Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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LA NOBLESSE FRANÇAISE

A

SAINT-DOMINGUE

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si longtemps, et qui, désormais, paraît-il, était incompatible avec le bonheur et les intérêts de la colonie. « Aux temps anciens, disent des mémoires inspirés par Clugny, la colonie de Saint-Domingue, composée d'un tas d'aventuriers que l'envié de s'enrichir et une humeur belliqueuse y avoient rassemblés, n'étoit point telle qu'elle se montre aujourd'hui. Des hommes errans, accoutumés aux coups de main, indisciplinés, en petit nombre et réunis en peu de lieux, avoient besoin pour être contenus de loix simples dont l'exécution fût soudaine, de loix du moment. Dans ces temps, un gouvernement militaire convenoit à des hommes militaires, et comme l'éducation et les sentimens qu'elle inspire ne cimentoient point les liens de la société, la contrainte devoit la resserrer, afin que cette société imparfaite pût subsister... Mais si les milices ont été nécessaires lorsque la colonie n'étoit encore peuplée que des gens qui en avoient fait la conquête, et qui ont été longtemps obligés de veiller continuellement à sa défense, aujourd'hui c'est le gouvernement civil qui doit présider seul à la conservation de la société, lorsqu'elle n'est pas attaquée 1. » Ce gouvernement civil, il importe donc de le substituer au plus tôt au gouvernement militaire qui vient de disparaître, dessein que, sans même consulter la Cour, Clugny se met en devoir de réaliser. « La suppression des milices, expose-t-il en une note, a entraîné nécessairement de nouveaux arrangemens. Les commandans de ces milices tenoient à l'administra1. Cf. Remontrances au Roi du Conseil supérieur du Port-au-Prince,

1761 {Ibid., vol. CXI), et mémoire de M. Marcel, conseiller au même Conseil, du 16 novembre 1768 {Ibid., vol. CXXXIV).


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