Sortie d'Usine #0

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Dossier APRÈS MAI

Olivier Assayas

désobéissance désobéissance cinématographique cinématographique questions : ARIANE KUPFERMAN-SUTTHAVONG

L

e réalisateur le plus en vue cet automne ? Olivier Assayas. Le film dont on aura le plus parlé ? Après Mai. Dernier-né d’une œuvre colossale d’un réalisateur éclectique, il s’impose comme la manifestation aérienne d’un combat. Filmer la lutte, filmer une époque, filmer un paysage intérieur qui n’est autre que le sien ; vaste programme que celui que s’est imposé Olivier Assayas. Pas de fresque pour autant, mais un portrait intimiste, patchwork de sensations, une rencontre : celle du cinéma. Nous aussi, nous avons eu droit à notre rencontre ; une rencontre avec la figure de proue du cinéma français actuel. Entretien avec un virtuose.

La jeunesse des années soixantedix est à nouveau au cœur de votre dernier film. Après L’Eau Froide (1994), vous reprenez ce motif autobiographique. Qu’estce qui vous a poussé à y revenir ? Je me sers d’éléments vécus comme de piliers. De la même manière qu’un film comme Carlos était constitué par un travail de recherches, de vérifications factuelles, ce travail de documentation je n’ai évidemment pas eu à le faire pour Après Mai. Je me suis inspiré de choses vécues qui me semblaient autant de repères sur lesquels le souvenir pouvait m’aider à reconstituer quelque chose de 20 SORTIE D’USINE

l’époque. Ça a un rapport avec le souvenir, avec l’autobiographie, la possibilité d’utiliser cette matièrelà au cinéma de la même manière qu’on l’utilise couramment dans le roman. Ça a été une sorte de fil qui a continué à exister dans ma carrière, spécifiquement dans des films comme Fin Août, Début Septembre. Je crois que si je suis revenu, par l’écriture, sur cette période et sur les questions qu’elle pose, c’est que j’avais besoin d’élucidation, de comprendre comment d’un jeune homme engagé dans les convictions, politiques en particulier, de son époque, attiré de façon diffuse encore par le

cinéma, traversé plutôt par les arts-plastiques et par la peinture, je suis devenu moi-même. Puis je me suis retrouvé sur le chemin qui m’a progressivement conduit à faire des films. C’est d’une part une forme de réflexion et, d’autre part, une mise au point face à la manière dont aujourd’hui ces années-là sont, dans le souvenir et la littérature, soit occultées, soit déformées par une caricature facile. Ensuite, cette référence au vécu, elle est plus de l’ordre de la vérification que de là où je veux en venir. Là où je veux en venir, c’est à quelque chose de plus collectif, quelque chose qui soit davantage l’histoire d’une époque.


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