences en criminalistique numérique en Afrique du Sud à l’aide de programmes universitaires de cybersécurité.

Dans toute l’Afrique, on s’inquiète de l’utilisation abusive des données par les pouvoirs publics à des fins politiques, notamment par la surveillance et l’augmentation de la désinformation. Une utilisation abusive des TN par les autorités pourrait également permettre une violation numérique généralisée des libertés individuelles en vue de suivre subrepticement l’opposition politique, de réprimer les dissidents politiques, de restreindre la liberté d’expression et de colporter des informations erronées pendant les élections. Par exemple, certaines organisations de la société civile africaine ont exprimé leur inquiétude quant à d’éventuelles violations de la vie privée et des droits numériques (Woodhams, 2020). En Afrique, comme ailleurs, les TN ont permis aux citoyens d’ouvrir des espaces civiques en ligne, mais ont également permis aux autorités d’en fermer à l’aide de la surveillance numérique, de la désinformation, de la fermeture d’internet ou d’arrestations pour des propos tenus en ligne, entre autres (Roberts, 2021).

En plus d’accroître les risques politiques, les techniques telles que les fermetures d’internet peuvent avoir des effets négatifs sur les activités économiques. Selon Netblock, parmi les pays africains récemment exposés à des fermetures, le coût d’une journée de fermeture va de 0,48 million de dollars US au Liberia à 8,30 millions de dollars US en Éthiopie.47

Les débats sur le numerique et la vie privée tournent autour des compromis entre les droits de l’homme individuels et la sécurité nationale. Le renforcement de la qualité institutionnelle en Afrique est crucial, car, en l’absence de contre-pouvoirs institutionnels, les avancées technologiques pourraient davantage exposer les citoyens à la surveillance et à la répression. Des règles précises sur la cybercriminalité et la réglementation des contenus, ainsi que des contraintes sur la surveillance étatique et la désinformation, seraient nécessaires pour empêcher toute utilisation abusive à des fins politiques. Des etudes plus rigoureuses et des réponses politiques efficaces sont nécessaires pour s’assurer que les risques des nouvelles technologies sont gérés et n’empêchent pas la réalisation des effets positifs d’une adoption et d’une utilisation plus larges.

Infrastructure numérique et des données 207

Regarder vers l’avenir : Intégration régionale et le changement climatique

À moyen terme, l’intégration régionale pour la connectivité, les données et les marchés en ligne est indispensable pour élargir les marchés et fournir des solutions TN aux entreprises et aux citoyens africains, comme le reconnaît la « Stratégie de transformation numérique pour l’Afrique (2020-2030) » de l’UA (UA, 2020). Pour y parvenir, un environnement favorable est indispensable aux niveaux national et régional (figure 4.27). Les cadres régionaux établis par des blocs supranationaux peuvent permettre une harmonisation transfrontalière des cadres politiques, juridiques et réglementaires. Les réformes politiques en faveur des infrastructures transfrontalières et des écosystèmes de données peuvent fournir les bases nécessaires à la fourniture de services numériques. Enfin, des réformes au niveau national, une réglementation efficace et des investissements dans un cadre harmonisé de transparence et de responsabilité peuvent garantir que les consommateurs, les entreprises et les autorités en tirent profit.

L’intégration numérique régionale pour les services de télécommunications est en cours dans certaines poches de l’Afrique. Par exemple, la zone de réseau unique de l’Afrique de l’Est a facilité l’itinérance dans cette région. L’initiative a été lancée en janvier 2015 et, à ce jour, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda et le Soudan du Sud ont plafonné les tarifs de l’itinérance mobile internationale, et la Tanzanie a confirmé sa participation. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a lancé une initiative similaire, mais la mise en œuvre a été plus limitée.

La mise en œuvre de cadres régionaux, comme en Afrique de l’Ouest, a également eu des retombées positives au niveau national : au Cabo Verde, la mise en œuvre d’une directive de la CEDEAO stipulant les conditions d’accès aux stations d’atterrissage des câbles sousmarins internationaux en fibre optique a permis une colocation à la station d’atterrissage du câble sous-marin qui a entraîné une baisse des prix de la connectivité internationale.48 Des initiatives multinationales ont également permis d’acheter des capacités de bande passante

FIGURE 4.27 Couches du marché numérique régional et résultats visés

desuniqueMarché

2 3

Les innovateurs, les entrepreneurs et les entreprises régionales proposent des services et des contenus numériques librement dans toute la région, sans aucun obstacle à la livraison transfrontalière de biens ou de services numériques.

Les données circulent librement et en toute sécurité à travers les frontières pour être traitées, analysées, stockées ou utilisées n’importe où dans la région.

La capacité, la vitesse et la qualité des services de connectivité sont disponibles à partir de n’importe où à un prix abordable.

Source : Adapté de Torgusson et coll., 2018. Note : TN = technologie numérique.

208 Afrique numérique
TN
uniqueMarchédes données uniqueMarché connectivitédela 1

internationale, comme l’achat en gros de bande passante internet sous-marine et satellitaire effectué par l’Alliance Smart Africa regroupant 32 pays africains.

La convergence des cadres réglementaires nationaux est plus limitée en ce qui concerne l’octroi de licences, la politique du spectre ou les subventions à la connectivité numérique. En particulier, les évaluations DE4A pour l’Afrique de l’Est recommandent des plafonds tarifaires harmonisés au niveau régional pour le trafic transfrontalier, l’élimination des suppléments pour itinérance et la mise en place de liaisons supplémentaires avec les pays voisins. Pour l’Afrique de l’Ouest, il est possible de renforcer l’interconnexion physique des réseaux en fibre optique, de permettre les échanges de trafic au niveau régional, et de garantir une tarification et une capacité de transport favorables à l’industrie sur les liaisons transnationales par fibre optique.

