Bolivar et l'Emancipation des Colonies Espagnoles : des origines à 1815

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ORIGINES DE LA REVOLUTION SUD-AMÉRICAINE

administra la confirmation et plusieurs années après, le Libérateur reparlait encore des innombrables cadeaux qu'il avait reçus ce jour-là1. Ces gâteries continuelles rendirent bientôt Simoncito incorrigible. Il se montrait enthousiaste, bouillant, révolté, s'emportait facilement, sans souci des remontrances. Il n'obéissait guère qu'à Don Miguel Sanz que l'Audiencia de Santo-Domingo, dans la juridiction spéciale de laquelle se trouvait la capitale vénézuélienne, avait nommé administrateur ad litem d'un majorat légué au fils cadet de Don Juan Vicente par son parent Don José Félix Aristeguieta. Sanz proposa à Da Concepcion de prendre pendant quelque temps l'enfant auprès de lui et la bonne dame, qui ne parvenait pas à gouverner le terrible Simoncito, y consentit volontiers. Il resta près de deux années dans la maison des Sanz2 ; partageant son temps entre de vagues leçons que lui donnait un capucin, le Père Andûjar3 et des promenades avec son tuteur aux environs de la ville. Le grave Don Miguel en profitait pour instruire son jeune pupille qui lui posait d'incessantes questions et retenait à merveille. Souvent ils sortaient à cheval; Sanz montait un alezan superbe que Simon, prudemment installé sur un petit âne noir, considérait avec envie. Un jour que l'enfant harcelait sa trop paisible monture, voulant à toute force dépasser celle de son compagnon : « Simon lui dit celui-ci, Simon, il ne faut pas s'agiter de la sorte. Vous ne vous tenez pas bien. Vous ne serez jamais un homme de cheval ! — Qu'estce que c'est un homme de cheval ? interroge aussitôt le gamin. — Et lorsque Don Miguel le lui eut expliqué: Comment voulez-vous, monsieur, que je sois un homme 1. Lettre à Esteban Palacio (Cuzco, 10 juillet 1825). O'LEARY, Correspondencia del Libertador, t. II, p. 90. 2. La maison de J. M. Sanz se voit encore à Caracas Calle Sud 5, n° 9. 3. Le Père Andùjar accompagna quelques années plus tard, en 1800, Humboldt et Bonpland dans l'expédition qu'ils firent de Caracas à Barinas, à la Sierra de Merida et à Angostura de Guyane après avoir descendu l'Orénoque. V. Lettres Américaines d'Alexandre de Humboldt par HAMY. Lettre au Baron de Forell, de Caracas, 3 février 1800, pl 66.


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