Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LE LIBERTADOR

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attaqués et décimés en chemin, et dont les hommes n'arrivaient presque jamais au terme de leur voyage1. Cependant, le flot de la contre-révolution montait toujours. Les projets traditionnels de recours à l'extérieur redevinrent d'actualité et le Libertador songea, sans doute, à ce moment, à solliciter l'appui de quelque grande puissance en faveur de la liberté américaine. Lors de sa rentrée à Caracas, Bolivar, conscient de la fragilité de son ouvrage, avait déjà préparé les voies à cette politique. Il s'était attaché de son mieux à déraciner dans l'esprit de ses compatriotes la xénophobie séculaire2. Celle-ci n'avait fait que s'accroître depuis la proclamation de l'Indépendance. S'étant déclarés maîtres de leur territoire, les Américains éprouvaient plus de jalousie et d'aversion encore à l'égard des étrangers qu'ils considéraient comme uniquement soucieux de les exploiter ou de les asservir. Bolivar combattit ces sentiments avec constance. Il promulgua, le 16 août 1813, un décret d'appel aux étrangers, leur promettant de grands avantages s'ils venaient s'établir dans le pays. Ceux qui s'engageraient dans l'armée nationale seraient « reconnus citoyens du Vénézuéla et leurs services dignement récompensés3 ». Les intentions du Libertador s'arrêtèrent toutefois à cette manifestation. Les circonstances ne lui permirent pas de la renouveler sous une forme plus directe et plus effective. Il y avait d'ailleurs, à cette époque, un certain nombre d'émissaires américains occupés à négocier aux Etats-Unis et en Europe l'obtention de secours ou d'alliances. Bolivar ne se faisait guère d'illusions sur le succès de ces ambassades, mais encore, convenait-il d'être instruit avec précision de leur résultat pour adopter de nouvelles mesures. La situation était, d'autre part, singulièrement troublée dans chacun des états dont le Vénézuéla pourrait espérer quelque appui. Les Etats-Unis semblaient fermement décidés à ne point se départir, quant à leur politique 1. V. MITRE, op. cit., t. III, ch. XXXVIII, in fine. 2. V. O'LEARY, Memorias, t. I, ch. XI. 3. Décret du 16 août 1813. D IV, 689.


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