Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LE SERMENT DU MONT SACRÉ

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tres éplorées qu'il adressait au Libertador restèrent sans réponse. « Si je me trouvais auprès de vous, lui écrivait-il, je pourrais encore retenter l'aventure... Tant que vous aurez le pouvoir, vous compterez des amis par centaines, des amis qui ne vous servent, en réalité, que pour se servir eux-mêmes, car si jamais l'infortune venait à vous atteindre, je ne vois guère qui serait votre Bertrand... S'il est encore possible que vous conserviez votre influence, je suis capable et désireux de faire de très grandes choses que personne autre que moi ne saurait accomplir pour le bien de l'Amérique. Mais si, pour son malheur, l'on vous contraignait à chercher asile dans quelque Sainte-Hélène, je vous suivrais, vous le savez, de bien grand cœur1 ». La mort de Bolivar emporta sur ces entrefaites les derniers espoirs de D. Simon qui s'en fut achever tristement ses jours â Huaymas, dans le Pérou, en 1854. C'est pourtant à la même source qu'avaient bu le maître et le disciple, à cette source troublante de JeanJacques, réconfort des âmes vigoureuses, philtre lourd de dangers pour les esprits défaillants. Bolivar n'oublia jamais qu'il en devait la révélation à Rodriguez. Écoutons de quel accent il l'accueillait à son retour en Amérique, de quel cœur il l'engageait, à demiconvaincu lui-même, à tenter dans la liberté spacieuse d'une terre nouvelle, l'expérience primitiviste : « Oh ! mon maître, oh! mon ami, oh! mon Robinson! Vous en Colombie, à Bogota, sans m'avoir rien dit, rien écrit. Vous êtes assurément l'homme le plus... singulier que je connaisse. Vous mériteriez d'autres épithètes, mais je ne vous les donnerai pas pour ne point manquer de courtoisie en saluant un hôte qui nous arrive de si loin. Vous êtes venu voir votre patrie que vous ne connaissiez plus... que vous aviez oubliée... qui vivait pourtant dans votre cœur. Personne ne sait mieux que moi combien vous chérissez notre Colombie bien-aimée. Vous souvient-il du jour où nous fûmes au Mont Sacré 1. Lettre d'Orùro, 30 septembre 1827. p. 514.

O'LEARY,

Documentos, t. IX,


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