De la pétition des ouvriers pour l'abolition immédiate de l'esclavage

Page 204

— 171 — 18 juillet 1845, il résulte ce qui suit : sur 38 mutations survenues dans les ressorts des cours royales de la Martinique et de la Guadeloupe, 2 4 avancements ont été donnés à des juges créoles ou créolisés, et en 6 mois, de doubles faveurs ministérielles sont quelquefois tombées sur les mêmes créoles ou créolisés; 12 avancements sont échus à des métropolitains ou supposés tels, la plupart relégués dans les bas grades ; les deux seules disgrâces parties des bureaux de la marine ont frappé des magistrats indépendants qui avaient eu le malheur de déplaire aux colons. Dans les deux cours royales, la majorité appartient irrécusablement aux maîtres. Dans les parquets de ces cours, on a placé fort adroitement à côté de procureurs-généraux métropolitains, des substituts créoles ou dévoués à l'esclavage, de telle sorte que tous les actes des parquets, en supposant qu'ils fussent conformes à la justice, sont annullés par la cour, ou entravés par les substituts. La même tactique a été suivie pour les tribunaux de première instance. Ainsi, les juges royaux sont-ils indépendants, les lieutenants de juge (juges d'instruction) ou les procureurs du roi, et presque toujours les uns et les autres, sont hostiles aux esclaves et favorables aux maîtres. Le tribunal et le parquet de première instance de Saint-Pierre sont dans le premier cas, les tribunaux et les parquets de la Basse-Terre et de la Pointe-à-Pitre sont dans le second cas. Si donc le juge royal veut réellement l'application de la loi, le juge d'instruction et le parquet, et presque toujours l'un et l'autre annullent ses bonnes dispositions. Dans le cas au contraire où le juge d'instruction est indépendant, ou d'opinion inconnue, le juge royal et le parquet sont dévoués aux maîtres, et partant, point de justice possible. Les tribunaux et les parquets de première instance de Fort-Royal et de Marie-Galante fournissent de cela deux exemples frappants. Il est à remarquer aussi que tous les parquets de première instance de la Martinique et de la Guadeloupe, sont, sans aucune exception, livrés à des procureurs du roi, propriétaires d'esclaves. C'est dans cette déplorable composition des cours, des tribu-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.