Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

Page 208

172

SAINT-DOMINGUE

La ration hebdomadaire de l'esclave doit être, suivant le Code noir, de deux pots et demi de manioc, ou trois cassaves, deux livres de bœuf salé ou trois livres de poisson 1 ; mais elle varie naturellement à l'infini. Voici un autre menu : de six à neuf pintes de farine de gruau, de riz ou de pois, et six à huit harengs, avec faculté d'en remplacer une partie par du biscuit, ou de la mélasse 2. Et si encore ces distributions eussent été régulières, et si surtout ce régime échauffant de viande et de poisson salés n'eût pas été infiniment peu réparateur pour des gens astreints à un travail régulier des plus rudes ! Le système de l'alimentation hebdomadaire était le seul légal. Nous lisons bien dans Du Tertre que, de bonne heure, certains Français voulurent imiter le système pratiqué par les Hollandais, qui, au lieu de fournir à leurs nègres nourriture et habillement, leur laissaient le samedi libre et une certaine quantité de terre à travailler ; les nègres y plantaient des pois, des patates, du manioc, des ignames ; les femmes y cultivaient des herbes potagères, des concombres, des melons que les hommes allaient vendre au marché les dimanches et fêtes et dont le produit leur servait à acheter de la viande et du poisson 3. Mais ce système ne fut jamais reconnu par la loi. « J'ai vu, écrit le 10 juillet 1731 le Ministre à M. de la Chapelle, j'ai vu ce que vous me marquez au sujet de l'abus qui s'est glissé dans 1. Code noir, art. XXII. 2. Moreau de Saint-Méry, Notes historiques... (A. M. C., F3 136, fol. 506). 3. Du Tertre, Op. cit., t. II, p. 151 et seq.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.