De la pétition des ouvriers pour l'abolition immédiate de l'esclavage

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à la Basse-Terre; il pouvait rendre, dans cette position, de grands services à la coterie dominante ; cependant son vote ayant plus d'importance à la cour, on s'empressa de l'y faire entrer, en confiant son intérim à M. Fourniols, qu'on connaît déjà. De cette manière le procureur-général s'assurait d'un des parquets de la cour, et consolidait, au sein des conseillers, la résistance à l'article 47. Grâce à ce machiavélisme, la cour fut successivement envahie par les possesseurs d'esclaves. Il n'y eut plus de siéges respectés que ceux sur lesquels les rares titulaires qui avaient pris part à l'arrêt du 27 mars, protestaient, par leur consciencieuse fermeté, au nom de la loi et de la pudeur, contre une pareille profanation de la justice. Dès ce moment, la cour change de jurisprudence, et rend, le 5 AOUT 1844, le singulier arrêt Coralie, dont la rédaction est due à M. Dupuy, l'un des substituts actuels du procureur-général, alors conseiller auditeur. Il s'agissait d'une ancienne esclave nommée Coralie, mère de quatre enfants impubères, qui, vendue d'abord, avec d'eux d'entre eux, à une dame Blanchet, avait été achetée des mains de celle-ci par un sieur Noyer, et avait obtenu la liberté de son dernier maître, en le désintéressant du prix payé pour elle. Les deux autres filles, desquelles elle avait été séparée en premier lieu, étaient restées entre les mains de sa première maîtresse, la veuve Coquille, et à l'époque du procès, l'une d'elles se trouvait appartenir à une demoiselle Nancy. Coralie, en vertu do l'art. 47, revendiquait la liberté de ses enfants, deux fois séparés d'elle malgré leur état d'impuberté. Sa demande, repoussée en première instance, fut portée devant la cour royale, qui, par une sorte de transaction avec le principe, rendit un arrêt où la logique et le droit sont aussi peu respectés que les sentiments d'humanité. « En ce qui touche, dit cet arrêt, la revendication de Narcisse et de Joséphine (les deux premiers vendus) : «Attendu qu'il résulte des circonstances de la cause que, dans « l'acte sous seing privé du 26 mars 1823, le sieur Noyer n'a été « que le prête-nom de Coralie, que celle-ci s'est elle-même ra-


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