Dans le domaine de la politique des données, les blocs régionaux ont pris des mesures pour faciliter l’intégration et l’harmonisation régionales, mais aucun mécanisme contraignant n’a été mis en place. Des mécanismes d’interopérabilité entre les cadres nationaux sont nécessaires. La CEDEAO a adopté, en 2010, une loi régionale de protection des données obligeant les États membres à promulguer des lois nationales sur la question. En avril 2021, cinq États membres n’avaient pas de législation ou s’efforçaient d’en adopter une. La Convention de l’UA sur la cybersécurité et la protection des données personnelles (également connue sous le nom de Convention de Malabo) a été adoptée en 2014, mais elle n’atteint pas le seuil des 15 membres requis pour pouvoir être appliquée. En février 2022, l’UA a adopté un cadre global des politiques des données pour guider les États membres. La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) a publié une loi type en 2013. Depuis 2016, le Réseau africain des autorités de protection des données (RAPDP) est un forum d’échange consacré à la protection des données personnelles. Ces efforts se heurtent à de profondes difficultés liées à la diversité des contextes nationaux et à la multiplicité des blocs sous-régionaux.

Dans la pratique, les cadres régionaux peuvent être un moyen d’approfondir l’intégration en soutenant les actions au niveau national. Pour faciliter une adoption et une utilisation plus intensives des technologies numériques en Afrique, les politiques régionales peuvent porter sur divers domaines d’action traditionnellement nationaux, notamment l’infrastructure numérique, les catalyseurs des marchés numériques, les compétences numériques et les services d’administration en ligne (figure 4.28). L’objectif à long terme d’un marché véritablement intégré permettrait :

• la vente aux enchères du spectre pour transcender les États (comme aux États-Unis) ;

• une réglementation harmonisée pour contrôler les opérateurs dominants, stimuler l’expansion de l’internet à haut débit et permettre aux start-ups et aux entreprises de changer facilement de centre de données et de fournisseur d’informatique en nuage dans la région (comme dans l’Union européenne) ; et

• des plateformes numériques de logistique et de transport pour fonctionner de manière transparente au-delà des frontières.

Des estimations inspirantes peuvent donner une idée de l’importance des avantages pour la productivité et l’emploi qui pourraient résulter de l’intégration de la connectivité continentale, des données et des marchés des TN, ainsi que de l’intégration plus poussée tentée dans deux ou trois pays voisins. Ce serait une réussite remarquable si l’Afrique pouvait montrer au reste du monde l’ampleur des avantages d’une intégration continentale complète.

Infrastructure numérique et des données 209

FIGURE 4.28 Mesures prises au niveau national pour faciliter une intégration régionale plus poussée de la connectivité, des données et des marchés numériques

Domaine des politiques Sujet

Infrastructure numérique

Marchés régionaux intégrés de l’infrastructure numérique Institutions et gouvernance réglementaire

Confiance dans les marchés en ligne/transactions électroniques

Politique des données

Protection des données

Cybersécurité

ID de base

Facilitateurs de services numériques

Services financiers numériques

Compétences numériques

Plateformes numériques publiques

Source : Banque mondiale.

Secteur émergent

Règles pour l’itinérance et les tarifs de terminaison des appels internationaux, l’itinérance des données, les prix du transport transfrontalier au sein des blocs régionaux

Politique nationale d’harmonisation régionale (réseau de régulateurs/ groupes de travail techniques)

Interopérabilité des règles relatives à la signature électronique, aux contrats électroniques et au commerce électronique

Politique régionale, règles nationales permettant les flux de données transfrontaliers tout en protégeant les données à caractère personnel

Politique/stratégie nationale d’harmonisation régionale en matière de cybercriminalité et de cybersécurité

Accord de reconnaissance des identités dans un autre pays

Réglementation harmonisée de l’USSD (tarification, qualité de service, non-discrimination)

Normes de certification harmonisées pour les programmes TIC

Coordination des stratégies nationales de numérisation entre les pays et les secteurs

Règles pour le déploiement d’infrastructures transfrontalières et de points d’échange régionaux, cadre harmonisé pour l’octroi de licences

Délimitation claire des mandats pour les réglementations nationales et supranationales ; adoption nationale plus efficace

Convergence des règles de protection des consommateurs (transparence des services en ligne d’intermédiation et recours)

Interopérabilité régionale des législations nationales en matière de protection des données (portabilité, accès, consentement, partage)

Harmonisation des lois sur la cybercriminalité et la cybersécurité pour permettre une collaboration transfrontalière Règles pour faciliter la vérification transfrontalière des identités Intégration régionale des systèmes de paiement (y compris la monnaie électronique)

Secteur en transition

Coordination/harmonisation de la gestion du spectre et de la réglementation ex ante favorable à la concurrence

Politique harmonisée et règles coordonnées en matière de fiscalité sectorielle et de taxes parafiscales

Règles communes pour faciliter le changement de centres de données/fournisseurs d’informatique en nuage d’un pays à l’autre

Adoption de conventions régionales/mondiales pour l’harmonisation

Cadre pour la coordination transfrontalière des CERT/SOC ; adoption d’accords mondiaux/ régionaux sur la cybersécurité Systèmes d’identification interopérables

Interopérabilité pour la monnais electronique/les paiements mobiles

ARM pour les professionnels des TIC

Interopérabilité des services publics en ligne, en particulier pour le commerce transfrontalier, la circulation des personnes et les entreprises numériques

Note : La figure présente une liste non exhaustive de politiques. CERT = équipe d’intervention en cas d’urgence informatique ; TIC = technologies de l’information et de la communication ; ID = identification ; ARM = accord de reconnaissance mutuelle ; SOC = centre d’opérations de sécurité ; USSD = données de service supplémentaires non structurées (Unstructured Supplementary Service Data).

