Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LA GUERRE A MORT

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faires du pays, par un directeur suprême assisté d'un conseil de sept membres. Alvear n'osa pas se faire investir de ce pouvoir mais il s'en prépara les voies en proposant la candidature de Gervasio Posadas1, son oncle, au suffrage des membres de la Loge de Lautaro. Le récent départ de San Martin pour l'armée du nord le laissait maître d'exercer sur eux un ascendant de plus en plus considérable. Les premières semaines de l'entrée en fonctions de Posadas allaient être assombries par la nouvelle des préparatifs d'une grande expédition militaire que Ferdinand VII avait décidé de diriger sur Buenos-Ayres. L'horizon se troublait aussi du côté du Brésil dont le gouvernement semblait disposé à coopérer avec le roi d'Espagne dans sa lutte contre les provinces argentines. Les proclamations fastueuses que le vice-roi de Lima fit répandre en Amérique annoncèrent que 15.000 hommes étaient sur le point de quitter Cadix. Si ce projet venait à se réaliser, la cause de l'Indépendance ne pourrait y survivre. Elle paraissait d'ailleurs, à considérer la situation d'ensemble du continent colonial, irrémédiablement perdue. Domptée en 1812, la Révolution s'était, il est vrai, relevée. Mais cette fois, et tout au moins sur la plus grande partie du territoire, elle était si cruellement atteinte que l'on ne pouvait humainement prévoir sa régénération. Le combat, soutenu depuis quatre années, par les Proceres, s'achève aux lueurs des villes incendiées et parmi les râles des nations qui s'égorgent, sur une vision de massacre et de carnage, sur un tableau désespéré. Au Vénézuéla, où s'est concentrée toute l'énergie de la répression, le spectacle est à donner l'épouvante. « Ces provinces n'existent plus, écrit dans un rapport officiel l'auditeur D. Manuel de Oropesa2, les cités où 1. POSADAS (Gervasio-Antonio de) né à Buenos-Ayres en 1757, y mourut en 1832. Premier directeur suprême des États-Unis de la Plata de 1814 à 1815. 2. Rapport de D. José Manuel de Oropesa, Auditeur de la capitainerie générale du Vénézuéla à l'intendant D. Dionisio Franco. Caracas 18 juin 1814. D., V., 940. 38


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