Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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LE

MONDE

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NOIR

pour les poux de bois qui détruisent ici les charpentes 1. » A l'appui de cette thèse les deux administrateurs signalaient un mémoire de M. Poissonnier des Perrières, médecin du Roi à Saint-Domingue, lequel, disaient-ils, démontre : « 1° que les poisons employés par les nègres ne sont pas des poisons végétaux, car on connoît aussi bien qu'eux toutes les plantes de la colonie ; elles donneroient un goût désagréable aux aliments et on en reconnoîtroit la présence; — 2° les nausées, les coliques d'estomac, la soif inextinguible qu'éprouvent les empoisonnés, la diarrhée sanguinolente qui leur survient, un sentiment de chaleur brûlante dans la région du ventricule démontrent, au contraire, évidemment que ce sont des poisons salins, et font présumer, presque à coup sûr que c'est à l'arsenic et au sublimé corrosif que l'on doit ce cruel état2. » Malgré ces témoignages formels, la légende du poison secret fabriqué par les nègres eut toujours cours à SaintDomingue. « Il y a plus de trois ans, écrit, en 1760, un habitant, qu'il circule dans la colonie un poison qui détruira tous les blancs si on n'y apporte un prompt remède. Ce poison n'est point encore connu. Il a été trouvé par les noirs qui s'en servent avec un secret incroyable. Les effets sont d'une nature qui fait périr tantôt subitement et tantôt par des maladies de langueur 1.

vol.

Lettre de MM. CXXVII).

d'Estaing

et

Magon,

10 janvier 1766

(Ibid.,

2. Mémoire sur les empoisonnements à Saint-Domingue, par M. Poissonnier-Desperrières, médecin ordinaire du roi, janvier 1764 (A. M. G., C orr. gén., 2« série, carton XVI). Cf. carton XXIII, un autre mémoire du même de 1773. 16


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