Les technologies numériques peuvent également jouer un rôle novateur dans l’écologisation des économies et assurer la durabilité face au changement climatique. En développant son infrastructure numérique et en augmentant l’utilisation des TN, l’Afrique peut bénéficier d’une infrastructure plus respectueuse du climat ainsi que de solutions sectorielles vertes basées sur les données (figure 4.29). Les technologies numériques peuvent permettre et accélérer les initiatives favorables à l’environnement et la transformation des modes de consommation et de production dans tous les secteurs, en particulier dans l’énergie, les transports et l’agriculture.49

Les TN peuvent être utilisées dans les secteurs qui sont les principaux générateurs d’émissions de gaz à effet de serre (GES) – par exemple, les réseaux électriques intelligents, les systèmes de transport intelligents, la logistique intelligente et les pratiques agricoles réduisant les émissions de GES et autres polluants. Grâce au traçage, les TN

210 Afrique
numérique

peuvent modifier les habitudes de consommation dans les principaux secteurs émetteurs de GES. Elles peuvent également surveiller la pollution de l’air et de l’eau et optimiser l’utilisation de l’énergie afin de minimiser l’impact sur l’environnement et d’adopter des approches de recyclage pour réduire les déchets. Elles sont également essentielles à l’adaptation en vue de la préparation et de la réponse au changement climatique, en augmentant la résilience des activités économiques, des systèmes de protection sociale et d’autres services gouvernementaux. Enfin, les start-ups et les modèles économiques numériques ont développé des solutions innovantes pour aider les citoyens et les entreprises à réduire leur empreinte carbone et à optimiser l’utilisation de l’énergie. Le développement de l’utilisation des TN pour soutenir des économies plus vertes nécessitera une infrastructure numérique et de données fondamentale ainsi que des cadres solides pour les sauvegardes.

Les infrastructures numériques et des données doivent devenir plus durables du point de vue environnemental en s’appuyant sur la symbiose avec l’électricité pour faciliter l’atténuation. Bien que l’utilisation de l’énergie implique toujours un compromis avec la capacité fournie par utilisateur, l’infrastructure numérique nécessite des sources d’énergie supplémentaires, en particulier pour atteindre les zones rurales ou éloignées. Il est ainsi possible de remplacer le diesel par l’énergie solaire. De nouveaux modèles commerciaux émergent déjà en Afrique : les TESCO (sociétés de services énergétiques pour les télécommunications) gèrent 11,6 % des sites (mars 2021), avec un potentiel de marché qui devrait atteindre environ 60 000 sites au Moyen-Orient et en Afrique d’ici 2025 (TowerXchange, 2021).

Les centres de données ont besoin d’une électricité fiable pour fonctionner et soutenir l’utilisation d’applications numériques. Des sources d’énergie propres (éventuellement produites sur place) et des économies d’énergie (par exemple, des techniques de refroidissement innovantes) seront nécessaires pour compléter la croissance prévue des centres de données dans la région. Ceux-ci devraient nécessiter au moins 1 000 mégawatts pour répondre à la demande en Afrique au cours de la prochaine décennie (Xalam Analytics et ADCA, 2021).

FIGURE 4.29 Contribution de l’infrastructure numérique et des données aux résultats écologiques

Adaptation

Infrastructures de réseaux de télécommunications résistantes au climat

Atténuation

Centres de données résistants au climat

Numérisation de la prestation de services et du fonctionnement interne

Partage des infrastructures pour la résilience

Surveillance des conditions météorologiques et des catastrophes et interventions d’urgence

Infrastructure de télécommunications économe en énergie

Centres de données économes en énergie

Services numériques économes en énergie

Partage d’infrastructures pour l’efficacité énergétique

Appareils et déchets électroniques

Infrastructure numérique et des données 211
Source : Pratique mondiale Développement numérique de la Banque mondiale.

Les nouvelles technologies peuvent également rendre l’infrastructure numérique plus économe en énergie, contribuant ainsi à la réalisation des objectifs écologiques. Le câble en fibre optique, par exemple, est 85 % plus économe en énergie que les fils de cuivre ; la 4G peut être plus de 50 fois plus économe en énergie que la 2G, et les centres de données plus grands sont plus économes en énergie (Banque mondiale, 2021e). Diverses organisations ont fixé des objectifs et des stratégies « net zéro » pour guider les actions en faveur de l’environnement dans le secteur.50 L’utilisation croissante de l’électronique génère toutefois des déchets électroniques et des émissions,51 et nécessite des cadres pour permettre le fonctionnement d’un système de gestion des déchets électroniques et pour aborder les contraintes actuelles – manque de politiques, de sensibilisation et d’infrastructure (Maphosa et Maphosa, 2020).

Les déchets électroniques contiennent à la fois des minéraux précieux, qui ont une valeur économique et peuvent être récupérés, et des substances très dangereuses, qui peuvent être nocives pour l’environnement physique et la santé humaine. L’extraction de minéraux pour répondre à la consommation mondiale croissante d’appareils électroniques a des effets indirects sur les émissions tout au long de la chaîne de valeur numérique. Parmi les 15 principaux pays producteurs des sept minéraux clés pour les technologies de l’information et de la communication dans le monde,52 5 se trouvent en Afrique. L’Afrique a donc besoin d’un soutien pour les technologies à faibles émissions de carbone pour son industrie minière, notamment en République démocratique du Congo, en Éthiopie, à Madagascar et au Nigeria (Onianwa, 2021).

Résumé des principales conclusions pour une utilisation plus inclusive

En résumé, pour accroître la disponibilité et l’utilisation d’un internet et d’autres TN, il est essentiel que les politiques se concentrent sur les points suivants :

• Une concurrence accrue en permettant l’entrée et l’accès au spectre ainsi qu’à l’infrastructure, et une réglementation plus efficace des opérateurs dominants.

• Des coûts opérationnels réduits grâce à une politique du spectre permettant des technologies plus efficaces, le partage des infrastructures, ou des co-investissements, y compris l’accès à l’infrastructure dorsale des entreprises publiques, et l’élimination des droits d’accise.

• Un soutien actualisé au service universel pour les personnes à faible revenu, en utilisant des interventions à la fois sur l’offre et la demande à l’aide de la réglementation et du soutien financier public.

• Un environnement favorable à l’infrastructure des données, notamment les IXP, les centres de données et l’informatique en nuage, qui apportent un soutien aux entreprises numériques locales avec une meilleure qualité et à des prix plus bas pour les données.

