Vieux papiers du temps des isles. Deuxième série

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VIEUX PAPIERS

DU TEMPS DES ISLES

fense pour la forme et que les nouvelles expédiées par bombes avaient éveillé en eux des sentiments nettement antirépublicains. La meilleure preuve en fut qu'à peine les Anglais occupaient-ils la ville que l'on vit tous les officiers se réunir chez Touffreville en acclamant le Roi, épinglant à leurs parements leur croix de Saint-Louis et mettant au bras un « crêpe blanc en signe de deuil pour l'assassinat de Louis XVI ». Ces officiers se rendirent en corps chez le gouverneur qui, à cette vue, « tira de sa poche sa croix de Saint-Louis et de Saint-Lazare et les mit à sa boutonnière ainsi qu'un crêpe blanc à son bras. Une voix ayant crié : la cocarde blanche ! chacun s'en affubla, ceux qui n'en avaient pas s'en firent avec du papier ». Puis, aux cris de : « Vive le Roi ! », on décida de faire célébrer le lendemain un service funèbre et, le 25, de fêter avec éclat la Saint-Louis. Un cortège se forma pour aller obtenir l'autorisation du gouverneur anglais ; nos contre-révolutionnaires furent, chemin faisant, acclamés par les habitants et ils ne se gênèrent pas pour molester les « officiers patriotes », leur arrachant la cocarde tricolore. Sur la place d'Armes on arracha le « palmier de la Liberté ». Ce fut le Père Langlais, évêque in partibus d'Holicha qui, devant une brillante assistance, aux premiers rangs de laquelle se trouvait le gouverneur britannique, officia pour le repos de l'âme royale. Le lendemain, une messe du Saint-Esprit préluda à la fête de la Saint-Louis. Le gouverneur y décora de l'ordre de Saint-Louis deux officiers et fit même plusieurs promotions ; dans un vaste banquet on fraternisa avec les Anglais et des poètes amateurs improvisèrent des chansons de circonstance. L'ingénieur Phéline, le capitaine d'artillerie Dher-


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