Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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SAINT-DOMINGUE

que ceux que je viens d'indiquer, sont seuls capables de susciter des départs sans esprit de retour. Quoi qu'il en soit, la colonisation des Antilles et en particulier celle de Saint-Domingue, au XVIIe siècle, nous offre une singulière confirmation des idées que je viens d'exposer. Nulle part, en effet, les divers mobiles qui pouvaient pousser alors nos nationaux hors de France ne se peignent mieux que dans l'histoire des flibustiers et des boucaniers, nulle part n'apparaissent d'une façon plus violente et plus heurtée les causes profondes du mouvement colonial du XVIIe siècle. Il est difficile de bien préciser les origines de nos premiers établissements dans cette île de Saint-Domingue occupée par les Espagnols depuis 1492 et dont la population primitive avait été rapidement détruite et absorbée par eux. On s'accorde en général à reconnaître que des colons français et anglais, chassés de Saint-Christophe par l'amiral espagnol Federico de Tolède, en septembre 16291, furent les premiers Européens qui disputèrent aux Espagnols la possession de la petite île de 1. C'est au moins la version des PP. Le Pers et Charlevoix, qui est aussi adoptée par H. Lorin, De praedonibus insulam sancti Dominici celebrantibus saeculo septimo decimo, p. 6. — M. Guet, Origines de la Martinique ; le colonel François de Collart et la Martinique de son temps, p. 18, prétend qu'un certain Levasseur, le môme dont il sera question plus loin, ayant cédé à M. d'Esnambuc ses droits sur SaintChristophe, moyennant 3.000 livres, lui demanda, en 1627, de le faire transporter avec ses compagnons à la Tortue, qui aurait été dès lors occupée par lui. Qu'il y ait eu un accord entre Levasseur et d'Esnambuc au sujet de Saint-Christophe, la chose est indéniable (cf. l'extrait du registre de la Compagnie des Iles d'Amérique, donné par Guet, Op. cit., p. 40-41). Mais je ne sais sur quels textes le même auteur s'appuie pour affirmer la venue de Levasseur à la Tortue en 1627. Il est peutêtre permis de dire qu'il y avait déjà en 1629 à la Tortue d'autres Européens que les Espagnols ; du moins ces derniers en étaient-ils alors les maîtres officiels.


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