• Une réglementation amelioree des données pour accroître la disponibilité de nouvelles TN favorables aux pauvres et à la productivité ; pour permettre la mise en place de modèles commerciaux numériques (grâce à des règles pour l’accès aux données, le partage et les flux de données transfrontaliers) ; et pour accroître la confiance dans l’utilisation des TN (grâce à des sauvegardes telles que la protection des données, la cybersécurité et la protection des consommateurs).

212 Afrique numérique

Une vision à long terme nécessitera de voir grand en matière d’intégration régionale et de penser vert, afin que les infrastructures numériques et énergétiques coexistent en symbiose pour une plus grande durabilité environnementale.

Les décisions relatives aux interventions prioritaires dépendront de la situation du pays. L’importance relative des écarts de couverture et d’adoption (figure 4.5) peut éclairer les décisions quant à l’objectif politique le plus important. Les interventions des pouvoirs publics doivent tenir compte de la dynamique du secteur privé, de la capacité institutionnelle de mise en œuvre et des ressources publiques disponibles, ainsi que des effets escomptés des interventions. Les simulations réalisées pour certains pays africains montrent les effets positifs des principales propositions de réglementation visant à assurer la disponibilité d’un accès abordable à internet et à d’autres TN. Le tableau 4.1 résume ces propositions et leurs effets.

TABLEAU 4.1 Résumé des recommandations de politiques et effets simulés des mesures sélectionnées

Objectif Sujet Simulation des effets potentiels pour certains pays Accessibilité d’internet à un prix abordable

Règles favorables à la concurrence :

• Ouverture de l’octroi des licences et élimination des monopoles, en particulier dans le domaine de la connectivité internationale.

• Réglementation des opérateurs dominants.

• Accès aux infrastructures essentielles.

• Attribution des fréquences.

• Synergies entre les régulateurs des télécommunications et les autorités de la concurrence.

Réglementation réduisant les coûts :

• Disponibilité du spectre (dividende numérique provenant de la migration de la radiodiffusion).

• Accès réglementé à l’infrastructure dorsale des entreprises publiques et partage intersectoriel de l’infrastructure.

• Minimisation des droits d’accise sur les services de télécommunication et rationalisation des redevances sectorielles.

• Une fois mises en œuvre, les politiques favorables à la concurrence peuvent contribuer à réduire les taux de pauvreté de 0,02 à 0,82 % et à améliorer l’accès aux services de 0,06 à 5,37 points de pourcentage.

• Associée à la réduction des taxes sectorielles, à l’innovation technologique et au partage actif des infrastructures, l’augmentation de la concurrence pourrait permettre d’atteindre des niveaux d’adoption de la téléphonie mobile et de l’internet mobile plus élevés que si l’on mettait en œuvre toutes ces politiques avec des subventions à l’infrastructure et sans niveaux de concurrence plus élevés.

• Les réformes politiques comprenant la libération des fréquences inférieures à 1 GHz et la réduction des surtaxes pourraient réduire de 2 à 7 points de pourcentage l’écart de couverture du haut débit estimé pour 2030.

• Associée au partage des infrastructures et à la réduction des taxes, l’innovation technologique pourrait ajouter 5,0 points de pourcentage à l’adoption de la téléphonie mobile et 4,5 points à celle de l’internet mobile par rapport aux politiques n’incluant que l’innovation technologique et le partage des infrastructures.

• Environ un dollar US de taxes supplémentaires doit être compensé par un dollar de subventions pour couvrir les zones rurales.

• L’alignement de la politique fiscale sur les principes des pratiques modèles et la suppression des taxes générant des distorsions appliquées uniquement au secteur de la téléphonie mobile peuvent accroître l’adoption de l’internet mobile de 6 points de pourcentage (sur la base des données du Bénin et de la République démocratique du Congo).

• Les réformes politiques visant à réduire les coûts (spectre, partage des infrastructures et fiscalité) peuvent permettre d’économiser 10 à 20 % des coûts nécessaires pour parvenir à une couverture quasi universelle, soit une économie de 204 millions de dollars US pour les États des six pays analysés.

Infrastructure numérique et des données 213
(suite)

TABLEAU 4.1 Résumé des

recommandations

de politiques et effets simulés des mesures sélectionnées (suite)

Objectif Sujet Simulation des effets potentiels pour certains pays Disponibilité d’internet à un prix abordable

Disponibilité de TN attrayantes

Une politique de service universel plus efficace :

• Amélioration de la gouvernance et de l’efficacité des FSU.

• Permettre aux opérateurs de « payer ou jouer » (pay or play).

• Introduire des obligations de couverture.

• Un RRP unique autorisant le partage du RAR uniquement dans les zones rurales permet de réaliser des gains d’efficacité, tout en préservant la concurrence entre les infrastructures dans les zones urbaines et suburbaines, avec une économie par rapport à la situation de référence (sans partage des infrastructures) de 21 à 56 % pour 10 Mbps et de 12 à 48 % pour 2 Mbps par utilisateur.

• Si des obligations de couverture sont fixées avec une marge bénéficiaire maximale de 10 % par site, 30 à 100 % de la population pourrait être couverte par un réseau 4G avec liaison sans fil fournissant 30 Go par mois sans nécessiter de subventions publiques.

Interventions sur la demande :

• Accessibilité financière : plans sociaux, bons ciblés, subventions pour les appareils, financement des appareils.

• Attractivité et facilité d’utilisation : programmes de formation numérique, familiarisation avec les TN grâce à un accès public, aux écoles et à des transferts numériques sociaux.

Infrastructure des données :

• Soutenir l’évolution des IXP en centres de données plus avancés.

Politique des données :

• Clarifier les politiques en matière de données pour protéger les utilisateurs et permettre le développement des TN.

• Mettre efficacement en œuvre les règles relatives aux données.

• Réaliser l’harmonisation régionale ou l’interopérabilité des cadres afin de créer des marchés régionaux uniques de données et de TN.

Transversal

• Harmonisation et interopérabilité régionales pour une meilleure intégration des marchés d’infrastructures numériques, des marchés des données numériques, et des TN.

• Des infrastructures numériques et des données plus écologiques, utilisant des sources d’énergie plus durables.

• Intégration des TN dans tous les secteurs afin de soutenir l’utilisation des données pour la transition climatique.

