Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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BOLIVAR

ment quitta San Mateo le 10 mars après midi, à la vue de l'ennemi. Persuadé que la colonne de Monlilla effectuait un mouvement d'attaque contre son aile droite, Morales se tint en expectative, attendant que la manœuvre d'ensemble se précisât. Grâce à cette attitude, escomptée d'ailleurs par Bolivar, la colonne put continuer sa marche sur Caracas. Bôves cependant se rétablissait et ne songeait qu'à reprendre le commandement de l'armée. Les fusiliers espagnols manquaient de munitions et la bravoure des llaneros était impuissante contre l'artillerie républicaine. Ces considérations ne décourageaient point l'ardeur frénétique de Bôves. Le 11 mars, il décidait de revenir à l'offensive. Le 17, le 20 ce sont de terribles combats encore sans résultat décisif toutefois, car Bolivar a des approvisionnements de guerre considérables et le feu des redoutes de San Mateo arrête toujours les assauts de la cavalerie royaliste. Enfin, Bôves se résout à une attaque générale. Le 25 mars, au petit jour, il distribue à ses soldats les munitions qui lui restent, prend position devant la plaine de San Mateo et fait ouvrir le feu sur toute la ligne. L'action s'engage avec acharnement. Les salves se succèdent entremêlées d'assauts furieux. Les llaneros, dévorant le terrain, viennent tomber au pied des redoutes qui sont autant de volcans en flammes. Bolivar à cheval exhorte les tirailleurs, il croit être sûr de la victoire, la fusillade des royalistes s'espace, les canonniers républicains redoublent de zèle. A ce moment, une clameur inattendue s'élève derrière les combattants. Huit cents llaneros, achevant un habile mouvement tournant, gravissent au galop l'esplanade de l'Ingenio. Il n'y a, pour défendre le parc d'artillerie de l'armée, qu'une cinquantaine de soldats commandés par le jeune grenadin Antonio Ricaurte. Impossible de leur porter secours. Saisis d'une inexprimable angoisse, les chefs républicains entourent Bolivar qui descend de cheval, met l'épée à la main et déclare d'une voix ferme : « Nous ne reculerons point quoi qu'il advienne, et s'il faut mourir, je mourrai avec vous. »... Les llaneros poussant des hourras de ven-


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