Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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SAINT-DOMINGUE

reste de flibustiers est en effet la plus sûre garantie de l'île contre les incursions toujours à craindre des aventuriers d'autre nation 1. En réalité, à l'époque où nous sommes arrivés, c'està-dire à la fin du XVIIe siècle, les gouverneurs de SaintDomingue comprennent que le possible a été fait, que les éléments assimilables de la population conquérante ont été fixés, et ils se tournent vers la métropole pour tenter d'y faire de nouvelles recrues 2. Malheureusement, 1. Constatant, un peu prématurément sans doute, dès 1689, la décadence de la flibuste à Saint-Domingue, M. de Cussy écrivait à un de ses correspondants, le sieur April : « J'ai détruit la flibuste parce que la Cour l'a voulu, et je n'en suis venu à bout qu'avec bien de la peine. Je voudrois à présent n'y avoir pas réussi, car il y auroit à ceste coste dix ou douze bons navires et quantité de braves gens dessus. » (Lettre de M. de Cussy, sans date, mais vraisemblablement de 1689, aux Arch . du min. des Col., Corr. gen., G9, vol. II).— Un rapport de Du Casse de 1691 déplore de même « la perte des flibustiers. » (Mémoire de Du Casse , du 23 novembre 1691. Ibid.). Bien après, en 1756, MM. de Vaudreuil et Lalanne, gouverneur et intendant, entretiendront encore le ministre du projet de reconstituer un corps de corsaires très propre à la défense de la colonie (Lettre de MM. de Vaudreuil et Lalanne, du Port-au-Prince, du 9 septembre 1756, aux A. M. C, Corr. gén., Saint-Domingue, C9, vol. XCIX). Mais il était alors bien tard pour faire refleurir la flibuste. MM. Bart et Lalanne le constataient en 1758. « Les flibustiers, écrivent-ils, qui nous seroient dans l'occasion d'une grande ressource, ne trouvant plus à gagner leur vie depuis le commencement de la guerre par le défaut de navigation le long des côtes, disparaissent insensiblement. Les uns meurent de misère et les autres s'étant embarqués sur des corsaires ont été pris et peu d'entre eux sont revenus dans la colonie. » (Lettre de MM. Bart et Lalanne, du 1er novembre 1758, aux A. M. C., Corr. gén., Saint-Domingue, C9, vol. CI.) 2. Si quelques-uns des premiers gouverneurs regrettent que l'importation des nègres ne soit pas plus considérable, la plupart se plaignent plus justement des trop rares arrivées d'Européens. « La Compagnie du Sénégal, écrit notamment M. de Cussy en 1685, envoie 150 nègres par an, ce qui sera le moyen de diminuer cette colonie, car les François négligeront de faire venir des engagés qui leur coûtent plus. » (Lettre de M. de Cussy à M. de Seignelay, du 18 octobre 1685 (A. M. C, Corr. gén., Saint-Domingue, C9, vol. I). Cf. les mémoires de Du Casse des 15 et 23 novembre 1691 (Ibid., vol. II) ; la lettre de M. de Brach, lieutenant de roi, de Léogane, du 25 novembre 1701 (Ibid., vol. V) ; la


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