Oeuvres : Un bonheur impossible. Tome premier

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L'un est le marquis de Pierre-Lys, riche habitant; l'autre maitre Bigot, notaire impérial. — Hé ! c'est vous, monsieur Bigot, dit ie mar-j quis, savez-vous la nouvelle ? — Hélas ! oui, monsieur le marquis, répondit le ' notaire, l'Anglais est à nos portes ! — Je viens de voir l'aide-de-camp du capitaine i général' qui m'a assuré que nous serons attaqués le 25 de ce mois. j — Savez-vous d'où vient la nouvelle de cette j j prochaine attaque ? — De la Martinique directement. — C'est affreux, c'est horrible, s'écria maître j Bigot en frappant du pied la terre, guerre, toujours la guerre. Quand cela finira-t-il ? — Dieu seul le sait ! — Et que pensez-vous de l'issue de la lutte qui | se prépare ? — Mon cœur crie : vitoire ! mais ma raison répond : défaite ! fit tristement le marquis. — Oh ! ne désespérons pas, monsieur le marquis, confiance, au contraire ! N'avons-nous pas des soldats, des canons, des armes, des balles, de la mitraille, de la poudre ? Le dévouement et le patriotisme ne combattent-ils pas dans nos rangs, ne mourrons-nous pas tous plutôt que de livrer à ces chiens d'Anglais la dernière colonie qui reste à la France dans la mer des Antilles ? — A quoi serviront, monsieur Bigot, soldats, canons, armes, balles, mitraille et poudre, si l'ennemi nous est supérieur en nombre ? Voyez-vous, malgré moi je désespère malgré moi le doute envahit mon être. J'ai beau me dire : « cela n'est pas possible ! » la réalité est là, froide, palpable, évidente et, devant elle, je ne puis que me courber. i

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