Source : Banque mondiale.

• Même avec une infrastructure universelle 4G subventionnée, l’adoption de l’internet mobile n’augmenterait que de 1 à 3 points de pourcentage, car la demande resterait limitée. Si l’adoption de la 4G atteignait 40 % dans les zones non couvertes grâce à des politiques axées sur la demande, la couverture 4G atteindrait alors les mêmes niveaux que ceux obtenus avec une simple subvention de l’offre.

• Des services de stockage de données et d’informatique en nuage plus accessibles pour développer et utiliser des TN améliorant la productivité.

• Une confiance accrue pour une utilisation plus large des TN, une utilisation et une réutilisation accrues des données, et une réduction des pertes dues aux cyberattaques.

• Un entrepreneuriat numérique plus fort.

• Des données et des marchés des TN régionaux plus intégrés.

• Une plus grande variété de TN et une augmentation des échanges.

• Un impact environnemental plus faible et des économies d’énergie plus importantes.

Note : 4G = technologie de télécommunications mobiles de quatrième génération ; TN = technologie numérique ; Go = gigaoctet ; GHz = gigahertz ; IXP = point d’échange internet ; Mbps = mégabits par seconde ; RAR = réseau d’accès radio ; EP = entreprise publique ; RRP = réseau rural partagé ; FSU = fonds de service universel.

214 Afrique numérique

Annexe 4A Données complémentaires

TABLEAU 4A.1 Chaîne de valeur numérique simplifiée et caractéristiques du marché, par sous-région, Afrique, 2020

Sources : Base de données (interne) 2021 des acteurs du marché numérique en Afrique de la Banque mondiale, élaborée à partir de nombreuses (11+) sources de données, notamment TeleGeography, Global System for Mobile Communications Association (GSMA), Africa Bandwidth Maps, Afterfibre.org, Policytracker, TowerXchange, PeeringDB et Xalam Analytics

Note : AOA = Afrique orientale et australe ; AOC = Afrique occidentale et centrale ; IHH = indice de concentration du marché de Hirschman-Herfindahl ; AN = Afrique du Nord ; EP = entreprise publique ; – = non disponible.

a. Fait référence au nombre d’opérateurs de réseaux mobiles virtuels actifs.

b. Il s’agit du nombre de pays où la concurrence est partielle dans le domaine de la connectivité internationale, selon l’Union internationale des télécommunications.

Infrastructure numérique et des données 215
Indicateur Sousrégion Connectivité internationale Infrastructure passive (tours) Commerce de gros fixe Commerce de gros mobile Commerce de détail fixe Commerce de détail mobile Argent electronique Données et services en nuage Plateformes numériques Concentration (IHH) AOA 5 591 4 638 6 656 38a 4 904 4 476 5 334 1 596 5 000 entreprises numériques ayant leur siège en Afrique AOC 7 820 3 474 6 089 9a 6 882 4 288 4 789 2 782 AN 3 732 3 482 7 471 3a 6 046 3 941 NA 1 470 Structure du marché : monopoles AOA 1 2 3 – 4 2 1 0 0 AOC 4 0 1 – 5 0 1 0 0 AN 3 0 1 – 2 1 0 0 0 Structure du marché : duopoles AOA 2b 5 2 – 3 8 1 0 0 AOC 8b 2 5 – 3 3 0 0 0 AN 2b 0 2 – 0 0 0 0 –Nouvelles entrées AOA 10 investissements dans des câbles ou des mises à niveau depuis 2016 3 12 11 4 3 17 0 –AOC 3 6 10 5 1 24 0 –AN 0 5 2 0 1 4 0 –Présence d’entreprises publiques AOA 12 11 22 1 17 23 13 4 –AOC 14 6 22 0 15 20 10 2 –AN 6 4 6 1 6 6 3 2 –

Notes

1. Toutes les statistiques sur les abonnés à l’internet mobile proviennent des données de la Global System for Mobile Communications Association (GSMA), consultées en novembre 2022 à l’aide de la plateforme de données GSMA Intelligence

2. Ce nombre d’Africains ne bénéficiant pas d’une couverture de connectivité haut débit a été calculé à partir des statistiques de la GSMA sur la population (1,38 milliard en septembre 2021) et la couverture du réseau 3G par habitant en 2021 (89,1 %), consultées en novembre 2022 à l’aide de la plateforme de données GSMA Intelligence

3. Les prix des données pour 2015-2020 en Afrique proviennent des données de Research ICT Africa Mobile Pricing (RAMP), https://researchictafrica.net/research-ict-africa-ramp-index-2/.

4. Voir « 2025 Targets: Connecting the Other Half » de Commission de l’ONU sur le haut débit pour le développement durable, https://www.broadbandcommission.org/broadband-targets/.

5. La vitesse moyenne de téléchargement estimée provient de l’analyse par le personnel de la Banque mondiale des données Speedtest Intelligence d’Ookla de juin 2021.

6. Les données relatives à la vitesse de téléchargement sont des données de juin 2020 provenant de la plateforme Speedtest Intelligence d’Ookla

7. Cette conclusion est basée sur des simulations effectuées pour neuf pays africains différents par Vergara-Cobos, Malasquez et Granguillhome (à paraître). Les estimations supposent des réductions possibles de la concentration du marché de la téléphonie mobile dans chaque pays.

8. Par exemple, une étude réalisée au Rwanda à l’aide de données de panel mensuelles provenant d’entreprises de télécommunications, deux ans et demi avant et après la mise en œuvre de la réglementation des tarifs de terminaison d’appel mobile, a révélé que l’introduction de réductions des tarifs d’interconnexion au Rwanda a réduit les prix de détail globaux de la téléphonie mobile pour les consommateurs finaux (Nshunguyinka, Shema, et Saint, 2021).

