De la pétition des ouvriers pour l'abolition immédiate de l'esclavage

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CHAPITRE

VIL

Les parquets de la Martinique. — Le gouverneur assiste, avec l'un des substituts du procureur-général, à un dîner donné par un planteur, pour célébrer le scandaleux acquittement de son géreur. — Magistrats du Sénégal. — Conclusion.

On trouve tout d'abord dans le parquet de la cour royale de la Martinique, M. Blondel-Larougery, créole de l'île, nouvellement allié par son mariage à une famille des plus renommées par ses préjugés de caste. Les liens que vient de former ce substitut du procureur-général, l'enchaînent plus fortement que jamais au régime actuel des habitations. Par son père et par sa femme, M. Larougery est doublement propriétaire d'esclaves, doublement intéressé à ce qu'il en existe toujours. Dernièrement, il y eut une petite émeute sur une habitation de la Basse-Pointe; les noirs refusèrent de travailler. Le général Rostoland et M. Larougery, accompagnés de détachements de troupes, se rendent sur les lieux; on reconnaît le bien fondé des griefs des esclaves, ils n'étaient pas nourris convenablement. Mais, comme il faut que l'autorité dominicale n'ait jamais tort, le représentant de la justice, au lieu de poursuivre le maître, a ordonné que quatre nègres reçussent un quatre-piquets, pour avoir eu raison de se plaindre. Ce fait ne peut étonner, lorsqu'après l'acquittement du géreur Bruneau, on a vu M. Larougery se transporter sur l'habitation Bayardelle, et célébrer dans un repas donné à cette occasion par M. Delhorme, conseiller colonial, la nouvelle victoire remportée sur la loi par les passions des planteurs. Nous devons entrer ici dans quelques détails, pour que l'on puisse bien comprendre ce qu'une pareille démarche de la part d'un magistrat renferme de blessant pour la morale publique.


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