Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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SAINT-DOMINGUE

au bain, et en sortent pour se mettre de nouveau à table. Après dîner, la sieste qui se prolonge jusque vers o heures; léger souper, le soir 1. Tel est le programme de vie à peu près invariable d'un planteur, programme qui comporte, d'ailleurs, des détails accessoires qui en rendent l'exécution plus pénible encore : obligation fréquente d'un régime, abstention de spiritueux, toutes choses dont s'embarrassent peu sans doute beaucoup de colons, mais qu'un jour ou l'autre ils peuvent regretter d'avoir négligées. En dehors de la monotonie que le fait seul du climat lui impose, cette vie des planteurs, autre chose contribue à la rendre bien moins séduisante qu'on ne se plaît à l'imaginer communément. Cette autre chose, c'est l'isolement où elle s'écoule trop souvent. Certaines habitations se trouvent à cinq ou six lieues les unes des autres, et quelquefois ne sont reliées entre elles que par des chemins tout à fait insuffisants. Chacun prend ainsi l'habitude de rester chez soi et, dès lors, n'a plus, comme entourage et compagnie, que ses nègres. La « solitude des habitations », que de fois retrouve-t-on cette plainte sous la plume des colons ! « Gardez votre pitié, écrit l'un d'eux, pour une existence qui se passe tout entière loin du monde. Nous sommes ici cinq blancs, mon père, ma mère, mes deux frères et moi environnés de plus de 200 esclaves, le nombre de nos nègres domestiques se montant seul à près de trente. Du matin au soir, leurs 1. Baron de Wimpffen, Voyage à Saint-Domingue, pendant les années 1788, 1789, 1790, Paris, 2 vol. in-8, 1797, t. I. p. 131-132. — Cf. GirodChantrans, Op. cil., p. 141.


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