Œuvres. Tome deuxième

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dame Lilice, comme je l'appelais, était accouchée d'un gros garçon et que, d'un commun accord, j'étais désigné pour en être le parrain. De la marraine, il ne m'en soufflait mot. Etait-elle jeune ou âgée ? jolie ou laide ? cela, à dire vrai, me préoccupait un peu. Mais, baste 1 je savais Daph trop homme de goût pour supposer, un seul instant, qu'il ne me donnerait pas une commère qui fût à la hauteur, comme l'on disait alors. Et je me surprenais, épatant les gens du Lamentiu par mon chic, donnant le bras à la plus jolie jeune fille du lieu, entrer pompeusement à l'église et, le cœur un peu ému, voir le prêtre procéder aux cérémonies du baptême. Juge donc 1 c'était mon premier parrainnage et tu dois penser si j'en étais fier ! L'on m'aurait demandé à céder ma place, je crois que pour tout l'or du monde, j'eusse refusé / J'attendais le dimanche avec une sorte d impatience afin d'aller présenter à Mme Lilice tous mes compliments, lui faire mes félicitations et lui adresser mes remerciements de l'honneur qu'elle m'avait accordé en me choisissant pour tenir son enfant sur les fonts baptismaux. Je la trouvais toujours belle sous sa pâleur, gaie, riante et surtout très fière d'avoir donné à son cher Daph un si beau et si gros garçon. Elle m'apprit que le baptême aurait lieu après ses relevailles, c'est-à-dire dans un mois ou deux.


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