Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LE MANIFESTE DE CARTHAGÈNE

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taire d'Etat, les services que nous devons à Casas ainsi qu'à Pena et Bolivar : aussi leur personne at-elle été respectée. J'ai seulement accordé au dernier des passeports pour l'étranger, car son influence et ses relations pouvaient être dangereuses dans les circonstances présentes 1. » Bolivar s'embarqua le lendemain à La Guayra en compagnie de son cousin José Félix Rivas, sur la goélette espagnole, Jésus Maria José, qui faisait voile pour Curaçao2. Arrivé le 2 septembre à Santa-Ana, il y connut de tristes journées de soucis et de détresse. Les papiers de la goélette n'étaient pas en règle. Les autorités de Curaçao firent mettre l'embargo sur les bagages de Bolivar qui contenaient pour une dizaine de mille dollars de valeurs. C'était alors toute sa fortune. Le procès qu'il entama pour rentrer en possession de ses biens traînait en longueur, tant que le brillant créole dont les prodigalités émerveillaient naguère les habitués du Palais-Royal, eut bientôt à peine de quoi ne pas mourir de faim. Ses propriétés de Caracas et d'Aragua allaient, d'autre part, être confisquées par le gouvernement de Monteverde. C'était une ruine complète et la misère qui s'apprêtaient. Le futur Libertador ne se laissait cependant point abattre : « Je suis armé de patience, écrit-il à ce moment à Iturbe, je méprise les coups de la mauvaise fortune. Sur le cœur de votre ami, seule la conscience est maîtresse et ma conscience est trop sereine pour s'inquiéter de quoi que ce soit3. » Le parti de Bolivar était pris : il entendait plus que jamais « se dévouer à la liberté des peuples », comme il le disait autrefois à son maître Rodriguez, et ne pensait plus qu'il lui fallût pour cela « être riche ». Rapport cité du 26 août 1812, Archivo General de Indias. Estante Cajon 3. Legajo 1. 2. Vicente Tejera et les français Chatillon, Chassaing et Janot prirent passage en même temps sur la goélette. Rapport du commandant de La Guayra à Monteverde daté du 28 août 1811, cité par LARRAZABAL, op. cit., t. I, p. 138. 3. Lettre à D. Francisco de Iturbe. Curaçao, 19 septembre 1812. O'LEARY, Memorias, t. XXIX, p. 15. 1.

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