Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LE MANIFESTE DE CARTHAGÈNE

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la chute du Vénézuéla, à savoir l'indifférence avec laquelle Caracas envisagea toujours l'hostilité qu'elle trouvait dans la province de Coro. » « Coro ne pouvait, certes, entrer en concurrence avec . Caracas au point de vue de la puissance intrinsèque, mais dans l'ordre des vicissitudes humaines, la force matérielle doit céder à la force morale... Le gouvernement du Vénézuéla n'aurait pas dû négliger de poursuivre l'anéantissement d'un adversaire qui, faible en apparence, disposait pourtant de toutes les provinces demeurées fidèles à la cause royale, comptait en principe sur le concours personnel et financier de nos éternels ennemis les Espagnols d'Europe qui vivent parmi nous, sur l'appui du parti clérical, associé d'instinct au despotisme, sur l'adhésion enfin de tous les éléments de superstition et d'ignorance que renferment nos états... En appliquant l'exemple du Vénézuéla à la Nouvelle-Grenade et en usant d'une formule mathématique je dirai que Coro est à Caracas comme Caracas est à l'Amérique tout entière. » Cette façon de poser le problème était aussi logique que possible et il ne pouvait sembler douteux, ainsi que le démontrait ensuite compendieusement Bolivar, que « si l'on les laissait maîtres du territoire vénézuélien, les Espagnols, après en avoir fait un réservoir d'hommes et de ressources de toute espèce, seraient promptement en mesure de se répandre, par Barinas et Maracaïbo, jusqu'aux confins de l'Amérique ». L'auteur du mémoire prévoyait au surplus les expéditions que la Péninsule, une fois délivrée de l'invasion étrangère, allait sans nul doute diriger sur le Nouveau Monde. Il faut, concluait-il, prévenir ses desseins. « Il faut que les provinces grenadines soient pacifiées sans retard. Il faut que nous dirigions ensuite nos armes contre les ennemis qui détiennent une portion de la terre américaine. C'est ainsi que nous formerons des officiers et des soldats dignes d'être appelés les piliers de la patrie. La Nouvelle-Grenade doit à son honneur de poursuivre ses envahisseurs jusque dans leurs derniers retranchements. Elle doit à sa gloire de libérer le Vé29


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