Saint-Domingue : ( 1629-1789 ), la société et la vie créoles sous l'Ancien Régime

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SAINT-DOMINGUE

On s'imagine volontiers, après cela, que ces juges sont mal placés pour se montrer impitoyables à l'égard de leurs justiciables. Aussi bien font-ils preuve de la plus extraordinaire mansuétude. Le Conseil souverain du Petit-Goave abandonne ainsi [lés poursuites engagées contre une femme qui avait empoisonné, puis étranglé son mari; absout un homme coupable de viol sur une fille de neuf ans l. A Léogane, un individu, ayant blessé mortellement un nègre d'un coup de pistolet, est condamné, « après huit mois de longueur affectée par le juge et le procureur du Roy », à 100 livres d'amende, et un autre, « avant percé tout le corps d'une jeune esclave de onze ans à coups d'éperon », s'en tire avec 600 livres d'amende 2. Il serait injuste de nier qu'avec le temps la situation ne soit pas allée s'améliorant. Pourtant nous trouvons par la suite d'assez amusants exemples du recrutement et de l'esprit de la magistrature de la colonie. En 1746, le procureur du Roi au Petit-Goave est un ancien geôlier de prison, et les membres du Conseil supérieur s'en étant pudiquement plaints à M. de Larnage, celuici leur conseille de ne pas toucher cette corde, de peur de trouver quelque doyen de leur corps dans le même cas ou dans un pire 3. Un autre, nommé la même année conseiller assesseur au Conseil du Cap, est un contumace, retour de la Louisiane *. Un troisième, greffier de la juridiction du Fort-Dauphin, vers 1750, est un 1. Lettre de M. de Galliffet, du 27 décembre 1699 (Ibid., vol. IV). 2. Lettre du même, du Petit-Goave, 24 janvier 1703 (Ibid., vol. VI). 3. Lettre de M. de Larnage, du 1« mars 1746 (Ibid., vol. LXIX). 4. Lettre du même, du 7 mars 1746 (Ibid.).


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