Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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SAINT-DOMINGUE

rentes. « La solitude, écrit Moreau de Saint-Méry, plaît aux femmes créoles qui y vivent volontiers, même au sein des villes; elle leur donne un caractère de timidité qui ne les quitte pas dans la société, où elles répandent peu d'agréments » Et cela est d'autant plus significatif, que cela n'est pas particulier aux seules créoles, mais à l'un et l'autre sexe. Le fait a frappé presque tous les observateurs : il n'y a point, ou il y a peu de société à SaintDomingue. Un colon, qui n'a d'ailleurs vécu que quelques semaines dans la colonie, le comte de Ségur, nous a tracé, je ne l'ignore point, des « plaisirs de la société » dans l'Ile un tableau bien souvent cité. « Les routes, écrit-il, étoient sans cesse couvertes d'une foule de chars légers qui promenoient les créoles voluptueux d'habitation en habitation... Tous se visitoient, se réunissoient continuellement; ce n'étoit sans cesse que festins, danses, concerts et jeux dans lesquels souvent les plus grandes fortunes se dissipoient en peu d'heures. Ces riches plaines de la colonie offroient en quelque sorte l'image, par leur luxe et leur mouvement, de ces grandes capitales divisées en nombreux quartiers, où le commerce, les affaires, les intrigues et les plaisirs- entretiennent une perpétuelle agitation et un mouvement sans repos2. » Je crois, quand même, qu'il y a là beaucoup d'optimisme et la généralisation un peu hâtive de faits trop particuliers. Sans doute, dans certains «quartiers », dans la plaine du Fonds, par exemple, « on se réunit volon1. Moreau de Saint-Méry. Op. cit., t. I, p. 20. 2. Mémoires du comte L.-Ph. de Ségur. 1824. 3 vol. in-8°, t. I, p. 468469.


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