Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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ORIGINES

DE

LA

REVOLUTION

SUD-AMÉRICAINE

Hernando de Montâlvo avait cru devoir le signaler aux autorités de la métropole. « Il y a là, écrivait-il1, des fils de la terre qui, des cinq parties de la gent espagnole, en forment déjà quatre ; leur nombre s'accroît chaque jour. Ils sont peu révérents de la justice, de leurs parents et majeurs, curieux d'armes, dextres à pied comme à cheval, endurants, amoureux de guerres et de nouvelle tés. » En plein seizième siècle, en effet, le gouvernement du Paraguay était une véritable petite république turbulente et jalouse de liberté dont les colons déposaient les agents royaux aux cris de « Mort aux tyrans ! », élisaient des mandataires à la majorité des suffrages et parvenaient longtemps à garder intactes leurs franchises 2. D. Diego de los Reyes Balmaseda, qui administrait le Paraguay en 1720, ayant voulu s'opposer un jour à une réunion du cabildo de L'Assomption, une émeute se produisit. Le peuple, écrasé d'impôts, parut si résolu à soutenir les revendications de son ayuntamiento que le gouverneur dut se soumettre. Les conseillers élirent aussitôt un gouverneur paraguayen, Joséf Antequera3. très populaire à L'Assomption, et sur les talents duquel ses compatriotes fondaient de grands espoirs pour l'amélioration de leur sort. Antequera n'était pas un ambitieux vulgaire. En dépit des accusations de tyrannie dont l'accablent les historiens espagnols, que leur souci d'impartialité contraint pourtant à plusieurs reprises, à se montrer moins sévères4, son désintéressement ne peut être mis en doute. Les violences qu'il exerça pour conserver le 1. Rapport du trésorier D. Hernando de Montalvo, ms. de l'Archivo de Indias à Buenos-Ayres, cité par BARTOLOME MITRE, llistoria de San Martin, t. Ier, p. 86. •2. V. MITRE, op. cil., t. IER, ch. IER. 3. V. pour l'histoire de la révolte d'Antequera et des Comuneros paraguayens, le P. CHARLEVOIX, Histoire du Paraguay, 1757, et MIGUEL LOBO, llistoria General de las antiguas colonias hispano-americanas, 6 vol. in-8°. Madrid, 1875, t. I, pp. 86 à 216. 4. « La cupidité non plus qu'aucune des passions qui peuvent porter à mépriser un homme n'étaient son t'ait ». LOBO, op. cit., p.

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