Vieux papiers du temps des isles. Deuxième série

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VIEUX PAPIERS DU TEMPS DES ISLES

c'était la France qui arrivait ! Le soir, toute la ville fut illuminée et le populaire força Dubuc, « l'administrateur des Anglais », à illuminer aussi. Mais ce n'était pas tout d'être accueilli avec le plus vif enthousiasme et pour MM. Boyer-Peyrebeau et de Vaucresson commencèrent des heures pénibles. Ces Messieurs d'Angleterre faisaient la sourde oreille pour vider les lieux. Le gouverneur Skinner répétait sans cesse : « Je n'ai pas d'ordres de mon gouvernement. » Nos commissaires durent aller à Antigua voir le général Leith, gouverneur anglais qui, lui aussi, « n'avait pas reçu d'ordres », se rendre auprès de l'amiral Cochrane, venu à Basse-Terre sur le Tonnant qui, également, « souffrait » d'être sans nouvelles de Londres ! Et pendant un mois nos troupiers attendirent ballottés sur le Lys, à la cape, dans la rade, l'autorisation de mettre pied à terre ! Il ne faudrait pas croire que les « goddams » restaient les bras croisés, point du tout, ils déménageaient avec méthode, emportant tout ce qui était dans les forts et les arsenaux, canons, munitions, armes, y compris les marmites. Tout cela échauffait les cervelles et les fausses nouvelles de circuler. On ne parlait rien de moins que de sauter sur l'Anglais et de le flanquer à la mer. BoyerPeyrebeau s'attendait, d'un moment à l'autre, à ce qu'un incident vienne mettre le feu aux poudres ; c'est pour parer à ce danger qu'il créait « le camp de Boulogne », où il confinait les soldats qui ne cachaient pas que leurs sabres les démangeaient furieusement et réorganisait en deux jours une garde nationale. Heureusement que le 5 décembre 1814, le général Leith débarquait et commençait les opérations de restitution. Le 7 décembre, le drapeau blanc flottait sur les forts, salué par les salves réglementaires. Quelques


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