Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LOYALISME COLONIAL

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pas désespérer de leur réussite. Mais la fermeté était naturelle à Miranda et la certitude qu'il avait de trouver ses compatriotes tout préparés à l'indépendance l'aurait au besoin réconforté. « Il pensait, écrit l'un des officiers de l'expédition, qu'il n'aurait qu'à paraître pour que dès cet instant l'Amérique méridionale cessât d'appartenir au roi d'Espagne 1. » Le Leander mit à la voile le 3 février et les désillusions de Miranda commencèrent. Dès l'arrivée à Portau-Prince, le capitaine Lewis eut une dispute avec son frère qui devait commander l' Emperor, et qui refusa de partir ainsi que tout son équipage. Miranda se procura non sans peine deux goélettes, la Bacchus et la Bee, dont il lui fallut se contenter. Discussions à bord, rencontres avec des corsaires auxquels on échappait par miracle, avec des croiseurs anglais qui ne s'opposèrent pas, heureusement, à ce que la flottille poursuivît sa route, tempêtes, maladies, tels furent les incidents de la traversée. Les vivres s'épuisèrent. Miranda dut relâcher à Jacmel, puis à l'île d'Oruba. Aucun de ces contretemps ne l'avait abattu. A force d'énergie, d'audace il parvenait à discipliner, à tenir en haleine son turbulent équipage et tout le monde était disposé à faire son devoir, lorsque, le 12 mars au matin, les vigies signalèrent enfin les côtes vénézuéliennes. On se trouvait à quelques milles à l'est de Puerto-Cabello. Miranda mit le cap sur le petit port voisin d'Ocumare afin d'y effectuer son débarquement avec plus de sécurité. Cette mesure n'était pas inutile, car le capitaine général D. Manuel de Guevara y Vasconcéllos, averti depuis un mois par le ministre d'Espagne à Washington, avait eu tout loisir de se préparer: 150 bouches à feu garnissaient les hauteurs de La Guayra, et les forts de San-Francisco et Padrastro en Guyane, de SanAntonio à Cumana, San-Felipe-el-Real à Puerto-Cabello, ceux de Zapara et San-Carlos à Maracaïbo, avaient été pourvus aussi complètement que le permettait 1. The history of D. Francisco Miranda, etc., op. cit. Lettre XXV.


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