9. Les entreprises publiques sont définies ici comme toute personne morale reconnue par la législation nationale comme une entreprise et dans laquelle les autorités nationales ou infranationales exercent un droit de propriété, y compris les sociétés par actions, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés en commandite par actions. Les sociétés statutaires, dont la personnalité juridique est établie par une législation spécifique, doivent être considérées comme des entreprises publiques, si leur objectif et leurs activités sont de nature essentiellement économique (c’est-à-dire que l’entité opère sur un marché de biens ou de services qui pourraient, en théorie, être fournis par une entreprise privée). Pour les statistiques présentées dans ce rapport, les « entreprises publiques » comprennent les entités dans lesquelles l’État détient au moins 50 % des actions. Les entités dans lesquelles l’État détient moins de 50 % des actions sont considérées comme des entreprises liées à l’État.

10. Les documents de référence de ce rapport fournissent une analyse plus approfondie sur a) le rôle des entreprises publiques dans l’économie numérique en Afrique (Pop et Connon, à paraître) ; et sur b) la gouvernance des entreprises publiques numériques en Afrique (Jaupart et Begazo, à paraître).

11. Equitel a obtenu une licence en 2014 et démarré ses activités en 2015 (Equity, 2019), mais a connu d’importantes difficultés dans le déploiement de son « Thin SIM [module d’identité de l’abonné] » et de la licence accordée par le régulateur (Business Daily Africa, 2015 ; Wainaina, 2016). Outre Finserve (Equitel), qui a réussi à se développer au fil des ans (Chitavi, Cohen et Hagist, 2021), deux autres ORMV ont obtenu des licences en 2014, mais ont à peine décollé (Mumo, 2017).

12. Bien que l’intégration verticale puisse se justifier en termes de gains d’efficacité grâce à des économies d’échelle et de gamme, elle peut entraîner des risques pour la concurrence en l’absence d’une réglementation ou de mesures correctives adéquates.

13. Ces chiffres correspondent aux parts de marché des fournisseurs d’hébergement en nuage parmi les sites web ayant un domaine africain dans 34 pays. Un IHH de 1 500 à 2 500 indique des marchés modérément concentrés et un IHH de plus de 2 500, des marchés très concentrés (« Cloud Hosting Usage Distribution in the Top 1 Million Sites : Statistics for Websites using Cloud Hosting Providers », données BuiltWith [consultées en avril 2021], https://trends.builtwith.com / hosting/cloud-hosting).

216 Afrique numérique

14. La « concentration du marché » mesure le degré de concentration des parts de marché des entreprises d’un marché. Les mesures de concentration du marché sont souvent utilisées pour évaluer la concurrence. Une forte concentration du marché peut donner lieu à un pouvoir de marché, c’est-à-dire à une situation où une entreprise est en mesure d’augmenter et de maintenir ses prix à un niveau supérieur à celui qui prévaudrait en situation de concurrence.

15. Ces chiffres font référence au nombre de nouvelles entreprises fondées (sièges sociaux) dans un pays depuis 2017. Cette analyse est basée sur les données 2020 de Pitchbook sur les investissements dans les entreprises numériques et sur une analyse préliminaire basée sur les données d’Apptopia sur les applications mobiles.

16. Une part de marché de 40 % est un seuil commun de présomption d’une position dominante, selon la jurisprudence de l’Union européenne (UE). Les lois sur la concurrence de certains pays africains ont des seuils plus stricts, de 25 à 30 % (par exemple, au Botswana, en République arabe d’Égypte et en Zambie), tandis que d’autres ont des seuils plus souples de 40 à 50 % de part de marché (Kenya, Namibie et Afrique du Sud) pour définir la position dominante. Voir le Groupe de la Banque mondiale et le Forum africain de la concurrence (2016) ainsi que Pop et Coelho (2021b) pour plus de détails sur les définitions de la position dominante en Afrique.

17. Les projets de distribution par câble appartenant à des fournisseurs de contenu présentent eux aussi des risques pour les marchés, tels que des effets négatifs potentiels sur la concurrence et des difficultés en matière de fiscalité.

18. La réglementation sur la portabilité des numéros mobiles, qui permet de changer de fournisseur de services de manière abordable et transparente, peut également être utile pour stimuler la concurrence dans les services mobiles de détail (Mothobi, 2020).

19. Les bonnes pratiques en matière d’« octroi de licences » comprennent l’absence de limitation du nombre de licences, de services autorisés ou de technologies pour les fournisseurs de services ou d’infrastructures, ainsi qu’une procédure d’octroi de licences transparente. Les bonnes pratiques en matière d’« interconnexion » comprennent la publication d’une offre d’interconnexion de référence détaillée. La réglementation des opérateurs disposant d’un pouvoir de marché significatif (PMS) fait référence à l’analyse du marché et à la désignation de l’opérateur ayant un PMS. Pour la « gestion du spectre », les bonnes pratiques concernent la clarté et la transparence des procédures d’attribution des licences d’utilisation du spectre et de fixation des redevances d’utilisation du spectre. Les règles relatives à la connectivité internationale comprendraient la libéralisation des passerelles internationales et l’accès aux infrastructures de connectivité internationale.

20. Pour une discussion sur le spectre et la concurrence en Afrique de l’Ouest, y compris un cadre conceptuel sur la façon de limiter la rareté du spectre, voir Pop et Coelho (2020).

21. Les TTM, également appelés tarifs d’interconnexion, désignent le montant que le réseau A doit payer au réseau B pour connecter un appel ou envoyer un SMS d’un abonné de A à un abonné de B.

22. Voir, par exemple, les actions du régulateur français (ARCEP) présentées dans OCDE (2020).

23. Pour une analyse des activités d’application de la législation antitrust et de plaidoyer des autorités de la concurrence sur les marchés numériques, voir Pop et Coelho (2021b). En outre, pour une vue d’ensemble des autorités de la concurrence en Afrique et de leurs activités d’application dans divers secteurs, voir Groupe de la Banque mondiale et Forum africain de la concurrence (2016).

24. Seuls l’Afrique du Sud, le Kenya et le Malawi sont financés au même niveau que l’UE et les États-Unis, compte tenu des niveaux de revenus (Nyman et Falco, 2020).

