Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LOYALISME COLONIAL

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d'envoyer d'autres émissaires. Un agent du roi Joseph à Baltimore en expédia, dit-on secrètement, quelquesuns, mais ces négociateurs occasionnels renoncèrent vraisemblablement d'eux-mêmes à une mission devenue périlleuse et qu'il eût fallu soutenir, sans grand espoir de succès, par de fortes expéditions. A l'enthousiasme délirant des peuples de la Péninsule pour le souverain Bien Aimé, les habitants des Colonies répliquaient avec une égale frénésie. La Junte de Séville avait délégué des commissaires aux Amériques afin d'y annoncer la déclaration de guerre à la France, l'écrasement et le massacre des Français en Espagne 2. D. Manuel de Goyeneche 3, D. José San Llorente, désignés pour la Plata et la Nouvelle-Grenade, partirent sur les bâtiments mêmes que Napoléon avait fait armer à Cadix, au Ferrol et à Carthagène et qui devaient suivre Sassenay. Au Mexique, en NouvelleGrenade, au Pérou, à la Plata, ces commissaires furent accueillis par des transports de joie. On proclama partout Ferdinand VII. On donna des fêles, on célébra des messes. Les villes illuminèrent. Il fut de mode d'orner son chapeau de cocardes aux couleurs espagnoles ou d'un ruban cramoisi où s'étalait en lettres d'or l'inscription : Vencer o morir por mi Rey Fernando Septimo 4. Les protestations de loyalisme ne se bornèrent pas d'ailleurs à de platoniques témoignages. Les dons affluèrent. 70 millions furent adressés à Séville 5. Bien que dans la Nouvelle-Espagne on recueillit, en moins de dix jours, « 2.955.435 piastres, réparties entre 116 souscripteurs, sans qu'aucun d'entre eux figurât pour moins de 1.000 piastres; plusieurs en avaient donné 1. D'après CARLOS CALVO, Anales historicos de la Revolution de la America latina, Paris 1864, t. I, p. 47. L'un de ces envoyés aurait été pris et fusillé à La Havane (?). 2. Cf. GRANDMAISON, L'Espagne et Napoléon. Deuxième partie, ch. IV. 3. GOYENECHE (José-Manuel de), lieutenant général espagnol, né au Pérou en 1775, mort en 1846 à Madrid. Il fut capitaine général et président de l'Audience de Cûzco de 1809 à 1813, époque où il quitta définitivement l'Amérique. 4. Vida de D. Ignacio Gutierrez Vergara. Londres 1900, t. I, p. 44. 5. TORENO, Histoire du Soulèvement et de la Révolution d'Espagne, Madrid 1848, t. II, liv. VIII, p. 298. 17


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