Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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LE SERMENT DU MONT SACRÉ

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de cheval sur un vilain bourriquet comme celui-ci, bon tout au plus à charger du bois mort?1 » Simon grandissait cependant et le moment arrivait de songer à son éducation. Bien que l'enseignement supérieur dans les collèges et les universités d'Amérique fût assez avancé à cette époque et remarquable même dans certaines capitales, l'instruction primaire était en général fort négligée partout. Les jeunes créoles apprenaient à lire dans leur famille ; un religieux le plus souvent, en leur inculquant des rudiments assez ineptes d'histoire sainte, de grammaire et parfois d'arithmétique, les préparait à rentrer au collège où ils commençaient seulement à recevoir des leçons plus utiles et mieux concertées. L'université de Caracas, la seule du reste qui existât au Vénézuéla, était à cet égard moins bien partagée que celles des autres grandes villes coloniales2. Le fond de son enseignement se réduisait au latin, parce que la connaissance en était nécessaire pour l'état ecclésiastique, à la jurisprudence civile et canonique enseignée suivant des méthodes aussi creuses qu'intolérantes, à une médecine enfin, où la théorie tenait plus de place que la pratique3. Aussi les parents fortunés envoyaient-ils presque toujours leurs enfants à Mexico, à Santa-Fé et surtout en Europe. Tel avait été le projet de Don Juan Vicente pour ses fils, mais la mère et surtout le grand-père de Simon, vieil aristocrate aux idées moyenâgeuses, étaient loin de partager ce dessein. Il leur répugnait aussi de se séparer d'un enfant très aimé et dès qu'ils le virent avancer en âge, ils se préoccupèrent de lui trouver un précepteur à Caracas. Andrés Bello4, qui n'avait que peu 1. ROJAS, Leyendas historicas, II, p. 255. M. Rojas tenait cette anecdote des propres enfants de J. M. Sanz. 2. V. GARCIA DEL RIO, La Instruction en la America colonial a principios del siglo XIX. Caracas 1886. 3. V. HUMBERT, Orig. Vénéz., op. cit., p. 184. 4. BELLO (Andrés) né à Caracas le 30 novembre 1780, mort à Santiago du Chili le 15 octobre 1865, l'un des savants et des littérateurs les plus remarquables de l'Amérique espagnole. Employé à la capitainerie générale du Vénézuéla en 1808, il lit partie en 1810 de la Délégation vénézuélienne à Londres (V. infrà, liv. III, ch. III, § 5.) Il entra en 1828


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