25. Cette estimation concerne un réseau 5G non autonome d’une capacité de 200 Mbps.

26. L‘étude sur la fiscalité a porté sur 25 pays africains : Afrique du Sud, Algérie, Angola, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, République arabe d’Égypte, Éthiopie, Kenya, Gabon, Ghana, Guinée, Madagascar, Mali, Maroc, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Tanzanie, Tchad, Tunisie et Zambie.

27. Le trafic « manquant » a très probablement été acheminé via internet ou par l’intermédiaire de boîtes SIM faisant passer le trafic international entrant pour des appels locaux.

28. Pour les évaluations DE4A, voir les diagnostics pays sur le site internet DE4A de la Banque mondiale, https://www.worldbank.org/en/programs/all-africa-digital-transformation /country-diagnostics.

Infrastructure numérique et des données 217

29. Par exemple, l’adoption estimée des smartphones (nombre de cartes SIM utilisées dans des smartphones, divisé par le nombre moyen de cartes SIM par abonné unique) pour un échantillon de sept pays (Bénin, République démocratique du Congo, Ghana, Nigeria, Rwanda, Sierra Leone et Tanzanie) va d’environ 15 % en Tanzanie à près de 40 % au Ghana, sur la base des données de 2020 de la plateforme GSMA Intelligence. En outre, il existe un écart important entre les zones rurales et urbaines en ce qui concerne la possession d’un smartphone. Au Nigeria et en Tanzanie, les adultes vivant dans les zones rurales sont environ 35 % moins susceptibles de posséder un smartphone que ceux vivant dans les zones urbaines, selon les estimations basées sur l’enquête GSMA Intelligence Consumer Survey (2020 pour le Nigeria et 2018 pour la Tanzanie) (Banque mondiale, 2022).

30. Au Bénin, en République démocratique du Congo, au Rwanda et en Sierra Leone, la plupart des utilisateurs de l’internet mobile (55 à 70 %) ne se connectent pas à la technologie 3G ou 4G, même si la couverture du haut débit mobile est large. Pour un échantillon de six opérateurs africains de téléphonie mobile, les revenus tirés des services 2G (voix et applications SMS/USSD) représentent 58 à 77 %, ce qui montre l’importance limitée des données pour déterminer la viabilité commerciale (Banque mondiale, 2022).

31. Le partage de l’infrastructure mobile peut être globalement classé en a) partage passif (partage du pylône physique et de l’approvisionnement en énergie) ; b) partage actif (partage du réseau d’accès radio [RAR] comprenant le site, le pylône, la station émettrice-réceptrice de base, la liaison et les contrôleurs de la station de base) ; et c) itinérance (lorsqu’un abonné mobile utilise le réseau d’un autre opérateur).

32. Tiré de la page web de Mobile UK, « About the Shared Rural Network », https://www.mobileuk .org/shared-rural-network ; voir également Alpha Wireless (2021).

33. Dans la base de référence, chaque ORM construit son propre réseau pour desservir sa part de marché, sans partage.

34. Les pays d’Afrique subsaharienne où les entreprises publiques contrôlent plus de 40 % du réseau en fibre optique sont l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Angola, le Botswana, le Cabo Verde, le Cameroun, les Comores, Djibouti, l’Égypte, l’Érythrée, l’Eswatini, l’Éthiopie, la Gambie, la Guinée équatoriale, la Libye, la Namibie, le Niger, la République démocratique du Congo, le Tchad, la Tunisie et le Zimbabwe.

35. Wi-Fi 6 est la sixième génération de la technologie Wi-Fi qui offre une amélioration significative des vitesses et des temps de latence. Pour plus d’informations, voir la page web d’Intel « What Is Wi-Fi 6 ? » https://www.intel.com/content/www/us/en/gaming/ resources/wifi-6.html.

36. L’économie serait de 204 millions de dollars US pour six pays (Bénin, Ghana, Nigeria, République démocratique du Congo, Sierra Leone et Tanzanie), étant donné que la couverture 4G est déjà presque universelle au Rwanda.

37. Les plans Internet Movil Social para la Gente et Vive Digital para la Gente proposent des forfaits de données subventionnés pour les ménages à faibles revenus et ceux habitant des zones éloignées (OCDE, 2019).

38. Voir les informations sur les conditions relatives aux tarifs à bas prix imposées à British Telecom et Kingston Communications dans le cadre de leur désignation en tant que fournisseurs de service universel pour le haut débit (Ofcom, 2020).

39. Pour plus d’informations, voir « Lifeline Program for Low-Income Consumers » sur le site de la Federal Communications Commission : https://www.fcc.gov/general/lifeline-program-low -income-consumers.

40. En Amérique latine, les dépenses liées à la bande passante internationale (milliards de dollars US par an) pourraient diminuer d’un tiers grâce à l’utilisation des IXP (Agudelo et coll., 2014, cité dans Banque mondiale, 2021c).

41. Selon la base de données PeeringDB (https://www.peeringdb.com/) (consultée le 16 septembre 2021), il y a 63 IXP en Afrique (62 en Afrique subsaharienne et 1 en Égypte) sur les 738 existant dans le monde. En décembre 2020, l’Association africaine des IXP (AFIX) faisait état de 52 IXP membres dans 35 pays africains, dont un en Tunisie.

42. Selon les Nations Unies, il y a 54 pays en Afrique et 195 pays au total.

218 Afrique numérique

43. Par exemple, le projet AXIS (African Internet Exchange System) a établi 15 nouveaux IXP dans les économies africaines entre 2012 et 2017.

44. Le GDRD est une base de données sous-jacente développée pour le Rapport sur le développement dans le monde 2021 (Banque mondiale, 2021e).

45. Le concept de Privacy by design (respect de la vie privée dès la conception) intègre la protection de la vie privée dans la création et le fonctionnement des nouveaux appareils, systèmes informatiques, infrastructures en réseau et même politiques d’entreprise.

46. Pour plus de détails sur ce programme, voir Banque mondiale (2021c, 2021d) et le site Digital Acceleration Project for Rwanda de la Banque (consulté le 13 février 2023), https://projects .worldbank.org/en/projects-operations/project-detail/P173373.

47. Le coût d’une journée de fermeture est basé sur les données de 2020 en utilisant l’outil d’estimation de Netblock : https://netblocks.org/cost/.

