Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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VIE

ET

MOEURS

CRÉOLES

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lement chastes que l'exemple des hommes et l'éducation qu'elles reçoivent les laissent absolument sans ressources contre l'influence du climat et les dangers d'une éternelle oisiveté1. » Car l'oisiveté et une paresse native restent bien en somme le fait, et le péché favori de la plupart des femmes créoles. Je dis de la plupart, ne voulant là pas plus qu'ailleurs par trop généraliser. A Saint-Domingue, comme en beaucoup d'autres colonies, il y a en effet d'admirables exemples de l'activité féconde et bienfaisante de certaines femmes. « Combien de ces femmes de la campagne dans la colonie, écrit Moreau de SaintMéry, qui sont vraiment l'honneur de leur sexe par les soins généreux qu'elles prodiguent à tous ceux qui vivent sur leur habitation, leurs esclaves, leurs domestiques, les malades, les enfans ! Combien d'entre elles conduisent des biens considérables et se donnent des peines que des hommes très laborieux de la métropole ne voudroient pas prendre. Quelle différence de cette habitante qui coud des chemises pour ses nègres et ouvriers, qui leur fait distribuer à manger devant elle, qui va dix fois par jour dans un hôpital infect, où régnent souvent des maladies dangereuses et susceptibles de contagion, avec cette élégante des villes de France, ou même avec la bourgeoise laborieuse au-dessus de laquelle le hasard l'a placée par la naissance ou par la fortune. Combien de femmes, faites pour être le charme et l'ornement de la société, sont au fond des bois, dans les mornes, nourries de privations et réduites à espérer un meilleur sort 1. Wimpffen, Op. ci/., t. II p. 409-110.


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