Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LA PREMIÈRE RÉPUBLIQUE DU VÉNÉZUÉLA

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Haynes, dont les rapports 1 sont du reste muets sur ce point, offrit-il à Miranda de lui donner asile. Le généralissime, en tous cas, le laissa repartir, et, brisé de fatigue et de chagrin, il pria son aide-de-camp Soublette de le réveiller le lendemain de bonne heure et se coucha tout habillé sur un divan de la chambre qui lui avait été préparée. Il est fort vraisemblable, ainsi que le rapporte Pedro Gual2, que Miranda avait résolu de partir pour la Nouvelle-Grenade, où la cause de l'Indépendance semblait mieux assurée. Le brick républicain le Zeloso, rentré quelques jours plus tôt avec Bolivar de PuertoCabello, était prêt à reprendre la mer et, suivant une tradition locale, le maigre bagage du dictateur, consistant en deux ou trois valises de vêtements et de papiers, avait été transporté dans la soirée sur l'une des chaloupes mouillées devant l'embarcadère3. La brise ne se levait qu'à dix heures du matin, ce qui sans doute avait engagé Miranda à remettre au lendemain sa décision. Ce retard le perdit. Casas, qui, d'ailleurs, devait à Miranda son poste de commandant de la place, d'accord avec Miguel Pefia, gouverneur civil, préparait depuis plusieurs jours un complot4 contre son bienfaiteur. Les bruits de lâcheté, d'abus de pouvoir, enfin de trahison visant le généralissime, dont s'entretenait à cette heure la population de La Guayra, avaient été semés par Casas qui voulait, en livrant le malheureux vieillard à la rage de ses ennemis, se ménager 1. Le commandant Haynes, à l'amiral Stirling, commandant la division navale britannique à la Jamaïque, de Fort Amsterdam (Curaçao) 4 août 1812. R. O. Admiralty Secretary, in letters. Jamaica 262. 2. Dans l'article précédemment cité. 3. BECERRA, op. cit., t. Il, p. 259. 4. Les menées ténébreuses de Casas durant la semaine qui précéda le 30 juillet 1812, sa connivence avec les Espagnols et sa trahison résultent péremptoirement du rapport de Monteverde au sous-secrétaire d'État à Madrid, daté de Caracas, le 26 août 1812 (Archivo General de Indias, Estante 133. Cajon 3, Legajo 12) publié pour la première fois par M. Gil Fortoul dans le Tiempo, journal de Caracas, du 16 septembre 1899 et reproduit in extenso dans : Historia Constitucional, op. cit., t. I, ch. V, pp. 189-190. Casas resta du reste au service de l'Espagne jusqu'en 1821.


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