Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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ORIGINES DE LA COLONISATION ET PREMIERS COLONS

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sauvages, dont ils préparaient les cuirs, ou à celle des cochons sauvages, dont ils boucanaient et fumaient la chair ; les flibustiers poursuivant sans trêve dans la mer des Antilles les vaisseaux espagnols qui revenaient vers l'Europe chargés des dépouilles du nouveau monde. Mais les boucaniers précédèrent-ils les flibustiers, ou ceux-ci furent-ils antérieurs à ceux-là? Flibustiers et boucaniers se divisèrent-ils dès l'origine en deux sociétés distinctes, ou bien les uns et les autres exercèrentils concurremment les mêmes métiers? Tous problèmes insolubles et offrant en vérité assez peu d'intérêt. Ce qu'il importerait plutôt de connaître, c'est la vie même que menaient ces hommes pendant les années d'indépendance absolue qui précédèrent la reconnaissance de l'autorité du roi de France, vie primitive et à demi sauvage, mais aussi pittoresque, — au moins d'après le peu qu'on en sait, — qu'il s'agisse des flibustiers ou des boucaniers : les uns habitant au milieu des bois ou des savanes, dans des cases faites de branchages à la manière des sauvages, vêtus de haillons sordides, imbus et poisseux du sang des animaux, les cheveux hérissés ou noués sur la tête, la barbe inculte et longue, coiffés d'un sorte de « cul de chapeau » à visière, chaussés de souliers de peau de porc, toujours armés de quatre ou cinq coutelas et de longs fusils, — dits boucaniers, — au canon de quatre pieds et demi de long, « à l'aide desquels, à 120 pas, ils ne manquent jamais de donner dans une piastre1 », et, ainsi accoutrés, passant leur temps à la poursuite de leur gibier, à de longues buve1. Beauval-Ségur, Histoire de Saint-Domingue, en manuscrit à la Bibliothèque nationale, Nouv. acq. fr., vol. 9326, fol. 8.


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