LA NOBLESSE
FRANÇAISE
A
SAINT-DOMINGUE
111
entre l'intendant et la population. Alors donc qu'en France un gentilhomme, fût-il un gros seigneur, tremble devant l'intendant de sa province, à Saint-Domingue les moindres commandants-majors, capitaines de quartier ou de milices, sont ses collaborateurs, et ses collaborateurs fort indépendants, je dois le dire, d'autant plus indépendants qu'ils se sentent indispensables. Qui, en effet, sinon eux, président les assemblées d'habitants ; ont la « police ecclésiastique », la « police extérieure du culte » et une sorte d'autorité en tout ce qui concerne l'accomplissement régulier du service religieux dans le quartier ou la paroisse ; ordonnent des corvées, veillent au bon entretien des chemins et à ce que les prestations de nègres y soient portées en temps utile et sans fraude ; sont consultés sur l'octroi des concessions ; édictent les règlements d'irrigation ; fixent la date et la tenue des marchés ; ont la surveillance des « hattes » ou parcs à bestiaux; délivrent les permis de cabotage; font les dénombrements ou recensements ; dressent les statistiques industrielles, commerciales, ou agricoles demandées par les gouverneurs et les intendants ; établissent les listes d'imposés? L'administration financière est en effet tellement rudimentaire, pénètre si peu dans le pays, que c'est uniquement sur les officiers-majors ou de milices que l'on doit compter pour la confection des rôles de la capitation des nègres, pour la fixation des droits des cabarets, et la levée des divers octrois en général 1. 1. Il n'est pas une de ces attributions dont l'existence ne nous soit révélée par les ordonnances et règlements ou par la correspondance des gouverneurs et des intendants.