48. La baisse des prix est signalée par le régulateur (l’Agence de régulation multisectorielle de l’économie – ARME). Cette réforme a été soutenue par le deuxième financement de la politique de développement des entreprises publiques et de la gestion fiscale, dans le but d’améliorer la concurrence et de garantir un régime d’accès ouvert et non discriminatoire au haut débit international. En octobre 2019, le Gouvernement du Cabo Verde a adopté un décret (Regulamento C/REG.06/06/12 sobre as condiçoes terrestres de cabos submarinos) mettant en œuvre les directives de la CEDEAO.

49. La Global e-Sustainability Initiative a constaté qu’une utilisation accrue des solutions TIC (technologies de l’information et de la communication) permettrait une réduction de 20 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone d’ici à 2030, ce qui équivaut à 12,08 gigatonnes d’émissions de gaz à effet de serre (GeSI et Deloitte, 2019).

50. Voir la recommandation ITU-T L.1471 de l’Union internationale des télécommunications, qui vise à aider les organisations du secteur des TIC à clarifier la signification du concept de « zéro net » dans le contexte du secteur des TIC et à définir des objectifs et des stratégies de « zéro net ». Elle identifie également les actions qui conduiraient le secteur vers le zéro net.

51. Les déchets électroniques comprennent, entre autres, les téléphones portables, les équipements informatiques, les téléviseurs, les cartes électroniques, les puces et les déchets de stockage des données. La quantité de déchets électroniques générés dans le monde a été estimée à plus de 53,6 millions de tonnes, soit une moyenne de 7,3 kg par habitant en 2019 (Forti et coll., 2020). La contribution de l’Afrique aux déchets électroniques s’élevait à 2,9 millions de tonnes, avec une moyenne de 2,5 kg par habitant en 2019. La grande majorité des déchets électroniques est mise en décharge, tandis qu’une plus faible proportion est recyclée ou incinérée.

52. Les sept minéraux clés pour les TIC sont le gallium, le germanium, l’indium, les terres rares (praséodyme, néodyme, dysprosium, etc.), le sélénium, le tantale et le tellure.

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ECO-AUDIT Déclaration des avantages environnementaux

Le Groupe de la Banque mondiale s’est engagé à réduire son empreinte environnementale. À l’appui de cet engagement, la Division des publications exploite des moyens d’édition électronique et des outils d’impression à la demande installés dans des centres régionaux à travers le monde. Ensemble, ces initiatives permettent de réduire les tirages et les distances de transport, ce qui se traduit par une baisse de la consommation de papier, de l’utilisation de produits chimiques, des émissions de gaz à effet de serre et des déchets.

La Division des publications suit les normes relatives à l’utilisation du papier recommandées par l’Initiative Green Press. La plupart de nos livres sont imprimés sur du papier certifié par le Forest Stewardship Council (FSC) et contenant entre 50 et 100 % de fibre recyclée dans la quasi-totalité des cas. Cette fibre est soit écrue, soit blanchie à travers un procédé totalement sans chlore, de traitement sans chlore ou sans chlore élémentaire amélioré. Pour plus d’informations sur la philosophie environnementale de la Banque, rendez-vous sur http://www.worldbank.org/corporateresponsibility.

Tous les pays africains ont besoin d'avantage d'emplois de qualité pour leurs populations croissantes. Le rapport « Afrique numérique : Transformation technologique pour l’emploi » montre qu'une utilisation plus large, par les entreprises et les ménages, des technologies numériques génératrices de productivité est impérative afin de générer de tels emplois, y compris pour les personnes peu qualifiées. Dans le même temps, cette démarche peut soutenir non seulement l'objectif à court terme de reprise économique postpandémique des pays, mais aussi leur vision d'une transformation économique assortie d’une croissance plus inclusive.

Cependant, ces résultats ne seront pas automatiques. La disponibilité de l'internet mobile a augmenté sur l’ensemble du continent ces dernières années, mais l'écart d'utilisation est le plus élevé au monde. Les zones disposant d'au moins un service internet mobile 3G couvrent désormais 84 % en moyenne de la population des pays d'Afrique subsaharienne, mais seulement 22 % utilisent ces services. Et l'entreprise africaine moyenne accuse un certain retard en matière d'utilisation de smartphones et d’ordinateurs, ainsi que de technologies numériques plus sophistiquées qui contribuent à obtenir de nouveaux gains de productivité.

Deux problèmes expliquent cet écart d'utilisation : l'absence d'abordabilité de ces nouvelles technologies et la de les utiliser. Pour les 40 % d'Africains qui vivent en dessous du seuil de pauvreté extrême, les forfaits de données mobiles coûteraient à eux seuls un tiers de leurs revenus, en plus du prix des appareils d'accès, des applications et de l'électricité. Les forfaits de données pour les petites et moyennes entreprises sont également plus chers que dans d'autres régions. De plus, la qualité des services internet – de même que la fourniture d'applications attrayantes et adaptées aux compétences qui favorisent l'entrepreneuriat et augmentent les revenus – présente des lacunes qui freinent la volonté des entreprises et populations de les utiliser.

Pour les pays qui utilisent déjà ces technologies, les retombées du développement sont importantes. De nouvelles études empiriques réalisées pour le présent rapport s'ajoutent aux données sans cesse croissantes qui démontrent que la disponibilité de l'internet mobile augmente directement la productivité des entreprises, accroît le nombre des emplois, et réduit la pauvreté à travers l'Afrique.

Pour que ces bénéfices ainsi que d'autres avantages se concrétisent plus largement, les pays africains doivent mettre en œuvre des politiques complémentaires et synergiques afin de renforcer à la fois la capacité de payer des consommateurs et leur volonté d'utiliser les technologies numériques. Ces interventions doivent accorder la priorité à une utilisation productive en vue de générer un grand nombre d'emplois inclusifs dans une région sur le point de bénéficier d'une main-d'œuvre massive et jeune, laquelle est appelée à devenir la plus importante du monde d'ici la fin du siècle.

ISBN 978-1-4648-1970-4

SKU 211970

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